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DEDC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 novembre 2022

[Enregistrement électronique]

  (1835)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 17e réunion du Comité mixte spécial sur la déclaration d’urgence, qui a été créé conformément aux ordres de la Chambre du 2 mars 2022 et du Sénat du 3 mars 2022.
    La réunion d’aujourd’hui se déroule en mode hybride, conformément aux ordres de la Chambre et du Sénat. S'il survient un problème technique quelconque, veuillez m’en informer, car nous devrons peut-être suspendre la séance quelques minutes pour nous assurer la pleine participation de tous les membres. Les témoins doivent savoir également que l'interprétation est disponible par l’icône du globe au bas de leur écran.
    Pour notre premier groupe de ce soir, nous accueillons, par vidéoconférence, Steve Bell, chef intérimaire, et Patricia Ferguson, cheffe par intérim adjointe, du Service de police d’Ottawa.
    Vous avez cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.
    À vous la parole, chef Bell.
    Bonsoir. Je remercie la présidente et les membres du Comité de leur invitation à comparaître aujourd’hui.
    Je m’appelle Steve Bell. Je suis le chef intérimaire du Service de police d’Ottawa. Je suis accompagné de la cheffe par intérim adjointe, Patricia Ferguson. Je suis heureux d’être là pour répondre aux questions que vous pourriez avoir.
    Comme on l’a dit maintes fois, l’occupation du « convoi de la liberté » a été un événement sans précédent dans l’histoire de notre ville. Notre service a tiré de nombreuses leçons de l'expérience, et nous sommes fermement résolus à collaborer avec les comités et les commissions d’enquête qui veulent comprendre.
    Dans mon récent témoignage devant la Commission sur l'état d'urgence, j'ai exposé les quatre principales façons dont le Service de police d’Ottawa a utilisé les pouvoirs que lui donnait la Loi sur les mesures d’urgence.
    En premier lieu, le pouvoir le plus important conféré par la loi était le pouvoir d’établir une zone d’exclusion. Cela nous a permis de bloquer l'entrée du centre-ville et de stabiliser l'environnement avant l’opération qui a permis de dégager de façon sécuritaire le centre-ville et de rétablir l’ordre.
    Un autre élément clé de la loi était le pouvoir de bloquer les comptes financiers. Cela nous a aidés, nous et nos partenaires des forces de l'ordre, et principalement la Gendarmerie royale du Canada, à convaincre les participants au convoi de quitter volontairement les lieux.
    Troisièmement, la loi a supprimé l’obligation faite aux agents de l’extérieur de la province et aux agents de la GRC de prêter serment avant d’exercer des fonctions policières chez nous. Compte tenu du grand nombre de policiers de l'extérieur qui ont participé à nos opérations, le retrait du processus d’assermentation nous a fait gagner un temps et des ressources précieux.
    Enfin, la déclaration d’urgence fédérale nous a facilité l'accès aux dépanneuses, puisqu'elle nous donnait désormais le pouvoir d’obliger les entreprises à fournir des dépanneuses et des chauffeurs pour aider à dégager le centre-ville.
    Nous sommes déterminés à continuer de tirer des leçons du passé dans l'intérêt de la sécurité publique et du bien-être de la collectivité. Depuis février, nous avons apporté d'importants changements à nos opérations de police et de renseignement, et nous avons connu de grands succès, particulièrement lors de l’événement « Rolling Thunder » en avril, et à la fête du Canada, cette année.
    Je suis heureux de cette nouvelle occasion d’expliquer à la fois ce qui s’est passé l’hiver dernier et comment nous pourrons prévenir ce genre d'événements désormais.
    Merci de votre temps. Je suis prêt à répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, chef Bell.
    Nous allons maintenant passer à une série de questions, en commençant par M. Motz.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à nos deux témoins d’être là.
    Vous m'avez intrigué en affirmant que la Loi sur les mesures d’urgence traite de quatre principaux points. J’y reviendrai dans une minute.
    Si je comprends bien, chef, vous aviez un plan opérationnel en place.
    Exact.
    Ce plan opérationnel était en place avant l'invocation de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Je vais devoir demander à la cheffe adjointe Ferguson de répondre à votre...
    Un simple oui ou non. Vous aviez un plan opérationnel...
     Nous avions un...
    ... qui était en place avant l’invocation.
    C’est juste. Nous avions un plan opérationnel que nous continuions de mettre au point...
    C'est cela.
    ... et qui a été appliqué après la Loi sur les mesures d’urgence.
    Très bien.
    Si je comprends bien, un plan opérationnel comme celui‑là est une cible mobile. Il est flexible. Vous devez vous rajuster, ce que vous avez fait.
    Aviez-vous confiance, avant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, que votre plan allait permettre de disperser les manifestants?
    Encore une fois, je vais laisser la cheffe adjointe répondre à cette question.
    Un simple oui ou non suffira.
    Merci.
    Vous aviez confiance que ce plan opérationnel fonctionnerait à coup sûr.
    Estimez-vous, chef Bell, que vous aviez l’appui et la confiance du gouvernement du Canada pour ce plan, et tout au long des manifestations?
     Pour l'exécution du plan, je suis tout à fait persuadé que nous avions l'appui et la confiance, au moins dans les services du gouvernement avec lesquels nous traitions. Nous étions intégrés avec la Gendarmerie royale du Canada et la Police provinciale de l'Ontario à ce moment‑là, et je suis convaincu que nous avions leur confiance.
    Avez-vous jamais demandé au gouvernement fédéral s’il rencontrait ou allait rencontrer les meneurs de la manifestation?
    Non, je n'ai pas posé directement la question.
     Votre expérience vous fait-elle croire qu’il serait normal que des personnes qui ont un désaccord comme cela sur quoi que ce soit — en l'occurrence, un désaccord politique ou un désaccord au sujet d’un mandat — et qui cherchent à avoir une conversation avec le gouvernement...? Estimez-vous qu’il aurait été avantageux qu'une telle rencontre ait lieu entre les responsables gouvernementaux et les dirigeants de la manifestation?
    Je sais que nous avons participé activement, par l'intermédiaire de notre équipe de liaison, à la négociation et aux discussions. Pour ce qui est des demandes qui ont été faites directement ou des réponses reçues du gouvernement fédéral, je ne peux pas me prononcer. Je n’ai pas participé à...

  (1840)  

    Non, ce n’est pas ce que je demande, chef.
     Je vous demande si vous croyez que, dans le cours normal de l’interaction humaine, avoir une interaction réelle plutôt que de lancer des insultes et de diviser les Canadiens à propos d'un problème, en somme simplement les écouter... Cela aurait‑il été utile dans une situation comme celle‑là?
    En tant que dirigeants de la police, nous cherchons tout le temps à négocier. Que ce soit utile ou pas, je ne peux parler ni pour l’un ni l’autre des deux camps...
    C’est la clé. La nature humaine est assez élémentaire, n’est‑ce pas? Chacun aime être entendu, et je serais certainement d’accord pour cela.
    Vous n’avez pas demandé au gouvernement du Canada d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence, n’est‑ce pas?
    Non, nous n’avons jamais demandé directement d’invoquer la loi.
    Êtes-vous d'avis que la Loi sur les mesures d’urgence était nécessaire pour disperser les manifestants avec votre plan opérationnel? Vous avez tous deux indiqué qu'elle ne l'était pas, selon vous.
    Je veux maintenant vous parler de la zone d’exclusion. Vous avez dit que la Loi sur les mesures d’urgence vous a aidés à...
    J’invoque le Règlement, madame la présidente.
    Mon collègue m'excusera d'interrompre ses questions, mais je crois savoir que les députés sont attendus à la Chambre à ce moment‑ci.
     Merci beaucoup.
    Nous essayions de comprendre ce qui se passait. Nous devons nous rendre à la Chambre.
    Nos témoins voudront bien nous excuser. Nous allons suspendre la séance.
    Attendez.
    Il s'agit d'une vérification du quorum. Les règles du Parlement n'obligent pas les comités à interrompre leurs travaux lorsqu'il y a une vérification du quorum.
    Quelqu'un d'autre aurait‑il un commentaire là‑dessus?
    Puis‑je vous demander de suspendre la séance pour une minute, le temps de tirer l'affaire au clair?
    D’accord, suspendons la séance pour deux minutes.

  (1840)  


  (1840)  

    Nous allons reprendre.
    Nous revenons à M. Motz.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Mes excuses aux témoins.
    Chef Bell, vous avez témoigné ce soir que la Loi sur les mesures d’urgence vous a aidé à créer une zone d’exclusion. Pourtant, vous aviez déjà dit qu'il existe d’autres pouvoirs statutaires ou de common law qui auraient pu permettre la création de cette zone d’exclusion, même sans la Loi sur les mesures d’urgence.
    Êtes-vous toujours de cet avis?
    Oui. Ce que j’ai dit dans le passé, c’est que la Loi sur les mesures d’urgence nous a donné un cadre juridique très stable pour créer une zone d’exclusion qui ne rejetait pas sur les agents individuels de première ligne l'entière responsabilité de décider de permettre ou d'interdire l'accès à un lieu quelconque. La loi a été extrêmement utile...
    Très bien, chef.
    Je suis désolé, mais nous savons tous qu'il est possible d'établir une zone d’exclusion n’importe où. Nous le faisons tout le temps sur les scènes de crime. Il y avait une clôture autour de la Colline parlementaire. Vous n'avez pas besoin de l'autorisation de la Loi sur les mesures d’urgence pour établir une zone d’exclusion. Nous savons tous que vous avez ce pouvoir.
    De toute façon, mon temps de parole est écoulé. Merci de votre témoignage.
    Votre temps de parole est écoulé. Merci.
    Monsieur Naqvi, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur, et vous aussi, madame, de votre présence aujourd’hui.
    Voyons d'abord ce qui se passait dans le centre-ville d’Ottawa pendant la période de trois semaines. Diriez-vous que vous avez eu une contestation de l’ordre public sur les bras pendant les trois semaines d’occupation dans le centre-ville d’Ottawa?

  (1845)  

     Oui, certes, et je pense que nous avons dit ouvertement à maintes reprises que les activités qui se déroulaient dans le secteur étaient illégales et extrêmement difficiles à gérer pour notre service de police.
    Vous avez dit que les activités étaient illégales. Diriez-vous également qu'elles étaient hostiles?
    Oui.
    Pouvez-vous nous dire — et je sais que vous en avez déjà parlé — quel impact cette occupation illégale et hostile a eu sur les résidents et les entreprises du centre-ville?
    Nous travaillons activement à rétablir la confiance du public avec les membres de notre collectivité, et la chose que nous entendons maintes et maintes fois, c’est que cette période les a laissés avec un sentiment d'insécurité dans leur foyer. Cela a eu une incidence sur leur capacité, en tant que commerçants, de mener leurs affaires. Cela a créé de la peur pendant cette période, et aussi de la peur au sein de la collectivité, ou tout au moins chez de nombreux résidents, une peur qui était toujours là, bien après la fin de février.
    Seriez-vous d’accord — et je crois que vous l’avez déjà dit — pour dire que les répercussions ont été disproportionnées pour les personnes vulnérables, marginalisées, les membres de la communauté autochtone, la collectivité 2ELGBTQI+, et les collectivités racisées du centre-ville?
    Oui, je suis tout à fait d’accord. Il s'agit d'un secteur des plus riches, sur le plan culturel, de notre collectivité, et c'étaient les groupes qui étaient ciblés, marginalisés et les plus profondément touchés par cette situation.
    Conviendriez-vous également que, pendant cette période, il y a eu des signes évidents de symboles de haine comme des drapeaux nazis, des drapeaux confédérés, des affiches, etc., qui pouvaient être extrêmement pénibles et traumatisants pour les membres de la collectivité vivant dans le centre-ville?
    Je dirais qu’il y en a eu des exemples. Il y a eu des enquêtes à ce sujet. Ce n'était pas partout ni tout le temps, mais il y avait certainement des exemples de symboles haineux qui étaient vus régulièrement, qui nous étaient signalés et qui faisaient l’objet d’un suivi de notre part.
    La semaine dernière, j’ai interrogé le greffier de notre ville, M. Kanellakos, au sujet du volume d'appels au 311 pendant ces trois semaines. Il m’a dit que le nombre d'appels avait presque doublé. Avez-vous une idée du volume d’appels au 911 pendant la période d’occupation?
    Par l’entremise de la présidente, je peux vous faire parvenir les chiffres précis. Je sais que nous y avons accès.
    Je peux déjà vous dire que le nombre d'appels a été extrêmement élevé. Le plus problématique pour nous a été le nombre d’appels au 911 que nous recevions et qui visaient précisément à perturber nos systèmes 911.
    Merci de me le rappeler. J’avais oublié qu’il y avait eu un effort concerté pour engorger le système 911. Cela aurait pu être extrêmement dangereux pour le reste de la collectivité à Ottawa. Ai‑je raison?
    Vous avez raison. Il y a eu des appels qui ont étouffé notre système. J'estime qu'il importe également de reconnaître les difficultés que nos membres ont éprouvées pendant ce temps. Il y avait des gens qui recevaient ces appels dans notre centre de communications et qui ont été blessés par leurs conversations et leurs interactions avec les personnes au bout du fil.
    Très rapidement, j'aimerais reconfirmer — et vous l’avez mentionné dans votre déclaration préliminaire — que le Service de police d’Ottawa a utilisé les pouvoirs que lui conférait la Loi sur les mesures d’urgence, ce qui vous a aidés à mettre fin à l'occupation.
    Nous avons utilisé les pouvoirs prévus dans la loi pour mettre fin à l’occupation, oui.
    Merci, madame la présidente.
    Nous passons maintenant à Mme Normandin.
    Vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie nos deux témoins.
    J'aimerais leur poser des questions sur les camions-remorques puisqu'ils en ont parlé dans leurs allocutions d'ouverture.
    Je crois comprendre que Transports Canada avait préparé, durant la crise, un plan qui aurait permis de déplacer les camions qui bloquaient les rues d'Ottawa sans qu'il soit nécessaire de recourir aux mesures d'urgence.
    Est-ce exact?

[Traduction]

    Je ne connais pas ce plan. Je ne dis pas qu’il n’existe pas, mais je n’en ai jamais entendu parler.

[Français]

    Vous êtes dites donc que, à votre connaissance, s'il y avait un plan, il n'a pas été transmis aux services policiers.

  (1850)  

[Traduction]

    En tout cas pas dans un service où j'aurais pu le recevoir.

[Français]

     De votre côté, des questions ont-elles été posées pour savoir quels seraient les recours possibles pour faire déplacer les camions sans qu'il soit nécessaire de recourir aux mesures d'urgence?

[Traduction]

     Absolument. Je peux vous dire que dès les premiers jours, il a été question dans notre planification, de la façon de tirer parti des dépanneuses et d'y accéder. Nous avons examiné différentes options. Comme vous l'avez entendu dans les témoignages rendus à l'enquête sur la Loi sur les mesures d'urgence, il y a eu plusieurs cas où l'on a décrit tout le mal qu'on s'est donné pour essayer d'avoir accès aux dépanneuses.
    C'était l'un de nos principaux défis et, avec l'invocation de la loi, cet obstacle a été éliminé pour nous.

[Français]

    Je comprends que c'est une barrière qui a été levée, mais, plus précisément, avez-vous analysé les possibilités de faire déplacer les camions sans même recourir, par exemple, à des dépanneuses?
    A-t-on analysé des moyens juridiques, par exemple?

[Traduction]

    Nous avons eu de longues conversations sur les divers moyens de déplacer les camions. Cela a été envisagé, bien sûr.

[Français]

    Pourquoi ces mesures n'ont-elles pas été mises en place, si elles ont été étudiées?

[Traduction]

    Au moment d'exécuter notre plan, la Loi sur les mesures d'urgence avait été invoquée et nous avons eu accès aux dépanneuses nécessaires, en vertu des dispositions de cette loi.

[Français]

    Si je comprends bien, on avait mis en place des plans qui auraient pu permettre de faire partir les camions sans qu'il soit nécessaire de recourir aux mesures d'urgence, mais ils n'ont pas été tentés parce que la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée avant.

[Traduction]

    Désolé, mais je ne suis pas sûr de comprendre la question. Il y a eu des discussions et des plans sur la possibilité de recourir à d'autres moyens pour déplacer les véhicules. Nous avons envisagé diverses options.
    À la fin, le plan a privilégié les dépanneuses, et la Loi sur les mesures d'urgence renfermait des dispositions nous permettant d'accéder à ces dépanneuses.

[Français]

    Je vais reformuler ma question.
    Vous aviez un plan pour déplacer les camions qui ne requérait pas l'invocation de Loi sur les mesures d'urgence, mais il n'a pas été mis en application parce que celle-ci a été invoquée avant.
    Est-il logique de dire que vous n'étiez pas encore à bout de ressources, puisque vous n'aviez pas encore essayé toutes les mesures possibles avant que la Loi sur les mesures d'urgence ne soit invoquée?

[Traduction]

    Le plan que nous avons fini par adopter pour déplacer les camions était basé uniquement sur l'accès aux dépanneuses. D'autres opérations plus restreintes qui avaient été envisagées devaient utiliser différents moyens pour enlever les véhicules, mais étant donné l'ampleur et la portée de l'opération que nous étions en train de monter, nous avons jugé nécessaire de faire appel à des dépanneuses.
    Avec l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, les obstacles qui existaient sont disparus.

[Français]

    D'après ce que je comprends, il restait quand même des mesures possibles avant de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence.

[Traduction]

    Il y avait plusieurs options différentes. L'une d'elles était que les manifestants partent volontairement au volant de leur camion. Nous aurions pu envisager différentes façons de chasser les véhicules. Nous avions plusieurs options. Nous avons jugé qu'il était irréaliste de les utiliser pendant la période où nous menions une opération à grande échelle.

[Français]

    Vous avez parlé aussi des comptes gelés en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence. À quel moment le premier compte a-t-il été gelé?

[Traduction]

    Ce sera une question... Comme je l'ai dit, c'est la Gendarmerie royale du Canada qui a mené la plupart de ces enquêtes. C'était un outil à utiliser essentiellement par la GRC, si bien qu'il vaudrait mieux lui adresser la question à elle, car je ne sais pas trop à quelle date cela a commencé.
     Merci, madame Normandin. Votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Green.
    Vous avez cinq minutes.
    Monsieur Bell, je vais vous poser des questions en rafale. Je vous demanderais d'essayer de nous donner des réponses succinctes, au mieux de vos capacités.
    Je commence par le témoignage de l'ancien chef Sloly, qui a déclaré que, d'après ses renseignements aux premiers stades de la procession vers le convoi et l'occupation ultime, on estimait que tout cela ne durerait que quelques jours. Environ un week-end.
    Cette évaluation était-elle fondée sur l'information que vous lui auriez fournie, vu vos responsabilités en matière de renseignement?

  (1855)  

    Nous tenions cette information essentiellement de notre équipe de direction et des évaluations qui avaient été faites par nos équipes de renseignement dans l'analyse des rapports de renseignement qui existaient. Nous avions évalué que ce serait surtout une période assez courte, probablement un week-end.
    À la fin, monsieur, vous auriez approuvé les évaluations finales en tant que dirigeant principal responsable du renseignement. Est‑ce bien cela, oui ou non?
    Je n'ai pas signé d'évaluations. L'information... et c'est tout à l'honneur de la Police provinciale de l'Ontario. Elle a fait la préparation...
    Cela me suffit, monsieur. Je passe à la question suivante.
    Dans l'évaluation du renseignement du 29 janvier préparée par le sergent Chris Kiez, on trouve pas mal de dissertation — en fait, l'auteur du plagie Rex Murphy. Je veux vous donner l'occasion de répondre. C'est assez frappant. J'aimerais que vous nous disiez dans quelle mesure, à votre avis, cette évaluation du renseignement a pu orienter la décision de laisser les camions s'amener rue Wellington.
    Pensiez-vous avoir l'expertise et les ressources nécessaires pour faire une évaluation exacte et professionnelle du risque pour la sécurité publique?
    L'évaluation du renseignement dont vous parlez a en fait été distribuée le 28. Je peux vous dire que c'était une évaluation de la menace globale. C'était un document très complet. Au‑delà de cela, il y a eu un échange continu d'information, un échange d'information entre notre unité du renseignement...
    Mais au sujet de ce document en particulier, monsieur...
    ... et notre équipe de planification, qui a aidé...
    Mais en ce qui concerne ce document particulier, monsieur, sauf votre respect, le dernier paragraphe de la page 4 se lit comme un manifeste de convoi.
    Il parle des problèmes de la classe moyenne. Il parle de personnes qui se lèvent et qui ne manifesteraient pas autrement. Il semble que ce soit presque un avertissement brutal des choses à venir. Voici ma question. Étant donné la nature délicate du renseignement, ne conviendriez-vous pas que vous auriez dû avoir une information objective fondée sur les faits, plutôt que la dissertation à la Rex Murphy, pour faire de bonnes évaluations des menaces?
    N'êtes-vous pas d'accord sur cette affirmation fondamentale?
    C'est l'un des éléments qui ont contribué à l'évaluation de la menace ultime que nous avons retenue pour le plan opérationnel. Ce n'est pas le seul document que nous avons utilisé.
    D'accord. Donc, dans cette évaluation, il est question de personnes d'intérêt qui « dans certains cas avaient accès à des armes à feu » — je suis à la page 9 — et d'autres personnes d'intérêt qui avaient « fait des commentaires en source ouverte disant qu'elles avaient l'intention d'apporter leurs armes à feu », etc.
     Dans deux cas au moins, des personnes d'intérêt de l'extérieur d'Ottawa, et même, souvent de l'extérieur de l'Ontario, avaient reçu la visite des policiers, qui ont saisi des armes à feu dans l'intérêt de la sécurité publique sur la foi de commentaires sur les armes à feu qui avaient été faits dans des médias en source ouverte.
    Pourriez-vous confirmer dans quelle mesure vous saviez qu'on avait effectivement confisqué des armes à feu dans le but de mener le convoi jusqu'à l'occupation?
    Je ne peux pas le confirmer, car cela aurait été fait dans le cadre d'une mise à jour du renseignement qui aurait été greffée à ce document par d'autres administrations.
    Pouvez-vous confirmer que c'était dans votre rapport et que vous avez interprété cela comme une évaluation de la menace?
    Absolument, la menace des armes à feu et la menace de violence étaient...
    Pouvez-vous confirmer, monsieur, que vos renseignements indiquaient que des individus avaient été interceptés en cours de route et s'étaient fait saisir leurs armes?
    Comme vous le dites, c'est dans le renseignement et l'évaluation de la menace.
    Voici ma dernière question. Le sommaire de l'entrevue du surintendant Pat Morris de la Police provinciale de l'Ontario indiquait que le Bureau des renseignements criminels, opérations provinciales de l'OPP, dans le rapport Hendon du 9 février, précisait qu'on était préoccupé par les cas où les manifestants avaient mis la main sur l'information concernant les mesures policières. Récemment, les organisateurs ont révélé qu'il y avait eu des fuites.
    Quand avez-vous appris qu'il y avait des fuites entre la police d'Ottawa et les organisateurs du convoi?
    Je peux vous dire que dès réception de toute information pendant et après l'occupation, nous avons ouvert des enquêtes. L'information présentée hier à l'enquête sur la Loi sur les mesures d'urgence était une nouvelle information sur laquelle nous n'avions pas encore fait enquête. Nous avons déjà, hier soir, lancé une enquête interne, et nous demanderons à M. Wilson de nous communiquer de plus amples renseignements pour nous permettre de faire un suivi. Nous avons été très clairs...
     Monsieur Bell, le temps de parole du député est écoulé. Excusez-moi.
    Monsieur Green, pouvez-vous prendre le fauteuil?

  (1900)  

    Oui, sénatrice.
    Vous avez cinq minutes et la parole est à vous.
    Je vous remercie tous les deux de votre présence.
    C'est au chef Bell que je vais adresser mes questions.
    Vous parlez d'un plan des trois organismes, qui était déjà en place avant l'entrée en vigueur de la Loi sur les mesures d'urgence. Pouvez-vous me dire quand ce plan a été finalisé au juste et où cela se situe par rapport aux mesures et à l'entrée en vigueur de la loi?
     Je vais laisser la cheffe adjointe Ferguson répondre à cette question.
    Bienvenue, madame.
    Merci et bonsoir, madame la présidente.
    Je peux vous dire que le plan a été élaboré puis élargi après l'installation de l'équipe intégrée. Je pense qu'il est juste de dire que le plan était prêt à enclencher le ou vers le 15 février.
    Qui a participé à ce plan? Quels organismes?
    C'était la GRC, l'OPP et le Service de police d'Ottawa. D'autres intervenants travaillaient sur des composantes distinctes du plan, le plan d'ordre public et certains des autres plans de circulation et du ministère des Transports de l'Ontario.
    À ce stade de la planification, combien de temps aurait‑t‑il fallu pour mettre le plan en place?
    Il y a eu plusieurs itérations. Nous tentions de nous adapter en fonction de la situation qui se déroulait dans nos rues et de déterminer quels pouvoirs nous aurions et ce que nous pourrions utiliser, et les ressources, comme vous l'aurez probablement compris, étaient un obstacle majeur pour nous.
    Dans le temps qu'il a fallu aux membres pour arriver, le plan détaillé fonctionnait très bien pour établir de combien d'agents nous allions avoir besoin et comment nous allions les déployer.
    Lorsque la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée, comment ces outils ont-ils été intégrés au plan initial?
    Je pense que notre plan était assez solide avant que la loi ne soit invoquée. Cela nous a permis de vraiment donner des pouvoirs décisionnels aux agents sur le terrain plutôt que d'avoir à examiner chaque situation individuelle au cas par cas. Cette zone d'exclusion permettait à nos agents d'agir en toute confiance pour empêcher les gens d'entrer et pour réduire l'empreinte en bloquant l'entrée à tous les autres.
    Lorsque l'opération a eu lieu, chef Bell, étiez-vous responsable du côté du Service de police d'Ottawa?
    J'essaie simplement de voir qui a joué quel rôle.
    Le 15, je suis devenu chef par intérim, et l'opération a été déclenchée le 17.
    Lorsque la Loi sur les mesures d'urgence a été annoncée et que vous avez commencé... Je veux dire, je suivais cela. Il était clair que vous alliez intervenir le lendemain, ou dans les deux ou trois jours.
    Comment évaluez-vous l'impact sur ceux qui sont restés et ceux qui sont partis? Comment l'invocation de la loi a‑t‑elle touché ceux qui ont choisi de partir? Était‑ce une coïncidence, ou la loi elle-même, à votre avis...? Je veux dire, certains d'entre eux ont décidé de s'en aller à cause de cela.
    D'après mon évaluation, je ne pense pas que la ligne entre les deux points est droite. Je pense plutôt que la Loi sur les mesures d'urgence nous a donné une partie de la base du plan que nous avons appliqué. Lorsque nous avons déclenché le plan et que des composantes comme la restriction financière des comptes bancaires est entrée en vigueur, nous avons commencé à voir des manifestants partir. Des témoins nous ont dit qu'ils savaient dès lors que c'était fini et ils sont partis.
    Je ne pense pas que la Loi sur les mesures d'urgence ait permis de les chasser tout de suite, mais elle a été une composante clé qui a fini par convaincre certaines personnes de quitter avant l'intervention de la police.
    Entre l'annonce de la loi et le déclenchement de l'opération — je félicite tous les services pour l'opération menée ce jour‑là —, de combien la foule avait diminué?
    Je n'ai pas de chiffres précis sur la contraction de la foule. Je peux vous dire que l'empreinte des véhicules n'a pas diminué à ce moment‑là. C'était très statique alors. Nous étions au début d'un week-end, et elle n'a pas pu augmenter comme tous les autres week-ends.
    Je pense qu'on me fait signe que mon temps de parole est écoulé.
    Merci, monsieur Green.
    Nous passons maintenant au sénateur Carignan. Vous avez cinq minutes.

  (1905)  

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Ma question traite de la zone d'exclusion.
    Selon vous, c'est la Loi sur les mesures d'urgence qui a permis d'établir cette zone d'exclusion. Ai-je bien compris?

[Traduction]

    Il en est résulté un cadre juridique très stable pour nous permettre d'élargir la zone d'exclusion. Nous mettions en place des dispositions pour tirer parti, au cas par cas, de façon ponctuelle, de la common law, qu'on n'avait traditionnellement jamais utilisée à cette fin, afin de permettre aux agents de décider de bloquer l'accès de la zone d'exclusion aux personnes ou aux véhicules.
    La Loi sur les mesures d'urgence nous a donné un cadre juridique très stable.

[Français]

     Il existe déjà une loi provinciale sur les mesures d'urgence. Le maire Watson a déclaré l'état d'urgence. Il nous a dit, la semaine dernière, que son décret en lien avec les mesures d'urgence était symbolique, puisque aucun pouvoir n'y était vraiment associé.
     Selon vous, le fait que le maire Watson ait décrété les mesures d'urgence pouvait-il lui permettre d'établir une zone d'exclusion?

[Traduction]

     Non. Comme le maire Watson l'a expliqué, la municipalité qui déclare l'état d'urgence a des moyens ou des pouvoirs limités. Ces moyens et pouvoirs concernent essentiellement l'approvisionnement, et nous n'aurions pas eu le pouvoir légal de créer une zone d'exclusion comme celle que la Loi sur les mesures d'urgence a permis de créer.

[Français]

    Selon vous, le décret du maire Watson ne permettait pas de créer une zone d'exclusion.
    Avez-vous tenu des consultations juridiques à cet égard?

[Traduction]

    Non. Cela vient de ma connaissance imparfaite de ce qu'une municipalité peut faire lorsqu'elle déclare une urgence.

[Français]

    D'accord.
    Saviez-vous que le décret du maire pouvait également lui permettre de réquisitionner de l'équipement ou de forcer des gens à lui en fournir, dont des remorqueuses?

[Traduction]

    Non, je ne le savais pas.

[Français]

    Vous avez dit que vous vous étiez penché sur plusieurs options relativement aux remorqueuses. Or vous n'avez pas donné de détails sur celles-ci.
    Quelles options avez-vous étudiées?

[Traduction]

    Nous avons pesé différentes options. L'une d'elles consistait à trouver des dépanneuses par l'entremise d'entreprises privées. L'une de ces entreprises cherchait à rassembler un certain nombre de véhicules de remorquage appartenant à la municipalité ou au gouvernement. Elle n'a pas eu beaucoup de succès, parce qu'il n'y en avait tout simplement pas assez de disponibles. Une autre option était d'y faire monter un chauffeur pour les sortir de la zone. On a jugé que c'était problématique parce que certains véhicules avaient été neutralisés d'une façon qui aurait rendu difficile, voire impossible, de les faire sortir.

[Français]

    Chef Bell, saviez-vous que, en tant qu'agent de la paix, vous aviez le pouvoir de forcer une compagnie de remorquage à procéder au remorquage d'un véhicule et que, si cette dernière refuse, vous pouvez l'accuser d'entrave?

[Traduction]

    Je ne peux pas les trouver coupables d'entrave. Nous pourrions envisager...

[Français]

    J'ai 30 ans d'expérience en tant qu'avocat, et je sais que seul un juge peut décider de couper une entrave.
    Ce que je dis, c'est qu'une compagnie de remorquage peut être accusée d'entrave si elle refuse de procéder au remorquage d'un véhicule.

[Traduction]

     Le Code criminel ne nous permettrait pas de porter une accusation contre une entreprise de remorquage. Elle devrait être contre une personne, un chauffeur ou un propriétaire. Nous ne sommes pas allés jusqu'à nous pencher sur la possibilité d'ouvrir une enquête criminelle, puis de mener l'enquête elle-même, de porter une accusation et de renvoyer l'affaire aux tribunaux...

  (1910)  

[Français]

    Avez-vous songé à forcer les camionneurs...

[Traduction]

     Sénateur Carignan, votre temps de parole est écoulé.

[Français]

    Merci.

[Traduction]

    Sénatrice Cordy, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente, et bienvenue à nos deux témoins, le chef et la cheffe adjointe.
    On a fait valoir qu’il y avait des problèmes dans les relations entre la police d’Ottawa et... Êtes-vous d’accord sur cette évaluation et, si oui, ces problèmes ont-ils retardé la mise en œuvre de solutions pour gérer la situation?
    Il est très important de rappeler que c’était une période stressante. C’était une période stressante pour tous nos concitoyens et une période stressante pour nos services.
     Je crois que nous avons travaillé avec nos partenaires de façon efficace et de plus en plus progressiste pour arriver au résultat ultime que nous avons obtenu. Au bout du compte, nous avions une très solide équipe de planification intégrée et un très solide système de commandement unifié qui nous a permis de mettre à profit des ressources de tous les coins du pays pour exécuter le plan.
     Les dirigeants travaillaient-ils en concertation? Chose certaine, nous avons entendu parler d’incidents où le chef et la commission de police ne se concertaient pas. Y avait‑il des problèmes de ce côté‑là?
    Encore une fois, je dirais que ce fut une période extrêmement stressante pour toutes les personnes concernées. Il était toujours difficile de travailler ensemble pour aller de l’avant. Je ne crois pas que cela ait eu quelque incidence sur nos progrès, mais ce fut une période stressante et pénible.
    D’autres personnes ont parlé des outils disponibles, et vous avez dit — en tout cas, je crois que c'est ce que vous, et certainement bien d'autres, avez dit — que les outils étaient en place. Mais des problèmes d'organisation et de planification ont-ils compliqué l’utilisation des outils disponibles?
    Non, de fait, je pense que les outils qui étaient là ont très bien servi le plan que nous avons fini par exécuter. Selon moi, les outils fournis par la province et par le gouvernement fédéral dans leurs deux lois d’urgence nous ont facilité la mise en œuvre du plan.
    Nous avons aussi appris hier que les têtes d'affiche du convoi recevaient de l’information sur les tactiques et les plans des services de police, y compris la police d’Ottawa, la police provinciale et même la GRC. On nous a dit que les dirigeants étaient informés de ce qui se préparait. Croyiez-vous que cela se produisait ou connaissiez-vous des situations où cela se produisait?
    Dès les tout premiers jours du convoi, cela nous préoccupait. Chaque fois que nous recevions de l’information pour ouvrir une enquête, nous le faisions.
    Certains de nos membres se sont vu imposer des mesures disciplinaires pour inconduite au cours de cette période. Ce n’était pas directement lié à la planification dont nous avons entendu parler, mais davantage à des dons d'argent à la cause. Je peux vous dire que cette information venue de M. Wilson était nouvelle pour nous hier. Comme je l’ai dit plus tôt, dès hier soir, j’ai enclenché une enquête suite à ces commentaires.
    Merci.
    C’était ma prochaine question. J’allais vous demander si vous alliez mener une enquête interne. Alors je suis heureuse que vous le fassiez.
    Pour en revenir à l’argent, vous avez dit que les comptes étaient bloqués, mais nous avons appris hier que des enveloppes d’argent passaient de main à main, et que c'étaient des sommes importantes — pas 25 $ ni 50 $, mais des sommes considérables. C'était de l'argent venant de programmes comme « Adoptez un camionneur », dont je n'avais pas encore entendu parler avant hier.
    Est‑ce exact? Étiez-vous au courant de la distribution de l'argent? Je pense que vous y avez fait allusion plus tôt dans une réponse. A‑t‑on tenté de mettre fin à la circulation de cet argent?
    Je ne suis pas au courant de l’information concernant la distribution d'enveloppes. L’une des choses qui nous préoccupaient au début et qui sont ressorties du renseignement était le financement participatif, initialement par l’entremise de GoFundMe. Nous avons eu des conversations pour convaincre GoFundMe de bloquer ces mouvements de fonds. Ensuite, avec GiveSendGo, nous avons pris une ordonnance de blocage, en tant qu’organisme responsable avec le ministère du Procureur général.
    Chaque fois que nous avons eu l’occasion d’enquêter sur des mouvements de fonds, nous l'avons fait.

  (1915)  

    Merci beaucoup. Je sais que mon temps est écoulé. Alors je vous remercie.
    Sénateur Patterson, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente, et merci aux témoins.
    Chef Bell, vous avez parlé du gros problème que constituait la présence des camions au centre-ville et de la difficulté de les en chasser, mais j’aimerais aborder la question sous l’angle de la prévention et vous demander ceci. Vous saviez, comme tout le pays, je crois, que les camions roulaient sur les routes du pays en direction d'Ottawa. Le Service de police d’Ottawa n’a‑t‑il pas accès à de gros blocs en béton qui peuvent servir à barrer les routes?
    Oui — eh bien, oui, la ville en a, et nous aurions pu y avoir accès, oui.
    Ils ont déjà servi à bloquer des rues dans certaines situations.
    En effet.
    Voici ma question: pourquoi n'en a‑t‑on pas installé à des endroits comme la rue Wellington pour empêcher les gros camions d’entrer dans la Cité parlementaire?
     Ce que je peux dire, c’est que maintenant, grâce à l’expérience que nous avons connue à la fin de janvier et au début de février, nous avons adopté une position bien différente sur la façon dont nous autorisons les manifestations en véhicule dans le centre-ville. Nous ne les autorisons tout simplement pas.
    Je peux vous dire qu'avant que cet incident ne se produise dans notre ville — le premier du genre dans tout le pays —, nous n'avions jamais, en tant que service de police, interdit l'accès de véhicules à un centre-ville. Par le passé, nous avons facilité plusieurs manifestations avec véhicules. C’était la première expérience de ce genre pour un service de police à l'échelle du pays. Je dirais qu'elle a changé du tout au tout la façon dont les services de police voient et gèrent les manifestations avec véhicules.
    Nous avons entendu les témoins de la Ville d’Ottawa il y a une semaine. J’ai posé la même question, et le haut fonctionnaire de la Ville m’a répondu qu’en ce qui concerne cette demande ou cette idée de déployer de gros blocs de béton, c’est le Service de police d’Ottawa qui s'y est opposé au motif qu'ils nuiraient à la circulation.
    Vous rappelez-vous cette demande et la décision du Service de police d’Ottawa de ne pas accepter l'idée?
    Non, je ne me rappelle pas.
    D’accord, merci.
     Merci, sénateur.
    Nous allons maintenant passer aux tours de quatre minutes. Commençons par M. Brock.
    Merci, madame la présidente.
    Merci à nos témoins de leur présence aujourd’hui.
    J’ai une question pour le chef Bell.
    Pour invoquer la Loi sur les mesures d’urgence, il faut une urgence qui découle de menaces à la sécurité du Canada qui sont si graves qu’il s’agit d’une urgence nationale. Comme vous le savez, chef Bell, l'expression « menaces envers la sécurité du Canada » a le sens que lui attribue l’article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité.
    Ma question s’adresse à vous et à la cheffe adjointe. Pendant toute la période de cette occupation et après, il n’y avait absolument aucune preuve d’espionnage ou de sabotage visant le Canada. Êtes-vous d’accord?
    Je n’ai pas d'information à ce sujet. Nous n’avons mené aucune enquête là‑dessus.
    Il n’y a aucune preuve d’activités influencées par l'étranger qui touchaient le Canada ou s'y déroulaient et étaient préjudiciables à ses intérêts, et qui étaient d'une nature clandestine ou trompeuse ou comportaient des menaces envers quiconque. Est‑ce exact?
    Personnellement, je n’en connais pas.
    Il n’y avait aucune activité touchant le Canada ou s'y déroulant et visant à utiliser l'usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes dans le but d’atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique au Canada. Est‑ce exact?
    Il n’y avait aucune preuve.

  (1920)  

    Je pense que celle‑là prête davantage au débat. Nous avons bien vu des actes de violence pendant le convoi.
    Vous avez vu des actes de violence qui ont donné lieu à quatre accusations en vertu du Code criminel. Il n’y a pas eu de violence grave par voies de fait graves, infliction de lésions corporelles, tentative de meurtre ou meurtre. C’est cela de la violence grave. Vous êtes policier. J'ai déjà été procureur de la Couronne.
    Êtes-vous d’accord avec moi, monsieur?
    Nous n’avons porté aucune de ces accusations, non.
    Merci.
    Enfin, il n’y a aucune preuve d’activité qui, par des actions cachées et illicites, visait à saper le régime de gouvernement constitutionnellement établi au Canada ou dont le but immédiat ou ultime était sa destruction et son renversement par la violence. Aucune preuve.
    Nous n’avons pas fait enquête ni porté d’accusations relativement à ce genre d'activité.
    Merci.
    Mon collègue, Glen Motz, a indiqué, et vous l’avez confirmé, que vous n’avez pas demandé au gouvernement du Canada d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence.
    C’est exact. Le Service de police d'Ottawa n'a pas fait de demande directe.
    Le gouvernement fédéral vous a‑t‑il jamais consultés sur la possibilité de l'invoquer?
    Je serais bien mal placé pour vous répondre, vu que la loi avait déjà été invoquée quand je suis devenu chef par intérim. Ces conversations auraient eu lieu avec l’ancien chef Sloly, si tant est qu'il y en a eu.
    Merci.
    Le ministre de la Sécurité publique, Marco Mendicino, a confirmé à 13 occasions à la Chambre des communes, en comité, dans la presse et dans les médias, que les forces de l’ordre ont demandé le recours à la Loi sur les mesures d’urgence.
    Seriez-vous d’accord avec moi, monsieur, pour dire que les deux déclarations — la vôtre, selon laquelle vous n’avez pas demandé l'intervention du gouvernement, et les multiples déclarations du ministre Mendicino, selon lesquelles les services d'application de la loi l'ont demandée — ne peuvent pas être exactes et vraies en même temps?
     J'ignore quelles conversations mon prédécesseur aurait pu avoir avec le gouvernement fédéral. Mais ce que je peux dire, c'est que le Service de police d’Ottawa n’en a jamais fait la demande directement.
    Ce que je dis, c’est que les déclarations de l'un et l'autre ne peuvent pas être vraies en même temps. Conviendriez-vous que le ministre Mendicino a menti aux Canadiens et qu’il a répété maintes fois le même mensonge?
    Je ne pense pas pouvoir faire cette déclaration.
    En outre, le ministre Mendicino a dit que nos services d’application de la loi nous avaient conseillé de respecter le seuil pour l'invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. Vous allez confirmer que vous n’avez pas dit cela, n’est‑ce pas?
    Non, mais je répète que je n’ai pas participé à ces discussions avant l’invocation de la loi.
    Au tour de Mme Bendayan. Vous avez quatre minutes.
    Merci, madame, et merci, monsieur.
    J’aimerais commencer par rappeler une histoire que j’ai déjà racontée à votre comité.
    J’étais à Ottawa pour les trois semaines et un peu plus de l'occupation. À plusieurs reprises, j'ai croisé dans la rue des agents de la police d'Ottawa, qui souvent surveillaient des altercations entre citoyens ou se contentaient de regarder les énormes camions paralysant tout le centre-ville d’Ottawa. Plusieurs fois, je leur ai demandé pourquoi ils n’appliquaient pas la loi, y compris le code de la sécurité routière, et ils m’ont répondu plus d’une fois que c’était parce qu’ils avaient reçu ordre de leurs supérieurs de laisser faire.
    Ces instructions venaient-elles du Service de police d'Ottawa — de vous, madame, puisque vous y étiez à l'époque?
    Pendant une longue période dans les premières semaines, la situation était très instable et très agitée. Les agents de police ont le pouvoir discrétionnaire dans n’importe quelle situation lorsqu’ils estiment que leur intervention aggravera la situation ou la rendra plus violente pour les personnes présentes ou pour eux-mêmes s'il y a des risques pour eux-mêmes ou pour d’autres membres du public...
    Donc, la police d’Ottawa n’appliquait pas la loi.
    Ce n’est pas ce que je dis. Nous laissions nos agents user de leur jugement, quitte à appliquer la loi plus tard, en relevant les numéros de plaque d’immatriculation et recueillant de l'information sur les personnes se trouvant à proximité afin de réunir des éléments de preuve pour préparer d'éventuelles accusations.
    Plus tard.
    Dans votre témoignage de ce soir, madame et monsieur, vous avez dit que vous aviez un plan prêt à mettre en œuvre le 15 février. C’était le lendemain de l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence.
    Pour l'amour de Dieu, sauf votre respect, que faisait le Service de police d'Ottawa pendant les trois semaines précédant le 15 février où la capitale du pays était en état de siège?

  (1925)  

    Je peux vous dire qu’après le premier week-end, nous nous positionnions face à la situation et cherchions la meilleure stratégie...
    Pendant trois semaines?
    Vous savez très bien, j’en suis certaine, que nous étions dépassés par le nombre de personnes arrivées dans notre ville. Nous n'avons pas jugé à ce stade que notre niveau d'effectifs était suffisant pour réagir d'une façon dont nous avons fini par avoir besoin de réagir.
    Nous avons tenté toutes sortes de négociations avec certains des manifestants. Nous avons fait ce qu'il fallait pour cerner nos principales préoccupations, et nous avons évolué et commencé à élaborer des plans à ce moment‑là.
    La mise en œuvre d’un plan de cette envergure prend plusieurs semaines, et il a finalement fallu 2 200 agents, que nous n’avions pas ici, à Ottawa, pour y arriver.
    Merci.
    Chef Bell, vous confirmez qu'il n'y avait pas de plan avant le 15 février et avant votre arrivée.
    Je ne crois pas avoir dit qu'il n'y avait pas de plan. J'ai dit que, à mon arrivée, un plan avait été préparé et était prêt à être mis à exécution...
    Pourquoi n'a‑t‑il pas été exécuté?
    Il a été exécuté à partir du 17...
    C'était après que la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée. Pourquoi, chef Bell, n'a‑t‑il pas été mis à exécution plus tôt?
    Je crois que vous avez entendu la cheffe adjointe Ferguson dire que nous étions en train de préparer des plans au fur et à mesure. Nous avons effectivement établi des plans. Nous avons été très clairs quant à nos besoins de ressources et à la nécessité de faire venir des gens pour nous aider dans l'exécution...
    L'OPP a‑t‑elle répondu à vos demandes de ressources avec efficacité?
    Je crois qu'elle l'a fait, à mesure que nous avancions dans le processus...
    Je suis désolée de vous interrompre. Mme Bendayan aura peut-être un autre tour. Merci.
    Nous passons maintenant à Mme Normandin.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.
    Chef Bell, j'aimerais revenir à votre allocution d'ouverture. Vous avez nommé quatre choses que la Loi sur les mesures d'urgence a permises, à savoir l'établissement d'une zone d'exclusion, la possibilité de geler des fonds, la suppression de l'obligation de prêter serment et la possibilité de réquisitionner des remorqueuses.
    Est-ce bien exact?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Je vous remercie.
    Je reviens plus spécifiquement sur la question des fonds qui ont été gelés. Vous avez dit que cela vous avait aidés, parce que les gens ont commencé à partir d'eux-mêmes lorsque la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée. Cela a été une des incidences de la Loi et de l'annonce du fait que les fonds pouvaient être gelés.

[Traduction]

    C'est exact.
    J'ai mentionné également que la plupart du travail concernant le gel des comptes avait été fait grâce à la coordination de la Gendarmerie royale du Canada.

[Français]

    Vous avez quand même mentionné que cette mesure avait été utile.
    Êtes-vous en mesure de me dire en quoi il était non pas utile, mais nécessaire de geler les fonds?

[Traduction]

    Encore une fois, je vous renvoie à la Gendarmerie royale du Canada qui, ayant la responsabilité du volet des restrictions financières, était plus active que nous sur ce plan.
    Je pense qu'il est important de rappeler qu'à ce moment‑là nous faisions partie d'une équipe unifiée, d'un système de commandement unifié. Je parle donc des répercussions globales de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence que nous avons constatées avec tous nos partenaires.

[Français]

    Je vous rappelle la réponse que vous m'avez donnée.
    Je vous ai demandé à quelle date le premier compte a été gelé. Vous m'avez répondu que vous ne le saviez pas. Est-ce exact?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Vous avez mentionné que la possibilité de geler des fonds avait eu un effet dissuasif sur les manifestants.
     Pouvez-vous me dire combien de personnes étaient visées par cette mesure?
    En proportion, combien des manifestants risquaient-ils de voir leurs comptes gelés, ce qui les aurait dissuadés de rester sur place?

[Traduction]

    Encore une fois, je n'ai pas reçu cette information directement. Ce volet du plan a été exécuté en grande partie par la GRC.

[Français]

    Vous dites que le fait de geler les fonds des manifestants a aidé à résoudre la situation.
    Serais-je dans l'erreur si je disais que vos propos sont purement spéculatifs, étant donné que vous n'avez aucune idée du nombre de comptes gelés et que vous ne savez pas davantage qui cette mesure visait?

  (1930)  

[Traduction]

    Je sais que c'est de l'information qui a été recueillie sur le terrain par des membres de notre équipe de liaison avec la police. Je dirais qu'elle est corroborée par certains des témoignages entendus cette semaine dans le cadre du présent examen, dans lesquels des membres de l'équipe qui étaient sur le terrain, ainsi que de l'équipe de surveillance et de planification, ont indiqué que cette mesure avait eu effet.
    Je vous remercie.
    Je donne la parole à M. Green, pour trois minutes.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais revenir à certaines des discussions initiales sur l'évaluation de la menace.
    Certes, nous avons discuté de saisies d'armes sur des personnes d'intérêt. À votre connaissance, de combien de personnes d'intérêt s'agit‑il et combien d'armes ont été saisies, selon le rapport d'information et votre évaluation de la menace?
    Je suis désolé, je n'ai pas cette information. Je peux...
    Vous vous souviendrez, bien sûr, qu'on craignait dans les premières semaines de février, au barrage de Coutts en particulier, que les policiers soient la cible d'une attaque armée. Êtes-vous au courant de cela?
    Oui.
    Avez-vous été tenu au courant et avez-vous inclus cette information dans vos évaluations de la menace?
    Les renseignements que nous recevions tout au long de l'occupation étaient le fruit d'un effort conjoint de collecte de renseignements avec tous nos partenaires nationaux. Je pense qu'il importe de rappeler que le barrage de Coutts a commencé après l'occupation d'Ottawa.
    Je tiens également à mentionner que dans votre évaluation du renseignement du 29 janvier, le sergent Kiez fait état de personnes ou groupes qui pourraient représenter une menace pendant le convoi. C'est à la page 6 de l'évaluation. Il énumère l'EIIS, l'État islamique et les menaces étrangères, mais ne fait aucune mention des groupes qui, à Coutts, selon votre propre évaluation de la menace, prenaient la police pour cible. Je trouve cela incroyable.
    Pourriez-vous nous dire pourquoi vous n'avez pas inclus cette information dans votre évaluation de la menace, alors que dans le paragraphe suivant, monsieur, vous fixez le niveau de la menace à « moyen », c'est‑à‑dire — et c'est signalé en italique — qu'existent l'intention et la capacité de commettre un acte de terrorisme au Canada. Il est dit aussi que le CIET estime qu'un acte de terrorisme violent pourrait se produire. C'est écrit là.
    Comment expliquez-vous cette incohérence?
    Je ne suis pas sûr qu'il y ait incohérence.
    Comme vous l'avez indiqué, le renseignement dont vous faites état, le renseignement obtenu à la suite du démantèlement de Coutts, est bien postérieur à la rédaction de cette évaluation. C'était une semaine ou deux plus tard.
    D'accord. Reconnaissez-vous qu'il y avait une menace de niveau moyen?
    Ce n'est pas à moi de le reconnaître. Le niveau de menace est déterminé par un centre intégré d'évaluation du terrorisme. Ce sont nos experts en sécurité nationale qui font cette détermination, qui nous est ensuite communiquée.
    Chef Bell, le 7 mars, vous avez annoncé votre intention de « mettre en œuvre de nouvelles initiatives et mesures », y compris la « poursuite des enquêtes internes portant sur des cas de conduite inappropriée de membres de la police ». Est‑ce que cela comprend la communication de renseignements ou l'expression de sympathies qu'il aurait pu y avoir pendant la planification opérationnelle pour le convoi?
    Oui. Comme je l'ai indiqué...
    Jusqu'à quel niveau de la hiérarchie ces cas d'inconduite sont-ils survenus?
    Nous avons fait un suivi de chaque piste d'enquête qui nous a été fournie. Je ne peux pas commenter le déroulement des enquêtes. Je peux vous dire que, comme elles comportaient des mesures ou des audiences disciplinaires, nous les avons tenues et...
    Chef Bell, le temps est écoulé. Merci.
    Merci, monsieur Green.
    Sénateur Carignan, vous avez trois minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse encore une fois au chef Bell.
    Aux alentours du 7 février, une injonction a été émise par la Cour supérieure à la demande d'une citoyenne. J'ai été surpris qu'une citoyenne soit obligée de demander cela. Il s'agissait notamment de mettre fin aux klaxons incessants, qui violaient à peu près tous les règlements municipaux.
    Comment avez-vous appliqué cette injonction, et quels en ont été les effets?

[Traduction]

    Je demanderais à la cheffe adjointe Ferguson de vous parler de nos efforts pour exécuter l'injonction.
    Ce que je peux vous dire, c'est que, pendant l'audience sur la demande d'injonction, le Service de police d'Ottawa s'y est joint comme partie à la fin, intéressé qu'il était par ses dispositions d'exécution.
    Comme nous l'avons déjà entendu, l'un de nos grands défis pendant ces événements a été de faire respecter la loi. L'injonction nous a donné de nouveaux outils, dont certains ont été employés. Cependant, compte tenu de nos ressources et de la complexité des événements à l'intérieur de la « zone rouge », comme nous l'appelions, appliquer la loi devenait très difficile, parfois très dangereuse, pour nos membres.
    Je cède la parole à la cheffe adjointe Ferguson pour qu'elle vous décrive les autres mesures d'exécution que nous avons prises.

  (1935)  

    Merci, chef.
    Je pense que l'injonction était un outil qui a été employé lorsqu'il était sécuritaire de le faire. Je crois que l'augmentation des amendes a certainement été utile à nos membres.
    Une fois l'injonction accordée, nous avons constaté sur le terrain une diminution de l'emploi des klaxons. Il me semble que les camionneurs ont quelque peu modéré leur comportement par la suite.

[Français]

    Comment expliquez-vous que la Ville d'Ottawa ait demandé une injonction 10 jours plus tard, aux alentours du 13 ou du 14 février, et que ce soit une résidante qui l'ait demandée le 7 ou le 8 février?
    Vous, vous n'avez pas participé [difficultés techniques] requérant avec la Ville ou soutenir ces injections?

[Traduction]

    Sénateur Carignan, votre écran est gelé.
    Pouvez-vous répéter votre question? J'ai arrêté le chronomètre.

[Français]

    D'accord. Excusez-moi.
    Comment expliquez-vous que la Ville d'Ottawa ait mis autant de temps à demander elle-même une injonction, d'autant plus que l'injonction de la [difficultés techniques] citoyenne avait eu un effet? Comme on l'a entendu lors des témoignages, le bruit des klaxons était terrible, et je n'en doute pas, mais il a fallu qu'une citoyenne demande une injonction, le 7 février.
    Comment expliquez-vous que la Ville d'Ottawa ait décidé d'en demander une seulement le 13 février?

[Traduction]

    Comme le chef l'a indiqué, nous avons participé à certaines discussions au sujet des injonctions et des avantages qu'elles pourraient comporter. En fin de compte, c'est la Ville d'Ottawa qui avait à décider si elle allait en demander une ou non et, à l'évidence, c'est ce qu'elle a décidé de faire, plusieurs jours après que la jeune femme a obtenu la sienne.

[Français]

     Aviez-vous un plan...

[Traduction]

    Sénateur, votre temps de parole est écoulé.
    Si M. Green accepte d'occuper le fauteuil, je poserai la prochaine question.
    Sénatrice, vous avez la parole.
    Chef Bell, j'ai trois minutes. Il y a deux ou trois points que j'aimerais tirer au clair, si vous le voulez bien.
    Tout d'abord, la province a déclaré une situation d'urgence. Quel effet cela a‑t‑il eu? Quelle aide vous a été apportée de ce fait?
    La Loi sur la protection civile et la gestion des situations d'urgence qui a été invoquée par la province nous donnait des moyens de contrôler les véhicules commerciaux, le mouvement des véhicules vers la ville ou vers le lieu des manifestations. Il s'agissait de l'une des strates et composantes qui ont été intégrées dans notre plan.
    Pouvez-vous me dire, quant à ses effets sur l'occupation elle-même, si elle permettait de signaler... Les gens sont-ils partis? J'essaie de savoir si ces « strates », comme vous les appelez, ont eu un effet.
    Tout à fait. L'une des problèmes majeurs que nous essayions de gérer à l'époque, c'était l'afflux constant de gens au centre-ville. La LPCGSM nous donnait expressément le pouvoir de dissuader ou d'empêcher les gens de venir au centre-ville et de mettre en état d'arrestation ceux qui tentaient d'entrer dans la zone, même si cela n'a pas vraiment aidé à les faire partir. L'une de nos principales difficultés a été de créer un environnement stable et sécuritaire en vue de pouvoir exécuter le vaste plan que vous connaissez.
    Oui, je comprends.
    Selon le témoignage du maire la semaine dernière, un dénommé Dean French a engagé des négociations. Savez-vous si l'un de vos membres a participé à ces négociations et quel était leur objectif?
    À ma connaissance, nos membres n'ont participé directement à aucune de ces négociations. Je crois qu'il y a eu, par l'entremise du directeur municipal, Steve Kanellakos, une première rencontre entre des membres de notre équipe de liaison avec la police et les organisateurs du convoi, mais nous n'avons pas participé directement aux interactions avec M. French.

  (1940)  

    Quelles que soient les instructions données à M. French, vous n'avez pas participé aux consultations ou à la préparation de ces instructions.
    C'est exact. Nous n'avons pas participé à ces négociations.
    D'accord. Pouvez-vous me dire, du point de vue du renseignement, quelles étaient vos préoccupations au sujet des contre-manifestations, en particulier de la part des résidents qui, je crois, étaient très clairement à bout de patience?
    Au départ, nous n'avions pas de préoccupations au sujet des contre-manifestations. Les gens d'Ottawa sont très habitués aux manifestations.
    Pas comme celle‑ci, cependant.
    Non, certainement pas à une manifestation comme celle‑ci.
    Ce qui nous préoccupait, c'était l'intervention des citoyens auprès des participants à l'occupation qui circulaient dans la ville. Cela nous préoccupait beaucoup.
    Chers collègues, il nous reste assez de temps pour une autre série de questions. Si cela vous convient, nous allons commencer par M. Motz. Pour que ce soit clair pour tous, la parole sera à M. Motz et à M. Virani pour quatre minutes chacun, puis à Mme Normandin, à M. Green, à la sénatrice Cordy et au sénateur Patterson, qui auront chacun trois minutes.
    Nous commençons par M. Motz, pour quatre minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Chef Bell, je voudrais revenir sur une observation que vous avez faite au sujet de la zone d'exclusion. Vous avez dit que la Loi sur les mesures d'urgence était le seul outil dont vous disposiez pour l'imposer. Cependant, à peine trois heures après la révocation de la Loi sur les mesures d'urgence par le gouvernement, le Service de police d'Ottawa a trouvé d'autres pouvoirs pour interdire l'accès au centre-ville. Vous avez publié un bulletin disant que, dans l'intérêt de la sécurité publique, la zone autrefois connue sous le nom de zone protégée du centre-ville n'était plus accessible au public. Je tiens donc à rappeler qu'il y a d'autres pouvoirs que vous auriez pu utiliser pour créer des zones d'exclusion.
    Vous avez dit, monsieur, que le SPO avait un plan et que vous aviez besoin — je crois que la cheffe adjointe Ferguson l'a dit aussi — de renforts. Vous aviez besoin de ressources.
    Quand le Service de police d'Ottawa a‑t‑il demandé ces ressources? Je sais que le chef Sloly les a probablement demandés au début, mais vous sauriez à quel moment. À qui avez-vous adressé la demande?
    Pour répondre au premier volet de la question, je ne crois pas avoir dit que c'était le seul outil. Ce que j'ai dit, je pense, c'est que cela a créé un cadre juridique très sûr nous permettant d'adopter ou d'exécuter...
    D'accord. Je me souviens de ce que vous avez dit. Ce que je cherche à dire, c'est qu'à un moment donné, dans d'autres circonstances, vous avez invoqué, à peine trois heures plus tard, un pouvoir différent pour interdire le centre-ville aux gens. C'est irréfutable.
    Combien d'agents avez-vous demandés, quand les avez-vous demandés et à qui les avez-vous demandés?
    Je vais demander à la cheffe adjointe Ferguson de répondre.
    Pendant la première fin de semaine, un certain nombre d'unités de maintien de l'ordre sont venues nous prêter main-forte. Ensuite, il y a eu une demande permanente, très publique, de 1 800 agents, comme notre chef l'a déclaré — vous l'avez vu, je crois — devant la Commission des services policiers.
    D'accord. L'impression qu'on en retire, c'est que la Loi sur les mesures d'urgence devait être invoquée pour que ces gens puissent prêter serment. Nous savons tous que, dans des circonstances comme celles auxquelles vous étiez confrontés en tant que service de police, vous auriez pu réunir 500 agents dans une salle et leur faire prêter serment tous ensemble. La Loi sur les mesures d'urgence n'était donc pas nécessaire. D'autres organismes ont agi ainsi dans le passé.
    Chef Bell, j'ai une autre question pour vous. Nous avons été amenés à croire que, au début surtout, puis pendant la plupart du temps qu'ont duré les barrages ou les manifestations au centre-ville, il y a eu moins de crimes — en fait, beaucoup moins — qu'à l'ordinaire dans la zone sous blocus.
    Y a‑t‑il ou non du vrai là‑dedans?
    J'aimerais revenir à votre commentaire au sujet de l'assermentation...
    J'ai posé une question. Y a‑t‑il eu plus ou moins de crimes au centre-ville, dans le secteur sous blocus?
    Je n'ai pas les chiffres sous la main, mais je peux vous les faire parvenir.
    Mais vous savez que la criminalité a diminué.
    Non, je ne le sais pas.
    D'accord. Eh bien, il a été largement rapporté que la criminalité avait beaucoup diminué dans le centre-ville.
    Vous savez d'expérience, chef Bell, que les manifestations attirent des extrémistes qui cherchent à les exploiter à des fins malveillantes. Est‑ce exact?

  (1945)  

    Il est vrai que cela peut arriver.
    Des éléments de preuve — en fait, des éléments importants — donnent à penser que c'est exactement ce qui s'est passé à Coutts, comme la GRC l'a confirmé, et peut-être aussi à Ottawa. Est‑ce exact?
    Les renseignements sur ce qui s'est passé à Coutts ne me sont pas familiers. Je peux vous dire que des éléments marginaux ont pris part aux manifestations à Ottawa, mais je peux ajouter qu'un très grand nombre de ceux qui ont occupé les rues se sont adonnés tous les jours à des activités illégales.
     Monsieur Motz, votre temps de parole est écoulé.
    Nous allons passer à M. Virani.
    En ce qui concerne Coutts, je tiens à préciser — et vous ne le savez pas forcément, monsieur Bell — qu'au moins quatre accusations de complot en vue de commettre un meurtre y ont été portées. Êtes-vous au courant?
    Non, je ne suis pas au courant des accusations qui ont été portées là‑bas.
    D'accord.
    Je consulte ce qu'on appelle un rapport de renseignement opérationnel de la Police provinciale de l'Ontario, que celle‑ci a produit le 14 février. Sauf erreur, elle vous a consulté pour préparer les rapports de cette nature et vous les a communiqués. Est‑ce juste?
    Désolé, monsieur, mais je n'ai pas entendu le début de la question.
    La Police provinciale de l'Ontario, l'OPP, a produit un rapport de renseignement opérationnel le 14 février, en consultation avec vous. Je présume qu'elle vous a communiqué ce rapport, puisqu'il y est question d'information provenant du Service de police d'Ottawa, le SPO. Est‑ce exact?
    D'emblée, je ne vois pas au juste de quel document vous parlez.
    D'accord. Je vais vous présenter deux ou trois énoncés. Vous pourrez me dire s'ils sont exacts, à la lumière de vos observations dans le rôle qui était le vôtre au SPO. Il s'agit d'objectifs de divers manifestants qui étaient sur le terrain et participaient au blocage.
    Leurs objectifs étaient d'exercer des pressions sur le gouvernement fédéral pour qu'il abroge les restrictions sanitaires ou de contraindre le premier ministre Trudeau à remettre sa démission. À la page 18 du document, on dit que les manifestants semblaient directement intéressés par un changement de gouvernement. À la page 22, il est question d'un intervenant venu du Québec qui a tenu un discours véhément hostile au gouvernement, allant jusqu'à parler de renverser le gouvernement en place pour le remplacer par un parti populaire.
    Plus loin dans le document, on trouve de multiples mentions de la volonté de former un nouveau gouvernement, de prendre le pouvoir et de se le partager. À la toute fin du document, on conclut que le premier et le principal obstacle à un règlement tient aux objectifs principaux du groupe, qui comprennent la dissolution du gouvernement du premier ministre Justin Trudeau.
    Ces propos vous semblent-ils familiers, compte tenu des observations que vous et votre personnel avez faites sur le terrain lorsque le SPO essayait de gérer ce blocage? Ce discours sur le renversement du pouvoir par les manifestants vous dit‑il quelque chose?
    Je le répète, bien des groupes différents ont participé à l'occupation. Il est possible qu'on ait entendu des propos semblables, mais il y avait aussi un discours qui portait sur la levée des obligations sanitaires. Il a été question aussi du Forum économique mondial. Il y avait bien des objectifs différents.
    Vous avez saisi une partie de ce qui a été exprimé, mais je ne dirais pas que cette attitude dominait, que les manifestants parlaient d'une seule voix et que c'est là le discours qui était tenu.
     D'accord.
    M. Naqvi vous a parlé d'appels visant à tromper la police, d'une tentative d'obstruction du 911. Savez-vous également que des enfants ont été utilisés et déployés pour bloquer les activités de la police et empêcher les arrestations?
    Je sais très bien qu'il y avait des enfants dans les environs, dans la zone rouge, en fait. Pour ce qui est des activités dont vous parlez, nous n'avions aucune preuve et aucune accusation criminelle n'a été portée.
    Bien. Il n'y a pas eu d'accusations au pénal parce qu'il y a eu des moments où les agents du SPO ont essayé de porter des accusations et ils ont été en fait submergés par la foule ou entourés de manifestants. Est‑ce exact?
    C'est exact, mais la sécurité d'enfants n'a jamais été en cause.
    D'accord.
    Vous avez dit tout à l'heure que la simple menace de blocage des comptes en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence a incité des manifestants à partir de leur propre gré. Est‑ce exact?
    C'est exact. C'est ce que je comprends.
    Cela a permis d'éviter la nécessité d'une confrontation physique entre vos agents et les manifestants. Est‑ce exact?
    Cette réaction n'a pas pris beaucoup d'ampleur, mais c'est l'une des répercussions que nous avons constatées.
    Éviter une confrontation, c'est éviter la violence qui pourrait surgir de cette confrontation. Est‑ce juste?
    C'est exact.
    Merci.
     Merci, monsieur Virani.
    Nous passons maintenant à Mme Normandin.
    Je vous en prie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Chef Bell, j'aimerais revenir à vos propos au sujet des dépanneuses. Vous avez affirmé que la Loi sur les mesures d'urgence avait été utile parce qu'elle avait permis de réquisitionner suffisamment de dépanneuses. Un des plans de rechange étudiés proposait de prendre les dépanneuses que la Ville d'Ottawa avait en sa possession, mais il n'y en avait pas suffisamment.
    Ai-je bien compris?

  (1950)  

[Traduction]

    Non, il s'agit plutôt des diverses possibilités. On m'a demandé quelles étaient les possibilités auxquelles nous songions. La mobilisation de ressources locales par l'administration municipale était du nombre, mais le nombre de dépanneuses ne suffisait manifestement pas pour faire évacuer les manifestants.

[Français]

    Pouvez-vous me dire combien de dépanneuses vous étiez en mesure de réquisitionner?

[Traduction]

    Je n'ai pas ce chiffre sous la main.

[Français]

    Pouvez-vous me dire combien de dépanneuses ont été nécessaires une fois l'opération lancée?

[Traduction]

    J'invite la cheffe adjointe Ferguson à répondre.
    Ce serait strictement de mémoire, mais je pense que nous envisagions quelque chose comme entre six ou une quinzaine de dépanneuses. Ce sont les dépanneuses lourdes qui manquaient dans la ville.

[Français]

    Je reviens quand même à ce que vous avez dit.
    Vous avez mentionné qu'il avait été impossible d'avoir un nombre suffisant de dépanneuses avec les ressources de la Ville et que vous pouviez avoir recours à des sous-traitants. Vous n'êtes pas en mesure de me donner le nombre de dépanneuses, mais vous pouvez me dire que c'était insuffisant.

[Traduction]

    Je ne sais pas si nous avions accès à une, deux ou trois dépanneuses. Je crois qu'il y a eu une discussion au sujet du nombre exact avec le directeur municipal, Steve Kanellakos, la semaine dernière, mais il était bien inférieur à ce qu'il aurait fallu mobiliser pour appliquer le plan que nous avions élaboré et retirer tous les véhicules des manifestants.

[Français]

    Avez-vous cherché des ressources à l'extérieur de la Ville d'Ottawa ou vous êtes-vous limités à la Ville d'Ottawa?

[Traduction]

     Non. Je peux vous dire que, dans le cadre de la planification, dès le début, nous avons multiplié les efforts pour trouver les ressources nécessaires comme des dépanneuses et d'autres moyens d'intervention. En fin de compte, nous n'avons pas été en mesure de trouver le nombre voulu de dépanneuses ni d'autres moyens de déplacer les véhicules. En somme, pour que nous puissions exécuter le plan, nous devions avoir le nombre de dépanneuses indiqué par la cheffe adjointe Ferguson.

[Français]

    Vous en avez donc cherché comme vous l'avez pu, mais vous avez été incapable de trouver 12 dépanneuses.

[Traduction]

    Je suis désolée, mais votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Green, vous avez trois minutes.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Bell, pouvez-vous nous dire brièvement qui a participé activement au projet Hendon?
    Le projet Hendon est géré principalement par la Police provinciale de l'Ontario...
    Désolé. Je veux parler du SPO. Parmi ceux qui relevaient de vous, qui pouvait consulter les rapports Hendon?
     Les rapports Hendon ont été largement diffusés dans notre organisation. Ils ont en fait été communiqués à notre unité du renseignement, à notre équipe de planification, et l'information a été transmise par la chaîne de commandement.
    Des informations diffusées par la Commission sur l'état d'urgence veulent que la cheffe adjointe Ferguson n'ait eu accès à ces rapports qu'une semaine après le début du convoi.
     Est‑il exact, madame Ferguson, que vous n'avez pas eu accès à ces rapports dès le départ et alors pourquoi?
    C'est exact. Normalement, le renseignement est jalousement protégé dans les organisations pour être transmis à des gens qui sont... c'est le travail qui leur est confié.
    Dans l'entrevue avec le surintendant Pat Morris du Bureau des renseignements criminels - Opérations provinciales, il est question du fait qu'on n'a pas utilisé le renseignement dans la préparation opérationnelle, la prise de décisions et la planification proactive.
     En fait, on ajoute qu'il semble qu'on ne comprenait pas la gravité de la situation, qu'il n'était pas évident que les membres du SPO participant aux appels Hendon aient saisi la gravité de la situation avant le 21 janvier. Néanmoins, au fil du temps leur compréhension est devenue plus évidente et leurs questions ont été plus percutantes.
    Jusqu'à ce moment‑là, est‑il juste de dire que vos analystes du renseignement qui participaient aux appels Hendon ont peut-être sous-estimé ce qui s'en venait?
    Nous avons tous continué à approfondir nos connaissances et notre compréhension de ce qui se passait...

  (1955)  

    Ce n'était pas la question, monsieur. Êtes-vous d'accord sur l'évaluation selon laquelle il y a eu des lacunes dans l'analyse du renseignement et une coupure importante entre cette analyse et la planification opérationnelle jusqu'à ce que le convoi arrive?
    Non, je ne suis pas d'accord. Selon moi, il y a de nombreux éléments du renseignement qui sont très pertinents et qui ne le sont pas à l'intérieur du service de renseignement. C'est extrêmement pertinent...
    Parlons de la pertinence de ces éléments au sein de l'équipe de la haute direction. Des témoignages nous ont appris qu'il y avait eu des frictions au sein de cette équipe. Les relations personnelles ont-elles entravé une planification opérationnelle adéquate au début de l'occupation?
    Je vais poser cette question à la cheffe adjointe Ferguson.
    Pas au début, je dirais.
    Et par la suite?
    À mesure que la tension montait et que la situation évoluait... Le chef a déjà dit que c'était une période très stressante. Nous n'étions pas...
    Aviez-vous accès à toute l'information et au soutien nécessaires pour avoir un plan opérationnel, ou la coupure entre l'analyse du renseignement et les opérations était‑il un obstacle constant pour vous?
    Non. Au fur et à mesure que nous avons réalisé qu'il y avait des rapports Hendon, à ce moment‑là, bien sûr, notre ville était pleine de camionneurs et nous étions débordés.
    À ce moment‑là, il était trop tard.
     Votre temps de parole est écoulé. Merci.
    Je vais donner la parole à la sénatrice Cordy, qui sera suivie du sénateur Patterson.
    Sénatrice Cordy, vous avez trois minutes.
     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Chef Bell, vous avez dit plus tôt que la Loi sur les mesures d'urgence a donné un cadre stable à la police. Voici ma question: sans la Loi sur les mesures d'urgence, l'occupation se serait-elle poursuivie pendant un certain temps?
    Il est très difficile de répondre. Nous nous sommes appuyés sur les cadres qui nous ont été donnés. Nous poursuivions l'élaboration d'un plan. Nous aurions exécuté un plan qui aurait été différent de celui que nous avons finalement appliqué en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Je ne peux pas dire ce qui se serait passé en l'absence de cette loi. Elle était là et elle a servi dans notre planification, dans l'exécution de notre plan.
    Je comprends qu'il est toujours difficile de répondre à des questions hypothétiques, mais vous avez dit qu'il a certainement été utile de fournir un meilleur cadre à la police pour gérer la situation. Maintenez-vous votre position?
    Oui.
    Merci beaucoup.
    Je regarde également les questions déjà posées au sujet de l'évaluation de la menace. Combien d'armes, et de quel type, la police a‑t‑elle saisies pendant l'occupation?
    Je vais céder la parole à la cheffe adjointe Ferguson.
    Bien des choses peuvent servir d'arme. Les armes à feu ont été au centre de la plupart des échanges, mais une arme, ce peut être un couteau ou encore un démonte-pneu. Il peut s'agir de bien des choses.
    Pour ce qui est des accusations que nous avons portées, il y en a eu une pour agression armée contre un agent de la paix ou un agent public. Il y en a eu pour intimidation armée. Nous avons porté des accusations pour armes dissimulées. Nous en avons porté une pour port d'arme lors d'une assemblée publique. Il y a eu un certain nombre d'infractions différentes impliquant des armes, mais pour ce qui est du nombre d'armes à feu, si c'est ce à quoi on s'intéresse, je n'ai pas de chiffre précis.
    Il y a eu des menaces ou des insinuations selon lesquelles des armes à feu se trouvaient dans des véhicules, comme il en a été question ce soir. Nous n'avons pas fouillé tous les véhicules que nous avons dégagés, car nous avons dû progresser dans la ville assez méthodiquement et rapidement pour assurer la sécurité de nos agents et de toutes les personnes concernées. Bon nombre de véhicules n'ont pas été fouillés. Nous ne savons donc pas s'il s'y trouvait vraiment des armes à feu.
     Quels types d'armes avez-vous vus? De quels types d'armes avez-vous entendu parler?
    Toutes sortes d'armes... Une arme, c'est tout objet qui peut être utilisé pour menacer ou agresser quelqu'un. Il y avait notamment des couteaux, des outils, des démonte-pneus, entre autres choses.
     Sénatrice Cordy, votre temps de parole est écoulé.
    Le sénateur Patterson s'est abstenu de poser des questions. Je remercie donc le chef Bell et la cheffe adjointe Ferguson de s'être joints à nous ce soir. Nous leur en sommes très reconnaissants.
    Chers collègues, nous allons faire une pause de cinq minutes, puis nous entendrons les représentants de la Police provinciale de l'Ontario.
    La séance est suspendue.

  (1955)  


  (2005)  

    La séance reprend.
    Le deuxième groupe de témoins, ce soir, se compose du commissaire Thomas Carrique et du sous-commissaire Chris Harkins de la Police provinciale de l'Ontario.
     Bienvenue à vous deux.
    Commissaire Carrique, vous avez cinq minutes pour faire votre exposé liminaire. Je vous en prie.
    Bonsoir, coprésidents, vice-présidents et membres du Comité. Je suis accompagné aujourd'hui de Chris Harkins, commissaire adjoint aux opérations régionales de la Police provinciale de l'Ontario.
    En vertu de la Loi sur les services policiers de l'Ontario, l'OPP a un double mandat particulier. Elle fournit des services de police de première ligne à 330 municipalités ontariennes par l'entremise de cinq commandements régionaux dont chacun est dirigé par un surintendant principal et d'une division de la sécurité routière. Elle est également chargée de fournir divers services provinciaux par l'entremise de sa section des enquêtes et du crime organisé, de sa section de la sécurité routière et du soutien opérationnel et de diverses autres entités spécialisées. De plus, elle offre de l'aide ou un soutien spécialisé aux services de police municipaux sur demande. Cette année, elle a répondu à plus de 230 demandes.
    En ce qui concerne le « convoi de la liberté » et les barrages illégaux qu'il a entraînés dans la ville d'Ottawa, le Bureau des renseignements criminels - Opérations provinciales de l'OPP a commencé à faire rapport aux services policiers partenaires le 13 janvier 2022. Le 22 janvier, les rapports quotidiens du renseignement portaient sur le convoi qui se dirigeait vers Ottawa et sur les manifestations prévues dans toute la province. Nous en avons fait part aux services policiers partenaires. Plus de 35 organismes canadiens d'application de la loi et de sécurité ont reçu les rapports du renseignement. Pendant que le convoi passait du Manitoba en Ontario et traversait la province pour arriver à Ottawa le 28 janvier, les agents de l'OPP ont accompli leurs tâches de façon professionnelle sans incident.
    À l'appui du Service de police d'Ottawa, tout au long de l'occupation, un nombre croissant d'agents de l'OPP et d'effectifs spécialisés de divers services ont été mobilisés, contribuant en fin de compte à l'élaboration d'un plan intégré et à l'établissement d'un commandement unifié. En même temps, nos membres sont intervenus pour s'occuper de nombreux autres convois et manifestations qui ont surgi de façon constante et répétée dans les collectivités de l'Ontario, y compris, mais la liste n'est pas exhaustive, les barrages critiques du pont Ambassador, le barrage sur l'autoroute 402, de multiples autres tentatives de barrages aux passages frontaliers terrestres entre le Canada et les États-Unis et les manifestations qui ont posé un risque pour le secteur de l'Assemblée législative de l'Ontario. De plus, du jour au lendemain, le convoi est entré en Ontario et nous avons répondu aux demandes d'aide d'autres services de police municipaux. Il s'agissait d'une urgence provinciale et nationale qui a attiré l'attention à l'étranger.
    Réagissant à cette situation, l'OPP et plus de 20 autres services de police de partout au Canada ont travaillé en collaboration pour gérer les urgences en matière d'ordre public qui étaient sans précédent dans l'histoire récente. Les manifestations sont souvent de nature complexe. Le rôle de la police demeure la protection du public, le respect de la loi et le maintien de la paix. Le Règlement ontarien sur les infrastructures essentielles et les voies publiques, pris en vertu de la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d'urgence, a été un outil supplémentaire efficace qui a aidé à protéger les infrastructures essentielles et à assurer la livraison ininterrompue et sécuritaire des biens et des services essentiels.
    Le gouvernement du Canada a fourni d'autres outils encore en prenant des mesures en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence. Ces mesures ont aidé à prévenir une augmentation soudaine du nombre de participants aux manifestations, à protéger les enfants contre l'exposition à l'occupation, à soutenir les prestataires de services et à les indemniser, et à restreindre l'accès aux sources de financement de l'occupation illégale en bloquant temporairement des comptes.
    Comme le Comité le sait pertinemment, en plus de l'occupation illégale à Ottawa, il y a eu des incidents critiques en Ontario, ainsi que beaucoup d'autres manifestations à haut risque liées au « convoi de la liberté » et des barrages partout au Canada. L'OPP a travaillé en collaboration avec le Service de police d'Ottawa, la GRC et d'autres services policiers pour élaborer un plan opérationnel durable et intégré tenant compte des pratiques efficaces retenues après d'autres incidents critiques à risque élevé, des données sur les ressources policières disponibles et des exigences opérationnelles simultanées et émergentes dans un certain nombre d'administrations policières. Des agents de l'ordre public suffisamment formés ont été recrutés partout au Canada et déployés de façon intégrée, stratégique et mesurée sur une période de deux jours, ce qui a permis de mettre fin à l'occupation.
    Cette situation et les incidents semblables qui ont eu lieu simultanément partout au Canada ont nécessité une collaboration nationale sans précédent pour prévenir les préjudices, préserver la vie et protéger les infrastructures essentielles. À titre de commissaire de l'OPP, je suis extrêmement fier du professionnalisme et du dévouement remarquables des agents déployés à Ottawa et sur les lieux d'autres incidents qui se sont produits en même temps ailleurs dans la province. Malgré toutes les difficultés, sous le regard du pays tout entier, nos agents et ceux d'une multitude d'autres services de police canadiens sont demeurés engagés dans leurs rôles et responsabilités et ont représenté l'ensemble de la profession policière avec un professionnalisme, une discipline et une confiance du plus haut niveau.

  (2010)  

    Thank you, merci, meegwetch de nous avoir permis de nous joindre à vous ce soir.
     Merci, commissaire.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Ce sera d'abord M. Brock pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins de leur présence. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Commissaire, vous avez récemment participé aux travaux de la commission présidée par le juge Rouleau et vous avez juré de dire la vérité. Vous en souvenez-vous?
    Oui, monsieur.
    Plusieurs avocats vous ont posé des questions et vous avez confirmé qu'à aucun moment vous ou un membre de votre organisation n'avez demandé au gouvernement du Canada d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Maintenez-vous cette déclaration aujourd'hui?
    Oui, monsieur.
     Le ministre de la Sécurité publique, M. Mendicino, a déclaré à 13 reprises à la Chambre des communes, à divers comités et dans des reportages à la presse et à la télévision que les organismes d'application de la loi, y compris l'OPP, ont expressément demandé l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Une seule des deux affirmations peut être vraie. Convenez-vous avec moi que quelqu'un ment? Comme vous ne mentez pas, monsieur, seriez-vous d'accord avec moi pour dire que le ministre Mendicino ment aux Canadiens?
    Je peux affirmer que je vous dis la vérité absolue, monsieur. Je n'ai jamais demandé que la Loi sur les mesures d'urgence soit invoquée.
    Le ministre a perpétué ce mensonge en soutenant que non seulement vous l'aviez demandé, mais qu'il avait aussi reçu un avis de vous ou d'un membre de votre équipe juridique selon lequel le gouvernement du Canada avait atteint le seuil nécessaire pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Vous n'êtes pas d'accord non plus. Est‑ce exact?
    Je n'ai pas donné de conseils de cette nature, et je ne connais personne de mon équipe juridique qui l'ait fait.
    Très bien.
    Encore une fois, le ministre Mendicino a délibérément induit les Canadiens en erreur et leur a menti lorsqu'il a déclaré devant des comités et à la Chambre des communes que des gens à Ottawa et dans les environs de la zone de la manifestation avaient fait l'objet de menaces de viol et que ces menaces étaient confirmées par des accusations.
    À votre connaissance, personne n'a jamais été accusé de viol, d'agression sexuelle ou de menaces de cette nature. Est‑ce exact?
    Je ne connais personne qui ait été accusé d'agression sexuelle, mais je ne connais pas forcément tous ces détails. Cette information doit normalement venir du Service de police d'Ottawa.
    Merci.
    En ce qui concerne l'invocation de la loi, le gouvernement vous a‑t‑il consulté à un moment donné au sujet des mécanismes et des outils prévus dans la loi?
    Non, je n'ai pas été consulté, monsieur.
    L'OPP a‑t‑elle fait une analyse pour voir si les critères juridiques à respecter pour invoquer la loi avaient été satisfaits?

  (2015)  

    Je ne dirais pas que l'OPP a réalisé une analyse juridique. Lorsque les outils nous ont été fournis, nous avons demandé à notre service juridique de les examiner et de nous donner des conseils sur la façon dont nous pourrions les utiliser et sur leur harmonisation avec les outils dont nous disposions grâce à la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d'urgence et les autres pouvoirs qui étaient à notre disposition.
    Merci.
    Combien d'accusations l'OPP a‑t‑elle portées en vertu du Règlement sur les mesures d'urgence ou du décret?
    Que je sache, l'OPP n'a pas porté de telles accusations.
    Merci.
    Je crois comprendre qu'avant l'invocation de la loi, vous ne prêtiez pas attention à la loi elle-même. Vous ne cherchiez pas à vous renseigner à son sujet. Vous n'avez eu aucun avertissement, aucun préavis, aucune consultation. Vous avez été mis au courant au fur et à mesure.
    À l'exception de la conversation que j'ai eue avec la commissaire Lucki, au cours de laquelle elle m'a dit que le gouvernement fédéral envisageait d'invoquer cette loi. C'était plusieurs jours avant qu'il ne le fasse. Il n'y a eu ni préavis, ni alerte, ni possibilité d'examiner la question. C'est exact.
    Oui, et cette conversation avec la commissaire Lucki a eu lieu le 5 février. Est‑ce exact?
    C'est exact. Oui, monsieur.
    Vous devez être d'accord avec la commissaire Lucki qui a écrit dans un courriel envoyé à Mike Jones, un membre du personnel du gouvernement, en fin de soirée, le 13 février: « Je suis d'avis que la GRC n'a pas encore utilisé tous les outils déjà disponibles en vertu des lois existantes. Il y a des cas où des accusations pourraient être portées en vertu des pouvoirs existants pour diverses infractions au Code criminel. [...] La loi sur les mesures d'urgence de l'Ontario qui vient d'être promulguée contribuera également à fournir des outils de dissuasion supplémentaires, en plus de ceux que nous avons déjà. 
    Vous partagez cet avis. Est‑ce exact?
     Oui.
    Sur la question de...
     Monsieur Brock, excusez-moi, mais il vous restera cinq minutes au prochain tour.
    Merci.
    Nous allons passer à M. Virani pour cinq minutes.
    Merci. Je vais faire assez rapidement.
    Merci, monsieur Carrique, d'être là. Je vous suis vraiment reconnaissant du temps que vous nous accordez.
    Je voudrais d'abord vous parler de l'évaluation des risques. J'ai sous les yeux un document qui est un rapport de renseignement opérationnel de l'OPP daté du 14 février. C'est le genre de rapport qui, avez-vous dit dans votre exposé liminaire, est produit quotidiennement. On y parle par exemple des menaces qui ont surgi. Je vais vous soumettre quelques énoncés et vous demander ce que vous en pensez.
    D'après les notes du 5 février, il y a eu un rapport selon lequel on avait l'intention de bombarder le Parlement en empruntant le réseau de tunnels, et l'Équipe intégrée de la sécurité nationale de la GRC faisait enquête. Vous souvenez-vous de ce genre de menace? Vous souvenez-vous de l'avoir vue décrite dans ces rapports?
    Je me souviens d'avoir vu ce genre de menace signalé dans divers rapports Hendon. En toute honnêteté, je ne peux pas dire si c'est exact mot pour mot, mais je n'ai aucune raison de le contester, puisque vous avez le rapport Hendon sous les yeux.
    Le rapport dit également qu'il y a eu des incidents où des armes ont été amassées. Dans le même rapport, à la page 20, on lit que le CIG a reçu de l'information selon laquelle une personne pourrait fournir des armes à des manifestants et que le CIG poursuit son enquête. Le CIG, c'est quoi, monsieur Carrique?
    Sans avoir vu le rapport, je ne peux pas le dire. Désolé.
    Vous ne connaissez pas cet acronyme?
    Non.
    Je suis à la page 27 du rapport. Il est question d'une menace, quelqu'un disant: « Si le gouvernement ou la police locale commettent des actes de violence contre ces manifestants, ce sera un appel aux armes pour que nous tous, combattants de la liberté, nous regroupions et allions là où on a besoin de nous. Laissez tout tomber et apportez votre soutien. »
    Vous souvenez-vous d'avoir vu des propos comme ceux‑là dans ce genre de rapport?

  (2020)  

    Je me souviens d'avoir vu ce genre d'énoncé dans les rapports Hendon, oui.
    Voici un autre passage que je voudrais vous soumettre. À la page 21 du rapport, on peut lire: « Le contexte [de cette publication] semble être la page Instagram du SPO » — c'est‑à‑dire le Service de police d'Ottawa — « avec une bulle bleue où on lit: n'oubliez pas que nous avons plus d'effectifs, plus d'armes à feu, de meilleures armures et que nous sommes vos patrons. Vous serez aux côtés de Trudeau et des nombreuses autres personnes à la main traîtresse. Nous n'avons pas peur de vous. Vous avez besoin de nous, nous n'avons pas besoin de vous. »
    À entendre seulement ce passage et à plus forte raison à le lire dans un rapport de situation, comment réagiriez-vous dans le cadre du travail d'application de la loi de l'OPP, lorsque les manifestants tiennent ce genre de propos?
    C'est préoccupant, bien sûr. Il faudrait pousser l'analyse avec le renseignement et peut-être enquêter plus à fond, et en tout cas communiquer cette information au service de police compétent. Toutes les choses que vous avez présentées ont été une source de préoccupation pour les forces de l'ordre, et en particulier pour l'OPP.
    Des renseignements ont été soumis à la commission. Le SPO aurait porté 533 accusations, dont un grand nombre concernait des infractions liées aux armes à feu. Êtes-vous au courant?
    Je connais les chiffres qui ont été cités. Je ne peux pas dire s'ils sont exacts ou non.
    Nous avons également entendu le témoignage de personnes qui ont comparu devant la commission d'enquête et qui ont soutenu qu'il s'agissait essentiellement d'une manifestation pacifique et presque amusante. Comment réagissez-vous à ces témoignages, compte tenu de ce que je viens de vous lire et des accusations qui ont été portées?
    Au‑delà de ce que vous m'avez lu et des accusations qui ont été portées, on ne peut pas dire que c'était une manifestation pacifique. C'était une manifestation illégale qui s'est transformée en occupation, et ce fut un lourd défi à relever pour les forces de l'ordre.
    Je ne sais pas si vous avez écouté le témoignage précédent, mais j'ai amené le chef intérimaire Bell à parler de certains cas où des manifestants ont parlé de « renverser le gouvernement », de « dissoudre le gouvernement », de « mettre fin au règne de Trudeau », par exemple. Êtes-vous au courant du fait que des manifestants auraient exprimé semblables sentiments?
    Je sais que les rapports Hendon en ont fait état, oui.
    Je voulais vous amener à discuter d'un élément important. Il s'agit de Diagolon, un groupe violent d'idéologie extrémiste. Nous savons que le symbole Diagolon a été trouvé dans une cache d'armes à Coutts, en Alberta.
    Nous avons également des faits énoncés dans ce document, à la page 6, attestant que Diagolon est « un groupe idéologique qui met en avant le discours accélérationniste vers l'effondrement du gouvernement. DIAGOLON semble avoir un auditoire parmi ceux qui participent au convoi, certains d'entre eux étant venus de la Colombie-Britannique à Ottawa. »
    Pouvez-vous nous parler de la présence de Diagolon dans le blocage d'Ottawa?
    Je ne suis pas en mesure de vous fournir des faits précis attestant leur présence dans le blocage d'Ottawa. Tous les renseignements auxquels j'ai accès sont ceux qui figurent dans le rapport Hendon. Les autres éléments de preuve devraient venir du surintendant Pat Morris ou d'un agent du renseignement.
     D'accord. Merci.
     Merci, monsieur Virani.
    Nous passons maintenant à Mme Normandin.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je vous remercie de votre présence, commissaire Carrique.
    J'aimerais que vous nous donniez des détails sur ce qui s'est passé au moment où vous avez appris le décret de la Loi sur les mesures d'urgence. Si j'ai bien compris, vous avez discuté avec la commissaire Lucki vers le 5 février. C'est alors qu'elle vous a mentionné que cette mesure allait peut-être être utilisée.
     À quel moment précis avez-vous su que ce serait utilisé sous forme de décret par le gouvernement?

[Traduction]

    Merci.
    Je ne savais pas à l'avance que la Loi sur les mesures d'urgence allait être invoquée. Ce n'est qu'après coup, lorsque cette information a été rendue publique que j'ai été mis au courant. Cela a obligé notre équipe à revoir le plan opérationnel qu'elle avait mis en place et à tenir compte des nouveaux outils qui lui étaient offerts par la Loi sur les mesures d'urgence.

[Français]

    Dans ce cas, j'aimerais que vous nous parliez des plans que vous aviez déjà en tête et qui allaient possiblement être mis en œuvre.
    Pouvez-vous nous donner un peu plus de détails sur le temps requis pour la mise en place du plan?

[Traduction]

    Le plan était prêt le 13 février. Il y avait encore des obstacles à surmonter avant qu'il ne puisse être mis en œuvre, mais il était prêt à l'être le 15 février. L'équipe de planification a dû revoir le plan et s'assurer que les outils dont elle disposait désormais étaient pris en compte et qu'ils seraient utilisés au besoin.

  (2025)  

[Français]

    Vous venez tout juste de mentionner qu'il y avait encore quelques écueils à aplanir pour que le plan puisse fonctionner. L'utilisation de la Loi sur les mesures d'urgence était-elle nécessaire pour que ces écueils soient aplanis? Envisagiez-vous d'autres possibilités?

[Traduction]

    La Loi sur les mesures d'urgence n'était pas expressément nécessaire pour que nous mettions en œuvre le plan à partir de cette période entre le 13 et le 15 février.
    Ce que la Loi sur les mesures d'urgence a fait, comment elle a aidé la police, je crois... La prestation des services de remorquage a été constamment difficile. Nous avons identifié un certain nombre de dépanneuses dont les exploitants étaient prêts à aider. Il y avait un maximum de 35 dépanneuses, je crois, réparties entre sept ou neuf entreprises, mais ces entreprises demandaient une indemnisation. Nous étions en train de mettre en place un processus d'approvisionnement d'urgence par l'entremise de la province pour offrir cette indemnisation. La Loi sur les mesures d'urgence nous a permis d'accorder cette indemnisation aux exploitants de dépanneuse.
    Bien qu'elle ne fasse pas partie du plan opérationnel, la Loi sur les mesures d'urgence a également permis à la police de couper l'accès aux sources de financement, ce qui a rendu l'occupation plus difficile à maintenir, et nous avons certainement été en mesure de tirer parti des messages concernant les zones réglementées et la restriction imposée sur la présence d'enfants dans ces zones. Même si la common law et diverses lois permettaient de restreindre la participation, la Loi sur les mesures d'urgence a permis à la police de renforcer le message.

[Français]

    Je vous remercie.
    Je vais revenir à la question des remorqueuses, puisque vous en avez parlé.
    Si j'ai bien compris, le problème était uniquement d'ordre financier, et, si on a eu de la difficulté à recourir à des remorqueuses, ce n'est pas parce que les propriétaires, par exemple, ne voulaient pas effectuer le travail. Seul l'aspect financier était en jeu.

[Traduction]

    Oui, entre le recours à la Loi sur les mesures d'urgence pour contraindre les conducteurs de dépanneuse et le versement d'une indemnisation, la question s'est quelque peu compliquée. Nous avions environ 35 conducteurs de dépanneuse prêts à intervenir, mais certains d'entre eux s'inquiétaient toujours du risque de représailles, du risque d'être identifié, du risque de dommages à leurs biens ou à leurs véhicules et d'atteinte à leur personne — de tout préjudice qu'ils pourraient subir à cause de leur intervention —, mais ils s'étaient tout de même engagés à apporter leur aide et il a été très utile de pouvoir leur offrir cette indemnisation.
    Il y a autre chose. Ils avaient accepté de participer, mais nous redoutions que, à mesure que le moment fatidique approchait, ils ne se ravisent et refusent leur concours. C'était donc un grand avantage de pouvoir les contraindre. Nous avons fourni la documentation écrite et l'avis verbal, comme l'exige la Loi sur les mesures d'urgence. Ils n'ont pas résisté à ce moment‑là, mais s'ils avaient changé d'idée, nous avons estimé que la possibilité de les contraindre était un avantage important.

[Français]

     Merci beaucoup.
    Je poursuivrai lors du prochain tour de questions.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez cinq minutes.
     Merci beaucoup.
    Je vais profiter de l'occasion pour m'adresser au commissaire Carrique afin de voir clair dans ce qui semble être une contradiction.
     Lors de la séance du Comité de la sécurité publique et nationale, le 24 mars, vous avez dit que le Bureau des renseignements criminels - Opérations provinciales avait identifié le « convoi de la liberté » comme une menace à la sécurité nationale. Par contre, le 19 octobre, le surintendant de l'OPP, Pat Morris, a déclaré à la commission que son équipe n'avait jamais reçu d'information crédible montrant que le « convoi de la liberté » constituait une menace directe à la sécurité nationale.
     Êtes-vous d'accord avec le Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes lorsqu'il dit que ces déclarations sont contradictoires?
    Non, je ne suis pas d'accord pour dire qu'elles sont contradictoires, et j'ai longuement expliqué devant la commission en quoi on pourrait avoir l'impression qu'il a contradiction. Le 7 février...
    Je vais considérer cela comme votre réponse. Je suis heureux de vous donner la possibilité de donner une explication officielle aujourd'hui.
    Selon vous, le « convoi de la liberté » constituait‑il une menace à la sécurité nationale?
    Je crois que le « convoi de la liberté » représentait une menace à la sécurité nationale, et il est très important... Je le soutiens non dans l'optique de la preuve requise en vertu de la Loi sur le SCRS ou des accusations de terrorisme aux termes du Code criminel, mais en me plaçant du point de vue du renseignement stratégique, qui mène à la prise de décisions et à la planification des interventions.
    Absolument, j'ai senti que c'était une menace.
    Le niveau de menace nationale établi par le Centre intégré d'évaluation du terrorisme était moyen, c'est-à-dire que le renseignement indique qu'une personne ou un groupe au Canada a l'intention ou la capacité de commettre un acte de terrorisme au Canada. Le Centre estime qu'un acte de terrorisme violent pourrait se produire. 
    Est‑ce que cela guiderait le renseignement et la prise de décisions au plan opérationnel?
    Sur le plan opérationnel, cela éclairerait la prise de décisions, et il y a eu des consultations entre le Bureau des renseignements criminels - Opérations provinciales, l'EISN, c'est-à-dire l'Équipe intégrée de la sécurité nationale de la Gendarmerie royale du Canada, et le SCRS pour analyser plus à fond ce que notre section a signalé comme une menace possible à la sécurité nationale.
    Votre rapport Hendon du 9 février 2022 parle de menaces à la sécurité publique, à la sécurité des agents et peut-être à la sécurité nationale. Le surintendant Morris a fait remarquer que, par moment, l'ambiance était joviale et agréable, mais lorsque la police est intervenue, la dynamique a changé et il y a eu plus d'agressivité. À peu près à ce moment, le Bureau s'est également inquiété du fait que des renseignements sur les interventions policières étaient communiqués aux manifestants.
    Partagiez-vous les préoccupations du surintendant Morris, compte tenu de cette information?

  (2030)  

    Si j'avais les mêmes préoccupations?
    C'est exact: des renseignements sur les interventions policières arrivaient aux manifestants.
    Oui, j'avais les mêmes inquiétudes.
    Il y avait peut-être des signes de fuites accidentelles ou intentionnelles d'information et vous vouliez « fermer les écoutilles », pour reprendre ses mots. Êtes-vous d'accord pour dire qu'il s'agissait d'une menace que vous deviez désamorcer, du point de vue du renseignement et des opérations?
    C'était certainement un risque qu'il fallait combattre et atténuer.
    Compte tenu du témoignage récent des organisateurs selon lequel il y a eu de multiples fuites à tous les niveaux, quelles preuves...? Vous avez parlé de fuites accidentelles ou intentionnelles. Quels renseignements vous auraient amené à croire qu'il y avait eu des fuites intentionnelles d'information au profit des manifestants du convoi, ce qui vous aurait incité à vouloir fermer les écoutilles?
    Je n'ai aucune preuve me permettant d'affirmer que des fuites ont eu lieu pendant cette période. Je suis d'accord sur les impressions et les énoncés relayés dans le rapport Hendon à ce moment‑là. Un certain nombre de missions de suivi ont été commandées pour essayer de voir si les menaces avaient réellement été suivies d'effet en ce qui concerne des renseignements précis qui auraient fait l'objet d'une fuite.
    Avez-vous jamais été mis au courant de la possibilité qu'il ait eu certaines sympathies à la haute direction de la police d'Ottawa, comme on l'a dit de façon générale, ce qui aurait pu constituer une menace concernant les renseignements qui avaient été communiqués? De façon plus claire, devrais‑je dire, étiez-vous assez à l'aise pour communiquer toute l'information que vous aviez aux membres de la police d'Ottawa?
    Je n'avais aucune crainte qui m'aurait incité à ne pas communiquer tous les renseignements que nous avions à la police d'Ottawa ou à nos autres partenaires policiers.
    Vous a‑t‑on déjà communiqué des renseignements voulant que des membres de l'équipe soient peut-être sensibles à la cause des manifestants et aient peut-être fait fuiter des renseignements?
    Nous avons toujours craint que ce ne soit le cas. Il y avait des policiers qui considéraient d'un œil sympathique la cause des manifestants et il y avait un risque que des renseignements sortent des services de police.
    Cela vaut pour l'OPP également?
    Pour tous les services de police.
    Que faites-vous, alors, pour enquêter sur la possibilité de fuites tout au long de la présence du convoi? Cela fait partie du post-mortem que vous êtes en train de faire?
    Aucune enquête n'est en cours pour l'instant. Rien n'indique qu'il y ait eu des fuites au sein de la Police provinciale de l'Ontario. Le Bureau des renseignements criminels a fait un suivi, mais aucun élément de preuve ne confirme l'existence de fuites.
    Monsieur Green, votre temps de parole est écoulé. Puis‑je vous céder la présidence?
     Certainement. Je vais remettre le chronomètre à zéro.
    Madame la sénatrice, vous avez cinq minutes. La parole est à vous.
    Merci.
    Encore une fois, bienvenue à vous deux.
    Monsieur le commissaire, je vous amène à l'autre bout de la province. Les questions sont nombreuses. Nous avons tendance à nous confiner à la bulle d'Ottawa, mais ce qui s'est passé à Windsor a suscité de grandes inquiétudes. Je comprends la position qui est la vôtre, obligé que vous êtes de décider où et comment apporter votre soutien tout en continuant d'assurer les services policiers dans les localités. On l'oublie parfois lorsqu'on essaie de comprendre.
    Une question m'intéresse beaucoup: comment la décision d'aller à Windsor a‑t-elle été prise? Je connais la Loi sur les services policiers et je sais que votre aide a été demandée. Comment la situation de Windsor se compare-t-elle à celle d'Ottawa? On se pose bien des questions à ce sujet, à Ottawa.
    Merci, madame la sénatrice.
    Les demandes d'aide des deux villes étaient très semblables. Il y a eu des demandes d'aide officielles, par écrit, de la part des deux services de police. Les deux demandes ont eu ceci de particulier qu'elles ont été adressées au premier ministre et au solliciteur général de la province plutôt qu'à moi directement. Normalement, le chef de police fait la demande au commissaire, qui fournit ensuite l'aide nécessaire. C'était un peu particulier dans les deux cas. Il s'agissait de demandes faites publiquement. Normalement, le nombre précis d'agents demandés n'est pas révélé.
    Pour apporter notre aide, nous avons communiqué directement avec les services de police concernés et désigné les commandants du niveau opérationnel pour apporter l'aide nécessaire.
    Dans le cas de Windsor, nous avons dû composer avec le blocage du pont Ambassador. Nous avons profité d'un créneau favorable qui nous a permis de prendre des mesures d'application de la loi, une fois constaté l'échec de toutes les tentatives de négociation, et d'exécuter un plan dans un délai de deux à quatre jours. Nous avions les ressources nécessaires pour répondre aux besoins du plan.
    Le plan d'Ottawa était encore en évolution et en développement, et nous savions, à cette étape du plan, que nous n'avions pas immédiatement accès aux ressources nécessaires. Selon l'évaluation initiale, nous aurions besoin d'au moins 800 membres des forces de l'ordre public, ce qui signifiait qu'il fallait déplacer des ressources de partout au Canada pour appliquer le plan. Nous craignions que les mesures prises dans n'importe quelle administration n'éparpillent les activités dans la province.
    Le jour en question, lorsque nous sommes passés à l'action à Windsor, le 12 février, 20 manifestations avaient lieu simultanément dans la province. Nous gérions le barrage de l'autoroute 402, le pont Ambassador, les tentatives de blocage du pont Peace, un barrage à Cornwall, les tentatives qui ont eu lieu à Fort Frances et à l'Assemblée législative de Toronto, à Queen's Park.
    Ma priorité était de m'occuper de tous ces incidents, de veiller à ce que nous ayons les ressources nécessaires. Cela fait, nous serions ensuite en mesure de réunir les ressources nécessaires pour nous attaquer au problème d'Ottawa, tandis que l'élaboration du plan se poursuivait. Malgré tout, nous avons sans cesse envoyé des ressources à Ottawa pendant cette période également.

  (2035)  

    C'est tout à fait logique, compte tenu de ma connaissance de l'organisation. Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi la demande aurait été adressée au premier ministre ou au solliciteur général. A‑t-elle été faite par le chef de police ou par le maire? Ils comparaîtront, mais j'essaie de comprendre les différences entre les deux villes. J'ai beaucoup de questions à ce sujet.
    À Ottawa, c'est le maire qui a adressé la demande au premier ministre et au solliciteur général. À Windsor, c'est le chef qui a signé la demande après avoir consulté le maire. J'ai ensuite eu des échanges directs avec les deux chefs pour m'assurer que nous étions en mesure de répondre à ces demandes. Bien qu'il s'agisse d'une variante que je n'avais jamais vue auparavant, cela ne nous a pas empêchés de structurer les opérations pour donner suite aux demandes.
    Avez-vous participé à l'élaboration du règlement sur les urgences que le gouvernement a pris en Ontario. Le règlement vous a‑t‑il été utile?
    J'ai pu donner mon point de vue. Les réunions ont commencé le 10 février ou à peu près. J'ai été en mesure de faire valoir le point de vue opérationnel et de donner des conseils en ce qui concerne les outils qui, à mon avis, seraient efficaces pour mettre fin immédiatement aux barrages et décourager et prévenir l'installation d'autres barrages.
     Si nous avons pu dégager le barrage sur l'autoroute 402, c'est grâce au fait que nous avons pu expliquer aux manifestants les conséquences auxquelles ils s'exposaient s'ils ne le levaient pas immédiatement. J'estime que le règlement a été un moyen très efficace, entre les mains de nos équipes de liaison provinciales, pour prévenir l'installation d'autres barrages.
    Je vais reprendre le fauteuil.
    Merci, monsieur le commissaire.
    Je donne la parole à la sénatrice Cordy.
    Merci beaucoup.
    Merci à vous deux d'être là. Votre participation est très utile.
    Dans quelle mesure étiez-vous préoccupé? Ma question fait suite aux propos de M. Green au sujet de l'OPP.
    J'ai été étonnée et déçue lorsque j'ai vu à la télévision des images de policiers chargés de notre sécurité qui mettaient le bras autour des épaules des manifestants, qui se faisaient photographier avec eux et qui disaient: « Bon voyage à Ottawa. J'aimerais pouvoir vous accompagner. » J'ai été consternée de voir ce genre de choses. On serait porté à croire que les policiers sont là pour maintenir la paix. Au lieu de cela, j'ai eu l'impression, à voir ces images, qu'ils encourageaient les membres du convoi à contrevenir à la loi.
    Avez-vous eu une réaction devant des comportements semblables?

  (2040)  

    Oui. J'ai eu une réaction lorsque j'ai vu ce genre de chose. Je peux vous dire que des mesures disciplinaires officielles ont été imposées dans 15 cas à des membres de la Police provinciale de l'Ontario.
    Il est également important de rappeler que ces images peuvent parfois être présentées hors contexte. Lorsqu'un agent de police est déployé dans une situation qui risque d'être dangereuse, il arrive qu'il établisse certains rapports en essayant de calmer le jeu, d'établir une communication et d'amener les manifestants à partir de leur plein gré. Ce n'est pas la même chose que de dire: « Nous appuyons ce que vous faites ». Ou encore: « Nous sommes avec vous. » Le simple fait d'être pris en photo avec quelqu'un qui participe à une occupation ne constitue pas forcément un écart de conduite.
    Nous ne pouvons pas perdre de vue le fait qu'il y avait des gens qui manifestaient pacifiquement et légalement à divers stades avec des gens qui se livraient à des activités illégales.
    Vous avez tout à fait raison. Il y avait des manifestants pacifiques, comme nous l'avons tous vu, et il y a eu des comportements illégaux. Merci.
    Hier, on nous a dit que des renseignements tactiques avaient été communiqués aux manifestants. Il y a eu des fuites. Ce que j'ai entendu — et ce n'est pas ce que vous avez dit plus tôt —, c'est qu'il y avait eu des fuites aux trois niveaux des services de police.
    Avez-vous fait des enquêtes à ce sujet à l'intérieur de l'OPP?
    Je suis désolé, madame la sénatrice. Je ne sais pas d'où vient cette information.
    Je croyais que cela avait été révélé à la Commission hier.
    C'est possible. Je n'ai eu connaissance d'aucune preuve de fuites provenant des trois paliers d'application de la loi. Si on parle des paliers municipal, provincial et fédéral, il y a effectivement eu des affirmations et des rumeurs à ce sujet. À l'aide de nos services de renseignement, nous avons cherché à vérifier les rumeurs et à obtenir des preuves, et rien n'indique que des agents de l'OPP se soient conduits de la sorte.
    Vous avez mené des enquêtes internes à ce sujet.
    Nous avons cherché à obtenir des renseignements ou des preuves supplémentaires.
    Nous n'avons pas officiellement d'enquête en cours. Nous n'avons aucune preuve. Il n'y a pas de plainte officielle. Il n'y a pas de preuve concrète. Il n'y a rien qui puisse être le point de départ d'une enquête.
    Craignez-vous que la population puisse perdre confiance dans les services de police? Quand les gens voient ce genre de choses à la télévision, qu'elles soient mal interprétées ou qu'elles soient avérées, craignez-vous que la population se méfie des services de police?
    Je me préoccupe toujours de la mesure de confiance de la population envers la police. Il est absolument essentiel d'être efficace et de veiller à ce que les citoyens et les collectivités se sentent protégés et en sécurité. Il faut qu'ils aient confiance en nos policiers.
    Cependant, en l'absence de toute preuve, une grande partie de ces propos peut être encore de la rhétorique de la part de ceux qui ont participé aux manifestations et de ceux qui continuent de répandre de la désinformation pour essayer de faire valoir leur version des choses. Si jamais des preuves ou une plainte permettaient de justifier une enquête, vous avez ma parole que j'y donnerai suite.
    La méfiance de la population peut aussi mettre les policiers en danger, je crois. Il est donc important de s'attaquer à ce problème.
    La confiance est absolument essentielle au maintien de l'ordre dans une société libre et démocratique.
    Merci.
    Les mesures prises à l'égard du convoi se sont-elles améliorées après la démission de l'ancien chef à Ottawa?
     Il est certain qu'un commandement unifié a été très clairement établi le 15 février.
     Le chef Sloly a démissionné. Je ne savais pas qu'il allait démissionner le 15 février. Il a participé à une réunion de la commission des services de police. Nous avions un certain nombre de questions que je devais porter à l'attention du chef Sloly pour circonscrire les obstacles à l'opérationnalisation du plan au sein de la police d'Ottawa.
    Je n'ai jamais eu l'occasion d'avoir cette conversation avec le chef Sloly. Le chef intérimaire Bell a été nommé, et le plan a été mis en œuvre immédiatement.
     Madame la sénatrice, votre temps de parole est écoulé.
    Merci.
    Chers collègues, nous avons le temps de faire une autre série de questions de cinq minutes. Pour tout le monde.
    Je vais commencer par M. Motz.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci d'être parmi nous, monsieur le commissaire et madame la cheffe adjointe.
    Monsieur le commissaire, vous avez probablement entendu parler ces derniers temps de la méfiance de la population canadienne à l'égard du ministre Blair et de son ingérence supposée dans la fusillade de masse en Nouvelle-Écosse.
    Dans la foulée, si on peut dire, nous avons trouvé un texte de la commissaire Lucki qui vous a été envoyé vers le 22 février, juste avant que la Loi sur les mesures d'urgence soit sur le point d'être révoquée. Elle vous demandait ceci: « Le ministre Blair a‑t‑il essayé d'obtenir de vous une lettre d'appui à l'invocation de la LMU? » Vous avez répondu: « Non. Est‑ce que je suis censé avoir de ses nouvelles? »
    Ne trouvez-vous pas étrange, comme moi, qu'un ministre de la Couronne demande l'appui de la police après coup, alors qu'il s'est toujours dit en faveur de cette mesure?

  (2045)  

    Je n'ai reçu aucune demande de la part du ministre Blair concernant une lettre à l'appui de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Vous avez dit clairement tout à l'heure dans votre témoignage et devant la Commission que vous n'aviez pas demandé qu'on l'invoque.
    C'est vrai.
    Et je n'ai reçu aucune demande après coup de la part d'un ministre ou de qui que ce soit du gouvernement fédéral m'invitant à fournir une forme quelconque d'approbation ou de lettre.
    Je vais revenir aux questions de mon collègue, M. Green, au sujet du renseignement. Vous avez employé les mots « renseignement stratégique ».
    Vous savez que le seuil à partir duquel le gouvernement invoque cette disposition — et ce n'est pas de votre ressort — est celui des menaces à la sécurité nationale. Vous avez déclaré le 6 ou le 7 février que, selon vous, il y avait menace à la sécurité nationale. Je ne sais pas ce qui s'est passé durant ces journées qui vous aurait incité à le penser. J'espère que vous nous le direz, si vous le pouvez.
    Cela contredit ce que le surintendant Morris a dit durant l'enquête. Il a déclaré qu'il n'y avait pas de renseignement crédible attestant l'existence d'une menace à la sécurité nationale. Selon le libellé de la loi, « menaces envers la sécurité du Canada » s'entend au sens de l'article 2 de la Loi sur le SCRS.
    Avez-vous été saisi ou eu connaissance de données de renseignement étayant l'existence d'activités d'espionnage ou de sabotage contre le Canada ou d'activités qui auraient porté préjudice aux intérêts du Canada?
    Je dois corriger un élément de vos propos, monsieur.
    Ce n'est pas moi qui, le 6 février ou vers cette date, ai fait quelque déclaration que ce soit au sujet d'une menace à la sécurité nationale. C'est dans un rapport Hendon, publié le 7 février, qu'il a été question d'une menace éventuelle à la sécurité nationale.
    Vous en avez parlé.
    J'en ai parlé, en effet.
    Ce rapport a été rédigé et approuvé par le surintendant Pat Morris. Il a eu la même information.
    Depuis, il a dit qu'il n'y avait pas eu de menace crédible à la sécurité nationale. C'est ce qu'il a déclaré à la Commission.
    En effet.
    J'aimerais obtenir une précision. Cela ne contredit pas le contenu du rapport Hendon du 7 février. Par la suite, aucune menace crédible n'a été circonscrite. Aucune menace ne s'est matérialisée.
    Donc, en définitive, il n'y avait rien dans le rapport Hendon ou dans tout autre rapport de renseignement qui aurait donné à penser qu'il y ait eu des activités de sabotage ou d'espionnage contre le gouvernement du Canada, ou contre le Canada, un point c'est tout.
    Je n'ai pas évalué cette information par rapport à la Loi sur le SCRS.
    Vous n'avez vu aucun signe de menace répondant à ces critères dans aucun des rapports. C'est bien cela?
    Je n'ai évalué la situation en fonction d'aucun critère. Comme je l'ai indiqué, j'ai considéré cette information comme du renseignement stratégique. Il y avait une menace possible à la sécurité nationale.
    Aujourd'hui, vous avez du recul, monsieur. Vous avez du recul. À l'époque, il fallait encore envisager...
    Ma question est... Je suis en train de vérifier comment la Loi sur le SCRS définit les exigences en matière de sécurité pour qu'on puisse parler de menace nationale.
     Oui.
    Avez-vous constaté dans ces évaluations stratégiques qu'il y avait une menace d'espionnage ou de sabotage au Canada?
    Vous me demandez de revoir tous les rapports Hendon et...
    Non, je vous demande si vous étiez au courant. C'est oui ou c'est non, évidemment.
    Je n'ai rien constaté de particulier qui aurait trait à du sabotage ou à de l'espionnage...
    Étiez-vous au courant d'activités influencées par l'étranger, au Canada ou liées au Canada, qui seraient préjudiciables aux intérêts du Canada?
    Il a été question de choses nécessitant une enquête plus approfondie, oui.
    Mais rien n'a été confirmé. C'était du renseignement à ce moment‑là.
    Rien à ma connaissance. Il faut être clair au sujet des mandats. Le renseignement stratégique que fournit l'OPP est destiné à alimenter nos processus décisionnels et notre planification. Ce renseignement est transmis au SCRS, qui est chargé de l'évaluer en fonction de la Loi sur le SCRS.
    Ce n'est pas de mon ressort, comme commissaire de la Police provinciale de l'Ontario, ni de celui de la Police provinciale de l'Ontario en général; nous ne faisons pas non plus d'évaluation pour déterminer si cela répond aux critères de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Monsieur Motz, excusez-moi, mais votre temps de parole est écoulé.

  (2050)  

    Merci.
    Madame Bendayan, vous avez cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Je vais partager mon temps avec mon collègue M. Naqvi.
    Comme nous avons peu de temps, je vais procéder assez rapidement.
    Si je comprends bien, vous avez déclaré à la Commission — je lis le compte rendu — que les barricades représentaient pour vous un risque pour la sécurité nationale.
    Maintenez-vous votre témoignage, monsieur?
    Oui.
    Merci.
    Vous avez également déclaré tout à l'heure qu'il y a eu 20 manifestations dans toute la province, en comptant le blocus de la frontière internationale entre l'Ontario et les États-Unis. Devant 20 manifestations dans la province et tout ce qui se passait, l'OPP avait-elle suffisamment de ressources à l'époque pour mettre fin aux barrages illégaux partout en Ontario?
    La réponse à cette question est très complexe.
    Mettre fin aux blocus simultanément en une même journée n'aurait pas été...
    Sauf votre respect, ce blocus a duré trois semaines; donc, peut-être pas le tout en une journée, mais, au cours de ces trois semaines, l'OPP n'a pas réussi à mettre fin aux manifestations et aux blocus.
    Oui, elle y a réussi à différentes étapes. Et elle a fini par tout régler. Nous avons préservé la vie et prévenu les blessures...
    Le blocus d'Ottawa n'a été réglé qu'après l'application de la Loi sur les mesures d'urgence. N'êtes-vous pas d'accord?
    Du point de vue du calendrier, oui, mais le plan opérationnel a été rédigé le 13 février, sans intervention de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Pourquoi a‑t‑il fallu trois semaines pour dresser un plan? Le 13 février, c'était trois semaines après le début du blocus.
    C'est une question qu'il faudra poser à la police d'Ottawa. C'était la police compétente, et c'est elle qui était chargée d'élaborer un plan opérationnel.
    Merci.
    Le solliciteur général de l'Ontario croyait qu'il y avait 1 500 agents de l'OPP sur le terrain à Ottawa, alors que le maire d'Ottawa disait qu'il y en avait 50.
    Comment expliquer cette défaillance dans les communications entre le gouvernement de l'Ontario et l'OPP?
    Cette défaillance est le résultat de rapports administratifs adressés au ministère du Solliciteur général. Pour demander un remboursement financier à un autre service de police, il faut obtenir l'approbation du solliciteur général. Le chiffre de 1 500 provenait de la comptabilité financière. Ce chiffre est fonction du nombre moyen d'agents présents tel ou tel jour pendant le nombre de jours où ils étaient présents, soit l'équivalent de 1 500 agents. À ce moment‑là, il n'y avait pas 1 500 agents par jour.
    Chaque jour, dans toute la province, j'ai environ 1 100 policiers en service, répartis dans 330 municipalités.
    Merci.
    Monsieur Naqvi, vous avez la parole.
    Monsieur le commissaire, on vous a demandé si vous aviez demandé d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, et vous avez répondu que non, mais vous avez également déclaré que la Loi sur les mesures d'urgence était un outil extrêmement précieux.
    Maintenez-vous ce témoignage?
    Je crois que la Loi sur les mesures d'urgence nous a offert des moyens utiles. À mon avis, ce qu'il faut examiner plus largement, c'est le résultat, dans l'ensemble du système judiciaire, des accusations criminelles portées par la police dans ce genre de situation et la façon dont ces accusations ont vraiment un effet dissuasif sur les manifestants ultérieurs.
    Vous avez également déclaré ceci dans votre témoignage:
Ces outils ont rendu nos opérations très efficaces, et sans ces outils, nous n'aurions pas pu être aussi efficaces que nous l'avons été.
    Confirmez-vous cette affirmation?
     C'est mon opinion sur la combinaison des moyens permis par la Loi sur les mesures d'urgence et la réglementation provinciale. Les deux nous ont fourni des outils très précieux.
    Vous avez également déclaré que, parmi les pouvoirs dont vous avez pu vous servir et qui vous ont été conférés par la Loi sur les mesures d'urgence, il était, par exemple, possible d'interdire aux gens de se rendre dans les zones désignées, de limiter la présence d'enfants, qui était un risque important pour la sécurité publique, d'obliger les fournisseurs de services à faciliter l'enlèvement de véhicules, d'indemniser ces fournisseurs de services et de geler des comptes.
    Estimez-vous encore aujourd'hui que ces pouvoirs précis vous ont été utiles et ont permis de mettre fin à l'occupation d'Ottawa et aux barrages routiers?
     Je pense que ce sont des outils utiles et efficaces. Je ne peux pas dire dans quelle mesure ils ont aidé à mettre fin au blocus, mais je crois que ce sont des outils efficaces que les forces de l'ordre peuvent employer dans ce genre de situation et de circonstances. Ce sont effectivement des outils sur lesquels nous aurions pu compter dans cette situation particulière.
    Mais, monsieur, vous avez déclaré que ce sont des outils efficaces que vous avez pu employer dans le cadre des incidents qui ont duré trois semaines à Ottawa et à nos frontières.
    C'est juste. C'étaient des outils efficaces. La question de savoir s'ils étaient « nécessaires » reste à approfondir. Il y avait des lois pénales. Il y avait le Code de la route, applicable à certains des aspects de la situation. Mais, oui, il s'agissait d'outils efficaces.

  (2055)  

    Ces moyens n'ont pas été déployés à Ottawa avant que la Loi sur les mesures d'urgence ne soit invoquée. Comment cela se fait‑il?
    C'est une question de temps. La Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée avant le déploiement du plan opérationnel.
     Monsieur Naqvi, votre temps de parole est écoulé. Je suis désolée.
    Merci.
     Madame Normandin, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup, madame la présidente.
    Encore une fois, je vous remercie, commissaire Carrique.
    Je vais revenir à mes questions antérieures, mais j'aimerais d'abord en poser quelques-unes.
    À votre connaissance, au moment où il a pris la décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement était-il au courant du contenu du plan qui avait été établi le 13 février?

[Traduction]

    À ma connaissance, le gouvernement ne connaît pas le contenu du plan. Les plans opérationnels ne sont pas — ne devraient pas — être communiqués au gouvernement. C'est d'ordre opérationnel, et cela n'est effectivement jamais partagé avec le gouvernement.

[Français]

    Il y a quelques jours, nous avons appris que, le 13 février, Transports Canada avait établi un plan pour permettre de déplacer les camions sans qu'il soit nécessaire de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence.
    Aviez-vous été mis au courant de ce plan?

[Traduction]

    Je suis désolé. Je ne suis pas au courant d'un plan qui aurait été dressé par Transports Canada. Peut-être y a‑t‑il confusion en raison de l'aide apportée par le ministère des Transports en Ontario. Le gouvernement américain et l'État du Michigan ont également offert de fournir des services de remorquage pour le pont Ambassadeur — environ 100 dépanneuses, qui n'ont pas été utilisées. Il y a peut-être une certaine confusion ou peut-être qu'un plan était en cours d'élaboration, mais je ne suis pas au courant.

[Français]

    L'important est que vous n'aviez pas été mis au courant qu'un plan existait.
    Vous avez mentionné que l'utilisation des remorqueuses présentait quelques écueils potentiels. Par exemple, les propriétaires de remorqueuses craignaient de subir des dommages. Ils craignaient peut-être d'être identifiés lors de la mise à exécution du plan. Ils craignaient de ne pas être remboursés pour les dommages.
    Est-ce que cela n'aurait pas été le cas de toute façon, que la Loi sur les mesures d'urgence ait été invoquée ou non?

[Traduction]

    Je ne suis pas certain de bien comprendre la question, mais je vais faire de mon mieux.
    La Loi sur les mesures d'urgence a aidé à atténuer ces préoccupations parce que nous pouvions indemniser ces fournisseurs de services. En ce qui concerne les préoccupations qu'ils avaient avant l'application de la Loi sur les mesures d'urgence, nous avons été en mesure de les atténuer.

[Français]

    Par exemple, en ce qui a trait aux dommages subis ou à la possibilité d'identifier les propriétaires des camions, la Loi sur les mesures d'urgence n'aurait rien changé. Il aurait pu y avoir des dommages et les propriétaires auraient pu être identifiés de toute façon.

[Traduction]

    C'est exact, et à ma connaissance, il n'y a eu aucun rapport de représailles de ce genre.

[Français]

    Je vous remercie.
    Vous avez parlé du fait que les propriétaires de remorqueuses auraient peut-être pu changer d'idée.
    Aviez-vous quand même une marge de manœuvre quant au nombre de remorqueuses que vous aviez réquisitionnées, compte tenu du fait que certains propriétaires auraient pu décider à la dernière minute de ne pas intervenir avec vous?

[Traduction]

    Nous avions des plans d'urgence. On nous a dit qu'avec aussi peu que deux dépanneuses et des policiers qualifiés pour opérer les remorques lourdes, nous pouvions procéder à l'enlèvement des véhicules. Cependant, il aurait fallu beaucoup plus de temps pour atteindre le même objectif.

[Français]

    Par contre, d'après ce que je comprends, cela aurait pu être fait sans la Loi sur les mesures d'urgence.

[Traduction]

    Cela aurait pu être fait, mais pas aussi efficacement.

[Français]

    La Loi sur les mesures d'urgence ne doit être invoquée que si cela est nécessaire; croyez-vous que ce niveau de nécessité a été atteint?

[Traduction]

     Je suis désolé. Voulez-vous savoir si nous avions atteint le seuil?

[Français]

     Était-il nécessaire de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence pour exécuter votre plan?

[Traduction]

    Il n'était pas nécessaire pour nous d'avoir la Loi sur les mesures d'urgence pour avancer.
    Je n'ai pas tenté de déterminer si le gouvernement avait atteint le seuil pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, et je ne suis d'ailleurs pas qualifié pour avoir une opinion à ce sujet.

[Français]

    D'accord. Selon vous, ce n'était pas nécessaire pour la mise à exécution de votre plan.

[Traduction]

    Ce n'était pas nécessaire.

  (2100)  

[Français]

    D'autres moyens légaux ont-ils été considérés par la Police provinciale de l'Ontario pour réquisitionner des remorqueuses? Par exemple, le fait de recourir aux tribunaux dans le but d'obtenir des injonctions à cette fin faisait-il partie de vos plans?

[Traduction]

    En fait, nous étions à mi‑chemin d'une demande d'indemnisation à la province dans le cadre d'un processus d'approvisionnement sur lequel nous pouvons compter en cas d'urgence. C'était en cours. Nous avons pu mettre fin à ce processus et tirer parti de la Loi sur les mesures d'urgence, ce qui était beaucoup plus efficace pour nous.
     Merci, madame Normandin. Votre temps est écoulé.
     Je donne la parole à M. Green.
     Je vais poursuivre dans la même veine que ma collègue du Bloc.
    Vous étiez à mi‑chemin. D'après vous, combien de temps vous aurait‑il fallu en tout pour être opérationnel avec le plan que vous aviez avant que la Loi soit invoquée?
    Désolé, mais j'aurais besoin de plus de précisions.
    Vous étiez à mi‑chemin de l'indemnisation pour obtenir les dépanneuses. Cela me semble être le dernier élément après l'occupation de trois semaines. Il me semble, d'après mon interprétation, que vous nous dites que si vous aviez eu un peu plus de temps, vous auriez pu faire le travail sans la Loi sur les mesures d'urgence.
    Du point de vue du déroulement des opérations, vous avez dit que vous étiez à mi‑chemin. Compte tenu du déroulement prévu dans le plan opérationnel, quand l'opération aurait-elle eu lieu?
    Exactement au même moment. L'opération n'a pas été menée plus tôt en raison de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Vous auriez avancé sans indemnisation complète.
    Nous aurions pris les mesures d'indemnisation que nous aurions pu obtenir par l'entremise de la province. Si cela n'avait pas satisfaisait les fournisseurs de services de remorquage, nous aurions dû nous fier à notre capacité d'utiliser des policiers pour opérer les dépanneuses.
    Quel aurait été le risque?
    Il nous aurait fallu plus de temps pour accomplir notre mission.
    Combien de temps de plus?
    Je ne peux pas dire.
    Je suis sûr qu'on vous a parlé de rapports selon lesquels la police d'Ottawa avait un plan pour déplacer des gens et que, quelques jours auparavant, elle avait mis fin au plan en raison d'un dysfonctionnement interne.
    Quel a été le déroulement de ces événements? Dans vos mémoires... Quand avez-vous appris qu'ils avaient un plan et qu'ils l'ont annulé au dernier moment?
    Je ne suis pas certain de bien comprendre de quoi vous parlez. Quel plan a été annulé au dernier moment?
    Le plan pour dégager la rue Wellington.
    Il y avait un plan pour prendre des mesures positives visant à assurer l'ordre public et pour vider une section. Il y a eu des discussions à ce sujet. Cette question a été réglée au niveau opérationnel et l'opération n'a pas eu lieu. Je n'y ai pas nécessairement participé de près.
    À un moment donné, le ou vers le 9 février — veuillez ne pas m'en tenir rigueur si je me trompe, car je me fie à ma mémoire —, j'ai parlé avec le chef Sloly au sujet des préoccupations soulevées par notre équipe en rapport avec la mise en œuvre d'un plan d'ordre public que nous n'étions pas prêts à mettre en œuvre selon eux.
    Je vais vous éclairer. En tant que membre de l'opposition, j'ai obtenu des renseignements qui m'ont été fournis par l'entremise des médias, comme la plupart des membres du public. Vous affirmez maintenant que le gouvernement n'a jamais eu accès à des plans opérationnels.
    Est‑il juste de dire, étant donné qu'il s'agissait d'une occupation continue depuis trois semaines et que le gouvernement n'a pas eu accès à la planification opérationnelle, que l'invocation de la loi aurait été fondée sur l'information qui a été rendue publique?
    Je ne sais pas si je peux dire cela. Je n'en ai aucune idée...
    Avez-vous informé le gouvernement de certains aspects de l'application de la loi?
    Je n'ai informé le gouvernement d'aucun aspect de l'application de la loi.
    Je suppose que nous pourrons demander à d'autres témoins s'ils ont fait une telle chose, mais si je me fie à votre témoignage, je dirais que le gouvernement n'avait pas été mis au courant à l'époque.
    J'affirme, et je vais le dire officiellement, que je n'ai pas encore nécessairement conclu que tous les outils juridiques avaient été épuisés. Cependant, il y a une question très sérieuse d'ordre pratique, à savoir que le SPO a simplement négligé d'agir pendant trois semaines. Nous avons entendu des témoignages plus tôt aujourd'hui selon lesquels on leur a accordé un pouvoir discrétionnaire en matière d'application de la loi, ce qui a mené à l'anarchie. Ils ont profité du pouvoir discrétionnaire qui, à mon avis, manquait de précision quant à leur capacité d'agir, leur défaut d'agir ou leur volonté d'agir.
    Avez-vous dû envisager des scénarios où vous ne pouviez tout simplement pas obtenir la coopération sur le terrain pour faire avancer les choses, de la même façon qu'ils ont dû annuler leur propre action dans les semaines précédant l'invocation de la Loi?
     Je suis désolé. Je ne comprends pas très bien la question.
     La question est la suivante: pouvez-vous comprendre que le public a l'impression qu'il ne s'agissait pas nécessairement d'un seuil juridique, mais d'un seuil pratique, d'un échec des services de police, monsieur, en ce sens que la police d'Ottawa n'a pas bien planifié, exécuté et assuré l'ordre opérationnel sur le terrain, et cela a finalement mené à l'invocation de la Loi, étant donné que le gouvernement n'était pas au courant de vos plans opérationnels?

  (2105)  

    Je pense que le terme « échec » de la police d'Ottawa est très dur...
    Il y avait un boulet de démolition devant le Cabinet du premier ministre...
    Ces types d'incidents, ces types d'événements, nécessitent une planification méthodique. On ne peut pas les régler du jour au lendemain. C'est l'un des...
    Mais peut‑on les prévenir, monsieur?
    Je ne crois pas que cela aurait pu être complètement évité. Le convoi aurait pu être déplacé et dispersé. Très probablement, il y aurait quand même eu attroupement illégal. Il ne se serait tout simplement pas produit dans le secteur visé, mais plutôt dans d'autres secteurs de la ville.
    C'est juste.
    Merci.
     Monsieur Green, puis‑je vous demander d'occuper le fauteuil?
     Vous avez cinq minutes.
    Je vais poursuivre dans la même veine que M. Green, parce que c'est maintenant une question pour ceux d'entre nous qui viennent à Ottawa chaque semaine: pourquoi trois semaines? Je suis sûre que l'on vous en parle tous les deux régulièrement. Je pense que cela vous donne l'occasion d'aider les gens à comprendre les opérations et leur ampleur.
    Je reviens à la situation de Windsor. Nous avons certainement l'impression qu'elle a eu préséance sur les citoyens d'Ottawa en ce qui a trait au soutien provincial, quel qu'il soit, ou au soutien de votre organisme. Pouvez-vous nous aider à comprendre pourquoi Windsor avait la priorité? Je pense que vous y avez fait allusion dans ce que j'appellerais une mesure chirurgicale pour régler ce problème.
    De toute évidence, il y avait des raisons économiques particulières, mais pour les résidants d'Ottawa qui étaient inactifs pendant trois semaines parce qu'ils ne pouvaient pas se rendre au travail — le Centre Rideau a été fermé —, c'est une question de portée, comme vous le comprendrez, selon ce que vous perdez sur le plan du revenu. Je sais que cela aurait été un gros problème pour les travailleurs de l'automobile à Windsor.
    Pouvez-vous nous aider à comprendre comment vous avez essayé de trouver un juste équilibre? Je comprends que ce n'est pas simple.
    Je vous remercie de cette question, madame la sénatrice.
    La Police provinciale de l'Ontario ne contrôle pas tous ces événements en même temps. Chaque service de police compétent est responsable de l'élaboration et de l'exécution d'un plan dans son secteur de compétence. Nous jouions un rôle de leadership informel parce que nous étions les mieux placés pour coordonner l'accès aux ressources nécessaires.
     Nous avons établi, en collaboration avec d'autres chefs de police, ce que nous avons appelé un « carrefour de l'ordre public ». Il n'y a que 10 équipes d'ordre public dans la province, d'environ 1 000 membres, et il s'agit de membres à temps partiel, alors ils ne sont jamais tous disponibles en même temps. Chaque membre d'une équipe d'ordre public en uniforme est un agent de police de première ligne qui travaille dans une voiture de police et qui provient d'une collectivité.
    Il s'agissait d'essayer de coordonner ce que tout le monde devait faire pour atténuer ce qui posait le plus grand risque à ce moment et de déterminer comment nous étions prêts à aller de l'avant. Nous nous attendions à ce qu'il se passe de 5 à 10 jours à Ottawa après l'élaboration d'un plan et avant d'avoir épuisé toutes les possibilités de désescalade: essayer de réduire l'ampleur de la manifestation de sorte que lorsque vous passez à l'application de la force, vous n'avez besoin que de la force minimale requise pour résoudre l'incident.
    Nous sommes liés par le modèle de recours à la force de l'Ontario, comme vous le savez, et la désescalade doit toujours être la priorité absolue. Notre équipe de planification intégrée — qui a été triée sur le volet dans toute la province — d'experts en la matière est arrivée à Ottawa le 9. Le 11, l'équipe a proposé un plan d'action; le 13, ce plan a été accepté; le 15, nous avons confirmé qu'il était prêt à être mis en œuvre, et il restait encore trois jours avant que toutes les ressources soient disponibles et prêtes à être mises en service.
    Ce n'est pas une réponse directe, mais j'espère que cela vous éclaire sur la façon dont nous avons tenté de gérer tout cela.
    C'est utile, mais en version abrégée, pouvez-vous comparer cela à Windsor? Encore une fois, on a signalé qu'au moins 400 agents de la Police provinciale de l'Ontario avaient été déplacés d'Ottawa à Windsor. Vous avez ici l'occasion d'en expliquer la raison.
     Aucun agent de la Police provinciale de l'Ontario n'a été déplacé d'Ottawa à Windsor. Le 11 février, nous avions environ 150 agents de la Police provinciale de l'Ontario à Ottawa. Le 12, il y en avait bien plus de 200. Nous avons maintenu une présence de 200 agents, qui a atteint près de 1 000 au fil des jours. Nous avons envoyé des agents de la Police provinciale de l'Ontario à Windsor pour prêter main-forte, mais ils ne venaient pas d'Ottawa; ils venaient d'autres régions de la province.
    Le 10 février, j'ai lancé un déploiement provincial, ce qui signifie que nous avons laissé tomber toutes les tâches administratives, bon nombre de nos secteurs spécialisés. Tout ce qui n'était pas essentiel à la sécurité immédiate des agents ou à la sécurité publique a été redéployé vers les activités du « convoi de la liberté » partout dans la province, qu'il s'agisse d'équipes d'intervention rapide à différents postes frontaliers, directement à Windsor ou directement à Ottawa...

  (2110)  

     Je vais vous interrompre parce qu'il me reste quatre secondes, mais le fait est que c'est le « convoi de la liberté » d'un bout à l'autre de la province qui est à l'origine de tout cela.
    C'est exact.
    Je donne la parole à la sénatrice Cordy.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je me demande si les divers services de police ou organismes qui étaient à Ottawa ont tiré des leçons sur la façon dont ils devraient dorénavant réagir à des événements semblables.
    Pour revenir au commentaire de la sénatrice Boniface, je pense que beaucoup de gens se demandent pourquoi l'occupation a duré trois semaines. Nous avons tous regardé le convoi se diriger vers Ottawa en provenance de toutes les régions du Canada. Trois semaines, c'est long quand on regarde cela jour après jour. Ensuite, la police dit: « Nous étions prêts à passer à l'action, mais comme la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée, nous n'avons pas vraiment eu le temps de mettre en œuvre notre plan. Si la Loi sur les mesures d'urgence n'avait pas été adoptée, nous serions passés à l'action un jour ou deux plus tard. » Mais l'occupation avait déjà duré trois semaines, trois semaines de torture pour les résidants du centre-ville d'Ottawa.
    C'est difficile à expliquer aux gens. Vous auriez été prêts à passer à l'action en trois semaines plus deux jours sans la Loi sur les mesures d'urgence, mais comment expliquez-vous cela aux Canadiens qui nous regardent lorsque vous dites que vous n'en aviez pas besoin, mais que vous dites ensuite qu'elle a été utile? Le chef de police d'Ottawa a dit que la Loi sur les mesures d'urgence a certes facilité les choses, et vous l'avez également laissé entendre dans vos commentaires.
    J'essaie d'être très clair quant à mon opinion sur la Loi sur les mesures d'urgence.
    Était-elle théoriquement nécessaire en droit? Non. A‑t‑elle été utile? A‑t‑elle donné des outils qui ont aidé la police? Oui. Je pense que c'est la meilleure façon de résumer mon opinion sur la Loi sur les mesures d'urgence. Je sais que le Comité va se pencher sur la question de savoir si le projet de loi répond au critère ou au seuil juridique, mais je pense que c'est la meilleure façon de le résumer.
    Pour ce qui est du moment choisi, de ce qui est perçu comme un retard, je peux très bien imaginer à quel point cela a dû être frustrant pour les résidants d'Ottawa, mais je demande aux Canadiens d'examiner de près les perturbations civiles qui ont eu lieu partout dans le monde et la façon dont les services de police y ont réagi. Il y a eu des blessures graves; il y a eu des morts; il y a eu des émeutes. Nous n'avons qu'à regarder ce qui se passe au sud de la frontière pour voir comment la police peut parfois réagir trop rapidement.
    Le moment choisi n'était pas idéal. Il ne l'est jamais. Si la police d'Ottawa était intervenue plus tôt et que quelqu'un avait été grièvement blessé ou tué, nous assisterions à un autre type d'enquête. À mon avis, la police et les habitants d'Ottawa ne pouvaient sortir gagnants de cette situation.
    Il est tellement regrettable qu'on accorde autant d'attention à l'action ou à l'inaction perçue de la police, par opposition aux gestes des manifestants, qui sont les responsables d'une situation dont la ville d'Ottawa et tout le pays ont été victimes.
    C'est assurément une source de frustration, j'en conviens.
    J'aimerais aussi savoir si la police était préoccupée, avait-elle des préoccupations au sujet des enfants — M. Naqvi en a parlé — qui se trouvaient dans des situations dangereuses, de jeunes enfants placés entre la police et les manifestants? Nous avons vu au moins un jeune enfant qui souffrait d'engelures. Y avait‑il des préoccupations au sujet du froid qui régnait à Ottawa en février, des enfants qui dormaient dans des véhicules, des émanations de diesel et des klaxons entendus jour et nuit?
    J'ai cru vous entendre dire plus tôt que la Loi sur les mesures d'urgence avait au moins limité les enfants à l'intérieur de la zone. Est‑ce exact?
    La Loi sur les mesures d'urgence restreignait la présence d'enfants dans la zone. Encore une fois, je ne veux pas trop compliquer les choses, mais il existe des lois provinciales et fédérales sur la mise en danger des enfants. Je sais que la police d'Ottawa a reçu l'aide des services à l'enfance et à la famille et qu'elle s'est occupée de ces questions, mais je n'ai pas ce genre de détails en tant que service de police provincial. Ce niveau de détail doit vraiment venir de la police d'Ottawa.
    Merci.

  (2115)  

     Merci, monsieur le président.
    Chers collègues, il nous reste quelques minutes. Nous avons tous convenu, je pense, que nous aurions un tour de questions de trois minutes.
    Nous allons commencer par M. Brock.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le commissaire, on a dit qu'il y avait beaucoup d'information erronée, de désinformation et de fausses informations entourant le groupe, avant son arrivée et pendant qu'il était ici. Êtes-vous d'accord avec cette affirmation?
    Oui, je suis d'accord avec cette affirmation.
    L'un de vos employés, le chef Pat Morris, partage également ce sentiment. En fait, il a qualifié les représentations politiques et médiatiques du convoi d'« exagérations » et de « sensationnalisme ». Le premier ministre, par exemple, a qualifié les participants aux convois de « minorité marginale » qui ne devrait pas être tolérée. Vous avez connaissance de ces commentaires.
    Oui, je les ai entendus.
    Plus tard, il les a traités de « misogynes », de « racistes » qui ne devraient pas être tolérés.
    Lors de son témoignage devant la commission, M. Morris a affirmé le contraire: son unité a déterminé que les participants avaient « une multitude de griefs » et semblaient être principalement des citoyens ordinaires bénéficiant d'un « appui important » à l'échelle du pays. Êtes-vous d'accord?
    Je m'en remets certainement au surintendant Morris pour son analyse plus approfondie des participants à la manifestation.
    Bien.
    Je peux vous dire, monsieur le commissaire, que M. Barry MacKillop, administrateur général du CANAFE, abonde dans le même sens. Connaissez-vous cette personne?
    Oui, je connais Barry MacKillop.
    Il a indiqué, dans un témoignage précédent devant le Comité, qu'il n'y avait aucune preuve de financement illégal du convoi et que la plupart des donateurs semblaient être des gens ordinaires qui en avaient assez des restrictions liées à la COVID. En convenez-vous?
    Je conviens que c'est ce qu'a dit M. MacKillop.
    Bien.
    Vous conviendrez avec moi qu'un autre exemple des dangers de la désinformation s'est produit le 6 février, lorsqu'un habitant d'un appartement du centre-ville a publié un fil de discussion sur Twitter dans lequel il décrivait deux hommes se disant manifestants, entrés dans son immeuble, entourant de ruban adhésif les poignées de porte du hall d'entrée, puis essayant de mettre le feu dans un acte incendiaire et meurtrier.
    Êtes-vous au courant de cet incident?
    Non, monsieur.
    Ce fil est devenu viral, repris notamment par la classe politique et les journalistes. L'homme arrêté par le SPO a confirmé que l'incendie n'avait absolument rien à voir avec les manifestants, que l'auteur avait tout inventé.
    Toutefois, cela n'a pas empêché les politiciens et les médias de l'exagérer, y compris des membres du Comité. En fait, l'ancien maire Watson a emboîté le pas en affirmant que cet événement démontrait clairement « l'intention malveillante » du convoi de camionneurs. Les journalistes ont dit que c'était « terrifiant » et « horrifiant ». Le chef du NPD, Jagmeet Singh, et le député Charlie Angus ont cité cette histoire comme preuve que le manifestant voulait « renverser le gouvernement ». CBC Radio a invité l'auteur du canular à sa radio. L'ancien ministre...
    Monsieur Brock, votre temps est écoulé.
    Merci.
    Madame Bendayan, vous avez trois minutes.
    Merci, madame la présidente.
    La violence, et même l'incendie criminel dont mon collègue, M. Brock, a parlé ne se seraient probablement pas produits si nous n'avions pas été une ville assiégée à Ottawa à l'époque.
    Monsieur Carrique, j'aimerais vous poser une question au sujet de quelque chose que vous avez dit plus tôt. Si j'ai bien compris votre témoignage, vous avez dit que sans la Loi sur les mesures d'urgence, vous auriez probablement eu des policiers qui auraient conduit des dépanneuses. Cela aurait pris plus de temps, mais vous ne savez pas exactement combien de temps. Par conséquent, la Loi sur les mesures d'urgence a permis de régler la situation plus rapidement.
    Non. Je pense que je me suis peut-être mal exprimé ou que vous avez mal compris. Je n'ai pas dit que c'est ce qui se serait passé en l'absence de la Loi sur les mesures d'urgence. J'ai dit que nous avions un plan d'urgence, au cas où nous nous trouverions dans une situation où les conducteurs de dépanneuses refuseraient de fournir les services que nous leur demanderions.
    Ce plan d'urgence aurait pris plus de temps.
    Ce plan d'urgence aurait pris plus de temps, oui.
    Vous avez également indiqué dans un témoignage précédent que vous prévoyiez que le blocus durerait entre cinq et dix jours, alors qu'en fait, il a duré trois semaines.
    Non. Encore une fois, je suis désolé si vous avez mal compris mon témoignage. Je n'ai jamais dit que le blocus ou la manifestation durerait de 5 à 10 jours. Nous avions prévu qu'il faudrait de 5 à 10 jours pour exécuter un plan opérationnel.

  (2120)  

    Alors, pourquoi n'avez-vous pas commencé plus tôt? Les gens d'Ottawa ont attendu trois semaines pour retrouver l'accès à leur ville et à leurs libertés. Je pense que tout le monde ici a de la difficulté à comprendre pourquoi des mesures semblent avoir été prises seulement vers le week-end du 10 février.
     Je déplore que vous ayez cette impression. D'abord et avant tout, je ne suis pas le chef du service de police compétent. J'ai un mandat provincial pour aider le service de police compétent lorsqu'on me le demande.
    Nous avons immédiatement fourni de l'aide, à partir du 28 janvier, pour fournir les ressources demandées — des officiers de première ligne à l'ordre public, au commandant de l'intervention critique, aux membres de l'équipe de liaison provinciale — jusqu'à ce que nous participions à l'élaboration du plan opérationnel.
    Il vaut mieux poser ces questions à la police d'Ottawa, avec tout le respect que je vous dois.
    C'est donc un échec de la police d'Ottawa.
    Je n'ai pas dit que c'était un échec de la police d'Ottawa. J'ai déjà fait part de mes sentiments sur ce à quoi ressemble un échec. Il s'agit de blessures graves, voire mortelles, et de dommages graves aux infrastructures essentielles.
    Les ambulances n'ont pas pu se rendre à l'hôpital, monsieur. Les patients atteints de cancer n'ont pas pu se faire traiter. Il y a eu des incidents de violence dans les rues d'Ottawa, et les gens avaient peur de quitter leur maison.
    N'est‑ce pas suffisant?
    Suffisant pour quoi?
    Apparemment, ce n'était pas suffisant pour vous, monsieur. Je ne comprends pas quel est, selon vous, un niveau de violence suffisamment important.
    Vous ne m'avez pas demandé ce qui était important ou violent; vous m'avez demandé si c'était un échec de la police d'Ottawa. Je ne suis pas d'accord pour dire que c'était un échec de la police d'Ottawa.
    Est‑ce parce que personne n'est mort?
    La police d'Ottawa était prise à partie. Elle était débordée. Elle avait atteint ses limites. Elle avait besoin d'aide pour résoudre...
    Madame Bendayan, votre temps est écoulé.
    Et vous n'étiez pas là.
    Nous étions là. Vérifiez les faits.
    Madame Normandin, vous avez trois minutes.

[Français]

     Commissaire Carrique, quelle était la qualité de la communication entre l'OPP et le gouvernement, de façon générale? Sur une échelle de satisfaction, était-elle très bonne, bonne, moyenne, mauvaise ou très mauvaise, par exemple?

[Traduction]

    Nous n'avons eu aucune communication directe avec le gouvernement fédéral, mais nous avons chargé l'inspecteur Beaudin, qui dirige notre équipe de liaison provinciale, de tenir des consultations avec le sous-ministre fédéral, Rob Stewart.
    Je relève du ministère du Solliciteur général au niveau provincial. J'ai une autonomie administrative et opérationnelle complète; cependant, j'ai l'obligation de fournir une connaissance de la situation au sous-solliciteur général, ce que j'ai fait tout au long du déroulement du convoi.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Un peu plus tôt, vous m'avez répondu que le gouvernement n'était pas au courant du plan que vous aviez mis en place le 13 février. Est-ce exact?

[Traduction]

    À ma connaissance, le gouvernement n'avait pas une connaissance approfondie du plan le 13 février. Il est certain qu'aucune entité du gouvernement n'a reçu de copie du plan de la Police provinciale de l'Ontario.

[Français]

    Vous avez mentionné que la Loi sur les mesures d'urgence avait notamment facilité le recours aux remorqueuses. Le gouvernement ne pouvait pas savoir quel effet l'invocation de la Loi allait avoir sur votre plan, puisqu'il n'était probablement pas au courant de ce dernier.

[Traduction]

    Je ne sais pas quelles autres consultations le gouvernement a menées. Je suppose qu'il connaissait certainement le nombre de camions qui devaient être remorqués, et il y a eu beaucoup de commentaires publics au sujet des défis que cela posait pour la police. Il serait injuste de ma part de me perdre en hypothèses sur ce qu'il savait ou ne savait pas.

[Français]

     Ne vous a-t-il jamais demandé comment la Loi pouvait vous aider et si elle était nécessaire?

[Traduction]

    Pas à moi spécifiquement, non.

[Français]

    D'accord.
    Avez-vous une raison de croire que le gouvernement pouvait savoir quel effet bénéfique la Loi pouvait avoir pour une opération quelconque?
    De façon générale, les gouvernements sont-ils au courant de la planification des opérations?

[Traduction]

    Selon les consultations qui ont été menées et les outils qui ont été fournis, je dois croire qu'ils ont reçu de bonnes directives en ce qui concerne les outils qui seraient efficaces du point de vue des services de police. Je considère les outils qui ont été fournis comme des outils efficaces pour l'application de la loi.

  (2125)  

[Français]

    De ce que je comprends, dans les cas où des consultations ont eu lieu, vous n'étiez pas impliqué.

[Traduction]

    Pas moi personnellement, non, mais je ne peux pas parler des autres consultations qui ont peut-être eu lieu.

[Français]

    Je vous remercie, commissaire Carrique.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez trois minutes.
    Avez-vous eu des préoccupations au sujet de l'organisation bien huilée de la chaîne d'approvisionnement, ainsi que de l'infiltration du mouvement par des gens haut placés au sein de la Deuxième Force opérationnelle interarmées, du service de sécurité du premier ministre et d'autres services militaires et anciens services de police?
     De façon générale, oui, j'étais préoccupé par les signalements de militaires et de policiers en service, démissionnaires ou retraités qui faisaient partie du convoi.
     Est‑il juste de dire que ce genre de connaissances, la connaissance approfondie des opérations et des tactiques de la police, créait un scénario dans lequel cette occupation et ce mouvement en particulier savait parfois à l'avance à quoi s'attendre? J'ai parlé de la façon dont les manifestants ont utilisé des jerricans et se sont servis du stade de baseball pour leur chaîne d'approvisionnement logistique.
    D'après votre expérience, avez-vous déjà vu quelque chose d'aussi bien organisé?
    Je n'ai jamais vu quoi que ce soit d'aussi bien organisé.
    Pour que ce soit bien clair, il n'y a aucune preuve de cela, mais j'ai du mal à accepter que ce soit simplement une coïncidence ou par hasard que la police ait dû étirer ses forces entre les deux points les plus éloignés, entre Ottawa et le sud de l'Ontario, à Windsor. Je ne pense pas que ce soit le fruit du hasard.
    Il était stratégique de disperser vos forces et de vous attirer dans toutes sortes de directions différentes.
    Je n'en ai aucune preuve, mais du point de vue stratégique...
    Oui, c'est logique.
    Dans un rapport de police et dans une évaluation du renseignement préparée par la police d'Ottawa, il y avait une section sur les personnes d'intérêt sur laquelle j'ai attiré l'attention, parce que la différence entre les accusations relatives aux armes et la présence, ou la présence potentielle d'armes a suscité beaucoup d'inquiétudes. Parlons un peu des points sur lesquels la police a bien travaillé, à mon avis. Il s'agit des personnes d'intérêt dont on craignait qu'elles aient accès à des armes à feu, certaines d'entre elles ayant déclaré, dans des sources ouvertes, qu'elles avaient l'intention d'apporter des armes à feu. Dans au moins deux cas, des personnes situées à l'extérieur d'Ottawa — et on a dit souvent à l'extérieur de l'Ontario — ont été rencontrées par la police, qui a saisi des armes à feu dans l'intérêt de la sécurité publique.
    Lorsque les services de police saisissent des armes à feu dans l'intérêt de la sécurité publique, des accusations sont-elles portées?
    Elles peuvent être portées, mais elles ne le sont pas toujours.
    Même si des accusations n'ont pas été portées, cela ne change rien au fait que, dans deux cas, les services de police ont jugé que la menace était suffisamment crédible pour saisir les armes, n'est‑ce pas?
    C'est ainsi que je l'interprète.
    Je suis désolé, mais je ne suis pas au courant de ce rapport.
    Il provient d'un groupe mixte de renseignement. Il a été soumis.
    Mais vous admettrez que c'est le témoignage que j'ai sous les yeux.
    Oui.
    Cela étant dit, si les armes n'avaient pas été saisies, y avait‑il des scénarios pour lesquels vous étiez prêts à faire face à des factions armées dans le cadre de l'occupation d'Ottawa?
    Oui.
     Monsieur Green, puis‑je vous céder le fauteuil?
    Oui, bien sûr.
    Vous avez trois minutes. La parole est à vous.
    Monsieur le commissaire, j'aimerais revenir à la nature stratégique de ce que nous appellerions la menace d'un bout à l'autre de la province. Compte tenu de votre vaste expérience dans ce domaine, avez-vous eu l'impression que ces opérations étaient très bien connectées sur le plan de l'information et qu'elles étaient planifiées stratégiquement en conséquence?
    Je ne sais pas si c'était bien planifié et stratégique, ou plutôt organique. Je crois que diverses personnes sont devenues des leaders, à divers moments, du « convoi de la liberté ». Je pense que les dirigeants identifiés ont très rapidement perdu le contrôle des autres factions au sein du groupe.
    Lorsque le convoi est parti après l'opération — dont je félicite, encore une fois, vos membres —, un certain nombre de camions se trouvaient à l'extérieur de la ville d'Ottawa, ce qui a causé beaucoup d'inquiétudes aux citoyens d'Ottawa, qui se demandaient s'ils reviendraient.
    Pouvez-vous me dire combien de temps il a fallu pour que ces camions finissent par partir, et quel genre de surveillance vous avez peut-être exercée à cet égard?
    Nous exercions une surveillance sur les adresses d'intérêt. Il y avait un certain nombre d'endroits où des camions et des particuliers se réunissaient, et nous les surveillions constamment. Je ne peux pas vous dire de mémoire la date exacte, mais il s'est écoulé un certain nombre de semaines avant que nous soyons convaincus que la menace avait été atténuée et que les risques avaient été gérés.

  (2130)  

    Je veux vous laisser le dernier mot.
    Beaucoup de questions ont été soulevées au sujet des camions qui sont arrivés ici de diverses régions du Canada, et beaucoup de gens ont demandé pourquoi on ne les avait pas arrêtés plus tôt. Étant donné que cela relève de votre compétence, pouvez-vous aider le public à comprendre quels étaient vos pouvoirs dans ces circonstances et quelles décisions vous avez prises à cet égard?
     Oui, certainement.
    Pendant que le convoi parcourait la province, les policiers n'avaient aucune justification légitime pour l'arrêter à un moment donné. Ils n'avaient aucun motif raisonnable et probable d'identifier une personne en particulier qui était sur le point de commettre une infraction criminelle, ce qui constitue un seuil important, comme les Canadiens s'y attendraient, j'en suis sûr. Même s'il y avait beaucoup d'information dans les médias sociaux, il était toujours possible qu'il s'agisse d'une manifestation légale. Les policiers n'avaient donc aucune raison légitime d'arrêter le convoi à un moment donné, avant son arrivée à Ottawa, en ayant des motifs raisonnables de croire qu'un acte criminel pourrait être commis.
    Je vais reprendre le fauteuil.
    Voilà qui conclut notre soirée, chers collègues. Permettez-moi de profiter de l'occasion pour remercier le commissaire et le sous-ministre d'avoir participé à la dernière heure et demie. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir fait le voyage depuis la belle ville d'Orillia.
    La séance est maintenant terminée. Merci.
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