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DEDC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise


NUMÉRO 009 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 7 juin 2022

[Énregistrement électronique]

  (1835)  

[Traduction]

    Bonsoir aux membres du Comité et à nos invités.
    Je déclare la séance ouverte et je souhaite la bienvenue à tous à la neuvième réunion du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, créé conformément à l'ordre de la Chambre du 2 mars 2022 et à celui du Sénat du 3 mars 2022.
    La séance d'aujourd'hui se déroulera selon une formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021.
    J'aimerais rappeler à toutes les personnes présentes qu'elles doivent suivre les recommandations des autorités sanitaires ainsi que les consignes de santé et de sécurité données par le Bureau de régie interne.
    Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en informer, car nous devrons peut-être suspendre la séance pendant quelques minutes afin de nous assurer que tous les membres sont en mesure de participer pleinement.
    J'informe les témoins qu'ils ont accès aux services d'interprétation en cliquant sur l'icône du globe au bas de leur écran et, bien sûr, en utilisant les microphones devant eux.
    Nous accueillons aujourd'hui, de 18 h 30 à 20 heures, des représentants du ministère de la Justice. Nous avons François Daigle, le sous-ministre de la Justice et sous-procureur général du Canada ainsi que Samantha Maislin Dickson, la sous-ministre adjointe du portefeuille de la Sécurité publique, de la Défense et de l'Immigration; Jenifer Aitken, la sous-ministre adjointe par intérim du Portefeuille des organismes centraux; et Heather Watts, la directrice générale adjointe et avocate générale de la Section des droits de la personne. Bienvenue.
    Vous disposerez tous de cinq minutes pour vos déclarations liminaires. Nous commencerons par...
    Allez‑y, monsieur le greffier.
    Il n'y a qu'une déclaration liminaire.
    Il n'y a qu'une déclaration liminaire. Je suis sûr que vous avez tous joué à roche-papier-ciseaux pour déterminer qui s'en chargera.
    Nous allons vous donner la parole pour commencer, monsieur Daigle. Je vous remercie.
    La parole est à vous pour cinq minutes.

[Français]

    Bonjour à tous.

[Traduction]

    Mesdames et messieurs les coprésidents et membres du Comité mixte, merci de l'invitation à prendre la parole.
    Je tiens à aborder trois points dans ma déclaration liminaire. Le premier est le critère pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Comme deuxième point, je veux parler des mesures temporaires et comme troisième, de la conformité à la Charte.

[Français]

    Pour ce qui est du premier élément, qui porte sur le test, je vous invite à consulter les articles 3, 16 et 17 de la Loi sur les mesures d'urgence. À l'article 3, on mentionne qu'une crise nationale est un concours de circonstances critiques à caractère d'urgence et de nature temporaire qui met gravement en danger la santé et la sécurité des Canadiens, et auquel il n'est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada.

[Traduction]

    J'aimerais faire deux remarques à ce sujet.
    Premièrement, le 14 février, la gouverneure en conseil a décidé que notre pays se trouvait effectivement dans une telle situation de crise. Les raisons de la déclaration de situation de crise liée à l'ordre public ont été exposées de façon très détaillée dans le document public prescrit par l'article 58 de la Loi. C'est ce document qui résume les faits sur lesquels la gouverneure en conseil s'est appuyée à l'époque pour conclure qu'il y avait des motifs raisonnables d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Je crois que ce document a été soumis au Comité.
Deuxièmement, la gouverneure en conseil a déterminé que la situation dépassait la capacité et le pouvoir des provinces et des territoires de réagir « adéquatement », ou « effectively » comme il est écrit dans la version anglaise.
    Le critère n'est pas de savoir si d'autres lois existaient, comme d'autres codes de la route provinciaux. Il s'agit de savoir si elles permettaient de faire face adéquatement à la situation de crise. Le critère n'est pas non plus de savoir si elles auraient pu être adéquates. Le critère est de savoir si elles étaient adéquates. Le gouvernement a déterminé qu'elles ne l'étaient pas et a pris des mesures d'une durée limitée que les forces de l'ordre et les fournisseurs de service financier pouvaient utiliser, à leur discrétion, pour faire face à la situation de crise.

[Français]

     Le Règlement sur les mesures d'urgence qui a été décrété interdisait certains comportements ciblés et conférait aux agents de la paix le pouvoir de préserver et de maintenir la paix publique.
    Chacune des interdictions énumérées aux articles 2 à 5 du Règlement visait des comportements observés lors des blocages illégaux et de l'occupation des rues d'Ottawa. L'interdiction clé est celle qui est prévue au paragraphe 2(1), qui vient compléter les pouvoirs dont dispose la police, en common law, pour maintenir la paix par l'interdiction de certaines assemblées publiques. Elle ne vise pas toutes les assemblées publiques, mais seulement un type très précis et ciblé. Il s'agit d'une assemblée publique dont il est raisonnable de penser qu'elle pourrait avoir comme effet de troubler la paix par trois moyens: en entravant gravement le commerce ou la circulation des personnes et des biens; en entravant le fonctionnement d'infrastructures essentielles; ou en favorisant l'usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens.
    Les mesures interdisaient également aux personnes d'emmener des enfants à ces assemblées illégales — c'est un comportement que nous avons tous pu observer à Ottawa et à Windsor. Les mesures interdisaient également à un étranger d'entrer au Canada avec l'intention de participer à une telle assemblée. Elles interdisaient la fourniture de biens ou de fonds destinés à appuyer les assemblées illégales.
    Le Décret sur les mesures économiques d'urgence connexe, qui a permis le gel de certains comptes de banque, était lui aussi très ciblé et limité. Les obligations auxquelles étaient soumises les institutions financières ne s'appliquaient plus, c'est-à-dire qu'elles cessaient de s'appliquer, si « la personne désignée », terme défini dans le Décret, cessait de participer aux activités illégales. Il était donc facile pour une personne de se soustraire à ce gel tout simplement en quittant les assemblées illégales.

[Traduction]

    Les objectifs des mesures étaient clairs: décourager les gens de participer à des rassemblements illégaux, mettre fin aux blocages illégaux et faire partir les gens et empêcher la formation de nouveaux blocages et mouvements de manifestations illégaux.

  (1840)  

     Enfin, en ce qui concerne la Charte, comme le ministre de la Justice l'a dit lors de sa comparution le 26 avril, les mesures étaient conformes à la Charte et la déclaration n'a pas suspendu la Charte. Cela ressort clairement de la Loi. La Charte a continué de protéger les droits et libertés alors que le gouvernement prenait les mesures nécessaires, légales et proportionnelles pour mettre fin aux blocages.
    Je veux expliquer ce que nous faisons au ministère de la Justice lorsque nous examinons de nouvelles lois, comme ces mesures temporaires, pour vérifier leur conformité à la Charte. Nous ne sommes pas la police qui décide de la pertinence ou du moment d'exercer les pouvoirs existants ou nouveaux, ni des procureurs qui décident d'engager des poursuites. Nous examinons les projets de loi tels qu'ils sont présentés, dans ce cas‑ci les décrets temporaires, pour saisir leurs objectifs et déterminer si les mesures sont incompatibles avec la Charte.
    L'examen peut comporter la question de savoir si toute atteinte à un droit garanti par la Charte est justifiée dans une société libre et démocratique comme le permet l'article 1 de la Charte. Nous examinons leur portée et leur relation avec les objectifs des mesures. Nous nous appuyons sur des décisions judiciaires, notamment celles de la Cour suprême du Canada.
    Bien que nous ne puissions pas communiquer les avis juridiques que nous avons pu préparer pour le pouvoir exécutif, nous pouvons expliquer la position du gouvernement. Le ministre a déjà expliqué que sa position était que les mesures étaient ciblées, proportionnelles, de durée limitée et conformes à la Charte.
    Le ministre a déposé aujourd'hui un document d'information sur la Charte qui expose les considérations relatives à la Charte touchant les alinéas 2b) et c) et les articles 6, 7 et 8. J'espère qu'il facilitera votre compréhension et vos délibérations.

[Français]

    En conclusion, nous avons constaté que, dans l'ensemble, le Règlement et le Décret ont prévenu l'organisation de manifestations illégales et ont permis à la police de maîtriser la situation. Les occupants sont partis afin d'éviter que leurs comptes ne soient gelés. Les gens ont arrêté d'emmener leurs enfants aux manifestations illégales, ce qui a permis à la police d'appliquer la loi à Ottawa. Les mesures ont également dissuadé d'autres personnes de se joindre aux blocages. En effet, tels étaient les objectifs des nouvelles mesures adoptées en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Cela conclut mon introduction. Nous avons bien hâte de répondre à vos questions.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Je ferai remarquer que nous avons un peu dépassé les cinq minutes prévues, mais il est important que cette déclaration liminaire soit entendue. Dans votre déclaration, vous avez dit qu'un document avait été préparé. A‑t‑il été soumis pour distribution à ce comité?
    Une voix: Il a été distribué plus tôt aujourd'hui.
    Le coprésident (M. Matthew Green): Excellent. Je vous remercie beaucoup.
    Avant de passer aux séries de questions, j'aimerais que vous sachiez qu'au cours de notre séance, nous allons probablement adopter un rythme assez rapide, compte tenu de nos contraintes de temps. Le député qui a la parole contrôle son temps. Si vous entendez des députés dire « Merci » ou s'ils vous interrompent gentiment pour passer à la question suivante, sachez que ce n'est pas personnel. C'est qu'ils souhaitent passer à la question suivante pour protéger leur temps. Je demande aux députés de faire preuve de tact et de permettre la discussion de suivre son cours.
    Si un tour touche à sa fin, mais que des renseignements sont en train d'être présentés, je vous le ferai savoir et vous pourrez conclure votre réflexion. Nous ne voulons certainement pas couper la parole à qui que ce soit au milieu d'une phrase.
    Nous allons commencer la première série de questions avec M. Motz, qui disposera de cinq minutes.
    Monsieur Motz, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Avant que vous ne lanciez le chrono, j'aimerais simplement vous remercier publiquement d'être ici en personne en tant que représentants du ministère. C'est l'une des premières fois que cela se produit, exception faite de la présence des ministres, et cela en dit long sur votre volonté d'être entendus et d'être ouverts à ce que nous faisons. Je vous en remercie beaucoup.
    Monsieur le sous-ministre Daigle, je tiens simplement à faire un commentaire sur votre déclaration liminaire. Vous avez dit que l'invocation était nécessaire parce que les lois en vigueur étaient fondamentalement inadéquates. Ce n'est pas une question, mais un commentaire. Je dirais plutôt que les lois en vigueur ont été appliquées de manière inadéquate plus qu'autre chose.
    Permettez-moi de passer aux questions. Comme vous l'avez dit, monsieur, la Loi sur les mesures d'urgence dit clairement qu'une crise nationale est « un concours de circonstances critiques à caractère d'urgence et de nature temporaire, auquel il n'est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada ». Étant donné le nombre de lois que nous avons dans ce pays qui auraient pu être invoquées pour faire face à ces manifestations, le gouvernement a dû atteindre un seuil très élevé avant d'invoquer les pouvoirs d'urgence.
    Pouvez-vous affirmer catégoriquement, oui ou non, que le gouvernement a exercé toutes les options prévues par la loi avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Je ne peux pas répondre par oui ou par non à votre question, car le critère n'est pas de savoir si nous avons exercé les pouvoirs prévus dans toutes les lois du pays. Il s'agit de savoir si ces lois ont été utilisées adéquatement pour faire face à la crise, et nous pensons qu'elles ne l'ont pas été.
    S'agit‑il d'une question de droit, ou d'une question d'« application de la loi »?
    C'est une question d'« application de la loi ». Les lois étaient appliquées...
    C'est différent.
    ... à différents endroits, mais elles ne permettaient pas de faire face adéquatement à la crise.
    Je n'ai pas eu l'occasion d'étudier en détail le document que vous avez fourni. Est‑ce qu'on vous a demandé, à vous ou à votre ministère, de produire, évidemment, un examen constitutionnel de la légalité de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence?

  (1845)  

    Nous fournissons des avis juridiques à l'organe exécutif du gouvernement sur toutes les questions et on peut supposer que nous l'avons fait dans ce cas. Après la comparution du ministre le 26 avril, j'ai demandé à Mme Watts et à son bureau de préparer ce document, car j'ai pensé qu'il pourrait vous être utile.
    Le ministre est‑il déjà allé à l'encontre des avis qu'il a reçus de son ministère?
    Je ne vais pas vous dire ce que le gouvernement fait des avis qu'il reçoit du ministère de la Justice. Je pense qu'ils sont toujours heureux de recevoir nos avis, mais au bout du compte, ils prennent leurs décisions en tenant compte de ces avis.
    Pouvez-vous mettre l'examen que vous avez effectué à la disposition du Comité?
    Nous avons mis le document d'information sur la Charte à la disposition du Comité et nous serons heureux de parler de ce document si vous avez des questions à son sujet.
    Compte tenu de votre déclaration liminaire, votre ministère a‑t‑il recommandé au ministre, depuis l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, de nouvelles lois qui seraient mieux adaptées à des situations semblables et qui permettraient de mieux les régler à l'avenir?
    Je pense que je n'ai pas le loisir de dire si nous avons donné des avis juridiques au gouvernement.
    Dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que les lois en vigueur n'étaient pas adéquates. Ma question est la suivante: avez-vous suggéré au ministre qu'il serait pertinent que nous promulguions de nouvelles lois?
    Je n'ai pas dit que les lois n'étaient pas adéquates. J'ai dit que les lois n'avaient pas été adéquatement appliquées pour faire face à la crise.
    J'en déduis de votre sorte de non-réponse que vous n'avez pas vraiment parlé au ministre de nouvelles lois qui pourraient être mises en oeuvre dans ce pays. Puis‑je en déduire que vous pensez peut-être que les lois en vigueur sont adéquates, mais qu'elles n'ont simplement pas été adéquatement appliquées? Serait‑ce juste de le dire?
    Notre point de vue est que les lois en vigueur n'étaient pas adéquates pour faire face à la situation de crise et que nous avions besoin de nouvelles lois, c'est-à-dire ces mesures que nous avons mises en oeuvre, que nous avons promulguées, afin d'aider la police et les fournisseurs de services financiers à faire face à la situation de crise.
    Le gouvernement envisage évidemment de se livrer à un exercice pour en tirer des leçons. Une enquête est en cours et je suis sûr que le gouvernement prendra connaissance des avis issus de cette enquête et déterminera s'il souhaite modifier la Loi sur les mesures d'urgence ou s'il pense que d'autres lois devraient être examinées pour faire face à d'éventuelles situations de crise.
    Sauf votre respect, monsieur Daigle, je dirais que ce comité a aussi une responsabilité et que le gouvernement doit prendre au sérieux les recommandations qui en émaneront et pas seulement celles de l'enquête publique.
    J'en conviens, oui.
    Des médias ont rapporté au début du mois de juin que deux décrets secrets ou non publiés avaient été adoptés pendant la période des manifestations, de janvier à février. Le Bureau du Conseil privé a refusé de publier ces décrets ou de les rendre publics, citant un article de la Loi sur l'accès à l'information fédérale qui permet au gouvernement de garder des documents secrets s'il le juge nécessaire.
    Pouvez-vous nous parler de ces décrets?
    Je peux vous dire que mon ministère a rédigé tous les décrets liés à la situation de crise. Il y a eu une proclamation, une déclaration, un décret et un règlement, et les quatre ont été rendus publics. Aucun décret secret lié à la situation de crise n'a été pris.
    Pas de la part de votre ministère…?
    Du gouvernement.
    De l'ensemble du gouvernement…?
    De l'ensemble du gouvernement.
    D'accord.
    Je vous remercie.
    Nous allons passer à M. Virani pour cinq minutes.
    Monsieur Virani, à vous la parole.
    Merci aux témoins.
    Je vais adresser mes questions au sous-ministre Daigle, et elles seront probablement un peu percutantes, alors des réponses brèves seraient les bienvenues.

[Français]

     Je vous en remercie à l'avance.

[Traduction]

    Vous avez parlé de la Loi sur les mesures d'urgence et, en fait, dans son préambule elle renvoie à la nécessité d'être conforme à la Charte ou d'être « assujettie à » la Charte. Est‑ce exact?
    C'est exact, oui.
    Lorsque la Loi sur les mesures d'urgence est promulguée, elle n'a pas pour effet de suspendre temporairement les droits garantis par la Charte, n'est‑ce pas?
    Elle n'a pas cet effet.
    Je veux me pencher sur la Charte.
    En ce qui concerne la Charte elle-même, l'alinéa 2b) protège la liberté d'expression, mais la jurisprudence n'étend pas cette protection à autre chose qu'à l'expression pacifique et non violente.
    Est‑ce exact?
    La liberté d'expression est une liberté garantie par notre Charte des droits et libertés, mais des limites nécessaires y sont assorties, de sorte que le discours haineux n'est pas protégé et la violence n'est pas protégée. Mme Watts se fera un plaisir de vous donner plus de détails sur le contexte de la Charte, si cela vous intéresse.

  (1850)  

    Passons à l'alinéa 2c) de la Charte. Il protège la liberté de réunion, mais il consacre explicitement la liberté de réunion pacifique. C'est ce qu'on trouve dans la Charte elle-même.
    Exactement, et c'est pourquoi nos décrets sont rédigés et j'ai passé en revue l'alinéa 2a) du décret pour expliquer que ce n'était pas toute assemblée publique qui était interdite. Ce n'était que certains types précis d'assemblée qui créent trois préjudices précis.
    Exactement, dans la partie que votre ministère a aidé à rédiger, il est question, au sous-alinéa c(i) de la déclaration originale, de la restriction visant les assemblées publiques « autres que les activités licites de défense d'une cause, de protestation ou de manifestation d'un désaccord », et c'était délibéré.
    Oui, c'était délibéré.
    Néanmoins, nous savons que les règlements qui ont été adoptés peuvent avoir une certaine incidence sur ce qui est même interprété comme une expression non violente ou pacifique, mais à votre avis, comme vous l'avez expliqué dans votre déclaration liminaire, cette incidence était justifiée en vertu de ce qu'on appelle la clause de « sauvegarde » de l'article 1 de la Charte.
    C'est le cas, et je pense qu'il faut faire une distinction entre savoir si une loi est conforme à la Charte de prime abord et si, en l'appliquant, les policiers ou d'autres l'ont fait en conformité avec la Charte.
    Au ministère de la Justice, nous examinons la loi pour voir si elle est conforme à la Charte, en prenant en compte la façon dont elle pourrait être appliquée, mais nous ne l'appliquons pas. D'autres appliquent les nouvelles mesures.
    Je comprends, mais certains des éléments qui auraient pu entrer dans votre analyse et votre évaluation sont le fait que, compte tenu de la Charte des droits et libertés, la durée et la portée de l'application de ces mesures étaient limitées.
    Est‑ce…
    Exactement. Elles étaient proportionnelles et très liées aux objectifs, qui étaient de mettre fin à ces assemblées illégales, aux blocages et à l'occupation d'Ottawa. Elles étaient proportionnelles aux objectifs. Leur durée était limitée et elles étaient très ciblées.
    L'invocation de la déclaration elle-même a eu lieu quelques jours, voire plusieurs jours après le début de la manifestation et elle a été révoquée après environ neuf jours en tout, entre le 14 et 23, si je me souviens bien.
    C'est exact. La déclaration a été émise le 14 février. Nous avons pris les décrets le 15 février et ils ont été révoqués le 23 février.
    Si vous le permettez, j'aimerais maintenant aborder la constitutionnalité du décret sur les mesures économiques.
    De façon générale, les tribunaux n'ont pas interprété les articles 7 et 8 de la Charte comme protégeant de façon générale les droits économiques ou de propriété dans ce pays. Est‑ce exact?
    C'est ce que nous comprenons et c'est, je crois ce qui est énoncé dans notre document d'information sur la Charte.
    Lorsqu'une mesure prévoit un emprisonnement potentiel, nous savons que les garanties liées à la vie, à la liberté et à la sécurité sont déclenchées et que nous devons entreprendre une analyse en vertu de l'article 7.
    Cependant, l'article 7 parle aussi des principes de justice fondamentale et certains de ces principes visent des choses comme les décisions arbitraires ou la portée excessive. Est‑ce exact?
    C'est exact, oui.
    Selon vous, les pouvoirs conférés en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence et le règlement qui en découle n'étaient pas arbitrairement trop larges parce qu'ils étaient adaptés à un objectif précis que vous avez annoncé au départ, soit mettre fin aux blocages et empêcher la formation de nouveaux blocages illégaux.
    C'est exact?
    C'est exact. C'est ce que j'ai dit plus tôt, oui.
    Pour ce qui est de l'objectif, en fait, il y avait un objectif très précis au sujet de ces blocages qui se rapportait au décret sur les mesures économiques, c'est‑à‑dire des choses comme la fourniture ou la mise à disposition de biens qui aideraient à maintenir les blocages, à les faire durer, et c'est pourquoi il en était question à l'article 5 de l'un des décrets.
    Oui, et l'objectif était vraiment d'y mettre fin, de sorte que dans la mesure où des gens finançaient les blocages illégaux, nous voulions trouver un moyen d'empêcher les gens de venir et de…
    Il vous reste 30 secondes.
    … mettre fin au financement de ces blocages.
    [Inaudible] ce financement, nous avons beaucoup entendu parler du gel de comptes.
    Nous savons qu'environ 200 comptes ont été gelés. Le gel cesse en vertu de la loi que vous avez rédigée dans votre ministère dès que la participation d'une personne au blocage illégal prend fin.
    Est‑ce exact?
    C'est exact.
    L'obligation est faite à l'institution financière de cesser les transactions avec les personnes désignées. Une personne désignée est toute personne qui participe à l'une de ces assemblées illégales. Une fois qu'elles n'y participent plus, il n'y a plus d'obligation de cesser les transactions.
    Je vous remercie.

[Français]

     Monsieur Fortin, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie, monsieur et mesdames, d'être ici avec nous aujourd'hui.
    Je vais adresser mes questions à M. Daigle.
    Monsieur Daigle, j'ai écouté votre témoignage et je veux être certain de l'avoir bien compris.
    Avez-vous été consulté, vous, personnellement, avant la proclamation de la Loi sur les mesures d'urgence?
    Le ministère de la Justice, et moi, en particulier, avons participé aux discussions qui ont mené à l'invocation de la Loi.
    Qui participait à ces discussions, à part vous et le ministre de la Justice?
    Je pense que certains témoignages ont déjà expliqué qu'il y avait nécessairement eu des discussions au sein du Cabinet. Il y a eu des discussions entre sous-ministres et avec la GRC. J'ai participé à certaines de celles-là. De façon générale, c'est ainsi que cela s'est passé. Mes collègues ont aussi participé à plusieurs discussions avec leurs clients, que ce soit la GRC, Sécurité publique Canada ou d'autres.

  (1855)  

    Avez-vous une idée du nombre de discussions auxquelles vous avez personnellement participé?
    Personnellement, j'ai commencé à y travailler de façon très intensive à la mi-février, soit aux alentours du 6 ou du 7 février, et jusqu'au 23 février.
    Avez-vous rédigé des avis juridiques en rapport avec la proclamation?
    Comme je l'ai expliqué, le ministère de la Justice a le rôle de donner des avis juridiques au gouvernement.
    L'avez-vous fait?
    Vous pouvez tenir pour acquis que plusieurs avis juridiques ont été préparés…
    Je m'excuse de vous interrompre. Je ne veux pas être impoli, mais nous n'avons pas beaucoup de temps et j'ai besoin d'une réponse claire.
    Est-ce que vous avez signé un avis juridique ou quelques avis juridiques relativement à la proclamation des mesures d'urgence?
    Vous pouvez tenir pour acquis que plusieurs avis juridiques ont été préparés…
    Je ne veux rien tenir pour acquis, monsieur Daigle.
    Mon ministre vous a déjà expliqué qu'il ne vous fournirait pas les avis juridiques que nous avons préparés.
    Nous verrons cela en temps et lieu avec M. Lametti, mais je vous pose une question, et si vous ne voulez pas y répondre, dites-le-moi et ce sera réglé.
    Avez-vous signé, oui ou non, des avis juridiques en ce qui concerne la proclamation des mesures d'urgence?
    Je refuse de répondre à votre question directement.
    Vous avez dit tantôt qu'à votre connaissance, aucun décret secret n'émanait du gouvernement. Est-ce bien cela?
    Il n'y en a eu aucun en relation avec le décret en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence.
    On a vu dans les médias qu'un certain nombre de décrets secrets avaient été adoptés, dont deux au cours du mois de février.
    Êtes-vous au courant de l'existence de ces deux décrets secrets?
    Comme vous, j'ai lu ce qui était dans les journaux, mais je n'ai pas vu ces décrets. Cependant, je peux vous dire que les décrets liés à la Loi sur les mesures d'urgence sont tous publics.
    Savez-vous de quoi traitaient ces deux décrets en question?
    Non.
    Avez-vous participé à l'élaboration de la stratégie visant le démantèlement des barrages et ainsi de suite?
    Non, c'était le travail des policiers, et le ministère de la Jutice ne donne pas de directives aux policiers qui s'occupent de ces questions.
    En résumé, votre intervention en ce qui concerne les mesures d'urgence s'est faite en amont. Avant la proclamation, vous avez eu des discussions relativement à cela, mais, une fois la proclamation faite, vous n'êtes plus intervenu en ce qui concerne la situation. Est-ce bien cela?
    Non, nous avons continué de participer à plusieurs réunions pour savoir comment les décrets étaient appliqués et ce qui se passait sur le terrain, et si les mesures étaient efficaces. Nous avons continué à tenir des discussions jusqu'à ce que le gouvernement décide de révoquer la Loi une fois qu'il a été convaincu que les choses étaient maîtrisées.
    Pourquoi aviez-vous des discussions?
    Était-il question de modifier la proclamation, d'ajouter des décrets ou des règlements?
    Quel était votre travail au ministère de la Justice à ce moment-là?
     Nous devions continuer à donner des avis juridiques au gouvernement en fonction de la situation et des questions qui pouvaient survenir.
    Si vous me dites que vous deviez continuer à donner des avis juridiques, j'en comprends que vous en aviez donné.
    Le ministère de la Justice donne, tous les jours, plusieurs avis juridiques au gouvernement.
    Cela, c'est en général. En ce qui concerne précisément la situation d'urgence, vous avez donné des avis juridiques avant et après la proclamation, si je comprends bien.
    Est-ce que je me trompe?
    Oui.
    Ce que je vous ai dit, c'est que vous pouvez tenir pour acquis que nous avons donné plusieurs avis juridiques.
    Je ne veux rien tenir pour acquis, monsieur Daigle. Le cas échéant, je vais lire la Loi et les règlements.
    Vous êtes ici comme témoin. Vous devez témoigner sur des faits.
    Est-ce que, oui ou non, vous avez donné des avis juridiques?
    Vous pouvez me dire que vous ne répondez pas à cette question, mais ne me dites pas que la règle générale est comme ceci ou comme cela. Je ne veux pas une opinion d'expert. Je veux l'opinion d'un témoin de faits.
    Avez-vous donné des avis ou non?
    Les réponses aux questions sur le fait que nous avons donné un avis, deux avis ou aucun et à quel moment sont assujetties au secret professionnel. Ce ne sont pas des questions auxquelles je peux répondre.
    Vous venez de me dire que vous avez participé à des discussions pour donner des avis juridiques après la proclamation, donc, vous en avez donné.
    Ce que je vous dis, c'est que vous pouvez tenir pour acquis que j'ai fait mon travail. Cela fait partie de mon travail.
    Je ne suis pas ici pour vous évaluer, monsieur Daigle, sauf votre respect.
    Je comprends le malaise que vous ressentez, mais comprenez bien que, moi, je suis ici pour enquêter sur cette situation.

[Traduction]

    Monsieur Fortin, j'aimerais vous céder la parole pour avoir mon tour.

  (1900)  

    Avant de le faire, monsieur le président, puis‑je invoquer le Règlement?
    Vous pouvez le faire.
    Il est très inhabituel qu'un témoin dise, et sauf votre respect, monsieur, qu'il ne répondra pas à une question devant un comité parlementaire, qu'il refuse de répondre à une question. Je pense qu'il incombe aux témoins de comprendre le pouvoir des comités et leur obligation de répondre aux questions. Ils peuvent y répondre d'une manière différente, mais refuser de répondre à une question n'est pas une option. Je demande que le Comité oblige le témoin à répondre à la question que M. Fortin lui a posée.
    Sur le même rappel au Règlement, monsieur le président, je pense que le sous-ministre a précisé où il peut… Il a été très franc, et il a précisé lorsqu'il ne pouvait pas l'être. Pour l'édification de tous, lorsque nous parlons du secret professionnel de l'avocat et de ce qu'il couvre, il peut couvrir le fait même qu'une opinion existe ou qu'un certain nombre d'opinions existent. C'est ce que M. Daigle a expliqué à la toute fin de sa réponse, de sorte qu'il y a un fondement justifiant l'impossibilité de répondre à certaines questions.
    Je fais ce travail depuis sept ans et j'ai entendu de nombreux témoins ne pas répondre à certaines questions. Parfois, c'est parce que cela dépasse leur compréhension ou le champ de leurs compétences, etc., donc je suis respectueusement en désaccord avec M. Motz.
    Monsieur Brock.
    Avec tout le respect que je dois à mon collègue, M. Virani, ce n'est pas une interprétation juridique de ce qui vient de se passer. Nous avons eu un haut fonctionnaire du gouvernement — en fait, exception faite du ministre de la Justice et procureur général, le plus haut fonctionnaire du ministère de la Justice — qui a refusé de répondre à une question posée par un membre du Comité, sans invoquer la confidentialité du Cabinet ni le secret professionnel de l'avocat.
    Je suis tout à fait en désaccord avec l'interprétation de M. Virani selon laquelle le simple fait qu'un avis juridique a été préparé et remis au gouvernement déclenche le secret professionnel de l'avocat. C'est absurde. Nous ne demandons pas à ce stade le contenu ou le thème. Nous ne demandons pas s'il a été donné en personne ou par courriel. Nous ne demandons pas la date.
    La question de M. Fortin était très générale: avez-vous signé une opinion juridique avant que la Loi sur les mesures d'urgence ne soit invoquée, ce à quoi le témoin a répondu de façon très catégorique qu'il refusait de répondre à la question. Monsieur le président, je vous demande d'ordonner au témoin de répondre de façon appropriée, au lieu d'opposer un simple refus.
    Monsieur le président, si vous me permettez d'ajouter deux points très brefs…?
    Très brièvement, s'il vous plaît.
    Je dirais d'abord respectueusement que le fait qu'un membre d'un comité n'apprécie pas ou n'aime pas une réponse ne signifie pas que la question n'a pas reçu de réponse. C'est mon premier point.
    Le deuxième point est que ce comité n'a pas le pouvoir d'obliger un témoin à répondre à une question. Seul le Parlement le peut. Seule la Chambre des communes le peut.
    Le troisième point est que je trouve cela un peu curieux dans la mesure où, la semaine dernière, nous avons adopté une motion à propos de la production de documents, y compris des avis juridiques qui auraient été donnés. Cette réponse est imminente. Je pense que cette motion de production était assortie d'un délai, alors peut-être que certaines réponses que mes amis cherchent à obtenir seront fournies lorsque ces documents seront produits.
    Allez‑y, monsieur le sénateur Harder.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais simplement intervenir brièvement. Ayant moi-même été témoin en tant que sous-ministre pendant 16 ans devant des comités du Sénat et de la Chambre des communes, je comprends que l'on pose parfois à un sous-ministre des questions auxquelles il n'est pas en mesure de répondre en toute connaissance de cause, comme le souhaiterait l'auteur de la question. Cependant, je crois que le témoin a répondu à la question et c'est après tout pour cela que nous sommes ici.
    Par conséquent, je ne vois pas cela comme une question de privilège, mais comme une distraction de notre étude.
    Y a‑t‑il d'autres interventions?
    Monsieur Daigle, si nous passions à huis clos, seriez-vous disposé à répondre plus franchement à ces questions?
    J'ai effectivement invoqué le secret professionnel lorsque M. Fortin m'a invité à refuser de répondre à sa question. C'est la raison pour laquelle je ne répondrai pas à sa question. Que nous soyons à huis clos ou non, je ne pense pas que cela changera quoi que ce soit, mais je prends note de la motion qui a été adoptée il y a quelques jours. Le gouvernement examinera comment nous pouvons répondre d'ici la fin du mois, ce qui est le délai prévu pour la réponse, je crois.
    Connaissez-vous l'article 108 du Règlement, qui parle de la formation des comités et qui stipule qu'il n'y a aucune limite à notre capacité, en tant que comité dûment constitué par la Chambre, de convoquer des personnes et de demander la production de documents et de preuves?

  (1905)  

    Oui, je le connais.
    Savez-vous aussi — et vous savez peut-être ou peut-être pas, mais je vais le préciser pour la gouverne du Comité — qu'en 1891, un témoin devant un comité du Sénat du Canada a refusé de répondre à des questions? Il a expliqué qu'il n'était aucunement obligé de donner au comité des renseignements sur ces affaires.
    Le comité a ordonné au témoin de répondre, mais il a refusé. Le comité a fait part au Sénat de son refus et lui a demandé de prendre les mesures à cet égard. Le Sénat a adopté le rapport du comité et le témoin a reçu l'ordre de se présenter à la barre du Sénat. Le Sénat a ordonné au témoin de répondre aux questions du comité. Après avoir accepté de le faire, il a pu quitter la barre.
    Il existe une jurisprudence dans notre système selon laquelle ces comités sont suprêmes dans leur capacité à enquêter sur ces questions. Je suppose que j'aimerais...
    Monsieur le président, puis‑je...
    J'ai la parole. J'aimerais vous soumettre que notre comité a été dûment constitué en vertu de ces dispositions. La convention relative aux documents confidentiels du Cabinet n'est qu'une convention. La Chambre des communes ne l'a jamais reconnue dans une quelconque jurisprudence. Ce n'est qu'une convention.
    Monsieur Naqvi.
    J'essayais de savoir si vous posiez ces questions en tant que membre du Comité ou que président.
    C'est en tant que président qui se penche sur la décision dont nous sommes saisis.
    Je vous remercie.
    À ce sujet, monsieur le président, c'est exactement ce que j'ai dit. La jurisprudence que vous avez citée montre que l'affaire est passée d'un comité au Sénat qui a ensuite contraint le témoin. C'est exactement le processus qui devrait être suivi ici, si le Comité souhaite aller plus loin. L'affaire doit passer du Comité à la Chambre des communes, qui pourra ensuite contraindre le témoin. Cette jurisprudence est établie.
    Le deuxième point est que M. Daigle n'a pas évoqué la confidentialité des documents du Cabinet. C'est le secret professionnel de l'avocat qui a été invoqué, alors s'il vous plaît, ne confondons pas les deux idées.
    Le privilège de la Couronne, c'est ce que vous...
    Le secret professionnel de l'avocat, qui couvre non seulement l'avis, mais le simple fait que l'avis existe, ou le nombre de fois que l'avis a été donné...
    Cela correspond au privilège de la Couronne. Est‑ce exact?
    Il s'agit du secret professionnel de l'avocat.
    Qui est la même chose que le privilège de la Couronne.
    Non, ce n'est pas la même chose.
    Je vais prendre un moment et faire une pause. Je vais revenir sur ce point.
    Monsieur le président, avant de le faire, puis‑je suggérer que nous mettions cette question en suspens pour le moment et que nous l'examinions ultérieurement. Nous avons des questions à poser et le temps nous est compté, et je veux demander simplement que nous...
    Je vais céder la présidence et je vais...

[Français]

     Monsieur le président, M. Virani nous dit que le témoin invoque le secret professionnel client-avocat. Je comprends bien cela, cependant, cela ne s'applique pas dans le cas qui nous occupe.
    M. Daigle n'est pas ici en tant qu'avocat du ministre de la Justice. Il est ici pour représenter le ministère de la Justice dans ses fonctions de sous-ministre. Or, dans ses fonctions de sous-ministre, il ne bénéficie pas du privilège client-avocat lorsqu'il discute avec son patron.
    Je ne m'attarderai pas à argumenter davantage ici, mais nous continuerons ce débat devant la Chambre des communes ou devant le Sénat, en temps opportun. Je dis seulement que le secret professionnel client-avocat, dans le cas de M. Daigle, malgré tout le respect que j'ai pour lui, ne s'applique pas. Il n'est pas l'avocat de M. Lametti, il est un fonctionnaire du ministère de la Justice.

[Traduction]

    C'est dûment noté.
    Je vais maintenant vous céder la présidence, monsieur Fortin, pour que je puisse utiliser mes cinq minutes pour poser des questions.

[Français]

     Vous avez la parole, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Daigle, connaissez-vous l'obligation de franchise telle qu'elle s'applique dans la Loi sur le SCRS?
    Je connais très bien l'obligation de franchise, oui, et je vous promets d'être aussi franc que possible.
    En refusant de répondre à des questions qui vous sont posées, considérez-vous que vous vous conformez à l'obligation de franchise, telle qu'elle est définie?
    Même la Cour fédérale et la Cour suprême du Canada reconnaîtraient que les renseignements liés au secret professionnel de l'avocat sont confidentiels et privilégiés. En invoquant le secret professionnel, je ne refusais pas de répondre. J'expliquais qu'il y a des limites à l'information que je peux divulguer.
    Avant la déclaration de la situation de crise, comment votre ministère a‑t‑il évalué la menace à la sécurité publique que représentaient les blocages et le convoi?
    Comme je l'ai expliqué dans ma déclaration liminaire, le gouvernement a examiné les définitions des articles 3, 16 et 17 de la Loi sur les mesures d'urgence. Dans le rapport prescrit à l'article 58 qu'il a déposé au Parlement, il a résumé les raisons et les faits qui l'a amené à conclure à la présence de motifs raisonnables de croire que le seuil avait été atteint.

  (1910)  

    Vous faites référence au gouvernement, mais lorsque vous avez participé à ces discussions, vous étiez alors au courant de la nature de ces menaces qui dépassaient vraisemblablement la portée de ce qui a été relaté dans le résumé. Est‑ce exact?
    Le gouvernement a résumé cette information dans le document, alors je vous renvoie à ce...
    Ma question à M. Daigle, par votre entremise, monsieur le président, est la suivante: auriez-vous été le destinataire d'un ensemble de preuves en fonction desquelles vous auriez évalué ces risques pour vérifier la proportionnalité?
    Comme je l'ai dit, j'ai participé à des discussions auxquelles ont participé la commissaire Lucki et d'autres personnes. J'ai reçu des séances d'information verbales à propos de la situation sur le terrain.
    Est‑ce que des notes ont été prises lors de ces séances d'information?
    Des notes ont sans doute été prises. Des notes ont été prises. J'ai pris mes propres notes de...
    Seriez-vous disposé à nous les communiquer?
    Nous avons pris note de la demande de documents du Comité. Nous sommes en train de préparer certains documents pour les communiquer au Comité en réponse à la motion, et...
    Certains ou tous, monsieur?
    Je pense que nous devons les réunir et les parcourir pour voir lesquels nous pouvons produire sans enfreindre certaines lois. Nous espérons que d'ici la fin du mois, nous serons en mesure de les réunir.
    Avez-vous mené d'autres consultations auprès de ministères et d'organismes pour obtenir des conseils?
    Comme je l'ai dit, j'ai participé à des réunions avec les ministères clients tout au long de cette situation, depuis la mi‑février...
    Seriez-vous disposé à nous fournir des détails sur les consultations que vous avez eues avec d'autres ministères à ce sujet également?
    Comme je l'ai dit, nous allons réunir les documents que nous pouvons fournir afin de répondre à la motion qui...
    Quels documents ne pourriez-vous pas nous fournir?
    Pardon...?
    Quels documents ne voulez-vous pas fournir ou refusez-vous de fournir?
    Comme je l'ai expliqué, mon ministre a comparu le 26 et a dit qu'il ne fournirait pas d'avis juridique, alors ce sont les instructions que j'ai en ce moment. Si le gouvernement en décidait autrement, avant le 30, nous vous le ferons savoir.
    Les notes sur les consultations et les documents d'information ne seraient pas des opinions juridiques, par leur nature. Seriez-vous prêt à les fournir?
    Comme je l'ai dit, je travaille avec Sécurité publique et d'autres ministères pour rassembler ces documents. Nous allons fournir un ensemble de documents pour aider le Comité dans ses délibérations.
    Est‑ce que cela comprendra des évaluations de sécurité?
    Je ne sais pas si cela comprendra des évaluations de sécurité. Vous devriez demander à Sécurité publique et aux autres ministères responsables de ces évaluations.
    Bien sûr, étant donné les histoires... Vous avez déclaré officiellement, dans votre déclaration liminaire, qu'il n'y avait aucun décret spécial. Vous l'avez dit catégoriquement. Puis, bien sûr, nous avons entendu parler de deux décrets qui auraient été pris au cours de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Y a‑t‑il un scénario possible où des décrets secrets ne vous auraient pas été communiqués, ou dont vous n'auriez pas eu connaissance?
    Je peux vous garantir qu'il n'y a pas eu de décrets secrets liés à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Est‑ce une simple coïncidence que ces histoires soient sorties entre ces dates?
    Pour autant que je sache, c'est une coïncidence. Je n'ai pas examiné les deux autres décrets secrets, les deux décrets dont il est question, mais je peux vous dire que tous les décrets liés à cette situation ont été rendus publics.
    Vous ne les avez pas examinés, mais vous pouvez affirmer avec assurance qu'ils ne se rapportent pas à cette situation. Comment est‑ce possible, monsieur?
    Parce que j'ai participé à tous les décrets liés à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Un décret secret ne nécessiterait pas votre participation.
    S'il y avait un autre décret lié à la Loi sur les mesures d'urgence, qu'il soit secret ou non, je le saurais. Je ne suis pas au courant d'un décret secret et, par conséquent, cela n'existe pas.

[Français]

    Merci, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci beaucoup. Nous allons maintenant passer à la sénatrice Boniface.
    Sénatrice, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Aux témoins, merci de votre présence.
    J'aimerais me concentrer sur la proportionnalité à la menace pour la sécurité publique. Pouvez-vous me dire comment vous avez fait cette détermination, ou quels facteurs vous avez pris en compte pour examiner le niveau de menace pour la sécurité publique qui existait?
    Je vous renvoie au rapport produit conformément à l'article 58 qui parle de la nature des menaces signalées et que nous avons constatées. Cela comprenait des menaces de violence et des menaces d'enfreindre la loi. Cela comprend la présence d'un extrémisme violent à caractère idéologique et les autres éléments mentionnés dans le rapport prescrit par l'article 58.

  (1915)  

    Je suppose que certains de ces renseignements vous sont parvenus par l'entremise du ministère de la Sécurité publique. S'agit‑il de ce genre de processus? J'essaie simplement de comprendre le processus qui s'est déroulé au sein du gouvernement.
    Je pense que le processus était essentiellement — et je pense que d'autres en ont parlé — que nous avions un groupe de sous-ministres qui se rencontraient régulièrement et qui échangeaient de l'information. C'est ainsi que la plupart de ces renseignements me sont parvenus, en tout cas.
    Dans ce groupe de sous-ministres, je suppose que quelqu'un présidait. Est‑ce que ce serait vous?
    Non.
    Dans la version anglaise de la proclamation elle-même, alors, en déclarant une situation de crise, le libellé dit: « the special temporary measures that may be necessary for dealing with the emergency ».
    Si des consultations ont eu lieu, je suppose que votre groupe a eu beaucoup de discussions à ce sujet. Peut-être pouvez-vous me dire précisément pourquoi le mot « may » aurait été employé, plutôt que « shall » ou « will »? Ce serait beaucoup plus concret.
    Il est difficile de connaître la nature éventuelle de la situation de crise. Il pourrait s'agir de n'importe quel type de situation. L'idée derrière « may » serait de donner beaucoup de latitude au gouvernement pour qu'il puisse trouver les mesures qui correspondent à la crise particulière qu'il souhaitait résorber.
    Pour préciser… J'essaie simplement de comprendre quel était le processus de réflexion à l'époque. Je suis sûre que les documents nous aideront à cet égard.
    S'agissait‑il à la fois des renseignements que vous aviez en main et de tout autre prévision ou préoccupation concernant d'autres renseignements qui pourraient être présentés et qui pourraient vous faire changer d'idée par rapport à ce que les gens faisaient ou ce qu'ils préparaient? Est‑ce que cela a aussi été pris en considération?
    Je pense que nous nous réunissions presque quotidiennement et que nous recevions des renseignements quotidiennement. Nous nous sommes adaptés en fonction de l'information dont nous disposions.
    Nous n'avons évidemment pas rédigé ces documents en quelques minutes. Nous avons anticipé la possibilité que le gouvernement décide de le faire. Nous avons collaboré avec la GRC, nos conseillers juridiques et nos rédacteurs, et nous avons essayé de déterminer ce qui serait utile pour rédiger des décrets. Ces avant-projets ont ensuite été soumis à un processus de révision avant d'en arriver à leur version définitive.
    Je vous remercie de ces précisions. Je pense que je comprends le fonctionnement du processus d'un autre angle.
    J'essayais de voir si, en tenant compte de tous ces éléments, vous tiendriez aussi compte de certaines autres préoccupations que vous aviez qui ne s'étaient peut-être pas encore produites ou qui ont été anticipées. Je suppose que l'évaluation du risque a pris une place importante dans la décision et que vous avez essayé de trouver le juste équilibre.
    Y aurait‑il des documents ou des considérations écrites, qui nous aideraient à comprendre les autres éléments que vous avez examinés ou que vous avez anticipés en fonction de l'information et, je dirais, de l'aspect très subjectif des renseignements dont vous pouviez disposer à l'époque?
    Je pense qu'au moyen de ce recueil de documents que nous réunissons pour répondre à la motion, nous espérons brosser un peu ce tableau. Son contenu sera cohérent avec le contenu du rapport prescrit à l'article 58. Je ne pense pas que vous y verrez quelque chose qui dit: « Nous pensons que cela pourrait se produire, mais nous avons fait une croix dessus. » La situation était très dynamique et urgente.
    Comme vous le savez, conformément à la Loi, il y avait toujours la possibilité de… Si la Loi n'avait pas été révoquée, votre comité, ou un comité comme celui‑ci, aurait pu examiner les décrets et les révoquer ou les modifier. Le gouvernement aurait pu prendre de nouveaux décrets en fonction de la situation sur le terrain et de ce qui devait être réglé.
    Je vous remercie. C'est vrai que le temps file.

[Français]

     Monsieur Carignan, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Daigle, je veux m'assurer de bien comprendre votre témoignage. Comme nous le savons, vous êtes avocat. Vous nous dites que le problème ne découle pas de l'inexistence des lois, mais de leur inefficacité dans cette situation particulière. C'est ce que j'ai compris.
    C'est ce que j'ai dit, en effet.

  (1920)  

    D'accord.
    Quelles lois avez-vous tenté d'appliquer et qui n'ont pas fonctionné?
    Premièrement, je précise que ce n'est pas le ministère de la Justice qui applique les lois, mais les forces policières, partout au pays.
    Que vous a-t-on dit, dans ce cas?
    Il fallait observer la situation et voir si les forces policières étaient capables de la gérer avec les lois dont elles disposaient, qu'il s'agisse du ministère des Transports ou des forces policières.
    Vous n'avez peut-être pas rendu d'opinion juridique; nous le verrons plus tard. Cela dit, vous avez quand même décidé de faire un décret ensemble.
    Quelles lois spécifiques l'État n'était-il pas en mesure d'appliquer par l'entremise des services policiers ou d'autres agents de l'État?
    Comme j'habite dans la région, je suivais la situation de près. Or j'ai constaté, en regardant la télévision, que le Service de police d'Ottawa avait de la difficulté à appliquer même les lois municipales ou provinciales, y compris les lois sur...
    De quelles lois parlez-vous?
    Je parle notamment de la Loi sur les véhicules à moteur et de la Highway Traffic Act.
    Le savez-vous parce que vous l'avez entendu à la télévision ou parce que, dans le cadre de votre travail, vous avez eu à évaluer cet aspect?
     Nous recevions quotidiennement de l'information des collègues de Mme Lucki, ainsi que d'autres personnes. Le gouvernement pouvait donc déterminer si le travail permettait, ou non, de gérer efficacement la situation.
    Vous avez parlé de dispositions précises que vous n'étiez pas capables d'appliquer. De quelles dispositions s'agit-il?
    Je ne peux pas vous renvoyer à des articles de lois provinciales précises. Cependant, il était clair, d'après ce que nous voyions, que l'urgence était un problème. Les choses se poursuivaient chaque fin de semaine et il y avait de plus en plus de problèmes. La police avait de la difficulté à déplacer les camions et à faire respecter l'ordre à Ottawa ou à Windsor, par exemple.
    À Ottawa, le 12 février, le Service de police a publié une déclaration dans laquelle il disait avoir un plan. Savez-vous quel était ce plan?
    Je n'ai pas vu le plan. On m'a dit qu'il y en avait un. Je sais qu'on travaillait à ce plan avec la GRC.
    Vous a-t-on communiqué le plan?
    Pour ma part, je n'ai pas vu le plan.
    D'accord.
    Savez-vous que, dans son communiqué du 12 février, le Service de police affirmait avoir un plan et attendre un ajout d'effectifs? Il disait qu'il appliquerait ce plan dès qu'il disposerait de ces effectifs. Ce communiqué date du 12 février.
    Savez-vous si des effectifs supplémentaires ont été fournis au Service de police d'Ottawa?
    Dans leur témoignage, qui a déjà eu lieu, Mme Lucki et M. Duheme ont dit avoir envoyé d'autres effectifs à Ottawa. Je pense qu'il y avait des policiers provenant d'un peu partout.
    Était-ce après le 14 février?
    C'était avant et après le 12 février, mais il faudrait poser la question à Mme Lucki. Je n'ai pas cette information, malheureusement.
    Si je comprends bien, vous ne connaissez pas les dispositions spécifiques que ces gens n'étaient pas en mesure d'appliquer et vous n'avez pas participé, avec des services policiers, à des discussions traitant de leur incapacité à appliquer les dispositions.
    Pour ma part, je n'ai pas tenu de discussion avec le Service de police d'Ottawa.
    D'accord.
    Avez-vous discuté avec d'autres corps policiers?
    J'ai tenu des discussions avec la GRC, mais pas tenu avec d'autres corps policiers.
    Que vous ont dit les gens de la GRC? Vous ont-ils dit qu'ils n'y arrivaient pas?
    Ont-ils demandé que la Loi sur les mesures d'urgence soit appliquée?
    Je pense que vous avez déjà la réponse à cette question qu'a fournie Mme Lucki.
    J'ai celle de Mme Lucki, mais pas la vôtre.
    Mme Lucki ne m'a pas posé la question. Il reste que, en vertu de la loi, c'est le gouverneur en conseil, et non Mme Lucki, qui doit faire cette demande et prendre cette décision.
    D'accord.
    Le document sur la Charte que vous nous avez fourni et que nous avons reçu aujourd'hui a-t-il été préparé après la comparution du ministre?
    Oui, c'est exact.
     D'accord.
    Je veux bien comprendre votre définition du mot « saisie ». Selon vous, ce n'est pas une saisie au sens de la Charte, parce que ce sont les banques qui bloquent les comptes.
    Est-ce bien ce que vous dites?
    Premièrement, il n'y a pas eu de saisie, parce qu'il n'y a pas eu de transfert de propriété. Personne n'a pris le compte de quelqu'un pour le donner à quelqu'un d'autre.

  (1925)  

    Vous connaissez sûrement l'arrêt Laroche.
    Vous êtes avocat, vous êtes le plus haut fonctionnaire au ministère...
    Monsieur Carignan, je m'excuse de vous interrompre, mais votre temps de parole est écoulé.
    Ce n'est pas grave, car j'aurai d'autres occasions de poser des questions.

[Traduction]

    Je sais que vous êtes sur une lancée, monsieur. Je vous en suis reconnaissant. Je vous remercie beaucoup.
    Monsieur le sénateur Harder, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Permettez-moi de commencer par me faire l'écho des commentaires de M. Motz sur votre volonté de vous présenter devant nous en personne. Je pense que cela ajoute à la conversation. J'espère que vous l'accueillez dans l'esprit dans lequel il est offert, dans la mesure où une partie de ce que nous cherchons à faire est de comprendre de façon plus interactive que la technologie ne le permet. Je vous remercie beaucoup.
    Mon deuxième point consiste simplement à dire que j'accueille favorablement le document d'information sur la Charte. Je pense que c'est une contribution importante à notre compréhension. Il arrive un peu sur le tard, mais il ajoute à l'information dont nous disposons.
    Ma question fait suite à votre commentaire, et le sénateur Carignan en a parlé un peu. Vous avez dit qu'on a constaté que la situation sur le terrain dépassait la capacité des autres administrations. Je suis certainement d'accord avec ce constat. J'aimerais savoir comment vous en êtes arrivé à cette conclusion, et j'aurai peut-être des questions complémentaires à poser après votre réponse.
    Je vous remercie.
    C'est une conclusion du gouvernement, fondée sur tous les renseignements dont il avait connaissance, qui étaient mis à jour presque quotidiennement, alors que nous recevions des comptes rendus des forces de l'ordre sur la situation à Ottawa, Windsor, Coutts, Emerson, Fredericton, Halifax, etc.
    Dans le cadre de cette observation collective, auriez-vous conclu à l'existence d'échecs des forces policières à poursuivre des infractions aux régimes juridiques en vigueur?
    Il m'est difficile de dire s'il s'agissait d'échecs des forces policières, parce que je…
    Il ne s'agissait pas de réussites.
    Elles avaient de la difficulté… Vous savez, les gens ne partaient pas d'Ottawa. C'était la conclusion, malgré les efforts et plusieurs plans qu'elles ont essayé de mettre en œuvre.
    Avec l'aide de la PPO, elles ont réussi à faire sortir les gens de Windsor et à ouvrir ce corridor. Elles avaient encore de la difficulté à le garder ouvert et elles ont dû y consacrer beaucoup de ressources pour s'assurer qu'elles pouvaient le garder ouvert.
    Exactement. Je ne considère pas les échecs comme une défaillance morale. Je les considère simplement comme une conclusion concrète d'après ce que nous observions sur le plan opérationnel. Les ressources déployées en fonction des cadres juridiques en vigueur étaient inadéquates, comme vous le dites, pour la capacité des autres administrations.
    J'aimerais vous parler un peu des consultations auxquelles vous avez participé. Je comprends que les vôtres portent davantage sur l'aspect juridique que sur l'aspect opérationnel. Par exemple, avez-vous consulté le bureau du procureur général de l'Ontario ou avez-vous eu des discussions régulières avec lui?
    Personnellement, non, mais je sais que le ministère a eu des conversations avec le bureau du solliciteur de la Ville d'Ottawa et avec le procureur général de l'Ontario, pas son cabinet, mais le ministère.
    D'accord, et y a‑t‑il eu des conversations avec la Ville également?
    Oui, avec la Ville également.
    À propos du processus de consultation, nous avons maintenant eu des déclarations publiques de la cheffe de la GRC et de l'ancien chef de police de la Ville d'Ottawa disant qu'ils n'avaient pas demandé l'invocation de la Loi.
    Je ne pense pas que cela soit si important. J'estime qu'il est essentiel qu'ils aient été consultés à propos des situations auxquelles le gouvernement était confronté et auxquelles ils étaient confrontés. Pouvez-vous confirmer que cette consultation a eu lieu directement avec eux?
    Au moment où nous rédigions les décrets, cette consultation a eu lieu directement avec la GRC. Nous tentions alors de déterminer ce qui serait utile pour mettre fin à l'occupation et aux blocages.
    Y a‑t‑il eu une convergence de vues, selon ce que vous avez observé? Êtes-vous prêt à dire qu'il y a eu une grande convergence de vues et que les mesures que le gouvernement a prises étaient la conclusion logique des observations que vous avez faites à propos du dépassement de la capacité des administrations?
    Je pense que le résultat a été les décrets que nous avons pris. Vous avez entendu la commissaire dire qu'ils ont été utiles pour mettre fin à l'occupation et aux blocages, alors oui, ils l'ont été.

  (1930)  

    Ma troisième question, si nous avons le temps, monsieur le président…
    Il vous reste 10 secondes.
    Ce sera pour le prochain tour. Je vous laisse dans l'attente.
    Merci beaucoup, monsieur le sénateur Harder.
    J'aimerais souhaiter un bon retour au Comité au sénateur Campbell. Il se joint à nous virtuellement.
    Monsieur le sénateur Campbell, vous disposez de cinq minutes, et la parole est à vous.
    Je me suis aperçu qu'en étant le dernier sur la liste, on laisse toutes les bonnes questions à ceux qui vous précèdent.
    Je suis préoccupé de vous entendre dire que vous vous étiez renseigné sur la situation en regardant la télévision. Peut-être pouvez-vous nous expliquer dans quelle mesure vous avez consulté la police d'Ottawa plutôt que la GRC. Il me semble qu'il s'agissait d'un problème d'Ottawa et que, bien sûr, la GRC serait nécessaire. Cependant, d'après ce que vous avez dit, et je peux me tromper, il semble qu'il y a eu plus de consultations avec la Gendarmerie qu'avec la police d'Ottawa. Est‑ce exact?
    Je pense que cela dépend à qui vous posez la question.
    J'ai certainement eu plus de conversations avec la GRC qu'avec la police d'Ottawa, mais je crois que la GRC a eu plus de conversations avec la police d'Ottawa qu'avec moi. J'ai participé à des séances d'information régulières auxquelles la GRC participait pour nous informer de la situation dans tout le pays, puisque la GRC est présente dans de nombreuses provinces et de nombreux territoires. Il y avait aussi les conversations avec la Police provinciale de l'Ontario et la Sûreté du Québec, mais je ne participais pas à ces consultations et à ces conversations, bien qu'on en ait fait rapport au groupe des sous-ministres.
    Nous nous concentrons toujours sur l'Ontario, et je sais que le soleil brille tout le temps sur l'Ontario, mais à ce propos, l'Alberta et la Colombie-Britannique ont eu quelques difficultés à la frontière concernant les armes à feu. On y trouve plusieurs corps policiers là‑bas, dont Delta, ainsi que la GRC.
    Avez-vous parlé à l'un de ces responsables municipaux ou provinciaux pour savoir ce qu'ils pensaient de cette situation?
    Non, je ne l'ai pas fait, mais je sais que la GRC a parlé à ces corps policiers.
    La GRC semble jouer un grand rôle dans cette affaire, mais j'ai suivi ces débats et, très franchement, si c'est une indication de…
    Quoi qu'il en soit, vous n'avez effectivement parlé à personne d'autre qu'à la GRC et on vous a donné l'information dont vous aviez besoin.
    Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que je participais à des séances d'information quotidiennes auxquelles participaient un certain nombre de ministères et d'organismes qui nous renseignaient quotidiennement à propos de la situation sur le terrain.
    C'est toute une danse.
    Je vous remercie beaucoup.
    Nous allons passer au deuxième tour. Étant donné le temps que nous avons pris pour cette partie, le temps de parole sera de quatre minutes.
    Sur ce, nous commençons par M. Brock.
    Monsieur Brock, la parole est à vous pour quatre minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence.
    Mes questions s'adresseront à M. Daigle. Je ne voudrais pas manquer de respect envers les dames du groupe, mais je m'intéresse au premier plan aux critères juridiques et au respect de la Charte.
    Cela dit, avant d'aborder ces questions, permettez-moi de vous rappeler que Perrin Beatty, l'ancien ministre de la Défense qui est aussi l'auteur de cette mesure législative, a insisté sur le fait qu'un gouvernement qui est investi de pouvoirs extraordinaires a d'office une responsabilité extraordinaire. Le Comité a été légalement constitué pour procéder à un examen approfondi du rôle qu'a joué le gouvernement dans l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Nous ne sommes pas ici pour parler des manifestants ou des circonstances qui ont précédé leur arrivée, mais plutôt du respect des critères juridiques et de la Charte. C'est sur cela que je vais me concentrer.
    La Loi établit les deux critères qui doivent être remplis, et vous les connaissez bien. Le premier est l'existence de menaces à la sécurité du Canada, qui sont définies de manière très précise dans la loi sur le SCRS. J'imagine que vous connaissez bien cette loi, monsieur Daigle.

  (1935)  

    Oui, je la connais bien.
    Je vous épargne la lecture de chaque disposition. Ce serait beaucoup trop long. Pouvez-vous me dire quels éléments de preuve le ministère de la Justice a jugé pertinents et crédibles pour établir qu'il y avait eu, conformément à la définition donnée aux alinéas a) à d), des activités d'espionnage, des activités influencées par l'étranger, de la violence grave dans le but d'atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique, et des activités visant à saper le régime de gouvernement constitutionnellement établi au Canada?
    Sur quels éléments de preuve le ministère s'est‑il fondé?
    Je commencerai par préciser qu'il n'est pas exigé de satisfaire aux critères énoncés aux alinéas a), b), c) et d) pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Il suffit qu'un seul de ces critères soit rempli.
    Le gouvernement a invoqué l'alinéa 2c), où il est question d'actes de violence contre des personnes ou des biens. Le rapport produit au titre de l'article 58, dont j'ai déjà parlé et qui a été déposé au Parlement et transmis au Comité, expose les faits et les motifs sur lesquels le gouvernement s'est fondé pour établir l'existence de menaces de violence justifiant l'invocation de la Loi.
    Vous parlez de menaces de violence. Selon la Loi, il faut qu'il y ait usage de la violence grave contre des personnes ou des biens dans le but — pas indépendamment de ce but — d'atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique au Canada.
    Je conviens avec vous qu'il existe certaines preuves de violence. Il y a eu des menaces de harcèlement et de voies de fait. Il n'y a pas eu des menaces de voies de fait, perçues ou réelles. Cependant, comment en êtes-vous arrivés à la conclusion qu'elles avaient pour but d'atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique au Canada?
    Je dois de nouveau vous renvoyer au rapport, qui expose les motifs de l'invocation de la Loi par le gouvernement.
    Pouvez-vous nous dire exactement quels étaient ces motifs?
    Je peux certainement vous rappeler qu'il y a eu des menaces de recourir à la violence pour résister aux tentatives de la police de faire appliquer la loi et de rétablir l'ordre. Nous avons des rapports concernant les menaces qui ont été proférées, qui…
    Je vous arrête tout de suite.
    Merci. Malheureusement…
    Il ne reste plus de temps?
    Je veux assurer une gestion du temps serrée, pour que tout le monde ait la chance d'intervenir.
    C'est maintenant au tour de Mme Bendayan.
    Vous disposez de quatre minutes.

[Français]

     Maître Daigle, j'aimerais moi aussi discuter avec vous du test qui a été fait afin de déterminer s'il fallait invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
     J'imagine que vous avez un exemplaire de la Loi à portée de main. Je vous invite à lire l'article 3 de la Loi, dont vous avez parlé dans votre allocution d'ouverture. Vous avez attiré notre attention sur le fait que, selon cet article, le critère à remplir était l'impossibilité de faire face à la situation adéquatement sous le régime des lois du Canada.

[Traduction]

    Je voudrais revenir à la première partie de l'article 3. L'intention était-elle d'invoquer l'alinéa a), l'alinéa b), ou les deux?

[Français]

    Je vois qu'il y a deux paragraphes à l'article 3.
    Je ne suis pas certain de bien saisir votre question.
    À l'article 3, on parle de la possibilité d'invoquer une situation d'urgence dans deux situations qui sont présentées aux paragraphes 3a) et 3b). Selon vous, est-ce que les deux circonstances existaient le 14 février 2022?
    À la lumière du rapport qui était prévu en vertu de l'article 58, il est clair que la situation mettait gravement en danger la vie de certains Canadiens, leur santé et leur sécurité, y compris la santé économique de plusieurs Canadiens, en raison des blocages aux frontières. En vertu de la Loi, cela aurait pu être l'un ou l'autre des paragraphes, et le gouvernement s'est arrêté au premier paragraphe.

  (1940)  

     Vous venez de mentionner plusieurs faits.
    Le ministre de la Sécurité publique a témoigné devant le Comité au sujet des frontières à Coutts, en Alberta, à Emerson, au Manitoba, et à Surrey, en Colombie‑Britannique, qui étaient bloquées, alors que l'on avait invoqué la Loi sur les mesures d'urgence puisque, si ma mémoire est bonne, cette loi a été invoquée le 14 février vers 16 h 30.
    Est-ce exact?
    Oui, nous nous préoccupions des frontières. De plus, nos collègues américains se demandaient ce qui se passait aux frontières.

[Traduction]

    Pour ce qui concerne les critères juridiques, la Gazette du Canada renvoie à l'article 17 de la Loi sur les mesures d'urgence, et plus précisément du paragraphe (1). Pouvez-vous nous expliquer pourquoi l'interaction entre le paragraphe 17(1) et l'article 3 permet d'établir que le critère est rempli?
    Le paragraphe 17(1) prévoit que le « gouverneur en conseil peut par proclamation, s'il croit, pour des motifs raisonnables, qu'il se produit un état d'urgence », et les mesures possibles en l'occurrence sont énoncées ensuite. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste le critère des motifs raisonnables et comment vous l'interprétez?

[Français]

    D'abord, il s'agit d'une loi sur les mesures d'urgence, ce qui implique qu'il y a une urgence.

[Traduction]

    Le gouvernement doit réagir promptement. L'existence de motifs raisonnables n'exclut pas l'obligation d'avoir une preuve hors de tout doute raisonnable. S'il a des preuves qu'il existe des motifs raisonnables de croire qu'il y a un état d'urgence, tel qu'il est défini à l'article 3, le gouvernement peut intervenir et, le cas échéant, il peut modifier les mesures prises ultérieurement.
    À la fin des séries de questions, j'ai prévu du temps pour permettre aux témoins de donner des compléments d'information au Comité.
    Nous passons maintenant aux segments de quatre minutes.

[Français]

    Sénateur Carignan, vous avez la parole.
    Je n'ai pas eu mon tour de parole, monsieur le président.
    Excusez-moi.

[Traduction]

    Vous étiez en bonne compagnie. Nous aurions tous les deux perdu notre tour.
    Monsieur Fortin.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Daigle, tantôt, vous avez dit que vous étiez avocat et que vous aviez eu des rencontres à plusieurs reprises. Avant que les mesures d'urgence soient proclamées, avez-vous été consulté en lien avec les lois et les règlements en vigueur qui auraient pu être utilisés pour mettre fin aux barrages?
    Nous avons été consultés à propos de différentes situations. Par exemple, nous avons été consultés lorsque les policiers tentaient de déplacer un camion, alors que des enfants y étaient. Les policiers n'ont pas pu utiliser leurs pouvoirs pour déplacer le camion, car il y avait une situation de danger.
    Monsieur Daigle, je m'excuse de vous interrompre. Je sais que c'est impoli, mais mon temps de parole n'est que de trois minutes et il y en a déjà une qui est écoulée.
    Le Code de la route de l'Ontario pouvait-il être utilisé lors des manifestations?
    Aurait-on pu utiliser l'ensemble des lois en vigueur pour mettre fin aux barrages? Cela a été fait à Windsor et ailleurs, par exemple.
    Oui, nous avons consulté le Code criminel. La GRC et les autres forces policières s'y sont aussi référé et ont tenté de l'appliquer. Nous avons aussi discuté avec l'Ontario pour savoir dans quelle mesure le Code de la route pouvait ou ne pouvait pas être appliqué.
    Pourquoi ne pouvait-il pas être appliqué?
    À la lumière de ce que nous avons vu, il était très difficile de l'appliquer.
    Il faudrait leur poser la question, car on ne m'a pas dit pourquoi on n'était pas en mesure de le faire.
    Je vous ai donné l'exemple du camion qui était stationné là où il ne devait pas l'être et que l'on tentait de déplacer. Quand les policiers se sont approchés du camion, ils ont vu que des enfants étaient à l'intérieur de celui-ci. Finalement, ils n'ont pas pu déplacer le camion.
    En Ontario, y a-t-il des lois qui permettent de s'occuper des enfants, de les faire sortir ou...
    Oui, mais nous avons été surpris par la situation. Il a donc fallu développer un nouveau plan.
    Quand les policiers sont retournés sur place, ils étaient accompagnés par des représentants du service des soins aux enfants.

  (1945)  

    Il était donc possible de le faire sans la proclamation d'urgence.
     Jusqu'au 14 février, on ne l'avait toujours pas fait.
    On ne l'avait pas fait. Je comprends cela, et c'est ce que nous avons vu. Je suis d'accord avec vous. Cependant, cela aurait été possible.
    À votre avis, la proclamation des mesures d'urgence était-elle nécessaire? N'y aurait-il pas eu moyen de régler la situation en fonction des lois en vigueur, du Code criminel, du Code de la route, et ainsi de suite?
    Comme je l'ai dit au début, le test ne vise pas à savoir si c'est nécessaire...
    Oui, c'est ce en quoi consiste le test. Était-ce nécessaire?
    À l'article 3 de la Loi, on indique qu'on peut recourir à la Loi « [s'il] n'est pas possible [d'y] faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada [...] ». À votre avis, il n'était pas possible de mettre fin au barrage autrement qu'avec la proclamation des mesures d'urgence. Est-ce exact?
    Ce n'est pas que ce n'était pas possible, mais plutôt que cela ne se faisait pas de façon adéquate, pour reprendre les mots du texte de la Loi.
    Dans la Loi, on ne parle pas de ce qui est adéquat, mais de ce qui est possible.
    On utilise le mot « adéquatement » dans la Loi.

[Traduction]

    Monsieur Fortin, puis‑je vous céder le fauteuil pour trois minutes?

[Français]

    Vous avez la parole, monsieur Green.

[Traduction]

    Par votre entremise, je vais poursuivre avec des questions qui feront suite aux vôtres.
    Nous avons parlé des lois en vigueur, mais j'ai l'impression que nous n'avons pas suffisamment discuté de l'efficacité ou, en l'occurrence, de l'inefficacité des déclarations d'urgence aux échelons municipal et provincial.
    Dans votre évaluation, ou dans vos délibérations concernant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, a‑t‑il été question de l'inefficacité des décrets d'urgence pris par la Ville d'Ottawa et la province de l'Ontario?
    Des décrets ont été pris, en effet.
    Relativement aux mesures prises, j'ai vraiment l'impression que la province s'en est tirée à bon compte. Quelles lacunes dans la législation provinciale sur les mesures d'urgence sont ressorties de vos évaluations? J'ai l'impression que cette analyse reste encore superficielle. Quelle était la différence?
    Quand nous avons examiné la législation ontarienne et la réglementation municipale sur la gestion des situations d'urgence, de même que les injonctions qui ont été prises, nous ne nous sommes pas limités à ce qui a été fait en Ontario. Nous avons examiné la situation dans l'ensemble du pays, dans chaque province. D'autres provinces ont pris des mesures en vertu de leur législation sur les situations d'urgence. C'est le cas du Nouveau‑Brunswick, notamment…
    Si vous me permettez, j'aimerais me concentrer sur l'Ontario. La capitale nationale était sous occupation. Doug Ford a invoqué la loi sur la gestion des situations d'urgence mais, de toute évidence, il n'a rien fait pendant des semaines. Quels pouvoirs invoqués au titre de cette loi se sont avérés inutiles et pourquoi la municipalité d'Ottawa n'a‑t‑elle pas, comme l'a évoqué M. White, mon collègue du Comité, réclamé une aide au pouvoir civil pour faire remorquer des camions et prendre d'autres mesures?
    Je n'ai pas en tête le décret exact pris par l'Ontario, mais je pense qu'il prévoyait surtout des amendes beaucoup plus importantes. Selon ce que j'en sais, il semblait difficile d'imposer des amendes en Ontario, et elles ne semblaient pas suffisantes pour convaincre les gens de partir.
    Comment peut‑il être difficile d'imposer des amendes?
    Elles n'avaient aucun effet. Les gens ne bougeaient pas.
    Est‑ce que des amendes ont été données?
    Je n'ai pas le détail de ce que le gouvernement ontarien ou le Service de police d'Ottawa ont fait. Je sais toutefois que beaucoup d'accusations ont été portées et que des procédures judiciaires sont en cours.
    Le ministère a‑t‑il envisagé de recourir à l'aide au pouvoir civil pour éviter d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Ce n'est pas un recours que le ministère de la Justice envisagerait. C'est un recours qui peut être envisagé par un autre ministre fédéral.
    Je suis impatient que ce ministre comparaisse devant le Comité pour que je puisse lui poser la question.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, puis‑je faire un rappel au Règlement? J'aimerais apporter une précision.
    Je n'occupe pas le fauteuil actuellement.
    Monsieur Fortin, j'invoque le Règlement.

[Français]

    Monsieur Motz, vous avez la parole.

[Traduction]

    M. Green a demandé à M. Daigle si, à son avis, les déclarations d'urgence d'Ottawa et de la province de l'Ontario étaient « inefficaces ». Je ne sais pas si M. Daigle a bien entendu la question, puisqu'il a répondu que des mesures ont été prises, en effet.
    Il a dit: « Elles étaient inefficaces. »
    Ce n'est pas ce qu'il a dit.
    Merci de cette précision.
    Monsieur le président, par votre entremise, puis‑je demander que cela soit précisé aux fins du compte rendu?

[Français]

    Il vous reste encore 20 secondes, monsieur Green.

[Traduction]

    Je vais donner 20 secondes à M. Daigle pour nous donner des précisions.
    Je suis désolé. Pouvez-vous répéter la question?
    Pensez-vous que les déclarations d'urgence de la Ville d'Ottawa et de la province de l'Ontario étaient inefficaces?
    Oui, je pense qu'elles étaient inefficaces. C'est pour cette raison que le gouvernement a dû intervenir.
    Je cède le reste de mon temps de parole.
    Puis‑je reprendre le fauteuil?

  (1950)  

[Français]

    Je vous cède ma place, monsieur le président.

[Traduction]

    Je donne la parole au sénateur Carignan, pour trois minutes.

[Français]

     Excusez-moi.

[Traduction]

    Merci.

[Français]

    Je reprends ma série de questions sur la saisie. Ce que vous dites, c'est que, comme il n'y a pas eu de dépossession de biens ou d'argent, et que l'argent est resté dans les comptes de banque, il n'y a pas eu de saisie. Est-ce bien cela?
    Oui, c'est ce que j'ai dit.
    Vous savez que, si vos avocats disent cela en Cour suprême, ils vont passer un mauvais quart d'heure, n'est-ce pas?
    Si l'affaire se rend en Cour suprême...
    Elle va s'y rendre, et vous allez passer un mauvais quart d'heure.
    L'autre élément que vous avez mentionné pour dire qu'il ne s'agissait pas de saisie, c'est que ce n'est pas vous qui avez saisi l'argent, c'est la banque qui l'a gelé. Est-ce exact?
    Oui, c'est exact. Ce sont les banques qui ont fait la... Ce sont les banques qui ont gelé les comptes.
    Attention, ne dites pas « saisie »!
    Non.
    Quand la banque gèle ou saisit un compte, ne pensez-vous pas qu'elle agit comme mandataire de l'État?
    Le décret crée une obligation pour la banque et celle-ci prend sa décision. C'est à sa discrétion d'agir ou de ne pas agir, selon les informations qu'elle a.
    Encore une fois, cela va être difficile en Cour suprême, je vous le dis.
    Quand je regarde le décret sur les produits financiers, j'essaie de trouver un produit financier qui ne serait pas visé. Vous avez dit que c'était mesuré, que ce n'était pas excessif et que c'était raisonnable. Quels sont les produits financiers qui ne pouvaient pas être gelés? J'essaie de trouver ce qui ne serait pas saisissable, et je n'ai rien trouvé.
    Je vais demander à ma collègue Mme Aitken de répondre à votre question.

[Traduction]

    Je pense pouvoir vous donner un exemple tiré du décret concernant les polices d'assurance. Le décret ne gèle pas les polices, sauf les polices d'assurance automobile dans le cas de l'utilisation d'un véhicule pour participer à une manifestation ou à un blocus illégal.

[Français]

    En avez-vous d'autres?

[Traduction]

    Il y a aussi une liste de services financiers. Je n'ai pas d'autres exceptions en tête, mais c'en est une que je voulais mentionner.

[Français]

    D'accord. Tous les autres produits étaient donc visés par une saisie.

[Traduction]

    Il s'agit des services fournis par les entités figurant à l'article 3 du décret.

[Français]

    D'accord.
    En quoi était-ce raisonnable de saisir à peu près tout ce qui bouge dans les produits financiers d'un individu?

[Traduction]

    Ce n'est pas une saisie, mais un gel, et seules les personnes visées par le décret sont touchées en raison de leur participation à des activités illégales.
    Les établissements financiers étaient tenus de suivre la situation en continu et, s'ils avaient connaissance qu'une personne avait cessé de participer aux activités en cause, ils devaient lever le gel.
    Malheureusement, sénateur Carignan…

[Français]

    Est-ce que vous connaissez l'arrêt dans la cause Québec (Procureur général) c Laroche?

[Traduction]

    Sénateur Carignan…

[Français]

    Avez-vous dit que vous le connaissiez?
    Cela fait deux fois que je pose la question, et je ne suis pas capable d'obtenir une réponse.
    Vous devriez poser la question au début.

[Traduction]

    Elle n'a pas tort.

[Français]

    C'est parce que c'est du droit, donc je présume qu'ils le connaissent.
    C'est rare [inaudible] Cour suprême dans les questions.
    Je ne voudrais pas être leur avocat en Cour suprême.

[Traduction]

    Je vous demanderais de vous abstenir de donner votre avis sur le personnel.
    Je donne maintenant la parole à la sénatrice Boniface. Vous disposez de trois minutes.
    Je vous remercie de nouveau d'être ici.
    J'aimerais parler plus en détail sur ce qui s'est passé entre l'invocation de la Loi et son abrogation. Je vais vous présenter une hypothèse, que vous pourrez valider ou réfuter. Mon hypothèse est que les sous-ministres et les autres parties se sont réunis sur une base quotidienne, sinon plus souvent.

  (1955)  

    En effet, et nous étions informés en continu de la situation sur le terrain.
    Une des questions soulevées concernant la transmission d'information à votre groupe par la GRC… Je comprends que le service de police fédéral doit tenir le gouvernement fédéral au courant. Peut‑on conclure également que la GRC a recueilli de l'information, comme le veut son rôle, auprès d'autres organismes du pays relativement aux personnes impliquées dans les blocus, ou qu'elle a recueilli des renseignements concernant ces blocus?
    Oui, c'est ce que j'en comprends. Vous pouvez poser la question directement à la GRC. Je sais qu'elle collaborait et qu'elle travaillait directement avec la Police provinciale de l'Ontario et le Service de police d'Ottawa.
    Je présume également qu'elle a collaboré avec d'autres organismes du pays, et notamment avec la police de Windsor.
    Oui, et aussi avec les services policiers albertains. Comme je l'ai dit déjà, elle était en contact avec la Sûreté du Québec et la Police provinciale de l'Ontario.
    J'aimerais parler un peu de l'abrogation des événements qui l'ont précédée.
    Pouvez-vous nous en dire davantage au sujet de ce processus? Je comprends que vous ne pouvez pas nous donner d'avis juridique, mais vous pouvez certainement nous expliquer le processus qui a conduit à l'abrogation? Quelques-uns d'entre nous étaient présents au Sénat et ont entendu les discours à ce sujet.
    Nous recevions régulièrement de l'information concernant la situation sur le terrain. Quand nous avons été informés que les choses étaient rentrées dans l'ordre et que les forces policières locales disposaient de pouvoirs suffisants pour garder la situation en main, le gouvernement a envisagé la levée des décrets.
    Pour ce qui est de la déclaration d'urgence de l'Ontario, pouvez-vous nous toucher quelques mots des discussions qui ont eu lieu? À votre avis, le régime législatif ontarien est‑il foncièrement déficient, et cette déficience a‑t‑elle pesé dans la balance?
    J'essaie aussi de comprendre, comme M. Motz et d'autres, le cadre législatif ontarien en matière d'urgences.
    Je crois que la loi ontarienne sur la gestion des situations d'urgence est assez large et qu'elle permet un certain nombre d'interventions. Les décrets ont été pris conformément à cette loi.
    Les lois sur les mesures d'urgence varient beaucoup d'une province à l'autre. En Colombie-Britannique, si je ne m'abuse, elle porte surtout, voire seulement, sur les catastrophes naturelles. La province aurait donc eu beaucoup de mal à gérer une telle crise si elle avait dû s'en remettre aux pouvoirs prévus dans cette loi.
    Nous avons examiné toutes les lois sur les mesures d'urgence en vigueur au Canada.
    Je remercie nos témoins d'avoir accepté l'invitation du Comité. C'est ce qui conclut la première partie. Nous allons suspendre la séance quelques instants pour accueillir le groupe de témoins suivant.
    La séance est suspendue.

  (1955)  


  (2005)  

    Nous allons reprendre.
    Allez‑y, monsieur Virani.
    Merci.
    Je voudrais faire un bref rappel au Règlement relativement à une question posée par M. Fortin au groupe de témoins précédent. Il a parlé du secret professionnel entre les clients et les avocats de la Couronne ou du ministère de la Justice.
    Pour la gouverne du Comité, la Cour suprême a tranché dans l'arrêt R. c. Campbell, 1999, 1 RCS 565, que le secret professionnel de l'avocat s'applique aussi aux avis donnés par les avocats du ministère de la Justice.
    C'est aussi mentionné aux pages 1078 et 1079 de l'ouvrage de Watson et McGowan.
    Je trouvais important de le signaler au Comité. Merci.
    Il en sera tenu compte dans les futures décisions.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous accueillons maintenant des représentants du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile, qui seront avec nous de 20 heures à 21 h 30. Il s'agit de M. Rob Stewart, le sous-ministre; de M. Dominic Rochon, le sous-ministre adjoint principal, Secteur de la sécurité et de la cybersécurité nationale, ainsi que de M. Talal Dakalbab, le sous-ministre adjoint, Secteur de la prévention du crime.
    Vous disposez de cinq minutes pour nous présenter vos remarques liminaires.
    Monsieur Stewart, je crois que vous êtes l'heureux élu.
    Je précise tout d'abord que durant les périodes de questions, comme vous l'avez peut-être entendu au cours des périodes précédentes, les membres du Comité sont maîtres de leur temps de parole. S'ils vous interrompent pour passer à une autre question, ne vous en formalisez pas. Il se peut aussi que je m'immisce dans la conversation pour remercier quelqu'un ou lui demander de conclure ou, encore, pour lui demander d'enchaîner sur un autre sujet.
    Sur ce, monsieur Stewart, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Mes propos aujourd'hui s'inscriront dans la foulée du témoignage du ministre Mendicino devant le Comité. Je suis ici également pour apporter ma contribution à l'étude de la proclamation de l'urgence d'ordre public et expliquer le rôle qu'a joué la Loi sur les mesures d'urgence dans la résolution de cette crise.
    Plus précisément, je vais vous parler du rôle que j'ai eu, à titre de sous-ministre, dans divers domaines. Le premier a trait à l'analyse de la nature des menaces qui a précédé l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Le deuxième volet portera sur la façon dont la Loi a facilité les interventions des forces de l'ordre, et le troisième sur notre rôle dans les communications et la coordination avec les provinces, les territoires et les municipalités.

[Français]

     L'urgence publique de janvier et de février 2022 a pris racine dans un mouvement centré sur les sentiments intergouvernementaux liés à la réponse de la santé publique à la pandémie de la COVID‑19.

[Traduction]

     Durant cette période, les tactiques déployées par les participants aux manifestations et aux blocus dans la capitale nationale et à divers points d'entrée stratégiques pour troubler la paix et nuire à l'économie canadienne posaient une menace pour la sécurité nationale. Ces tactiques comprenaient des manifestations agressives, des comportements menaçants et des activités destinées à ralentir la circulation ou à occasionner des embouteillages, particulièrement aux points d'entrée.
    Les manifestations ont porté atteinte à la liberté et au bien-être des citoyens, et des entreprises ont été forcées d'interrompre leurs activités pour des raisons de sécurité ou parce que les blocus aux points d'entrée perturbaient la circulation des biens et des services.
    Un peu partout au pays et de manière imprévisible, des manifestants ont organisé des convois de véhicules de plus en plus imposants et nombreux. À plusieurs endroits, les manifestations ont perdu leur caractère pacifique et franchi le seuil de la légalité, créant un environnement instable et imprévisible qui, selon les évaluations, présentait un potentiel pour une escalade de violence.
    Fait très important, il était généralement très difficile d'avoir l'heure juste sur les agissements des groupes de manifestants. Le SCRS n'a pas décelé de menaces d'extrémisme violent à caractère idéologique, mais il savait que des partisans plus radicaux tentaient de se greffer aux manifestations.
    Je tiens à rappeler que le SCRS ne mène pas d'enquête, comme en a témoigné le directeur, concernant des activités légales de défense des intérêts, de manifestation ou de dissidence, sauf si elles impliquent des activités qui menacent la sécurité du Canada.
    Le Centre intégré d'évaluation des menaces a publié des résultats non classifiés d'évaluations de l'extrémisme violent à caractère idéologique qui nous ont aidés à comprendre le contexte de menace complexe et changeant, qui était alimenté par la désinformation et les discours nuisibles. Un des risques qu'il fallait surveiller était celui que des loups solitaires s'infiltrent parmi les manifestants. Dans un tel contexte, un marginal bien déterminé peut faire beaucoup des dégâts en peu de temps.

  (2010)  

[Français]

     De plus, on craignait que les mesures prises par les policiers se heurtent à une opposition ferme et déterminée pouvant causer des troubles et une plus grande instabilité.

[Traduction]

    Les motifs de la déclaration de l'état d'urgence ont été expliqués dans un document public qui a été produit au titre de l'article 58, comme il a déjà été dit devant le Comité.
    De plus, les deux chambres du Parlement ont reçu un rapport sur les consultations qui fait état des comptes rendus sur l'escalade de la menace entre la fin de janvier et le 14 février que le gouvernement fédéral a reçus des provinces, des territoires et des autorités policières compétentes, ou qui leur ont été communiqués. Le gouvernement fédéral a été appelé à prêter main-forte aux autorités policières compétentes pour les aider à faire face à la menace.
    Au ministère de la Sécurité publique, moi-même et mes collègues avons eu de nombreuses discussions avec nos partenaires des provinces, des territoires et des municipalités. Ces discussions portaient sur le soutien aux forces de l'ordre pour les aider à empêcher les rassemblements illégaux, sur le renforcement des pouvoirs pour gérer les convois, y compris des pouvoirs de donner des constats d'infraction, des amendes, de prendre des mesures d'application de la loi, de remorquer des véhicules, ainsi que sur le déploiement de ressources matérielles et humaines de la GRC.

[Français]

    C'est dans ce contexte que la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée à la mi-février.

[Traduction]

    La Loi permettait de renforcer les pouvoirs des forces de l'ordre. Par exemple, elle leur donnait accès à des dépanneuses pour démanteler les blocus. La Loi offrait aussi des moyens de faire cesser les manifestations illégales et de rétablir l'ordre public, en interdisant par exemple les rassemblements publics et le financement des convois.
    Au sein du gouvernement fédéral, le ministère de la Sécurité publique, le Service canadien du renseignement de sécurité, l'Agence des services frontaliers du Canada, le ministère de la Justice, la Gendarmerie royale du Canada et Transports Canada ont tous joué un rôle déterminant.
    Durant les trois semaines de la crise, nous sommes restés en contact avec nos partenaires et nous avons coordonné nos activités avec eux. Nous avons collaboré avec nos homologues des provinces et des territoires par l'intermédiaire du Comité fédéral-provincial-territorial sur la prévention du crime et la police, composé de sous-ministres adjoints. J'ai aussi discuté avec les sous-ministres provinciaux. En ma qualité de sous-ministre, j'ai eu des discussions avec le directeur de la Ville d'Ottawa, des responsables de la GRC, de la Police provinciale de l'Ontario, du Service de police d'Ottawa, ainsi qu'avec les sous-ministres des provinces.
    Pour terminer, je réitère qu'après avoir reçu les avis et les points de vue de nombreuses parties prenantes, la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée pour mettre fin aux conditions d'instabilité présentant un risque pour la sécurité nationale qui régnaient un peu partout au pays.
    Je serai très heureux de répondre à vos questions.
    M. Motz amorcera la première série de questions.
    Monsieur Motz, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    De nouveau, avant que le chronomètre tourne, et comme je l'ai demandé ou proposé aux représentants du ministère de la Justice, veuillez accepter mes remerciements sincères…
    Je crois que c'est un précédent…
    … pour votre présence en personne devant le Comité. Nous vous en sommes vraiment reconnaissants. C'est très important pour nous.
    Votre ministre a fait deux déclarations qui ont retenu mon attention. Premièrement, il a affirmé que la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée à la demande des forces policières pour protéger les Canadiens. Deuxièmement, il a déclaré que la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée seulement après que les autorités policières ont indiqué qu'elles avaient besoin de ce pouvoir extraordinaire.
    Des responsables de la police ont témoigné devant notre comité et d'autres comités du Parlement. À ce jour, aucun n'a confirmé qu'ils avaient fait une telle demande. Pouvez-vous nous dire de qui venait la demande?
    Je crois que les propos du ministre ont été mal compris. Il faisait…
    C'est évident.
    … allusion au fait que les autorités policières ont été consultées et que… La GRC et d'autres organismes policiers nous ont dit, comme il a été expliqué lors de la séance précédente, que leurs pouvoirs étaient insuffisants et qu'ils devaient être renforcés.
    C'est une explication raisonnable.
    Dans vos remarques liminaires, vous avez parlé de vos consultations avec la GRC, la Police provinciale de l'Ontario, la Ville d'Ottawa et d'autres. Le ministre a‑t‑il reçu des comptes rendus de ces consultations?
    Oui, et il a participé à certaines consultations.
    D'accord. Il y a participé. Pouvez-vous nous fournir des copies des notes prises durant ces consultations?
    Volontiers.
    Merci.
    Avez-vous des comptes rendus distincts des discussions avec les forces policières? Vous avez dit qu'il y avait eu des rencontres séparées avec les représentants de la Ville d'Ottawa et les forces policières. Avez-vous également ces notes?
    Je n'ai pas pris de notes moi-même, mais nous avons les comptes rendus des consultations que nous avons faites.

  (2015)  

    Je vous remercie. C'est très apprécié.
    Vous souvenez-vous si le ministre a été informé de faits qui se sont révélés faux, mais qui ont néanmoins pu influer sur la décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Que voulez-vous dire par « qui étaient peut-être faux »?
    J'ai plutôt dit « qui se sont révélés faux », mais qui ont néanmoins pu influer sur la décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Pas que je sache.
    Je vous le demande parce qu'il a déclaré lors d'une réunion précédente du Comité que l'incendie criminel dans un immeuble était lié aux manifestations, alors que la police d'Ottawa a clairement nié que c'était le cas. C'est un exemple de ce à quoi je fais référence.
    Qui a décidé, monsieur Stewart, que le pas entre une manifestation pacifique et l'état d'urgence avait été franchi?
    Vous me demandez à qui il revenait de prendre cette décision?
    Exactement.
    Au Cabinet.
    Au Cabinet, certes, mais il a reçu des avis.
    Oui.
    Est‑ce que ces avis étaient fondés sur le résultat des consultations avec les forces policières ou provenaient‑ils d'autres responsables?
    Les avis provenaient de nombreuses sources, y compris celles que vous avez nommées.
    D'accord. Et j'imagine que l'information sur laquelle vous vous êtes fondés, que les documents en question seront accessibles au Comité.
    C'est le premier ministre qui détermine ce qui constitue un document confidentiel du Cabinet. Je ne peux donc pas vous donner de confirmation.
    Je ne doute pas que le Comité aura accès à ces documents, mais il risque de recevoir des versions caviardées. Merci.
    Vous avez dit que des responsables du gouvernement assistaient aux réunions du Cabinet. Est‑ce que des responsables des forces policières, outre la commissaire Lucki, y assistaient aussi?
    Là encore, je crois que le nom des personnes présentes aux réunions doit être traité comme un secret du Cabinet.
    La commissaire Lucki a déjà déclaré que...
    Elle était présente lors des discussions avec les ministres.
    À ce stade, qui devraient donner des avis? Vous avez mentionné que des personnes ont conseillé le Cabinet relativement à la décision à prendre. Selon vous, de qui aurait‑il dû recevoir des avis? Je vais reformuler ma question. Est‑ce que les bonnes personnes ont pris part au processus décisionnel et ont donné des avis au Cabinet avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence?
    Comme vous le savez, monsieur, la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée quelque temps après le début des blocus et, durant les deux semaines ou plus qui ont suivi leur mise en place, nous avons rassemblé énormément d'information et fait beaucoup de consultations.
    C'est le Cabinet qui a pris la décision d'invoquer la Loi. Combien de temps s'est écoulé entre l'invocation de la Loi le 14 février et la prise de la décision par le Cabinet?
    Assez peu de temps.
    Une journée, une semaine, des heures… Combien de temps?
    La décision a été prise peu de temps avant, au cours de la fin de semaine.
    Monsieur Naqvi, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Allez‑y.
    Merci, monsieur le président, et par votre entremise, je remercie le sous-ministre et les sous-ministres adjoints de leur présence.
    Je viens d'Ottawa. Je représente la circonscription qui a subi un siège de trois semaines. J'ai été témoin du grabuge, du chaos, des agressions qu'ont endurées les membres de cette communauté et les nombreuses entreprises qui ont été forcées d'interrompre leurs activités. J'aimerais comprendre comment vous avez vécu les choses, de l'intérieur, comment vous en êtes venus à réaliser que les manifestations prenaient la forme d'une occupation et qu'il ne semblait pas y avoir d'issue. Quels efforts ont été faits au sein de l'appareil gouvernemental pour comprendre ce qui se passait sur le terrain, ici à Ottawa et ailleurs?
    Essentiellement, durant les manifestations, les opérations étaient menées en concertation avec les policiers d'Ottawa. Ils étaient sur le terrain, parmi les camions et les manifestants, et ils avaient des équipes de liaison qui discutaient avec eux.
    Avez-vous eu des interactions régulières et continues avec la police d'Ottawa ou d'autres corps policiers pendant toute cette période?
    Oui. La GRC en est venue à faire partie d'un centre de décision intégré, mais, même avant, elle était constamment en communication avec le Service de police d'Ottawa.
    Lors de ces interactions, est‑ce que vous partagiez de l'information sur autre chose que les aspects opérationnels? Était‑il question de la nature des manifestations, des défis particuliers liés à la gestion des événements?
    Oui, certainement.
    Vos discussions avec la police d'Ottawa, avec la GRC ou, dans le cas de Coutts et Windsor, avec la Police provinciale de l'Ontario vous ont-elles permis de mieux comprendre où se trouvaient les failles et pourquoi on n'arrivait pas à mettre fin aux blocus et aux occupations?

  (2020)  

    Oui. Il était évident que les policiers, surtout ceux d'Ottawa, avaient de la difficulté à faire respecter la loi. Je crois que l'ancien chef du Service de police d'Ottawa l'admet sans problème. Les manifestations ont pris une tournure tout à fait inusitée et l'expérience de l'ASFC a révélé à quel point il était difficile de faire respecter la loi aux passages frontaliers.
    Une question revient souvent, et j'essaie de comprendre pourquoi. En quoi est‑il pertinent de savoir si un organisme policier a réclamé l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence puisque ce n'est ni exigé ni nécessaire aux yeux de la Loi? Quand je lis le décret et le règlement, je constate que des pouvoirs très précis ont été conférés aux forces policières. Ils ont tous été exercés et ils ont permis de mettre fin aux blocus et à l'occupation. J'essaie de comprendre comment cette liste de pouvoirs a été dressée.
    Si j'ai bien saisi, le gouvernement a fait des consultations et il a eu des discussions qui lui ont permis de comprendre quelles lacunes dans les lois existantes empêchaient de mener des interventions efficaces, et la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée pour combler ces lacunes.
    C'est tout à fait juste. Par exemple, partout au pays, et surtout en Alberta, au Manitoba et à Ottawa, les forces policières avaient de la difficulté à trouver des opérateurs de dépanneuse disposés à les assister pour faire appliquer la Loi. L'abolition de la nécessité d'assermenter des membres de la GRC pour qu'ils puissent prêter main-forte aux policiers d'Ottawa fait partie des mesures expressément recommandées.
    Les décisions concernant les pouvoirs conférés ont-elles été mûrement réfléchies? Y a‑t‑il eu une démarche rigoureuse et ciblée pour déterminer quelles mesures étaient requises pour mettre fin aux blocus et à l'occupation?
    Oui, tout à fait.
    Cette démarche a‑t‑elle été mise au point en collaboration étroite avec les autorités policières, notamment les services de police d'Ottawa, de Windsor, la Police provinciale de l'Ontario et la GRC, pour faire en sorte que le gouvernement fédéral leur confère exactement les pouvoirs dont ils avaient besoin?
    Oui.
    Et il était clair pour eux, si j'en juge par ce qui s'est passé après le 14 octobre, que c'était le cas et que ces pouvoirs étaient suffisants.
    Le gouvernement fédéral a agi dans un contexte considéré comme un état d'urgence, qui exigeait des pouvoirs qui n'existaient pas à l'échelon national. La Loi a été invoquée dans l'espoir que les mesures autorisées mettent fin aux manifestations et empêchent de nouvelles manifestations.
    Avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, avez-vous senti de la frustration au sein de la fonction publique fédérale ou parmi vos autres interlocuteurs devant l'inaction des autorités ou l'incapacité des autres gouvernements, et notamment le gouvernement provincial, de mettre fin à l'occupation?
    Je pense que la population d'Ottawa ressentait beaucoup de frustration. Ailleurs, les gens étaient sur leurs gardes à cause de l'imprévisibilité de la situation. C'est quelque chose que je trouve très important de souligner. Personne ne savait où se produiraient les manifestations. Il était impossible d'obtenir des renseignements, ni par la filière policière ni dans les médias sociaux, qui nous auraient permis de mieux anticiper les événements.
    Des manifestations et des convois de gros camions surgissaient un peu partout et menaçaient l'accès à des infrastructures essentielles. Nous avions des renseignements, mais c'était évident que des choses se tramaient dans l'ombre.

[Français]

     Monsieur Fortin, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie aussi les trois témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Mes questions s'adressent à M. Stewart.
    On a posé la question suivante à d'autres témoins avant vous. Deux décrets secrets ont été adoptés entre la fin de janvier et la fin de février dernier. On se demandait si c'était lié à la situation d'urgence. Êtes-vous au courant de ces deux décrets?

  (2025)  

    Non. Je n'en ai aucune connaissance.
    C'est donc dire que vous ne savez pas ce que cela concerne.
    C'est exact.
    D'accord. Merci.
    J'imagine que vous avez été consulté avant la proclamation de la Loi sur les mesures d'urgence et qu'on vous a consulté, par la suite, sur l'évolution de la situation.
    Oui.
    À votre avis, au moment de la proclamation, y avait-il vraiment une situation d'urgence, telle que définie dans la Loi sur les mesures d'urgence?
    Avoir un avis ne faisait pas partie de mon rôle. Je donne des conseils au ministre.
     Il reste que vous êtes sous-ministre de la Sécurité publique. J'imagine que, à ce titre, vous avez une idée de la façon dont on gère des situations comme celles-là.
    Était-ce la première fois que vous aviez à gérer une telle situation, à savoir des manifestations et l'occupation d'une place publique?
     C'est la première fois que nous avons vu une manifestation aussi sérieuse et aussi longue dans le cadre de laquelle on était incapable d'appliquer la loi.
    À votre avis, n'était-il pas possible de mettre fin à la situation ou même d'empêcher qu'elle se produise en fonction des lois en vigueur au pays, que ce soit le Code criminel, le Code de la route ou toute autre loi en vigueur en Ontario, particulièrement à Ottawa?
    Oui, cela a été fait dans d'autres villes, qui ont tiré des leçons de la situation à Ottawa et qui ont été en mesure de prévenir les occupations.
    Nous avons tous suivi la situation, sans toutefois participer aux décisions, lorsque les policiers ont décidé d'évacuer la rue Wellington. Cela a pris environ trois jours, je crois.
    Les policiers sont arrivés et ils ont évacué tout le monde. Je fais peut-être erreur, mais je n'ai pas eu l'impression qu'on avait eu recours à des pouvoirs particuliers autres que les pouvoirs normaux que tous les policiers ont.
    À votre connaissance, y a-t-il quelque chose qui a été fait à ce moment qui n'aurait pas pu être fait sans la proclamation des mesures d'urgence?
    La proclamation a aidé la police d'Ottawa à prendre des mesures, notamment en ce qui concerne les dépanneuses.
    Le Code de la route de l'Ontario ne prévoit-il pas déjà la possibilité de faire remorquer des véhicules lorsqu'ils entravent la voie publique?
    Oui, mais nous avions besoin de la coopération des conducteurs de dépanneuses.
    Les policiers n'ont-ils pas le pouvoir de forcer les conducteurs de dépanneuses à remorquer des véhicules?
    Non.
    Les forces policières n'ont-elles pas des dépanneuses?
    Cela ne fait-il pas partie des équipements des forces policières?
    Non.
    Aucun policier au Canada n'a le contrôle d'une dépanneuse?
    Je ne le sais pas. À tout le moins, le nombre de dépanneuses n'aurait pas été suffisant.
    Est-ce que cette question a été étudiée avant la proclamation de la situation d'urgence?
    Nous avons consulté toutes les provinces et beaucoup de municipalités.
    N'y a-t-il pas des dépanneuses dans les équipements de l'armée?
    Elle n'a pas suffisamment de dépanneuses du modèle dont on avait besoin.
    Pourtant, lorsque cela a été fait, lorsqu'on a décidé de dégager la rue Wellington, on a trouvé des dépanneuses pour remorquer les camions.
    Était-ce vraiment cela, le problème? A-t-on proclamé la Loi sur les mesures d'urgence uniquement parce qu'on ne trouvait pas de dépanneuses?
    Non, ce n'était pas la seule raison. Il s'agit seulement d'un exemple.
    Quelle situation ne pouvait-on pas régler correctement au moyen des lois en vigueur, dont le Code criminel et le Code de la route?
    Quelles situations ne pouvait-on pas régler avec les outils législatifs qui sont en vigueur?
    Il y en avait quelques-unes. Il était évident que la police avait besoin de plus de pouvoirs. Je vous ai donné un exemple. Il y a aussi l'accès à des ressources supplémentaires. Ici, à Ottawa, nous avons demandé une centaine de policiers.
    De quelles ressources parlez-vous?
    Qu'est-ce qui manquait, à part les dépanneuses, pour mettre fin à la manifestation?
    Je pourrais vous donner d'autres exemples.
    Dans la situation à Ottawa en particulier, mais aussi ailleurs, on avait de la difficulté à décourager ceux qui voulaient participer aux manifestations. Les pouvoirs relatifs aux mesures économiques s'ajoutaient aux pouvoirs des policiers.
    C'était préventif, pour éviter…

  (2030)  

[Traduction]

[Français]

    Merci, monsieur Stewart.

[Traduction]

    Monsieur Fortin, je prends la parole pour les cinq prochaines minutes.
    Monsieur Stewart, je vous remercie de votre franchise et de vos réponses.
    J'aurais des questions au sujet de la chronologie des événements.
    Quand avez-vous réalisé qu'il pourrait y avoir un siège à Ottawa et qu'un convoi de camions s'apprêtait à traverser le Canada?
    Je crois que la mobilisation a commencé à la fin de janvier. Le « convoi de la liberté » s'est mis en branle à ce moment pour prendre d'assaut les routes du pays. Quand il est arrivé à Ottawa peu de temps après, nous avons réalisé qu'il resterait peut-être plus qu'une journée. Au même moment, des frontières ont été bloquées dans l'Ouest du pays.
    Est‑ce que vous avez reçu des rapports du Centre intégré d'évaluation du terrorisme?
    Non. Le Centre surveillait seulement les menaces d'extrémisme violent.
    C'était avant que le convoi arrive à Ottawa… C'était assez prévisible qu'il y resterait.
    Est‑ce que, à mesure que le convoi progressait d'une province à l'autre, vous receviez des comptes rendus sur le nombre de camions qui s'y greffaient?
    Oui.
    Le nombre approximatif de participants était donc connu avant leur arrivée dans la capitale nationale.
    Il était difficile de savoir exactement combien de personnes viendraient à Ottawa. Leur nombre était potentiellement très élevé. Ils ne sont pas tous venus, mais, comme vous le savez, ils étaient quand même très nombreux à Ottawa.
    Des rapports qui ont été rendus publics font état de pourparlers entre la Commission de la capitale nationale et le Service de police d'Ottawa concernant la gestion de la situation et les attentes à ce sujet.
    Êtes-vous au courant de ces pourparlers? Savez-vous de quoi ils ont parlé?
    Vous parlez des discussions entre la CCN et le SPO?
    Je parle de la Commission de la capitale nationale. Je crois qu'ils ont discuté des stationnements, de ce qui pourrait se passer sur la rue Wellington et ce genre de choses.
    Je crois que le gouvernement fédéral et la police d'Ottawa ont discuté de ce qu'elle pourrait faire et des endroits où les gens pourraient…
    Savez-vous sur quoi portaient les discussions avec la police d'Ottawa avant l'arrivée du convoi?
    Non, je ne le sais pas.
    Selon ce que vous avez pu observer... Serait‑il juste de dire que, dès leur arrivée, leur chaîne d'approvisionnement logistique les a placés dans une catégorie à part parmi les activistes antigouvernementaux? Ce n'était certainement pas une manifestation ordinaire. Est‑ce exact?
    Tout à fait exact, et c'est pour cette raison que nous redoutions des débordements violents.
    Est‑ce que cela comprend la distribution de carburant aux camionneurs et la grue avec un boulet de démolition qui a été installée devant le bureau du premier ministre?
    Absolument.
    Aviez-vous déjà assisté à ce genre de choses?
    Non, jamais.
    Précédemment, il a été question… Quand cette même question a été posée au chef intérimaire, il a répondu que ce n'était rien de très anormal ou de très extraordinaire. Franchement, je n'ai jamais rien vu de tel.
    Compte tenu du caractère exceptionnel de la menace, aviez-vous accès aux rapports concernant les pourparlers continus entre la police d'Ottawa et les responsables du convoi et de l'occupation? Saviez-vous qu'ils cherchaient une solution?
    C'est le cours normal des choses.
    Est‑ce que c'est aussi le cours normal d'aider un groupe d'occupants à établir un camp de base non loin de la ville? Est‑ce le cours normal des choses?
    Je ne peux pas répondre à cette question, monsieur. Je crois que la police d'Ottawa...
    Savez-vous que la police d'Ottawa, en négociant avec le convoi, a aidé le convoi à établir un camp de base? Êtes-vous au courant de cela?
    Je pense que oui, à partir bien sûr des sources publiques. Si je devais attribuer une motivation à la police d'Ottawa, c'était la tentative de désamorcer la manifestation dès le départ.
    En leur permettant de s'enraciner dans les chaînes d'approvisionnement?
    Absolument. Cela a tourné d'une façon que personne n'avait prévue.
    Si des gens viennent ici dans le but exprès, en vertu d'un protocole d'entente, de renverser le gouvernement, et que la police d'Ottawa établit un camp de base pour eux à l'extérieur du site et permet à une chaîne d'approvisionnement logistique de se développer — y compris le carburant et la nourriture à destination et en provenance des occupants — ne prévoirait‑on pas qu'ils n'ont aucune intention de partir?
    Je crois qu'au départ, le terrain de baseball du chemin Coventry ne devait servir qu'au stationnement des camions supplémentaires. Je ne crois pas qu'il était prévu qu'ils établissent un camp de base.
    Pourtant, ils l'ont fait.
    Ils l'ont fait.
    Ce terrain appartient à la Ville, n'est‑ce pas?
    Je crois bien, oui.
    La Ville n'avait-elle pas le pouvoir d'expulser les gens d'un camp de base qui alimentait une occupation de trois semaines?

  (2035)  

    Encore une fois, d'après les dossiers publics, je crois qu'ils ont essayé.
    Ils n'ont pas pu le faire.
    C'est exact.
    Lorsque nous parlons de leçons apprises et de la nature imprévisible des choses, le défi que je rencontre est le suivant: en rétrospective, l'évolution de la situation semble être, en grande partie, assez prévisible. Si nous permettons aux camions de se ravitailler en essence, ainsi que de se nourrir et de se loger à l'extérieur, il y a plus de chances qu'ils restent dans les parages.
     Ne convenez-vous pas de cette évaluation, en rétrospective?
    Absolument.
    Ne semble‑t‑il pas logique — sans avoir besoin d'une quelconque expérience spéciale — qu'une telle évolution se produise?
    Je prétends toujours que c'était imprévu et sans précédent, mais maintenant...
    C'est la dernière question.
     Conviendriez-vous qu'il s'agit d'un échec de la police locale à contenir et à dissuader ce qui a été une occupation de trois semaines de la capitale nationale?
    Pour ma part, je qualifierais cela d'une incapacité.
    C'était un échec.
    C'était une incapacité de la police à...
    Quelle est la différence entre incapacité et échec?
    L'échec, c'est la façon dont cela se termine.
    Qu'est‑ce qu'un échec?
    C'est la façon dont cela se termine.
    C'est intéressant.
     J'apprécie votre franchise. Je vous remercie beaucoup.
     Nous passons maintenant la parole à nos dignes sénateurs, en commençant par la sénatrice Boniface.
     Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup d'être ici. Comme l'a dit M. Green, nous apprécions votre franchise sur cette question.
     J'aimerais m'attarder un peu sur le rôle des provinces. En tant que sous-ministre de la Sécurité publique, je suppose que vous travaillez dans le cadre de ce qu'on appelle un processus FPT?
    Oui.
    Je suppose que dans le cadre des processus qui ont eu lieu au cours des semaines qui ont précédé, vous avez eu des échanges avec vos homologues dans les provinces, n'est‑ce pas?
    C'est exact.
     Excusez-moi, c'était moi et d'autres.
    Oui. Je vous remercie. Je suis sûre, pour avoir travaillé au gouvernement à un moment ou à un autre, qu'il y a beaucoup de conversations qui se déroulent à beaucoup de niveaux également.
     Ce qui m'intéresse le plus, et votre collègue du groupe précédent y a également fait référence, ce sont les différences entre la capacité des provinces à déclarer des situations d'urgence et ce que leurs lois sur les mesures d'urgence prévoient en particulier.
     Commençons par l'Ontario, car c'est elle en réalité qui a déclaré l'urgence. Vos discussions auraient-elles eu lieu avec votre homologue de la sécurité publique en Ontario, au niveau du sous-ministre?
    Oui.
    Avez-vous au sein de votre ministère ce que l'on appelle dans diverses provinces un groupe de mesures d'urgence ou des personnes qui s'occupent des urgences qui ne relèvent pas du service de police?
    Absolument, nous en avons.
    Ce portefeuille relève‑t‑il de vous à l'échelle fédérale?
    Oui.
    Pouvez-vous me dire si la même chose existe actuellement en Ontario et si elle aurait également joué un rôle?
    Tel qu'établi, les autorités responsables de la gestion des urgences dans notre gouvernement et dans le gouvernement de l'Ontario jouent principalement un rôle dans la réponse aux désastres naturels. Dans notre cas, le Centre des opérations du gouvernement de Sécurité publique est une unité de coordination et fournit des rapports. Certains des documents que nous fournirons au Comité vous montreront le rôle qu'il a joué pour s'assurer que tout le monde était informé.
    Ni ce centre ni l'Organisation de la gestion des urgences de l'Ontario n'ont joué un rôle actif dans la gestion des blocus.
    Personne du point de vue de l'OGU n'a participé à la discussion.
    Ils étaient au courant. En tant qu'autorité de gestion des urgences moi-même, j'étais là, mais c'était une question de police.
    Je le reconnais. Je comprends le contexte.
     J'essaie simplement de comprendre, lorsque vous créez un décret d'urgence à l'échelle provinciale, et lorsque vous le faites à une plus grande échelle, ce ne sont pas seulement les forces de l'ordre qui transmettent l'information. Je suppose que d'autres organismes au sein de ce qui serait le ministère du Solliciteur général participent généralement à ce processus.
    Oui, absolument. Dans notre cas, il y avait plusieurs organismes.
    Pour faire suite à la question de M. Green, en ce qui concerne le rôle de la police d'Ottawa et la façon dont celle‑ci a pu ou n'a pas pu évaluer la situation, elle serait probablement le meilleur témoin pour nous le dire, étant donné qu'elle aurait toute l'information, y compris l'information sur laquelle elle s'est appuyée au jour le jour.
    Oui. Je suis d'accord.
    En ce qui concerne le décret d'urgence en Ontario, par exemple, si vous comparez le pouvoir du décret provincial, à bien y penser, voyez-vous un écart entre le pouvoir d'urgence des décrets provinciaux et celui des décrets fédéraux?
     Dans l'optique d'un processus FPT, est‑ce que vous examineriez cette question pour l'avenir, la façon dont ils se relient ou créent des écarts entre les échelons?

  (2040)  

    Oui. Je crois que cette expérience nous a donné à tous des raisons de repenser la structure et la nature de nos lois d'urgence.
    C'est parce que, selon une partie de ce que vous avez dit, la conception vise les catastrophes naturelles et non l'ordre public.
    Les structures au sein du gouvernement sont davantage destinées à cela. Les lois d'urgence sont probablement un peu plus génériques quant à la façon dont elles pourraient être appliquées en tant que lois.
    Il est clair que la province a estimé que cela dépassait ses pouvoirs en tant que province, malgré le fait qu'il existe un service de police provincial et une multitude de forces municipales dans la province.
    Le décret d'urgence en Ontario — qui a évidemment été invoqué peu avant le décret fédéral — visait principalement à dégager les infrastructures essentielles. J'ai noté que nous avons constaté dans la loi que nous n'avons pas assez de pouvoir pour protéger les infrastructures essentielles.
    C'est vrai, mais pour protéger les infrastructures essentielles, il faudrait que les services policiers aient un certain pouvoir pour que cela puisse se faire. Est‑ce ainsi que vous voyez les choses, en ce qui concerne le pouvoir?
    Dans l'éventualité... mais il y a aussi la question de la dissuasion.
    Merci.
    Je vous remercie.
     Nous passons maintenant à M. Carignan.

[Français]

     Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Ma question va porter sur le blocage qui a eu lieu sur le pont Ambassador. Le président des États‑Unis a appelé le premier ministre du Canada quelques jours avant l'ouverture du pont.
    Cette demande du président des États‑Unis s'est-elle rendue à vos oreilles?
    Non, mais nous avons discuté avec des gens du gouvernement américain.
    D'accord. Qu'est-ce qu'ils vous ont demandé?
    Ils n'ont rien demandé. Ils ont offert du soutien pour...
    Qu'ont-ils offert?
    Ils ont offert des dépanneuses.
    D'accord. Les avez-vous acceptées?
    Oui, je crois, mais je ne connais pas les détails du processus pour mettre fin à la manifestation.
    D'accord.
    Ont-ils offert des dépanneuses parce que le premier ministre du Canada aurait dit au président des États‑Unis que notre problème était que nous n'en avions pas?
    Le problème était que nous n'étions pas capables de déplacer toutes les personnes et tous les camions.
    D'accord. Les États‑Unis vous ont offert des dépanneuses.
     Oui.
    S'agissait-il de dépanneuses américaines qui sont venues remorquer des véhicules canadiens?
    Oui.
    D'accord. Toutefois, à ce moment-là, la Loi sur les mesures d'urgence n'avait pas encore été invoquée.
    Non.
    D'accord.
    À part la question des dépanneuses, avez-vous participé au processus décisionnel pour rouvrir le pont Ambassador?
    Non. C'était une opération policière.
    De quelle police s'agissait-il?
    C'était la Police provinciale de l'Ontario.
    D'accord.
    A-t-elle travaillé avec le service de police de Windsor?
    Oui.
    A-t-elle travaillé avec la GRC?
    Non.
    La GRC n'a-t-elle pas été impliquée?
    Un peu, oui. Nous avons reçu une demande d'aide de la part du maire de Windsor, mais je crois que la plupart des agents de police qui ont participé à l'opération faisaient partie de la Police provinciale de l'Ontario.
    D'accord.
    Le démantèlement s'est-il bien passé?
    Je crois que oui.
    Quelle est la différence entre l'opération qui consistait à rouvrir le pont Ambassador et celle qui a eu lieu ici pour débloquer, pour ainsi dire, la rue Wellington, à part l'appel du président des États‑Unis et le fait qu'il s'agissait d'un pont international?

  (2045)  

    Vous voulez savoir la différence...
    Oui. Sauf le recours aux dépanneuses américaines qui sont venues remorquer les camions, quels étaient les différents pouvoirs qui ont permis de régler la situation là-bas et qui ne pouvaient pas être exercés sur la rue Wellington? D'ailleurs, je ne peux toujours pas croire que le Canada ait demandé l'aide de dépanneuses américaines, mais cela semble être la réalité. Je comprends que, sur la rue Wellington, il y avait des barbecues, et même un spa à déplacer, et que cela pouvait exiger des moyens différents sur le plan logistique.
    Qu'y avait-il de différent dans le cas du pont Ambassador?
    Je ne suis pas un expert des opérations policières, je suis un fonctionnaire. Je crois que la manifestation à Ottawa était d'une plus grande ampleur et qu'on avait besoin de plus de pouvoirs et d'outils pour déplacer toutes les personnes et les camions.
    De quels outils parlez-vous?
    Je parle de dépanneuses canadiennes et de plus de 2 000 policiers.
    Cela n'est pas un problème, par contre. On n'a pas besoin de la Loi sur les mesures d'urgence pour avoir plus de policiers.
    Vous rappelez-vous combien de policiers vous aviez au Sommet des Amériques? Il y en avait beaucoup plus.
     Ici, la question était de rassembler les ressources policières afin d'exécuter le plan qui avait été établi par la police d'Ottawa. Cela a exigé le déplacement de plusieurs membres de la Gendarmerie royale du Canada vers Ottawa. Il fallait que ce soit fait assez rapidement, ce qui est presque toujours un problème...
    D'accord, mais la Loi sur les mesures d'urgence n'offrait rien de supplémentaire...

[Traduction]

[Français]

    M. Fortin a été gentil avec vous.

[Traduction]

    Ce n'est pas une série différente de cinq minutes, malheureusement.
     Nous passons maintenant au sénateur Harder.
     Sénateur Harder, vous avez cinq minutes, monsieur. À vous la parole.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Sous-ministre Stewart et fonctionnaires, bienvenue. Nous vous remercions de votre témoignage ici, ce soir.
    J'aimerais revenir sur certaines des questions posées par M. Green concernant votre point de vue sur les événements qui ont mené à la déclaration des mesures d'urgence.
     Plus tôt ce soir, nous avons entendu votre collègue, le sous-ministre Daigle, dire que les événements ont dépassé la capacité des autorités en place à ce moment‑là. Il en est question à l'article 58 de la mesure elle-même.
    Quand avez-vous conclu avec vos collègues qu'il s'agissait en quelque sorte d'un jugement collectif sur l'évolution de la situation dans ce que vous décrivez comme un ensemble de circonstances sans précédent et imprévisibles?
    Quand en sommes-nous arrivés à ce point de vue?
    Était‑ce le jour de la Saint-Valentin ou quelque temps avant?
    C'était avant la Saint-Valentin.
     Au cours de nos consultations avec nos collègues fédéraux et provinciaux et avec les services de police compétents, nous avons constaté que, dans certaines circonstances, il était très difficile de faire respecter la loi. Cela concernait le nombre de personnes disponibles pour le faire et, par conséquent, leur capacité à appliquer les lois et les règlements.
     Nous avons également pris conscience, et je l'ai déjà mentionné, de la nature évolutive de la protestation, y compris la possibilité de nouveaux blocus. La loi avait, en partie, comme je l'ai dit, pour objectif d'éviter que de tels blocages se créent.
    Nous parlerons de l'invocation elle-même, mais les jours précédents, alors que la ville invoquait ses mesures d'urgence en Ontario, avez-vous eu des conversations avec vos homologues pour les inciter à invoquer ces mesures d'urgence?
    Oui.
    Si je peux me permettre de poser une question plus provocatrice, pourquoi avez-vous mis tant de temps à invoquer les mesures d'urgence à l'échelle nationale? Il était clair pour ceux d'entre nous qui observaient la situation au jour le jour, y compris vous-même, ... C'était presque deux semaines de circonstances observées où la capacité de la police à maintenir l'ordre et à réduire l'occupation était dépassée.
    Je suis tenté de dire que je crois que nous aurions été interrogés de façon plus agressive si nous l'avions fait plus tôt, mais le fait est qu'il a fallu du temps pour arriver à une évaluation complète de la situation.
    Bien, et pendant que vous travailliez du 14 au 23 février dans l'évaluation quotidienne — et je suis sûr que c'était plusieurs fois par jour — de l'évolution de la situation, est‑ce que quelque chose vous a amené à conclure que les mesures d'urgence ne fonctionnaient pas comme vous l'aviez prévu? Y a‑t‑il eu des surprises dans le fonctionnement des mesures d'urgence elles-mêmes?

  (2050)  

    Il y a certainement eu des difficultés au niveau de la mise en oeuvre des mesures économiques, où il y a eu beaucoup de malentendus sur ce qu'elles étaient censées faire et comment elles allaient fonctionner. C'était inattendu. Sinon, je pense que c'est le contraire. Nous avons eu la chance que certains des blocus à la frontière se sont résolus au même moment. Au fur et à mesure, la situation s'est calmée assez rapidement.
    Oui, je partage cette observation.
     J'ai l'impression que, jusqu'à l'invocation des mesures d'urgence fédérales, les actions de la police étaient — j'utiliserais l'expression — un échec, et j'ai été impressionné par la rapidité avec laquelle, une fois l'invocation faite, les actions de la police ont été exemplaires quant à la façon de gérer une occupation à grande échelle.
     Le contraste entre le jour et la nuit de l'opération telle que nous l'avons vue se dérouler ici à Ottawa, du moins, me laisse perplexe.
    Je dirais que l'opération a été étonnamment pacifique alors que nous craignions qu'elle ne devienne violente. J'attribue cela en partie au fait que la Loi dissuadait les gens de se joindre à la manifestation.
    Pendant que vous travailliez ces jours‑là, vous n'étiez pas certains du moment où la révocation aurait lieu. La révocation a‑t‑elle été mise en oeuvre dès que les professionnels qui géraient l'opération ont estimé qu'elle pouvait l'être, ou avez-vous subi des pressions le faire plus vite?
    Je ne peux pas parler de la décision elle-même, mais je peux vous dire que l'avis était que la Loi n'était plus nécessaire.
    La décision a‑t‑elle été prise dès que cet avis a été prononcé?
    Peu de temps après.
    Merci. Vous avez réussi à glisser quelques..., mais vous cédez du temps fréquemment aussi.
     Nous passons maintenant au sénateur Campbell, qui est en ligne.
     Sénateur Campbell, vous avez cinq minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président. Je tiens à remercier le témoin d'être venu aujourd'hui.
     J'aimerais revenir sur l'incapacité qui a conduit à un échec de la part de la police. Si je peux me le permettre, depuis combien de temps occupez-vous votre poste et travaillez-vous pour le ministère de la Justice?
    Je travaille pour la Sécurité publique, monsieur, et j'occupe ce poste depuis deux ans et demi.
    D'accord, vous avez donc une certaine expérience dans ce domaine.
     Nous entendons continuellement, par exemple, que cette loi a été invoquée parce que la police ne pouvait pas contrôler une situation où il y avait des enfants. Savez-vous que la police se retrouve pratiquement tous les jours dans ce pays dans une situation où des enfants sont impliqués et où elle doit faire appel à des ressources qui ne font pas partie des forces policières, comme des travailleurs sociaux?
    Je suis au courant de cela, monsieur. Dans le cas d'Ottawa, la Société d'aide à l'enfance était prête à intervenir.
    Le témoin précédent a dit que nous ne pouvions pas agir ici parce que c'était une situation dangereuse et qu'il y avait des enfants en jeu. Je pense vraiment que c'est un faux-fuyant.
     Passons à autre chose: les remorqueuses. La police n'a généralement pas de remorqueuses. Elle a des contrats avec des entreprises de remorquage et je dirais qu'à Ottawa, ces contrats sont probablement de l'ordre du million de dollars. Légalement parlant et en tant que membre de la Sécurité publique, ne diriez-vous pas que le contrat des remorqueuses est exécutoire, de sorte qu'ils ne peuvent pas refuser d'envoyer des remorqueuses dans une situation où elles sont nécessaires?

  (2055)  

    Ce n'est pas seulement ici à Ottawa, mais ailleurs.
    Vous me dites que si, en tant que chef de police, je téléphone à l'entreprise de remorquage et que je lui dis: « Si vous ne faites pas cela, nous annulons votre contrat et n'essayez pas d'en demander un autre », l'entreprise de remorquage n'interviendra pas?
    C'est une hypothèse, monsieur. Je dirais que ce que nous savions et ce que la GRC, en tant que police contractuelle en Alberta, savait, c'est que les conducteurs de remorqueuses qu'elle avait à titre contractuel ne feraient pas le travail.
    D'accord. Dernière question, êtes-vous déjà allé à Petawawa?
    Oui.
    Avez-vous déjà vu l'équipement lourd qu'ils ont là‑bas pour déplacer les réservoirs et les véhicules lourds? Ils ont essentiellement une division d'ingénierie là‑bas. Avez-vous vu cela?
    Non, mais je pense que je vois ce que vous voulez dire.
    Pourquoi n'a‑t‑on pas fait appel à eux?
    Il y a eu une demande d'aide du gouvernement de l'Alberta pour la capacité de remorquage des Forces armées canadiennes, et elle a été refusée parce que l'Alberta n'avait pas utilisé pleinement sa propre capacité de remorquage et que l'équipement des FAC endommagerait les camions.
    Cela est‑il le moindrement logique pour vous? Ces gens enfreignent la loi. Nous sommes dans une situation où il y a des armes à feu. Le gouvernement envisage un décret d'urgence, et nous permettons à quelqu'un de nous dire, à nos militaires de nous dire qu'ils n'y vont pas parce qu'ils pensent que la province n'a pas utilisé ses ressources. Est‑ce là le pays dans lequel nous vivons? La police ne peut pas faire son travail, et l'armée ne peut pas faire le sien. Pouvez-vous répondre à cela?
    Je ne vois pas les choses de la même façon que vous, monsieur. Je pense que, dans les circonstances, l'intervention de l'armée aurait été inappropriée et insuffisante. Ce dont nous avions besoin à la frontière de Coutts, c'était des dizaines de remorqueuses pour des centaines de camions.
    D'accord. Oubliez la frontière à Coutts. Que diriez-vous de Petawawa? C'est juste au coin de la rue.
    En fait, la demande concernait les camions qui se trouvent à la base dans l'Ouest.
    Je ne parle pas de la base de l'Ouest. Nous parlons d'Ottawa, la capitale nationale, assiégée, et nous ne pouvons pas faire venir des remorqueuses militaires pour remorquer de gros camions parce que nous avons peur qu'ils soient endommagés. Êtes-vous sérieux?
    Je vous dis ce qui s'est passé.
    Merci, monsieur le président.
    Merci beaucoup.
     Nous commençons maintenant la deuxième série. Il y aura un tour de quatre minutes pour les conservateurs et les libéraux, suivi de tours de trois minutes.
     Nous allons commencer par M. Brock.
     Monsieur Brock, vous avez quatre minutes, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
     Je remercie les témoins.
     Monsieur Stewart, je commencerai par dire que, pour reprendre les paroles de Perrin Beatty, des pouvoirs extraordinaires exigent une responsabilité gouvernementale extraordinaire. Avec tout le respect que je vous dois, monsieur, aux questions que vous a posées mon collègue, M. Motz, je n'accepte pas votre réponse selon laquelle le ministre Mendicino n'a pas utilisé ses mots de façon appropriée, lorsqu'il a déclaré publiquement que les forces de l'ordre ont demandé le recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Votre réponse est qu'il a choisi les mauvais mots, ou qu'il a été mal compris.
     Le ministre Mendicino est un haut fonctionnaire du gouvernement. Il a longtemps été député. Il est avocat. Les mots comptent. Il a pris la parole à la Chambre à de nombreuses reprises. Il a prononcé des discours à la Chambre à de nombreuses reprises. Il a répondu à des questions, a fait des communiqués de presse et est passé à la télévision. Chaque fois qu'il l'a fait, M. Stewart, il a été cohérent dans son message voulant que les forces de l'ordre ont réclamé la Loi sur les mesures d'urgence. Ce n'est que lorsque les forces de l'ordre, témoignant devant ce comité et d'autres comités, ont carrément réfuté cette déclaration que nous avons entendu un changement de la part du ministre Mendicino, qui a déclaré qu'il consultait les forces de l'ordre.
     Ma question est la suivante: étiez-vous, vous-même, responsable, ou des membres de votre bureau étaient-ils responsables de donner au ministre Mendicino ces mots voulant que les forces de l'ordre avaient demandé la Loi sur les mesures d'urgence à plusieurs reprises?
    Nous ne disons pas au ministre ce qu'il doit dire, monsieur.
    Qui le fait?
    Le ministre parle pour lui-même.
    Le ministre prépare ses propres notes.
    Je crois qu'il a été mal compris, parce que lorsque vous dites « sur le conseil des forces de l'ordre », le conseil ne doit pas nécessairement être de les interroger sur la Loi...
    Ce n'était pas sur le conseil. Écoutez ma question très attentivement. Il a déclaré — je n'ai pas le temps de répéter textuellement ce qu'il a déclaré — qu'ils ont demandé, les forces de l'ordre ont demandé la Loi sur les mesures d'urgence. Ce n'est pas que les forces de l'ordre ont consulté le gouvernement comme une option pour faire face à la protestation, pour parler de l'invocation de la Loi. Il a dit qu'ils l'avaient demandé.
     Si vous saviez qu'il interprétait mal ces mots, pourquoi n'avez-vous pas informé le ministre Mendicino pour qu'il éclaircisse cela à la Chambre ou auprès du public?

  (2100)  

    Je suis au service du ministre, et je n'ai pas le droit de parler des conseils que je lui donne, mais je peux vous dire qu'à mon avis, il a été mal compris. Je crois que l'intention qu'il essayait d'exprimer était que les forces de l'ordre ont demandé les outils qui sont compris dans la Loi sur les mesures d'urgence.
    Ce n'est pas seulement le ministre Mendicino qui a été mal interprété ou mal compris. C'était le premier ministre. C'était le ministre Blair. C'était le ministre Lametti. Ce sont probablement tous les membres du caucus libéral qui ont utilisé le même argument selon lequel les forces de l'ordre l'ont demandé.
     Est‑ce que tout le gouvernement a été mal compris, monsieur Stewart? Les Canadiens veulent de la transparence ici. Qui donne des directives au gouvernement si ce n'est pas votre ministère?
    Le...
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je pense que ce témoin est ici pour témoigner au sujet de la sécurité publique et des conseils qu'il aurait donnés au ministre Mendicino...
    Il a la capacité de répondre aux questions. Il l'a fait de façon très compétente tout au long de la réunion.
    Je ne pense pas que cette question soit pertinente du point de vue de son expertise.
    Je la juge recevable. Il peut répondre à la question.
    La fonction publique ne donne pas de directives au gouvernement, monsieur.
    Merci, monsieur Stewart.
     Nous allons maintenant passer à Mme Bendayan pour quatre minutes.
     Madame Bendayan, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec M. Virani.
     Monsieur Stewart, je vais passer rapidement en revue un certain nombre de questions. Premièrement, savez-vous que la GRC a exécuté un mandat de perquisition le matin du 14 février et a saisi à la frontière de Coutts 13 armes d'épaule, plusieurs armes de poing et des ensembles de gilets pare-balles, une machette, une grande quantité de munitions et des chargeurs à grande capacité?
    Oui.
    Savez-vous que des menaces ont été portées à la connaissance de la GRC quelques jours avant les manifestations à Coutts, en Alberta, et que l'enquête était en cours depuis un certain temps avant que le mandat de perquisition ne soit délivré le 14 février?
    Je ne peux pas parler des détails. Je ne crois pas qu'ils étaient au courant depuis très longtemps avant d'exécuter le mandat de perquisition.
    Je crois que l'enquête est en cours, mais j'aimerais vous demander si vous êtes au courant d'un lien quelconque entre ce groupe lourdement armé à Coutts, en Alberta, et d'autres participants aux blocus ou manifestants pendant cette période.
    Nous n'avons pas trouvé de lien direct. On a estimé qu'ils étaient membres d'un groupe particulier d'extrémisme violent à caractère idéologique appelé Diagolon, et il y a d'autres membres de Diagolon dans le pays.
    Pouvez-vous confirmer que l'enquête est en cours et que nous attendons les résultats de cette enquête?
    Non, je ne peux pas. C'est à la GRC d'en parler.
    Merci beaucoup.
     Le 11 février, les États-Unis, en particulier l'administration Biden, ont offert l'aide de Homeland Security pour mettre fin au blocus sur le pont Ambassador et aux autres manifestations à la frontière. Ce sujet a été abordé pour la première fois par le sénateur Carignan.
     En tant que responsable de la Sécurité publique pour le gouvernement fédéral du Canada, pouvez-vous nous dire s'il y a jamais eu un autre pays qui a fait une telle offre?
    Nous avons une relation de travail étroite avec les Américains. Selon la situation, nous nous offrons mutuellement de l'aide. Ce n'est pas rare.
    Madame Bendayan, je vous signale simplement qu'il reste deux minutes. Si vous voulez continuer, c'est sur votre temps.
    Merci beaucoup. Je passe à M. Virani.
    Merci, monsieur le sous-ministre. Je vais moi aussi aller rapidement.
     En réponse à M. Naqvi, vous avez dit que le remorquage fait partie du décret que nous examinons. L'idée du remorquage vous a été donnée par les personnes que vous avez consultées, y compris les forces de l'ordre. Est‑ce bien cela?
    C'est exact.
    Certaines entreprises de remorquage de cette ville recevaient en fait des menaces de mort si elles osaient remorquer certains des camions immobilisés. Est‑ce exact?

  (2105)  

    Je ne peux pas dire que c'est un fait.
    D'accord. Dans la déclaration de la Chambre des communes, à l'article 58, il est question de menaces de mort proférées.
    D'accord.
    Des agents ont été fournis, mais cet outil — la Loi sur les mesures d'urgence — vous a donné la possibilité d'assermenter ces agents très rapidement. Au lieu de prendre des jours, il fallait quelques minutes pour les assermenter en masse.
    C'est exact.
    M. Green vous avait parlé de l'idée concernant les chaînes d'approvisionnement. Un autre élément, que vous n'avez pas abordé avec M. Naqvi, je crois, est que les pouvoirs conférés par la Loi sur les mesures d'urgence vous permettent non seulement de geler des actifs, mais aussi de perturber les chaînes d'approvisionnement en empêchant les gens de fournir du carburant aux camions arrêtés au ralenti devant le Parlement.
    C'est exact.
    Cela a également donné au gouvernement la capacité d'arrêter le flux de personnes venant ici pour manifester, pas seulement dans cette région, mais aussi dans tout le pays, y compris les personnes qui auraient pu participer à l'insurrection du 6 janvier aux États-Unis.
    C'est exact.
    Cela a donné la possibilité, du point de vue de l'application de la Loi, de réduire le nombre de personnes qui participent effectivement au blocus illégal, ce qui vous permet d'avoir une approche logistique plus raisonnée et pragmatique. Vous savez combien de personnes sont présentes. Par conséquent, vous savez de combien d'agents vous avez besoin pour exécuter un démantèlement sûr et non violent du blocus. Est‑ce bien cela?
    Oui. En effet, certains des camions ont quitté Ottawa après que les ordonnances financières ont été mises place.
    C'est tout le temps que vous avez.
    Merci.
    Nous passons maintenant à M. Fortin pour trois minutes.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je vais encore m'adresser à vous, monsieur Stewart.
    J'ai entendu ce que vous avez dit sur la question des dépanneuses. Si je comprends bien, leurs contrats leur permettent de refuser ou de ne pas refuser — ce point n'est pas clair — de faire le travail. Chose certaine, cependant, ils l'ont fait.
    À votre connaissance, ces remorqueurs ont-ils fait l'objet de sanctions comme une annulation de contrats, une mise à l'amende ou d'autres pénalités?
    Je ne suis aucunement au courant de cela.
    Savez-vous si les dépanneuses qui ont remorqué les camions étaient bien canadiennes?
    Oui.
    Combien de dépanneuses y avait-il, à votre connaissance?
    Je ne le sais pas.
    Avez-vous signé un document quelconque pour ordonner aux dépanneuses de venir sur la rue Wellington remorquer les camions?
    Voulez-vous savoir si je l'ai fait moi-même?
    La réponse est non.
    Avez-vous vu de tels ordres émanant d'un policier ou d'une autre autorité?
    Non.
    Si je comprends bien, vous n'êtes pas en mesure de me dire en vertu de quel ordre, de quelle injonction ou de quel dispositif légal les dépanneuses ont décidé, ce matin-là, de remorquer les camions.
     J'ai seulement le témoignage de la police.
     Qu'est-ce que les policiers vous ont dit?
    Ils m'ont confirmé que c'était le cas. L'ordre leur donnait le pouvoir de...
    Qui a ordonné aux dépanneuses de remorquer les camions?
    La commissaire de la Gendarmerie royale du Canada nous a...
    Il s'agit de Mme Lucki, si ma mémoire est bonne.
    Est-ce Mme Lucki qui a donné l'ordre aux dépanneuses de venir remorquer les camions?
    Non, mais elle savait que quelqu'un dans la police en avait donné l'ordre.
    Selon vous, cela n'aurait-il pas pu être fait avant la proclamation?
    Non.
    Comme je l'ai dit, selon ce que je sais, les camionneurs ont refusé de déplacer leurs véhicules. C'était impossible de les...
    Si, demain matin, des camionneurs décidaient de revenir à Ottawa et de bloquer la rue Wellington et s'il y avait d'autres manifestations où se trouvent des enfants, on serait encore obligés d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Ai-je bien compris?
    Non.
    Que ferait-on différemment?
    La première mesure que l'on prendrait serait d'empêcher la manifestation.
    Pourquoi ne l'a-t-on pas empêchée, en février dernier?
    C'est tout simplement parce qu'elle était imprévue.
    Elle était prévue; elle a été annoncée à l'avance.
    Tout le monde savait que des centaines, voire des milliers, de camions étaient en route vers Ottawa.

[Traduction]

    Merci, monsieur Fortin.

[Français]

    M'avez-vous dit que mon temps de parole était terminé?

[Traduction]

    Oui, et je vous cède la présidence.
    Pour mon intervention, monsieur le président, je suis heureux de concéder mon temps de parole après avoir présenté la motion, dont l'avis a été donné. Je propose:
Que, à la lumière de rapports récents selon lesquels de nombreux décrets secrets ont été adoptés, ce comité exige la production de tous les décrets secrets adoptés en rapport avec les occupations de convois et les blocages à travers le Canada, l'invocation et/ou la révocation de la Loi sur les mesures d'urgence, et que la documentation soit fournie au comité dans les 30 jours suivant l'adoption de cette motion.

  (2110)  

[Français]

    Souhaitez-vous présenter cette motion maintenant, monsieur Green?

[Traduction]

    Je dépose ma motion pendant mon temps de parole. C'est exact.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais que mon nom figure sur la liste des intervenants.
    Oui, madame Bendayan.
    Est-ce que M. Green a terminé?
    Je pense que oui.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais proposer un amendement à la motion de M. Green.
    Je veux clarifier quelque chose.
    Si j'ai bien compris, M. Green renonce à son temps de parole de trois minutes; il ne veut pas poser de questions au témoin.
    Il n'y a pas de trois minutes...
    Il renonce à son temps de parole de trois minutes et souhaite présenter sa motion.

[Traduction]

    On perd le son.
    Sénateur, le président ne fait que consulter le greffier sur une question de procédure.

[Français]

    Monsieur Green, je retiens le fait que vous voulez présenter une motion et que Mme Bendayan souhaite intervenir.
    Je vais demander aux membres du Comité s'ils sont d'accord pour continuer le tour de questions, sachant que M. Green ne posera pas de questions. Après le tour de questions, M. Green pourra présenter sa motion. Ainsi, nous allons pouvoir libérer les témoins au moment où nous allons débattre de la motion, ce qui peut prendre un certain temps.

[Traduction]

    Respectueusement, j'invoque le Règlement, cette directive n'est pas recevable. Je suis dûment habilité, étant donné l'avis de motion. La motion a été présentée en bonne et due forme. Elle est recevable. J'ai le temps. Je suis en mesure de le faire. Je propose la motion.

[Français]

     Je suis d'accord avec vous, monsieur Green.

[Traduction]

    Monsieur le président, pourrais‑je...

[Français]

    Attendez un instant, monsieur Campbell.
     Monsieur Green, je comprends que vous voulez présenter votre motion. Ce que je demande aux membres du Comité, c'est s'ils veulent que vous le fassiez maintenant ou s'ils veulent que nous terminions le tour de questions. Je crois qu'il restait trois...

[Traduction]

    Il y a une motion à l'étude, respectueusement, monsieur le président. La motion est à l'étude.

[Français]

    Je comprends que vous vous opposez à ce que nous terminions la ronde de questions, mais je pose la question aux membres du Comité.
    Est-ce que les membres souhaitent que nous terminions les trois dernières questions des sénateurs avant de discuter de la motion de M. Green ou ils préfèrent que nous en discutions tout de suite?

[Traduction]

    Toute cette intervention n'a fait que prendre le temps qu'elle aurait pu être adoptée.

[Français]

    Je comprends, monsieur Green, que vous vous objectez à ce que nous continuions le tour de questions. Vous souhaitez présenter la motion tout de suite.

[Traduction]

    Oui, la motion a été présentée.

[Français]

    Comme il n'y a pas de consentement unanime, nous allons étudier la motion de M. Green. Or il est possible que les trois minutes de temps de parole des trois sénateurs ne soient pas utilisées.
    Monsieur Green, j'ai bien compris.
    Je crois que c'était au tour de Mme Bendayan de discuter de votre motion.
    Je serai très brève, monsieur le président.
    Je remercie tous les gens de leur patience.
    Je propose d'amender la motion de M. Green en ajoutant « dans le cas où ils existeraient » à la toute fin de la phrase.
    Je vais lire mon amendement en anglais.

[Traduction]

    À la toute fin de la phrase qui vous est présentée, mesdames et messieurs, je propose de modifier la motion en ajoutant les mots « s'ils existent ». La raison de cet amendement est que, comme nous l'avons entendu dans le témoignage du sous-ministre de la Justice ce soir au cours de la réunion, il n'existe pas de tels décrets secrets. C'est son témoignage, et la motion, dans sa formulation actuelle, présuppose l'existence de décrets secrets.
     Nous sommes heureux de voter pour la motion et d'obtenir une réponse officielle à la question. Toutefois, nous demandons que l'amendement soit ajouté afin que nous ne présumions pas de l'existence de tels documents.

  (2115)  

[Français]

    Selon la liste des intervenants, seuls MM. Campbell et Carignan veulent revenir là-dessus.
    Avant que je continue, monsieur Green, faites juste me dire si vous accepteriez...

[Traduction]

    Je n'ai pas à accepter. L'amendement a été déposé. Il est recevable.

[Français]

    Acceptez-vous la proposition d'amendement?

[Traduction]

[Français]

    Nous allons donc continuer de débattre de la motion de M. Green, telle qu'amendée par Mme Bendayan. Cela convient-il à tout le monde?
    Monsieur Campbell, vous avez la parole.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
     C'est bon. Vous avez répondu à ma question. Je vous en suis reconnaissant, et je suis désolé de vous avoir interrompu.
     Je vous remercie.

[Français]

    Merci, monsieur Campbell.
    Je donne maintenant la parole au sénateur Carignan.
    Je voulais juste préciser que nous sommes le mardi 7 juin 2022.
    L'avis a été donné le vendredi 3 juin 2022.
    C'est cela. Aujourd'hui, c'est la première fois que nous en prenons connaissance.
    L'avis de la motion a été déposé le vendredi 3 juin.
    Or la motion est présentée maintenant.
    Elle est présentée...
    La motion est présentée aujourd'hui, mais on l'a fait circuler vendredi.
    La date de l'avis de la motion est le 3 juin.
    D'accord.
    Est-ce que ça va?
    Je donne la parole à M. Virani. Par la suite, ce sera au tour de M. Motz.

[Traduction]

    J'ai deux remarques. Si des ordres secrets ont été adoptés, ils auraient dû être déposés auprès de ce comité en vertu de la Loi dans les deux jours suivant leur adoption en secret, et il aurait fallu que ce comité siège à huis clos. Je pense que cela souligne le fait que ces choses n'existent pas. J'aimerais que les gens y réfléchissent.

[Français]

    Comme il n'y a pas d'autres intervenants, nous allons mettre aux voix la motion de M. Green.
    Monsieur le greffier, voulez-vous procéder à l'appel nominal?
    Va-t-on mettre aux voix la motion telle qu'amendée, monsieur le président?
    Oui, la motion, amendée par Mme Bendayan, est mise aux voix.
    Voulez-vous que je la lise?

[Traduction]

    Je l'ai lu dans le compte rendu lorsque je l'ai proposé.

[Français]

    Dans ce cas, monsieur le greffier, vous pouvez passer au vote par appel nominal.
    Une voix: Il y a unanimité.
    Le coprésident: C'est parfait.
    (La motion modifiée est adoptée à l'unanimité.)
    Le coprésident: Monsieur Green, je vous rends la présidence de la séance.

[Traduction]

    Je vous remercie. Je vais reprendre le fauteuil.
     Je vais céder mon temps de parole même si, sur le plan de la procédure, je ne suis pas tenu de le faire. Je l'ai fait un peu par courtoisie, en espérant que nous aurions pu passer rapidement. Je m'en excuse. Cela a peut-être pris plus de temps que nécessaire, compte tenu des invités.
     Nous allons passer à la sénatrice Boniface pour trois minutes.
     J'aimerais revenir sur certaines des questions concernant les remorqueuses. Je comprends que vous ne participiez pas aux opérations, mais que vous recevriez de l'information.
     D'après ce que j'ai compris en observant la situation, il ne s'agissait pas seulement de quelques remorqueuses. Il y avait beaucoup de remorqueuses. Du point de vue opérationnel de la police, l'opération devrait être menée en tandem avec un certain nombre de camions. Ce n'est pas aussi simple, comme je l'ai observé, que d'avoir besoin d'un camion à la fois pour agir et sortir.
     Je suppose que lors de vos séances d'information, vous avez eu — de la part de la GRC et d'autres organismes — une idée de la complexité du type d'opération qui serait nécessaire. Ai‑je raison?
    Oui, vous avez raison dans le sens général. Nous n'étions pas au courant, bien sûr, des plans de la police ou du nombre de remorqueuses dont elle avait besoin, mais nous savions très bien qu'il en fallait beaucoup.
    Pouvez-vous me parler du rôle de l'ASFC à mesure que les choses avançaient? Je suppose qu'elle relève de votre portefeuille.
    L'Agence a participé activement à ces consultations. Elle a participé activement à la surveillance des frontières, évidemment, et elle a donné des conseils sur les convois au fur et à mesure de leur apparition.
    Je suppose que l'ASFC a également un rôle à jouer dans le partage de l'information avec les organismes d'application de la loi, et qu'au moins une partie de l'information provient de ses propres sources. Est‑ce exact?
    Absolument. Ses gens travaillent en étroite collaboration avec les services de police compétents, et les services de police compétents travaillent ensemble pour recueillir des renseignements.
    En ce qui concerne la partie de l'ordonnance qui portait sur les personnes venant de l'extérieur du pays pour le convoi, je suppose que certains de ces renseignements ont été transmis à l'ASFC ou portés à son attention. Est‑ce exact?
    Dans la mesure où la police les connaissait, oui.
    Ils ont pu le découvrir eux-mêmes, cependant, en les interrogeant à la frontière.
    Bien sûr, vous avez mis le doigt sur ce que je voulais dire. Je vous remercie.
     Particulièrement vers la fin de la manifestation pour les gens qui vivaient ici à Ottawa — et je pense que M. Naqvi en a parlé —, nous avons commencé à voir, si je me souviens bien, des contre-manifestations, ce qui, à mon avis, aurait rendu la gestion de l'événement beaucoup plus difficile du point de vue de la police.

  (2120)  

    C'est peut-être le cas. Je n'ai pas reçu cette information. Il y avait la possibilité d'affrontement avec les contre-manifestations, mais je crois qu'elles ont été séparées.
    Oui, mais si l'on se projette dans l'avenir, je pense — et je vais poser la question à la police parce que, comme vous l'avez indiqué, c'est une opération qu'elle connaît — que si vous attirez l'un contre l'autre des gens aux opinions opposées, vous risquez certainement de vous retrouver dans une situation plus complexe, n'est‑ce pas?
    En effet, bien que j'insiste sur le point que j'ai mentionné plus tôt, à savoir que le risque, tel que nous l'avons évalué dans le contexte d'Ottawa en particulier, mais ailleurs avec les blocus également, était la menace de voir se développer une violence grave au sein même des convois.
    Pour le dernier tour, nous avons le sénateur Carignan.
    Vous avez trois minutes, monsieur.

[Français]

     Le 12 février dernier, le Service de police d'Ottawa a affirmé ce qui suit sur son site Internet:
Tous les agents disponibles furent déployés hier soir. Nous avons un plan pour mettre fin à cette occupation illégale, et nous attendons les renforts nécessaires pour y arriver.
    Le Service de police d'Ottawa dit ici « nous avons un plan ». Avez-vous été informé de ce plan?
    Non.
    Avez-vous posé des questions quand vous avez vu cette déclaration du Service de police, le 12 février dernier? Avez-vous demandé quel était le plan?
    Non, parce qu'il n'était ni habituel ni convenable d'intervenir dans les opérations de la police.
    Je trouve ces propos bizarres. Vous dites que ce n'est pas dans votre nature d'intervenir dans leurs opérations. Cependant, quand on constate qu'ils ne sont pas capables de remorquer des véhicules, on applique la Loi sur les mesures d'urgence.
    C'est plutôt substantiel comme intervention, ne trouvez-vous pas?
    Oui, mais il est évident que le plan a été jugé insuffisant.
    Comment pouviez-vous juger que le plan était insuffisant si vous ne l'aviez ni demandé ni vu?
    Je parle du plan jusqu'à ce moment-là.
    Le 12 février, le Service de police d'Ottawa a dit « nous attendons les renforts nécessaires pour y arriver ».
     Savez-vous combien de policiers supplémentaires il a demandés?
     Au début, je crois qu'il a demandé 1 800 policiers, selon l'ancien chef de police.
    D'accord.
    En fin de compte, presque autant de policiers ont été envoyés.
    D'accord.
    Avez-vous envoyé ces policiers?
    La GRC a envoyé à peu près 1 000 agents.
    À quelle date les a-t-elle envoyés?
    C'était au milieu de la semaine suivante.
    C'était donc après le 14 février.
    Oui.
    On avait demandé ces policiers avant cela, par contre.
    Oui. Ils ont été demandés presque au début.
    D'accord.
    Étiez-vous au courant que la Ville d'Ottawa se refusait de demander les dépanneuses de l'armée canadienne?
    Non, je ne suis pas au courant de cela.
    D'accord.
    Donc, vous n'avez pas connaissance du fait que, le 10 février, le directeur général des Services de protection et d'urgence de la Ville d'Ottawa, Kim Ayotte, a dit qu'il se refusait de demander les dépanneuses de l'armée, parce que c'était comme demander l'armée à Ottawa.
    Non, je ne suis pas au courant de cela.
    Vous ne lisez pas Le Soleil?
    J'étais conscient qu'il y avait des discussions concernant l'armée en général.
    Toutefois, en ce qui concerne les dépanneuses de l'armée...
    Non.
    Vous n'avez pas entendu ce commentaire fait par un fonctionnaire de la Ville d'Ottawa, Kim Ayotte, le 10 février?
    Non, je n'ai eu aucune conversation avec...
    Cela n'a pas été porté à votre connaissance? Cela n'a pas été relevé dans votre revue de presse?

[Traduction]

    Je vous remercie.
     Cela met fin à notre tour de table. J'aimerais remercier tous les témoins de leur présence ce soir. Vous êtes certainement libres de partir. Je vous remercie de votre contribution à la discussion de ce soir.
     Le Comité est saisi d'une question qui doit être résolue. Il a été porté à notre attention que le chef intérimaire Bell du Service de police d'Ottawa ne pourra pas assister à notre prochaine réunion. J'aimerais proposer que nous invitions les anciens chefs de police Peter Sloly, Charles Bordeleau et Matt Torigian à cette séance particulière pour nous fournir...
    Je suis désolé. C'est le 21. Je dois rappeler que notre prochaine réunion est le 14 juin.
     Oui, sénatrice Boniface.

  (2125)  

    Pour que vous sachiez qu'avant de lever la séance, je dois en inscrire une autre sur ...
    D'accord, je veux juste m'assurer que nous avons l'accord du Comité.
    Nous allons entendre M. Motz, puis M. Naqvi.
    Merci, monsieur le président.
     Si l'on se reporte à notre plan de travail précédent, nous avons estimé que l'ancien chef Sloly avait besoin d'un groupe de travail à lui tout seul pendant au moins une heure et demie. J'essaie simplement de trouver le véritable...
    Nous pourrions les diviser. M. Sloly pourrait participer à la première séance et les deux autres à la deuxième.
    Qui sont les deux autres messieurs que vous avez mentionnés, monsieur Green?
    Je viens d'apprendre que la Police provinciale de l'Ontario est confirmée pour la première section, donc nous aurions eux, puis nous avons maintenant le choix entre M. Sloly pour une heure et demie ou les autres personnes qui ont participé de façon tangentielle.
     Un député: Nous voulons que M. Sloly soit seul.
     Le coprésident (M. Matthew Green): D'accord. Monsieur Motz, c'est tout?
     Nous passons à M. Naqvi.
    Merci, monsieur le président.
     J'allais proposer d'inviter M. Sloly. Il est important qu'il se présente devant ce comité.
     Je ne suis pas trop sûr de la valeur de M. Bordeleau et de M. Torigian. Cependant, je pense qu'une personne que nous devrions également inviter et entendre est le maire Watson, qui a eu un rôle central dans tout ça.
    Il est sur la liste.
    J'allais proposer que, si nous devions inviter deux personnes, l'autre personne pourrait peut-être être le maire Watson, mais j'ai entendu dire que...
    Vous aviez mentionné trois noms, alors je voulais juste le proposer. Je vous remercie.
    Il semble que nous ayons trouvé une solution.
     En résumé, le 21, nous aurons la Police provinciale de l'Ontario pendant la première heure, puis nous inviterons M. Sloly. Nous saurons à la prochaine réunion s'il ne peut pas se présenter au Comité pour une raison quelconque, et nous ferons alors les ajustements nécessaires. Y a‑t‑il un consensus autour de la table à ce sujet?
    Puis‑je proposer quelque chose?
     Si M. Sloly n'est pas disponible, pouvons-nous penser au maire Watson et voir s'il est disponible?
    C'est bon. Mettons‑le en réserve pour que le greffier puisse l'envisager à ce moment‑là.
     Pour le compte rendu, c'est un consentement unanime pour cette partie de l'horaire.
     Excellent. Je cède maintenant la parole à la sénatrice Boniface.
    J'ai parlé à tous les membres et je me demande si je peux présenter une motion demandant que le greffier consulte tous les membres pour voir si nous avons de la disponibilité en septembre.
     L'idée est d'organiser deux journées complètes avant de revenir le 19 septembre. Cela dépendra de la disponibilité, alors j'ai pensé que nous devrions peut-être commencer par consulter les membres, puis demander l'approbation, si c'est la prochaine étape.
    Chers membres, vous avez entendu la proposition de la sénatrice Boniface.
     Monsieur Motz, vouliez-vous intervenir?
    Oui.
     Nous en avons parlé au sein de notre groupe. Nous voulons certainement nous occuper des affaires de ce comité. Nous sommes d'accord avec cela. Je ne sais pas où en sont mes collègues libéraux en ce qui concerne les réunions de leur caucus avant la reprise de la session. Les nôtres ont lieu mercredi et jeudi, les 14 et 15 septembre.
     Un député: Les nôtres sont un jour avant.
     M. Glen Motz: Les vôtres sont donc le mardi et le mercredi.
    Pourquoi ne pas demander aux greffiers de s'en occuper? Nous avons évidemment cela aussi. Je pense que la motion vise simplement à déterminer la disponibilité.
     Un député: Nous aurions lundi, à tout le moins.
    Oui. Lundi, c'est sûr, nous pouvons avoir...
    Si nous nous mettons d'accord en...
     Je suis désolé. Allez‑y, madame Bendayan.
    Merci, monsieur le président.
     J'allais suggérer les 15 et 16 septembre. Pour répondre à la question de M. Motz, nous sommes en réunion jusqu'au 14 septembre, en fin de journée.
     Je pense que les 15 et 16 septembre nous conviendraient bien, mais je comprends que le 15 septembre pourrait être difficile pour vous, chers collègues.

[Français]

     Ce ne sera pas possible pour moi les 15 et 16 septembre.

[Traduction]

    Je peux peut-être ramener la discussion, car nous avons une heure d'arrêt ferme.
     Je pense que la motion est sage. Les sénateurs ont aussi leurs considérations. Elle permet à notre analyste et à notre greffier de s'en occuper et de revenir avec une date. Nous nous réunirons la semaine prochaine et la semaine suivante pour nous assurer que nous sommes prêts.
     Si nous pouvons nous entendre autour de la table pour adopter cette approche, qui me semble très sage et judicieuse, et revenir sur le sujet à l'automne, alors la directive sera envoyée et nous reviendrons lors de la prochaine réunion. Avons-nous des objections à cela?
     Des députés: D'accord.
     Le coprésident (M. Matthew Green): Cela étant dit, que le compte rendu indique qu'il y a consentement unanime à ce sujet.
     Ce n'est pas pour les dates. Les dates vont vous être communiquées et nous reviendrons à la prochaine réunion pour les confirmer.
     Cela étant dit, j'aimerais remercier tout le monde pour leur participation à la réunion de ce soir.
     La séance est levée.
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