LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité mixte permanent des langues officielles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 7 mai 2002
¹ | 1535 |
La coprésidente ( la sénatrice Shirley Maheu (Rougemont, Lib.)) |
M. Daniel Boucher (président et directeur général, Société franco-manitobaine) |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
M. Daniel Boucher |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu--Nicolet--Bécancour, BQ) |
¹ | 1550 |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ontario, Lib.) |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
¹ | 1555 |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
º | 1600 |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Louis Plamondon |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Gérald Beaudoin (Rigaud, PC) |
M. Daniel Boucher |
º | 1605 |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
La sénatrice Viola Léger (Nouveau-Brunswick, Lib.) |
º | 1610 |
M. Daniel Boucher |
La sénatrice Viola Léger |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Raymond Setlakwe (Les Laurentides, Lib.) |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Raymond Setlakwe |
M. Daniel Boucher |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Mme Yolande Thibeault (Saint-Laurent, Lib.) |
º | 1615 |
M. Daniel Boucher |
Mme Yolande Thibeault |
M. Daniel Boucher |
Mme Yolande Thibeault |
M. Daniel Boucher |
Mme Yolande Thibeault |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.)) |
º | 1620 |
M. Daniel Boucher |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
M. Daniel Boucher |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
M. Daniel Boucher |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
M. Louis Plamondon |
M. Daniel Boucher |
M. Louis Plamondon |
M. Daniel Boucher |
º | 1625 |
M. Louis Plamondon |
M. Daniel Boucher |
M. Louis Plamondon |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
L'hon. Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
º | 1630 |
M. Daniel Boucher |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Daniel Boucher |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
La sénatrice Viola Léger |
M. Daniel Boucher |
M. Louis Plamondon |
La sénatrice Viola Léger |
M. Louis Plamondon |
La sénatrice Viola Léger |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
M. Jack Jedwab |
º | 1635 |
º | 1640 |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
M. Jack Jedwab |
º | 1645 |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
º | 1655 |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Jack Jedwab |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Jack Jedwab |
» | 1700 |
Le sénateur Jean-Robert Gauthier |
M. Jack Jedwab |
» | 1705 |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
M. Louis Plamondon |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
M. Jack Jedwab |
» | 1710 |
Le coprésident (M. Mauril Bélanger) |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
La sénatrice Viola Léger |
M. Jack Jedwab |
» | 1715 |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
La sénatrice Viola Léger |
M. Jack Jedwab |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Jack Jedwab |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Jack Jedwab |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Jack Jedwab |
» | 1720 |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
M. Jack Jedwab |
Le sénateur Gérald Beaudoin |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
» | 1725 |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
M. Louis Plamondon |
M. Jack Jedwab |
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu) |
CANADA
Comité mixte permanent des langues officielles |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 7 mai 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1535)
[Français]
La coprésidente ( la sénatrice Shirley Maheu (Rougemont, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Bienvenue, monsieur Boucher. M. Boucher est le président de la Société franco-manitobaine.
[Traduction]
Nous accueillons également M. Jack Jedwab, directeur général de l'Association d'études canadiennes.
Bienvenue, monsieur Jedwab.
[Français]
Monsieur Boucher, voulez-vous commencer votre présentation?
M. Daniel Boucher (président et directeur général, Société franco-manitobaine): Ça va. Merci beaucoup.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): On va vous donner 10 minutes pour faire votre présentation. Ensuite les sénateurs et les députés auront sept minutes chacun pour vous poser des questions.
M. Daniel Boucher: Bonjour, chers députés, sénateurs et sénatrices. Il me fait énormément plaisir d'avoir été invité ici aujourd'hui pour parler d'un dossier très important pour notre communauté, évidemment, soit le dossier de l'immigration francophone dans nos communautés et le lien avec la Partie VII de la Loi sur les langues officielles.
Ça fait trois ans que je suis à la Société franco-manitobaine et j'aimerais féliciter les coprésidents de cette belle initiative, car je pense que c'est peut-être la première fois que je fais une présentation devant le comité mixte. J'attends depuis longtemps, alors ça me fait plaisir d'être ici. J'ai l'intention d'en faire d'autres. Merci beaucoup.
J'aimerais d'abord soulever quelques points et ensuite, lorsque nous aurons un échange, j'aimerais avoir l'occasion de répondre à vos questions. Je sais que vous avez rencontré les gens de la fédération hier, M. Arès, M. Barrette et Mme Côté, et je sais que vous avez eu des échanges très intéressants avec eux. J'ai aussi eu la chance de parcourir le document qui a été préparé par la fédération. On est d'accord sur les points qui ont été soulevés par la fédération. Je vais donc tenter de prendre un angle un peu différent.
J'ai aussi eu l'occasion de lire les propos tenus lors de votre rencontre avec M. Coderre le 29 avril dernier. Je pense qu'on a pu déceler une grande volonté du ministre de nous appuyer dans cette démarche très importante pour notre communauté.
Comme vous le savez, le Manitoba est reconnu comme une terre d'accueil en raison de sa pluralité ethnique et culturelle. Le Manitoba a à coeur d'accueillir les personnes immigrantes et de leur fournir un tissu social et économique dans lesquels elles pourront s'épanouir. Riche et dynamique, le Manitoba francophone est un lieu intéressant pour les nouveaux arrivants d'expression française désirant s'établir en Amérique du Nord. La Société franco-manitobaine désire contribuer au développement de sa communauté en facilitant un accueil réussi des immigrants francophones au Manitoba.
Récemment, nous avons fait une consultation dans notre communauté et nous avons dressé des pistes d'orientation dont je vais vous parler un peu aujourd'hui. Comme vous le savez, le Manitoba a un modèle de congestion dans le domaine de l'immigration. Pour nous, c'est un très bon modèle. Nous avons établi une excellente collaboration avec la province et nous comptons travailler de près avec Citoyenneté et Immigration Canada pour vraiment renforcer notre partenariat. Ce qui est le plus important ici, c'est de trouver des façons de venir nous appuyer davantage dans cette démarche très importante.
Nous trouvons qu'il faut absolument travailler ensemble, le fédéral, le provincial et les municipalités, et plus particulièrement la Ville de Winnipeg. Le maire de notre ville a indiqué à maintes reprises l'importance de l'immigration pour Winnipeg en particulier, et la communauté francophone fait partie de cela. Nous travaillons avec lui pour justement dresser un plan d'action avec les autres partenaires dans ce dossier très important.
Nous avons aussi certains joueurs qui nous aident, mais nous avons évidemment la Partie VII et l'article 41 et tous les ministères qui peuvent se joindre à cela. Nous avons le plan que le ministre Dion est en train de préparer. Nous avons la commissaire aux langues officielles qui nous appuie aussi dans cette démarche et qui considère cette démarche comme un élément important pour l'épanouissement de nos communautés.
J'aimerais vous parler un peu de l'immigration dans un contexte très général. Les immigrants ont contribué au développement social et culturel du pays, comme vous le savez, et à un grand rayonnement des arts, à l'avancement de la recherche et de la technologie. Le Canada est aujourd'hui un pays multiculturel et, évidemment, bilingue axé sur le respect entre les différents groupes ethniques d'origines multiples, d'un océan à l'autre.
Au Manitoba, surtout depuis 1999, de nouveaux arrivants d'expression française se présentent en plus grand nombre. C'est évidemment un nouveau défi que d'intégrer et, comme ils aiment le dire, d'inclure ces gens-là dans nos communautés.
En septembre et en octobre 2001, la Société franco-manitobaine a obtenu le mandat de faire lire un document que nous avons fait circuler dans notre communauté et qui s'intitule Agrandir l'espace francophone. Ce document vise cinq actions. Une des actions visées est l'intégration et l'inclusion proactive des personnes francophiles et des immigrants.
Les avantages de l'immigration pour nous sont le maintien et le développement de la langue; un plus grand accès aux services en français, ce qui nous donne une plus grande masse critique; une meilleur main-d'oeuvre; l'enrichissement de la culture; un plus grand nombre d'élèves inscrits à nos écoles françaises; l'augmentation des services en français, tant au gouvernement qu'ailleurs; de nouvelles structures de services.
Pour ce qui est de la qualité des immigrants, ils viennent avec un patrimoine personnel, une bonne scolarité, en général, d'excellentes compétences, un esprit d'initiative et de débrouillardise, un désir d'apprendre, une expertise dans des domaines où il y a pénurie dans notre communauté. Donc, il y a un véritable intérêt à accueillir de nouveaux immigrants francophones.
Nous avons un noyau très important de francophones à Saint-Boniface et nous travaillons de près avec les partenaires dans notre communauté pour vraiment assurer le succès de cette démarche. Le Manitoba est souvent recommandé car Winnipeg est perçue comme une petite ville possédant tous les avantages d'une grande ville. Nous avons aussi une communauté francophone et bilingue importante.
Nous avons décidé ensemble, comme communauté, de participer à cette grande initiative, à ce grand défi, et je dois vous dire que c'est un grand défi. Ce n'est pas évident, à ce moment-ci, de réussir sans l'appui de tous les partenaires, qu'il s'agisse de partenaires communautaires, de partenaires gouvernementaux ou autres.
Nous avons recueilli les commentaires de l'ensemble de notre communauté et nous avons posé une question très simple à notre communauté: «Êtes-vous prêts à embarquer dans cette démarche importante?» La réponse a été un oui très catégorique. Maintenant, il faut avoir les outils et les mettre en place pour réussir.
Cependant, nous avons constaté certaines choses sur lesquelles vous pourrez probablement vous appuyer de façon plus concrète. Il y a un manque de promotion de nos communautés. Quand je parle de promotion, je parle des ambassades à l'extérieur où la promotion du Canada telle qu'il est n'existe pas. C'est un problème. On fait la distinction entre le Québec et ce qu'on appelle—c'est une expression que je déteste—le Canada anglais. Or, ce n'est vraiment pas la réalité canadienne. Cela nous dérange. Nous aimerions changer au moins cette terminologie, ce qui nous aiderait énormément, et faire beaucoup plus la promotion de nos communautés. C'est une chose à laquelle nous aimerions travailler avec le ministère des Affaires extérieures, par exemple, et le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Il y a peut-être d'autres joueurs. Évidemment, notre province aussi serait très intéressée à travailler avec le gouvernement fédéral sur cette initiative.
Nous avons constaté des choses très importantes par rapport à l'immigration. Il y a un manque d'information quant à la localisation des quartiers sécuritaires, aux logements inoccupés, aux organismes multiples pour la recherche d'emploi, aux cours d'anglais et bien d'autres choses. Il y a un grand manque d'information quand les gens arrivent ici.
Il y a un manque d'accompagnement, de soutien des familles et des personnes qui arrivent. C'est quasi inexistant à ce moment-ci.
Le climat, comme vous le savez, n'est pas facile. Plusieurs de ces arrivants arrivent de pays où il fait chaud. Au Manitoba, il fait plus ou moins chaud.
Leurs diplômes constituent aussi un problème. Je sais que la fédération en a parlé et que vous en avez parlé hier. Les diplômes ne sont pas nécessairement reconnus.
Il n'y a aucune formation en français sur le langage technique. Il faut compter au moins deux ans pour apprendre l'anglais, par exemple, dans une communauté comme la nôtre, parce que nous constituons 5 p. 100 de la population.
Il y a un manque de compréhension mutuelle des cultures, surtout dans le cadre de l'emploi, où les habitudes peuvent diverger.
Alors, il y a plusieurs différents défis auxquels on doit faire face. Il y a des pénuries de logements. Encore une fois, on peut avoir des partenariats entre le fédéral et le provincial. Il y a des problèmes d'emplois reliés, comme je l'ai dit tout à l'heure, à la connaissance de l'anglais, à la reconnaissance des diplômes, etc.
Ce sont des défis auxquels nous nous attaquons de front dans notre communauté. Ce sont des défis auxquels la communauté a décidé de s'attaquer avec l'aide des partenaires communautaires. Ce qu'on recherche à ce moment-ci et ce qu'on va faire chez nous avec l'appui de la province, c'est mettre sur pied un organisme d'accueil. C'est très important pour nous. On veut entreprendre aussi des initiatives de formation à distance. On aimerait que cela se passe sur deux ans. On constate que les gens qui viennent ici devraient recevoir une formation linguistique. Par exemple, on devrait leur donner une formation sur la façon d'obtenir leur certification, leur diplôme plus rapidement.
¹ (1540)
On devrait faire cela avant que les gens arrivent parce que quand ils arrivent, ils ont des moyens limités, et c'est très difficile pour eux de s'adapter. Nous disons que si le pays veut investir dans l'immigration, il faudrait investir avant que les gens arrivent et s'assurer qu'ils soient à l'aise lorsqu'ils arrivent ici afin qu'ils restent dans nos communautés. Quand on vit dans une communauté de langue officielle comme les nôtres, les défis sont d'autant plus grands, étant donné les populations, etc. Alors, pour nous, c'est absolument essentiel.
On insiste pour que les gouvernements aient un dialogue avec les corporations professionnelles ou les institutions d'éducation sur la reconnaissance des acquis et des diplômes. Je le répète parce que c'est très important. Personnellement, j'ai rencontré des gens qui ont des diplômes exceptionnels, des gens qui ont des talents extraordinaires. Ces gens-là, malheureusement, arrivent ici et, comme vous le savez, ils doivent occuper des emplois qui sont vraiment difficiles. Souvent ces gens-là ne restent pas dans nos communautés. Pour nous, c'est d'autant plus un défi au niveau linguistique. Les francophones qui viennent chez nous et qui ont le fardeau du logement et le fardeau de la langue à surmonter vont simplement vers le Québec, parce qu'au Québec, au moins, ils n'ont pas le fardeau linguistique. Au moins, ils peuvent être soulagés de ce côté-là.
Nous avons besoin d'appuis pour surmonter ce fardeau. Nous ne sommes pas en compétition avec le Québec. Nous comprenons que le Québec présente un attrait tout à fait naturel. Cela ne nous pose aucun problème. Je pense qu'il est assez clair qu'on ne se prend pas pour d'autres, mais ce qu'on veut, c'est avoir toutes les conditions possibles pour réussir à accueillir et à garder les immigrants.
Je ne vais pas couvrir tous les détails de ma présentation, mais, comme je l'ai dit tout à l'heure, on compte sur votre appui, on compte sur le partenariat fédéral-provincial. Il y a un groupe de travail, un comité conjoint, qui se réunit et on compte beaucoup sur le travail de ce comité pour trouver des pistes de solution. Nous comptons aussi sur vous, députés et sénateurs, pour nous aider à faire avancer ce dossier important.
Merci beaucoup.
¹ (1545)
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur Boucher.
Monsieur Plamondon, vous avez sept minutes.
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu--Nicolet--Bécancour, BQ): Monsieur Boucher, je vous trouve optimiste. La réalité de l'immigration canadienne a beaucoup changé au cour des cinq dernières années. On sait que présentement, par exemple, 90 p. 100 de l'immigration passe par le bureau de Hong Kong et par le bureau de Pékin. Donc, le seul contact que les gens de là-bas ont avec une autre langue, c'est l'anglais, et c'est peu. Dans ces régions-là, nos fonctionnaires doivent donner la priorité à la réunification des familles. Cela ne veut pas seulement dire le mari et la femme, mais aussi le père, la mère, etc.
Lors de ma visite là-bas, il y a un mois, une fonctionnaire m'a dit qu'elle passait son temps, pour le moment, à faire entrer au Canada des gens de 65 ans et plus qui sont des tantes et des oncles. L'attente est de trois à quatre mois. En vertu de la réunification des familles, eux n'ont pas l'obligation de parler ni le français ni l'anglais. Donc, pour eux, les priorités sont Vancouver et Toronto. Ils vont sans doute aller vivre dans la langue chinoise ou dans la langue coréenne sans même apprendre quelques mots d'anglais, ou si peu.
Si c'est difficile de les intégrer aux communautés de langue anglaise, imaginez quelle est la situation pour les communautés de langue française. C'est encore plus difficile pour une région comme la vôtre.
Au Québec, on a des bureaux spéciaux, c'est-à-dire qu'on a des bureaux parallèles à ceux du gouvernement canadien, pour amener des immigrants, surtout des investisseurs. Parmi ceux qui viennent, 70 p. 100 fuient ensuite le Québec pour aller à Toronto ou à Vancouver. La plupart de ceux qui restent au Québec vivent en anglais dans la région de Montréal. On a donc un très grand problème d'intégration de ces immigrants dont 90 p. 100 viennent de cette région du globe.
Quant aux priorités que les provinces peuvent donner en ce qui a trait aux travailleurs spécialisés, c'est souvent une astuce que de passer par Terre-Neuve, par l'Île-du-Prince-Édouard ou par le Manitoba pour dire qu'ils ont l'intention d'aller y travailler, alors qu'un mois plus tard ils en sont repartis.
Il nous reste les réfugiés. Les réfugiés viennent ici sur le conseil de leur lobbyiste, parce que les immigrants de cette région du monde passent tous par des lobbyistes. Ils payent pour entrer au Canada. Supposément, ils croient que c'est nécessaire. Tous le font. Or, les lobbyistes leur donnent des conseils sur la façon de devenir des réfugiés. Souvent, ils deviennent des réfugiés politiques en arrivant ici, et dans 97 p. 100 des cas, on les accepte comme réfugiés politiques en moins de 15 mois, pour des considérations humanitaires. Ayant été reçus, généralement, ils retournent à leur propre ambassade, l'ambassade de Chine ou celle de la Corée, surtout celle de Chine, et ils demandent un permis pour retourner là-bas. Si bien qu'on se retrouve avec des Chinois ayant un passeport canadien en Chine. Ils sont environ 100 000. Pour ce qui est de l'immigration française, par exemple, 50 000 Libanais vivent au Liban avec un passeport canadien. Donc, le truc de se faire passer pour réfugié est connu.
Il reste les investisseurs. Or, quand ils obtiennent le fameux permis, ils retournent faire des affaires surtout dans leur pays. Donc, l'intégration au monde francophone est extrêmement difficile pour cette masse d'immigrants qui viennent vivre au Canada, au Québec ou dans l'une des provinces canadiennes.
Je sais qu'au Québec, c'est un problème très grand, mais au moins on a la Loi 101 qui oblige les enfants des parents immigrants à faire leurs études primaires en français pendant au moins 12 ans. Ensuite, généralement, au niveau universitaire, ils poursuivent en anglais ou en français; au Québec, ils ont le choix. Mais, au moins, il y a un petit brin d'intégration possible par le biais de cela, ce que vous n'avez pas au Manitoba.
Alors, c'est pour ces raisons que lorsque vous dites que ça va bien avec les ententes, qu'on doit vanter le Canada dans les ambassades, qu'il y a deux réalités, qu'on pourrait intégrer des immigrants, je vous trouve optimiste. Je trouve cela difficile parce que, de façon concrète, qu'on le veuille ou non, tout se passe en anglais à l'ambassade là-bas aussi. J'ai demandé à l'un des hauts fonctionnaires combien ils avaient de demandes en français. Il m'a répondu qu'il y en avait 0 p. 100. Or, 90 p. 100 des immigrants viennent de là-bas. Il n'y a pas de demandes, donc c'est difficile de donner des services en français, même si quelques personnes parlent français et qu'elles pourraient sans doute donner les services en français. Mais l'Amérique du Nord, c'est en anglais d'abord. Les francophones comptent pour 3 p. 100 de la population en Amérique du Nord.
¹ (1550)
Alors, j'aimerais que vous élaboriez davantage sur des mesures très, très concrètes qui pourraient être prises pour que, justement, la Loi sur l'immigration soit modifiée en ce sens. Faudrait-il prendre des moyens coercitifs, tout en restant respectueux de la Charte des droits?
M. Daniel Boucher: Je vous remercie de votre question, monsieur Plamondon. Je peux vous dire que si je n'étais pas optimiste, je ne serais pas ici aujourd'hui pour vous parler en français. Alors, ça fait partie de notre réalité.
Vous avez soulevé de bons points, et je comprends que ça peut sembler un grand défi. C'est vrai que c'est un grand défi, mais je peux vous dire de façon très concrète, par exemple, qu'au Manitoba, depuis 1999, nous avons accueilli environ 32 familles, surtout en provenance du Maroc. De ces 32 familles, environ 70 p. 100 sont restées, ce qui n'est quand même pas si mal, parce qu'on a pu trouver les moyens de les garder. Mais ce n'est pas facile. Je vous dis que ce n'est pas garanti.
Ce qu'on dit, c'est qu'on a bâti chez nous une structure d'accueil seuls, à toute fins pratiques. Au début, nous n'avons pas eu d'appuis parce que c'est arrivé assez soudainement. Alors, nous avons bâti une structure d'accueil à l'intérieur de notre communauté. Ce que nous disons maintenant, c'est qu'avec l'appui du gouvernement canadien—depuis quelques années, nous avons l'appui de la province du Manitoba—, nous pensons que nous pouvons réussir jusqu'à un certain point, dans un contexte réaliste.
On ne veut pas accueillir des gens qu'on ne pourra pas garder. Je pense qu'on veut se donner des cibles. On n'a pas défini ces cibles encore, mais on va se donner des cibles par année. Par exemple, si on accueille dix familles par année et que le taux de rétention est de 80 p. 100, je pense qu'on aura réussi à agrandir l'espace de notre francophonie. Pour nous, c'est très important. On ferait des pas dans la bonne direction.
Pour ce qui est des ambassades, je suis allé à l'ambassade au Maroc il y a quelques années, et j'ai été complètement découragé. Il y avait là des francophones qui ne comprenaient pas nécessairement qu'il y avait d'autres communautés qui existaient ailleurs. J'ai saisi l'occasion de leur dire. Ce n'était pas une question de promotion, on n'en était pas rendu là, mais la question était de dire... Un agent d'Immigration Canada m'a demandé pourquoi les gens viendraient chez nous. Il ne comprenait absolument pas. Or, c'est un ambassadeur, si on veut, de notre pays.
Pour nous, c'est une question de sensibilisation, une question de réalisme, mais aussi une question de tenter de le faire, parce qu'on est convaincus qu'on peut réussir avec des moyens assez limités, mais aussi dans un contexte qui est le nôtre, et non pas un contexte qui est... [Note de la rédaction: Inaudible]
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci M. Boucher. Le temps de M. Plamondon est maintenant épuisé.
[Traduction]
Monsieur Jedwab, je vous présente mes excuses. Vous auriez dû prendre la parole le deuxième.
[Français]
Voulez-vous faire votre intervention?
Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ontario, Lib.): Madame la présidente, ce n'est pas correct. On a deux témoins. Je ne pense pas que ce soit acceptable que vous demandiez aux deux témoins... Vous nous donnez sept minutes pour les deux témoins.
[Traduction]
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Je sais. Je viens de présenter mes excuses. Je m'en rends compte, sénateur Gauthier.
[Français]
Je m'excuse, sénateur, mais j'ai présenté mes excuses à M. Jedwab.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Ce n'est pas correct.
¹ (1555)
[Traduction]
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Je sais. Je m'en rends compte.
Monsieur Jedwab, allez-y s'il vous plaît.
[Français]
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: On a un monsieur qui vient du Manitoba, qui a voyagé probablement aussi souvent que vous. Il vient ici, et vous lui donnez dix minutes. On ne pourra pas lui poser de questions... [Note de la rédaction: difficultés techniques]
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Le comité a des règlements. Est-ce que le comité consent à ce qu'on termine un tour sur le Manitoba et qu'on revienne à M. Jedwab après?
Monsieur Jedwab, est-ce que cela vous plaît aussi?
M. Jack Jedwab (directeur général, Association d'études canadiennes): Je préfère cela, justement.
La coprésidente (Mme Shirley Maheu): Sénateur Gauthier, vous avez sept minutes.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Monsieur Boucher, vous avez signé un accord avec le fédéral en matière d'immigration. Je pense qu'il a été prolongé jusqu'en octobre 2002.
Est-ce que cela a changé quelque chose au niveau du fonctionnement, au niveau des résultats?
M. Daniel Boucher: Est-ce que vous parlez de l'entente entre le gouvernement du Canada et la province du Manitoba?
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Non, je parle de l'entente entre vous, la communauté francophone, la Société franco-manitobaine, et le gouvernement fédéral. Trois millions six cent mille dollars ont été alloués pour encourager l'immigration chez vous.
M. Daniel Boucher: Cette entente n'était pas directement avec nous. Cette entente a été signée entre la province du Manitoba et le gouvernement fédéral. Nous avons obtenu des fonds de la province du Manitoba en vertu de cette entente.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Dans ce cas, mes documents ne sont pas exacts. Je m'excuse. Il y a tout de même eu 3,6 millions de dollars du fédéral pour permettre la promotion de l'immigration chez vous.
Est-ce que vous pouvez m'en parler? Quels sont les résultats jusqu'à présent?
M. Daniel Boucher: En termes de promotion, cette entente n'a pas fait une grande différence quant aux résultats. Cependant, cela nous a permis de renforcer notre structure d'accueil, mais cela n'a pas permis de faire de la promotion. C'était un peu voulu. Nous avions décidé de renforcer notre structure d'accueil au lieu de faire d'autre promotion et de ne pas être prêts à accueillir les gens. C'était une entente avec la province du Manitoba qui était d'accord là-dessus.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous avez dit que le maire de Winnipeg vous a appuyés. Vous n'avez pas parlé du premier ministre, M. Doer.
Pourriez-vous nous en parler? Est-ce qu'il est sympathique?
M. Daniel Boucher: Oui.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Son ministre de l'Éducation est-il sympathique? Si un immigrant voulait prendre des cours de langue en français chez nous...
Avez-vous un CLIC au Manitoba?
M. Daniel Boucher: Non.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Avez-vous des cours de langue pour les immigrants?
M. Daniel Boucher: Oui.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: À quel niveau? Élémentaire ou secondaire?
M. Daniel Boucher: Il y en a à tous les niveaux, à toutes fins pratiques, mais les cours de français...
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Qui paie pour ces cours-là?
M. Daniel Boucher: C'est la province du Manitoba. Ce sont des cours de français pour les immigrants, mais il n'y en a pas beaucoup. Je peux vous assurer qu'il y a une grosse lacune de ce côté-là. Au départ, c'est déjà un problème. Il y a des cours d'anglais langue seconde.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: C'est un problème au départ, mais le fédéral ne contribue pas à l'éducation.
º (1600)
M. Daniel Boucher: Non. Pas à ma connaissance.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Quant aux compétences professionnelles, aux corps de métiers, etc. et aux compétences académiques, l'équivalence des diplômes obtenus dans les écoles d'Europe, par exemple, constitue-t-elle un gros problème chez vous?
M. Daniel Boucher: Absolument. Il y a un problème, par exemple, pour les médecins. Ils ont des ententes avec les pays du Commonwealth, mais ils n'en ont pas avec les pays de la Francophonie. C'est assez facile de recevoir une équivalence pour un médecin de l'Afrique du Sud, par exemple, mais il est difficile de recevoir une équivalence pour un médecin venant d'un pays comme le Maroc. Pour nous, c'est un gros problème, mais on nous dit que c'est un problème national et complexe.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Une famille qui arrive chez vous, au Manitoba, peut-elle envoyer ses enfants à l'école française si elle le désire?
M. Daniel Boucher: Absolument, sans problème.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: C'est bien. Il y a d'autres provinces où il y a des problèmes, comme au Québec, par exemple.
M. Daniel Boucher: Chez nous ça va.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Quand M. Plamondon vous dit que 90 p. 100 des immigrants viennent des pays asiatiques, je ne suis pas certain que ses statistiques soient exactes.
M. Louis Plamondon: C'est monsieur Coderre qui a dit cela.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: C'est le ministre qui a dit cela?
Une voix: Il a dit cela la semaine dernière.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: En parlant de M. Coderre, vous avez été très sympathique dans vos commentaires. Vous avez dit que c'est un homme ouvert, qu'il a un esprit accueillant, qu'il est généreux, etc. Vous avez raison. C'est le premier ministre que j'entends parler d'une façon positive de l'article 41 qui engage le gouvernement à faire le développement, la promotion et l'épanouissement des communautés. Je vais lui envoyer une copie de vos remarques pour qu'il sache qu'il a un chum au Manitoba.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Beaudoin.
Le sénateur Gérald Beaudoin (Rigaud, PC): J'ai une question au sujet des immigrants qui arrivent au Canada avec une expertise. Vous dites que ce n'est pas facile d'attirer un immigrant et d'obtenir l'équivalence des diplômes. Cela me frappe beaucoup parce que du côté anglophone, il semble qu'on réussisse très bien dans ce domaine-là. Nous avons des médecins qui viennent de partout dans le monde et qui ont une expertise médicale. Nous avons des juristes au Québec qui viennent d'autres pays et qui peuvent faire une carrière universitaire; j'en ai connu beaucoup. Il y a aussi d'autres professions: des ingénieurs, des comptables. Enfin, nous en avons une quarantaine au Québec. Dans les autres provinces, c'est la même chose.
C'est un domaine provincial et les provinces peuvent légiférer dans le domaine de l'équivalence des diplômes. Rien ne les empêche de le faire. Je dois admettre que la situation a été corrigée au Québec, mais j'ai toujours été scandalisé de voir que les provinces ne se servent pas de leur pouvoir législatif en matière d'équivalence des diplômes. Plus encore, on a aussi, au niveau provincial, des pouvoirs en matière d'immigration. Il est vrai que le fédéral a le pouvoir prépondérant en matière d'immigration, mais on a aussi, au niveau provincial, une compétence en cette matière, pourvu que la compétence provinciale, que les lois provinciales n'aillent pas à l'encontre des lois fédérales. Tout ça est très clair en droit. Je suis toujours estomaqué d'apprendre qu'on ne se sert pas de ces pouvoirs.
Je corrige la situation immédiatement. Au Québec, autrefois, avec les grosses familles qu'il y avait, on s'occupait très peu de cela, mais on s'est réveillé il y a plusieurs années et on a commencé à légiférer dans ce domaine-là, et on a réussi. Au Manitoba, vous dites qu'il y a un recul sur ce plan ou, du moins, une lacune, une carence.
Est-ce que vous avez essayé? Est-ce que vous avez essuyé un refus de la part du gouvernement?
M. Daniel Boucher: Je peux prendre l'exemple de la santé et des médecins. C'est l'exemple que je connais, mais je sais que cela se transfère à d'autres domaines. Comme vous le savez, le collège des médecins peut donner les licences, etc. C'est vraiment à lui de donner l'équivalence ou de donner une licence à un médecin. Ce qui arrive, chez les anglophones, c'est que les collèges des médecins se sont entendus partout au Canada. C'est plus simple de cette façon; c'est ce qu'on nous explique. On nous dit que lorsqu'on peut avoir une norme plus ou moins nationale, c'est plus facile de donner des licences aux médecins qui viennent d'autres pays. Ce sont quand même des gens qui viennent d'un autre pays, et il y a une norme nationale.
Au niveau de la Francophonie, cependant, il y a une certaine lacune parce qu'on n'a rien fait de ce côté-là. Pour les pays du Commonwealth, c'était facile parce que, comme vous le savez, je pense qu'il est assez clair que les collèges des médecins dans notre province sont des collèges anglophones. Alors, il y a eu certaines pressions de faites à un moment donné, et le problème a été réglé. Mais ça fait plusieurs années qu'on essaie de changer notre façon de fonctionner par rapport aux pays de la Francophonie. On a de la difficulté parce qu'on revient toujours à la question d'avoir une norme nationale. Or, aller chercher une norme nationale en français, c'est moins évident.
º (1605)
Le sénateur Gérald Beaudoin: L'exemple médical est parfait parce que la médecine est la même partout, alors que le droit change de pays en pays, de province en province. On n'a pas assez de médecins. On devrait aller en chercher et on devrait attirer des immigrants chez nous dans ce domaine-là. Mais vous m'arrivez avec la norme nationale. Qui légifère dans ce domaine-là?
M. Daniel Boucher: Ce sont les provinces qui veulent avoir une entente entre elles. C'est vraiment cela. Nous avons parlé à la ministre du Travail du Manitoba. La ministre du Travail nous a indiqué qu'elle serait prête à agir, mais que c'est très complexe à l'intérieur de la province, étant donné que ce sont des entités indépendantes. Il y a le collège des médecins, celui des dentistes, etc. Alors, légiférer serait jouer avec le gros bâton.
D'un autre côté, eux trouveraient cela plus facile s'ils pouvaient trouver une entente pancanadienne ou avec d'autres collègues qui accepteraient de le faire ensemble afin que tout le monde soit sur un pied d'égalité. C'est essentiellement ce qu'on recherche, mais ce n'est pas fait et ce n'est pas au programme.
Je sais qu'il y aura une conférence fédérale-provinciale. Nous aimerions que M. Coderre soulève ce genre de chose avec ses collègues et qu'ils s'interrogent sur ce qu'il faut faire avec ces normes nationales au niveau des pays de la Francophonie. Je suis convaincu que ce serait relativement simple à régler.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Sur le plan médical, il est certain qu'aucune province n'a assez de médecins. En outre, c'est une matière qui, au départ, est de compétence provinciale; le fédéral légifère dans ce domaine pour d'autres raisons. Ça va bien, et je ne m'en plains pas, mais ce que je ne comprends pas, c'est le fait que les provinces ne trouvent pas le moyen de se coaliser pour faire venir plus de médecins de l'extérieur. C'est vrai que la dualité français-anglais pose un problème, mais des médecins français, il y en a beaucoup dans le monde.
M. Daniel Boucher: Absolument.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Alors, il faudrait peut-être mettre cela à l'ordre du jour des réunions provinciales-fédérales.
M. Daniel Boucher: C'est exact. On souhaite que ce soit soulevé.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Je ne veux pas excéder la limite de temps. Je suis rendu à cinq minutes?
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Presque cinq minutes.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Je reviendrai.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci.
Sénatrice Léger.
La sénatrice Viola Léger (Nouveau-Brunswick, Lib.): Bonjour. Ça me fait plaisir de vous rencontrer.
Vous disiez, monsieur Plamondon, que si ça ne réussissait pas au Québec, compte tenu du fait qu'il n'y a que 3 p. 100 de francophones sur le continent, il serait irréaliste de penser à cela hors Québec. D'abord, l'expression «hors Québec» est omniprésente. En fait, c'est presque la définition du Canada, puisqu'au Canada, comme vous le disiez l'autre jour, le français et l'anglais sont égaux. Ça, c'est le Canada, et non les États-Unis. On a la chance d'appliquer cela au Canada. Au Québec, la majorité est francophone, alors qu'elle est anglophone dans le ROC.
Je devrais peut-être poser une question plutôt que d'ajouter un commentaire. Je suis assez convaincue que le 90 p. 100 des personnes asiatiques qui viennent ici dans le cadre de la réunification des familles ou comme investisseurs ne sont pas uniquement intéressées à l'anglais; elles veulent réussir. On pourrait leur offrir deux langues; c'est ce qu'ils veulent, d'ailleurs. Par contre, si on n'est pas assez vite sur nos patins et qu'on n'est pas en mesure d'offrir l'égalité d'expertise et d'avancement, il y a un problème. Je trouve que c'est très important qu'on aille partout au pays pour arriver à notre but. C'est dans ce sens-là que le gouvernement fédéral peut peut-être... On a beaucoup de rattrapage à faire pour que ça marche et on le sait très bien. Ce sera un travail de plusieurs générations au Canada. C'est parti.
J'ai été très heureuse d'entendre dire que vous gardiez 80 p. 100 de vos familles; c'est déjà un bon commencement. Continuez. Il est difficile d'établir une norme nationale francophone; le Québec est là, très gros, en termes de français. Mais ils ne s'accordent pas. Est-ce cela? Je ne le sais pas. Il me semble qu'il est possible d'arriver à une norme nationale francophone si on travaille ensemble. On peut parler d'une norme pancanadienne, d'une coalition. C'est tout.
º (1610)
M. Daniel Boucher: Merci de vos commentaires. Je suis d'accord pour dire que tout est possible. Ça fait longtemps qu'on fait des choses qui peuvent sembler irréalistes et on les réussit. Donc, pour nous, tout est possible, et on a une vision. J'ai 43 ans et ça fait 43 ans que je vis au Manitoba. J'ai rencontré une personne ce matin qui ne pouvait pas croire que je vivais là depuis 43 ans, que j'y étais né et que mon père y était né. Alors, on a réussi.
Pour l'immigration, c'est la même chose. Il s'agit de s'organiser pour y trouver notre place et trouver des structures qui vont faire en sorte que les gens vont être bien chez nous. C'est tout ce qu'on demande. Pour ce qui est de cette initiative, le gouvernement fédéral est un joueur essentiel.
Pour revenir à la question du sénateur Gauthier, je dirai que nous sommes chanceux d'avoir l'appui de la province du Manitoba, du premier ministre et de certains des ministres, mais la collaboration du gouvernement fédéral est essentielle pour que nous puissions continuer l'initiative. Sans ce partenariat, elle ne sera que temporaire; or, ce qu'on veut établir, c'est une initiative à long terme.
La sénatrice Viola Léger: Si on veut établir une norme nationale francophone, il faut que le Québec... Est-ce que ce serait cela, la base? Est-ce que c'est possible?
M. Daniel Boucher: Je pense que c'est possible. Je ne pense pas qu'il y ait une grosse controverse de ce côté-là ou qu'il pourrait y en avoir une. Je crois que c'est dans l'intérêt de tout le monde. Alors, il s'agit de mettre ça sur la table, d'en parler et de régler la question une fois pour toutes. J'ose espérer que ce n'est pas une question qui va susciter de gros problèmes.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci. Sénateur Setlakwe.
Le sénateur Raymond Setlakwe (Les Laurentides, Lib.): Je voudrais poser deux petites questions. Tout d'abord, je ne sais pas si vous l'avez déjà dit, mais quel est le taux de natalité des Franco-Manitobains?
Deuxièment, quel est le taux d'assimilation des Franco-Manitobains au Manitoba?
M. Daniel Boucher: Bas et relativement haut. Je n'ai pas le taux de natalité; je ne m'en souviens pas, mais ce n'est…
Le sénateur Raymond Setlakwe: Quel est-il?
M. Daniel Boucher: Non ce n'est pas si...
Le sénateur Raymond Setlakwe: Est-ce 1,4?
M. Daniel Boucher: Oui, c'est 1,6 ou 1,7 environ. Alors, c'est quand même assez élevé, et le taux d'assimilation est d'environ 50 p. 100. La situation est sérieuse. C'est pour cela que l'on veut agir maintenant. Lorsque la communauté s'est réunie l'année dernière et qu'elle a produit son document Agrandir l'espace francophone, on a constaté que si on ne posait pas de gestes comme ceux-là, on aurait des difficultés dans 30 ans. On a été très honnêtes avec nous-mêmes par rapport à cela, et ce fut très difficile de le faire. C'est pour cette raison qu'il faut réussir ici. C'est une des pistes d'action où on doit réussir. Ce n'est pas la seule, mais c'en est une parmi d'autres.
On a été très honnêtes en faisant ce constat, et les gens ont vraiment accepté le défi. C'est donc dans ce contexte-là que l'on veut avancer. Mais je peux vous garantir que dans 35 ans, nous serons encore là. Ça, je vous le dis d'avance.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Madame Thibeault.
Mme Yolande Thibeault (Saint-Laurent, Lib.): Puisqu'on parle d'assimilation, bien sûr, d'après ce que je peux voir, vous nous avez dit que c'est depuis 1999 que vous avez réussi à faire des progrès et à faire venir des familles françaises. C'est bien ça?
Cela coïncide avec le fait que le gouvernement fédéral a passé certaines responsabilités à la province, non?
º (1615)
M. Daniel Boucher: En partie oui, mais on avait déjà entrepris des démarches. Je suis allé au Maroc, à un moment donné, pour faire du recrutement, et les gens commençaient à arriver rapidement.
Alors, dans ce contexte, on a été obligés de s'organiser. Et là on a constaté que c'était à la fois une bonne chose pour nous, mais aussi un grand défi. Il fallait d'abord s'occuper des choses urgentes. Par la suite, il y a eu l'entente avec la province du Manitoba qui a facilité notre travail.
Mme Yolande Thibeault: À part le Maroc, est-ce qu'il y a d'autres pays que vous avez commencé à sensibiliser?
M. Daniel Boucher: Pas tout à fait comme on aimerait, sauf qu'au Collège universitaire de Saint-Boniface, par exemple, il y a 22 pays de représentés. Il y a des gens de l'Afrique noire, de l'Afrique du Nord, de la France, de la Belgique, etc. Ça, c'est une bonne nouvelle pour nous et c'est important.
Ce qui était vraiment nécessaire pour nous à ce moment-là, c'était de s'arrêter pour s'organiser afin de pouvoir garder les gens chez nous et de voir à leur bien-être au moment où ils arrivent. Alors, c'est là qu'on en est rendu dans l'évolution de notre projet.
Mme Yolande Thibeault: Ce n'est peut-être pas une question trop honnête que je vais vous poser là, mais comment allez-vous faire pour vous assurer que ces gens-là ne s'assimilent pas, comme 50 p. 100 des vôtres le font?
M. Daniel Boucher: Évidemment, il n'y a pas de garantie. Cependant, nous avons des institutions qui sont solides. Nous avons bâti des institutions en éducation, nous avons notre système scolaire, un collège universitaire, des institutions en santé, et j'en passe. C'est vraiment à nous de voir à ce que ces gens-là, lorsqu'ils fréquentent nos institutions, puissent obtenir des services de qualité, que ce soit en éducation ou dans tout autre domaine. On croit que si on peut leur offrir des services de qualité et une vie intéressante chez nous, ils resteront dans notre communauté. Tout ce qu'on peut faire, c'est leur offrir les meilleures choses possibles.
Mme Yolande Thibeault: Si les gens qui arrivent chez vous viennent tous d'un même pays ou d'une même culture, trouvez-vous que c'est plus facile pour eux de rester chez vous? Ils sont moins portés, je suppose, à s'en aller vers les grands centres s'ils trouvent chez vous un petit noyau des leurs.
M. Daniel Boucher: Oui, absolument. Il y a de plus en plus de personnes venant d'un certain nombre de pays, et des groupes se créent, mais ce que nous voulons faire, c'est inclure ces gens-là dans notre communauté. On ne veut pas créer des communautés parallèles. On veut que ces gens-là se sentent bien dans l'ensemble de la communauté et que nous nous sentions bien avec eux. Mais il y a beaucoup de regroupements qui se font. On respecte leur religion, leur culture, etc. C'est important de faire cela. C'est un défi pour nous aussi, les francophones catholiques qui doivent recevoir des musulmans. C'est un défi, mais on doit y faire face. On doit poser des gestes et être ouverts. Ce sont des choses sur lesquelles on travaille. On avance.
Mme Yolande Thibeault: Merci beaucoup.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Bélanger.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.)): Merci, madame.
J'ai quelques petits commentaires à faire. Moi aussi, sénatrice Léger, je trouve l'expression « hors Québec » un peu gênante. D'ailleurs, j'ai déjà essayé de la pousser à l'extrême. À l'extrême, les Sénégalais, les Marocains, les Algériens et même les Français sont tous des francophones hors Québec. J'avais tenté, lors d'une conférence à Paris, de suggérer que nous nous présentions tous comme comme des francophones hors Québec. Ils ne l'avaient pas trouvée tellement drôle.
Pour ce qui est d'ouvrir un bureau d'immigration au Manitoba ou au Québec, cela a déjà été fait. Si je ne m'abuse, c'est Henri Bergeron qui a écrit un petit bouquin là-dessus. C'est l'histoire d'une dame qui menait des groupes de gens qui partaient du Québec et qui passaient par les États-Unis pour se rendre au Manitoba. Elle en perdait quelques-uns en cours de route.
Moi, je m'intéresse à ces dix familles. Monsieur Boucher, j'aimerais que vous m'en parliez un peu plus. Comment avez-vous fait cela? Quelle sorte d'efforts ont été déployés pour aller les chercher, pour les recruter? Est-ce que vous avez eu un peu d'appui financier pour cela? Je crois qu'il y a 3,8 millions de dollars dans la province. Quelle part de cette enveloppe recevez-vous?
J'ai mentionné hier qu'un député du Parti conservateur a eu une idée que je trouve intéressante, surtout du côté rural. Il suggère qu'au lieu d'admettre une famille, on admette un groupe de familles et qu'on les invite à s'installer dans le même patelin. Sa thèse, si on veut, c'est que puisqu'elles ne seraient pas toutes seules, ces familles s'appuieraient mutuellement et seraient plus enclines à rester et à s'intégrer à une communauté en particulier ou à être incluses, si vous voulez.
Alors, cet exercice que vous avez fait m'intéresse. J'aimerais, si vous le voulez bien, que vous nous donniez plus de détails.
º (1620)
M. Daniel Boucher: Premièrement, il s'agit de 35 familles. Dix familles, c'est la cible par année que j'ai inventée tout à l'heure. Ça pourrait être 25, mais je pense que dix, pour le moment, ça ne serait pas si mal. Trente-cinq familles sont venues depuis 1998-1999. Ces gens-là, comme je l'ai dit tout à l'heure, sont venus suite à un voyage que j'avais fait au Maroc pour vraiment aller faire la promotion de la communauté. C'était dans ce contexte-là. J'ai fait de la promotion, et la province m'avait aussi demandé de faire de la promotion pour elle. Les représentants de la province n'étaient pas là, mais on m'avait demandé de les représenter aussi. Alors, je suis arrivé avec beaucoup de choses et j'ai fait des conférences, etc. Ces gens-là étaient déjà dans le système et ils ont choisi de venir au Manitoba. De ces 35 familles, environ 70 p. 100, peut-être même 75 p. 100, sont demeurées chez nous.
Au début, on a fait avec nos moyens, à la Société franco-manitobaine. À l'époque, on avait une employée—on l'a encore aujourd'hui—qui s'en occupait. Elle allait les chercher. Elle a même hébergé des gens dans sa maison. C'était comme ça. Ils arrivaient et il fallait faire quelque chose. Alors, on les a organisés, dans un premier temps. Je pense que c'est cet accueil qui a fait en sorte qu'on a eu un taux de rétention quand même assez important, selon nous. C'est donc dans ce contexte qu'on a reçu ces gens-là.
Ensuite, nous avons approché la province pour qu'elle nous donne un coup de main par rapport à l'accueil et à l'intégration. Elle nous donne 52 000 $ par année pour faire cela, ce qui n'est pas énorme, mais on y travaille. Pour la province, c'était un premier pas.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Quel est le pourcentage de la francophonie au Manitoba?
M. Daniel Boucher: Cinq pour cent.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Cinq pour cent de 3,8 millions de dollars, c'est un peu plus que 52 000 $.
M. Daniel Boucher: C'est ça. Justement.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): On s'entend. Cinquante-deux mille dollars, ce n'est même pas 1 p. 100.
M. Daniel Boucher: Non, vous avez absolument raison. D'ailleurs, nous voulons certainement augmenter ce montant. Mais la province a des communautés beaucoup plus structurées. Il y a beaucoup d'Allemands, par exemple, qui viennent dans des communautés. La province amène 40 familles à la fois. Ces gens sont installés à Carman, au Manitoba, ou à Morden…[Note de la rédaction: inaudible]…et ils ont tous un emploi. Alors, la province a investi de ce côté-là, mais elle est en train de venir vers notre communauté. À un moment donné, on va augmenter ce montant-là. Alors, c'est un geste qui a été très apprécié.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Ne devrait-il pas, dans une entente future, y avoir un critère en vertu duquel une part des 3,8 millions de dollars ou du montant total de l'entente, quel qu'il soit, devrait être remise aux francophones en fonction de leur poids démographique au Manitoba?
M. Daniel Boucher: Absolument. On va insister là-dessus s'il y a une nouvelle entente parce que ça reflète, encore une fois, la dualité linguistique. C'est aussi une question de transfert de pouvoir. Quand on transfère un pouvoir du fédéral à la province, quelles sont les garanties qui suivent? Pour nous, c'est très important. Je dois dire qu'à l'époque, il y avait eu quelque chose d'assez bien. Mme Robillard, qui était la ministre, avait mis une clause dans l'entente selon laquelle quelque chose devait être fait pour les francophones. C'était déjà pas mal.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Certains membres du comité… [Note de la rédaction: Inaudible] …dans la loi.
M. Daniel Boucher: C'est merveilleux.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Plamondon.
M. Louis Plamondon: Vous dites que 75 p. 100 des 35 familles que vous avez accueillies sont demeurées, soit une vingtaine de familles. Est-ce que vous les avez amenées à Saint-Boniface? Sont-elles concentrées dans un même endroit?
M. Daniel Boucher: Non.
On a un sérieux problème de logement à Saint-Boniface. C'est un défi. C'est un de nos gros problèmes, mais on a quand même créé des structures où les gens peuvent se regrouper. Les gens peuvent étudier en français, etc., mais il n'y pas de logements.
M. Louis Plamondon: Comme le sénateur Gauthier l'a fait plus tôt, je veux parler de l'accessibilité aux études en français pour ces familles. Elles étaient quand même à côté du gros centre français de Saint-Boniface. Si, par exemple, un immigrant veut vivre en français mais qu'il est environ à 150 kilomètre ou plus des grands centres, la difficulté d'étudier en français est beaucoup plus grande.
M. Daniel Boucher: Cela dépend de la communauté. S'il est proche d'une communauté où il y a une structure d'écoles françaises, par exemple, c'est plus facile, évidemment, puisqu'il y a quand même une quarantaine de villages francophones au Manitoba. Mais s'il vit dans un endroit comme dans le sud-est du Manitoba, il aura peut-être certains problèmes.
º (1625)
M. Louis Plamondon: Quelle proportion des enfants de ces familles sont inscrits à l'école française? Est-ce 50:50?
M. Daniel Boucher: Tous. Ils sont tous dans nos écoles françaises.
M. Louis Plamondon: C'est d'abord attribuable à l'absence de connaissance de l'anglais, n'est-ce pas?
M. Daniel Boucher: C'est en partie pour cette raison. C'est aussi le choix qu'ils ont fait de fréquenter nos écoles, ce qui est très bien pour nous.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Beaudoin.
Le sénateur Gérald Beaudoin: J'ai une question à vous poser sur les collèges universitaires. Je crois beaucoup à l'éducation parce que c'est tellement important. Les collèges universitaires peuvent-il être l'équivalent d'une université?
M. Daniel Boucher: Oui. C'est une université.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Dans les structures provinciales de la province concernée?
M. Daniel Boucher: C'est une des universités de la province.
Le sénateur Gérald Beaudoin: On y remet des diplômes universitaires.
M. Daniel Boucher: C'est ça. Dans notre cas, il est affilié à l'Université du Manitoba.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Combien y en a-t-il au Canada, si on fait exception du Québec? Est-ce fréquent dans les provinces?
M. Daniel Boucher: Non.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Il y en a en Ontario.
M. Daniel Boucher: Oui, il y en a en Ontario. En Alberta, il y a la Faculté Saint-Jean et chez nous, il y a le collège universitaire. Je pense que c'est tout pour l'Ouest.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Vous en avez un à Saint-Boniface.
M. Daniel Boucher: Oui, c'est le Collège universitaire de Saint-Boniface. Évidemment, dans l'Est, c'est...
Le sénateur Gérald Beaudoin: Les Acadiens doivent en avoir un.
M. Daniel Boucher: Oui, les Acadiens en ont un. Il y a l'Université de Moncton, l'Université Sainte-Anne...
Le sénateur Gérald Beaudoin: L'Université de Moncton a un statut universitaire très clair.
Daniel Boucher: Oui. Nous aussi, c'est très clair. Ça s'appelle un collège, mais c'est une université en bonne et due forme.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Je me demande si on ne devrait pas, au niveau des universités et de ces collèges universitaires, faire quelque chose pour l'équivalence des diplômes. Ça m'a toujours frappé. C'est injuste, d'ailleurs, qu'on ne le fasse pas. Je donnais l'exemple des médecins. Chacun a besoin des médecins tôt ou tard dans sa vie. Alors, c'est un domaine à développer. Je peux comprendre, dans une province où les Canadiens de langue française sont très peu nombreux, qu'on soit peut-être réticent, mais on doit légiférer et on a le pouvoir de légiférer.
Les provinces devraient naturellement s'occuper aussi de l'immigration. Pour ce qui est de l'équivalence universitaire, c'est garanti; c'est dans la Constitution, noir sur blanc. On devrait, je pense, faire cela. Peut-être aussi devrait-on le faire dans les conférences interprovinciales où on discute de la santé. Les transferts et autres sont très importants, je suis bien d'accord, mais l'équivalence des diplômes, pour moi, c'est crucial.
Je pense qu'on a quand même réussi un peu à l'Université d'Ottawa, par exemple, dans certains domaines. On a tout de même une faculté de droit dont la moitié est pour les juristes qui feront une carrière d'avocat ou de notaire au Québec et l'autre moitié pour ceux qui feront carrière en Ontario. On a réussi cela; c'est déjà beaucoup. Peut-être cela pourrait-il se faire ailleurs.
M. Daniel Boucher: Vous avez tout à fait raison. Je pense qu'il s'agit de faire le constat du problème et que ce dernier est relativement facile à régler. Par exemple, sur le plan de la santé, il y a, comme vous l'avez dit, une pénurie de médecins, et il faut faire quelque chose à ce sujet. Je pense que les ministres de la Santé peuvent le faire.
En ce qui nous concerne, à la fédération, on a fait récemment un rapport sur la santé. On y parle de recrutement et de formation. Toutes ces choses doivent être prises en considération et elles font partie des démarches qu'on doit faire. Je parle de la médecine, mais il reste à régler bien d'autres problèmes reliés à d'autres domaines.
Je peux vous assurer que d'ici trois ans, nous allons régler le problème chez nous, en ce qui concerne les médecins et les équivalences.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Pour les infirmières aussi?
M. Daniel Boucher: Oui. C'est une crise, et je pense qu'ils voient des solutions. Alors, ils vont certainement faire quelque chose.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, sénateur Beaudoin.
Nous avons suffisamment de temps pour deux petites questions avant de passer à M. Jedwab.
Sénateur Gauthier.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous avez parlé plus tôt de cette entente de 3,6 millions de dollars qui a été conclue entre le fédéral et la province. Vous ne sembliez pas être au courant, mais on m'a dit qu'il y avait dans cette entente un volait qui touchait la francophonie.
M. Daniel Boucher: Une clause. Il ne s'agit pas d'argent.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Ce n'est pas ce qu'on nous dit. On nous a dit qu'il y avait un volet qui touchait la communauté. Les efforts du Manitoba, jusqu'à maintenant, ont plutôt été orientés vers les professionnels, ce dont on a besoin dans la province. La langue n'est pas un critère qui a été retenu par la province. Vous êtes d'accord là-dessus? Allez-vous faire quelque chose pour changer cela?
º (1630)
M. Daniel Boucher: Absolument. Dans l'entente, il y a une clause qui parle de nos communautés. Ce n'est pas exclu, mais l'argent ne nous a pas été transféré. Nous avons eu 50 000 $ des 3,6 millions de dollars. Ce n'est pas beaucoup.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Alors, j'ai été mal informé. On m'avait dit qu'une tranche avait été réservée à la Société franco-manitobaine.
M. Daniel Boucher: Non. Si c'est vrai, je ne l'ai pas vue.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénatrice Léger, une dernière question.
La sénatrice Viola Léger: À cause de la dénatalité, il y a beaucoup moins d'étudiants dans les universités de langue française. Pour cette raison, on invite beaucoup d'étudiants étrangers dans nos universités francophones. Le but de cela n'était pas l'immigration, mais se pourrait-il qu'ils aiment tellement cela ici que plus tard... Je sais que c'est égoïste de dire cela, mais j'imagine qu'il y aura un résultat à cela.
M. Daniel Boucher: M. Jedwab me disait que parmi ces personnes, une sur cinq demeurait ici.
M. Louis Plamondon: Il y a 14 000 étudiants chinois qui viennent au Canada à chaque année.
La sénatrice Viola Léger: Pas dans les universités francophones.
M. Louis Plamondon: Non.
La sénatrice Viola Léger: C'est ce que je veux dire.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Jedwab, est-ce qu'on peut vous demander de faire votre présentation? J'ai hâte d'entendre votre intervention.
M. Jack Jedwab: D'abord, permettez-moi de m'excuser parce que je vais probablement obliger les personnes autour de la table à faire une espèce de paradigm shift. Quand Joan Fraser a pris l'initiative d'encourager le comité à m'entendre, elle m'a demandé de parler des anglophones du Québec, ce qui fait que c'est surtout là-dessus que portera ma présentation.
Maintenant, je comprends qu'on voudrait que je parle aussi de la question de l'immigration; pas nécessairement de l'immigration anglophone au Québec, mais de l'immigration en général. Je demeure très ouvert, naturellement, après avoir fait une étude pour la commissaire aux langues officielles sur la place de l'immigration, à répondre à toute question touchant ce sujet. Toutefois, la présentation que j'ai préparée se limité plutôt à la situation des anglophones au Québec.
Je vais parler en anglais et en français. J'espère que cela ne créera pas de confusion pour les interprètes. Je vais essayer aussi de traiter de la question de la Partie VII qui touche plus que l'immigration, effectivement, en ce qui concerne le rôle de l'État vis-à-vis des communautés minoritaires de langue officielle.
J'ai aussi le brouillon, si on veut, d'un document que j'ai préparé et que j'espère terminer bientôt. Je vais vous le faire parvenir afin que tous les membres du comité puissent en avoir une copie. J'ai été un peu pressé dans la préparation, alors j'ai fait ce que j'ai pu, mais ce n'est pas encore complet. C'est basé essentiellement sur une série de présentations en français sur la situation de la communauté anglophone du Québec elles-mêmes basées, entre autres, sur une série de sondages et de compilations spéciales qui ont été faits sur les attitudes des anglophones du Québec.
Permettez-moi d'abord de dire deux choses très clairement. D'abord, les problèmes auxquels les anglophones du Québec sont confrontés ne se situent pas, selon moi et selon les données que j'ai compilées, au niveau de sérieux problèmes d'accès aux services dans la langue anglaise. Il peut y avoir de petits problèmes à l'extérieur de Montréal. Dans certains endroits, il peut y avoir des écarts, si on veut, notamment dans le domaine des services sociaux et de la santé, mais, globalement parlant, je ne suis pas d'accord, selon les chiffres que j'ai compilés, que les anglophones souffrent d'un problème sérieux de manque de services dans la langue anglaise quant aux institutions publiques et privées.
Deuxièmement, la question de l'assimilation linguistique n'est pas, généralement parlant—tout est relatif—un problème auquel les anglophones du Québec sont confrontés. Ça peut varier à l'extérieur de Montréal. Dans des endroits comme l'Estrie, par exemple, chez les jeunes, il y a un niveau de transfert linguistique plus élevé que la moyenne. Ça peut même monter jusqu'à 20 p. 100, ce qui est quand même plus élevé que le taux moyen chez les francophones du Nouveau-Brunswick, mais cela se produit dans le cas des mariages interlinguistiques. C'est donc un peu le choix naturel auquel un individu de la communauté anglophone peut être confronté dans cet environnement. C'est dire que je ne suis pas d'avis, à la lumière de toutes les données, que la question de l'assimilation est un problème majeur auquel les anglophones du Québec sont confrontés.
Cela étant dit, je constate que le problème des anglophones est à deux niveaux. D'abord, il y a le problème de rétention, si on veut, ou de migration interprovinciale qui, depuis à peu près 25 ans, fait en sorte qu'il y a une diminution assez importante de la proportion historique de la communauté anglophone au Québec en chiffres réels et en pourcentage. En termes de langue maternelle, cette communauté a perdu environ 150 000 membres depuis 25 ans, ce qui est quand même assez considérable, démographiquement parlant.
Le deuxième problème auquel les anglophones du Québec sont confrontés est ce qu'on appelle en anglais le disempowerment, c'est-à-dire le sentiment de ne pas avoir une influence significative, le sentiment de ne pas être des citoyens à part entière quant à l'appareil étatique, de ne pas avoir le sentiment, d'abord, d'avoir de l'influence sur les décisions qui sont prises par les instances politiques, d'une part, et, d'autre part, de ne pas être représentés dans l'État ou dans l'appareil étatique, que ce soit au niveau provincial ou dans la fonction publique, tant fédérale que provinciale. Comme on le sait, au Québec, la représentation des anglophones dans la fonction publique provinciale est très, très basse. De plus, la représentation des anglophones dans la fonction publique fédérale au Québec, dans l'appareil fédéral, se situe sous la moyenne par rapport à la population anglophone du Québec.
J'ai fait un tableau. Encore une fois, c'est à l'état brouillon. Ce tableau sert à voir un peu le pourcentage de la représentation politique des anglophones du Québec au gouvernement provincial, au gouvernement fédéral et dans la nouvelle mégaville de Montréal. Chez les anglophones du Québec dont l'anglais est la langue maternelle, il y a à peu près six personnes à l'Assemblée nationale du Québec, soit à peu près 4,8 p. 100 de toute l'Assemblée nationale, ce qui est moins que le pourcentage de la population anglophone du Québec.
º (1635)
C'est la même chose pour le fédéral. Le pourcentage est de 5,3 p. 100, environ. Je compte mon ami Clifford Lincoln parmi les anglophones pour arriver à ce pourcentage, même s'il vient de l'île Maurice. Malgré tout, c'est 5,3 p. 100. Il y a 75 comtés, ce qui fait qu'il y a environ quatre représentants. C'est la réalité. Ce que j'appelle disempowerment, dans un autre contexte, qu'il s'agisse des francophones au fédéral, dans l'appareil étatique ou en termes de représentation politique, d'autres l'appelleront democratic deficit. Moi, j'ai appelé cela demo-political deficit, c'est-à-dire une conjoncture entre la démographie et la politique. Quoi qu'il en soit, il y a un déficit à combler.
Dans la mégaville de Montréal, où, comme on le sait, beaucoup d'anglophones étaient en désaccord sur ce projet, il demeure que le pourcentage d'anglophones au sein des représentants élus est à peu près de 28 p. 100, ce qui est quand même au-delà du pourcentage d'anglophones dans la nouvelle mégaville, c'est-à-dire sur l'île de Montréal. Il n'y a donc pas de déficit.
Cela étant dit, on a vu, dans tout le débat entourant la création de cette nouvelle mégaville, que les anglophones ont le sentiment de ne pas avoir été considérés dans le processus décisionnel qui a mené à la création de cette mégaville. Personnellement, je suis favorable à la création de mégavilles, mais je parle plutôt de la perception de ne pas être représenté. C'est un cas de disempowerment, qui est le sentiment que la décision est prise sans considération pour l'opinion de la minorité. On se dit que la majorité doit l'emporter sur la minorité au lieu de tenir compte de l'élément historique qui est installé au Québec depuis au-delà de 300 ans.
Alors, ce sentiment est assez répandu, ce qui fait en sorte que, dans une compilation spéciale que j'ai faite avec Environics, on a demandé qui avait l'autorité première dans le dossier linguistique entre le fédéral, le provincial, le municipal, etc. La majorité des anglophones, soit 65 p. 100, ont dit que c'est le provincial qui a l'autorité première en matière de promotion de la politique linguistique. Vingt-six pour cent ont dit que c'est le fédéral. [Note de la rédaction: inaudible] ils auraient probablement dit que oui, ils avaient raison. Pourtant, on a aussi posé la question dans le sens inverse. On a demandé qui devrait avoir l'autorité première en matière de promotion de la politique linguistique. Soixante-quinze pour cent des anglophones du Québec ont dit que ça devrait être le fédéral et 19 p. 100 ont dit le provincial. Six pour cent ont dit que ça devrait être combiné entre les divers paliers de gouvernement. Il y a donc encore cet écart. Oui, c'est le provincial qui a le pouvoir, on le sait, mais on aimerait par ailleurs que le fédéral ait ce pouvoir. Ce manque de confiance, à tort ou à raison, dans l'appareil étatique est aussi un symptôme de ce disempowerment que l'on ne doit pas, je pense, ne pas prendre au sérieux.
Les anglophones ont une espèce de sentiment, selon les sondages que l'on a faits, très similaire à ce que l'on entend depuis à peu près 20 ans dans les débats sur l'Accord du lac Meech ou dans d'autres débats, de ne pas être reconnus pour leurs différences, de ne pas être respectés, le sentiment d'être rejetés, si on veut. Ce sentiment que l'on dénote souvent chez les anglophones du Québec est un peu le même que celui qu'on retrouve chez beaucoup de francophones hors Québec par rapport au reste du Canada. Je ne sais pas quelle terminologie on utilise. Moi, si je dis que suis anglophone, on dit que mes compatriotes sont dans le reste du Canada. Quand je dis que je suis francophone, on me dit que mes compatriotes sont hors Québec.
º (1640)
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): [Note de la rédaction: Inaudible] …Canada anglais.
M. Jack Jedwab: Passons maintenant à autre chose. On voulait que je parle un peu des immigrants anglophones. Je vais le faire rapidement afin de ne pas dépasser mes sept minutes. J'ai rendu la vie facile aux interprètes en parlant dans une seule langue, j'imagine.
«Est-ce que le degré et la qualité de l'enseignement de la langue française vous prépare à bien réussir au Québec?» C'est une question qu'on a posée dans un sondage fait par l'Institut Missisquoi, qui est un institut qui fait la recherche [Note de la rédaction: inaudible] du Québec.
Quarante-quatre pour cent des anglophones nés au Canada ont répondu que
[Traduction]
la durée et la qualité des cours de langue française
[Français]
qu'ils ont reçue ne les a pas préparés à réussir au Québec. Trente-deux pour cent des immigrants, des gens nés à l'extérieur du Canada, ont répondu qu'ils n'avaient pas reçu une formation adéquate, malgré le fait que chez les anglophones, le taux de bilinguisme est très élevé; il est d'environ 80 p. 100. Donc, il y a ces autres questions.
Est-ce que les communautés anglophones des régions ont le sentiment que leur avenir est menacé? Oui. Deux anglophones sur trois disent qu'ils ont ce sentiment, à tort ou à raison. Il faut se demander pour quelles raisons ils ont ce sentiment, mais ce sentiment est bien réel, qu'on le veuille ou non.
On a également posé deux questions sur la fonction publique. Est-ce que les anglophones souhaitent obtenir de l'emploi au gouvernement du Canada au Québec, et au gouvernement du Québec au Québec? Dans les deux cas, 50 p. 100 des gens ont répondu oui. Il y a un mythe qui veut qu'ils soient sous-représentés dans la fonction publique parce qu'ils ne sont pas intéressés à travailler au gouvernement du Québec au Québec ou au gouvernement du Canada au Québec. Ce n'est pas ce que ce sondage très important, auquel 3 000 personnes ont répondu, démontre quant à l'attitude des anglophones.
Nous leur avons aussi demandé s'ils avaient l'impression d'avoir un accès égal à celui des autres Québécois aux emplois au niveau provincial ainsi qu'au niveau fédéral. Leur réponse a été non. Un grand pourcentage des anglophones n'ont pas cette impression. Ils ont l'impression d'avoir moins de chances que les autres Québécois de se trouver un emploi, que ce soit au gouvernement du Québec ou au niveau fédéral.
Pour ce qui est du leadership de la communauté anglophone, je ne vais pas en parler.
Pour ce qui est de la question de l'immigration, permettez-moi d'abord de dire que le niveau d'immigration des personnes parlant la langue anglaise qui viennent au Québec est relativement bon. En d'autres termes, il n'y a pas d'écart, comme c'est le cas ailleurs au Canada, entre le nombre de personnes parlant l'anglais qui s'installent au Québec—quand leur langue maternelle est l'anglais, il y un écart, mais il est assez petit—et le pourcentage d'anglophones du Québec. Cela fait en sorte que, si on utilise le critère de la première langue parlée, the first language spoken, on peut dire qu'environ 28 p. 100 de la communauté anglophone du Québec est issue de l'immigration.
C'est quand même très intéressant. Si on utilise le critère de la langue maternelle, on voit que 14 p. 100 de la communauté anglophone est née à l'extérieur du Québec. Donc, il y a toujours un bon pourcentage des immigrants au Québec qui sont anglophones ou qui parlent anglais.
À l'extérieur, c'est très concentré. À Montréal, c'est de plus en plus concentré. Il pourrait être intéressant pour les communautés à l'extérieur de Montréal d'accueillir des immigrants anglophones. Le Québec désire régionaliser l'immigration depuis de nombreuses années. Il existe une entente, soit l'Accord McDougall—Gagnon-Tremblay, et il y en avait une autre auparavant.
Permettez-moi d'ouvrir une brève parenthèse pour dire que l'Accord McDougall—Gagnon-Tremblay n'a pas fait en sorte qu'il y a eu une diminution du pourcentage total des immigrants anglophones ou parlant anglais au Québec. Mais y a-t-il possibilité de travailler dans ce sens-là? Je pense qu'il y a effectivement possibilité de travailler dans ce sens-là pour que les gens qui parlent anglais puissent s'installer à l'extérieur de Montréal. Naturellement, il y a des questions économiques qui jouent là-dedans. Les transferts linguistiques chez les immigrants anglophones sont très limités: en moyenne 3,5 p. 100. Les immigrants anglophones qui s'installent au Québec ne passent pas à la langue française.
Il y a un autre problème, qui a été soulevé auparavant, et qui est la question de la migration interprovinciale des immigrants, c'est-à-dire des immigrants qui s'installent au Québec et qui le quittent. Dans le cas des immigrants qui sont venus entre 1980 et 1995, il y a eu une perte nette d'environ 25 p. 100. Je parle des immigrants qui parlent uniquement l'anglais, qui s'installent au Québec, qui y restent pendant quatre, cinq ou six ans et qui quittent la province pour aller s'installer ailleurs au Canada. C'est un problème. Cela reflète un problème qui demeure important, celui des anglophones qui quittent le Québec pour aller ailleurs et qui contribuent à différents problèmes d'ordre social: le vieillissement de la communauté, d'une part et, d'autre part, le sentiment de disempowerment, le sentiment de ne pas être valorisé sur le plan politique ou reflété dans les institutions.
Même dans le cas des immigrants francophones, il y a une perte nette de 3,7 p. 100 dans l'immigration interprovinciale. Il y a plus d'immigrants francophones qui quittent le Québec pour aller ailleurs au Canada qu'il y a d'immigrants francophones qui quittent le reste du Canada francophone pour aller s'installer au Québec. Actuellement, le bassin des immigrants francophones au Québec est plus important, mais il y a en quand même un certain nombre qui ont quitté: 2 700 d'entre eux ont quitté le Québec entre 1980 et 1995, et 1 020 sont venus de l'extérieur du Québec au Québec. On a eu toute une discussion pour se demander s'il y a des immigrants francophones qui s'installent au Manitoba et quittent pour le Québec. Il y a plus de francophones qui quittent le Québec pour aller ailleurs au Canada que de francophones qui viennent d'ailleurs au Canada.
Je termine là-dessus. Je suis disposé à répondre aux questions dans les deux langues officielles.
º (1645)
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur Jedwab.
Monsieur Plamondon.
º (1655)
M. Louis Plamondon: Merci et bienvenue au Comité des langues officielles.
J'ai lu en partie votre rapport, mais je voudrais surtout vous faire préciser quelques petites choses que vous venez de nous dire. Quel est le pourcentage des anglophones au Québec?
M. Jack Jedwab: Tout dépend de votre définition. Vous pouvez les définir par la langue maternelle ou par la première langue apprise;
[Traduction]
la première langue officielle parlée
[Français]
ou par la langue parlée à la maison. Le pourcentage le moins important est celui des gens dont la langue maternelle est l'anglais: il est d'environ 8,8 p. 100.
M. Louis Plamondon: Et le reste?
M. Jack Jedwab: ... [Note de la rédaction: Inaudible ...10 p. 100.
M. Louis Plamondon: La communauté anglophone s'est enrichie par l'immigration, qui s'est intégrée presque à 100 p. 100 à la communauté anglophone, surtout à un moment donné.
M. Jack Jedwab: Oui, c'était le cas il y a 30 ou 40 ans. Aujourd'hui, c'est un peu la situation inverse.
M. Louis Plamondon: C'est cela.
Lorsque vous avez parlé des pourcentages de représentation, cela m'a frappé, tant au niveau des députés fédéraux qu'à celui des députés du Québec. À ce moment-là, vous comptiez les anglophones de souche—je n'aime pas l'expression non plus—mais vous n'incluiez pas les allophones qui sont en grande partie intégrés à votre communauté. Quand on compte les anglophones et les allophones qui siègent à Ottawa ou à Québec, on voit que la proportion de 10 p. 100 est assez bien respectée.
M. Jack Jedwab: Oui, je dois ajouter les allophones pour être juste en ce qui concerne les anglophones. On peut ajouter M. Levine au Québec, par exemple.
M. Louis Plamondon: Oui.
M. Jack Jedwab: Ça peut faire monter la proportion.
M. Louis Plamondon: Il y a déjà M. David Payne, qui est anglophone. Dans notre cas, nous avions M. Nunez, notre ami d'origine chilienne.
L'autre chose qui m'a frappée, c'est le pourcentage d'anglophones dans la fonction publique fédérale. Vous avez dit qu'au niveau fédéral, vous étiez 5,3 p. 100.
M. Jack Jedwab: Je n'ai pas parlé de la fonction publique. C'est la proportion des députés qui est de 5,3 p. 100. Selon les chiffres de la commissaire aux langues officielles, 6,9 p. 100 des employés fédéraux au Québec sont anglophones; au Québec, c'est 0,9 p. 100.
M. Louis Plamondon: Vous savez peut-être que, lorsqu'on parle de la fonction publique et du nombre de francophones ou d'anglophones qui y travaillent, on exclut la zone de 50 kilomètres de la capitale, ce qui fait que tous les anglophones d'Aylmer, de l'autre côté de la rivière des Outaouais, ne sont pas compris dans votre statistique. Donc, on exclut les employés de toute la région de la capitale.
Nous avons souvent eu des discussions à ce sujet ici, au Comité des langues officielles. Il y a deux ans, je demandais combien de résidents anglophones du Québec travaillaient à la fonction publique dans la région de la capitale, et je n'ai jamais eu de réponse. Si on incluait ces gens, votre pourcentage serait plus élevé. Je n'ai rien contre cela, mais cette statistique des anglophones du Québec travaillant à la fonction publique est souvent faussée. Au Comité des langues officielles, à chaque fois qu'on a eu un débat sur les statistiques qui nous sont présentées, on a dit que ces statistiques étaient faussées par le fait que ceux qui travaillent à la fonction publique dans l'Outaouais et à Ottawa ne sont pas comptés. Je ne savais pas si vous étiez au courant de cette chose.
Quant au reste de votre intervention verbale, je trouve qu'elle reflète assez bien la pensée des anglophones que je côtoie, parce que j'ai des amis anglophones qui militent dans mon parti ainsi que dans le Parti québécois. Il y en a dans tous les partis. Vous avez effectivement brossé un tableau assez juste de leur pensée.
Maintenant, je pense qu'ils pourraient être rassurés. Je pense que leur influence dans le monde politique est beaucoup plus grande qu'ils ne le croient. C'est ce que je leur dis souvent.
Merci.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Gauthier.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: J'ai lu votre rapport. C'est très bien et je vous en félicite.
M. Jack Jedwab: Merci.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous avez bien cerné le problème. Je ne veux pas parler du nouveau paradigme auquel vous avez fait allusion plus tôt. Je ne me suis pas préparé à parler de cela.
Les minorités linguistiques vivant en milieu minoritaire sont habituellement identifiées à leur milieu d'abord: leur paroisse, la région dans laquelle ils vivent. Ensuite, elles sautent habituellement par dessus le provincial et vont directement au fédéral. Ces gens se disent fédéralistes, et c'est normal. Les gouvernements provinciaux n'ont pas été tellement à l'écoute de ces minorités ou généreux avec elles.
Au Manitoba, elles ont eu des problèmes de 1905 à 1988. En Ontario, on a eu le Règlement 17 vers 1915. On a obtenu la gestion scolaire en 1997, 15 ans après l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés. Auparavant, on avait le droit constitutionnel à la gestion de nos écoles, mais on ne l'avait pas en pratique. Je pourrais vous parler de cela pendant des heures et des heures.
La politique du gouvernement fédéral en matière d'immigration et d'intégration des immigrants doit contribuer à l'unité du pays, à la dualité linguistique du pays, si j'ai bien compris la politique annoncée récemment dans le projet de loi C-11. L'analyse que vous avez faite dans votre étude nous aurait été utile au comité. Dans vos remarques, vous avez touché à des problèmes d'actualité. Cela m'intéresse.
Au niveau de la francophonie, on est en déficit linguistique actuellement. Vous avez un déficit politique au Québec, mais on peut parler d'un déficit linguistique dans le reste Canada, dans le ROC, comme on dit, the rest of Canada. Je n'aime pas cette expression, mais on l'emploie couramment aujourd'hui. Au Québec, on parle du Québec et du reste du Canada, et au Canada anglais, on parle de Quebec and the rest of Canada.
La dualité linguistique est une réalité, une caractéristique fondamentale de notre pays. Dans votre étude, vous parlez d'un ressourcement démographique. Je trouve ce terme intéressant. Mme la commissaire aux langues officielles l'utilise aujourd'hui, et je trouve que c'est une belle expression.
Pendant des années, on a essayé d'obtenir des institutions d'éducation, de santé et ainsi de suite. On a les a depuis quelques années et on commence à s'organiser pour essayer d'améliorer la qualité de vie de nos milieux.
Vous avez parlé des anglophones. Je vais sauter une question, parce que je voudrais parler des anglophones au Québec. C'est vrai que, sur 100 immigrants qui ne parlent que l'anglais au Québec, 25 p. 100 partent du Québec au cours d'une période de temps donnée. Donc, on retient à peu près 75 p. 100 des immigrants anglophones au Québec. Je ne peux pas vous parler du reste du Canada. Vous avez fait une étude là-dessus, et j'aimerais savoir combien des 1 800 immigrants parlant français qui se sont établis hors Québec l'an passé sont demeurés dans les collectivités d'accueil où ils se sont d'abord établis. Avez-vous des statistiques là-dessus?
M. Jack Jedwab: Oui, mais permettez-moi d'abord de dire que j'ai commencé à utiliser le terme «ROQ» au Québec. Comme je suis Montréalais, je parle du rest of Quebec. J'appelle cela le ROQ.
On a écrit cela dans les journaux dernièrement.
Pour ce qui est de l'immigration interprovinciale, je dois calculer les données assez rapidement, mais je pense que les gens dont vous parlez restent dans le reste du Canada dans une proportion de 80 p. 100. On a vu qu'au Québec, il y a plus de francophones immigrants qui quittent le Québec qu'il y en a qui viennent au Québec.
J'aimerais vous donner un autre exemple. On parle beaucoup d'immigration internationale, mais aussi de migration interprovinciale. C'est un phénomène important qu'il faut regarder en conjonction avec l'immigration internationale.
À Vancouver, bien que le taux de transfert linguistique soit parmi les plus élevés au Canada, on a quand même connu une augmentation du nombre réel de francophones, parce que des migrants du Québec y sont venus en très grand nombre entre 1986 et 1996.
Quand les résultats du prochain recensement seront rendus publics, on va voir une augmentation du nombre de francophones en Alberta; encore une fois, on parle de francophones en provenance du Québec. Je ne peux pas saisir toute cette dynamique; il y a des études à faire là-dessus. Est-ce que ces gens qui s'installent utilisent les institutions francophones de ces provinces? Est-ce qu'ils vont à l'école française?
Daniel a parlé des immigrants qui, dans une grande proportion, sont allés dans le écoles francophones. C'est excellent, mais est-ce que les Québécois francophones le font? On n'a pas toutes les données là-dessus, et il y a là une dynamique à étudier. Ce phénomène des migrations est important.
Là, on voit encore que plus de Québécois francophones quittent le Québec qu'il y a de gens d'ailleurs qui y retournent, sauf durant certaines périodes pendant lesquelles le Parti libéral était au pouvoir. Mais ça, c'est une autre affaire.
» (1700)
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Puis-je poser une autre petite question?
Dans votre étude, vous insistez fortement sur la nécessité de permettre et d'encourager le ressourcement démographique.
Les statistiques de 1996 indiquent que 80 p. 100 des gens de la population canadienne sont les descendants d'immigrants. Dans les minorités francophones hors Québec, comme les communautés dont M. Boucher nous parlait, à peu près 5 p. 100 de la population est de souche immigrante. Avez-vous des suggestions à nous faire pour convaincre le gouvernement d'améliorer sa «propagande», si on peut employer ce terme-là, pour encourager davantage l'immigration francophone au Canada? Si on n'augmente pas la population francophone et qu'on ne maintient pas nos effectifs, le Canada n'existera plus. M. Plamondon aura raison: le Québec sera francophone et le reste du Canada sera anglophone.
M. Jack Jedwab: Vous parlez de l'immigration?
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Oui.
M. Jack Jedwab: Si la volonté de le faire est là, à la fois la volonté politique et la volonté de la part de la communauté, comme au Manitoba, alors c'est possible de le faire. Si des communautés ne souhaitent pas recevoir des milliers d'immigrants francophones, on ne peut pas leur imposer non plus le désir de le faire. Mais si le désir, la volonté et les ressources sont là, c'est possible de le faire.
Dans l'étude que j'ai présentée, je pose la question à savoir s'il y a un autre pays qui accueille des francophones en nombre important. Notre voisin du sud, par exemple, en accueille un bon nombre, même si le taux d'assimilation linguistique y est très élevé, dans les 90 p. 100. Les francophones sont assez nombreux à s'installer un peu partout aux États-Unis, pas seulement en Floride; je le précise. Les Haïtiens émigrent aussi en grand nombre aux États-Unis. Ce sont des gens qu'on considère comme francophones ou francophiles, qui parlent le créole mais qui sont des francophones quand même.
Alors, si on repense un peu notre politique d'immigration, en fonction de ce que Mme Adam propose et d'autres aussi, dont M. Coderre—en passant, j'ai eu la chance de lire les transcriptions que M. Coderre m'a envoyées—on envisagera moins la question en termes strictement économiques. Naturellement, il doit y avoir un équilibre entre les deux. Si on met strictement l'accent sur la dimension économique, on peut aller, bien sûr, à l'étranger et faire concurrence à bien d'autres pays qui désirent tous attirer des immigrants économiques. En fin de compte, dans l'histoire du Canada, l'immigration n'a pas été basée uniquement sur des critères économiques. Des gens possédant toutes sortes de talents sont venus s'établir au Canada. Si on en juge par notre performance sur ce plan par rapport à bien d'autres pays, le bilan est plutôt positif. Si la volonté politique est là... Je ne pense pas que ce sera aussi facile que ce l'est autour de cette table.
En effet, j'ai eu l'occasion de parler à beaucoup de gens dans différents endroits et j'ai cru déceler encore beaucoup de résistance, pas auprès de M. Coderre, mais ailleurs, dans l'opinion publique. Il existe une autre vision du Canada: tous les anglophones devraient aller dans le ROC et tous les francophones devraient... C'est une autre vision du Canada, que je ne partage pas, mais, c'est un fait: il y a toutes sortes de visions. Heureusement, les instances...
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: La grille proposée par la commissaire aux langues officielles...
M. Jack Jedwab: Moi, je suis favorable à la proposition de la commissaire aux langues officielles. J'ai préparé le briefing document, n'est-ce pas?
» (1705)
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur Jedwab. Monsieur Bélanger.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Je vous remercie de me donner la parole, parce que je vais devoir quitter. Monsieur Jedwab, je voudrais vous remercier de votre présence ici.
Je voulais intervenir, suite aux propos de mon ami ici au sujet de la fonction publique. Ce que je retiens à ce propos, c'est que ce serait peut-être une question sur laquelle notre comité pourrait se pencher. Vous avez peut-être raison. Je ne sais pas si cela en est ou n'en est pas, mais en ce qui a trait à la partie québécoise de la région de la capitale nationale, la proportion au Québec pourrait passer de 6,9 p. 100 à 10 p. 100. Ça reste à vérifier.
Mais si on fait cela, il faudrait peut-être aller un peu plus loin et faire la constatation à l'échelle nationale. À ce moment-là, on se retrouve dans des proportions semblables au poids démographique des communautés, à peu près 75:25. Mais, à propos du commentaire sur la proportion au Québec, ça reste à 0,9 p. 100. Il y a peut-être là une question que le gouvernement du Québec devrait se poser parce que, à mon avis, il y a une sous-représentation. Alors, nous pourrions, comme comité, nous pencher là-dessus.
M. Louis Plamondon: Il y a toute une culture là-dessus.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Ma question porte sur une chose que vous avez soulevée dans votre dernier commentaire, monsieur Jedwab. Comme membres d'un comité qui veulent faire avancer les choses, dans le sens dont on parle depuis quelques réunions, faisons-nous face surtout à une résistance motivée, ancrée dans la mauvaise foi, ou plutôt à une inertie de l'appareil étatique fédéral?
Cette idée d'intégrer l'immigration dans son ensemble à la dualité linguistique du pays et au poids démographique de nos communautés est passablement récente. Les efforts de la communauté minoritaire francophone le sont encore plus. Alors, sur quoi devrions-nous surtout concentrer nos efforts? S'il y a un problème d'inertie, il sera probablement possible de dégager une énergie qui fera en sorte que les choses vont se corriger. Mais si on fait face à un blocage de la part de personnes, surtout dans les provinces, qui ne considèrent pas nécessaire d'intégrer la notion de dualité linguistique à la question de l'immigration, ce sera plus difficile. Je ne vous demande pas ici d'identifier des personnes en particulier. Je ne veux pas du tout vous mettre dans l'embarras, mais si vous pouviez nous donner des indices à ce sujet, je l'apprécierais.
M. Jack Jedwab: Merci. C'est difficile de me mettre dans l'embarras.
Je ne dirais pas que c'est de la mauvaise foi. D'abord, il y a de l'inertie parce que c'est une nouvelle approche. Selon moi, on aurait dû adopter cette nouvelle approche quand on a commencé le processus de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme. Je ne sais pas pourquoi on n'a pas saisi, avec toutes ces analyses intéressantes et importantes, que c'était quelque chose qui pouvait mener à un apport démographique intéressant. Mais voilà, on ne l'a pas fait à cette époque.
Je pense qu'il ne s'agit pas de mauvaise foi, mais seulement du fait que c'est l'immigration économique qu'on veut prôner. Prenons par exemple le cas des 160 000 personnes provenant de Haïti qui, depuis 10 ans, gagnent les États-Unis. Certains disent qu'il ne s'agit pas là d'immigration économique. Beaucoup de gens considèrent qu'il faut mettre l'accent sur l'immigration économique, et c'est la ligne de pensée qu'ils suivent depuis de nombreuses années. C'est ce que leurs analyses les amènent à conclure à l'égard de la situation économique du Canada . Et même s'il y a ici des bassins francophones, ils ne voudront pas nécessairement faire venir des gens de la France. Il y en a un certain nombre qui viennent à chaque année, mais ce n'est pas là qu'on va chercher des immigrants en très grand nombre, du moins pas en France ou en Belgique, où la situation économique est relativement bonne. Après les dernières élections en France, ça pourrait peut-être changer; on ne sait jamais. Il y a des gens qui disent que le Canada devrait mettre l'accent sur l'immigration économique, et ça peut enter en contradiction avec l'autre objectif dont nous parlions plus tôt.
Ils disent que le montant qu'il faut investir dans l'intégration est beaucoup trop élevé, même au Québec. Il ne faudrait surtout pas prétendre que le Québec, malgré tous ses objectifs, n'est pas sensible à cette dimension de l'immigration économique. J'ai présenté un mémoire sur l'immigration et l'intégration devant une commission parlementaire au Québec il y a deux ans environ. J'ai constaté une chose qui était un peu embarrassante. On parlait d'une cible de 40 ou même 50 p. 100 d'immigration francophone au Québec et on se félicitait, on se réjouissait d'avoir réussi à obtenir 40 p. 100 d'immigration francophone. Or, comment fait-on le calcul? On prend les immigrants qui disent parler uniquement le français à l'arrivée--supposons qu'ils totalisent 22 p. 100—et on ajoute le 18 p. 100 de personnes qui déclarent qu'ils parlaient anglais et français à leur arrivée. Et bravo! Ils ont leur 40 p. 100. Ils disent qu'il s'agit de francophones.
J'ai demandé à l'ex-ministre Perrault comment il arrivait à ce chiffre. On pourrait facilement diviser en deux: 50 p. 100 d'anglophones, 50 p. 100 de francophones. On pourrait facilement les ajouter à l'ensemble des anglophones. Pourquoi pas? C'est la même logique. Quels sont les pourcentages? Environ 15 p. 100 d'anglophones, auxquels on ajoute les 20 p. 100 d'individus déclarant qu'ils parlaient les deux langues à leur arrivée, et ça donne 35 p. 100 d'anglophones. Ainsi, on peut montrer à la population qu'on a atteint les cibles. Dans ce sens-là, je suis francophone à presque 100 p. 100. C'est ce que j'ai dit à M. Perrault, et il ne m'a pas contredit.
Au Québec, au sein de la fonction publique, les fonctionnaires sont très sensibles à cela. Ils ont fait beaucoup d'efforts pour attirer les immigrants investisseurs venant d'Asie, comme M. Plamondon l'a mentionné, mais bon nombre de ces personnes ont quitté le Québec. Les autres provinces disent que c'est le Québec…[Note de la rédaction: inaudible]. The money is in Quebec, but the responsabilities are in Ontario. Il y a une question de fiscalité.
» (1710)
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Jedwab, monsieur Boucher, je veux vous remercier de vous être déplacés. Je vous demande de m'excuser car je dois partir.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénatrice Léger.
La sénatrice Viola Léger: J'ai beaucoup aimé votre avis concernant le disempowerment. Vous l'avez appliqué naturellement aux anglophones minoritaires au Québec, en exprimant le sentiment qu'ils sont rejetés, si j'ai bien compris. Il y a donc un genre de complexe d'infériorité. Vous n'avez pas employé ce terme? Moi, j'ai vécu ça; on vit avec ce sentiment quand on est minoritaire. Alors, ça s'appliquerait aux anglophones minoritaires au Québec. Les immigrants anglophones qui s'intègrent en anglais sentent-ils ce disempowerment? Ont-ils aussi un complexe d'infériorité en tant qu'anglophones au Québec?
M. Jack Jedwab: Je pense qu'ils peuvent adopter ce sentiment pessimiste assez rapidement. Il faut savoir aussi que beaucoup d'anglophones immigrant au Québec sont dans la catégorie des entrepreneurs. Alors, le niveau de chômage n'est pas très élevé. Comme je l'ai mentionné dans le rapport, leur salaire moyen est parfois plus élevé que celui des anglophones nés au Canada car beaucoup de ces immigrants ne sont pas des réfugiés. Plusieurs d'entre eux sont des immigrants entrepreneurs. Mais oui, on a entendu beaucoup d'anecdotes sur ce sentiment pessimiste. C'est une chose qu'il faut étudier. On peut dire que ce n'est pas réel. M. Plamondon a dit que non, qu'ils ont des pouvoirs.
M. Louis Plamondon: Moi, je dis qu'ils ont une bonne influence.
M. Jack Jedwab: Ce n'est pas l'impression que j'ai quand je parle aux anglophones. Ils ont un peu l'impression d'être dispensable. Je donne un exemple prudent.
Au Québec, quand on a besoin de trouver un comté pour une vedette francophone lors d'une campagne électorale qui n'est pas la meilleure, on le présente dans un comté où il y a une forte concentration d'anglophones. Ils ont l'impression qu'on va le faire à tous les niveaux. C'est le disempowerment. We are expendable. Effectivement, il y a certains anglophones qui peuvent avoir une bonne influence, comme beaucoup de francophones, mais je dirais que la grande majorité des anglophones--et les sondages l'ont indiqué--ont le sentiment de ne pas avoir beaucoup d'influence, de voir les choses se passer sans faire partie du processus décisionnel, de ne pas être inclus dans le processus étatique, de ne pas regarder la fonction publique et les instances politiques. Où est cette communauté à l'intérieur de ce processus? Maintenant, il y a toutes sortes de raisons. Je dis simplement aujourd'hui que c'est un problème. Tout le monde devrait être d'accord que c'est un problème et ne pas le banaliser, parce qu'il est réel. On a le sentiment de ne pas avoir la même valeur que les autres Québécois, d'avoir moins de valeur. Il y a des gens qui disent être des allophones. Parfois, je le fais à la blague: je dis que suis allophone. La première langue que j'ai apprise, et que je comprends encore--je l'ai réapprise récemment--, est le yiddish. Je l'ai fait pour redevenir allophone, parce que les allophones sont très populaires au Québec, politiquement. M. Parizeau n'a même pas mentionné les anglophones; il a seulement parlé des ethnies quand il a...
» (1715)
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Léger.
La sénatrice Viola Léger: Ce sentiment-là est grave n'importe où. C'est la base. Ça fait bien longtemps, mais c'est ce qui est grave, et pour les nouveaux immigrants, ce sentiment-là, c'est l'essentiel du travail, je crois.
M. Jack Jedwab: Je suis d'avis que le fédéral peut faire plus à cet égard et que les anglophones croient que le fédéral peut faire plus à cet égard.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Beaudoin et ensuite M. Plamondon.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Il y a un point sur lequel je veux revenir. Si j'ai bien compris, vous parliez du rôle que les provinces pouvaient jouer au niveau du bilinguisme. Vous avez semblé dire, si j'ai bien compris, qu'il faut s'en remettre surtout aux provinces au départ. Je n'ai pas l'impression... Évidemment, le cas du Nouveau-Brunswick est spécial parce que là, c'est une réussite incroyable. Le Nouveau-Brunswick est une province très bilingue, et c'est solidement enchâssé dans la Constitution canadienne. C'est solide, madame Léger. La Cour suprême va toujours interpréter libéralement cet article-là.
Est-ce que vous affirmez que ça devrait venir des provinces d'abord? L'histoire ne va pas du tout dans ce sens.
M. Jack Jedwab: Pouvez-vous répéter la question?
Le sénateur Gérald Beaudoin: Par exemple, le Nouveau-Brunswick... Je mets le Québec à part parce qu'il y a l'article 133 de la Constitution et qu'il y a aussi le nombre. Le Nouveau-Brunswick a réussi une chose extraordinaire: l'égalité des deux communautés, etc. Bravo! C'est formidable. Mais aucune autre province n'a réussi cela. J'ai toujours l'impression que si on veut avoir un bilinguisme qui croît, qui grossit, qui se développe, il faut s'en remettre, en grande partie, à l'autorité fédérale.
M. Jack Jedwab: Je crois qu'il y a quand même, au Québec ou ailleurs, une décentralisation. À l'intérieur de la Constitution, il y a des responsabilités pour les provinces en matière d'éducation. L'éducation est un élément clé dans l'intégration de l'immigrant. C'est essentiel. C'est une compétence provinciale. La santé aussi est une compétence provinciale.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Oui, mais j'ai demandé à M. Boucher comment il se faisait que l'équivalence des diplômes, qui relève clairement des provinces, ne soit pas développée dans les provinces autres que le Québec? Le Nouveau-Brunswick est un cas spécial, mais dans les provinces où les francophones sont très peu nombreux, on ne va pas dans cette direction-là . Alors, si on se fie à cela, l'avenir n'est pas très rose, mais parce qu'on a un pays bilingue, parce que c'est écrit dans la Constitution et parce que le fédéral peut mettre les deux langues sur le même pied, ça nous aide considérablement. Au moins, on peut affirmer que, même si les nombres ne sont pas égaux, au moins les langues sont égales. Cela a toujours été ma thèse, et c'est la beauté de la Loi sur les langues officielles. Mais à ce moment-là, le mouvement doit venir de l'autorité fédérale.
M. Jack Jedwab: Le leadership devrait venir du fédéral, mais je pense que tout le monde aimerait aussi qu'il y ait un leadership au niveau provincial.
» (1720)
Le sénateur Gérald Beaudoin: Oui. Je le souhaite beaucoup.
M. Jack Jedwab: Mais en termes de leadership et de responsabilités pour les communautés minoritaires de langue officielle, le fédéral a un rôle important à jouer. C'est un élément fondamental dans l'unité de la fédération. Il faut jouer ce rôle pleinement.
On a parlé de la dualité linguistique depuis de nombreuses années. C'est le concept qu'on utilise, mais il faut bien définir la notion de dualité linguistique. J'ai regardé les débats au Parlement sur cette étude faite par la commissaire à l'époque où on a introduit le concept de la dualité, et ce n'est pas très clair dans mon esprit ni dans l'esprit des législateurs de l'époque. Qu'est-ce que c'était au juste? Où allait-on avec la dualité? C'est un concept très large; on peut aller loin. J'espère que ce comité va un peu aider à définir ce qu'est au juste la dualité.
La question à laquelle Mme Adam m'a demandé de trouver une réponse est de savoir si la promotion de l'immigration francophone hors Québec, par exemple, est un élément de la dualité, et si c'est la responsabilité de l'assemblée législative de faire la promotion et de vendre de cette dualité.
Je ne suis pas un juriste, mais j'essaie de voir un peu avec un juriste...
Le sénateur Gérald Beaudoin: Si c'est cela, ça répond à ma question parce que moi aussi, c'est ce que je veux, et je n'ai pas beaucoup d'espoir parfois parce que si je me fie à l'histoire, c'est plutôt l'inverse qui s'est produit. Mais enfin, ça répond à ma question très, très bien.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Plamondon.
M. Louis Plamondon: J'interviens sur la remarque de Mme Léger. Toujours sur l'importance de l'influence, je me rappelle avoir vu un documentaire il y a quelques années à la télévision où on expliquait que la priorité chez les anglophones, comme comportement au niveau des institutions publiques, n'était pas au niveau municipal ni au provincial ni au fédéral, mais au niveau scolaire. Dans certaines villes, par exemple, tous les élus municipaux étaient des francophones, mais tous les élus des commissions scolaires étaient des anglophones parce que, pour eux, la priorité était là. C'est dans leurs habitudes, dans leur culture ou je ne sais quoi. Je n'ai pas d'explication. Donc, c'était par choix aussi que les gens de culture anglaise au Québec n'allaient pas de l'avant au niveau municipal ou provincial ni même au niveau fédéral. Donc, il y a une longue culture. Quant aux fonctionnaires, si on retourne quelques dizaines d'années en arrière, la plupart des anglophones du Québec préféraient faire carrière dans leur langue, donc au fédéral, où la fonction publique était anglaise, et les francophones aimaient mieux aller vers la fonction publique provinciale parce que c'était dans leur langue. Ça va quasiment de soi.
C'est pour cette raison que j'ai dit que ceux que je côtoie, comme M. Goldbloom, que j'ai côtoyé comme anglophone, qui, je pense, est un représentant de votre minorité et qui a travaillé au Musée des religions de Nicolet... Dans mon comté, 99 p. 100 des gens sont francophones. Ceux qui constituent le 1 p. 100 d'allophones et d'anglophones parlent tous français.
Le président de la Société historique Pierre-de-Saurel est un anglophone: M. Jones. Nous sommes de bons amis, et je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de complexes dans le coin. Il prend sa place et il se débat. Je dis que les anglophones ont une très grande influence, même en dehors de Montréal, et qu'il n'y a pas du tout de comportements... On le voit parfois chez certains individus, mais l'influence est très présente, et c'est tant mieux, parce que l'apport de la communauté anglophone du Québec a été extraordinaire. Tout le monde s'entend là-dessus.
Je pense qu'il y a des faits dans ce que vous avez énoncé, mais qui étaient dus à une volonté de la communauté anglophone de vivre un peu isolée, à sa manière, avec ses coutumes et avec les influences qu'elle choisissait.
M. Jack Jedwab: Au municipal, la représentation des anglophones parmi les élus montréalais est très importante. Elle était très importante aussi dans la plupart des 27 municipalités avant la fusion. Quant au provincial, le pourcentage d'anglophones est en déclin. Du point de vue culturel, je me demande si ce phénomène est récent ou si on va dans un sens inverse. C'est un phénomène en déclin. Alors, non.
Pour le reste, quant aux différents débats dans la société, j'ai l'impression que les raisons varient lorsqu'on demande aux anglophones pourquoi ils quittent le Québec. D'ailleurs, les sondages le confirment: certains invoquent des raisons économiques, d'autres donnent des raisons politiques.
» (1725)
M. Louis Plamondon: Quel pourcentage quitte le Québec, à peu près?
M. Jack Jedwab: Pardon?
M. Louis Plamondon: Quel est le nombre d'anglophones qui quittent le Québec, comme vous dites? Vous avez fait le calcul sur 15 ans, mais quel est-il depuis cinq ans, disons?
M. Jack Jedwab: Non, il y a une diminution, mais vous allez quand même voir, lors des prochains recensements, si on calcule les rapports trimestriels de Statistique Canada. Si on les met ensemble depuis cinq ans, il va quand même y avoir un autre écart de probablement 25 000 à 30 000 de moins. C'est important. C'est quand même 25 000 ou 30 000 dont c'est la langue maternelle. C'est important.
M. Louis Plamondon: Chez les francophones qui quittent le Québec, c'est combien à peu près? Ce n'est pas 150 000?
M. Jack Jedwab: Qui quittent le Québec? Non, pas tant que cela.
M. Louis Plamondon: Non? Vous avez parlé de....
M. Jack Jedwab: Non. Cinquante pour cent de toutes les personnes qui quittent le Québec sont des anglophones. Je parle de migration interprovinciale. Quant aux raisons pour lesquelles les anglophones quittent le Québec...
[Traduction]
bien des raisons...les Québécois anglophones non immigrants, et la décision de déménager éventuellement dans une autre province.
[Français]
Ça, c'est selon un sondage de 3 000 répondants, soit un échantillon assez important. Chez les gens nés au Canada, 24 p. 100 ont parlé de raisons économiques, 26 p. 100 ont invoqué des raisons politiques et 5 p. 100 ont parlé de sentiment de discrimination. Chez les immigrants au Québec, 15 p. 100 ont dit que c'était à cause d'un sentiment de discrimination, 15 p. 100 ont dit que c'était pour des raisons politiques, 31 p. 100 pour des raisons économiques et autres, comme des raisons familiales. Quand même, je pense que c'est un phénomène important à souligner et je pense que cela reflète...
Comme je l'ai dit, je ne suis pas d'accord avec les personnes qui disent que les anglophones sont menacés de disparaître à cause de l'assimilation sur le plan linguistique ou encore parce qu'ils ne peuvent pas recevoir de services en anglais. Je trouve que cet argument est non fondé. Je ne suis pas d'accord là-dessus, et je le dis publiquement. On entend souvent ce genre de remarques au Québec. On peut avoir des exemples de cela. Je ne dis pas non. Il se peut que cela arrive à l'extérieur de Montréal, surtout dans le «ROQ», the rest of Quebec, mais pour le reste, c'est ça...
J'essaie de voir et de saisir en quoi consiste le problème, pour faire en sorte que ce soit le paradis. Moi, j'aime beaucoup le Québec, mais il y a quand même beaucoup de gens qui quittent. Alors, j'essaie de comprendre pourquoi et je trouve que c'est important pour ceux qui font l'étude de la Partie VII, afin de mieux comprendre ce que veut dire l'objectif de la dualité et de voir comment l'atteindre. Il faut bien voir que cette notion de dualité n'a pas le même sens pour les anglophones au Québec que pour les francophones ailleurs au Canada. Pour les francophones hors Québec, la dualité est fortement reliée au phénomène de l'assimiliation linguistique et à la façon de contrer ce phénomène. Pour les anglophones du Québec, ce n'est pas cela la dualité communautaire. Ce n'est pas l'assimilation, mais plutôt ce sentiment de ne pas, en tant que communauté, avoir cette influence collective, disons. En tant qu'individus, il y en a qui ont de l'influence, bien sûr, comme on peut le constater et comme beaucoup d'autres Québécois, individuellement. Mais sur le plan collectif, ils n'ont pas le sentiment qu'ils peuvent contribuer pleinement. Est-ce le grand débat politique qui fait qu'il y a cet effet pervers? C'est possible, mais je pense que c'est important de l'étudier.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): I think, Mr. Jedwab, with your intervention, that we forgot the clock. Ce fut la même chose pour l'intervention de M. Boucher; ça n'a pas été difficile de laisser aller l'horloge. On vous remercie infiniment de votre présentation.
La séance est levée.