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DEDC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise


NUMÉRO 020 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er décembre 2022

[Enregistrement électronique]

  (1830)  

[Traduction]

     Bienvenue à la 20e réunion du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise établi conformément à l'ordre de la Chambre du 2 mars 2022 et du Sénat du 3 mars 2022.
     Cette réunion se déroulera en mode hybride, conformément aux ordres de la Chambre et du Sénat. Si vous éprouvez des difficultés techniques, veuillez m'en informer, car nous devrons peut-être suspendre la séance pendant quelques minutes afin de nous assurer que tous les membres puissent participer pleinement.
     Notre premier groupe de témoins est composé ce soir de trois représentants du Bureau du Conseil privé: Mme Jody Thomas, conseillère en sécurité nationale et au renseignement; M. Martin Green, secrétaire adjoint du Cabinet, Évaluation du renseignement; et M. Mike MacDonald, secrétaire adjoint du Cabinet, Sécurité et renseignement. Nous accueillons également Mme Marie-Hélène Chayer, directrice exécutive du Centre intégré d'évaluation du terrorisme.
     Je crois comprendre que Mme Thomas fera d'abord la déclaration préliminaire.
    Madame Thomas, je vous souhaite la bienvenue. Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente. Ma déclaration préliminaire sera très brève.
     Je suis ici avec trois collègues qui vous ont déjà été présentés.
     Je suis devenue conseillère en sécurité nationale et au renseignement le 11 janvier 2022. Il s'agit d'un poste dont le titulaire est chargé de donner des conseils coordonnés et non partisans au premier ministre par l'intermédiaire du greffier du Conseil privé. Mon rôle est de coordonner la communauté de la sécurité nationale et du renseignement, en plus d'assurer une fonction de remise en question comme le font tous les sous-secrétaires du Bureau du Conseil privé.

[Français]

     La conseillère à la sécurité nationale et au renseignement supervise quatre secrétariats: le Secrétariat de la sécurité et du renseignement, le Secrétariat de la politique étrangère et de la défense...

[Traduction]

    Madame Thomas, pourriez-vous vous arrêter, s'il vous plaît? Je m'excuse. Nous avons un problème d'interprétation.
    C'est peut-être mon français. Je suis désolée.
    Excusez-moi, madame Thomas. Vous pouvez poursuivre.
    Merci.

[Français]

    Les deux autres secrétariats sont le Secrétariat de l'évaluation du renseignement, et le nouveau secrétariat de la protection civile et de la relance à la suite de la COVID‑19.

[Traduction]

     La menace envers la sécurité nationale présentée par ce que l'on a appelé le « Convoi de la liberté » était multiforme et complexe, et nous en apprenons davantage chaque jour. Les manifestations, l'occupation de la capitale nationale et les barricades érigées près d'infrastructures essentielles représentaient des défis sans précédent pour le gouvernement.
     La liberté d'expression et de réunion pacifique sont des droits fondamentaux qui doivent être protégés dans toute démocratie. Toutefois, le gouvernement a aussi la responsabilité d'assurer la sécurité des Canadiens.
     Je tiens à souligner que c'est l'ensemble des circonstances qui m'ont amené, ainsi que d'autres, à recommander d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Il est important de noter que ces mesures étaient temporaires et qu'elles ont été en place du 14 au 23 février. Elles avaient été soigneusement élaborées pour être raisonnables, proportionnelles et, heureusement, de courte durée.
     D'autres personnes ont déjà été convoquées pour vous fournir des renseignements et une mise en contexte sur les conséquences plus larges de la multitude de facteurs qui ont mené à l'invocation et à l'exécution de la Loi sur les mesures d'urgence. Je suis ici pour vous parler du rôle de la conseillère en sécurité nationale et au renseignement dans la coordination de la communauté fédérale du renseignement et à titre de conseillère du gouvernement fédéral.
     Mes collègues et moi serons heureux de répondre à vos questions.
    Je vais m'arrêter ici.

  (1835)  

     Nous allons commencer notre série de questions avec M. Motz.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Je remercie nos témoins d'être avec nous aujourd'hui.
     Madame Thomas, je vais m'adresser à vous.
     Je vous remercie de nous avoir présenté votre rôle de conseillère en sécurité nationale et au renseignement. Comme vous l'avez dit, vous offrez des séances d'information et des conseils au premier ministre par l'entremise du Cabinet du premier ministre.
    Serait-il juste de dire qu'un aspect de vos responsabilités pendant le « Convoi de la liberté » était de fournir au Cabinet du premier ministre, au premier ministre et au Cabinet des séances d'information brossant un tableau complet, franc et factuel des menaces? Ai‑je bien compris?
    Je veux préciser que l'information et les renseignements sont fournis au greffier du Conseil privé et non au Cabinet du premier ministre.
     Oui, l'information fournie est franche, ouverte et transparente.
    Merci.
     Seriez-vous d'accord avec moi pour dire que la Loi sur les mesures d'urgence définit les seuils sur lesquels le gouvernement doit s'appuyer pour invoquer légalement cette loi, c'est-à-dire la définition fournie à l'article 2 de la Loi sur le SCRS? Je suppose que vous avez une bonne compréhension de l'article 2, qui définit ce qu'on entend par « menaces envers la sécurité du Canada ».
    Oui, et je vous remercie de la question.
    C'est un sujet qui a fait l'objet de discussions soutenues. Il en a certainement été question pendant les audiences et il en a aussi été question pendant l'enquête la semaine dernière.
     Un avis juridique a été fourni. Je sais que vous avez entendu les témoignages du sous-ministre et du ministre de la Justice. Le gouvernement doit examiner l'ensemble d'une situation lorsqu'il évalue les menaces envers la sécurité nationale.
    C'est là où je veux en arriver.
     Le SCRS, la GRC et la Police provinciale de l'Ontario, ou PPO, ont déclaré dans leurs témoignages que les renseignements ne permettaient pas de conclure qu'il y avait une menace envers la sécurité du Canada. Pourtant, comme vous venez de le dire, et comme vous l'avez déclaré à la Commission, vous avez reçu un avis juridique incluant une interprétation plus large de la Loi sur les mesures d'urgence et du seuil qui y est prescrit.
     Pouvez-vous me dire qui a décidé que cette interprétation élargie était nécessaire? C'est ma première question.
     Quand a‑t‑on demandé cette interprétation? Qui en est l'auteur? Quand a‑t-elle été reçue, par vous et d'autres personnes qui l'ont présentée?
    Merci beaucoup de votre question.
     Le ministère de la Justice a rédigé l'avis juridique. Il rédige les avis juridiques pour le gouvernement. La question relative à l'alinéa 2c) est importante. L'interprétation de l'alinéa 2c) et de la Loi sur les mesures d'urgence est que la description de la sécurité nationale et les paramètres s'entendent au sens de l'alinéa 2c) de la Loi sur le SCRS, plutôt que d'en découler directement.
     Cela veut dire que la détermination de ce qui constitue une menace envers la sécurité nationale n'incombe pas à une personne unique au Canada. Nous ne croyons pas que les auteurs de la Loi sur les mesures d'urgence voulaient que le directeur du SCRS soit le seul à prendre des décisions relativement aux menaces envers la sécurité nationale du Canada. Par exemple, cela signifie que s'il se produisait une situation liée au maintien de l'ordre — avec de l'anarchie dans les rues, des services de police débordés et incapables d'intervenir —, mais sans qu'il y ait une menace selon la définition très étroite de l'alinéa 2c), la Loi sur les mesures d'urgence ne pourrait pas être appliquée.
     Nous ne croyons pas que c'était l'intention des auteurs.
    Je vais vous interrompre, madame Thomas.
     En fait, si vous avez écouté le témoignage de la personne qui a rédigé la loi, Perrin Beatty, il a dit qu'ils ont utilisé l'article 2 précisément parce qu'il a été rédigé avec soin et que l'on peut s'y fier.
    Pour ce qui est de cette interprétation plus large qui a été utilisée, diriez-vous que les conseils que vous avez donnés au Cabinet reposaient sur cette interprétation? Était-il clair pour le Cabinet que cette interprétation ne correspondait pas à la lettre de la Loi sur les mesures d'urgence?
    Merci de votre question.
     Elle était conforme à la lettre de la loi, telle qu'elle a été interprétée. Oui, le Cabinet a été informé en détail.

  (1840)  

    À ce point-ci, je suppose que ma question serait: pourquoi accordiez-vous de l'importance à un avis juridique alors que — à mon avis — la loi actuelle est assez claire sur ce qui est requis?
     Se pourrait-il que, puisque les circonstances des manifestations ne répondaient pas vraiment au critère — comme l'ont déjà dit la GRC, la PPO et les services de renseignements du SCRS —, il ait été utilisé pour tenter de justifier l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence par le gouvernement?
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
     Non, je ne suis pas d'accord avec cela.
    Merci beaucoup.
    Vos cinq minutes sont écoulées. Merci, monsieur Motz.
     Je cède la parole à M. Naqvi.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Bienvenue à tous nos témoins.
    Merci, madame Thomas, d'être avec nous.
     Je vais simplement reprendre le fil des questions là où M. Motz s'est arrêté.
     Vous avez dit à la Commission sur l'état d'urgence que pour ce qui est de la Loi sur les mesures d'urgence, le gouverneur en conseil peut avoir une optique plus générale que les renseignements recueillis par le SCRS pour établir s'il y a une menace envers la sécurité nationale ou une situation ou un état d'urgence. Vous y avez aussi fait allusion dans votre exposé.
     Que vouliez-vous dire? Pouvez-vous prendre le temps de nous l'expliquer? Pourquoi est-ce important dans le contexte d'un état d'urgence?
    Ce que je voulais dire, c'est que la définition de l'alinéa 2c) relativement à la sécurité nationale n'est pas reproduite exactement dans la Loi sur les mesures d'urgence. Elle s'entend au sens de l'article 2 de la Loi sur le SCRS, plutôt que de devoir être déterminé par le SCRS.
     L'article 16 de la Loi sur les mesures d'urgence exige et permet d'avoir une considération plus large, puisque cette responsabilité incombe au gouverneur en conseil.
     Il a été établi que l'ensemble des événements se produisant partout au pays atteignaient le seuil pour constituer un état d'urgence. Comme nous le savons, des barrages avaient été érigés au pont Ambassador, à Emerson, à Coutts et à Surrey, et des convois s'étaient formés un peu partout au pays. Pendant que l'on travaillait à libérer le pont Ambassador, nous avons appris que des messages contextuels circulaient pour le reprendre. En fait, les policiers ont été obligés de demeurer sur place pendant une période assez longue.
     Il y avait une menace concernant des armes à Coutts, puis il y a eu la découverte de la taille de la cache. Il y a même eu des nouvelles aujourd'hui sur l'importance de cette cache et la quantité de munitions récupérée. On entendait dire la même chose à Ottawa, à savoir qu'il y avait une menace liée aux armes. Il y avait des répercussions économiques, l'incapacité des Canadiens de vivre leur vie et la rhétorique croissante en ligne.
     Ce qui est préoccupant au sujet de la rhétorique en ligne — comme vous le savez tous, parce que vous avez entendu parler de l'extrémisme violent à caractère idéologique ou EVCI —, c'est que les dirigeants de ces mouvements ne sont pas nécessairement les personnes qui passent aux actes. Ce seront les gens qui sont motivés et inspirés par cette rhétorique. La rhétorique s'amplifiait et cela nous préoccupait. Les menaces contre les fonctionnaires augmentaient et nous étions inquiets.
     Nous en étions à la troisième fin de semaine, à l'aube de la quatrième. La décision fut prise en fonction de l'interprétation de l'ensemble de l'article 17, et le gouverneur en conseil a jugé que la Loi sur les mesures d'urgence était la voie à suivre.
    Si je comprends ce que vous dites, c'est que lorsque cette détermination a été faite — et vous parlez de l'ensemble des événements dont vous avez tenu compte — il y avait une dimension contextuelle à cette détermination et au fondement des conseils que vous avez fournis au BCP et au premier ministre quant à savoir si le seuil minimal était respecté ou non. Ai-je raison?
    Oui, vous avez raison. Le SCRS est un organisme de renseignement. Il recueille des renseignements et l'alinéa 2c) lui permet de le faire. Cela ne nous permet pas nécessairement d'agir et cela ne veut pas dire que l'alinéa 2c) permettra de déclencher une action policière.
    L'interprétation élargie, le contexte, la dimension nationale, la durée des événements ainsi que les graves préoccupations concernant les nouvelles en provenance de Coutts ont mené à la décision qui a été prise.
    Lorsque nous considérons votre recommandation au premier ministre et que nous considérons ensuite celle de M. David Vigneault, le directeur du SCRS, qui a déclaré à la Commission qu'il considérait que la définition de « menace envers la sécurité du Canada » était plus large dans la Loi sur les mesures d'urgence que dans la Loi sur le SCRS, et que selon ce qu'il pensait de l'ensemble de la situation à ce moment, il avait avisé le premier ministre que sa conclusion était qu'il était effectivement nécessaire d'invoquer la loi.
    Même le directeur du SCRS, selon ce que j'ai lu et compris, est d'accord avec vous pour ce qui est de l'importance du contexte.
     Je vous pose la question, non pas en son nom, mais pour savoir si vous pensez que son conseil d'invoquer la loi était également fondé sur le contexte qu'il observait à titre de directeur du SCRS, c'est-à-dire ce qui se passait, non seulement à Ottawa, mais partout au pays, et la façon dont les choses s'aggravaient rapidement?

  (1845)  

    Je ne peux pas parler au nom du directeur du SCRS, mais en tant que sous-ministre adjointe principale de la communauté de la sécurité nationale, oui, je crois que c'est ce qu'il pensait.
    Merci.
    La parole est maintenant à M. Fortin.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame Thomas, je vais continuer à vous poser des questions, puisque vous êtes la vedette, ce soir.
    Si j'ai bien compris votre témoignage, voici ce qui vous a motivés à considérer que les seuils étaient atteints: le blocage du pont Ambassador, entre autres; le fait qu'un convoi se dirigeait vers Ottawa; et le fait que ces gens avaient obtenu des millions de dollars en financement.
    Connaissez-vous le chiffre exact? À votre connaissance, combien d'argent ces gens avaient-ils amassé?

[Traduction]

    C'était plus de 20 millions de dollars. Je crois que le montant exact a été révélé pendant l'enquête.

[Français]

    Selon vous, au moment où vous avez recommandé la déclaration de l'état d'urgence, il y avait à peu près 20 millions de dollars.

[Traduction]

    Merci de la question. Nous savions qu'il s'agissait de plus de 10 millions de dollars.

[Français]

    Ce sont là les raisons pour lesquelles vous avez considéré qu'il y avait lieu de proclamer l'application de la Loi sur les mesures d'urgence. Est-ce bien cela?

[Traduction]

    Comme je l'ai dit, il s'agissait du nombre de barrages routiers, du nombre de personnes qui se joignaient au blocus et à l'occupation d'Ottawa, des préoccupations liées aux armes, de la rhétorique, des acteurs de l'EVCI qui se manifestaient et des liens qu'il y avait entre toutes ces entités. Oui, c'était tout cela.

[Français]

    N'y avait-il pas d'autre moyen de faire face à cette situation?
    Par exemple, on pouvait faire remorquer les camions qui bloquaient la rue Wellington. De fait, on les a fait remorquer, quand le moment est venu. Les manifestants ont été refoulés par les policiers.
    À votre avis, d'autres mesures n'auraient-elles pu être prises en fonction des lois générales qui étaient applicables sur le territoire?

[Traduction]

    Je vous remercie d'avoir posé cette question. Je crois que vous avez soulevé des points très importants.
     Premièrement, les dépanneuses ont été un problème à plusieurs endroits. Des conducteurs de dépanneuse ont été intimidés ou, comme nous l'avons appris, ont été payés pour ne pas répondre et ne pas fournir de service. Nous avons tenté de faire venir des conducteurs de dépanneuse de Montréal par exemple. Nous avions une stratégie nationale de remorquage, que le sous-ministre de Transports Canada vous a expliquée.
     Les dépanneuses furent un important problème. Nous parlons des gros véhicules. Nous ne parlons pas de dépanneuses ordinaires. Il était difficile de trouver cet équipement, et nous avons dû obliger les conducteurs à venir à Ottawa et à faire le travail.
     Pour ce qui est des autres mesures, nous examinions deux pistes d'action qui étaient dirigées par Mike MacDonald au nom du BCP en collaboration avec la Sécurité publique. Vous avez entendu parler de la « voie 1 » et de la « voie 2 ». La première était la législation déjà en place et ce que l'on pouvait utiliser dans le cadre des lois existantes — provinciales, municipales et fédérales — pour régler la situation.
     À la fin de la troisième fin de semaine, rien de tout cela ne fonctionnait. Nous n'avons pas pu obtenir le soutien de la province de l'Ontario. Dans la ville, le chef de police a dit qu'il n'y avait pas de solution policière. Vous avez entendu ce témoignage...

[Français]

    Je me permets de vous interrompre, puisque notre temps de parole est assez court.
    Le chef de police avait dit qu'il voulait 1 800 policiers pour libérer le centre-ville. Il y en a finalement eu 2 000, aux alentours du lendemain de sa démission.
    Pour ce qui est des remorqueuses, je croyais qu'en vertu du Code de la route de l'Ontario, vous pouviez exiger qu'elles soient utilisées, et que, si les gens ne voulaient pas venir remorquer les camions, vous pouviez demander une injonction pour les forcer à le faire. Est-ce que je me trompe?

[Traduction]

    C'est une loi ontarienne, et l'Ontario n'a pas obligé les conducteurs de dépanneuse. Nous avons utilisé la loi fédérale pour le faire.
     Il y a eu de nombreuses occasions...

[Français]

    Je comprends que vous avez utilisé la loi fédérale, mais la question est la suivante: ne pouviez-vous pas utiliser les lois en vigueur, comme le Code de la route de l'Ontario ou le Code criminel, entre autres?
    N'auriez-vous pas pu vous en servir pour dire que ce qui se faisait était interdit et demander une injonction pour forcer les choses?

  (1850)  

[Traduction]

    Les injonctions ont été discutées et n'ont pas été utilisées. Il s'agit plutôt d'un recours de droit privé, comme l'a expliqué le ministre de la Justice.
     Des mesures auraient pu être prises en vertu de la loi actuelle, mais puisqu'elles ne l'ont pas été et que nous en étions à la fin de la troisième fin de semaine, le gouvernement fédéral a dû agir. Vous avez entendu les témoignages, tant à l'enquête qu'ici, selon lesquels il était difficile d'amener l'Ontario à discuter et à utiliser sa loi.
     Le gouvernement fédéral n'applique pas les lois provinciales. C'est la province qui le fait.

[Français]

    Vous avez peut-être entendu que la commissaire Lucki, dans un de ses témoignages, nous a dit que les mesures disponibles n'avaient pas toutes été utilisées, et qu'à son avis, avant d'aller...

[Traduction]

    Je suis désolée, mais votre temps est écoulé.

[Français]

    Merci, madame Thomas.

[Traduction]

    La parole est maintenant à M. Green.
    Merci, madame la présidente.
     Je remercie tous nos témoins d'être avec nous.
     Comme vous le savez, cela fait huit ou neuf mois que nous essayons de jeter les bases de ce qui, nous l'espérons, deviendra des recommandations à la Chambre et au Sénat pour améliorer la loi, les définitions et les seuils, dans l'espoir de ne jamais nous retrouver dans une telle situation.
     Je vais commencer par vous, madame Thomas, par l'entremise de la présidente.
     Croyez-vous que, bien que différents ordres de gouvernement aient pu avoir des recours juridiques, la débâcle concrète — je vais l'exprimer ainsi faute d'un meilleur terme — du maintien de l'ordre et l'incapacité de la police à assurer adéquatement le respect des lois, particulièrement pour ce qui est de l'occupation ici à Ottawa... Est-ce que cela a influencé certains de vos conseils au Bureau du Conseil privé?
    Merci de votre question.
     Lorsque les recours des services de police de la Ville d'Ottawa sont devenus insuffisants — ils ne pouvaient pas répondre, l'ampleur des événements dépassait leur capacité — oui, ces facteurs ont certainement été considérés dans les conseils fournis après la troisième fin de semaine.
    Estimez-vous que c'est au cours de la troisième fin de semaine qu'ils sont devenus insuffisants? Je vais dire qu'ils ont « échoués »; je vais utiliser ce terme. Les services de police n'ont pas su maintenir adéquatement l'ordre public dans la capitale nationale, sur la Colline du Parlement. À quel moment de votre évaluation avez-vous jugé qu'il y avait un risque pour la sécurité nationale?
    Je ne peux pas vous donner de date exacte, monsieur. Je m'en excuse. Je dirais que...
    Diriez-vous que c'était au début de votre évaluation? Avez-vous envisagé que le manque... Les témoignages nous l'ont appris, nous avons appris qu'il y avait un manque de confiance entre la GRC, la PPO et le Service de police d'Ottawa? Il y a eu des témoignages assez clairs selon lesquels les communications avaient été défaillantes dans plusieurs aspects fondamentaux, notamment au niveau de la planification opérationnelle. Êtes-vous d'accord pour dire que les communications ont été défaillantes?
    Je suis d'accord pour dire qu'il y a eu un manque de communication et que l'incapacité de préparer un plan opérationnel efficace et exécutable fut certainement un gros problème.
    Pourquoi en fut‑il ainsi?
    Pourquoi cela s'est‑il produit?
    Oui. Je vais vous laisser l'exprimer clairement. Pourquoi la police n'était-elle pas disponible pour utiliser des recours juridiques... Je vais simplement être très franc. Lorsque M. Beatty et les rédacteurs de ce projet de loi ont pour la première fois envisagé la Loi sur les mesures d'urgence, je ne suis pas certain qu'ils aient imaginé qu'un échec et un effondrement du maintien de l'ordre comme nous l'avons observé partout au pays pouvaient se produire.
    Seriez-vous d'accord?
    Je suis d'accord avec votre évaluation de la Loi sur les mesures d'urgence, oui. Je pense qu'à Ottawa, étant la ville où se produisait les manifestations, l'information — et j'utilise le terme « information » en plus du terme « renseignement » —fournie et mise à la disposition de la police a transmis un message très ambigu au début, et que...
    Pour que ce soit bien clair, certains disaient qu'ils allaient repartir après quelques jours...
    Mme Jody Thomas: C'est cela.
    Le coprésident (M. Matthew Green): ... et je crois que d'autres rapports laissaient entendre que cela se prolongerait et qu'ils n'avaient pas l'intention de partir.
    Exactement.
     Je crois que la police, qui a l'habitude de gérer les manifestations dans cette ville, pensait avoir un plan qui lui permettrait de gérer cette situation. L'ampleur des événements et le nombre de camions, ainsi que la rapidité avec laquelle ils se sont incrustés dans la ville, ont été sous-estimés et ont entraîné un problème corrélatif.
    À votre avis, dans l'optique de l'évaluation de la menace, à quel point fut-il important de savoir qu'il y avait des membres de la Deuxième Force opérationnelle interarmées, des membres du service de sécurité de la GRC pour le premier ministre et, comme nous venons de l'entendre, qu'il y avait peut-être des fuites... il y avait des policiers et des militaires en service actif.
     Lorsque vous parlez de menaces posées par des extrémistes violents à caractère idéologique, à quel point était-il important pour vous de comprendre qu'il y avait des gens qui avaient des connaissances et des capacités logistiques qui allaient bien au-delà de toute manifestation normale qui aurait pu se produire sur la Colline du Parlement?

  (1855)  

    Lorsque ces renseignements sont devenus disponibles, ce fut certainement une préoccupation...
    Quand ont-ils été disponibles?
    C'était au tout début, pendant la première fin de semaine, lorsque nous avons commencé à comprendre qui étaient certains des participants, et que nous avons vu les mécanismes d'approvisionnement et la logistique qui étaient mis en place pour aider les camions à rester au centre-ville d'Ottawa...
    Oui. En fait, ils avaient une aire d'approvisionnement hors site, faute d'un meilleur terme, où ils pouvaient se réchauffer, se nourrir, se procurer du carburant et revenir.
     C'est cet aspect qui me trouble. Pendant que cela se passait, le renseignement interne laissait entendre que ces gens allaient partir. Lorsque nous parlons de la qualité de l'information et du renseignement, d'où provenait l'information que vous utilisiez pour prendre vos décisions? Était-ce au niveau local, provincial ou national?
    Merci.
    Je suis désolée, madame Thomas.
    Monsieur Green, votre temps est écoulé.
    Nos témoins sont ici pour deux heures, madame la présidente. Je vais pouvoir y revenir.
     Madame Boniface, vous avez la parole.
    Auriez-vous l'obligeance de prendre une minute pour répondre à la question de M. Green puisque la mienne fera suite à la sienne?
    Voulez-vous parler des sources de renseignement?
    Ma spécialiste du renseignement est avec moi, alors je vais l'inviter à répondre.
     Nous avons reçu des renseignements de diverses sources, soit notre propre collecte de renseignements par l'entremise du SCRS, mais aussi la Police provinciale de l'Ontario et son projet Hendon — je ne savais pas son nom, mais il était certainement à la disposition des équipes du renseignement —, notre propre analyse des renseignements de source ouverte et certainement la GRC et son Équipe intégrée de la sécurité nationale de Toronto.
     Madame Chayer.
     Oui, comme Mme Thomas l'a mentionné, plusieurs organismes de renseignement observaient ce qui se passait en fonction de leur propre mandat.
     Avec mon organisation, le Centre intégré d'évaluation du terrorisme, ou CIET, j'ai eu le plaisir de comparaître devant votre Comité il y a quelques mois, si vous vous en souvenez. Notre responsabilité est d'évaluer la probabilité d'une attaque terroriste au Canada et à l'étranger. Nous avons examiné ce qui se déroulait à Ottawa dans cette optique, et nous avons partagé nos évaluations et de nos rapports avec l'ensemble de la communauté de la sécurité nationale à Ottawa, ainsi qu'avec nos collègues d'autres administrations, notamment les organismes d'application de la loi.
     Comme vous l'avez déjà entendu, la gouvernance de la sécurité nationale s'est réunie régulièrement pendant les événements, et tous les organismes du renseignement ont communiqué leurs évaluations pertinentes à leurs collègues.
     Monsieur Green, voulez-vous ajouter quelque chose brièvement?
    Oui. J'ajouterais brièvement, monsieur Green, que je crois que ce fut pendant la première semaine que les rapports de source ouverte concernant d'anciens policiers et d'anciens membres des FAC ont été de plus en plus nombreux. Il y en avait un qui parlait d'un agent du renseignement qui, de toute évidence, travaillait dans ma section, mais j'ai découvert que c'était il y a 20 ans et qu'il avait un contrat à court terme.
     C'était préoccupant de voir à quel point la logistique et le renseignement étaient sophistiqués.
    Madame Thomas, cela m'amène à ce que vous avez dit au sujet de la collecte de renseignements en ligne. De toute évidence, ce n'était pas prévu dans la Loi quand elle a été rédigée il y a plus de 30 ans.
    Pouvez-vous nous donner une idée du genre de renseignements recueillis en ligne? Quelle évaluation en feriez-vous relativement à leur incidence sur l'escalade ou la désescalade de divers événements?
    Merci beaucoup de poser cette question.
    Mme Chayer est en fait la mieux placée pour y répondre.
    Merci beaucoup.
    On sait qu'une bonne partie de la rhétorique de l'EVCI est alimentée et diffusée en ligne. Depuis le début de la pandémie, nous assistons à une explosion de ce phénomène sur le Web, notamment dans les médias sociaux. Le problème, comme Mme Thomas l'a mentionné précédemment, vient de ce que les auteurs de cette propagande ne sont pas forcément ceux qui basculent dans la violence et qui commettent des actes terroristes. Ce que nous avons observé, c'est que les consommateurs de cette rhétorique et de cette propagande peuvent se radicaliser et basculer dans la violence petit à petit, ou parfois très rapidement, et se livrer à des actes terroristes.
    Pendant les manifestations du convoi et la période pandémique, et même encore, ce genre de discours était très présent. Les idées véhiculées sont anti-autorité et anti-gouvernement, mais aussi xénophobes et misogynes.
    L'autre problème avec les menaces associées à l'EVCI est ce que certains de mes collègues ont appelé le « bar à salades », parce que les griefs peuvent être de plusieurs ordres. Les gens peuvent choisir les causes de révolte qui font leur affaire dans ce bar, en fonction de leur histoire personnelle. C'est très difficile de savoir ce qui sera un déclencheur et quand la réaction se produira, et surtout à quelle forme active de violence cela les conduira.

  (1900)  

    Il me reste 30 secondes.
    Concernant la rhétorique véhiculée et que nous continuons d'entendre, comme vous l'avez souligné, quels ont été les impacts ailleurs dans le monde? Je peux attendre mon prochain tour pour avoir la réponse, mais j'ai des collègues et des anciens collègues qui travaillent en Nouvelle-Zélande qui étaient très inquiets de la situation. Tout ce contexte, à mon avis, est un bon exemple des changements survenus depuis que la Loi a été rédigée.
    Je vais revenir à cette question à la fin. Je crois que j'ai terminé.
    Nous passons maintenant au sénateur Carignan.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame Thomas, pouvez-vous nous parler de l'avis juridique, que beaucoup de gens ont vu, sauf nous? Qui a demandé cet avis juridique sur la possibilité d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Je crois que le secret professionnel de l'avocat s'applique à cette question. L'avis juridique a été établi par le ministère de la Justice. Un avis juridique devait accompagner le document d'invocation. Je crois que c'est tout ce que je peux vous dire à ce sujet.

[Français]

     Qui est le client?

[Traduction]

    C'est le gouverneur en conseil.

[Français]

    D'accord.
    Avez-vous pris connaissance de cet avis juridique?

[Traduction]

    J'ai pris connaissance des avis juridiques donnés durant le processus ayant abouti à la décision d'invoquer la Loi.

[Français]

    Est-ce que M. Vigneault a pris connaissance de cet avis juridique?

[Traduction]

    Ce serait à M. Vigneault de vous le dire, mais je crois qu'il reçoit ses propres avis juridiques.

[Français]

    À l'extérieur du Cabinet, combien de personnes ont eu accès à cet avis juridique?

[Traduction]

    Je ne peux pas répondre à cette question.

[Français]

    Selon vous, est-ce que plusieurs personnes à l'extérieur du Cabinet ont eu accès à cet avis juridique?

[Traduction]

    Je suis désolée, madame la présidente, mais je ne connais pas la réponse à cette question et je ne veux pas me livrer à des hypothèses.

[Français]

    Le client, c'est le Cabinet. Le professionnel qui a rendu le service, c'est le ministre de la Justice, le procureur général du Canada. Le Cabinet peut donc renoncer au secret professionnel.
    Avez-vous été consultée par le Cabinet quant à la possibilité de renoncer au secret professionnel en ce qui concerne cet avis juridique?

[Traduction]

    Je n'ai pas été consultée. Je n'ai pas eu de discussion à ce sujet.

[Français]

    D'accord.
    Quelle était la nature de l'avis juridique?
    Était-ce un élément décisif de votre recommandation?

[Traduction]

    La compréhension de la Loi sur les mesures d'urgence et de ses composantes était essentielle. Ma recommandation reposait sur la consultation de la communauté de la sécurité nationale et les renseignements dont nous disposions pour conseiller le Cabinet les 13 et 14 février.

[Français]

    La liste de toutes les personnes présentes à la réunion du Cabinet, dont la commissaire de la GRC et vous, figure dans les procès-verbaux.
    La commissaire de la GRC a écrit un courriel au ministre de la Sécurité publique. Dans celui-ci, elle écrivait qu'on n’était pas obligé d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence et qu'il existait d'autres solutions.
    Lorsque le Cabinet a discuté de cela, la commissaire de la GRC n'a-t-elle pas levé le petit doigt pour dire qu'elle avait envoyé un courriel au ministre de la Sécurité publique? Quelqu'un ayant pris connaissance de ce courriel s'est-il manifesté?

  (1905)  

[Traduction]

    Je ne peux pas, sous aucune considération, parler de ce qui a été discuté au Cabinet. Je ne crois pas avoir besoin d'expliquer pourquoi. Le sujet a été abordé. Les responsables peuvent aborder divers sujets aux réunions du Groupe d'intervention en cas d'incident. La commissaire de la GRC a eu cette possibilité. En fait, le plan a été établi seulement le 17 février. Après l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, le plan prévoyait l'octroi de pouvoirs aux services policiers. Le plan a été présenté dans sa forme définitive le 17 février seulement.

[Français]

    Le plan avait été préparé avant, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Nous entendions parler de plans depuis des semaines.

[Français]

    Selon vous, quel élément majeur a fait que l'on a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence à Ottawa?

[Traduction]

    Encore une fois, merci de poser cette question.
    Je crois que j'ai été assez claire sur le fait que la Loi sur les mesures d'urgence n'a pas été invoquée pour un site en particulier. Tous les barrages…

[Français]

    Oui, mais les autres problèmes en lien avec les blocages avaient été réglés. À Windsor et à Coutts, le problème était réglé. Il ne restait, principalement, que les manifestants sur la rue Wellington, où un spa et un grill avaient été installés.

[Traduction]

    Merci de cette question.
    Ce n'est pas tout à fait vrai. Il y avait des barrages à Surrey. Ceux de Coutts avaient été démantelés. Le pont Ambassador avait été rouvert, mais la situation restait précaire. Il y avait aussi des manifestations au pont Peace. Il y avait eu des menaces concernant les lignes de VIA Rail, et des renseignements concernant la formation de convois de soutien aux manifestants d'Ottawa…
    Madame Thomas, je suis désolée.
    Sénateur Carignan, votre temps de parole est écoulé.
    Je donne maintenant la parole au sénateur Harder.
     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci, madame Thomas, et merci également à vos collaborateurs d'être avec nous.
    J'aimerais que vous expliquiez au Comité le cheminement que vous avez suivi avant de vous forger une opinion. Je ne vous demande pas quelle était cette opinion. Il est important pour nous de comprendre le processus suivi par la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement et de nous assurer que les avis donnés au gouverneur en conseil ne sont pas filtrés.
    Dans ce cas en particulier, j'occupais le poste depuis trois semaines, et je ne suis pas…
    Vous avez beaucoup d'expérience maintenant.
    Oui.
    Toute la communauté a participé au processus, comme c'est toujours le cas quand des événements mettent en jeu la sécurité nationale. C'est l'objet et la raison d'être de la fonction de conseiller à la sécurité nationale et au renseignement, qui a été créée après les événements du 11 septembre pour donner une vue d'ensemble des menaces à la sécurité nationale et des questions stratégiques en lien avec le renseignement de défense. Tous les organismes de la communauté de la sécurité nationale, c'est‑à‑dire le Service canadien du renseignement de sécurité, la Gendarmerie royale du Canada, le Commandement du renseignement des Forces canadiennes, le groupe responsable du renseignement extérieur à Affaires mondiales, l'Agence des services frontaliers du Canada… Il y a plusieurs organismes. Le ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté du Canada a son propre service de renseignement. Chacun de ces organismes recueille ou évalue des renseignements à l'intérieur de son mandat limité.
    Le SCRS peut avoir un point de vue sur une facette de la situation, et les Forces armées canadiennes — si du renseignement extérieur est en cause — peuvent avoir une tout autre perspective. Notre but est d'en arriver à une vision globale et mesurée des menaces, du renseignement et de l'information. Nous recourons au groupe d'évaluation pour le renseignement extérieur, mais nous n'avons pas cette capacité pour le renseignement intérieur, du moins pas de la même façon. Nous utilisons les évaluations de groupes comme le CIET et l'information recueillie par le comité sur la sécurité nationale et le renseignement, présidé par Michael MacDonald, et par le ministère de la Sécurité publique pour nous assurer de bien comprendre la situation et pour donner des conseils, parce que pour les décideurs, le renseignement…
    Le renseignement est un point de repère. C'est la même chose pour les données économiques. Le renseignement ne nous dit pas ce qu'il faut faire. Il nous informe sur ce qui pourrait se passer. Il nous donne des indications sur des événements possibles et un aperçu de ce qui se passe. Les décisions sont prises à partir de cette information. Le renseignement ne nous dit jamais ce qu'il faut faire, et rien n'est jamais sûr.
    Nous mettons à profit toutes les composantes de la communauté du renseignement et de la sécurité nationale pour réunir l'information que nous transmettons au gouvernement. Je m'assure d'obtenir l'aval de la communauté avant de transmettre cette information.

  (1910)  

    Et l'information est transmise à tous les décideurs sans avoir été filtrée…
    Oui, à tous les décideurs.
    Pendant la période d'évaluation — bien entendu, l'évaluation est continuelle —, vos collègues ou vos homologues américains vous ont-ils appelée pour vous demander c'était quoi cette folie.
    Ils n'ont pas utilisé exactement ces termes, mais oui, j'ai reçu des appels.
    Le conseiller adjoint à la sécurité nationale du département de la Sécurité intérieure de la Maison-Blanche m'a appelée pour me parler de la situation au pont Ambassador. Il y a eu des discussions au sujet de l'EVCI en général, bien entendu, mais un appel a porté précisément sur le pont Ambassador et les mesures nécessaires pour le rouvrir.
    Quand j'ai reçu cet appel, tous les fabricants d'automobiles avaient indiqué à la Maison-Blanche qu'ils allaient faire des mises à pied.
    C'était un appel sérieux de votre homologue américain.
    Très sérieux, en effet.
    Pourquoi avoir attendu la troisième semaine? Dès la deuxième semaine, selon ce que vous avez dit précédemment, il était clair que les ratés de la police ne se régleraient pas comme par magie. J'étais à Ottawa, comme tous ceux de mes collègues qui vivent ici et qui représentent Ottawa.
    Ma question aux témoins est toujours la même: pourquoi avoir attendu aussi longtemps?
    L'équilibre entre une intervention précipitée et une intervention trop tardive est très délicat.
    Vers la fin du troisième week-end, parce que nous savions qu'il faudrait du temps pour mobiliser les forces policières et planifier une intervention, à Ottawa notamment, nous avons réalisé qu'il faudrait faire face à un quatrième week-end si rien n'était fait. Nous avions essayé de tirer parti de tous les pouvoirs existants et de tous les paliers de gouvernement pour trouver des solutions aux événements à Ottawa et ailleurs dans le pays, et c'est à ce moment qu'il a été déterminé qu'il fallait agir.
    Quant à la question de savoir si c'était trop tard ou trop tôt, je crois que le débat est loin d'être terminé.
    Merci.
    Votre temps de parole est écoulé, sénateur Harder.
    Allez‑y, sénateur Patterson.
     Merci, madame la présidente, et merci aux témoins.
    Madame Thomas, j'aimerais revenir sur certaines de vos déclarations. Vous avez dit que l'évaluation comme quoi la sécurité nationale était menacée découlait d'un éventail d'événements, de toute une série d'événements. Vous avez parlé de menaces contre des titulaires de charge publique. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce propos et nous expliquer ce que cela signifiait?
    Merci.
    Encore là, ma collègue du CIET pourra certainement vous donner des compléments d'information à ce sujet.
    Nous avons constaté une augmentation sans précédent des menaces visant le premier ministre, la vice-première ministre, des ministres, des politiciens d'Ottawa des trois ordres de gouvernement et des titulaires de charge publique, dont les médecins hygiénistes en chef du fédéral et des provinces. Durant une certaine période, la Dre Tam a eu besoin d'une protection rapprochée en raison des menaces dont elle faisait l'objet. Des propos en ligne ciblaient des membres du personnel du Cabinet du premier ministre. Ces menaces étaient sérieuses et crédibles.
    Pendant cette période, le volume et la virulence des propos de ce type ont atteint des niveaux jamais vus. Le phénomène avait commencé durant les élections de 2021 et il prenait de l'ampleur. Il a atteint un sommet sous l'influence de certains leaders de la mouvance EVCI et de leurs adeptes en ligne. Certaines menaces étaient faites par écrit. C'était très préoccupant.

[Français]

     J'aimerais ajouter quelque chose à cela.
    Effectivement, nous observons cette tendance depuis plusieurs mois. Vous aurez peut-être constaté que, l'été dernier, il y a eu un sondage mené par Le Devoir, si je me souviens bien. Il mentionnait que 34 % des parlementaires fédéraux disaient avoir reçu des menaces de mort. C'est un phénomène qui s'accentue.
    Cela me préoccupe particulièrement. Parfois, ces menaces sont envoyées directement par courriel ou par lettre. Parfois, elles sont envoyées sur les médias sociaux. Elles ont une portée d'autant plus large que beaucoup de gens les voient et pensent alors qu'il est normal, voire acceptable, de tenir ce type de commentaires et de menaces envers les parlementaires ou les hauts fonctionnaires.
    Même si certaines personnes publient ces menaces sur les réseaux sociaux sans l'intention de les mener à bien, elles peuvent amener d'autres personnes qui consomment ce genre de rhétorique à vouloir passer aux actes.
    Au Canada, nous sommes chanceux de ne pas avoir vu cela, mais nous avons vu ce genre de menaces être menées à bien dans d'autres pays.

  (1915)  

[Traduction]

    Madame la présidente, est‑ce que je peux ajouter un point concernant le contexte?
    J'ai seulement cinq minutes.
    Le niveau de menace était si élevé que les services de protection de la GRC, le Service de protection parlementaire et le sergent d'armes ont modifié les voies d'accès à la Colline. Un service de navette était aussi offert par les services de protection policière dans le secteur du centre-ville d'Ottawa et jusqu'à la Colline. C'est allé jusque‑là.
    J'aimerais poser une dernière question, madame la présidente.
    Le public pensait que le barrage du pont Ambassador avait été levé quand la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée. Vous avez fait allusion à ce qui s'était tramé après pour reprendre le pont. Pouvez-vous nous dire ce qui en était au juste?
    Des plans circulaient en ligne concernant un nouveau barrage du pont. La province et la Ville de Windsor ont dû garder des effectifs policiers sur place pour garder le pont ouvert. Par exemple, les barrages sont restés en place pendant des semaines.
    Nous prenions très au sérieux tout ce que nous lisions en ligne au sujet de l'organisation de nouveaux convois. Quand nous avons constaté que d'autres camions se dirigeaient vers Windsor et que des plans circulaient en ligne, nous avons compris qu'il n'y avait aucune garantie que le pont resterait ouvert. C'était inquiétant pour le commerce et l'économie, mais également parce que la situation accaparait des ressources policières. La question de savoir si l'intention derrière ces plans était justement de détourner les ressources policières a été sérieusement envisagée.
    Votre temps est écoulé, sénateur Patterson.
    Chers collègues, nous allons entamer le second tour, avec des segments de quatre minutes.
    Monsieur Brock, vous avez la parole.
    Merci, madame la présidente.
    Bonsoir tout le monde. Je remercie les témoins d'être des nôtres.
    Je vais m'adresser à vous en premier, madame Thomas. J'aimerais vous poser une série de questions en rafale, et je vais vous demander de dire si vous êtes d'accord ou non. Vous pouvez répondre par oui ou non. Je ne vous demande pas d'explications.
    Êtes-vous d'accord avec moi que notre pays est lié par la règle de droit?
    Oui.
    Vous seriez d'accord pour dire que tous les Canadiens, y compris le premier ministre, son Cabinet, les hauts fonctionnaires et, par-dessus tout, le ministère de la Justice, sont aussi liés par la règle de droit.
    Oui.
    Personne, pas même le premier ministre, n'est au‑dessus de cette règle de droit.
    Est‑ce exact?
    C'est exact.
    Je vais maintenant citer quelques déclarations de l'ancien ministre Perrin Beatty, qui a été le maître d'œuvre de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Il a déclaré ceci: « En fait, le Comité devrait insister pour obtenir tous les renseignements qui aideraient les Canadiens à comprendre les raisons pour lesquelles la Loi a été invoquée, et les vérifier en fonction des faits de la situation et du seuil délibérément élevé qui est requis. » Êtes-vous d'accord avec lui?
    Oui.
    Il a dit également que la Loi « est un instrument grossier » parce qu'elle doit couvrir des situations d'urgence « qui ne peuvent être gérées efficacement d'aucune autre manière ». Êtes-vous d'accord?
    La Loi sur les mesures d'urgence est conforme à la Charte…
    Êtes-vous d'accord?
    C'est trop complexe pour répondre par oui ou non.
    Merci.
    Il a dit aussi que le recours à la Loi facilite l'application de la loi, mais que « la question est de savoir si le seuil délibérément élevé qui a été établi a été atteint, et non si les pouvoirs donnés étaient utiles ». Autrement dit, il faut établir si les pouvoirs existants étaient suffisants pour régler le problème. Êtes-vous d'accord?
    C'est l'application qui en a été faite.
    Concernant le gel des comptes bancaires des personnes associées aux manifestations, il a fait valoir que tout nouveau pouvoir du gouvernement « devrait être conféré en période de calme et non au moyen d'un règlement élaboré en temps de crise ». Êtes-vous d'accord?
    Oui.
    Il a dit aussi que la « police a été appelée à réagir à un dysfonctionnement de notre système politique ». Êtes-vous d'accord?
    Non.
    Il a déclaré que si le gouvernement voulait « éviter des situations d'urgence beaucoup plus graves à l'avenir, nous devons rétablir le civisme dans l'arène politique, de manière à pouvoir à nouveau être fortement en désaccord sur divers enjeux sans nous considérer comme des ennemis ». Êtes-vous d'accord?
    Je ne suis pas une politicienne.
    Êtes-vous d'accord?
    Je serais certainement d'accord, mais je ne suis pas une politicienne.
    Merci.
    Il a dit aussi: « Notre corps politique est blessé à l'heure actuelle. Nous devons guérir ces blessures. Nous devons le faire en nous traitant mutuellement, en tant que Canadiens, avec respect. Nous devons le faire en mettant de côté les différends partisans et en accordant la priorité à l'intérêt national. »
    Êtes-vous d'accord avec cette déclaration?

  (1920)  

    Oui.
    Il a dit: « Le Parlement se doit maintenant de faire tout ce qu'il peut pour atténuer les divisions qui ont été créées. » Êtes-vous d'accord?
    Je ne suis pas une parlementaire.
    Seriez-vous d'accord avec moi qu'une des principales fonctions d'un premier ministre est d'unir les Canadiens, pas de les diviser en criant des injures?
     Le premier ministre doit protéger les Canadiens.
    Êtes-vous d'accord?
    Je suis d'accord qu'il doit protéger les Canadiens.
    Êtes-vous d'accord que le premier ministre ne devrait pas injurier qui que ce soit?
    Je vais réserver mes commentaires à ce sujet.
    D'accord.
    Vous êtes au courant que durant l'enquête, le premier ministre a affirmé qu'il n'avait pas proféré d'injures à l'endroit des personnes non vaccinées. Êtes-vous au courant qu'il a fait cette déclaration?
    Oui. J'ai entendu cette déclaration.
    Êtes-vous d'accord avec moi qu'en 2021, le premier ministre a déclaré à la télévision québécoise que des gens sont farouchement opposés à la vaccination, ne croient pas à la science, sont misogynes et souvent racistes. Il a ajouté que même s'ils sont peu nombreux, ils prennent beaucoup de place. Il a ensuite posé la question suivante: est‑ce que les leaders et le pays doivent tolérer ces gens ou leur dire de se réveiller?
    Il a repris les mêmes propos durant la campagne électorale inutile de 2021. Êtes-vous d'accord qu'il a fait des déclarations?
    Je n'ai pas entendu ces déclarations. Je suis désolée.
     Seriez-vous d'accord pour dire que soit le premier ministre a de graves problèmes de mémoire, soit il a délibérément et intentionnellement tenu des propos trompeurs durant l'enquête?
    Madame la présidente, je crois que ces questions ne sont pas justes.
    Votre temps est écoulé.
    Elle peut répondre à la question. Ce n'est pas à elle, à cette témoin…
    J'invoque le Règlement, madame la présidente. Les remarques sur les déclarations d'un témoin sont déplacées…
    … de contester la validité et la pertinence d'une question.
    Est‑ce que j'ai encore…
    Les déclarations de la témoin tiennent…
    Est‑ce que je peux lui laisser la chance de répondre?
    Merci.
    Je ne suis pas certaine de me souvenir de la question.
    Je peux la répéter, madame la présidente.
    M. Yasir Naqvi: [Inaudible]
    M. Larry Brock: Elle m'a demandé de répéter la question. Si la présidente me le permet, j'aimerais répéter la question, monsieur Naqvi.
     Seriez-vous d'accord pour dire que soit le premier ministre a de graves problèmes de mémoire, soit il a délibérément…
    Madame la présidente, je n'ai pas entendu votre décision concernant la répétition de la question.
    Pouvez-vous trancher, s'il vous plaît, madame la présidente?
    J'ai tranché. Je lui ai dit de répéter la question.
    Puis‑je répéter la question sans être interrompu par les députés libéraux?
    Pouvez-vous poursuivre, s'il vous plaît?
    Je vais poursuivre sans interruption. Merci, madame la présidente.
    Seriez-vous d'accord pour dire que soit le premier ministre a de graves problèmes de mémoire, soit il a délibérément et intentionnellement tenu des propos trompeurs durant l'enquête du juge Rouleau?
    Cette question est péjorative. Je n'y répondrai pas.
    Merci.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Bendayan, vous avez quatre minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de comparaître devant le Comité.
    Je comprends que les conseils que vous avez donnés au gouvernement fédéral les 13 et 14 février reposaient sur les renseignements reçus de diverses sources. Est‑ce bien ce que vous déclarez devant le Comité aujourd'hui?
    Merci de cette question.
    Oui, nous nous reposions sur les renseignements, mais également sur les mesures prises par divers ministères et la communauté de la sécurité nationale et du renseignement pour aider leurs partenaires municipaux et provinciaux à dénouer la crise.
    Après avoir entendu le témoignage de Mme Chayer tout à l'heure, je pensais qu'une partie des renseignements reçus par le CIET étaient liés notamment aux menaces terroristes internationales et au risque que la situation soit exploitée à mauvais escient.
    Je suis désolée. Pouvez-vous répéter la dernière partie?
    Avez-vous eu des craintes que le Canada soit exposé à des menaces internationales durant cette période d'anarchie?
    C'était effectivement dans notre ligne de mire. Nos craintes, et nous l'avons évoqué dans notre rapport, concernaient le risque que les événements ouvrent une porte à des groupes extrémistes violents.
    Madame Thomas, vous avez fait allusion tout à l'heure à une découverte très choquante. Dans un article du Globe and Mail, il est question de documents judiciaires rendus publics récemment qui portent sur le complot d'assassinat d'agents de la GRC à Coutts. Selon ces documents, les enquêteurs ont découvert 2 bombes artisanales, 36 098 cartouches, des masques à gaz et des armes à feu. Par chance, les bombes artisanales ont été désamorcées par une équipe spécialisée. La CBC a aussi révélé que la police a produit un texto dans lequel les leaders demandaient aux troupes de faire passer le message que la manifestation visait avant tout à déstabiliser les systèmes politiques et judiciaires, mais aussi le système de santé.
    Je pense que vous êtes au courant de tout cela. Vous avez aussi mentionné que la situation à Coutts vous préoccupait beaucoup. Voulez-vous, ou pouvez-vous ajouter quelque chose à ce que nous avons appris aujourd'hui?

  (1925)  

    Merci beaucoup de poser cette question.
    Au‑delà de la gravité de la situation, de son ampleur et des intentions sous-jacentes, qui sont maintenant publiques… Tout cela confirme ce que nous pensions. Je n'ai rien d'autre à ajouter. La volonté de renverser le gouvernement, que ce soit ici ou par l'emploi de la force à Coutts, et l'instrumentalisation de la dissidence publique pour forcer un changement de gouvernement ou des politiques publiques, y compris en matière de santé, faisaient partie des intentions sous-jacentes des convois.
    Merci.
    Je pense vous avoir entendu dire plus tôt qu'après avoir essayé d'utiliser tous les instruments et tous les pouvoirs existants, vous avez conclu durant le troisième week-end de manifestations que le gouvernement fédéral allait devoir s'en mêler. Est‑ce que vous déclarez ce soir qu'au vu des renseignements dont vous disposiez, on avait essayé d'utiliser tous les pouvoirs et tous les instruments existants?
    Je vous remercie de cette question.
    Je ne peux pas affirmer qu'on avait essayé… À diverses occasions, la législation provinciale aurait pu être appliquée, mais la province s'en est abstenue.
    Vous avez indiqué que les choses n'avançaient pas avec la province.
    En effet.
    Merci.
    Vous avez parlé également de votre conversation téléphonique avec le conseiller adjoint à la sécurité nationale du département de la Sécurité intérieure des États-Unis. Savez-vous… Vous avez dit que c'était un appel sérieux. À votre connaissance, votre homologue américain avait‑il déjà fait ce genre d'appel, et pouvez-vous nous parler un peu plus du sérieux de cette conversation?
    Merci.
    Madame Bendayan, votre temps est écoulé. Est‑ce qu'elle pourrait répondre par oui ou non pour l'instant et poursuivre au prochain tour?
    Je crois que nous devrions donner la possibilité à la témoin de répondre.
    C'est ce que j'ai dit.
    Je ne parle pas d'une réponse par oui ou non, mais d'une réponse complète.
    Merci.
     Les conversations avec la Maison-Blanche, avec le conseiller à la sécurité nationale et avec l'ensemble de l'appareil du renseignement des États‑Unis sont constantes. Mes collègues ici présents s'entretiennent régulièrement avec leurs homologues.
    Pour ma part, il était un peu inhabituel de recevoir sitôt après mon entrée en fonctions un appel disant: « Nous devons régler ce problème. Je dois vous parler tout de suite » d'une personne que je n'avais pas encore rencontrée. C'était un appel révélateur d'une très grande collaboration. Nos collègues américains voulaient faire tout en leur pouvoir pour nous aider, car nos économies sont tellement intégrées.
    Bien, je pense que c'est suffisant. Merci.
    Monsieur Fortin, vous disposez de trois minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Madame Thomas, vous dites que vous étiez en constante communication avec votre vis-à-vis américain. Vous nous avez dit que, en Ontario, les moyens possibles n'avaient pas été utilisés.
    Avez-vous parlé avec votre homologue de l'Ontario, le responsable de la Sécurité publique de l'Ontario? Lui avez-vous parlé pour lui demander ce qu'il fallait faire au sujet de la rue Wellington et s'il pouvait intervenir? Y a-t-il eu des discussions là-dessus?

[Traduction]

    Merci beaucoup pour la question. Nous avons eu ce que nous appelons des appels et des forums tripartites, par l'entremise de tous les différents ministères qui s'efforçaient d'intervenir, par l'entremise de Sécurité publique, de Transports Canada et des services de police. Nous avons essayé, et vous avez entendu le témoignage de la province. Nous avons essayé. On nous a accusés de vouloir refiler le problème à l'Ontario. Nous avons essayé de collaborer avec l'Ontario. Ottawa n'est pas le district du Canada.

[Français]

     Avez-vous parlé avec votre homologue de...

[Traduction]

    Je n'en ai pas directement.
    Vous n'en avez pas, d'accord.

[Français]

    Vous avez vu comme moi que les barrages sur la rue Wellington ont finalement été levés par quelque 2 000 policiers. Dans vos recommandations au premier ministre, lui disiez-vous qu'il faudrait tout simplement envoyer des policiers à Ottawa, comme ce qui a été fait pour libérer la rue Wellington? Lui avez-vous recommandé cette opération?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question. La Loi sur les services policiers de l'Ontario régit les services policiers en Ontario. Le Service de police d'Ottawa fait la demande à la PPO.

[Français]

    Avez-vous recommandé au premier ministre d'intervenir pour que des policiers viennent à Ottawa ou de demander aux autres premiers ministres d'envoyer des policiers? Avez-vous recommandé cette opération policière pour libérer la rue Wellington?

  (1930)  

[Traduction]

    Je n'ai pas fait cette recommandation, non.

[Français]

[Traduction]

    Cela s'est fait par les canaux de la police avec la commissaire de la GRC, qui est notre liaison avec la police. Le premier ministre n'ordonne pas à un autre ordre de gouvernement d'envoyer des policiers à un endroit donné.

[Français]

    Cela n'aurait-il pas été une solution plus simple et plus respectueuse, disons, que d'invoquer la loi sur les mesures de guerre ou, plutôt, la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Merci.
    Je le répète, c'est plus complexe que cela. Les policiers ont été envoyés pour aider à Ottawa. Ils avaient besoin d'un plan à exécuter. Toutes les discussions se résumaient à: « Comment allez-vous utiliser les policiers? À quoi vont-ils servir? Quel est votre plan tactique et stratégique? » Nous comptions sur la commissaire de la GRC comme porteuse du dossier.
    Monsieur Fortin, je suis désolée. Votre temps est écoulé. Nous aurons un autre tour.
    Monsieur Green.
    Je vous remercie. Je vais adresser mes questions à Mme Chayer. Un reportage du Guardian nous a appris que dans la période précédant l'occupation, le CIET a fait une recommandation et avisé le gouvernement qu'il y aurait probablement des éléments extrémistes violents à caractère idéologie. Est‑ce exact?
    Nous avons souligné dans notre rapport qu'il y avait une probabilité qu'ils soient là. Cependant, le CIET ne fait pas de recommandations. Nous ne faisons qu'évaluer...
    Bien sûr. Les avez-vous signalés? Les rapports de sécurité et les renseignements vous ont-ils appris qu'ils étaient actifs et faisaient partie du mouvement qui descendait sur la capitale nationale?
    Je crois que le rapport auquel vous faites référence était non classifié, un rapport que nous avons communiqué au service de police compétent. Il est basé sur des sources ouvertes... Il était basé sur des renseignements que nous avons vus dans une source ouverte.
    Étant donné les révélations dans les médias aujourd'hui que ce groupe armé de Coutts, opérant comme une milice, à défaut d'une meilleure... Je vous pose la question. Ce groupe qui, à l'origine, était composé de quelques loups solitaires comptait alors d'autres membres dans ses rangs. Cela faisait‑il partie de votre évaluation? Étiez-vous au courant d'enquêtes en cours sur ce groupe qui prévoyait de participer ainsi à l'approche de l'occupation?
    Je ne suis pas en mesure de parler de cette question.
    Préféreriez-vous que nous parlions de cette question à huis clos?
    Non. C'est lié au niveau de classification de ces détails. Je dirais, cependant, vous savez, que mon travail consiste à évaluer la probabilité d'un incident terroriste.
    La question que je vous pose est de savoir si vous étiez au courant de l'existence d'une cellule terroriste armée s'organisant et représentant une menace directe pour la GRC, concomitante avec l'occupation du mouvement du convoi et ayant infiltré ce mouvement.
    Je peux vous dire que nous n'étions pas au courant des détails des opérations policières.
    Étiez-vous au courant des détails de l'organisation par des sources ouvertes...? J'imagine qu'une grande partie de ces préparatifs se déroulaient en ligne.
     Compte tenu de tous les renseignements relatifs à la sécurité nationale dont vous disposez, soit vous étiez au courant, soit vous ne l'étiez pas. Si vous étiez au courant, vous les avez conseillés. Si vous n'étiez pas au courant, ne considérez-vous pas comme un manquement à la sécurité nationale que nous ne sachions pas qu'ils s'organisaient ainsi?
    Je crois que j'ai mentionné...
    Permettez-moi de reformuler. La sécurité nationale est un sujet très vaste...
    Il s'agit de savoir si vous étiez au courant.
    Alors, je crois que j'ai répondu à la question, mais...
    D'accord. Je vais vous poser une dernière question. Il me reste 30 secondes.
    Seriez-vous disposée à nous soumettre les notes que vous avez préparées aujourd'hui? En vue de votre comparution, je suppose que vous avez apporté des notes auxquelles vous pouvez vous référer, si on vous pose des questions. Pour notre examen, je vais demander à tous les témoins s'ils sont disposés à soumettre leurs notes au Comité pour les besoins de nos analystes et de nos futurs rapports.
    Oui, mes notes seront...
    Pour être plus clair, c'était un non?
    Il y a ici des documents que je ne pense pas être en mesure de divulguer.
    Connaissez-vous l'obligation de franchise, monsieur?
    Oui.
    Savez-vous que cette obligation s'étend à la Chambre des communes en tant que grand inquisiteur du pays et que nous avons toute latitude pour demander des documents et autres? Êtes-vous au courant?
    Oui.
    Monsieur Green, votre temps est écoulé.
    C'est un rappel au Règlement, madame la présidente.

  (1935)  

    Madame la présidente, c'est un enjeu qui revient sans cesse au sein de ce comité. Je ne suis pas certain, compte tenu de toutes les connaissances à notre disposition ici, si on leur conseille de faire obstruction à ce comité ou de coopérer avec lui.
    Nous avons reçu un mandat qui nous a fait prêter serment et qui nous permet de travailler à huis clos. Je voudrais simplement dire aux témoins, par votre entremise, que nous pourrions procéder de façon volontaire ou nous pourrions commencer à fonctionner en déposant des motions au Comité qui exigeraient les documents, dont le refus serait considéré, à mon avis, comme une obstruction à ce comité.
     Je veux simplement m'assurer que les membres ici présents comprennent le sérieux de ce comité et les pouvoirs et privilèges parlementaires dont nous disposons en tant que députés.
    Madame la présidente, il est certain que ma reliure sera divulguée. Nous divulguerons les documents et nous collaborerons avec les greffiers du Comité pour en caviarder le contenu de niveau Très secret. Il ne devrait pas y avoir de contenu de niveau Très secret ou Secret, mais nous allons certainement divulguer nos renseignements.
    Je vous remercie.
    J'invoque le Règlement, madame la présidente. Je suis simplement curieux de savoir si les greffiers ont pu envoyer la mise en garde dont nous avions convenu la semaine dernière à ces témoins avant leur comparution aujourd'hui. C'est tout.
    Le greffier nous fait signe que oui.
    Merci.
    Je vais céder la parole au sénateur Carignan pour trois minutes, suivi du sénateur Harder.

[Français]

     Merci.
    Mes questions s'adresseront à Mme Thomas.
    Vous êtes conseillère du premier ministre en matière de sécurité. D'où tenez-vous votre information de base, celle qui est nécessaire pour le conseiller?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question.
     Le Bureau du Conseil privé est un consommateur de renseignements. Nous ne collectons pas de renseignements. Nous recevons des renseignements bruts et certains renseignements évalués de la communauté de la sécurité nationale, des ministères que j'ai énumérés plus tôt — le SCRS, le CST, Affaires mondiales Canada, le commandement du renseignement des Forces canadiennes...

[Français]

    Il y a aussi la GRC.

[Traduction]

    Oui, tout à fait, de la GRC.
    Une partie est évaluée. Une partie est brute. En ce qui concerne le renseignement étranger, le groupe de M. Green fait une évaluation de tout cela afin de fournir une vue d'ensemble du renseignement et de ce qu'il pourrait signifier.

[Français]

    Vous avez accès à toute cette information, n'est-ce pas?

[Traduction]

    Oui, j'y ai accès.

[Français]

    Quand aviez-vous parlé pour la dernière fois à la commissaire de la GRC, avant le 14 février?

[Traduction]

    Je vous remercie pour cette question.
    Nous nous sommes parlé plusieurs fois par jour.

[Français]

    Vous vous parliez donc plusieurs fois par jour dans les jours qui ont précédé le 14 février.

[Traduction]

    Oui. Je pense que nous avons fourni des renseignements sur les calendriers, les jours où nous avons eu des réunions et les types de réunions que nous avons eues. La commissaire de la GRC participait à ce que nous appelons le COSM, le Comité des opérations des sous-ministres. Il y avait des conversations privées, des conversations individuelles...

[Français]

    D'accord. Alors, vous étiez toujours en contact avec elle et vous vous parliez continuellement. Lui avez-vous demandé si elle avait un plan?

[Traduction]

    Ce n'était pas son plan, parce qu'à ce moment, la GRC... Le SPO était le service de police compétent, donc ce n'était pas son plan. Elle faisait état des efforts de planification de la cellule de planification des trois niveaux de corps policiers.

[Français]

    D'accord.
    Lui avez-vous demandé si d'autres moyens que l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence pouvaient être utilisés? Lui avez-vous posé cette question précise?

[Traduction]

    Je n'ai pas posé cette question précise à la commissaire de la GRC.

[Français]

     Pourquoi?

[Traduction]

    Parce que nous avions des conversations régulières sur les deux pistes de travail: la première étant la législation en vigueur, la deuxième étant les nouveaux pouvoirs. Si des pouvoirs n'avaient pas encore été exercés, la façon dont le comité était structuré, les gens présentaient leurs propositions.

[Français]

    J'ai entendu le premier ministre témoigner devant la commission Rouleau et il a dit qu'on cherchait un moyen pour en faire plus.
    Avez-vous senti que le premier ministre avait envie d'en faire plus?

[Traduction]

    Je vous remercie de cette question.
     Je ne peux pas faire d'hypothèse à propos de ce que le premier ministre pensait en répondant à cette question. Le premier ministre voulait que les convois et les blocages partout au pays prennent fin. C'était la question tous les jours: comment cela va‑t‑il se terminer?
    Monsieur le sénateur Carignan, votre temps est écoulé.
    Monsieur le sénateur Harder, la parole est à vous.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie encore une fois les témoins pour leur franchise.
    J'aimerais parler un peu de votre travail après la révocation. J'aimerais particulièrement savoir si les leçons tirées de cette affaire sont effectivement intégrées dans votre façon de travailler. J'ai deux ou trois questions à vous poser.
     L'accent mis sur l'EVCI est‑il plus important par suite de cette expérience? Des travaux sont-ils en cours? Il y a quelques semaines, on a annoncé qu'une célébration de l'événement aurait lieu en février. À votre connaissance, y a‑t‑il des travaux en cours pour assurer une meilleure collecte de renseignements afin d'évaluer cet événement? Y a‑t‑il des travaux en cours avec nos collègues américains en raison des préoccupations concernant le bien-être économique des voies commerciales, des ponts en particulier, qui sont maintenant à un niveau plus élevé d'engagement régulier?
     Pourriez-vous décrire un peu... je ne dirais pas les leçons apprises à ce stade, mais une conscience opérationnelle accrue?

  (1940)  

    Merci beaucoup pour cette question.
    Je pense que M. MacDonald serait très utile, car il préside les SMA qui exécutent, comme vous le savez, la majorité de ce genre de travail.
    Il ne fait aucun doute que nous avons tiré des enseignements des événements et que nous essayons de nous assurer de les intégrer, à mesure que nous allons de l'avant. Le « Convoi de la liberté 2023 » a été évoqué aujourd'hui. M. MacDonald a déjà présidé des réunions pour commencer à examiner la façon dont nous allons réagir; les sous-ministres se réuniront pour la première fois à ce sujet cette semaine.
    Les deux plus grands enjeux qui en découlent sont l'EVCI, dont Mme Chayer a parlé, et dans un cadre juridique, dans un environnement de liberté d'expression, comment nous interprétons le renseignement intérieur de sources ouvertes.
    C'est un enjeu important. Il ne suffit pas d'être présent sur Twitter pour comprendre ce qui se passe. Il faut utiliser des outils, l'intelligence artificielle et ce genre de choses, en recherchant des mots-clés, des algorithmes, pour vous aider à comprendre ce qui se passe. Cependant, il vous faut un cadre juridique pour le faire. Même si Twitter est public, il existe toujours des droits à la vie privée, conformément aux lois canadiennes sur la vie privée. Comprendre les renseignements et les tendances qui circulent sans les associer à des personnes qui ne sont pas des personnes d'intérêt, des forces de l'ordre ou des services de renseignement est un enjeu important et complexe. C'est un enjeu auquel nous consacrons une somme importante de travail, mais auquel nous n'avons pas encore de réponse.
    Madame la présidente, je serai très bref, compte tenu du temps.
     Nous avons eu l'occasion de le mettre en place et de réfléchir au fonctionnement de la gouvernance et à la façon dont nous avons réagi collectivement. Il y a eu le convoi « Rolling Thunder » en avril, il y a eu la fête du Canada, qui constitue un rassemblement énorme. Une grande partie des leçons et certaines idées ont été intégrées dans les structures de gouvernance et de décision.
     Je voudrais souligner un point très important. J'ai une relation plus étroite avec la police d'Ottawa et je m'assois directement avec ses représentants pour discuter de ces enjeux. Cela ne se produisait pas vraiment auparavant. De plus, grâce à l'opération Intersect dans la région de la capitale nationale — et cela n'est propre qu'à Ottawa — il y a des conversations sur l'avenir éventuel d'Intersect, comment l'opération pourrait être élargie, comment elle pourrait partager, comment elle pourrait coopérer davantage. Il y a donc...
    Monsieur MacDonald, je vais devoir vous interrompre. Nous avons dépassé le temps imparti. Je vous remercie.
    Chers collègues, nous passons maintenant à des tours de cinq minutes, si mes notes sont exactes, en commençant par M. Brock.
    Madame la présidente, le moment serait‑il bien choisi pour une pause-santé?
    Si c'est le souhait du Comité, nous pouvons prendre cinq minutes.
    Merci.
    Nous suspendons la séance.

  (1940)  


  (1950)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Nous commençons un tour de cinq minutes en donnant la parole à M. Brock.
    Merci, madame la présidente.
    Je vais revenir à vous, madame Thomas. Ce sera le même genre de questions. Peut-être que les réponses seront les mêmes, qui sait?
    Conviendriez-vous que lorsqu'il s'agit de déterminer si le gouvernement a vraiment agi en dernier recours, parce qu'aucune autre loi n'aurait fait l'affaire, c'est l'explication du premier ministre lui-même qui compte?
    Non, c'est plus large que cela.
    Conviendriez-vous que l'interprétation juridique de ces éléments par le gouvernement lui-même ne peut être évaluée qu'en fonction du témoignage du premier ministre, parce qu'aucun avis juridique n'a été publié?
    Vous devrez répéter la question. Je suis désolée.
    Dans son allocution d'ouverture de l'enquête, le juge Rouleau a dit: « Découvrir la vérité est un objectif [le plus] important. Lorsque des événements difficiles se produisent et ont un impact sur la vie des Canadiens, le public a le droit de savoir ce qui s'est passé. »
    Vous en souvenez-vous?
    Oui.
    Lorsqu'il a été élu pour la première fois en 2015, le premier ministre a promis aux Canadiens qu'ils verraient le gouvernement le plus ouvert et le plus transparent que jamais, et pourtant cette enquête a révélé des centaines et des centaines de pages caviardées par le gouvernement, avec peu d'explications sur le fondement juridique de cette expurgation.
    Conviendriez-vous que les actions du premier ministre et des ministres qui ont témoigné à l'enquête ont contrarié de nombreux avocats pour leur permettre d'aller au fond des choses en ce qui concerne la justification de l'invocation de la Loi?
    Je pense que le fait que le premier ministre et les ministres soient à la barre...
    Êtes-vous d'accord ou non?
    ... illustrait une extraordinaire...
    Êtes-vous d'accord?
    ... transparence. Je ne suis pas d'accord...
    Merci.
    Madame la présidente, la témoin devrait être autorisée à répondre à la question.
    Elle peut répondre.
    Allez‑y, monsieur Brock.
    L'avocat de l'enquête, Gordon Campbell, a déclaré que: « Depuis le début de cette procédure, nous avons essayé de trouver un moyen de lever le voile sur ce qui a fait tomber une telle chape de plomb sur ce qui s'est révélé un enjeu fondamental devant la Commission... Nous regrettons simplement que cela en vienne à constituer une absence de transparence de la part du gouvernement. »
    Vous souvenez-vous de cette déclaration?
    Pas précisément, non.
    Convenez-vous que le ministre de la Justice Lametti a témoigné à l'enquête que le gouvernement n'a pas utilisé la définition légale de la Loi sur les mesures d'urgence, mais qu'il a plutôt utilisé sa propre justification, qu'il n'a pu divulguer en raison du secret professionnel de l'avocat? Êtes-vous au courant de cela?
    Je n'ai pas vu tout le témoignage du ministre Lametti.
     Savez-vous que tous les ministres et le premier ministre parlent du secret professionnel de l'avocat pour justifier la non-divulgation de ces avis juridiques? Vous en êtes certainement au courant.
    Le secret professionnel de l'avocat...
    Je vous remercie.
     Le juge Rouleau a insisté auprès du ministre Lametti sur ce point, demandant comment nous pourrions comprendre le fondement juridique de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, et porter un jugement sur celui‑ci, une question centrale sur laquelle la Commission doit se prononcer, si le gouvernement n'était pas disposé à fournir la justification juridique. Il a alors dit: « Je suppose que la réponse est que nous devons simplement présumer qu'ils ont agi de bonne foi en appliquant ce qu'on leur a dit. »
     C'est ma dernière question. Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que la réponse du gouvernement selon laquelle nous devrions simplement lui faire confiance parce qu'il a agi de bonne foi en invoquant la Loi sur les mesures d'urgence est tout le contraire d'une attitude ouverte et transparente envers le juge Rouleau, mais surtout envers les Canadiens? Êtes-vous d'accord avec cette affirmation ou non?
    Le secret professionnel de l'avocat est un protocole de longue date dans ce pays...
    Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Le secret professionnel de l'avocat...
    Êtes-vous d'accord, oui ou non?
    Je ne répondrai pas à cette question...
    Je vous remercie.
    Je cède le reste de mon temps à mon collègue.
    Merci beaucoup, madame la présidente, et merci à mon collègue.
    Au CIET, êtes-vous d'accord pour dire que contrairement à ce que Mme Bendayan a laissé entendre, des personnes et des groupes s'associent à une manifestation et tentent de l'utiliser à des fins idéologiques? Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Mme Jody Thomas: Oui.
    M. Glen Motz: Mme Bendayan a laissé entendre que les gens à Coutts étaient en quelque sorte des manifestants, mais ce n'était pas le cas. La GRC l'a confirmé.
    Madame la présidente, je n'ai jamais laissé entendre une telle chose.
    Vous l'avez fait.
    Quoi qu'il en soit, madame la présidente, j'aimerais profiter du temps qu'il me reste, et même plus, pour proposer la motion qui a été distribuée au Comité. Je précise que mon intention est d'expliquer brièvement de quoi il s'agit, pour ceux qui ne le savent peut-être pas, et d'ajourner le débat sur cette question jusqu'à la prochaine réunion.

  (1955)  

    J'invoque le Règlement.
    Je tiens à préciser, madame la présidente, sur le plan de la procédure, que M. Motz prend son temps de parole pour donner un avis parce que, si je ne me trompe pas, le délai de préavis nécessaire avant la réunion n'était pas suffisant. Par conséquent, d'un point de vue procédural, il ne peut pas déposer la motion puis ajourner le débat. Ce sont deux choses différentes.
    Donner un avis verbalement est une chose. Déposer la motion et ajourner le débat en est une autre.
    Monsieur Motz, je crois que la terminologie appropriée serait simplement de donner un préavis. Je pensais que c'était ce dont nous avions discuté.
    D'accord. Je vais donner un préavis que nous allons déposer cette motion.
    C'était l'idée derrière tout cela.
    Monsieur Motz, je tiens à vous informer qu'il vous reste environ 25 secondes.
    Mais cela ne fait pas partie de mon intervention; il s'agit du dépôt d'une motion.
    Pardonnez-moi, alors. Je croyais que c'était le cas. Allez‑y.
    Merci.
    Un sujet de discussion important au sein de ce comité a été de savoir si les critères nécessaires pour que le gouvernement puisse déclarer un état d'urgence en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence avaient été remplis. L'interprétation de ces critères, y compris, en particulier, le soi-disant...
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je crois que M. Motz est en train d'expliquer le raisonnement derrière le préavis qu'il nous donne...
    Oui.
    ... et il est censé le faire pendant le reste de son temps de parole, qui est apparemment de 25 secondes, d'après ce que vous venez de dire.
    On m'informe que cela n'entre pas dans votre temps de parole pour poser des questions, mais je me demande, monsieur Motz, si vous pouvez être aussi bref que possible puisqu'il s'agit d'un avis de motion.
    Tout à fait. J'aurais déjà terminé si nous n'avions pas été interrompus si souvent, madame la présidente.
    L'interprétation de ces critères, notamment le soi-disant critère lié à la Loi sur le SCRS pour déterminer ce qui constitue une menace pour la sécurité du Canada, est récemment devenue une question fondamentale dans les délibérations de la Commission sur l'état d'urgence.
     Vous vous souviendrez tous que lorsque le procureur général du Canada a comparu devant nous, le 26 avril, il a insisté sur le secret professionnel de l'avocat lorsqu'il a été interrogé sur ces critères. Face à cette revendication, le 31 mai, le Comité a ordonné...
    Madame la présidente, il ne s'agit pas d'un avis de motion, mais d'un discours...
    ... la production des avis juridiques sur lesquels le gouvernement s'est fondé...
    ... qui n'a aucun lien avec les témoins qui comparaissent devant nous. Il a peut-être une question à poser aux témoins.
    Monsieur Motz, pouvez-vous conclure l'avis de motion, s'il vous plaît?
    Oui.
    Nous pourrons en débattre la semaine prochaine.
    Je n'en débats pas. Je présente simplement cette motion dont nous serons saisis la semaine prochaine, pour ceux qui ne comprennent peut-être pas ce que nous demandons.
    La transparence pour les Canadiens est mon objectif ici. De toute évidence, ceux qui s'y opposent ne tiennent pas à la transparence.
    Je comprends. Pouvez-vous continuer, s'il vous plaît?
    Merci.
     Les témoignages entendus au cours des derniers jours de la Commission ont clairement montré que le gouvernement a adopté pour lui-même une interprétation plus large du critère fondé sur la Loi sur le SCRS que le SCRS lui-même emploie pour justifier la déclaration d'un état d'urgence nationale. Le directeur du SCRS a confirmé que cela a été fait sur la base d'un avis juridique préparé par le ministère de la Justice. Les efforts de la Commission pour approfondir ces questions ont été bloqués à plusieurs reprises par le gouvernement.
    Madame la présidente, je crois qu'il ne fait que lire une lettre d'accompagnement qu'il a distribuée à chacun d'entre nous. Nous avons tous reçu cette lettre.
    Si c'est l'avis, alors nous n'avons pas besoin qu'on nous en fasse la lecture.
    Cela ne vous appartient pas, monsieur Virani.
    Alors, cela pourra faire l'objet d'un débat la semaine prochaine comme nous venons d'en convenir, madame la présidente.
    C'est tout à fait inacceptable.
    Monsieur Motz, puis‑je vous demander de conclure? Je pense que vous en avez déjà beaucoup dit.
    Notre comité est particulièrement bien placé pour aider à obtenir des réponses à la fois pour la Commission et pour les Canadiens, et comme le droit relatif au privilège parlementaire est de nature constitutionnelle, notre comité et le pouvoir de la Chambre ont préséance sur le droit législatif...
    Madame la présidente, si vous avez rendu une décision, elle peut être contestée, et je conteste donc cette décision. Je ne comprends pas ce qui se passe ici. Lire une lettre de deux pages pour qu'elle figure au compte rendu ne constitue pas un avis de motion.
    Monsieur Motz, avez-vous terminé?
    Comme le rapport de la Commission doit être déposé dans moins d'un mois...
    Pardon?
    Je vous demande de conclure.
    Oui.
    Ai‑je terminé?
    Oui, je crois que vous avez fait le tour. Je vous remercie.
    Monsieur Virani, la parole est à vous pour cinq minutes.

  (2000)  

    Merci, madame la présidente.
     Madame Thomas, je vais commencer par vous. On trouve bien sûr dans la Loi sur le SCRS une définition des menaces envers la sécurité du Canada. L'alinéa 2c) de cette définition parle des « activités qui touchent le Canada ou s'y déroulent et visent à favoriser l'usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens dans le but d'atteindre un objectif politique [...] au Canada ou dans un État étranger ». Il y a aussi quelques autres catégories.
    Connaissez-vous cette définition?
    Je la connais.
    Madame Thomas, vous avez témoigné devant le juge Rouleau dans le cadre de l'enquête sur l'état d'urgence et, bien sûr, vous avez été soumise à un contre-interrogatoire par plusieurs avocats.
     À un moment donné, l'avocat du gouvernement du Canada vous a interrogée sur votre compréhension des objectifs perçus de certains manifestants et vous avez répondu que vous croyiez savoir qu'il y avait différents objectifs, y compris la destitution du premier ministre. Vous souvenez-vous de ce témoignage?
    Je m'en souviens.
    Maintenez-vous ce témoignage?
    Je le maintiens.
    Mme Bendayan vous a parlé de certains éléments qui ont récemment été mis au jour, étant donné que la Cour supérieure de Lethbridge, en Alberta, si je ne me trompe pas, a levé les scellés d'un mandat d'arrestation. En partie, ce qu'on a découvert lors de la divulgation de ce mandat de perquisition, c'est que les dirigeants qui orchestraient le blocage de Coutts parlaient, textuellement, de l'élimination de la classe politique professionnelle. Il contenait aussi des renseignements sur le véritable objectif de la manifestation, notamment la modification des systèmes politique, judiciaire et médical du Canada.
     Êtes-vous au courant de cette dénonciation?
    Je le suis maintenant.
    Nous savons que le blocage de Coutts a été dégagé vers les 13 et 14 février. Une fois que Coutts a été dégagé, était‑ce votre impression que la menace était terminée à la frontière de Coutts, ou avez-vous eu l'impression que des menaces persistaient à cet endroit ou dans d'autres parties du pays?
    Je vous remercie de cette question.
     Lorsque le blocage de Coutts a été dégagé, en raison de la découverte d'armes, nous étions relativement sûrs que Coutts resterait dégagé. Cependant, nous n'étions pas sûrs... et nous savions certainement qu'Ottawa était loin d'être libérée. Nous commencions à entendre le même langage: des armes dans des camions-remorques, des armes à Ottawa, la connaissance de la présence d'armes.
     Pour protéger la criticité de cette enquête, les policiers restaient très discrets, ce que je comprends et respecte totalement. Lorsque nous entendions les mêmes choses à propos d'Ottawa, il aurait été négligent de ne pas entretenir les mêmes présomptions sur la présence potentielle d'armes à Ottawa.
    Que diriez-vous des blocages des frontières dans des endroits comme le Manitoba, la Colombie-Britannique, etc.?
    Nous étions de plus en plus préoccupés par la Colombie-Britannique. Le 13 au soir, un véhicule a forcé la frontière. Chaque jour, des activités à un endroit différent suscitaient des inquiétudes.
     Encore une fois, selon le flux continu de renseignements, des groupes se formaient pour venir appuyer... partant de l'île pour se rendre à Surrey, de la Colombie-Britannique pour traverser le pays afin de soutenir le mouvement à Ottawa. En fait, malgré ce qui s'est passé à Coutts, le mouvement était en train de croître, et non de diminuer.
    C'était après l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence.
    C'était avant l'invocation.
    Mais vous avez l'impression que les menaces ont persisté.
    Oui, elles ont persisté.
    Votre travail en tant que conseillère en matière de sécurité nationale — et je suis désolé de vous poser une question aussi banale — consiste à conseiller le premier ministre et le Cabinet au sujet des menaces à la sécurité.
    Je fournis des conseils et des renseignements.
    De votre point de vue, cette menace perçue aurait orienté les conseils que vous avez donnés au premier ministre lorsqu'on vous a demandé sans détour si la Loi sur les mesures d'urgence devait être invoquée.
    Oui.
    Lors de la même enquête devant le juge Rouleau, vous avez aussi témoigné au sujet de la définition. Je crois que vous répondiez à l'avocat de l'Association canadienne des libertés civiles; je sais que de nombreux avocats vous ont posé des questions.
     Je crois que vous avez souligné qu'il fallait moderniser la définition de la sécurité nationale pour tenir compte de la nature des menaces modernes et que différentes menaces pouvaient ne pas correspondre à la définition actuelle de l'article 2. Pouvez-vous préciser votre pensée?
    Lorsque la Loi sur les mesures d'urgence a été rédigée, la présomption et la compréhension de la menace à l'époque étaient qu'une menace se manifestait probablement à l'étranger comme une menace envers le Canada — heureusement jamais dans la même mesure, mais plutôt dans la lignée du 11 septembre — plutôt que ce que nous avons vu le 6 janvier.
     Avec le 6 janvier, ce type de menace intérieure est un mouvement plutôt qu'une organisation dotée d'une structure de commandement et de contrôle. C'est ce que les cellules terroristes, faute d'une meilleure désignation, avaient l'habitude de faire, une structure de commandement et de contrôle dans laquelle des gens recevaient leurs tâches et les exécutaient.
     Le mouvement de l'EVCI correspond exactement à ce que mes collègues ici présents ont décrit. Il s'agit de personnes ayant des opinions, généralement terribles, mais légales, comme le dit le SCRS, qui peuvent utiliser les médias sociaux pour convaincre d'autres personnes d'adhérer à ces opinions en utilisant la mésinformation et la désinformation, et cela motive les gens à agir.
     Il y a eu...

  (2005)  

    Madame Thomas, je suis désolée, mais le temps de M. Virani est écoulé.
    Merci, madame Thomas.
    Monsieur Fortin, vous disposez de cinq minutes.

[Français]

     Merci, madame la coprésidente.
    Madame Thomas, combien de personnes y avait-il sur la Colline du Parlement ou sur la rue Wellington au plus fort des manifestations?

[Traduction]

    Au plus fort des manifestations les week-ends, nous avons dénombré de 500 à 700 camions-remorques et de 8 000 à 10 000 personnes.

[Français]

    Si on apprenait aujourd'hui qu'il se prépare une autre manifestation en janvier et qu'on évaluait qu'il y aurait entre 5 000 et 10 000 personnes sur la Colline, recommanderiez-vous au premier ministre de proclamer la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Non.

[Français]

[Traduction]

    Lors du convoi « Rolling Thunder » qui s'est déroulé ici en avril ou mai, nous avons vu qu'avec une bonne compréhension des renseignements et de l'information, en travaillant avec le convoi ou les manifestants qui se dirigeaient vers la ville, et la bonne intervention policière, en collaboration avec nos collègues de la communauté de la sécurité nationale, comme l'équipe d'Intersect, la Loi sur les mesures d'urgence n'était pas nécessaire.

[Français]

    Si vous appreniez qu'il y a, parmi les manifestants, des personnes qui ont l'intention de rester sur la rue Wellington pendant plusieurs semaines, cela changerait-il votre recommandation?

[Traduction]

    Encore une fois, je pense que différentes mesures des policiers et de la municipalité permettraient de garantir que les gens ne s'incrustent pas sur la rue Wellington. Bien sûr, on ne peut plus accéder à la rue Wellington au même endroit. Une intervention différente serait faite, à l'avance, pour empêcher l'enracinement dans la mesure où nous l'avons vu en janvier et en février.

[Français]

    Si vous appreniez que certains de ces manifestants pourraient être armés, que recommanderiez-vous au premier ministre?

[Traduction]

    S'il s'agissait de personnes d'intérêt pour le SCRS, nous recommanderions que le SCRS en parle à la GRC. Une intervention policière aurait lieu et une enquête de la GRC serait ouverte. Si le problème est du ressort du service de police compétent, j'ai pleine confiance que le Service de police d'Ottawa réagira de la bonne façon.

[Français]

    Si vous appreniez que les manifestants ont l'intention de venir avec des gros camions, comme ce fut le cas il y a un an, et de bloquer la rue Wellington ou la rue Sparks, en fait, la Colline du Parlement, quelle serait votre recommandation au premier ministre?

[Traduction]

     Avant toute recommandation au premier ministre, nous collaborerions avec le service de police pour nous assurer que les camions ne restent pas sur place. Comme nous l'avons vu à Montréal, à Québec et à Toronto, où le convoi a été imité, comme les camions n'ont pas été autorisés à s'arrêter, le même problème ne s'est pas posé.

[Français]

    Je me trompe peut-être — vous me le direz si c'est le cas —, mais si je comprends bien, la source véritable du problème à Ottawa, c'est que les services policiers auraient mal fait ou n'auraient pas fait leur travail.

[Traduction]

    Je ne suis pas une spécialiste des interventions policières. La police procède à son propre examen, et l'enquête portera sur les interventions policières en cause. Cependant, dans les villes où les camions n'ont pas été autorisés à s'arrêter, le même problème ne s'est pas posé.

[Français]

    Si vous étiez confrontée à la même situation, en tant que conseillère en sécurité nationale, devant l'inaction ou les mauvaises stratégies policières, quel serait aujourd'hui votre avis au premier ministre?

[Traduction]

    Parlez-vous d'un événement futur?

[Français]

[Traduction]

    Nous aurions une collaboration très étroite avec la GRC et Intersect, ainsi qu'avec nos collègues de Sécurité publique et d'autres ministères, pour veiller à ce que le niveau d'intervention et le plan appropriés soient en place, comme nous l'avons vu avec le convoi « Rolling Thunder » et le 1er juillet dernier.
    Je pense que le genre de participants à des protestations, des convois ou des manifestations, peu importe comment vous voulez les appeler, qui peuvent venir et qui sont prêts à rester sont maintenant vus différemment, et la réponse serait différente.

  (2010)  

    Monsieur le président, pour situer un peu mieux le contexte, l'une des réussites...

[Français]

    Il ne me reste que 30 secondes, monsieur MacDonald.
    Je vais parler très brièvement.

[Traduction]

    L'une des réussites lors du convoi « Rolling Thunder » a été, en fait, le rôle que la Ville a joué et les décisions qu'elle a prises, que la police d'Ottawa a mises en oeuvre.
    Je vous remercie.

[Français]

    Merci, monsieur MacDonald.

[Traduction]

    Monsieur Fortin, je suis désolée, votre temps est écoulé.

[Français]

[Traduction]

    Allez‑y, monsieur Green.
    Madame Thomas, vous avez fourni la définition traditionnelle d'une cellule terroriste: des gens motivés par une idéologie — bien que vous ayez dit « à l'étranger », post-11 septembre — mais contrôlés par d'autres personnes qui donnent les ordres aux gens sur le terrain, qui les exécutent ensuite.
     D'après les renseignements dont vous dites avoir appris l'existence aujourd'hui, ne pensez-vous pas que les gestes posés à Coutts correspondent à la définition traditionnelle d'une cellule terroriste?
    Je vous remercie de cette question.
    C'est une question très importante, monsieur Green. Je n'en sais pas assez à ce stade pour y répondre. Je sais seulement ce que nous avons tous lu dans les médias.
    Mais vous savez qu'ils ont trouvé d'importants... Voici le problème que me pose, je dirais, la sous-estimation de ce qui s'est passé à Coutts: l'intention de tuer des agents de la GRC, les réserves d'armes trouvées et les bombes artisanales.
    Je vais vous parler d'une interaction que j'ai eue avec quelqu'un sur la base de renseignements, car il s'agit vraiment de la qualité du renseignement et des préjugés qui subsistent dans le maintien de l'ordre. Il y avait une note sur l'État islamique comme étant une menace, sans aucune mention du dominionisme chrétien, de la suprématie blanche et des mouvements de milice croissants que nous avons ici. Comment se fait‑il que le vocabulaire du terrorisme ne soit prescrit qu'aux personnes de couleur, aux minorités religieuses, et qu'il ne soit jamais correctement assimilé à ce que je considère comme l'une des plus grandes menaces dans ce pays, à savoir l'ethnonationalisme et la suprématie blanche?
    Autrement dit, étant donné ce que nous entendons maintenant — qu'il s'agissait d'une cellule qui prenait des directives de quelqu'un — je vais vous poser la question d'une autre manière pour vous donner l'occasion de revoir peut-être votre réponse: en quoi cela ne répond‑il pas à la définition d'une cellule terroriste traditionnelle?
    J'ai l'experte en terrorisme à mes côtés, alors je vais...
    D'accord. Posons-lui la question.
    Je suis d'accord avec vous.
    Bien. Je vous remercie.
    Laissons répondre la représentante du CIET, car il s'agit d'une question du genre « soit vous le savez, soit vous ne le savez pas », et si vous ne le savez pas, compte tenu de ce que nous venons de découvrir, c'est un problème.
    Je vais commencer.
    Chaque année, plusieurs fois par an, nous évaluons le niveau de menace terroriste à l'échelle nationale et nous...

[Français]

     Excusez-moi, madame la présidente, mais nous entendons mal Mme Chayer.
    Madame Chayer, pourriez-vous rapprocher votre micro? Ce que vous dites est intéressant, et je veux bien vous entendre.
    J'ai un ton de voix très bas, je suis désolée.

[Traduction]

    Je souligne simplement que mon temps de parole a été interrompu vers 14:13:14. Je vous remercie.

[Français]

    C'est très bien.

[Traduction]

     Comme je le disais, nous évaluons régulièrement le niveau de menace pour le pays et nous publions une évaluation. Dans la dernière version de notre évaluation, nous avons indiqué que, du point de vue du CIET, le scénario le plus probable concernant une menace de type terroriste est celui d'un acteur isolé influencé ou radicalisé par le discours de l'EVCI. Nous l'avons reconnu comme la principale menace liée au terrorisme.
     C'est exact, mais pour être plus précis, nous avons vu le 6 janvier. Nous avons observé la montée des Proud Boys, et nous avons observé la mobilisation des Three Percenters.
     Je suis de Hamilton. Je fais face à ces problèmes depuis près de 10 ans, et je les ai connus en tant que conseiller municipal à Hamilton. Il n'en est jamais fait mention dans les rapports de sécurité ici. Les renseignements qui nous sont parvenus parlaient de Daech. C'est absurde.
     La qualité du renseignement détermine les résultats de la planification opérationnelle. N'étiez-vous pas au courant que des dominionistes chrétiens et des ethnonationalistes, c'est‑à‑dire des suprémacistes blancs, étaient intégrés à ce mouvement et représentaient une menace pour la sécurité nationale? Étiez-vous au courant de cela, oui ou non?
    Je dirai que le détail des opérations policières, en particulier du genre que nous avons vu à Coutts, est protégé de très près pour des raisons de sécurité opérationnelle, il n'est donc pas anormal que je n'aie pas été mise au courant de ces détails.
     Ce que je peux dire — comme je l'ai dit et comme le directeur du SCRS l'a dit officiellement —, c'est que la moitié des ressources du SCRS en matière de contre-terrorisme sont maintenant consacrées à l'EVCI, l'extrémisme violent à caractère idéologique.

  (2015)  

    Pourquoi utilise‑t‑on le terme « EVCI » pour les nationalistes blancs et « terroristes » pour les personnes qui ne sont pas des nationalistes blancs?
    Non, en fait, nous sommes passés à... J'utilise le terme « terrorisme » tout le temps, parce qu'il figure dans le nom de mon organisation, mais lorsque nous parlons de la menace, nous parlons d'extrémisme violent, qui est motivé par la religion — n'importe quel genre de religion —, par des motifs politiques ou par l'idéologie, et on utilise le terme « idéologie » à dessein en raison de son sens large, parce qu'il y a différents...
    Avec tout le respect que je vous dois, madame la présidente, il ne me reste que 30 secondes.
     Reconnaissez-vous — et je pense que cela a été dit publiquement — l'existence d'une menace d'infiltration au sein de nos Forces armées canadiennes par des extrémistes motivés par une idéologie fondée sur la suprématie blanche et l'ethnonationalisme?
    En fait, je renvoie cette question aux Forces armées canadiennes.
    Monsieur Green, vous semblez avoir une réponse à cette question.
    Eh bien, je sais que dans certains des rapports que nous avons produits, nous parlons de ce que vous avez dit, et vous avez accès à ces rapports. Lors de manifestations antérieures au Canada et aux États-Unis, des groupes populistes d'extrême droite, des suprémacistes blancs, des adeptes des théories du complot, etc., se sont avérés capables d'infiltrer, de coopter ou même de prendre le contrôle de manifestations fondées sur des doléances.
    Je sais, pour ma part, que dans une grande partie des documents que nous avons produits sur ce qui se passait à Ottawa, nous ne soupçonnions pas que Daech était impliqué. C'était plutôt le contraire, ce que nous avons identifié...
    Le Service de police d'Ottawa avait cela dans ses renseignements.
    Votre temps est écoulé, monsieur Green.
    Monsieur Green, pouvez-vous assumer la présidence?
    Je le peux certainement.
     Sénatrice Boniface, vous avez cinq minutes. La parole est à vous.
    Je vais donner suite à la question de M. Green, et j'aimerais que vous répondiez aussi brièvement que possible.
    Pour ce qui est de l'extrémisme violent, et je le dis aussi du point de vue de la police, il s'agit de tous les types de groupes. En fait, compte tenu de l'expérience du 6 janvier et d'autres événements du genre, on s'inquiète de la montée de l'extrémisme qui est, comme l'a dit à juste titre M. Green, une opération de type suprémaciste blanc.
    Est‑ce que je vois un « oui » à cela?
    Vous avez tout à fait raison.
     Je vais maintenant passer à un autre sujet, celui du rôle de la province. Vous y avez fait allusion, madame Thomas, et je veux m'assurer que nous sommes très clairs sur la participation que vous avez obtenue de la province. Je pense qu'il est tout à fait clair qu'il y a eu peu de participation. En fait, je pense que le ministre de la Sécurité publique a indiqué qu'il a tenté à plusieurs reprises, en vain, de parler à son homologue. J'ai passé 30 ans dans la province, et j'essaie encore de comprendre pourquoi, puisque Ottawa fait partie de la province de l'Ontario. En même temps, j'applaudis le rôle de la Police provinciale de l'Ontario dans les derniers jours.
     Vous avez dit que vous n'avez pas d'homologue dans la province de l'Ontario. Avez-vous un homologue dans l'une ou l'autre des provinces?
    Je vous remercie de cette question.
     Il y a des agents de sécurité provinciaux, mais c'est une fonction tout à fait différente, ils ne jouent pas un rôle semblable.
    Ils seraient pour la sécurité interne par opposition à la sécurité externe, sur laquelle vous travailleriez.
    C'est exact.
    Du point de vue de ce comité, serait‑il avantageux d'avoir un homologue à qui vous pourriez parler et qui se trouverait davantage à ce que je considère être un niveau opérationnel et non un niveau politique? Cela faciliterait‑il votre rôle, compte tenu du genre de problèmes auxquels vous êtes confrontés?
    Je vous remercie de cette question.
     Je ne suis pas sûre. Il est certain que le sous-ministre de la Sécurité publique a pu s'adresser à l'appareil de sécurité des différentes provinces. M. Di Tommaso, qui est le...
    Je sais qui il est.
    Il était présent à l'enquête. Je pense que le problème fondamental était que l'Ontario a déterminé qu'il s'agissait d'une manifestation dans la capitale fédérale en raison du mandat fédéral, et que c'était donc un problème fédéral. C'était une question beaucoup plus complexe que cela. C'est pour cette raison qu'ils ne se sont pas présentés à la table, bien que nous l'aurions souhaité.
    Certes, à l'échelle de la Police provinciale de l'Ontario, l'inspecteur Craig était très engagé et très impliqué. Nous en avons eu la preuve.
    Je veux que ce soit clair. La province n'a pas seulement une responsabilité générale à l'égard des municipalités; elle est également responsable des services de police dans la province. Avez-vous supposé que la province jouerait un rôle plus important qu'elle ne l'a fait, en particulier pour Ottawa? En était‑il de même dans les autres provinces?
     J'essaie de me faire une idée de la situation dans l'ensemble du pays.

  (2020)  

    Je vous remercie.
     C'est différent dans chaque province, car cela dépend de la police qui a la compétence. Dans certaines provinces, la GRC est le service de police compétent...
    La coprésidente (L'hon. Gwen Boniface): Je suis au courant de cela.
    Mme Jody Thomas: ... alors la réponse et le degré d'engagement ont été différents. Le problème le plus frappant en ce qui concerne le maintien de l'ordre lui-même était en Ontario.
    Pour ce qui est de vos réflexions pour l'avenir, quels changements apporteriez-vous à ce tableau? Nous avons été très intéressés par le fait que la personne responsable des urgences à la Ville d'Ottawa ne savait pas qui était le sous-ministre de la Sécurité publique, et qu'ils ne s'étaient jamais rencontrés.
     Étant donné que nous sommes à Ottawa, chaque ordre de gouvernement n'a‑t‑il pas un rôle pour protéger notre capitale nationale?
    Je pense que c'est une observation très importante. C'est le point d'intersection, c'est‑à‑dire que tous les services de police et ceux d'entre nous qui font partie de la Cité parlementaire travaillent ensemble pour s'assurer que nous comprenons les menaces et les situations qui pourraient se produire dans la ville d'Ottawa.
     Le sous-ministre de la Sécurité publique n'avait pas participé à ce processus auparavant. Le nouveau sous-ministre et le sous-ministre sortant le font maintenant. Je pense qu'il y a des relations que nous n'avions pas établies comme nous aurions dû le faire avant ce convoi. Les manifestations et protestations précédentes avaient été laissées à l'échelle du Service de police d'Ottawa, et il les a gérées.
     Nous passons au sénateur Carignan, suivi du sénateur Harder.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    J'aimerais attirer votre attention sur le plan opérationnel qui a été préparé par la GRC, la PPO et les services de police d'Ottawa, de Toronto, de York et de Peel.
    Avez-vous lu ce document?

[Traduction]

    Non.

[Français]

    Ne l'avez-vous jamais regardé?

[Traduction]

    Je l'ai regardé depuis, mais je ne l'avais pas vu avant.

[Français]

    À quel moment l'avez-vous regardé pour la première fois?

[Traduction]

    C'était pendant l'enquête.

[Français]

    Quand était-ce?

[Traduction]

    C'était il y a deux semaines.
    C'était il y a deux semaines.

[Français]

    Vous avez donc vu ce document pour la première fois il y a deux semaines.

[Traduction]

    Oui.

[Français]

    Avez-vous noté qu'il avait été préparé le 12 février 2022?

[Traduction]

    J'aimerais souligner que, dans le cadre de mes fonctions, il n'est pas attendu de moi que je voie un plan tactique de la police.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    C'est le numéro un. On a commencé à le préparer le 12 février ou vers cette date. Il n'a été achevé que le 17 février.

[Français]

    Cependant, il a été signé le 12 février par l'ensemble des parties.

[Traduction]

    Oui, mais ce n'était pas un plan complet avec des ressources...

[Français]

    Comment avez-vous pu témoigner que ce n'était pas un plan complet, si vous l'avez vu pour la première fois il y a deux semaines?

[Traduction]

    Ce n'était pas un plan complet avec des ressources ou une compréhension de la façon dont il serait utilisé. Le plan complet était prêt le 17 février.

[Français]

    D'accord.
    Vous avez témoigné que vous avez donné au Cabinet, le 13 février,

[Traduction]

« un tableau complet des faits ».
    Oui.

[Français]

    Alors que vous ignoriez l'existence d'un plan préparé par les services de police, comment pouvez-vous dire que vous avez donné

[Traduction]

« un tableau complet des faits »?
    J'ai fourni les renseignements qui m'avaient été donnés par tous les organismes concernés. Ils étaient tous à la table lorsque j'ai fourni ces renseignements. Ce plan n'était pas complet.

[Français]

    Avez-vous remarqué qu'ils ne parlaient pas de vous, dans ce plan?

[Traduction]

    Je ne fais pas partie de l'infrastructure policière.

[Français]

    D'accord.
    Avez-vous remarqué qu'ils ne parlaient d'aucune de vos organisations, pas plus qu'ils ne parlaient du ministre de la Sécurité publique ni du premier ministre du Canada, dans ce plan?

[Traduction]

    Nous ne sommes pas... parce que c'est un plan tactique de maintien de l'ordre. Nous ne faisons pas partie des services de police...

[Français]

    Est-il possible que le plan ait été fonctionnel sans qu'on ait besoin de vous?

[Traduction]

    Je ne suis pas sûre de comprendre votre question.

[Français]

    Ma question est simple: s'ils ne parlaient pas de vous dans le plan, ne pensez-vous pas que c'est parce qu'ils n'avaient pas besoin de vous?

  (2025)  

[Traduction]

    Je ne suis pas un agent de police. Je ne prétends pas être un agent de police.

[Français]

    Si je vous disais que c'était le plan qui a été appliqué après le 14 février, que diriez-vous?

[Traduction]

    Le plan qui a été mis en application le 17 février comprenait des éléments des nouvelles autorités conférées par la Loi sur les mesures d'urgence.

[Français]

    D'accord.
    Quels éléments du plan ont été appliqués après le 14 février?

[Traduction]

    Je ne peux pas répondre à cette question. Cela relève du chef de police.

[Français]

    Je comprends pourquoi vous ne pouvez pas répondre, c'est parce que vous ne le saviez pas.

[Traduction]

    Je ne savais pas...

[Français]

    Comment expliquez-vous que vous conseilliez le premier ministre du Canada en matière de sécurité nationale et que vous ne regardiez pas ce qui se passe sur le terrain en contactant les services de police pour leur demander quel plan ils sont en train de préparer?

[Traduction]

    Vous déformez ce que j'ai dit.
    J'ai rapporté ce que la GRC m'a dit, et ce que les autres agences dans l'environnement de la sécurité nationale — dans cette infrastructure fédérale — m'ont rapporté. S'il y avait un plan et qu'on ne me l'a pas dit, c'est une chose. S'il y avait un plan qui aurait pu être exécuté, alors c'était la responsabilité de quelqu'un d'autre. Je ne suis pas le chef de la police du gouvernement fédéral.

[Français]

    Non, mais vous conseillez le premier ministre sur la sécurité.

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    D'accord.
    Avez-vous parlé à Mme Lucki, de la GRC, pour lui dire qu'il y avait un plan signé par son organisation et qu'elle ne vous en avait jamais prévenue?
    L'avez-vous réprimandée?

[Traduction]

    Toute conversation que j'ai eue avec la commissaire Lucki est privée.

[Français]

    D'accord.
    Ainsi, quand vous parlez de sécurité nationale avec la commissaire de la GRC, ces conversations sont privées et ne sont pas d'intérêt public.

[Traduction]

    Je ne vais pas parler ici d'une conversation privée que j'ai eue avec elle. Les conversations et les discussions que nous avons eues concernant la situation nationale à travers le pays sont consignées au dossier. Nous en avons tous les procès-verbaux.

[Français]

     J'ai l'impression que vous avez donné des conseils au premier ministre...

[Traduction]

    Sénateur Carignan, votre temps est écoulé.

[Français]

    ... dans votre tour de bureaux sans consulter ceux qui étaient sur le terrain.

[Traduction]

    Sénateur Carignan, votre temps est écoulé.
    C'est faux.
    Nous passons au sénateur Harder.
    Merci, madame la présidente.
     J'allais poser une question sur les leçons apprises, mais je pense, compte tenu de l'interaction à laquelle nous venons d'assister, qu'il serait très utile que vous passiez en revue pour ce comité la relation entre le renseignement et la sécurité et le maintien de l'ordre, et pourquoi ils sont distincts dans leurs mandats, mais ont des points de contact.
    Pouvez-vous nous le décrire à nouveau?
    Le principe de l'indépendance de la police est fondamental dans ce pays. Je ne dirige pas la GRC, l'OPP ou tout autre service de police provincial ou municipal. Nous recevons des données de renseignement et de l'information à partir desquelles dresser un tableau des menaces. Il y a certaines données de renseignement qui sont conservées par les services de police, dont la GRC, en vue de l'exécution des opérations comme celle de Coutts.
    Je ne m'attendais pas à voir le plan tactique. Je ne suis pas en mesure d'évaluer le plan tactique. Nous ne sommes pas des experts en maintien de l'ordre. Ce n'est pas ce que nous faisons.
     Nous nous sommes fiés à la commissaire de la GRC pour nous assurer qu'il y avait un plan tactique qui pouvait être exécuté, et elle l'a fait. En fait, le plan qui a été mis en oeuvre le 17 février ou vers cette date, puis jusqu'à la fin du nettoyage d'Ottawa et des convois ailleurs au pays, a été exécuté de manière appropriée, sous la direction de la GRC et de l'OPP.
    Pouvez-vous également assurer à ce comité qu'il serait inapproprié pour le premier ministre ou n'importe quel autre ministre de la Couronne de diriger les services de police directement ou par votre intermédiaire?
    Absolument, et il n'a jamais été demandé de diriger de la police.
    Lorsque la commissaire Lucki a pris connaissance de la situation à Coutts, elle en a parlé à son ministre, comme il se doit, pour lui dire qu'une action policière était en cours.
    Je vous remercie.
    Avez-vous terminé, sénateur Harder?
     Nous passons au sénateur Patterson.
    Merci, madame la présidente.
     Madame Thomas, vous avez parlé de la définition d'une menace à la sécurité nationale, et vous avez dit qu'on attribue un sens à la définition, mais qu'elle exige une interprétation large. Si j'ai bien compris, vous disiez qu'elle nécessite une interprétation qui s'étend au‑delà de la définition énoncée à l'alinéa 2c) de la loi.
    Pouvez-vous nous en dire plus, s'il vous plaît?

  (2030)  

    L'alinéa 2c) décrit une situation où le SCRS a repéré un groupe ou une personne identifiable qui est sur le point d'agir, et il peut alors recueillir des renseignements sur cette personne ou ce groupe. Cela n'autorise pas la GRC à prendre des mesures. Cela signifie qu'il peut, dans le cadre de son mandat, agir, ce qui consiste généralement à recueillir des renseignements sur cette personne.
    Cette définition ne confère pas le pouvoir nécessaire pour mettre fin aux situations comme les convois, les blocus et les occupations qui ont sévi dans tout le pays en février 2022.
    Je vous remercie.
    Nous venons de parler de maintien de l'ordre, alors j'aimerais vous interroger sur une observation dans votre exposé selon laquelle, si j'ai bien compris, vous dites que vous avez déterminé que la police d'Ottawa ne pouvait pas réagir. Je pense que c'était vers la troisième fin de semaine que vous disiez cela. Après trois semaines, la police ne pouvait pas réagir.
     J'aimerais simplement vous demander si, à votre avis, la cause profonde de cette situation — qui, comme vous l'avez expliqué, a échappé à tout contrôle — était une défaillance du service de police de la ville d'Ottawa.
    Comme je l'ai dit, je ne suis pas une experte en maintien de l'ordre. Je pense que l'on a sous-estimé l'intention des gens qui sont venus à Ottawa. On l'a vu davantage comme une manifestation traditionnelle, que le Service de police d'Ottawa gère couramment. La situation a rapidement — selon le chef Sloly, dès le samedi du premier week-end — dépassé les capacités du Service de police d'Ottawa. Immédiatement, nous avons constaté des répercussions sur la ville d'Ottawa. Le Centre Rideau a fermé ses portes ce samedi‑là, alors la situation était, dès le premier week-end, tout autre que ce qui avait été vécu auparavant.
     Il a fallu un certain temps pour comprendre l'ampleur de la situation — sa profondeur, son enracinement, ses chaînes d'approvisionnement logistique et les sommes d'argent qui l'alimentaient, ce qui permettait aux gens de rester —, et le fait que nous n'étions pas en mesure d'utiliser les pouvoirs existants, ou que les pouvoirs existants n'étaient pas utilisés, afin de résoudre le problème.
    Bien qu'Ottawa ait été la plus importante... je répète, il s'agissait d'une crise nationale. Il y a eu des cas partout au pays.
    Dans votre témoignage, vous avez dit que de meilleures relations ont été établies entre votre bureau et d'autres à la suite de l'expérience du convoi.
    Pourriez-vous nous dire s'il y a d'autres leçons apprises ou de nouvelles pratiques qui ont découlé de cette expérience?
    Je pense qu'il y a quelques leçons apprises, mais qui doivent encore être mises en pratique, c'est‑à‑dire comprendre le problème des renseignements de source ouverte dont j'ai parlé plus tôt.
    Je pense — et c'est quelque chose que la greffière du Conseil privé nous a dit fréquemment — que les policiers et les responsables de la sécurité nationale voient tout le temps des choses comme des convois et des manifestations. Celui‑ci était différent. Je pense que cela rejoint l'argument de M. Green, si vous me le permettez, à savoir que nous avons sous-estimé et sous-estimons — probablement plus maintenant — les extrémistes à motivation idéologique. Ce problème existe au Canada, et il est là pour rester. Nous devons comprendre ce qu'il est et avoir les moyens de le résoudre.
    C'est la fin de votre temps, sénateur Patterson. Je vous remercie beaucoup.
     Puis‑je profiter de cette occasion pour remercier nos invités de s'être joints à nous? Je sais que ces deux heures ont été longues, mais nous vous sommes reconnaissants d'être venus nous rencontrer. Nous vous remercions tous d'être venus.
     Chers collègues, il y aura une pause d'environ sept minutes afin que nous puissions faire venir notre prochain témoin par vidéoconférence.
     Merci.

  (2035)  


  (2040)  

    Nous reprenons nos travaux.
    Pour notre deuxième séance de témoignage ce soir, nous accueillons Jacob Wells, cofondateur de GiveSendGo.
     Monsieur Wells, merci de vous joindre à nous.
    Merci de m'avoir invité.
    Je vous rappelle que vous pouvez accéder à l'interprétation à partir de l'icône du globe terrestre au bas de votre écran.
     Vous aurez cinq minutes pour votre déclaration liminaire, si vous souhaitez ajouter quelque chose. Je sais que vous nous avez fourni un document.
    Allez‑y.
    Merci.
     Bonsoir. Je remercie la présidente et les membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole.

[Français]

     J'aimerais faire un rappel au Règlement.

[Traduction]

    Monsieur, si vous pouvez attendre une minute, nous avons un rappel au Règlement.

[Français]

    Madame la présidente, les tests de son ont-ils été faits avec le témoin avant qu'il ne témoigne?

[Traduction]

[Français]

    Les tests étaient-ils satisfaisants?

[Traduction]

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.

[Traduction]

    Je suis désolée, monsieur. Allez‑y.
    Très bien. Je vous remercie.
     Bonsoir. Je remercie la présidence et les membres du Comité de m'avoir invité à prendre la parole.
    Je m'appelle Jacob Wells. Je suis cofondateur de la plateforme de sociofinancement givesendgo.com.
    C’est avec humilité que je saisis l’occasion qui m’est donnée de participer à ces travaux et je serai heureux de répondre à toutes les questions pertinentes que vous vous posez sur les campagnes menées sur GiveSendGo.
     Je suis impressionné par la croissance de GiveSendGo depuis sa création il y a huit ans. Elle a été créée avec une mission simple: partager l’espoir de Jésus par l’entremise du sociofinancement. C’est un honneur pour moi de pouvoir partager ce même espoir avec vous aujourd’hui.
     Notre objectif était de créer une plateforme de collecte de fonds qui marie l’utilité de la collecte de fonds en ligne à la vérité selon laquelle la vie ne se limite pas à l’argent et au monde matériel. Encore une fois, notre mission est de « partager l’espoir de Jésus par l’entremise du sociofinancement ». Nous y parvenons notamment en priant avec les dirigeants de campagnes et en partageant l’espoir que nous avons par des messages sur notre plateforme et la correspondance que nous entretenons avec les donateurs et d'autres utilisateurs.
    Au cours des huit dernières années, la plateforme GiveSendGo est devenue un leader dans le domaine de la collecte de fonds en ligne et est présente dans plus de 80 pays. Grâce à notre plateforme, des millions de dollars sont recueillis chaque année pour aider des personnes et des organisations à réaliser leur mission. Bien qu’une grande partie de ce dont nous allons parler ce soir porte sur une campagne humanitaire nationale qui s’est politisée et est devenue internationale, la grande majorité des campagnes sur GiveSendGo sont menées par des personnes qui recueillent des fonds pour répondre à des besoins liés à des factures médicales, à des tragédies et à des voyages de mission.
    L’une des distinctions entre GiveSendGo et d’autres plateformes de sociofinancement est que GiveSendGo se considère comme un service permettant de recueillir des fonds pour des activités légales sans discrimination. Moi, en tant qu’ancien combattant de la marine américaine, et nous, en tant qu’entreprise, nous accordons une grande importance à la liberté et aux sacrifices consentis pour que nous puissions vivre dans la liberté, même lorsqu’il s’agit d’une cause que nous n’approuvons peut-être pas personnellement, mais qui est néanmoins légale selon les lois adoptées par notre gouvernement. Ainsi, plutôt que de prendre des décisions sur les types d’activités légales que nous soutiendrons, GiveSendGo a choisi de laisser la loi déterminer ces limites.
    Je tiens à préciser que nous disposons d’une équipe de vérification qui fait preuve de diligence raisonnable pour s’assurer que les objectifs énoncés dans les campagnes que nous hébergeons sont légaux et que les bénéficiaires des fonds recueillis sont identifiés et autorisés à utiliser des services de paiement en ligne. Comme notre service de traitement des paiements fait de même, nous croyons que les campagnes hébergées sur notre plateforme font l’objet d’une vérification adéquate avant que les fonds ne soient versés. Nous comptons ensuite sur les organismes d’application de la loi existants pour faire leur travail d’enquête et d’application des lois en cas de violation.
     Cela étant dit, je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.

  (2045)  

    Merci beaucoup, monsieur Wells.
     Nous allons commencer nos tours de cinq minutes, en commençant par M. Brock.
    Merci, madame la présidente.
     Bonsoir, monsieur Wells. Merci de votre présence ce soir.
    Bonsoir. Je vous remercie.
     J'ai quelques questions à vous poser au cours des cinq prochaines minutes environ.
     Je voudrais commencer par souligner ce que je considère comme la caractéristique la plus importante qui distingue votre opération de sociofinancement de vos concurrents, notamment GoFundMe. C'est que vous croyez en la valeur de la liberté.
     Serait‑ce une déclaration juste pour la résumer succinctement?
    C'est juste. Vous avez raison.
    Vous saviez assez tôt que GoFundMe avait initialement participé au « Convoi de la liberté », avant votre organisation, et qu'il avait ensuite retiré son soutien. Vous étiez au courant de cela.
    Nous l'étions.
    Nous avons longuement interrogé le représentant légal de GoFundMe. Je comprends qu'ils étaient activement engagés dans un dialogue avec le Service de police d'Ottawa.
     Peut‑on en dire autant de votre organisation, durant ces premiers jours qui ont mené à l'implication de la police, qui a entièrement dissous le mouvement?
    Nous n'avons eu de participation à aucune force de police à Ottawa ou en Ontario. Nous n'avons été contactés par aucun d'entre eux et n'avons pas rendu la pareille. Nous n'avons eu aucun contact.
    Dans les six jours suivant l'arrivée du « Convoi de la liberté » à Ottawa, le 28 janvier... GoFundMe a déclaré le 2 février — plusieurs jours avant d'annuler son service — qu'il était prêt à aider la police à mettre fin au financement.
     Avez-vous adopté cette approche en ce qui concerne le « Convoi de la liberté »?
    Non, nous ne l'avons pas fait.
    Un représentant du gouvernement fédéral vous a‑t‑il demandé de cesser de soutenir le « Convoi de la liberté »?
    Non, cela ne nous a pas été demandé.
    Je sais que c'est une question que d'autres membres de ce comité vous poseront, peut-être, alors j'ai pensé que je commencerais par elle.
    Si j'ai bien compris, il y avait deux sources de sociofinancement affiliées à votre entreprise. L'une était le sociofinancement « Adopt a trucker », et l'autre était le don « Convoi de la liberté 2022 ».
    Est‑ce exact?
    C'est exact.
    En ce qui concerne le sociofinancement « Adopt a trucker », est‑ce que ces chiffres sont exacts? Selon votre entreprise, un peu moins de 600 000 dollars américains ont été recueillis en tout.
    Cela semble exact.
    La majorité de cette somme, soit 55 %, provient de notre pays hôte, le Canada.
     Est‑ce bien cela?
    En pourcentage de valeur, c'était 59 %.
    C'est exact.
     Environ 41 % provenaient des États-Unis.
    Je crois que c'était 37 % de la valeur.
    Bien.
     Pour les autres pays, c'était un peu moins de 20 000 $.
     Est‑ce que c'est exact?
    Cela semble à peu près correct.
    Parmi les contributions des autres pays, avez-vous un chiffre en ce qui concerne la Fédération de Russie?

  (2050)  

    Je ne crois pas que nous ayons remarqué des dons en provenance de la Russie. En les examinant, je n'en ai pas remarqué. Je peux retourner en arrière et, le cas échéant, vous l'indiquer. Cependant, je ne crois pas qu'il y en ait.
    Étiez-vous au courant que des politiciens de notre pays, ainsi que notre média national, financé par les contribuables, la CBC, ont diffusé qu'il y avait des influences russes en ce qui concerne ce convoi et l'argent provenant de ce pays? Étiez-vous au courant de cela?
    Je crois que je l'ai appris plus tard, après coup. C'est quelque chose dont je me souviens, mais je ne crois pas que je le savais à ce moment‑là.
    Bien.
     En ce qui concerne les dons au « Convoi de la liberté », je crois savoir qu'il y a eu un total d'un peu plus de 113 000 donateurs.
    C'est exact.
    C'est un peu moins de 40 000 dons du Canada.
    Oui, c'est exact.
    Bien.
     Je n'ai plus de temps. Je suis sûr que l'un de mes collègues reprendra cet aspect.
     Je vous remercie.
    Merci, monsieur Brock.
    Nous passons à M. Virani.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
     Merci, monsieur Wells, de vous être joint à nous.
     Je vais reprendre là où vous avez indiqué, à M. Brock, que vous étiez au courant que GoFundMe avait cessé de donner de l'argent aux manifestants du « Convoi de la liberté » au Canada, et que vous avez saisi cette occasion.
     Est‑ce exact?
    C'est exact.
    GoFundMe a cessé de donner de l'argent aux manifestants du « Convoi de la liberté » parce qu'ils ont jugé que leurs actions avaient cessé d'être pacifiques. Ils ont dit que c'était devenu « une occupation », alors vous avez rempli ce vide de collecte de fonds.
     Est‑ce correct? Êtes-vous au courant de cela?
    Je n'étais pas sûr de la terminologie employée par GoFundMe. Nous ne prenons pas notre politique de GoFundMe.
     Le convoi nous a sollicités. Les campagnes viennent sur notre plateforme de leur propre gré tout le temps.
    Vous avez dit que vous aviez une équipe de vérification et que vous avez toujours une équipe de vérification pour vos campagnes et sur votre plateforme. Il y a eu des activités illégales avec ces manifestants qui se sont transformées en un blocus. Il y avait des choses comme des agressions, des menaces et des dommages à la propriété. En fait, le Service de police d'Ottawa a témoigné devant ce comité que 500 arrestations ont été effectuées.
     Votre équipe de vérification a‑t‑elle vérifié tout cela?
    Ce que nous vérifions dans une campagne, c'est l'identité des personnes participant et ce qu'elles défendent. Il y a toujours...
    Avez-vous fait l'effort de vérifier si des activités illégales avaient lieu?
    Oui. Nous l'avons fait.
    Vous avez indiqué que vous n'étiez pas en communication avec le Service de police d'Ottawa. Est‑ce bien cela?
    C'est exact.
    Avez-vous continué à mettre à la disposition des personnes qui faisaient partie du « Convoi de la liberté » des biens qui servaient à financer et à soutenir le blocus?
    Je suis désolé. J'ai raté cette question.
    Avez-vous continué à mettre des biens à la disposition des personnes qui participaient au blocus?
    Non. La campagne sur GiveSendGo n'avait rien à voir avec le blocus. Elle était propre à Ottawa.
    Des gens ont décrit ce qui s'est passé à Ottawa comme un blocus, y compris l'ancien maire d'Ottawa, par exemple.
     Permettez-moi de passer à ma prochaine question.
    Le premier ministre de l'Ontario, Doug Ford, a demandé une injonction pour vous empêcher de distribuer des fonds aux personnes qui accédaient à ces fonds sur votre plateforme. Lorsque cette injonction a été obtenue par le tribunal de l'Ontario, avez-vous respecté cette ordonnance du tribunal?
    Oui. Aucun fonds n'a été distribué.
    Pouvez-vous m'expliquer un gazouillis qui a été publié sur votre plateforme? Il date du jour même où l'injonction a été obtenue. Il provient du compte Twitter de GiveSendGo, le 10 février. Il dit:
Sachez ceci! Le Canada n'a absolument AUCUN pouvoir sur la façon dont nous gérons nos fonds ici, à GiveSendGo. Tous les fonds de CHAQUE campagne sur GiveSendGo sont versés directement aux bénéficiaires de ces campagnes, notamment la campagne du convoi de la liberté.
    Pourquoi publiez-vous de tels gazouillis si vous respectez les décisions des tribunaux?
    Pour être honnête, je ne sais pas exactement qui a produit ce gazouillis, mais il y avait beaucoup de personnes en cause. GiveSendGo a saisi cette occasion en tant qu'entreprise et nous avons fait évoluer notre plateforme en conséquence, mais la campagne et les fonds qui en découlaient, en particulier, venaient des États-Unis.
     Comme pour les comptes et les ordonnances des tribunaux, il y a des questions de compétence et la compétence a été respectée, en fonction de l'emplacement des fonds.

  (2055)  

    En fait, les événements, comme nous l'avons entendu à ce comité, indiquent tout à fait le contraire. L'argent passait de GiveSendGo à une banque canadienne, puis à un membre individuel du blocus. Ce sont les banques canadiennes qui ont accepté la compétence et le pouvoir de cette décision. Ce n'était pas du tout GiveSendGo.
     Avez-vous une réponse à cela?
    Les fonds pour cette campagne étaient destinés aux États-Unis. Ils n'allaient pas à un représentant au Canada. Les fonds étaient détenus ici, aux États-Unis, ce qui ne relevait pas de la compétence du tribunal canadien.
    Exact. Cela explique votre gazouillis. Cependant, en fin de compte, lorsque les fonds sont libérés — je ne parle pas du don des fonds, je parle de la libération des fonds — ils passent par une banque canadienne pour aller à un individu.
     Ma question est la suivante: cela vous inquiétait‑il? Si vous n'étiez pas préoccupé par l'impact sur l'économie canadienne, étiez-vous préoccupé par le fait que les travailleurs de l'industrie automobile étaient arrêtés et que des quarts de travail étaient fermés dans des endroits comme le Kentucky, le Tennessee, le Michigan et l'Ohio?
     Aviez-vous une idée de l'impact de votre financement de ces blocus illégaux sur l'économie américaine?
    Il n'y a pas eu d'impact des campagnes de collecte de fonds, car les fonds ne sont jamais parvenus au convoi. Ce serait faux de dire qu'il y a eu un impact, car les fonds n'ont jamais atteint le convoi pour avoir un impact.
    Monsieur Virani, votre temps est écoulé.
     Nous allons passer à M. Fortin.
    Vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Monsieur Wells, en réponse aux questions de notre collègue M. Brock, vous avez lu des statistiques sur une ventilation des fonds que vous avez collectés et des personnes auxquelles ils ont été remis.
    Qu'y a-t-il précisément dans ce document? Quelles informations y retrouve-t-on?
    Entendez-vous ma question, monsieur Wells?

[Traduction]

    Je n'ai pas eu la traduction de cela.

[Français]

     Madame la présidente, j'aimerais que le chronomètre soit arrêté. Je pourrais recommencer à zéro une fois que nous aurons l'interprétation. Il faudrait vérifier auprès du service d'interprétation.

[Traduction]

    Monsieur Wells, je veux juste confirmer que sur votre écran Zoom, en bas, vous avez un globe qui dit « interprétation ». Si vous choisissez l'interprétation, vous pouvez choisir la traduction anglaise pour vous assurer que vous obtenez la traduction anglaise.
    Je viens de le faire. Merci.

[Français]

    M'entendez-vous bien, monsieur Wells?

[Traduction]

    Oui. Merci.

[Français]

    D'accord, merci.
    Je vais reprendre du début, madame la présidente.
    Monsieur Wells, en réponse à des questions de mon collègue M. Brock, vous lisiez un document qui semblait contenir une ventilation des sommes perçues ainsi que leur provenance. Vous avez donné des pourcentages et des montants.
    Je voudrais juste que vous me précisiez quelles informations figurent dans ce document.

[Traduction]

    L'information contenue dans ce document est exactement cela, une ventilation du nombre de donateurs, le pourcentage du nombre de donateurs de chaque pays — le principal pays est le Canada, et les États-Unis, puis tous les autres — du point de vue individuel du nombre de donateurs, puis du point de vue de la valeur.

[Français]

    Pourriez-vous nous transmettre une copie de ce document, monsieur Wells?

[Traduction]

    Je peux vous en faire parvenir un.

[Français]

    Merci. Les greffiers communiqueront avec vous en ce sens.
    Monsieur Wells, j'ai cru comprendre de votre témoignage qu'à aucun moment vous n'avez été en contact avec les policiers pour les événements entourant le « convoi de la liberté ». Est-ce exact?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Si des policiers ou des représentants du gouvernement vous avaient contacté pour vous demander de l'information sur les sources de financement et les montants en cause, auriez-vous collaboré avec les autorités sur cette question?

[Traduction]

    Nous l'aurions certainement fait.

[Français]

    Étiez-vous au courant de la présence de mouvements qu'on pourrait qualifier de terroristes ou de mouvements visant à renverser le gouvernement canadien dans le cadre de l'opération de financement que vous avez conduite avec GiveSendGo?

  (2100)  

[Traduction]

    Non. Nous n'étions pas au courant de quelque chose comme ça.

[Français]

    Si je comprends bien, les fonds que vous collectiez venaient en partie des États‑Unis et en partie du Canada, et une infime autre partie venait d'autres États. Si j'ai bien compris, c'étaient des gens qui souhaitaient contribuer au « convoi de la liberté » parce que ce dernier prétendait être en faveur des libertés individuelles. C'était la seule raison pour laquelle ces gens contribuaient à votre campagne GiveSendGo. Est-ce exact?

[Traduction]

    Oui, c'est exact.

[Français]

    Si vous aviez su que certaines activités du « convoi de la liberté » visaient à renverser le gouvernement ou à mener des opérations terroristes au Canada, qu'auriez-vous fait?

[Traduction]

    S'il y avait la moindre preuve d'une activité illégale commise par les destinataires des fonds, nous aurions mis fin à l'opération.

[Français]

    Merci, monsieur Wells.

[Traduction]

    Je passe à M. Green.
    Merci beaucoup.
     Monsieur Wells, dans votre déclaration liminaire, vous avez mentionné que la simple mission de GiveSendGo est de « partager l’espoir de Jésus par l’entremise du sociofinancement ». Considérez-vous que votre organisation ou votre entreprise est une organisation chrétienne?
    Oui.
    Avez-vous des entités à but non lucratif ou des groupes confessionnels rattachés à votre entreprise?
    Nous avons récemment lancé GiveSendGo Charities.
    Est‑ce que c'est au moyen d'un numéro d'organisme de bienfaisance confessionnel de l'IRS, ou est‑ce que c'est en tant qu'organisme à but non lucratif simplement inscrit auprès de votre entreprise à titre de société?
    Actuellement, c'est par l'entremise d'un organisme confessionnel... mais c'est en train de devenir un organisme à but non lucratif.
    Donc, à l'heure actuelle, vous bénéficiez d'exemptions fiscales en raison de la nature confessionnelle de la branche caritative de votre société.
    C'est exact.
    Bien.
     Nous avons également compris, dans votre mission, que vous étiez une sorte de champion de la liberté d'expression. Lors de votre comparution le 3 mars devant le Comité permanent de la sécurité publique et nationale, vous avez eu un échange avec Mme Pam Damoff au sujet du Ku Klux Klan. Je veux vous donner l'occasion de profiter de votre liberté d'expression pour préciser si oui ou non vous soutenez le Ku Klux Klan de quelque façon que ce soit.
    Non. J'exècre tout ce que le Ku Klux Klan et toute organisation suprémaciste représentent.
    Est‑ce que cela inclut aussi les Proud Boys?
    Est‑ce que cela inclut les Proud Boys? Je ne suis pas très au courant de ce que leur...
    Est‑ce que les Proud Boys des États-Unis d'Amérique ont déjà utilisé votre plateforme pour recueillir des fonds?
    Certains Proud Boys l'ont fait, oui.
    Savez-vous que Proud Boys est inscrit sur la liste des entités terroristes au Canada, monsieur?
    Je l'ai appris, maintenant, oui.
    Le saviez-vous dans le cadre de votre processus de diligence raisonnable, lorsque vous cherchiez des liens possibles entre l'entité terroriste répertoriée ici au Canada et peut-être une implication dans le convoi?
     Notre processus de vérification porte sur les personnes qui reçoivent les fonds, et non [difficultés techniques].
    Comment faites-vous?
    Grâce aux systèmes existants de listes de surveillance des terroristes, les individus...
    Donc vous auriez su si une personne figurant sur la liste des Proud Boys aurait pu s'y intéresser. Dites-vous que vous auriez disposé de systèmes pour vous en assurer?
    C'est exact pour...
    Nous vérifions les destinataires des fonds.
    En sachant qu'il s'agit d'une entité terroriste, est‑ce que vous continueriez à donner une plateforme aux Proud Boys?
    Pas au Canada.
    Mais vous le feriez aux États-Unis.
    Ils ne sont pas considérés comme une organisation terroriste aux États-Unis.
     Votre mission consiste à « répandre l'espérance de Jésus par le financement participatif ». Dans votre témoignage, vous avez mentionné comment vous collaboreriez avec ces clients pour répandre l'espérance de Jésus. Est‑ce exact?
    Oui, c'est exact.
    L’avez-vous fait avec le tueur en série Kyle Rittenhouse, monsieur, quand vous avez recueilli des fonds pour lui? Avez-vous répandu l'espérance de Jésus auprès de Kyle Rittenhouse?
    Nous contactons chaque propriétaire de campagne et nous prions avec lui au sujet de l’enjeu qui le concerne. Je ne…
    Le tueur en série Kyle Rittenhouse — vous avez prié avec lui et recueilli des fonds pour lui?
    Le jeune homme qui a été disculpé par les tribunaux américains pour raisons de légitime défense...?
    Vous avez récolté un quart de millions de dollars pour Kyle Rittenhouse.
    Trois quarts de million.
     En ce qui concerne l'attaque du Capitole des États-Unis survenue en 2021, PayPal a suspendu vos paiements à GiveSendGo lors d'une campagne de collecte de fonds…
    M. Jacob Wells: C'est inexact.
    Le coprésident (M. Matthew Green): ... à la suite de l'attaque contre le Capitole des États-Unis. Est‑ce exact?
    C'est faux.
    Vous n'avez donc pas recueilli d'argent pour les individus impliqués dans l'attaque contre le Capitole.

  (2105)  

    Pas à ma connaissance. Avant le 6 janvier, nous avons eu des collectes de fonds pour des personnes qui se rendaient à un rassemblement à Washington. C'était l’objet de ces campagnes — obtenir des billets d'avion et de l’hébergement à Washington durant les journées... pour le rassemblement du 6 janvier, oui.
    Sachant ce que vous savez aujourd’hui, et à la lumière de toutes les audiences tenues jusqu’à maintenant, est‑ce que vous qualifieriez cela de rassemblement, monsieur? Est‑ce que ce rassemblement qui a abouti au meurtre d'un policier de la colline du Capitole était légal? Était‑ce un rassemblement légal, d’après vous?
    Il me semble que vous diffusez de la désinformation.
    N’est‑il pas vrai qu’un agent de police a été assassiné? Je suis désolé, monsieur, je ne suis pas un Américain. Un policier n'a‑t‑il pas été assassiné au Capitole?
    Pas à ma connaissance, non.
    Nous avons peut-être un meilleur accès à vos médias que vous, monsieur.
    Le convoi de protestation canadien est une autre entité controversée à laquelle vous vous êtes associé. Ce que je veux dire, monsieur, c'est que certaines des activités dans lesquelles vous vous impliquez s’apparentent en quelque sorte à une zone grise. Je me demande simplement comment vous en tirez profit. Je me demande, pour ce qui est de votre...
     Je vois que mon temps est écoulé. Je reviendrai au témoin en temps opportun.
     Merci.
    Merci, monsieur Green. Merci de votre compréhension.
    Pouvez-vous assumer la présidence, monsieur Green?
    Certainement.
     Vous avez cinq minutes.
     Merci de votre présence aujourd'hui.
     J'aimerais comprendre un peu mieux le processus de vérification. Je ne connais pas très bien votre plateforme. Nous n’avons peut-être pas la même interprétation du terme vérification. Pouvez-vous m'expliquer le processus?
    Bien sûr. Merci de votre question.
     Lorsqu'une personne accède à GiveSendGo, avant de passer par un processus appelé KYC, ou « connaissance du client », qui est un processus réglementaire permettant d’identifier la personne qui reçoit les fonds, nous autorisons les campagnes à commencer à recevoir des fonds. Avant que la personne reçoive des fonds, elle fait l’objet d’un processus d'identification basé sur un numéro d’assurance sociale, un permis ou une autre pièce d’identité. Nous comparons cette information à diverses bases de données, pour nous assurer que l’individu ne figure pas sur une liste ou qu’il ne peut pas utiliser les systèmes financiers en place. S’il s’avère que la personne est inscrite à une de ces listes, alors elle ne peut toucher l’argent.
     Parallèlement, nous lisons toute la documentation de la campagne et nous prenons connaissance des motifs de la collecte. Nous veillons à ce que le demandeur respecte les lois du pays, qu'il ne fasse rien d’illégal et qu'il ne tente pas de recueillir de l’argent pour tuer quelqu'un ou une autre action illégale. Nous vérifions la légitimité de la demande.
    Dans ce cas, est‑ce que vous considérez les lois du pays, comme vous dites, au Canada...
    C'est exact.
    ... ou est‑ce que vous parlez des lois américaines, parce que c'est là où vous êtes basé?
    Quand le demandeur vit dans un pays étranger, il est assujetti au même processus exigé par ce pays pour qu’il accède au système financier. Ainsi, un demandeur canadien subit le processus de vérification au Canada, selon les normes canadiennes, avant de pouvoir accéder au système financier.
     C'est ainsi que fonctionne la vérification.
    Vous avez mentionné les numéros d’assurance sociale. Auriez-vous accès à ces numéros au Canada? Comment pouvez-vous les vérifier?
    La demande est soumise à une base de données par l’intermédiaire de notre solution de paiement. Nous ne détenons pas nous-mêmes ces informations. Le numéro est communiqué à une base de données, puis l'identité est vérifiée au moyen de cette information et aussi d'une pièce d'identité, toute pièce émise par le gouvernement. En conjuguant tout cela aux informations fournies, nous pouvons valider et vérifier l’identité du bénéficiaire des fonds.
    Pouvez-vous simplement nous dire ce qu’il en est des 10 millions de dollars de dons récoltés sur votre plateforme? Où est cet argent, actuellement?

  (2110)  

    La grande majorité de ces dons ont été remboursés parce qu'ils n'ont pas pu mener à la réalisation des objectifs visés par les donateurs. Je crois qu’ils ont été remboursés à la mi‑mars. Un certain pourcentage de ces fonds avait été transféré à un compte canadien dont le titulaire, Chad Eros, était le trésorier de l'organisation du « Convoi de la liberté ». Je pense que ces fonds ont été mis sous séquestre en attente des procès et d'autres choses.
    En ce qui concerne le programme « Adopt a trucker », aidez-moi à en comprendre l’objectif. Comment vendre ça à quelqu'un?
    GiveSendGo, en soi, ne le fait pas. Les propriétaires de campagne mettent sur pied les campagnes. Ils nous approchent et ils entreprennent une collecte de fonds. Ils disent aux gens pourquoi ils recueillent de l’argent. Dans ce cas, je pense que c'était un individu qui amassait des fonds pour subvenir aux besoins de familles déplacées, de familles de camionneurs qui avaient été contraints au chômage à cause des vaccinations obligatoires qui avaient été décrétées, et de choses de cette nature.
    Donc, dans votre esprit — à tout le moins quand vous avez évalué la situation —, ce n'était pas lié à ce que certains d'entre nous ici ont assimilé aux blocages qui entravaient l'économie du pays. Vous n’avez pris aucune mesure ou vous n’avez fait aucun effort pour vous assurer de l’absence de tout lien de cette nature.
    Ce que nous regardons, c'est la déclaration du propriétaire de la campagne, le motif de sa collecte. Est‑ce que l’objectif est légal? Si l’objectif est légal... S'il devait se servir de son argent... Comme pour n'importe qui, s'il prenait l'argent de son travail pour commettre un acte illégal, alors c’est contre la loi et il existe des procédures pour poursuivre les personnes qui enfreignent la loi, alors...
    Je dois vous interrompre, monsieur Wells, parce qu’on me dit que mon temps est écoulé.
     Merci.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, monsieur Green.
     Nous revenons à notre liste, au sénateur Carignan pour cinq minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Le financement entre les pays est-il illégal?
    Est-ce illégal que des Canadiens financent des activités aux États‑Unis, ou que des Américains de financent des activités au Canada?

[Traduction]

    Non, ce n'est pas illégal. Ça arrive assez souvent.

[Français]

    Je vous remercie; je n'ai pas d'autre question à poser.

[Traduction]

    Sénateur Harder, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
     Monsieur Wells, saviez-vous que dans le mémorandum remontant aux premiers jours du convoi, sinon dans d’autres documents, on exprimait le désir de venir à Ottawa pour renverser le gouvernement et exiger du Sénat canadien qu’il demande au gouverneur général de former un nouveau gouvernement?
    D’après vous, est‑ce que la sédition et le renversement d'un gouvernement constituent une action légale qui contribuerait à répandre l’espérance de Jésus?
    Nous ne disons pas que toute campagne de financement équivaut nécessairement à répandre l'espérance de Jésus. Ce que nous faisons, dans notre collaboration avec les propriétaires de campagne, c'est répandre l'espérance de Jésus. Il faut faire la distinction.
    Pour ce qui est du mémorandum, ou de ce que vous laissez entendre, les parties qui ont participé à la collecte de fonds n'en ont aucunement fait mention. En fait, elles ont désavoué tout ce qui ressemblait...
    Donc vous ne vérifiez pas vraiment vos clients potentiels. Vous les croyez sur parole, et s'ils faisaient quelque chose d’illégal avec cet argent, vous vous contenteriez de répondre « Ce n'est pas ce qu'ils nous avaient dit »; il n'y a donc pas de processus de vérification.
    Il y a un processus de vérification, parce qu'actuellement, si vous êtes un terroriste, ou si vous êtes une personne d'intérêt, vous figurez sur une liste. Si vous avez fraudé une banque et que vous avez été inscrit sur une liste, vous ne pouvez pas vous prévaloir de l'infrastructure financière. Quand vous êtes approuvé, vous êtes approuvé en tant que personne n’ayant commis aucune infraction qui vous interdirait d’accéder à l'infrastructure bancaire. Et quand…

  (2115)  

    Mais si votre intention était... Si je comprends bien, vous étiez heureux de financer le groupe du 6 janvier qui se rendait à Washington, et puis ensuite, oh mon Dieu, vous avez été surpris de les voir impliqués dans les événements qui ont abouti au meurtre d'au moins un policier.
    Encore une fois, je ne suis au courant d'aucun meurtre de policier, mais dans les sociétés libres, la réalité est que... On peut évoquer le concept de crime de pensée, comme si nous allions déterminer à l'avance ce que les gens vont faire. En règle générale, et c'est ce que nous constatons, quand les gens nous approchent, nous déclarent ce qu'ils veulent faire, que c'est légal, et que c'est autorisé...
    Monsieur Wells, combien d'autres activités de financement portent actuellement sur des organisations canadiennes?
    Il y a des milliers et des milliers de campagnes sur GiveSendGo.
    Se déroulent-elles au Canada?
    Il y en a probablement des centaines qui sont actives au Canada en ce moment. Comme je l'ai mentionné, la grande majorité concerne des frais médicaux, sont lancées par des personnes qui aident des gens de leur communauté.
     Dans le cas du « Convoi de la liberté 2022 », c'est un organisme sans but lucratif constitué en société et approuvé par l'Ontario qui a contacté GiveSendGo pour recueillir des fonds. Nous avons ses documents de constitution en société de la province de l'Ontario.
    Savez-vous que dans la foulée de la situation d'urgence, on a changé la loi pour obliger les plateformes en ligne de financement participatif à déclarer les transactions importantes ou suspectes au Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada?
     Si vous le savez, en quoi avez-vous modifié votre façon de faire? Si vous l'ignorez, est‑ce que vous en tiendrez compte pour modifier votre façon de faire?
    Je vous remercie de votre question.
    Nous actualisons constamment notre plateforme et nos processus en fonction des nouvelles lois et des nouveaux règlements. Nous travaillons avec nos fournisseurs de paiement pour qu'ils le fassent au Canada et dans le monde entier.
    Est‑ce que cela a été fait?
    C'est en cours. Il y a un processus à suivre pour incorporer toutes ces mesures.
    Ça fait presque un an.
     Quand ce processus aboutira‑t‑il, pour que vous puissiez nous assurer de votre conformité?
    Je crois que nous sommes conformes. Nous faisons actuellement le point sur ces questions avec nos fournisseurs de paiement. Je crois que nous avons fait ce que nous devions faire, pour le moment.
    Merci.
    Je vous remercie.
    Nous allons passer au sénateur Patterson.
    Je vais m'abstenir, madame la présidente. Merci.
     Nous entamerons le deuxième tour de quatre minutes, en commençant par M. Brock.
    Je n'ai pas de questions.
     Merci.
     Vous disposez de quatre minutes, madame Bendayan.
    Je vous remercie de votre présence, monsieur Wells.
     Dans votre exposé, vous avez indiqué que votre mission est de répandre l'espérance de Jésus avec votre plateforme. Vous avez déjà répondu à plusieurs questions à ce sujet. Je me demande simplement, spécifiquement dans le cas de cette campagne de financement, quel est le lien entre l'espérance de Jésus et les objectifs de ce mouvement particulier?
    Merci de votre question.
     Encore une fois, comme je l'ai dit plus tôt, le but d'une campagne ne correspond pas nécessairement à notre mission, qui est de répandre l'espérance auprès des gens. Quand nous acceptons une campagne, nous demandons aux responsables de parler de Jésus aux gens, ou de prier avec eux. Voilà ce que nous faisons, et comment nous le faisons.
    Vous avez indiqué tantôt que vous croyez en la liberté. Croyez-vous en la liberté de mouvement des individus, que je devrais pouvoir me déplacer librement?
    Oui, je le crois.
    Vous êtes conscient, bien sûr, et cela a défrayé les manchettes internationales, que ce mouvement, ce blocage, entravait en fait une frontière internationale entre nos deux pays, les États-Unis et le Canada.
    En fait, je crois que c'est le gouvernement canadien qui a promulgué des lois restreignant la liberté de mouvement des personnes non vaccinées; je croyais que c'était à cela que vous faisiez référence.
     Le « Convoi de la liberté » qui a organisé une campagne sur GiveSendGo a en fait désavoué les blocages survenus à la frontière. La campagne visait spécifiquement ce qui se passait à Ottawa, donc à notre connaissance elle n'avait rien à voir avec les blocages frontaliers.

  (2120)  

    Eh bien, même si c'est ce que vous alléguez, le blocage des routes a empêché des ambulances d'amener des patients aux urgences, et je comprends que les camionneurs qui bloquaient ces routes étaient dans les faits financés par votre campagne. Ne saviez-vous pas que la liberté de circulation des gens à Ottawa n'était pas respectée, et que c'est aussi une liberté?
     Je vais également vous demander, monsieur, si vous respectez les vétérans, parce que, comme vous le savez peut-être, le 29 janvier, aux débuts du blocage, des manifestants ont profané notre Monument commémoratif de guerre. Le saviez-vous?
    Je l'ignorais. Je n'étais pas au courant.
     Je pense l'avoir dit plusieurs fois, mais je vais le répéter — ou peut-être que je ne l'ai pas dit —, mais le groupe de personnes qui est venu à Ottawa était un groupe très diversifié qui, selon nous, n'était pas contrôlé par qui que ce soit. Il s'agissait majoritairement de camionneurs indépendants qui venaient de leur propre gré...
    Monsieur Wells, vous dites au Comité que vous ignoriez la nature de cette manifestation ou de ce blocage. Pourtant, le New York Times a abondamment couvert l'événement à l'époque. Si vous regardez Fox, alors Fox Business couvrait alors ce qui se passait, tout comme CNN.
     Nous dites-vous que vous n'aviez aucune idée de ce qui se passait au Canada, et que votre plateforme le soutenait?
    Non, pas du tout. Ce que je dis, c'est que…
    Vous étiez donc au courant.
    ... c'est un sophisme d'affirmer que parce que certaines personnes se présentent à une activité et y font quelque chose de mal, toute l'activité est mauvaise, et c'est le sophisme que vous tentez d'avancer. Si certaines personnes se battent dans un concert de rock, ça ne veut pas dire que le concert est illégal.
     Les personnes qui ont organisé la campagne sur GiveSendGo ont explicitement déclaré qu'elles condamnaient la violence, que leur campagne visait des besoins précis...
    Avez-vous vérifié si c'était bien le cas?
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Allez‑y, monsieur Motz.
    Elle pourrait peut-être laisser le témoin répondre à la question.
    Nous l'avons vérifié. Cela fait partie de nos mécanismes de vérification: qui sont les bénéficiaires des fonds, quel est leur...
    Monsieur Wells, je suis désolée. Le temps est écoulé pour cette question. Je sais que c'est difficile quand on participe à distance.
     Nous passerons à M. Fortin, puis ensuite à M. Green.
     Vous disposez chacun de trois minutes.

[Français]

     Monsieur Wells, après tout ce que nous venons de dire, voulez-vous seulement reconfirmer que vous n'avez jamais été contacté par un service de police canadien, que ce soit un service municipal, la Gendarmerie royale du Canada ou la Police provinciale de l'Ontario, relativement au financement du convoi de la liberté?

[Traduction]

    Je veux que ce soit très clair. Ce n'est jamais arrivé, mais aussi, la société responsable du « Convoi de la liberté » était une société autorisée par l'État, la province de l'Ontario.

[Français]

     Monsieur Wells, je vais vous poser une dernière question.
    Pouvez-vous confirmer que vous n'avez jamais été contacté par les autorités ni par un représentant ou une représentante du gouvernement du Canada, du gouvernement de l'Ontario ou du conseil municipal de la Ville d'Ottawa?

[Traduction]

    Je le confirme.

[Français]

    Merci, monsieur Wells.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez la parole.
    Je veux simplement boucler la boucle sur cette question particulière.
     Dans les mois qui ont suivi l'occupation, avez-vous été en contact avec des responsables gouvernementaux, des entités politiques ou des partis politiques au sujet de votre rôle dans le convoi?
    Nous avons été interrogés par la Commission.
    Était‑ce seulement la Commission, sans aucun acteur politique?
    Il n'y avait pas d'acteurs politiques, à ma connaissance.
    Pour en revenir à votre organisme de bienfaisance, monsieur, est‑ce qu'il est financé par la portion dons de votre plateforme?

  (2125)  

    Non, ce n'est pas le cas. En fait, je suppose que ça dépend de ce que vous entendez par « portion dons de votre plateforme ».
    Si je comprends bien, vous recevez des pourboires. Est‑ce qu'une partie des pourboires va à vos dons de charité?
    GiveSendGo est une entreprise à but lucratif. Nous nous finançons à même les pourboires. Nous couvrons les coûts de l'organisme de bienfaisance, de façon telle que 100 % de l'argent récolté et déboursé par cet organisme est affecté au besoin identifié.
    Pour ce qui est du volet caritatif, vous nous dites aujourd'hui qu'il est financé grâce à une partie des pourboires.
     Je fais référence à l'article du magazine Time paru en mars 2022, voulant que GiveSendGo ait reçu plus de 640 000 $ en dons de la part de partisans du « Convoi de la liberté » et de la campagne « Adopt a trucker ».
     Je veux m'assurer d'avoir bien compris. La portion dons, les 640 000 $, c'était de l'argent que vous avez reçu. Est‑ce exact?
    Oui, ça semble exact.
    Autrement dit, vous avez amassé 600 000 $ pour la cause et 640 000 $ pour votre propre organisme, c'est bien ça?
    Le total amassé était d'environ 13 millions de dollars canadiens, et je pense que nous avons reçu environ 600 000 $ en pourboires.
    En d'autres termes, votre organisation appelée GiveSendGo, à partir des listes de vos divers clients, profite d'organisations qui, dans les faits, ont été bannies des autres grandes plateformes en ligne légitimes. Donc, vous êtes la plateforme en ligne de dernier recours et vous faites partie de...? Cela semble être une somme d'argent vraiment élevée à prélever sur des dons de charité.
    C'est volontaire, les gens le font de leur propre gré.
    Est‑ce que cet argent provenait d'un particulier, ou c'est le montant total? Quel a été le don le plus élevé reçu par GiveSendGo de la part d'un particulier?
    Le don moyen à la campagne était d'environ 100 $, et le montant supplémentaire versé à GiveSendGo était d'en moyenne de 5 $.
    Quel a été le don le plus élevé versé à GiveSendGo?
    Je l'ignore.
    Essentiellement, sur les 640 000 $, quel montant a pu aboutir à votre organisme de bienfaisance?
    Très peu. Nous ne finançons pas l'organisme de bienfaisance. Actuellement, il récolte ses propres fonds pour diverses causes.
    C'était là toutes mes questions. Mon temps de parole est échu.
    Je vais simplement vérifier auprès des sénateurs. Y a‑t‑il d'autres questions?
     Alors, monsieur Wells, votre témoignage est terminé. Nous tenons à vous remercier d'avoir comparu, et spécialement d'être venu une seconde fois après les difficultés occasionnées par votre première convocation. Nous vous sommes reconnaissants de votre participation.
    J'ai un rappel au Règlement.
     Je souhaite simplement informer M. Wells que le policier décédé sur la colline du Capitole s'appelait Brian Sicknick. Il avait 42 ans.
     Merci.
    Oui, il est décédé deux jours plus tard d'un accident vasculaire cérébral. Je le comprends.
    Monsieur Wells, merci de votre présence.
     La séance est levée.
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