Je vous souhaite la bienvenue, monsieur le ministre.
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
[Français]
Bienvenue à la cinquième réunion du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, qui a été créé conformément à l'ordre de la Chambre des communes du 2 mars 2022 et à l'ordre du Sénat du 3 mars 2022. La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre des communes du 25 novembre 2021.
Pour des questions de santé et de sécurité, je remercie les personnes présentes de bien vouloir respecter les recommandations des autorités sanitaires ainsi que les directives du Bureau de régie interne. En cas de problèmes techniques, veuillez m'en avertir pour que nous puissions, au besoin, suspendre les travaux quelques minutes afin que tous les membres puissent pleinement participer à la réunion. Je rappelle aussi aux témoins que des services d'interprétation sont mis à leur disposition. Ceux qui assistent à la réunion en mode virtuel y ont accès en cliquant sur l'icône représentant un globe terrestre au bas de leur écran.
Pendant la première partie de la réunion, le comparaîtra devant le Comité, et nous recevrons le pendant la deuxième moitié. Je me permets de rappeler au ministre que ses représentants seront probablement invités à revenir à une date ultérieure. Nous vous demandons donc, dans la mesure du possible, de répondre vous-mêmes aux questions.
Veuillez prendre note qu'à la fin de la réunion, le Comité devra discuter de ses travaux futurs en vue de la prochaine réunion, laquelle aura lieu le mardi 3 mai, soit la semaine prochaine.
Je souhaite donc la bienvenue à monsieur le ministre de la Sécurité publique ainsi qu'à ses collaborateurs. Vous aurez cinq minutes pour faire vos observations préliminaires.
Vous avez la parole, monsieur le ministre.
:
Je vous remercie, monsieur le président.
[Traduction]
Je vous remercie tous de me recevoir aujourd'hui.
Avant de faire mon allocution, je ferais remarquer que je suis accompagné par un certain nombre de hauts fonctionnaires, soit mon sous-ministre, Rob Stewart; Brenda Lucki, commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, ou GRC; David Vigneault, directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, ou SCRS, et Ted Gallivan, premier vice-président de l'Agence des services frontaliers du Canada, ou ASFC.
Je remercie le Comité d'examiner les événements de janvier et de février derniers, lesquels ont mené à l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. La décision du gouvernement a été précipitée par une série d'urgences d'ordre public simultanées et sans précédent dans diverses régions du pays, dont les images sont gravées dans nos mémoires. Commençons par un rappel des faits.
À la fin de janvier 2022, les membres du prétendu « convoi de la liberté » ont exigé la révocation de toute obligation vaccinale, à défaut de quoi la gouverneure générale devrait unilatéralement démettre le de ses fonctions. D'autres membres ont encouragé un renversement violent du gouvernement, l'un d'entre eux lançant à la menace: « Ce n'est qu'avec des balles qu'on résoudra la question. » Ces objectifs idéologiques extrémistes ont incité des milliers de gens à former d'importants blocages à nos frontières, devant des assemblées législatives, près de monuments et ici même, à Ottawa, devant la Colline du Parlement.
Les répercussions ont été catastrophiques. Les coûts quotidiens enregistrés à chaque point d'entrée ont été astronomiques. Sachez qu'à Windsor, où se trouve le pont Ambassador, les pertes commerciales quotidiennes se sont élevées à environ 390 millions de dollars. Des usines ont fermé, des travailleurs ont été mis à pied et le secteur manufacturier a réduit ses activités.
[Français]
Au pays, notre capacité d'importer des fournitures médicales essentielles, de la nourriture et du carburant et de les acheminer aux Canadiens a été compromise. Notre plus proche ami et allié, les États‑Unis, a exprimé ses préoccupations aux plus hauts niveaux du gouvernement. Ici, à Ottawa, les résidants ont été assiégés pendants des semaines.
[Traduction]
Le Centre Rideau a dû fermer ses portes et de petites entreprises ont placardé leurs vitrines. Les gens ne pouvaient se rendre au travail ou amener leurs enfants à l'école. En outre, le 911 a été inondé d'appels, ce qui a mis en péril les personnes en détresse qui avaient besoin de l'aide des premiers intervenants. Le siège du gouvernement sur la rue Wellington a été complètement envahi par les participants au blocage, lesquels se sont retranchés derrière des structures, ont installé une grue devant le bureau du premier ministre et le Bureau du Conseil privé, et ont intimidé et harcelé continuellement les résidants à toute heure du jour, rendant leur vie insupportable et non sécuritaire.
Quand les policiers, forts de leurs pouvoirs de maintien de la paix, ont demandé aux participants de retourner chez eux, ils ont été entourés et menacés. Quand les médias ont tenté de faire des reportages sur ce qu'il se passait, ils ont été bousculés et se sont fait cracher dessus. De manière réaliste, on ne peut décrire cet événement que d'occupation massive et illégale d'Ottawa pendant près d'un mois.
Le gouvernement est demeuré en contact avec les organismes d'exécution de la loi tout au long de l'occupation pour veiller à ce qu'ils disposent du soutien et des ressources dont ils avaient besoin. Cependant, quand les efforts d'exécution des pouvoirs existants se sont avérés inefficaces, on nous a conseillé d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. En tout temps, nous avons été guidés par un principe simple d'utilisation limitée. Pour dire les choses simplement, nous étions réticents à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence et impatients de la révoquer.
À cet égard, je veux exprimer ma profonde gratitude envers tous les membres des organisations d'exécution de la loi qui ont exercé leurs responsabilités avec retenue et professionnalisme. Ils ont pu rétablir l'ordre public avec des blessures minimales et aucune perte de vie, ce qui nous amène au présent exercice.
Nous sommes ravis d'entendre les observations du Comité, pas seulement sur ce qu'il s'est passé, mais aussi sur la manière d'éviter que de tels événements se reproduisent. Nous devrions nous interroger sérieusement au sujet du recours à la Loi sur les mesures d'urgence. Pourquoi? Parce que des pouvoirs semblables ne devraient être accordés qu'en cas d'absolue nécessité et strictement pour réagir à un état d'urgence précis.
Honorables collègues, à titre de parlementaires, nous avons fait le serment de faire respecter la loi, car nous vivons dans un État de droit. Pour assurer le respect des principes et des valeurs garantis par la Charte, nous devons défendre la liberté d'expression, de rassemblement et de manifestation légale. Dans une démocratie, toutefois, la liberté ne permet pas de bafouer les droits d'autrui, ou d'empêcher les familles qui exploitent de petites entreprises de mettre de la nourriture sur la table ou des parents de marcher jusqu'à l'école avec leurs enfants. Jamais nous ne devrions encourager ou tolérer les comportements illégaux ou en être complices, car il s'agit là d'un affront à l'administration de la justice et à la primauté du droit. Nous pouvons certainement tous nous entendre sur ce point.
Je ne peux penser à quoi que ce soit de plus important pour la vie démocratique de notre pays en ce moment. Je remercie le Comité d'entreprendre ces travaux et répondrai à vos questions avec plaisir.
[Français]
Je vous remercie beaucoup.
:
D'accord. Je vous remercie.
Je suis ravi que vous ayez indiqué vouloir être transparent envers la population canadienne. Vu le manque de collaboration démontré au cours des procédures juridiques qui ont eu lieu en cour la semaine dernière, il semblerait que c'est peut-être une position que votre gouvernement est maintenant en train d'adopter. J'espère que si vous aviez de bonnes raisons d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, comme vous l'affirmez, vous les révélerez à la population canadienne avec les documents et l'information sur lesquels vous, à titre de ministre, et le gouvernement vous êtes appuyés dans cette affaire. J'espère que c'est ce que vous allez faire, monsieur le ministre, pour le bien des Canadiens.
Nous ne sommes pas ici pour nous, mais pour les Canadiens, afin d'être transparents et de rendre des comptes. Remettrez-vous au Comité tous les documents sur lesquels votre gouvernement s'est appuyé pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
:
Je présume donc que vous remettrez effectivement toute l'information sur laquelle vous vous êtes appuyés.
Il est intéressant que, pas plus tard qu'hier, les médias ont révélé que l'économie n'a, en fait, pas encaissé des pertes de centaines de millions de dollars, comme vous l'avez déclaré dans votre allocution d'ouverture. De fait, le commerce était à la hausse et les échanges transfrontaliers de l'industrie et du secteur manufacturier ont augmenté de 16 %, contrairement à vos affirmations.
S'il est une chose qui m'a intrigué, c'est le fait que vous avez retransmis des gazouillis contenant des informations qui se sont ultérieurement avérées complètement fausses ou inexactes. Comment les Canadiens peuvent-ils croire maintenant que l'information sur laquelle vous vous êtes appuyé à titre de ministre de la Sécurité publique pour invoquer la Loi était juste et bel et bien fiable?
:
Monsieur Virani, je vous remercie de votre commentaire.
Monsieur Motz, je vous remercie de vos questions.
Je pense effectivement que nous avons tous la volonté de demeurer respectueux dans le cadre de nos débats. Évidemment, les débats peuvent être parfois un peu plus sanguins qu'à l'habitude, mais nous allons quand même tenter de demeurer respectueux.
Je vous remercie, monsieur Motz, de votre intervention.
Je réalise que je n'avais pas de carton pour indiquer le temps qui s'écoule. Je viens d'en fabriquer un, qui indique qu'il reste une minute.
:
Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
Je remercie le ministre d'être avec nous aujourd'hui au Comité.
[Traduction]
Je dois dire que je trouve curieux que les membres conservateurs du Comité minimisent les répercussions que le blocage qui a entraîné la fermeture de la frontière internationale avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis, a eues sur notre économie et notre réputation.
Monsieur le ministre, je me tournerai vers vous pour vous poser quelques questions. Comme il y a un certain nombre de choses que je voudrais savoir, je vous demanderais, dans la mesure du possible, de répondre succinctement.
À l'heure où le gouvernement fédéral a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence, soit à 16 h 30 le 14 février, n'est‑il pas vrai que le blocage installé à la frontière internationale à Coutts, en Alberta, était toujours en place et que la frontière ne rouvrirait que le 15 février?
Comme je l'ai indiqué plus tôt en répondant à une question de M. Motz, j'ai eu la chance de me rendre à Emerson et de parler directement avec des agents de première ligne de l'ASFC et des organisations d'exécution de la loi qui étaient là à l'époque. Je sais que, comme vous l'avez fait remarquer dans votre préface, que certains membres du Comité et même de la Chambre des communes voient peut-être cette urgence d'ordre public de manières différentes. J'encouragerai ces députés et tous ceux qui doutent à parler à ceux qui ont participé aux efforts d'exécution de la loi et aux Canadiens qui ont dû fermer leur entreprise et vu leur vie bouleversée.
Il y a une différence entre avoir une opinion et un point de vue, et ce qui est un fait. Ce qui est un fait avéré, c'est qu'au moment de l'invocation, certains points d'entrée étaient encore bloqués illégalement. Ces blocages ont eu des répercussions catastrophiques non seulement sur notre économie, mais aussi sur notre sécurité nationale.
:
Je vous remercie, monsieur le ministre.
Vous nous dites que les choses allaient mal un peu partout. Selon la déclaration, il y avait une situation de crise partout au Canada. Or, comme vous le savez, le compte rendu des consultations faites auprès des premiers ministres des provinces et des territoires a été annexé à la déclaration. Vous savez que la Loi exige que le gouvernement fédéral consulte les premiers ministres avant de déclarer une situation de crise.
Or, selon le compte rendu annexé à la déclaration, le premier ministre du Québec s'opposait à l'application de la Loi. Ce dernier disait même que cela pourrait être une source de division. Le premier ministre de l'Alberta s'opposait aussi à l'invocation de la Loi. Le premier ministre de la Saskatchewan n'était pas favorable à l'invocation de la Loi. Le premier ministre du Manitoba n'était pas convaincu, à ce moment, que c'était une bonne idée. Les premiers ministres du Nouveau‑Brunswick, de la Nouvelle‑Écosse et de l'Île‑du‑Prince‑Édouard disaient que ce n'était pas nécessaire. Les premiers ministres des trois territoires, c'est-à-dire le Yukon, les Territoires du Nord‑Ouest et le Nunavut, ont fourni une rétroaction, sans, toutefois, faire de commentaires publiquement. Cela fait donc un total de sept provinces et trois territoires qui ne semblaient pas croire ni craindre qu'il y avait une situation de crise sur leurs territoires respectifs. Seules trois provinces, soit l'Ontario, la Colombie‑Britannique et Terre‑Neuve‑et‑Labrador étaient en faveur de la Loi.
Monsieur le ministre, comment pouviez-vous prétendre qu'il y avait une situation de crise sur tout le territoire canadien, alors que, au moment où vous avez fait cette déclaration, sept des dix premiers ministres vous disaient que tout allait bien, qu'ils n'en avaient pas besoin? Il y en a même un qui vous disait de ne pas le faire, affirmant que cela allait être une source de division.
Comment pouviez-vous prétendre, dans ce contexte, qu'il y avait une situation de crise partout au Canada?
:
Monsieur Fortin, c'est une bonne question.
Il y a un principe voulant qu'il y ait un processus de consultation avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Nous avons respecté ce principe en ayant plusieurs conversations avec nos homologues des provinces et des territoires. C'était un processus continu, non seulement avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, mais aussi pendant sa mise en oeuvre.
Nous avons donc respecté, de bonne foi, les relations avec toutes les provinces et tous les territoires. La Loi a été invoquée, parce que, à ce moment-là, il y avait une situation de crise. Nous avons donc créé les conditions nécessaires pour restaurer la sécurité publique.
:
La proclamation déclarant l'état d'urgence du 14 février 2022 précise que la déclaration d'état d'urgence prend la forme suivante:
i. les blocages continus mis en place par des personnes et véhicules à différents endroits au Canada [...]
J'ajouterai plus précisément:
[...] les menaces continues proférées en opposition aux mesures visant à mettre fin aux blocages, notamment par l'utilisation de la force, lesquels blocages ont un lien avec des activités qui visent à favoriser l'usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens, notamment les infrastructures essentielles, dans le but d'atteindre un objectif politique ou idéologique au Canada,
Par votre entremise, monsieur le président, je vais m'adresser à l'honorable ministre. Je veux faire référence à l'article 83.01 du Code criminel, qui définit le « terrorisme » comme étant un acte commis « au nom — exclusivement ou non — d'un but, d'un objectif ou d'une cause de nature politique, religieuse ou idéologique ».
Étant donné la définition au criminel, seriez-vous d'accord pour dire, vu le libellé que vous avez utilisé dans la proclamation, que c'était considéré comme étant une menace terroriste?
:
Par votre entremise, monsieur le président, j'ai également entendu parler d'un renversement violent. L'honorable ministre a utilisé l'expression « objectifs idéologiques extrémistes ». Or, dans la déclaration, on semble trop insister sur les barrages et les répercussions sur le bien économique. Je pense que nous, autour de la table, pouvons tous convenir que nous avons la responsabilité de faire connaître aux Canadiens la gravité de cette menace. Le commissaire Thomas Carrique de la Police provinciale de l'Ontario, dans son témoignage devant le Comité de la sécurité publique, a parlé de la façon dont le 13 janvier, le rapport de renseignement de la Police provinciale de l'Ontario voyait ces événements comme des événements critiques à risque élevé.
En fait, je vais citer le point numéro 5 de la proclamation, qui fait état du « potentiel d'augmentation du niveau d'agitation et de violence qui menacerait davantage la sécurité des Canadiens ».
Compte tenu de ces deux points, monsieur le président, et par votre entremise, je ferais remarquer à l'honorable ministre que les menaces à la sécurité aux fins de l'ordre d'urgence publique sont définies au sens de l'article 2 de la Loi sur le service canadien du renseignement de sécurité. J'aimerais savoir quelles considérations vous ont été communiquées, vu la menace à la sécurité nationale, par la Police provinciale de l'Ontario et, si j'ai bien compris, par le CIET, dans les semaines qui ont précédé le convoi et l'occupation éventuelle d'Ottawa.
Merci, monsieur le ministre, d'être ici.
J'aimerais me concentrer un peu sur la question du président concernant les problèmes de compétence en matière de maintien de l'ordre. Nous sommes un pays alambiqué en ce qui concerne les services de police, comme nous l'avons vu. Nous avons la police d'Ottawa — et je vais me concentrer sur Ottawa dans cette question — et la GRC qui, évidemment, sert certains aspects ici sur la Colline du Parlement à différents titres. Puisque la compétence en matière de maintien de l'ordre relève de la province de l'Ontario, ce que je connais bien, la province a un rôle à jouer dans le processus.
Dans cette situation, où la ville et l'Ontario ont déclaré des situations d'urgence et, je suppose, se sont donc adressées au niveau fédéral pour demander de l'aide, êtes-vous allé au‑delà de la déclaration d'urgence de la ville et de la province pour voir si elles avaient ou non épuisé leurs propres pouvoirs?
:
Je veux y venir, mais avant, je tiens à reconnaître... La prémisse de votre question va, je l'espère, être étudiée très attentivement par ce comité, à savoir comment les différentes branches de l'application de la loi sont en mesure de coopérer et comment les différentes compétences interviennent et sont mises à contribution, y compris ici dans la capitale.
Ayant passé un certain temps ici, et avec vous tous dans cette ville, je suis conscient, comme vous tous — et c'est très pénible — que la rue Wellington est la responsabilité du Service de police d'Ottawa, ce qui, si je dois être très franc, a présenté quelques défis pour toutes les forces de l'ordre lors de la réponse dans les premiers jours et dans la période qui a suivi le barrage illégal. J'espère... et je suis reconnaissant à ce comité du travail qu'il fait pour déterminer la façon dont nous pouvons nous y retrouver dans ces questions de compétence, particulièrement ici dans la Cité parlementaire.
Lorsque nous avons pris notre décision sur ce que nous pouvions faire pour répondre, nous avons suivi les conseils de divers niveaux d'application de la loi, y compris la GRC et les commissaires concernés, mais nous voulions être sûrs au fond que nous donnions aux forces de l'ordre tous les outils et les ressources dont elles avaient besoin pour intervenir.
Ce n'est qu'après cette période que les autorités existantes — et il y a des autorités existantes dans les livres et nous en sommes tous très conscients — ont été inefficaces pour rétablir la sécurité publique. C'est peut-être un autre domaine que nous encourageons ce comité à étudier très attentivement, et nous considérons cela comme un exercice sain.
:
C'est une question tout à fait légitime.
Je vous assure qu'au moment où nous entreprenons cet examen, nous pensons beaucoup au temps qu'il a fallu pour passer de la police locale à la police provinciale, qui est là pour apporter son soutien lorsque la police locale n'a pas les ressources nécessaires.
Je tiens également à rappeler et à souligner que, malgré l'absence d'une loi qui explique exactement comment passer du niveau local-provincial au niveau fédéral, la GRC n'a cessé d'offrir du personnel, des outils et des ressources supplémentaires pour aider la police compétente à gérer les barrages.
L'autre chose que je dirais, monsieur le sénateur, c'est qu'un principe important à rappeler est que, dans le cadre des opérations quotidiennes, vous ne voulez pas que les élus empiètent sur l'espace de la police. Il est bien établi que nous rédigeons les lois en tant que parlementaires et que nous attendons de notre police qu'elle applique ces lois.
:
Je vous assure que non. Il y avait une communauté de différents partenaires au sein de l'appareil de sécurité publique et nationale, ainsi que les consultations que nous avons entreprises avec différents ordres de gouvernement, y compris ceux qui ont été directement touchés par les barrages illégaux dans tout le pays. Il y a eu une discussion très robuste.
L'autre chose que j'aimerais mettre en contexte — et je sais à quel point c'était difficile, certainement à l'époque, pour ceux qui vivent à Ottawa en particulier —, c'est que, comme c'était la première fois que nous invoquions la Loi sur les mesures d'urgence, nous nous sommes donné beaucoup de mal pour bien faire les choses. En rétrospective, je pense que tout cet épisode et cette saga ont mis en lumière un certain nombre de questions, qui ont été soulevées par des collègues autour de cette table, concernant la coopération entre les divers niveaux de compétence et la façon dont les renforts sont envoyés.
J'espère que, à la fin de ce processus, tous les membres de ce comité seront en mesure de vous donner vos meilleurs conseils et vos meilleures recommandations, en ce qui concerne les défis auxquels nous nous sommes heurtés.
Je vais maintenant me tourner vers vous, monsieur le ministre. Je ne vais pas vous accuser de quoi que ce soit.
Monsieur le ministre, avec le temps dont je dispose, je vais essayer de poser quelques questions. Vous conviendrez avec moi que le gouvernement n'a pas été pris par surprise par l'arrivée de ce que vous avez vous-même appelé « le prétendu “convoi de la liberté” ». En fait, son arrivée avait été abondamment annoncée dans les médias sociaux. Les organisateurs du convoi avaient pris les mesures appropriées pour communiquer avec le Service de police d'Ottawa, le service de la Cité parlementaire, le maire et le conseil municipal pour annoncer leur arrivée. Ils avaient obtenu la permission de se garer sur la rue Wellington et les rues adjacentes.
Vous conviendrez avec moi qu'il s'agissait au départ d'une manifestation pacifique. Les manifestations sont très vigoureusement protégées par notre Charte, au paragraphe 2c), qui vise la liberté de réunion. Notre démocratie donne aux Canadiens le droit d'exprimer leur opinion à l'égard de toute politique gouvernementale. Ce qui était au départ une manifestation pacifique est devenu une manifestation illégale, aux dires du gouvernement.
Ma question porte sur le point suivant. Quelles sont les circonstances qui ont amené le gouvernement fédéral à déterminer que ce qui se déroulait à l'extérieur de l'édifice de l'Ouest constituait une manifestation illégale, et à quel moment ces circonstances se sont-elles produites?
:
Merci, monsieur le président.
Monsieur le ministre, j'ai écouté votre témoignage et je dois avouer que vous ne me rassurez pas du tout.
Si je comprends bien, vous ne pouvez donner d'instruction à aucun policier ni à une autorité quelconque pour empêcher que de tels événements se reproduisent. Vous dites que vous étiez au courant de cela depuis le début, puisque vous habitez à Ottawa. Vous avez entendu le bruit des klaxons et vous avez été témoin des blocages routiers. Vous êtes le ministre de la Sécurité publique, mais vous dites que vous n'avez rien pu faire et que vous n'avez pas l'autorité nécessaire pour faire quoi que ce soit. Manifestement, pour une raison que j'ignore encore complètement — j'espère qu'on la connaîtra avant la fin de nos travaux —, les policiers n'ont pas cru bon d'agir, eux non plus.
D'après votre témoignage, n'importe qui pourrait stationner son auto n'importe où à Ottawa demain matin. Plusieurs camions pourraient en faire autant et les gens pourraient installer un spa et un barbecue n'importe où. Notre réaction serait encore de nous croiser les bras et d'attendre quelques semaines avant de dire que nous allons finalement invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
Est-ce vraiment votre témoignage, monsieur le ministre?
:
Moi, je vous parle de la rue Wellington, à Ottawa.
Ce que je vous dis, c'est qu'il y a eu un blocage ici et vous en avez été témoin, selon ce que vous nous dites. Ce blocage était tellement sérieux que vous avez finalement eu recours à la Loi sur les mesures d'urgence, ce qui, à mon avis, n'était pas nécessaire. C'est mon opinion. On verra pour la suite.
Il n'en demeure pas moins que, aujourd'hui, vous confirmez que vous ne pouviez rien faire d'autre. Comme M. le sénateur Carignan nous l'a dit, le Code de la route de l'Ontario permet de dégager la route. Bien que cela nous apparaisse évident, tout le monde à qui je parle me dit que c'est normal que des policiers...
Personne ne comprend comment une situation comme celle-là a pu perdurer et s'éterniser. Au point où nous en sommes rendus, cela apparaît à tout le monde comme une espèce de laxisme inacceptable, je dirais même irresponsable, sauf votre respect, monsieur le ministre.
Pouvez-vous nous donner des explications à cet égard, s'il vous plaît?
Je vais revenir sur certaines des définitions. Vous remarquerez que dans la définition d'une urgence nationale, à l'article 3, on parle d'un concours de circonstances « auquel il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada ».
Nous avons entendu aujourd'hui que des experts-conseils avaient indiqué au gouvernement qu'il n'avait pas les pouvoirs suffisants, et pourtant on a beaucoup parlé d'un manque de volonté de la part de nos services de police.
Je note que l'une des raisons invoquées pour justifier l'état d'urgence était que des partisans du convoi, anciennement employés dans les forces de l'ordre et l'armée, étaient apparus aux côtés des organisateurs et leur avaient peut-être fourni des conseils en matière de logistique et de sécurité, ce qui posait des problèmes d'ordre opérationnel. Cela a été noté. Je pose cette question, car à l'article 5, où il est question des risques accrus d'agitation et de violence, il est indiqué que certains individus soutiennent l'extrémisme violent à caractère idéologique. C'est une question très sérieuse pour moi dans ce cas particulier.
La question que je pose à l'honorable ministre, par votre intermédiaire, est la suivante. Étant donné qu'il y avait des membres de groupes extrémistes violents à caractère idéologique et que les partisans du convoi comptaient, au sein de la capacité d'organisation de l'occupation, d'anciens membres des forces de l'ordre et de l'armée, le ministre conviendrait‑il qu'il pourrait y avoir des éléments à caractère idéologique au sein de nos forces de l'ordre et de notre armée, et qu'il existe des preuves de leur existence?
Je vais revenir sur les questions de compétence, parce que je veux très bien comprendre les choses sur deux fronts, premièrement en ce qui concerne les barrages ici à Ottawa, et le moment où l'occupation est passée de légale à illégale, ou de manifestation à occupation — illégale —, et deuxièmement, j'aimerais que la commissaire ou quelqu'un d'autre puisse fournir plus de détails sur la question du rôle de la province.
Je comprends la collaboration dont vous parlez, bien que je me souvienne avoir lu — et cela a peut-être été rapporté de façon inexacte — que le ministre de la Sécurité publique de l'Ontario n'était pas présent à certaines des réunions pendant lesquelles ces discussions avaient eu lieu. J'en déduis que cela signifie qu'aucun représentant de la province ne s'est présenté à ces réunions. J'aimerais simplement confirmer que c'est exact. C'est mon premier point.
Le deuxième point est le suivant: lorsque vous observez une manifestation et que celle‑ci devient une occupation illégale, lorsque ce seuil est franchi, comment cela se traduit‑il sur le plan des ressources requises ou demandées aux échelons municipal et provincial?
:
En premier lieu, je veux vous assurer, vous et tous les membres du Comité, qu'il y avait une bonne communication avec la province de l'Ontario, y compris avec mon homologue, la ministre Jones, pendant les barrages.
Nous voulions nous assurer de rester en contact afin de pouvoir soutenir nos efforts respectifs pour fournir aux forces de l'ordre les outils supplémentaires dont elles avaient besoin sur le terrain, en particulier le Service de police d'Ottawa qui, comme vous l'avez entendu tout au long de mon témoignage, était parfois débordé, et de façon significative en raison du grand nombre de personnes qui participaient à l'occupation d'Ottawa. Il y a eu une bonne collaboration.
Pour ce qui est de la deuxième partie de votre question concernant les moments charnières, je dirais que nous avons prêté une oreille très attentive et observé de très près la façon dont la sécurité publique se détériorait et s'érodait à la suite de l'augmentation du nombre de personnes qui se rendaient sur la Colline du Parlement.
Il est devenu très clair qu'ils n'allaient pas partir. Ils ont commencé à installer des structures. Ils ont commencé à s'installer fermement, non seulement sur la rue Wellington, mais...
Monsieur le ministre, le a dit que la Loi sur les mesures d'urgence était ciblée géographiquement, mais le libellé de cette loi s'applique à tout le Canada. Je pense que dans le Règlement, le libellé est « dans tout le pays ». Je pense que tout le monde est d'accord pour dire que c'est ainsi qu'elle a été appliquée. La Loi sur les mesures d'urgence s'appliquait à tout le Canada.
Je me pose la question. Dans ce contexte, l'urgence d'ordre public a été déclarée le 14 février. La déclaration a été faite, puis le 16 février, nous avons eu la violente attaque de Coastal GasLink. Une question inscrite au Feuilleton qui est arrivée hier indiquait que l'incident atteignait le seuil défini dans le Règlement sur les mesures d'urgence. Je suis curieux de savoir pourquoi le gouvernement n'a pas réagi à cette attaque violente en recourant à la Loi sur les mesures d'urgence plutôt que...
Voici une question pour la commissaire Lucki. Le 15 février 2022, on a trouvé une vidéo sur la GRC, peu après la découverte d'une cache d'armes et la dispersion du blocage de Coutts. On y voyait des agents serrer la main à des membres du convoi et les serrer dans leurs bras, comportement qui se distingue nettement de celui que les agents de la GRC réservent, en régions éloignées, aux protestataires autochtones, comme les Wetsuwetens, près de qui on n'a trouvé aucune arme à feu.
Que répondez-vous aux Canadiens qui y voient un exemple évident du système de deux poids, deux mesures? Pourriez-vous également répondre aux observations selon lesquelles les sympathies exprimées par la GRC à l'égard du convoi auraient pu influer sur son choix d'appliquer sélectivement la loi?
:
Je vous remercie, monsieur le président et membres du Comité.
Je suis très heureux d'être ici avec vous, ce soir, pour discuter des mesures d'urgence qui ont été utilisées pour la première fois dans l'histoire du pays.
Je suis accompagné de M. François Daigle, sous-ministre, et de Mmes Samantha Maislin Dickson, Jenifer Aitken et Heather Watts, du ministère de la Justice. Ils vont m'appuyer, comme vous l'avez souligné, sur des questions de nature technique, le cas échéant.
Je suis très heureux d'être ici avec vous sur le territoire traditionnel du peuple anishnabe algonquin.
[Traduction]
Comme vous le savez, le 14 février, notre gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence en déclarant, conformément à la partie II de la Loi, l'état d'urgence. La décision n'a pas été prise à la légère, loin de là.
[Français]
Cependant, après avoir consulté des dirigeants partout au pays, y compris les premiers ministres de toutes les provinces et territoires, nous avons pu constater que la situation avait dépassé leur capacité et leur pouvoir d'intervention, et que d'autres outils s'imposaient pour protéger la sécurité du Canada et des Canadiens.
Dès le départ, notre gouvernement a été très clair sur le fait que la Loi sur les mesures d'urgence ne devait être appliquée qu'aussi longtemps qu'elle était considérée comme absolument nécessaire. C'est pourquoi nous avons surveillé la situation de près pour nous assurer que les mesures prises demeuraient nécessaires, raisonnables et proportionnées à la situation. Grâce au travail des organismes d'application de la loi de tout le pays, nous avons rapidement pu annoncer, le 23 février, que la situation était suffisamment maîtrisée pour nous permettre d'abroger la déclaration d'état d'urgence et de retirer les mesures connexes qui avaient été mises en place.
Les mesures qui ont été mises en œuvre ont été spécifiquement adaptées pour répondre à la situation particulière. Les mesures ont fourni aux autorités les outils supplémentaires dont ils avaient besoin pour faire face à cette urgence. Ces outils ont également dissuadé des personnes de commettre d'autres activités illégales.
[Traduction]
Permettez‑moi de résumer ces mesures précises et temporaires. Nous avons temporairement interdit la participation à une assemblée publique dont il est raisonnable de penser qu'elle aurait pour effet de troubler la paix et qu'elle excéderait une protestation licite. La police a été en mesure, temporairement, d'aménager des lieux désignés comme protégés, notamment la Colline parlementaire, des infrastructures essentielles comme les aéroports, les hôpitaux et les ouvrages de franchissement internationaux. Elle a pu, temporairement, obliger des particuliers et des compagnies à fournir des biens et des services essentiels, nécessaires à l'enlèvement, au remorquage et à l'entreposage de véhicules, d'équipement, de structures et d'autres objets qui composaient un blocage, en contrepartie d'une rémunération décente. Elle pouvait également refuser temporairement l'autorisation de se déplacer aux personnes qui avaient l'intention d'aller participer à la protestation illégale.
De plus, des mesures ont été prises pour interdire temporairement le transport d'une personne mineure pour la faire participer à une telle assemblée et pour interdire temporairement le soutien à une assemblée illégale, ce qui donnait à la police le pouvoir d'appliquer l'interdiction, par exemple en faisant rebrousser chemin aux personnes qui apportaient de la nourriture, des couvertures et des matériaux servant à la construction d'abris vers un endroit où avait lieu une assemblée illégale.
Toutes ces mesures temporaires ont pris fin à la révocation de la déclaration de l'état d'urgence, le 23 février 2022. Ces mesures ont été en vigueur pendant neuf jours.
[Français]
Je prends au sérieux, à titre de ministre de la Justice, ma responsabilité de veiller à ce que toute mesure gouvernementale soit conforme à la Constitution, y compris à la Charte canadienne des droits et libertés. Cela inclut toutes les mesures prises dans le cadre de la Loi sur les mesures d'urgence. La Loi elle-même prévoit que toutes les mesures temporaires prises en vertu de celle-ci doivent être soumises à la Charte ainsi qu'à la Déclaration canadienne des droits, et tenir compte du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Ce point mérite d'être souligné, car je pense que cela a donné lieu à une certaine confusion. Les mesures employées dans le cadre de la Loi sur les mesures d'urgence ont été examinées de façon à relever toute incompatibilité avec la Charte. Le gouvernement est d'avis que les mesures prises y étaient conformes. Les droits et libertés individuels n'ont pas été suspendus. En vertu de la Charte, les droits et libertés ont continué d'être protégés, le gouvernement ayant pris les mesures nécessaires, des mesures légales et proportionnées à la situation, pour pouvoir faire face aux manifestations et aux blocages illégaux.
[Traduction]
Disons‑le clairement, nous protégerons et défendrons toujours le droit des Canadiens de se rassembler pacifiquement et d'exprimer librement leurs opinions, mais les blocages et l'occupation du centre-ville d'Ottawa n'étaient pas une assemblée pacifique. Les protestations et les blocages de février étaient illégaux, intimidants, harcelants et ils menaçaient la sécurité du Canada.
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Merci, monsieur le président.
Bonsoir, monsieur le ministre. Je suis heureux de vous revoir. Je vous en remercie.
Reportons-nous d'abord un peu en arrière, pour examiner des événements survenus avant l'invocation de la loi. Nous savons que les membres du convoi ont eux‑mêmes formulé une foule de demandes, largement répercutées dans les médias sociaux. Ils voulaient la fin de tous les passeports vaccinaux, y compris les passeports utiles aux déplacements à l'intérieur du Canada. Ils voulaient supprimer tous les programmes de vaccination et toutes les mesures de traçage des contacts. Ils voulaient faire respecter les droits des personnes non vaccinées. Ils voulaient la cessation immédiate de toute forme de dénigrement des Canadiens en désaccord avec les mandats du gouvernement et de toute censure des opinions contraires à celles du gouvernement.
N'est‑ce pas que, dans ces demandes publiques, on ne voit rien d'inquiétant pour le gouvernement fédéral, parce qu'elles expriment une opinion consacrée et protégée par la Charte des droits et libertés?
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Absolument. Des manifestations, nous en voyons tout le temps sur la Colline du Parlement.
En fait, lorsque la police d'Ottawa, en collaboration avec un certain nombre d'autres services de police, a dégagé la rue Wellington, les manifestants se sont installés légalement sur les trottoirs, quelques intersections plus loin, et personne ne les a dérangés. On leur a permis de faire valoir leur point de vue. Cela relève d'une liberté d'expression légitime. Voilà en quoi consiste une manifestation légitime.
Or, ce n'est pas ce qui s'est passé sur la rue Wellington, sur le pont Ambassador, ni à Coutts, en Alberta.
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Merci, monsieur Virani. C'est une excellente question.
De façon générale, chaque mesure que nous avons prise était assortie d'un objectif précis que nous voulions atteindre. L'intervention était mesurée, ciblée, temporaire et proportionnelle. Nous avons clairement indiqué que nous n'irions pas plus loin que ce qui était nécessaire pour maîtriser ces situations partout au Canada.
Nous avons suivi la situation de près, tous les jours, plusieurs fois par jour. Dès que ces dispositions n'étaient plus nécessaires, nous avons révoqué la Loi. Les droits des Canadiens, dans la mesure où ils avaient subi une atteinte minimale en raison de ces dispositions, ont alors été pleinement rétablis. Nous avons également veillé à ne pas empiéter sur d'autres droits liés à la liberté d'expression, comme le droit à la liberté de réunion. D'autres manifestations se déroulaient de façon légitime ailleurs au Canada.
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En tout état de cause, cela a été fait avant la déclaration. Le compte rendu de cette consultation, qui est daté du 16 février 2022, est annexé à la déclaration.
Je me reporte maintenant à ce compte rendu. Sans m'attarder à chaque article, je constate, à la page 6, que le premier ministre du Québec s'opposait à l'application de la Loi sur les mesures d'urgence et il disait même que ce serait une source de division. Le premier ministre de l'Alberta s'opposait à l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Le premier ministre de la Saskatchewan n'était pas favorable à la déclaration de l'état d'urgence et disait que la police disposait déjà de suffisamment d'outils. Le premier ministre du Manitoba déclarait qu'il n'était pas convaincu que, à ce moment, il était nécessaire d'invoquer la Loi. Les premiers ministres du Nouveau‑Brunswick, de la Nouvelle‑Écosse et de l'Île‑du‑Prince‑Édouard disaient que ce n'était pas nécessaire, dans leurs provinces, d'invoquer la Loi. Les premiers ministres des trois territoires, soit le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, ont discuté avec le gouverneur en conseil, mais ils n'ont pas fourni de commentaires sur l'invocation de la Loi, de sorte que sept provinces étaient tout simplement contre l'invocation de la Loi. Les trois territoires n'ont pas d'opinion ou, en tout cas, ils n'expriment pas d'opinion là-dessus. Il reste trois provinces qui vous ont dit, semble-t-il, qu'ils en auraient besoin, que ce serait une bonne idée.
À quoi servent donc ces consultations, monsieur le ministre?
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Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais faire de mon mieux pour poser des questions par votre entremise.
J'aimerais revenir sur cette notion de conformité à la Charte, car je pense que les Canadiens méritent à juste titre de savoir que les décisions prises par le gouvernement étaient proportionnelles à la menace. Je crois que le défi du Comité est d'examiner en profondeur les conditions préalables et les faits relatifs à ce qui nous a été présenté.
Nous avons entendu, je pense avec beaucoup d'intérêt, un désaccord sur la nature de la menace. Je dirai publiquement que lorsqu'il existe un protocole d'entente de cette nature, lorsque des éléments de preuve sur Internet montrent que certains parlent de tirer des balles dans nos têtes et lorsqu'on trouve des munitions sur place à Coutts, je serais porté à les croire sur parole et à reconnaître qu'il s'agit d'une menace. Cependant, l'invocation de la déclaration en tant que telle n'allait pas aussi loin que le libellé concernant la menace pour la sécurité nationale aux termes de la Loi sur le SCRS.
Voici la question que je pose à l'honorable procureur général, par votre entremise, monsieur le président: quels faits ou facteurs a‑t‑il pris en considération au moment de fournir des conseils sur le libellé de l'invocation, compte tenu de l'alinéa 2(d) de la Loi sur le SCRS?
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Je vous remercie de votre réponse, mais plus précisément, en ce qui concerne la situation de crise nationale...
Vous avez parlé d'une menace contre des personnes, mais à l'alinéa 3b) de la Loi, sous Champ d'application et interprétation, il est question d'une situation qui « menace [...] la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l'intégrité territoriale du pays » et à laquelle « il n'est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada ».
Lorsque votre collègue a comparu devant nous, je lui ai posé des questions pour souligner la similitude avec le libellé de l'article 1, qui parle d'activités visant à favoriser l'usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens, ou des infrastructures essentielles, dans le but d'atteindre un objectif « politique [...] ou idéologique ». Ce libellé est très semblable à celui de la définition de terrorisme qui figure à l'article 83.01 du Code criminel.
Je suppose que lorsque nous examinons objectivement la question de savoir si cette affaire aurait pu être gérée au moyen d'autres lois canadiennes, étant donné que vous avez dégagé des liens étroits avec l'extrémisme idéologique, l'infiltration d'anciens et d'actuels membres de sécurité, y compris des services de police, de la Force opérationnelle interarmées 2 et de l'armée, pourquoi n'a‑t‑on pas envisagé d'utiliser la définition de terrorisme, compte tenu des armes trouvées à Coutts et du protocole d'entente?
Bienvenue, monsieur le ministre, et merci d'être des nôtres.
J'aimerais parler un peu d'Ottawa et de l'injonction. Je voudrais simplement avoir une idée de l'importance que vous avez accordée — s'il y a lieu — aux nombreuses plaintes des citoyens d'Ottawa. Comme beaucoup de gens ici, lorsque je séjourne ici pendant la semaine, je rencontre des voisins. Ces derniers m'ont certainement expliqué comment ils vivaient la situation et comment le tout était géré.
Comme vous le savez, un citoyen a déposé une injonction interdisant la pollution sonore causée par les camions et les autres types de véhicules. En quoi cela a‑t‑il influé sur la prise de décision concernant la déclaration de situation de crise? Pour vous donner pleinement l'occasion de... On me pose souvent la question suivante: pourquoi un simple citoyen a‑t‑il dû demander l'injonction alors qu'en réalité, il y a trois ordres de gouvernement qui auraient pu faire la même chose et qui avaient peut-être beaucoup plus de moyens à cet égard?
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Merci, sénatrice Boniface.
Comme je vis à Ottawa une grande partie de la semaine, je devais moi aussi composer avec la situation. Mon bureau était juste à côté de Wellington. Je ne me prononcerai pas sur la substance de l'injonction, mais je me contenterai de dire qu'il s'agit d'un recours qui relève du droit privé et qui est exercé par un particulier. Rien dans ce que nous faisons n'empêche les particuliers de recourir au droit privé.
Le gouvernement, lui, a des recours de droit public. La Loi sur les mesures d'urgence en est un, et c'est ce que nous avons choisi d'utiliser parce que nous l'avons jugé nécessaire. Toutes les plaintes des citoyens, si vous voulez — pour reprendre votre expression — sont la preuve que leurs droits avaient été gravement bafoués par l'activité illégale du convoi.
Je vous lis un passage de ce que le père de la Loi sur les mesures d'urgence, M. Perrin Beatty, a dit à l'étape de la deuxième lecture de l'étude du projet de loi C‑77, le 16 novembre 1987, à la Chambre des communes:
[...] contrairement à la Loi sur les mesures de guerre, la partie II du projet de loi C‑77 ne confère aucun nouveau pouvoir en ce qui a trait aux perquisitions, aux arrestations ou à la détention. On considère que les dispositions du Code criminel à ce sujet permettent parfaitement de s'occuper du cas des gens qui troublent l'ordre public, même dans des circonstances exceptionnelles ou inhabituelles.
Monsieur le ministre, comment pouvez-vous dire qu'il est conforme à la Charte de saisir des comptes de banque sans fondement législatif ni mandat de perquisition ou autorisation judiciaire, avec pour seul objectif de faire peur au monde?
Dites-moi que cela est conforme à l'article 8 de la Charte canadienne des droits et libertés.
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Merci pour votre question, sénateur Harder.
C'était une situation sans précédent et, évidemment, vous le savez tous très bien, je ne vais pas divulguer de renseignements confidentiels du Cabinet, ni violer le secret professionnel. Cela dit, nous avions la situation à l'œil. Nous l'avons vu évoluer. Nous avons vu les autorités essayer de gérer la situation avec les outils dont elles disposaient. Nous avons tenu des consultations durant tout le processus, comme l'a souligné mon collègue, Marco Mendicino. Nous avons consulté les forces policières. Nous avons consulté d'autres gouvernements. Nous avons reçu des lettres de ministres d'autres provinces, dont l'Alberta, déclarant avoir besoin de remorqueuses et ne pas être en mesure de gérer la situation.
Nous avons tenu compte de tout cela. Nous avons invoqué la Loi sur les mesures d'urgence quand, d'abord, il nous est apparu évident que la situation était devenue de portée nationale, que nous avions satisfait aux définitions de seuil dans la Loi sur les mesures d'urgence et que les provinces et autres autorités locales ne pouvaient pas gérer seules la situation.
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Merci pour votre excellente question, sénateur.
Ces deux entités, soit le comité parlementaire et l'enquête indépendante, figurent dans la Loi comme telle. Il ne s'agit pas d'une enquête gouvernementale, mais d'une enquête entièrement indépendante menée conformément à la Loi sur les enquêtes.
Le mandat de la Commission, et je vais vous le lire, est d'examiner « les circonstances qui ont donné lieu à la déclaration », etc., l'ampleur des circonstances pertinentes et des mesures prises, l'évolution et les objectifs, le contexte global, y compris les effets du financement intérieur et étranger et du sociofinancement, etc. L'enquête indépendante a un mandat très étendu.
De ce que j'en comprends, le comité d'examen parlementaire vise à étudier ce que le gouvernement a fait dans le cadre de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Il y aura inévitablement des chevauchements, mais j'estime, du moins à la lecture des deux mandats dans la Loi, que l'enquête indépendante a une plus grande portée et, au titre de la Loi sur les enquêtes, des pouvoirs supplémentaires.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Merci d'être des nôtres, monsieur le ministre.
Vous venez tout juste de parler de votre devoir. Je m'en voudrais de ne pas souligner que nous tous, vous y compris, monsieur, avons le devoir d'être tout à fait transparents et de répondre de nos actes à la population canadienne. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous procédons à cet examen et qu'une enquête est menée.
Quand nous demandons des renseignements, je crois qu'il est important que les Canadiens aient foi dans leur obtention. Je sais qu'il est facile de se rabattre sur le caractère confidentiel des renseignements du Cabinet, mais cela n'inspire guère confiance à la population canadienne. Pas du tout, en fait. Elle doit avoir une raison pour faire confiance à ce gouvernement et à ce comité, de même que pour croire que nous aurons un accès total aux renseignements sur lesquels le gouvernement a fondé ses décisions. Il est d'ailleurs juste que ce soit le cas.
Je vous prie donc de fournir l'analyse et les renseignements dont vous disposiez et sur lesquels vous vous êtes appuyés dans le cadre de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, monsieur.
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Merci, monsieur Motz. Je comprends le sentiment sous-jacent à la question, et partage tout à fait les visées de transparence.
Selon moi, les Canadiens comprendront que le caractère confidentiel des renseignements du Cabinet fait partie intégrante de notre système de gouvernance. La capacité des membres du Cabinet d'exprimer leurs points de vue en toute liberté, surtout quand ils sont en désaccord, surtout quand ils doivent donner une réponse commune en sortant de la pièce, réponse avec laquelle ils ne sont pas nécessairement d'accord en privé, fait partie intégrante de notre système. Il est extrêmement rare que l'on renonce au caractère confidentiel de ces renseignements. Idem pour le secret professionnel.
Dans les documents déposés, nous avons fourni une feuille de route détaillée. Nous avons remis un rapport des consultations. Nous avons déposé les raisons pour lesquelles nous avons invoqué la Loi, et nous estimons avoir respecté ses critères. Nous avons concrètement remis les conclusions...
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Merci. Je suis heureux que vous adoptiez cette position. Je crois que nous devons aussi admettre la suprématie du Parlement, et c'est quelque chose qui, j'en suis sûr, sera éventuellement soulevé.
Monsieur, d'après votre témoignage, j'ai l'impression, du moins selon une remarque que vous avez faite à la sénatrice Boniface, je crois, que vous avez directement eu recours à la Loi sur les mesures d'urgence, contrairement à l'article 3 de ladite loi, qui exige qu'il ne soit pas possible de faire adéquatement face à la situation sous le régime des lois du Canada. À mon avis, il y a beaucoup d'articles du Code criminel, trop nombreux pour être cités dans le temps qui m'est alloué, de même que des lois provinciales et des règlements municipaux, qui auraient pu s'appliquer et qui n'ont pas été adéquatement ou pleinement employés dans cette situation. C'est peut-être ce qui vous a incité à faire cela.
Je veux revenir sur une question de M. Green sur la Charte. Beaucoup de Canadiens jugent que, dans cette situation en particulier, le décret suscitait de graves préoccupations par rapport à la Charte des droits. L'article 2 garantit la liberté d'association et la liberté de réunion pacifique. L'article 7 garantit le droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. L'article 8 garantit la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives.
Comme on l'a déjà mentionné, des juges ont statué que toute restriction aux droits fondamentaux doit être raisonnable, ancrée dans une démonstration probante de sa nécessité et prescrite par la loi.
Avez-vous effectué un examen complet de la Charte, monsieur, de même qu'un examen relatif au respect de toutes ses dispositions? Si oui, qui avez-vous consulté? Êtes-vous en mesure de partager ces conclusions avec le Comité?
Monsieur le ministre, j'écoute votre témoignage et, moi aussi, je déplore la situation qui a eu lieu sur la Colline du Parlement. Je sais qu'il s'est passé des choses ailleurs, mais concentrons-nous sur ce qui s'est produit sur la rue Wellington et sur la Colline, car cela n'avait aucun bon sens. J'ai de la difficulté à comprendre comment on a pu laisser la situation dégénérer à ce point. Si on m'avait dit, il y a un an, que des gens pourraient stationner des camions sur la rue Wellington et y installer un barbecue et un spa, j'aurais trouvé cela ridicule et je me serais dit que ce serait impossible. Or, c'est arrivé. Quand j'entends qu'il a fallu invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, je suis inquiet.
À votre avis, sommes-nous aujourd'hui dans la même situation qu'auparavant? Si des gens décidaient en fin de semaine de bloquer la rue Wellington ou d'autres rues aux alentours, ou même la Colline du Parlement, serions-nous encore à la merci de cela et aurions-nous encore à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence? Y a-t-il des mesures qui pourraient être prises en vertu des lois actuelles, que ce soit le Code criminel, le code de la route ou toute autre loi?
On a beaucoup parlé de la nécessité de faire preuve de transparence et de rendre des comptes au cours du présent processus, et pourtant, on a constamment fait référence au caractère confidentiel des renseignements du Cabinet et au secret professionnel au début des témoignages ainsi que dans les médias. Je crois que nous avons l'occasion de fournir aux Canadiens qui sont en faveur et contre ces mesures les éclaircissements dont ils ont besoin. Je ne vous demande pas de déroger au caractère confidentiel des renseignements du Cabinet, mais j'ai des questions précises sur le respect de la Charte.
Par votre intermédiaire, monsieur le président, j'aimerais donc demander au procureur général si, au sein du ministère de la Justice, il y avait du personnel chargé de l'analyse de l'incompatibilité avec la Charte?
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Vous ne nuisez pas sans doute à vos arguments, mais vous nuisez assurément au processus qui nous permettrait d'y voir clair.
Vous avez l'occasion ici même, au sein du Comité, à cette séance ou à la prochaine, d'être honnête avec les Canadiens au sujet des preuves et des faits qui vous ont menés à faire ce choix.
Je crois que ce qui est frustrant dans ce processus — et j'ai appuyé la décision —, c'est qu'il y a eu beaucoup de manquements dans l'analyse de la menace à la sécurité nationale telle que définie à l'alinéa 2d) de la Loi sur le SCRS, bien que je les prenne au mot, et honnêtement, dans la capacité du gouvernement à communiquer clairement aux Canadiens les faits réels.
Il y aura beaucoup de discussions autour de cette table au cours des semaines et des mois à venir, et des motions pour obtenir de l'information pour lesquelles les membres de ce comité spécial ont prêté serment. Je demanderais simplement au ministre en terminant d'envisager, étant donné ce qui est en jeu, de mieux collaborer avec le Comité et d'être plus transparent au sujet des faits.
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Je comprends votre frustration, monsieur Green.
En tant que procureur général, j'ai aussi le devoir de protéger le secret professionnel, qui permet aux Canadiens, et pas seulement au gouvernement, mais à tous les citoyens au Canada, d'obtenir des conseils juridiques honnêtes et solides, même lorsque ce n'est pas ce qu'ils veulent entendre. C'est un avantage aussi.
Bien entendu, je vais continuer de travailler avec vous et les Canadiens pour bâtir cette confiance, mais les Canadiens, je pense, vont comprendre qu'à titre de procureur général, je dois protéger le secret professionnel.
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Pourriez-vous me poser cette question dans quelques années?
Je suis sérieux. J'espère que le travail que vous faites et que les responsables de l'enquête indépendante vont faire nous incitera à revoir la loi. Honnêtement, je suis encore trop pris dans ce tourbillon. J'ai quelques idées à ce sujet, mais je ne suis pas encore prêt à en parler. Je veux avoir toute l'information avant.
Toutefois, en tant que législateurs, je crois que nous avons l'obligation de continuer à y apporter des modifications et de procéder à une refonte complète si c'est ce qui s'impose. Le gouvernement Mulroney a procédé à une refonte complète de l'ancienne Loi sur les mesures de guerre qui a mené à la présente loi, et c'était une bonne réforme. On pourrait avoir besoin d'apporter des modifications. C'est pour l'avenir, mais je crois que vous posez là une très bonne question.
Je sais que la province de l'Ontario veut procéder à des modifications législatives de sa loi, et j'espère qu'à un moment donné, quelqu'un se penchera sur les liens entre une mesure d'urgence provinciale et cette loi pour déterminer s'il existe des failles qui sont ouvertes à l'interprétation. Plus c'est clair, mieux c'est, à mon avis.
Enfin, j'aimerais savoir si vous seriez d'accord avec ce qui suit. L'Association canadienne des policiers a rencontré diverses personnes et suggéré qu'il faudrait tenir un sommet pour réunir les principaux intervenants afin de discuter de la façon d'assurer le maintien de l'ordre lors des manifestations, déterminer comment faire appel aux ressources, et établir la marche à suivre. Je crois que le gouvernement fédéral serait bien placé pour être un bon facilitateur, étant donné les niveaux...
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Je vous remercie, monsieur le ministre.
Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais être brève. Nous avons discuté de la Charte en long et en large. J'aimerais vous parler de l'article 7 et de l'importance de notre droit à la liberté comme Canadiens.
Je vous dirais que cette mesure était nécessaire pour protéger la liberté des Canadiens et leur droit de circuler librement dans la ville d'Ottawa, de circuler librement pour se rendre au travail à Coutts, en Alberta; à Emerson, au Manitoba; à Surrey, en Colombie-Britannique; et à divers autres endroits partout au pays.
La Loi sur les mesures d'urgence était-elle nécessaire pour protéger ces droits des Canadiens qui sont prévus dans la Charte?
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Je vous remercie beaucoup.
On a entendu dire autour de la table que les polices locales et les polices provinciales au pays n'avaient pas les pouvoirs nécessaires pour gérer adéquatement la situation. Toutefois, selon des éléments de preuve provenant de sources ouvertes, ce ne sont pas les pouvoirs qui étaient insuffisants, mais les autorités qui n'agissaient pas.
J'aimerais savoir si le ministre est d'avis que, si la police avait simplement utilisé les pouvoirs qu'elle détenait déjà — c'est-à-dire obtenir tôt des conseils du Centre intégré d'évaluation du terrorisme —, compris l'information qui lui était transmise à propos d'une menace à la sécurité nationale, et agi en conséquence, on aurait pu éviter cette situation.
Corrigez-moi si je me trompe, mais je crois que nous avions prévu refaire l'exercice relatif aux motions de régie interne le 3 mai, soit mardi prochain. C'est au Comité de prendre une décision, car je ne peux pas la prendre seul.
Il faut effectivement entendre des témoins, et il y a des motions en suspens. Entre autres, il y a une motion qui porte sur la production de documents. Cette motion a été présentée par M. Motz, mais elle a été amendée. Si l’on veut demander au ministre ou à quiconque au gouvernement de nous produire des documents, nous ne devons pas attendre la fin juin pour le faire, parce que nous allons devoir composer avec les délais. Il est peut-être opportun de discuter de cette question. Qu'on la rejette ou qu'on l'adopte, mais qu'on le fasse rapidement.
Je suis respectueusement en désaccord avec Mme Bendayan et le sénateur Harder. Nous devons nous occuper des affaires du Comité. Il incombe au Comité de les terminer. Je propose que nous y consacrions la moitié de notre séance la semaine prochaine. À ma connaissance, nous n'avons pas de témoins prêts à venir la semaine prochaine. Je propose que nous prenions la moitié de la séance pour terminer les affaires du Comité et que nous consacrions l'autre moitié à l'audition d'un témoin, celui qui sera disponible.
Je crois qu'il est important de le faire. Si le Comité s'entend pour examiner certaines motions la semaine prochaine, elles peuvent prendre du temps à se concrétiser. La question de la production de documents et des témoins peut prendre un certain temps à régler. Je pense que nous devons à tout le moins en discuter et prendre le temps de le faire.
Au bout du compte, nous allons entendre des témoins et encore des témoins, et nous devons avoir — je crois que c'est la semaine prochaine... Devons-nous remettre notre liste de témoins la semaine prochaine ou d'ici la fin de la semaine? Très bien, notre première liste de témoins préliminaires doit être soumise aujourd'hui. Je crois que vous allez la trouver très longue. Nous devons entendre des témoins, mais nous devons aussi terminer les affaires du Comité.
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Je vous remercie, monsieur le président.
Je voulais souligner que si la séance de ce soir est une indication de la réticence du gouvernement à fournir au Comité les renseignements qui seraient pertinents pour le témoignage des futurs témoins — et nous avons été assermentés pour pouvoir les examiner —, je pense que nous sommes malheureusement acculés au pied du mur et que nous devrons voter à un moment donné pour savoir si le Comité veut un processus transparent et responsable, ce qui comprend la divulgation de documents.
Lors des échanges que nous venons d'avoir, le ministre a clairement dit que, même s'il est vrai qu'il peut fournir les renseignements au sujet de la conformité à la Charte dans d'autres circonstances, il n'était pas tenu de le faire en vertu de la loi dans ce cas. Nous avons le pouvoir, en tant que Comité, et c'est confirmé par une jurisprudence considérable, d'exiger du gouvernement la production de documents, et j'aimerais voir ces documents. J'aimerais connaître les faits. On a beaucoup fait allusion aux faits, monsieur le président, mais les faits comme tels ne nous ont pas été divulgués, que ce soit dans une séance à huis clos ou non.
Je dirais qu'à un certain moment, nous devons examiner la motion qui a été présentée et qui porte sur la divulgation des documents qui sont nécessaires pour que nos enquêtes soient complètes.
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Je comprends ce que le greffier indique, mais je voudrais répéter que quelque chose dans les paroles de M. Motz m'a perturbé parce qu'il a déclaré qu'il ignorait quels témoins nous devions convoquer.
Nous avons adopté une motion juste avant Pâques. Je sais que c'était il y a trois semaines, mais je me souviens que des suggestions ont été faites à cet égard. J'ai proposé la motion, puis des gens ont proposé des modifications pour l'améliorer. Je pense que la motion a été améliorée, et elle indique que des représentants du ministère de la Sécurité publique, du SPP, du sergent d'armes, du ministère des Finances, du ministère de la Justice, de la GRC, du SCRS, de l'ASFC et du CANAFE sont invités à comparaître devant le Comité à quatre dates sélectionnées par les membres du Comité, afin de discuter des mesures invoquées le 14 février en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence pendant des périodes de trois heures chacune.
Nous avons traversé quelques moments difficiles pour parvenir à cette formulation, sur laquelle nous nous sommes mis d'accord, et je suppose que ce que le greffier souhaite, c'est que les membres du Comité choisissent ces dates.
Avec tout le respect que je vous dois, je propose une motion portant que nous entendions des témoins au cours de la réunion du 2 mai, si mes dates sont correctes, et que ces témoins incluent toutes les personnes que je viens de nommer. Nous verrons qui sera disponible. Je propose également que nous utilisions les trois heures, que nous ayons non pas une demi-rencontre, mais une rencontre complète pour entendre ces témoins. La réunion d'aujourd'hui a duré trois heures. C'était fatigant, mais nous avons fait du bon travail. Je pense que nous devrions continuer de réaliser un travail fatigant mais précieux, parce que nous avons beaucoup de pain sur la planche.
Je propose cette motion et demande que nous la mettions aux voix.
:
Lorsque la motion a été adoptée, nous ne connaissions pas les dates précises des audiences.
Je voudrais simplement prévenir le Comité que, comme ces motions ont déjà été présentées, les membres du Comité peuvent les proposer à tout moment pendant leurs interventions, même en présence de témoins. Je ne veux pas que le Comité se retrouve dans une situation où les considérations politiques du Comité entravent les témoignages de nos invités.
Dans cette mise en garde, je dirais qu'en réservant du temps pour les travaux du Comité, nous ne risquerions pas de nous retrouver dans une situation où ces questions pourraient entraver les témoignages de ministres ou de témoins qui comparaissent ce jour‑là. En tant que membres du Comité, nous avons tout à fait le droit de proposer ces motions à tout moment où nous avons la parole.
Au lieu de nous retrouver dans cette situation — et je songe au fait que je pourrais occuper le fauteuil au moment où cela pourrait survenir —, je demanderais que nous envisagions de réserver du temps pour discuter de ces questions sans entraver les témoignages des personnes que nous avons invitées.
Je tenais simplement à mentionner cela.
:
Merci, monsieur le président.
Vous savez, je trouve intéressant que certains membres du Comité soient accusés de manière désinvolte de chercher à reporter les témoignages. Nous sommes ici pour entendre des témoignages, mais les motions présentées établissent des règles et des paramètres concernant la façon dont nous allons nous occuper de nos travaux et ces questions n'ont pas encore été réglées. Nous devons les régler. Nous pouvons encore entendre des témoins, et nous devons le faire, mais le fait de suggérer que nous passions ne serait‑ce que la moitié d'une réunion du Comité à nous occuper de certaines des motions, à régler ces questions, puis à passer à autre chose... Je pense que nous, les membres du Comité, agissons un peu de façon irresponsable en voulant simplement, vous savez, tenir des audiences, alors que nous n'avons nullement structuré ce que nous allons faire de certains de ces témoignages.
Pour ce qui est de ce que nous demandons au gouvernement de nous donner, nous connaissons déjà, comme l'a indiqué M. Green, la position du gouvernement concernant la communication des renseignements sur lesquels il s'est appuyé pour invoquer la Loi. Un certain nombre des membres assis à la table ont laissé entendre que nous avions besoin de ces renseignements pour prendre une décision éclairée. Si vous regardez les motions que nous avons sous les yeux, soit les motions 16 et 17, il y a un...
Monsieur Naqvi, vous parlez des hauts fonctionnaires. Ces fonctionnaires ne vont pas tous comparaître la même journée. Cela exigera au moins quatre jours, voire cinq ou six jours. Il serait raisonnable de prévoir une heure et demie par organisme. Comme nous l'avons constaté aujourd'hui, nous ne pouvons pas vraiment obtenir beaucoup d'informations si nous accueillons en même temps plusieurs organismes qui sont responsables de domaines totalement différents.
J'affirme que nous devons agir de manière responsable et prudente en ce qui concerne les responsabilités que le Comité assume. Réservons la moitié d'une réunion, et passons ensuite aux témoins.
:
Sur la liste, M. Brock est le prochain intervenant. Cependant, si vous me le permettez, je voudrais intervenir, sinon je ne sais pas quand je pourrai le faire.
Je veux simplement mentionner ceci: j'aimerais bien que nous réglions la question des motions en suspend, qu'elles soient adoptées ou rejetées. J'ai besoin de savoir à quoi m'en tenir.
Il y a, entre autres, les ministres qui nous disent ne pas vouloir produire de documents et ne pas avoir le droit de le faire. J'aurais envie de poser la question aux conseillers juridiques de la Commission, sauf que nous n'avons pas désigné de conseiller juridique encore. Nous avons une proposition selon laquelle il faut un conseiller juridique indépendant, et nous avons un amendement ou une contre-proposition voulant que nous donnions cela au greffier de la Chambre.
Il n'en reste pas moins que j'ai une question: est-ce que je peux forcer le ministre, ou est-ce que le Comité peut forcer le ministre à nous fournir les opinions qu'il dit avoir reçues, et ce, pour que son témoignage définitif comprenne les documents qu'il invoque dans sa réponse? À mon sens, il doit les fournir, mais je n'ai pas de conseiller juridique à qui poser la question.
Il faut donc que nous nous prononcions sur les motions réservées pour en obtenir un. Advenant le rejet des motions et l'absence d'un conseiller juridique, je vais me débrouiller. Je vais en obtenir un, je vais faire venir un avocat à titre de témoin et je vais lui poser la question. Vous comprendrez que ce sont des choses que nous devons faire. Moi aussi, j'ai envie d'entendre des témoins, beaucoup de témoins, et longtemps, tout l'été s'il le faut. Cela dit, je pense que nous devons d'abord établir notre plan de travail.
Les motions de M. Motz sur l'expertise juridique, sur les thèmes que nous allons aborder durant l'étude et sur la production des documents, de même que la contre-proposition de Mme Bendayan à cet égard, ce sont tous des éléments importants. À mon avis, nous devons régler cela avant de continuer nos travaux, l'esprit en paix et en sachant où nous allons.
Je voulais simplement vous faire part de mon opinion, soit de régler ces motions, quitte à le faire en une heure et demie. Je ne pense pas que le processus soit nécessairement long, mais il faut le faire.
Vous avez la parole, monsieur Brock.
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La motion prévoyait quatre dates de réunion de trois heures. C'est à peu près... Je crois que nous avons discuté de la façon dont nous pourrions éventuellement regrouper les témoins, et c'était quelque chose comme deux ou trois témoins par groupe.
Maintenant que j'examine la motion, je remarque que j'ai noté ici que la Justice, la GRC et le SCRS feraient partie du même groupe; les Finances et le CANAFE feraient partie d'un autre groupe; le ministère de la Sécurité publique et l'ASFC appartiendraient à un troisième groupe; et le SPP, le sergent d'armes et l’huissier du bâton noir figureraient dans un quatrième groupe. Ce sont les quatre regroupements dont nous avons discuté. Le 3 mai, nous entendrons le groupe qui sera disponible, quel qu'il soit.
Voulez-vous que je répète cette information?
Le premier groupe était composé de la Justice, de la GRC et du SCRS. Le deuxième groupe comptait le ministère des Finances et le CANAFE. Le troisième groupe était constitué du ministère de la Sécurité publique et de l'ASFC. Le quatrième groupe comprenait le SPP, le sergent d'armes et l’huissier du bâton noir. Je suis heureux de pouvoir répéter cela deux fois. Si vous pouviez apporter le bâton noir, nous serions tous très impressionnés. Je fais un peu d'humour en cette heure tardive du mardi.
Pour être franc, je propose que nous commencions à programmer toutes ces comparutions, en commençant par les témoins qui sont disponibles le 3 mai.