Passer au contenu

DEDC Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Examen de l’exercice des attributions découlant de la déclaration de situation de crise en vigueur du 14 février 2022 au 23 février 2022

 

Chapitre 1 : Introduction

La première manifestation associée au « Convoi de la liberté » a commencé le 28 janvier 2022, à Ottawa, en Ontario. Au cours des jours et des semaines qui ont suivi, il y a eu plusieurs autres manifestations et blocages dans tout le Canada, notamment à Coutts, en Alberta, à Surrey, en Colombie-Britannique, à Emerson, au Manitoba, ainsi qu’à Fort Erie, Sarnia et Windsor, en Ontario. Plusieurs rassemblements de moindre rimportance ont également été organisés ailleurs au pays. La figure 1 montre les endroits où ont eu lieu plusieurs de ces manifestations et blocages.

Figure 1 — Quelques-uns des lieux de manifestation et de blocage organisés par le « Convoi de la liberté », de janvier à février 2022

Cette image est une carte agrandie du Canada et des États-Unis qui présente certains sites des manifestations et des blocages du « Convoi de la liberté » survenus en 2022. Les sites des manifestations et des blocages sont indiqués avec le nom de la ville et de la province où ils sont survenus, accompagnés d’une illustration d’un panneau d’interdiction de traverser vis-à-vis chacun des endroits touchés. Il s’agit de Surrey, Colombie-Britannique; Coutts, Alberta; Emerson, Manitoba; Windsor, Sarnia, Fort Erie et Ottawa, Ontario. La carte met en évidence que ces endroits sont généralement situés près de la frontière avec les États-Unis.

Source : Figure créée par le Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise à partir de diverses informations diffusées dans les médias.

Face à ces événements, plusieurs ordres de gouvernement ont déclaré l’état d’urgence. La figure 2 présente la chronologie de ces états d’urgence en fonction des différentes manifestations et des blocages qu’il y a eu pendant cette période.

Figure 2 — Chronologie des événements liés à l’invocation de la Loi des mesures d’urgence en 2022

Cette infographie illustre la chronologie des évènements liés à l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence en février 2022. Une ligne du temps, marquée de plusieurs dates et évènements du 28 janvier au 3 mars 2022, est placée au milieu de l’infographie. À la gauche, les évènements marquants sont énumérés, dans une colonne verticale. À la droite, les manifestations et les blocages sont indiqués, illustrés à l’aide d’une ligne verticale avec une barre pour indiquer leur fin respective. En bas, à droite de la ligne du temps, est indiquée la date du 3 mars, correspondant à la création du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise.

À la gauche de la ligne du temps
6 février 
Déclaration d’état d’urgence
(Ville d’Ottawa)

11 février
Déclaration d’état d’urgence
(gouvernement de l’Ontario)

12 février
Adoption du Règlement de l’Ontario 71/22 (Infrastructures essentielles et voies publiques) –
(gouvernement de l’Ontario)

14 février
Déclaration d’une urgence d’ordre public 
(gouvernement fédéral)

15 février
Publication par le gouvernement fédéral :
Proclamation déclarant une urgence d’ordre public
Règlement sur les mesures d’urgences
Décret sur les mesures économiques d’urgence

21 février
Adoption d’une motion ratifiant la déclaration d’état d’urgence 
(Chambre des communes)

23 février
Retrait de la motion tendant à ratifier la déclaration d’état d’urgence 
(gouvernement fédéral);
révocation de la déclaration d’état d’urgence
(gouvernement de l’Ontario)

24 février
Révocation de la déclaration d’état d’urgence dans la ville d’Ottawa

À la droite de la ligne du temps

28 janvier – 20 février
Manifestation à Ottawa

29 janvier – 15 février 
Blocage à Coutts (Alberta)

5 février – 15 février 
Blocage du poste frontalier Pacific Highway (Colombie-Britannique)

7 février – 13 février
Blocage du pont Ambassador à Windsor (Ontario)

8 février – 14 février
Blocage près de Sarnia (Ontario)

10 février – 16 février
Blocage à Emerson (Manitoba)

12 février – 14 février 
Manifestation à Fort Erie (Ontario)


3 mars 
Création du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise

Source : Figure préparée par le Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise à partir de données provenant de diverses sources gouvernementales et de sources médiatiques.

Le 6 février 2022, la Ville d’Ottawa a déclaré l’état d’urgence[1]. Le 11 février, le gouvernement de l’Ontario a déclaré à son tour l’état d’urgence « en raison des perturbations qui touchaient l’infrastructure de transport et d’autres infrastructures essentielles à différents endroits de la province[2] ». Le 12 février, le gouvernement de l’Ontario a pris un décret d’urgence, en vertu de la Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence, interdisant à quiconque de bloquer les infrastructures essentielles, entre autres mesures[3].

Le 14 février 2022, conformément à l’article 17 de la Loi sur les mesures d’urgence fédérale (la Loi), le gouverneur en conseil a déclaré l’état d’urgence[4]. La Proclamation déclarant une urgence d’ordre public disait que l’état d’urgence avait été décrété pour les motifs suivants :

a) les blocages continus mis en place par des personnes et véhicules à différents endroits au Canada et les menaces continues proférées en opposition aux mesures visant à mettre fin aux blocages, notamment par l’utilisation de la force, lesquels blocages ont un lien avec des activités qui visent à favoriser l’usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens, notamment les infrastructures essentielles, dans le but d’atteindre un objectif politique ou idéologique au Canada;
b) les effets néfastes sur l’économie canadienne — qui se relève des effets de la pandémie de la maladie à coronavirus 2019 (COVID-19) — et les menaces envers la sécurité économique du Canada découlant des blocages d’infrastructures essentielles, notamment les axes commerciaux et les postes frontaliers internationaux;
c) les effets néfastes découlant des blocages sur les relations qu’entretient le Canada avec ses partenaires commerciaux, notamment les États-Unis, lesquels effets sont préjudiciables aux intérêts du Canada;
d) la rupture des chaînes de distribution et de la mise à disposition de ressources, de services et de denrées essentiels causée par les blocages existants et le risque que cette rupture se perpétue si les blocages continuent et augmentent en nombre;
e) le potentiel d’augmentation du niveau d’agitation et de violence qui menaceraient davantage la sécurité des Canadiens[5].

Le 15 février 2022, le gouverneur en conseil a pris le Règlement sur les mesures d’urgences (le Règlement) et le Décret sur les mesures économiques d’urgence (le Décret)[6]. Le Règlement mettait en place des mesures pour réglementer ou interdire les assemblées publiques et exigeait que les personnes concernées répondent à l’ordre de fournir des biens et services essentiels donné par certaines autorités « pour l’enlèvement, le remorquage et l’entreposage de véhicules, d’équipement, de structures ou de tout autre objet qui composent un blocage[7] ».

Entre autres mesures, le Décret prévoyait un régime permettant à certaines institutions financières de cesser certaines transactions avec toute personne physique ou entité « qui participe, même indirectement, à l’une ou l’autre des activités interdites au titre des articles 2 à 5 du Règlement », comme la participation à une assemblée publique dont il est raisonnable de penser qu’elle aurait pour effet de troubler la paix[8].

Dans les jours qui ont suivi la prise du Règlement et du Décret, la totalité des manifestations et des blocages ont cessé. À compter du 18 février 2022, une opération policière menée à Ottawa a permis de mettre un terme à la manifestation qui s’était transformée en une occupation du centre-ville d’Ottawa. Les manifestations et les blocages qu’il y avait ailleurs au Canada ont également pris fin.

L’article 62 de la Loi sur les mesures d’urgence prévoit qu’un comité d’examen parlementaire doit se pencher sur l’exercice des attributions découlant d’une déclaration de situation de crise. Le Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise (le Comité) a donc commencé son examen le 24 mars 2022.

Lors de ses travaux, le Comité a entendu 79 témoins au cours de 16 réunions. Parmi les témoins figuraient des ministres fédéraux, des fonctionnaires ministériels et des représentants des services de police, des administrations municipales, du secteur financier et des industries connexes. Le Comité a également reçu quatre mémoires et des centaines de pages de documents de la part de plusieurs ministères et organismes fédéraux[9]. Le Comité tient d’ailleurs à remercier sincèrement tous ceux qui ont participé à cet examen pour leur précieuse contribution à une importante évaluation parlementaire de la toute première fois où l’on a eu recours à la Loi sur les mesures d’urgence.

L’article 63 de la Loi sur les mesures d’urgence exige que dans les 60 jours qui suivent la cessation d’effet ou l’abrogation d’une déclaration de situation de crise, il faille faire une enquête sur les circonstances qui ont mené à cette situation de crise. C’est pourquoi le 25 avril 2022, a été publié un décret, créant la Commission sur l’état d’urgence (la Commission)[10].

Le présent rapport résume la preuve considérée par le Comité, principalement les déclarations des témoins ayant comparu devant ce dernier, et ses chapitres sont divisés de la façon suivante : Suivi parlementaire, Impact du « Convoi de la liberté », Réponse politique au « Convoi de la liberté », Réponse policière au « Convoi de la liberté », Sécurité nationale et le « Convoi de la liberté », Invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, Mesures extraordinaires à titre temporaire, Respect de la Charte, et Accès à l’information et aux documents. Le rapport contient également des recommandations à l’intention du gouvernement fédéral.

En préparant ce rapport, le Comité a pris en compte la preuve recueillie par la Commission en ce qui concerne l’exercice des attributions découlant d’une déclaration de situation de crise. La Commission a publié son rapport final le 17 février 2023[11]. Le 6 mars 2024, le gouvernement fédéral a publié sa réponse au rapport de la Commission[12].

Chapitre 2 : Suivi parlementaire

La Loi sur les mesures d’urgence prévoit un régime de suivi parlementaire de la déclaration de situation de crise, y compris :

  • l’examen d’une motion de ratification d’une déclaration de situation de crise par le Sénat et la Chambre des communes;
  • l’intervention du Parlement dans l’abrogation, la prorogation ou la modification de la déclaration de situation de crise;
  • l’intervention du Parlement dans l’abrogation ou la modification de tout décret ou règlement pris en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence;
  • le comité d’examen parlementaire; et
  • une enquête devant être faite « sur les circonstances qui ont donné lieu à la déclaration et les mesures prises pour faire face à la crise[13] ».

Conformément au paragraphe 58(1) de la Loi sur les mesures d’urgence, la motion de ratification de la déclaration de situation de crise a été déposée à la Chambre des communes le 16 février 2022[14]. Cette dernière a débattu de la motion du 17 au 21 février puis l’a adoptée le 21 février à la suite d’un vote par appel nominal[15].

La motion de ratification de la déclaration de situation de crise a été présentée le 21 février 2022[16] au Sénat, lequel en a débattu les 22 et 23 février[17].

La déclaration de situation de crise a été révoquée le 23 février 2022, date à laquelle le gouverneur en conseil a fait la Proclamation abrogeant la déclaration d’état d’urgence[18]. De ce fait, au Sénat, la motion de ratification a été retirée avant de faire l’objet d’un vote.

Le paragraphe 62(1) de la Loi sur les mesures d’urgence prévoit qu’un comité mixte composé de sénateurs et de députés examinera « [l]’exercice des attributions découlant d’une déclaration de situation de crise ».

Le 2 mars 2022, la Chambre des communes a adopté une motion visant à constituer un comité mixte spécial « pour examiner l’exercice des attributions découlant de la déclaration de situation de crise en vigueur du lundi 14 février 2022 au mercredi 23 février 2022[19] ».

Le 3 mars 2022, le Sénat a adopté une motion semblable en vue de constituer un comité mixte spécial dont le libellé du mandat est identique à celui de la motion adoptée par la Chambre des communes[20].

Le 5 avril 2022, le Comité a adopté une motion qui dit entre autres choses :

Que le comité commence son étude, en vertu de l’article 62(1) de la Loi sur les mesures d’urgence, des options auxquelles le gouvernement du Canada a eu recours durant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence et qui sont énoncées dans la Proclamation déclarant une urgence d’ordre public.
Que dans la présente étude de chaque option et aux fins du rapport final du comité, ce dernier tienne compte de la nécessité, de la mise en œuvre et de l’incidence que pourraient avoir ces options[21].

La Loi sur les mesures d’urgence exige que le comité d’examen parlementaire dépose devant chaque Chambre du Parlement un rapport des résultats de son examen au moins tous les 60 jours pendant la durée de validité d’une déclaration de situation de crise, et donne au Comité le pouvoir d’abroger ou de modifier un décret ou un règlement[22]. Ainsi, au moment de la rédaction de la Loi sur les mesures d’urgence, le comité d’examen parlementaire avait pour vocation d’assurer un suivi continu pendant la durée de validité de la déclaration de situation de crise, plutôt que d’effectuer un contrôle a posteriori comme ce fût le cas pour la Commission.

En l’occurrence, comme la déclaration de situation de crise a été de courte durée, le Comité a été créé alors que cette déclaration avait déjà été abrogée. Il n’a donc pas pu faire rapport régulièrement aux deux Chambres du Parlement pendant que la déclaration était en vigueur, et n’a pas non plus eu l’occasion d’abroger ou de modifier un décret ou un règlement.

Comme le Comité et la Commission ont commencé leurs travaux simultanément, le Comité a invité trois témoins à comparaître pour expliquer l’étendue de son mandat.

Philippe Hallée, légiste et conseiller parlementaire du Sénat, et Philippe Dufresne, légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes, ont expliqué que conformément à la Loi sur les mesures d’urgence et aux motions adoptées par les deux Chambres, le Comité était habilité à examiner l’exercice des attributions découlant de la déclaration d’état d’urgence, mais qu’il revenait au Comité de décider si d’autres questions relevaient de son mandat[23].

En tant que ministre ayant parrainé la Loi sur les mesures d’urgence au Parlement lors de son adoption en 1988, l’honorable Perrin Beatty a donné au Comité un aperçu du rôle qu’il était censé jouer :

Nous nous attendions à ce que le rôle principal du comité soit d’assurer une surveillance parlementaire continue, pendant toute la durée de la crise, de la façon dont le gouvernement utilise ses pouvoirs. Nous n’excluions vraiment pas que le comité puisse se demander s’il était justifié que le gouvernement s’accorde ces pouvoirs[24].

L’honorable Perrin Beatty a aussi affirmé que le Comité devrait examiner les circonstances ayant mené à la déclaration de situation de crise et rechercher de l’information permettant de faire la lumière sur les raisons pour lesquelles la Loi sur les mesures d’urgence a été invoquée. Enfin, il a dit qu’il serait approprié pour le Comité de déterminer si le seuil pour l’invocation de cette loi a été atteint[25].

Dans son mémoire au Comité, Ryan Alford, professeur à l’Université Lakehead, a indiqué que le Comité pouvait se pencher sur la question de savoir s’il y avait une situation d’urgence telle que définie par la Loi sur les mesures d’urgence. Il a expliqué qu’en tant qu’« organe de supervision parlementaire et de gouvernement responsable », le Comité devrait tenir le gouvernement responsable de sa conduite tant pendant la déclaration de situation de crise que devant la Commission[26].

Certains témoins ont aussi abordé la question du chevauchement des mandats du Comité et de la Commission[27]. L’honorable Perrin Beatty a indiqué que ce chevauchement ne le dérangeait pas et qu’il pensait que « c’est sain en démocratie », car il se pourrait que les deux organes arrivent à des conclusions différentes[28].

Cependant, dans son mémoire au Comité, Nomi Claire Lazar, professeure à l’Université d’Ottawa, a expliqué que les examens menés simultanément par le Comité et la Commission créaient de la confusion chez les experts[29]. Elle a expliqué que :

[L]e chevauchement d’enquêtes suscite la confusion et l’exaspération au sein de la population et entraîne des dépenses, sans compter le risque de conclusions et de recommandations divergentes. Le processus actuel risque de générer, au sein de la population, la perception qu’on politise les enquêtes. Ensemble, ces facteurs pourraient miner la confiance du public envers les mécanismes de reddition de comptes, ce qui, en retour, nuit à leur efficacité[30].

Elle a invité le Comité à exercer son rôle de tribune pour la tenue d’un débat public sérieux après le recueil des faits par « un seul organe, dont la neutralité est largement acceptée par la population[31] ».

Dans son rapport final, la Commission a recommandé que la Loi sur les mesures d’urgence soit modifiée afin de clarifier le mandat d’un comité d’examen parlementaire et le moment où celui-ci devrait être formé[32]. Dans sa réponse aux recommandations, le gouvernement fédéral a reconnu qu’il serait avantageux que le comité soit créé « le plus tôt possible pour lui permettre d’exercer sa fonction de surveillance et que l’étude du comité soit faite de manière expéditive[33] ». Toutefois, dans sa réponse, le gouvernement fédéral ne s’est pas nécessairement engagé à modifier la Loi sur les mesures d’urgence pour apporter ces changements, mais a plutôt proposé de tenir des consultations additionnelles sur la série de modifications potentielles à cette loi.

À la lumière de son expérience et des témoignages qu’il a reçus au sujet du moment choisi pour tenir ses travaux et ceux de la Commission, le Comité convient qu’à l’avenir, les travaux d’un comité d’examen parlementaire devraient commencer plus tôt suivant la déclaration d’un état d’urgence. C’est pourquoi le Comité fait les recommandations suivantes :

Recommandation 1

Que le gouvernement fédéral modifie la Loi sur les mesures d’urgence afin que le comité d’examen parlementaire :

  • soit nommé dans les 48 heures suivant la proclamation de la situation de crise;
  • ne siège que pendant une situation de crise et remplisse un rôle de surveillance; et
  • ne siège pas en même temps que se tient l’enquête prévue à l’article 63 de la Loi.

Recommandation 2

Que le gouvernement fédéral modifie la Loi sur les mesures d’urgence afin d’exiger que la motion examinée par chaque Chambre du Parlement pour confirmer une déclaration de situation de crise prévoie également la constitution ou la création du comité d’examen parlementaire, de manière à ce que le comité devienne actif aussitôt que possible.

Le Comité reconnaît que d’autres aspects de son examen pourraient devoir se faire différemment dans le futur. Par exemple, bien que le Comité ait trouvé très profitable l’appui juridique fourni par les légistes du Sénat et de la Chambre des communes, le Comité anticipe des scénarios futurs dans lesquels il pourrait s’avérer utile de retenir les services de conseillers juridiques externes pour lui permettre d’effectuer correctement son travail.

Quoi qu’il en soit, concernant la façon dont il devrait fonctionner à l’avenir, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 3

Qu’à l’avenir, les Administrations du Sénat et de la Chambre des communes donnent à tout comité d’examen parlementaire la priorité absolue pour obtenir les ressources parlementaires disponibles pour les réunions des comités pendant une crise nationale.

Enfin, en ce qui concerne la reddition de comptes à l’égard du public, au sens large, et la procédure d’enquête, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 4

Que le gouvernement fédéral collabore avec le Parlement pour que soit modifiée la Loi sur les mesures d’urgence afin d’y inclure une disposition d’examen automatique de ladite loi par un comité parlementaire mixte, dans les 12 mois suivant la production du rapport final de l’enquête exigée par la Loi après son invocation ou à tous les 10 ans lorsque la Loi n’a pas été invoquée.

Chapitre 3 : Impact du « Convoi de la liberté »

Impact sur les résidents et les communautés

Plusieurs témoins ont commenté les répercussions majeures sur le bien-être, l’habitabilité du quartier et la sécurité des résidents touchés par les manifestations et les blocages du « Convoi de la liberté[34] ». Outre le bruit constant et les émanations produites par le carburant diesel, ces résidents ont souffert de stress, de détresse psychologique, de privation de sommeil, de perte d’audition, voire de pensées suicidaires, en plus de subir des comportements agressifs et intimidants de la part des manifestants. Le retentissement des klaxons a été particulièrement traumatisant pour les résidents du centre-ville d’Ottawa[35]. Le maire d’Ottawa, Jim Watson, a qualifié la présence de nombreux camions lourds et de véhicules au centre-ville d’Ottawa d’« armada écrasante et menaçante » pour les résidents de cette ville[36]. Le maire de Coutts, Jim Willett, a mentionné que la population âgée de sa localité craignait les déplacements dans la zone des manifestations en raison de la présence intimidante des manifestants[37].

Mathieu Fleury, conseiller municipal de la Ville d’Ottawa, a souligné que pour certains résidents, le préjudice psychologique n’a pas cessé depuis l’expérience qu’ils ont vécue[38]. Des témoins ont indiqué que le volume d’appels d’urgence et de détresse a augmenté de manière significative au cours des événements liés au « Convoi de la liberté[39] ». À titre d’exemple, la Ville d’Ottawa a reçu plus de 18 000 appels au 311, un volume nettement plus élevé qu’à l’habitude[40].

Par ailleurs, certains témoins ont fait part du préjudice moral et de l’épuisement vécus par les acteurs investis dans le rétablissement de l’ordre, dont les policiers, les agents de règlements, les conducteurs de déneigeuses, etc.[41]. Stephen Laskowski, président de l’Alliance canadienne du camionnage, a également parlé des conséquences pour les camionneurs immobilisés par les blocages, notamment sur la capacité de gagner leur vie[42].

Qui plus est, des témoins ont fait part au Comité de la perturbation des déplacements pour de nombreux résidents et travailleurs[43]. Certains services ont dû être relocalisés ou interrompus[44]. À titre d’exemple, à Ottawa, le personnel de l’Hôpital Montfort a dû loger dans des hôtels avoisinants, en raison d’importants ralentissements à la circulation entraînant une forte baisse d’activités dans les urgences[45]. Par ailleurs, 13 familles ont dû retarder ou reprogrammer des traitements d’oncologie au Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario[46]. Jim Willett a également ajouté qu’à Coutts, les autobus scolaires et des services de messagerie ne pouvaient plus passer dans la zone occupée par les manifestants[47].

Enfin, à titre de leçons tirées de l’expérience, des témoins de la Ville d’Ottawa ont expliqué qu’un barrage proactif de la circulation aurait pu empêcher les blocages de se produire et les camions de s’installer au centre-ville[48]. De plus, des erreurs comme celle de laisser les camions circuler sur des routes interdites, permettre aux manifestants d’apporter des équipements à des fins récréatives sur la zone de manifestation ou ne pas informer adéquatement les résidents et les entreprises touchés sur le plan d’action des autorités auraient pu être évitées[49].

Impact économique

Plusieurs témoins ont déclaré que de nombreuses entreprises ont été touchées par le « Convoi de la liberté », que ce soit financièrement ou à cause de la cessation temporaire ou complète de leurs activités, notamment en raison de l’impossibilité de recevoir des livraisons[50]. Mathieu Fleury a qualifié les événements de « chaos[51] » pour les commerces et les institutions du secteur touché. En l’occurrence, la fermeture du Centre Rideau pendant 24 jours consécutifs a entraîné une perte de revenus de deux millions de dollars par jour pour les commerces[52].

Mathieu Fleury a également indiqué que les petites entreprises et les commerces indépendants ont été particulièrement affectés. Certains des restaurateurs étaient confrontés à un choix difficile : enfreindre les règles de santé en vigueur pour servir les manifestants ou carrément fermer leurs portes[53]. Enfin, Jim Watson a ajouté que l’industrie touristique a également été touchée[54].

Par ailleurs, de nombreux témoins ont confirmé devant le Comité des répercussions économiques importantes liées au blocage illégal des infrastructures transfrontalières[55]. À titre d’exemple, la Ville de Windsor a absorbé une facture de 5,7 millions de dollars pour mettre fin au « Convoi de la liberté », facture dont elle a demandé le remboursement auprès des gouvernements de l’Ontario et du Canada[56].

En revanche, l’Association canadienne des libertés civiles a souligné dans son mémoire présenté au Comité :

Il y avait des craintes quant aux impacts économiques des blocus à la frontière qui auraient pu, sur une longue période, représenter une menace sérieuse pour la santé et la sécurité. Cependant, lorsque la situation d’état d’urgence a été déclarée, il n’y avait pas de preuves convaincantes que les Canadiens étaient à risque de se retrouver privés des produits de première nécessité. Les dommages économiques n’ont pas mené à des circonstances qui mettaient gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens[57].

Plusieurs témoins ont souligné l’impact économique du blocage du pont Ambassador, à Windsor, sur le plan national, et plus particulièrement pour l’industrie automobile[58]. La crainte de compromettre la chaîne d’approvisionnement avec les partenaires commerciaux américains figurait en tête de liste des préoccupations pour plusieurs témoins[59]. Des témoins ont précisé que la déviation des marchandises vers d’autres postes transfrontaliers ne pouvait constituer une solution, puisqu’aucun d’eux n’a la même capacité que le pont Ambassador[60].

De plus, certains témoins étaient préoccupés par la réputation du Canada sur la scène du commerce international et les potentielles répercussions des blocages des infrastructures transfrontalières sur les investissements au Canada en provenance de l’étranger[61]. En février 2024, l’honorable Dominic LeBlanc, ministre de la Sécurité publique, des Institutions démocratiques et des Affaires intergouvernementales, a réitéré que le blocage du pont Ambassador a entraîné des répercussions sur les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis estimées à 390 millions de dollars par jour, considérant que 30 % de tous les échanges routiers entre ces deux pays se font par l’intermédiaire de ce point de passage[62].

Le Comité prend acte des répercussions subies en raison du « Convoi de la liberté » par de nombreuses personnes et entités, et ce, dans différents secteurs. À cet effet, le Comité estime, qu’à la suite d’une situation de crise, telle que définie par la Loi sur les mesures d’urgence, il pourrait s’avérer utile de tenir des consultations auprès des personnes représentant les régions touchées afin de déterminer l’étendue des dommages et les mesures d’atténuation qui peuvent être prises pour éviter la survenance des situations similaires à l’avenir.

Chapitre 4 : Réponse politique au « Convoi de la liberté »

Étant donné que les événements se sont déroulés dans plusieurs municipalités de différentes provinces, les mesures prises en réponse au « Convoi de la liberté » ont nécessité, dans une certaine mesure, l’intervention des trois ordres de gouvernement. Outre le gouvernement fédéral, plusieurs administrations ont déclaré l’état d’urgence face aux événements survenus en janvier et février 2022, à savoir le gouvernement de l’Ontario ainsi que les villes d’Ottawa et de Windsor.

Le gouvernement de l’Ontario a déclaré l’état d’urgence le 11 février 2022 en vertu de sa Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence. L’état d’urgence a permis au gouvernement provincial d’adopter le Règlement de l’Ontario 71/22 : Infrastructures essentielles et voies publiques, qui interdisait le blocage d’infrastructures essentielles, entre autres mesures[63]. Selon la province, le décret d’urgence était devenu nécessaire parce que les pouvoirs réglementaires existants n’avaient pas permis d’atténuer les préjudices causés par les blocages à Ottawa et sur le pont Ambassador[64].

En ce qui concerne la décision du gouvernement fédéral d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence, il convient de noter que l’article 25 de cette loi exige que le gouvernement fédéral « consulte le lieutenant-gouverneur en conseil de chaque province touchée par l’état d’urgence ». Cet article prévoit également que si une province ne peut être convenablement consultée avant la déclaration d’état d’urgence ou sa modification, la consultation peut avoir lieu après coup.

Le 16 février 2022, l’honorable Marco Mendicino, ancien ministre de la Sécurité publique, a déposé à la Chambre des communes son Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement : Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence[65]. Ce même rapport a été déposé au Sénat le 21 février par l’honorable sénateur Marc Gold, représentant du gouvernement au Sénat[66].

Le compte rendu faisait état de manière détaillée des consultations menées depuis la fin janvier 2022 entre les gouvernements fédéral et provinciaux, les administrations municipales, ainsi que les partenaires étrangers. Il décrivait une rencontre des premiers ministres qui s’était tenue le 14 février 2022 pour décider s’il fallait déclarer l’état d’urgence, et incluait en annexe une lettre du premier ministre du Canada adressée aux premiers ministres des provinces indiquant que leurs points de vue avaient été pris en compte pour déterminer quelles mesures extraordinaires à titre temporaire seraient prises en réponse au « Convoi de la liberté[67] ».

Même si le Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement : Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence mentionne que le gouvernement fédéral a consulté les leaders autochtones à propos des blocages, le Comité estime qu’il y a une obligation de consulter avant d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Par conséquent, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 5

Que le gouvernement fédéral modifie la Loi sur les mesures d’urgence afin de prévoir qu’il soit tenu d’entreprendre des consultations auprès des peuples autochtones et d’établir les paramètres de celles-ci, et ce, avant d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence, dans le respect des principes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, notamment en ce qui concerne la justice, la démocratie, le respect des droits de la personne, la non-discrimination et la bonne foi.

Le Comité convient que la Loi sur les mesures d’urgence devrait être modifiée pour mieux prendre en considération les gouvernements provinciaux, et exiger du gouvernement fédéral qu’il fournisse davantage d’informations sur le caractère national de la situation de crise. La preuve recueillie par le Comité et la Commission vont dans ce sens. Par exemple, Leah West a déclaré ceci devant le Comité :

En même temps, je dirais que nous devons aussi modifier ce qu’est la consultation entre le gouvernement fédéral et les provinces, et rendre obligatoire une véritable consultation de ce côté‑là aussi. L’un ne va pas sans l’autre[68].

À la Commission, les gouvernements de la Saskatchewan et de l’Alberta ont décrié le fait que le gouvernement fédéral n’ait pas consulté adéquatement les provinces avant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence[69].

Selon le rapport de la Commission, la réunion des premiers ministres du 14 février « a été le seul moment où l’on a demandé aux premiers ministres de donner leurs avis sur l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence[70] ». Le rapport indique ensuite :

Bien sûr, je conviens que les premiers ministres ont eu peu de temps pour se préparer et que la convocation qu’ils ont reçue ne précisait pas explicitement le sujet à discuter lors de la réunion des premiers ministres. Cela dit, dans le contexte des événements, le sujet de discussion n’a probablement pas surpris de nombreux participants.
Le gouvernement fédéral a indiqué à la Commission que l’une des raisons pour lesquelles il n’a pas informé les provinces de l’objet de la réunion était la crainte d’une fuite de l’information et la possibilité qu’une déclaration d’état d’urgence puisse provoquer la colère des manifestants et augmenter le risque de violence. Je reconnais la validité de ce point de vue, mais je le qualifierais d’excès de prudence[71].

Lorsqu’il a témoigné devant la Commission, le premier ministre Justin Trudeau a également expliqué qu’il avait été décidé, à la réunion du Cabinet du 13 février, que les premiers ministres provinciaux seraient consultés le lendemain, et qu’il y avait eu une conférence téléphonique avec le caucus libéral avant la tenue de cette réunion[72]. Le premier ministre a expliqué également que la réunion des premiers ministres a pris la forme d’une conférence téléphonique qui a duré environ une heure[73]. Pendant cette conférence téléphonique, le premier ministre de la Saskatchewan a dit qu’il était toujours contre l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, et celui de l’Alberta a déclaré que sa province n’en avait pas besoin[74].

Le Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement : Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence précise en outre que le Québec, l’Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba, le Nouveau‑Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l’Île-du-Prince-Édouard ont déclaré qu’il n’était pas nécessaire de recourir à la Loi sur les mesures d’urgence dans leur province[75].

Des témoins ayant comparu devant le Comité ont parlé également du caractère national de l’état d’urgence au sens de la Loi sur les mesures d’urgence. Perrin Beatty a témoigné en ce sens :

Il faut que la situation réponde aux critères d’une crise nationale. Les conséquences doivent être graves au point de nuire au bien-être du pays en entier. Toutefois, cela ne veut pas dire que la situation de crise touche toutes les régions du pays.
[…]
Nous voulions avoir une loi qui permette au gouvernement de dire : « Nous avons une crise grave, elle répond à la définition d’une crise nationale, mais nous n’allons pas suspendre les droits de toute la population; nous voulons que ce soit ciblé[76]. »

Enfin, Ryan Teschner, directeur administratif et chef de cabinet de la Commission de services policiers de Toronto, a dit ceci devant la Commission :

[Si] le gouvernement ne met pas sur la table ce qu’invoquer la [Loi] veut dire, quels sont les règlements qu’il mettrait en place éventuellement, quels sont les impacts de ces règlements sur certains de ces acteurs autour de la table? Je ne sais pas comment on peut avoir une consultation de fond sans explorer ces dimensions[77].

De nombreux témoins ont commenté la réponse politique au « Convoi de la liberté » au niveau du gouvernement fédéral, dont les consultations et les rencontres qui ont eu lieu avant et après l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence[78]. L'ancien ministre Mendicino et l’honorable Bill Blair, ancien ministre de la Protection civile, ont abordé plus particulièrement le rôle joué par le gouvernement fédéral, qui a collaboré avec les services de police et participé à des consultations avec d’autres ordres de gouvernement. L'ancien ministre Mendicino a dit au Comité que le gouvernement fédéral « est demeuré en contact avec les organismes d’exécution de la loi tout au long de l’occupation pour veiller à ce qu’ils disposent du soutien et des ressources dont ils avaient besoin[79] ». Il a également évoqué les consultations menées de manière continue auprès des provinces et des territoires dans le cadre de la mise en œuvre des mesures extraordinaires à titre temporaire adoptées pendant que la déclaration de situation de crise était en vigueur[80]. Pour sa part, l’ancien ministre Blair a fait état de ses échanges avec la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et d’autres dirigeants de corps policiers au sujet des blocages à Coutts, et des options possibles pour obtenir des dépanneuses afin de remorquer les camions[81].

Certains maires des villes touchées ont déclaré que, globalement, ils s’étaient sentis soutenus par le gouvernement fédéral. Jim Watson a dit qu’il avait participé à plusieurs réunions avec des représentants fédéraux, et qu’il s’était entretenu directement avec le premier ministre Justin Trudeau dès le 3 janvier[82]. Pour sa part, Drew Dilkens, maire de la ville de Windsor, a dit ceci :

À titre de maire de Windsor, j’ai toujours senti que j’avais l’oreille des représentants des gouvernements fédéral et provincial aux plus hauts échelons, et notamment [de l’ancien] ministre Mendicino, [de l’ancien] ministre Blair, de la solliciteure générale de l’Ontario, du premier ministre Ford et du premier ministre Trudeau. Mon personnel était en communication et coordonnait les interventions avec le personnel politique des cabinets des ministres fédéraux et provinciaux, ainsi qu’avec les autorités responsables de la sécurité[83].

Dans la même veine, Steve Kanellakos, directeur de la Ville d’Ottawa, a déclaré que Rob Stewart, sous-ministre de la Sécurité publique du Canada, avait communiqué avec lui de sa propre initiative après la première fin de semaine de manifestations pour discuter de la situation, et qu’il était devenu un intermédiaire clé entre la ville d’Ottawa et le gouvernement fédéral[84].

Toutefois, certains témoins représentant les municipalités touchées ont souligné les points à améliorer dans leurs relations avec le gouvernement fédéral pour faire face à des situations de crise comme celle qui s’est produite en janvier et février 2022. Steve Kanellakos a déclaré qu’un protocole d’entente était nécessaire entre le gouvernement fédéral et la Ville d’Ottawa pour la gestion des situations d’urgence de grande envergure comme celle connue pendant les manifestations du « Convoi de la liberté[85] ».

Drew Dilkens a fait valoir quant à lui que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial devraient indemniser la Ville de Windsor pour les importantes dépenses imprévues qu’elle a dû engager à cause du blocage du pont Ambassador à Windsor[86]. Par conséquent, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 6

Que les municipalités qui engagent des dépenses raisonnables à cause d’une situation d’urgence (comme pour des barrières en béton) soient indemnisées et qu’une table ronde tripartite composée de représentants fédéraux, provinciaux et municipaux soit convoquée pour discuter de telles dépenses encourues après une situation d’urgence.

À l’échelon provincial, des témoins ont critiqué le niveau d’engagement du gouvernement de l’Ontario et du premier ministre Doug Ford dans les réunions concernant les interventions face au « Convoi de la liberté », ainsi que le manque de responsabilités assumées par le gouvernement de l’Ontario pour certains éléments concernant le « Convoi de la liberté ».

Par exemple, Jim Watson a indiqué au Comité que le gouvernement de l’Ontario avait refusé de prendre part à un dialogue au sein d’un comité tripartite réunissant des représentants de la Ville d’Ottawa, du gouvernement fédéral et du gouvernement de l’Ontario[87]. Il a aussi souligné le fait que le premier ministre Ford ne s’était pas rendu à Ottawa pendant les manifestations[88]. Dans son mémoire au Comité, l’Association canadienne des libertés civiles était aussi d’avis que « le gouvernement provincial [de l’Ontario] n’a pas réagi sérieusement aux manifestations avant le 9 février[89] ». Jody Thomas, conseillère en sécurité nationale et renseignement au Bureau du Conseil privé, a tenté d’expliquer en ces termes l’absence du gouvernement de l’Ontario :

L’Ontario a déterminé qu’il s’agissait d’une manifestation dans la capitale fédérale en raison du mandat fédéral, et que c’était donc un problème fédéral. C’était une question beaucoup plus complexe que cela. C’est pour cette raison qu’ils ne se sont pas présentés à la table, bien que nous l’aurions souhaité[90].

Drew Dilkens a expliqué qu’une plus grande collaboration et un plus grand soutien étaient requis de la part du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial afin de renforcer la sécurité à la frontière canadienne[91].

Autant le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, que sa vice-première ministre, Sylvia Jones, qui était aussi solliciteure générale de l’Ontario pendant les manifestations du « Convoi de la liberté », ont décliné les invitations à venir témoigner devant le Comité et la Commission. La Commission a contesté ce refus de comparaître devant la Cour fédérale, qui a jugé qu’on ne pouvait forcer le premier ministre et la vice-première ministre à témoigner devant la Commission en raison de l’immunité que leur conférait leur privilège parlementaire[92].

Le Comité fait donc la recommandation suivante :

Recommandation 7

Que le gouvernement fédéral modifie la Loi sur les mesures d’urgence afin de donner aux provinces un rôle clair et bien défini en cas de perturbations futures et, que dans le cadre de cet exercice : a) il conviendrait d’examiner les rôles des services de police, notamment les secteurs de compétence; b) les trois ordres de gouvernement devraient conclure un accord définissant clairement ces rôles et responsabilités en cas de situation d’urgence dans la Région de la capitale nationale et aux postes frontaliers; c) d’autres domaines et infrastructures essentiels devraient également être pris en compte dans le cadre de cet examen.

Chapitre 5 : Réponse policière au « Convoi de la liberté »

Les corps policiers de tous les ordres de gouvernement ont pris part aux interventions pour répondre aux manifestations et aux blocages du « Convoi de la liberté » avant que la déclaration de situation de crise ne soit en vigueur et pendant toute sa durée. Les principaux corps policiers mobilisés à ce moment-là étaient la GRC, la Police provinciale de l’Ontario (PPO) et le Service de police d’Ottawa (SPO)[93].

Les autres services de police provinciaux et municipaux qui sont intervenus lors des événements qui ont mené à la déclaration d’état d’urgence sont le Service de police de Toronto, le Service de police de Windsor, la Police régionale de York, la Sûreté du Québec, la Police de Gatineau et la Police régionale de Peel[94]. Les petites municipalités comme celle de Coutts, en Alberta, sont desservies par la GRC dans le cadre d’ententes sur les services de police[95].

Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer dans la direction de la GRC. La Loi sur la Gendarmerie royale du Canada prévoit que le commissaire de la GRC exerce son mandat « sous la direction du ministre » de la Sécurité publique et de la Protection civile du Canada[96]. Toutefois, le commissaire « a pleine autorité sur la Gendarmerie et tout ce qui s’y rapporte[97] ».

La Loi sur les services policiers de l’Ontario prévoit que dans une situation d’urgence, le solliciteur général de la province peut conclure une entente en vue de la prestation de services policiers[98]. D’ailleurs, la PPO est intervenue dès le départ dans la réponse policière au « Convoi de la liberté » :

[En] fournissant des rapports de renseignement aux forces de l’ordre partenaires, en dialoguant avec les organisateurs du convoi et en travaillant avec les services de police municipaux pour leur fournir des ressources[99].

Pendant les manifestations à Ottawa, le SPO a connu un changement de direction. Peter Sloly a occupé le poste de chef du SPO du 28 octobre 2019 au 15 février 2022, date à laquelle il a démissionné. Par la suite, Steve Bell a été nommé chef intérimaire du SPO.

Pour assurer la sécurité de la Cité parlementaire, plusieurs organisations ont participé à la surveillance des événements qui se sont produits sur la Colline du Parlement ou dans les interventions qu’ils ont nécessitées, notamment le SPO, le Service de protection parlementaire (SPP), la Direction de la sécurité institutionnelle du Sénat et le Bureau du sergent d’armes et de la sécurité institutionnelle de la Chambre des communes.

Le SPP a été créé après la signature d’un Protocole d’entente (PE), en juin 2015, entre les présidents du Sénat et de la Chambre des communes, le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile et le commissaire de la GRC[100]. Selon ce PE, le SPP a été « établi pour assurer la sécurité physique intégrée partout à l’intérieur de la Cité parlementaire et sur le terrain de la Colline du Parlement[101] ». Le PE précise également le rôle du directeur du SPP en ces termes :

Le directeur sera chargé de la planification, de la direction, de la gestion et de l’administration de la sécurité opérationnelle du Parlement […], tout en tenant compte des objectifs, des priorités et des buts établis par le Président du Sénat et le Président de la Chambre des communes[102].

Dans un autre PE conclu entre la GRC et la Chambre des communes au sujet de la communication d’informations destinées à améliorer la sécurité de la Chambre, les responsabilités de chaque organisation ont été précisées. Ce PE prévoyait que la Chambre, par l’intermédiaire du sergent d’armes, « a le droit et le mandat d’assurer la sécurité de la Chambre » et « a l’autorité complète et unique de réglementer et d’administrer la Cité parlementaire[103] ». Le Comité n’a pas été informé d’un PE équivalent conclu entre la GRC et le Sénat, s’il en existe un.

Défis auxquels se sont heurtées les forces policières

De nombreux témoins ont soutenu que les manifestations et blocages causés par le « Convoi de la liberté » étaient sans précédent[104].

Plusieurs témoins ont expliqué que l’ampleur des manifestations, particulièrement à Ottawa, posait des défis particuliers pour la police, notamment à cause du manque de ressources permettant de gérer les manifestations en toute sécurité[105]. Brenda Lucki, commissaire de la GRC, a déclaré qu’à cause de l’ampleur et de la durée des manifestations à Ottawa, il était devenu difficile d’assurer la sécurité de la population :

C’était une manifestation complètement différente, où les gens ne partaient pas. Nos équipes de liaison avec la police essayaient de motiver les gens à partir, parce que lorsque nous avons affaire à une manifestation de masse, il faut réduire l’empreinte, afin d’appliquer la loi de la façon la plus sécuritaire possible. Lorsqu’il y avait plein de manifestants la fin de semaine, ce n’était pas le moment de faire quoi que ce soit pour faire respecter la loi, parce que c’était trop dangereux pour le public et la police[106].

Selon le SPO, l’ampleur des manifestations à Ottawa a également fait en sorte qu’il a été difficile d’affecter un nombre adéquat d’agents de police aux manifestations. De fait, 2 200 agents ont été requis pour arriver à mettre un terme aux manifestations[107]. Faisant référence à sa demande officielle du 7 février pour avoir 1 800 agents supplémentaires en renfort, Peter Sloly, chef à la retraite du SPO, a expliqué ceci :

J’ai surtout demandé à répétition d’avoir à ma disposition un plus grand nombre d’agents de police et d’employés ayant une formation spécialisée. Je voulais aussi avoir accès à des remorqueuses. Je recherchais ainsi un accès prévisible à un grand nombre d’agents – 1 800 – et un accès à un nombre prévisible et constant de remorqueuses pour poids lourds[108].

Des témoins ont laissé entendre que le manque de leadership chez les manifestants compliquait les négociations pour mettre un terme aux manifestations et évacuer les camions des zones résidentielles à Ottawa[109]. À ce propos, Peter Sloly a expliqué que :

Dans de nombreux cas, il y a une entité organisatrice unique ou une personne influente au sein d’un groupe de manifestants. Ce n’était pas le cas dans le cadre des événements qui nous occupent. Des efforts considérables ont été déployés par de multiples compétences et de multiples organismes aux trois paliers des services de police pour négocier des accords, des ententes et des engagements raisonnables, mais il n’y a jamais eu une « autre » entité unifiée avec laquelle un service policier aurait pu s’entendre adéquatement sur la question de savoir si ce qui avait été convenu se produirait le jour des événements[110].

Toutefois, il a été possible, dans une certaine mesure, de faire déplacer avec succès quelques-uns des poids lourds utilisés dans les manifestations à Ottawa. Selon Steve Kanellakos, la municipalité a été avisée que des manifestants souhaitaient rencontrer un haut fonctionnaire de la ville, et les pourparlers ont mené au déplacement d’environ 40 poids lourds[111].

De nombreux témoins ont affirmé que l’utilisation de véhicules pendant les manifestations, notamment de poids lourds, avait compliqué les interventions des services de police face aux manifestations et aux blocages, aussi bien dans la ville d’Ottawa qu’en périphérie[112]. Selon Jim Watson, le plus grand défi à relever, à Ottawa, a été l’impossibilité de faire déplacer les camions[113].

Certains témoins ont expliqué qu’il n’avait pas été pas possible de trouver des conducteurs de dépanneuses acceptant de prendre part aux efforts destinés à déplacer les poids lourds[114]. Brenda Lucki a fait état de quelques-unes des raisons pour lesquelles les entreprises de remorquage refusaient de coopérer :

Certaines entreprises de remorquage recevaient de l’argent des manifestants pour ne pas nous aider. Certains employés de ces entreprises craignaient pour leur sécurité et pour leur gagne‑pain, et ils subissaient beaucoup de harcèlement[115].

Certains témoins étaient aussi préoccupés par d’autres problèmes causés par les poids lourds. Larry Brookson, directeur par intérim du SPP, a fait part de ses inquiétudes au sujet de ce que pouvaient contenir les camions et dont on n’avait aucune idée à ce moment-là. Voici ce qu’il dit à ce propos :

Je n’avais aucune idée de ce qui se trouvait à bord de ces véhicules, et je n’avais aucun moyen de le vérifier. C’était clairement un enjeu de sécurité qui m’a inquiété pendant toute l’occupation[116].

Des témoins se sont également prononcés devant le Comité sur l’incidence de la baisse de la confiance du public à l’égard des dirigeants des services de police, particulièrement à Ottawa[117]. Pour justifier sa décision de démissionner de son poste de chef du SPO pendant les manifestations qui se sont déroulées dans sa ville, Peter Sloly a expliqué que toute baisse de la confiance du public pose un risque en matière de sécurité publique, et à Ottawa, cela a contribué à l’attrition des ressources :

Le déclin de la confiance du public entraîne un risque pour la sécurité publique dans n’importe quelle organisation policière et dans tout environnement policier. L’attention était de plus en plus tournée vers le Service de police d’Ottawa dans le cadre d’une crise nationale, et de plus en plus sur la personne qui occupait le poste de chef de police, en l’occurrence moi. Selon mon interprétation – chacun aura sa propre opinion là-dessus –, la baisse de confiance envers mes policiers et envers mon service ralentissait peut-être l’attribution des ressources et du soutien dont mes policiers avaient besoin pour mettre fin à la situation en toute sécurité. Je préférais me retirer de l’équation plutôt que de paralyser 1 400 personnes[118].

Pour répondre aux critiques de la population selon lesquelles le SPO n’en avait pas fait assez pendant les manifestations, pour exercer les pouvoirs conférés par la loi, Peter Sloly a déclaré que les règlements municipaux, les lois provinciales et le Code criminel ont été appliqués « lorsqu’il […] était possible [pour la police] de le faire en toute sécurité sans risquer d’exacerber une situation déjà fortement explosive[119] ».

Cependant, Steve Bell, chef par intérim du SPO, a dit souhaiter que la confiance puisse être rétablie chez les résidents de la ville d’Ottawa. Il a indiqué que le SPO « travaill[e] activement à rétablir la confiance du public avec les membres de notre collectivité, et […] que cette période [de manifestations] les a laissés avec un sentiment d’insécurité[120] ».

Enfin, plusieurs témoins ont parlé des défis découlant du manque de renseignements exacts quant à la nature et aux objectifs du « Convoi de la liberté »[121]. Steve Kanellakos a expliqué au Comité qu’au départ, d’après les informations reçues, le service de police et les dirigeants municipaux s’attendaient à ce que ces manifestations soient semblables à d’autres qui s’étaient déjà tenues dans la capitale nationale :

L’hypothèse que nous avons faite avant la première fin de semaine était que la manifestation serait semblable aux centaines que nous sommes habitués de voir à Ottawa chaque année, et que la planification requise, pour répondre à d’autres questions qui nous ont été posées, n’a tout simplement pas été faite. Nous n’étions pas prêts à faire face aux événements de la fin de semaine, et autant la Ville que le Service de police ont été dépassés. Nous avons été dépassés par les événements et il a été difficile de nous rattraper parce que nous manquions de ressources.
La principale leçon à tirer, comme il a abondamment été dit au cours de l’enquête publique, est que nous aurions dû utiliser le renseignement comme base de notre stratégie[122].

Kent Roach, professeur à la Faculté de droit de l’Université de Toronto, a laissé entendre que le service de police ne dispose pas de l’expertise requise en matière de renseignement, particulièrement lorsqu’il faut déterminer si on a affaire à des extrémistes violents[123]. Voici ce qu’il a dit à ce sujet :

Bien que la GRC et le SCRS soient soumis à un examen assez rigoureux par l’OSSNR, ce n’est pas le cas de la PPO et des services policiers municipaux qui, pour leurs activités de renseignement, ne font l’objet que d’un contrôle très limité, et seulement par le directeur indépendant de la surveillance des services policiers de l’Ontario, dans la mesure où il a suffisamment de ressources pour effectuer des examens systémiques. Je crois comprendre que ce n’est pas le cas[124].

À la lumière de la preuve recueillie au sujet du renseignement et des services de police, le Comité fait les recommandations suivantes :

Recommandation 8

Que le gouvernement fédéral, de concert avec les gouvernements autochtones, provinciaux et territoriaux, les services de police et du renseignement, le Service de protection parlementaire, l’Association canadienne des chefs de police et d’autres intervenants, élabore ou améliore les protocoles relatifs à l’échange d’informations ainsi qu’à la collecte et à la diffusion de renseignements qui permettent :

  • de déterminer comment et par qui les informations et les renseignements doivent être recueillis, analysés et diffusés en cas d’événements majeurs, comme des manifestations, qui revêtent une importance intergouvernementale ou nationale;
  • d’améliorer la capacité de travailler en collaboration pour évaluer la fiabilité des informations recueillies;
  • de se conformer à la Charte canadienne des droits et libertés et aux attentes raisonnables des personnes concernées en matière de protection de la vie privée;
  • d’améliorer la tenue des dossiers concernant la collecte, l’analyse et la diffusion d’informations et de renseignements;
  • d’assurer le respect des mandats législatifs, comme les limites légales à la surveillance des manifestations légitimes par le Service canadien du renseignement de sécurité;
  • de favoriser un accès approprié aux médias sociaux et aux documents de source ouverte, ainsi que leur interprétation;
  • de veiller à ce que, le cas échéant, des renseignements complets, opportuns et fiables soient transmis aux services de police et au gouvernement dans leurs sphères décisionnelles respectives; et
  • de promouvoir des évaluations des risques objectives et fondées sur des preuves, et qui sont rédigées de manière à reconnaître le manque d’informations et à éviter les erreurs d’interprétation.

Recommandation 9

Que le gouvernement fédéral, de concert avec les gouvernements autochtones, provinciaux et territoriaux, les services de police et du renseignement, le Service de protection parlementaire, l’Association canadienne des chefs de police et d’autres intervenants, envisage la création d’un poste de coordonnateur national unique du renseignement pour les événements majeurs à l’échelle nationale, interprovinciale et interterritoriale.

Coopération entre les différents services de police

Plusieurs témoins ont parlé des différents groupes qui ont été créés pour faciliter le maintien de l’ordre entourant le « Convoi de la liberté », et de la manière dont ces groupes ont encouragé le travail d’équipe et l’échange d’informations entre le SPO, la PPO et la GRC, de concert avec d’autres partenaires[125]. Ces groupes étaient le Centre de commandement de la région de la capitale nationale (CCRCN), le Centre de commandement intégré (CCI), le groupe mixte du renseignement, la cellule de planification conjointe et Intersect.

Le CCRCN comptait des représentants de la GRC, de la PPO, du SPO, du SPP et de la Ville d’Ottawa et regroupait « d’autres organismes d’application de la loi du côté du Québec, le transport, les techniciens ambulanciers et les pompiers[126] ». Alors qu’il était le sous-commissaire de la Police fédérale, Michael Duheme, de la GRC, a déclaré ceci devant le Comité au sujet du rôle du CCRCN :

Il veillait simplement à ce que tous les intervenants soient au courant de ce qui se passait […] Il s’agissait surtout d’un centre d’où l’on coordonnait l’information avant de passer au mode opérationnel […] Il servait également de plaque tournante pour le renseignement mené sur l’événement[127].

Créé le 12 février 2022, le CCI était dirigé par le SPO et incluait la PPO et la GRC[128]. Son rôle consistait à revoir le plan d’intervention face au « Convoi de la liberté »[129]. Michael Duheme a expliqué en ces termes au Comité le fonctionnement de ce centre :

Le centre de commandement intégré que nous avions regroupait de multiples organismes de maintien de l’ordre. Au niveau le plus élevé, il y avait moi, le sous-commissaire Harkins de la PPO ainsi que le chef par intérim du service de police d’Ottawa, M. Bell.
Nous étions en communication constante concernant la marche à suivre. Pour chaque plan qui était déployé, nous donnions notre accord. Il ne s’agissait pas nécessairement d’un consensus, mais tout le monde était d’accord sur la façon de procéder et sur la séquence des interventions au fur et à mesure que la situation évoluait.
Je veux préciser clairement le rôle du Service de police d’Ottawa qui a été le principal responsable tout au long des opérations. La GRC et la PPO apportaient leur soutien tout au long, mais le commandement conjoint… Nous avions des échanges pour déterminer la meilleure façon de gérer la situation[130].

Selon Brenda Lucki, la cellule de planification conjointe a été créée « précisément pour l’application de la loi[131] ». Enfin, Intersect a été présenté par Steve Kanellakos comme un groupe s’occupant du renseignement dirigé par le SPO[132].

Des témoins ont formulé des commentaires positifs sur le niveau de coopération entre les différents services de police concernés[133]. Peter Sloly, en particulier, a dit que le travail effectué par le commissaire Thomas Carrique de la PPO et son personnel de commandement a été « essentiel au succès finalement remporté en janvier et en février[134] ». Plusieurs témoins ont aussi parlé du partage de ressources de la PPO et de la GRC avec le SPO, et plus particulièrement du nombre d’agents envoyés en renfort à Ottawa[135].

D’autres témoins ont fait des observations plus mitigées sur la coopération entre les différents niveaux de services policiers[136]. Jim Watson a fait remarquer qu’il y avait une meilleure coopération de la part de la PPO et de la GRC après la démission de Peter Sloly[137]. Kent Roach a décrit les différents niveaux de services policiers comme étant « des cloisonnements […] fragmentés et dysfonctionnels de gouvernance[138] ».

Dans son mémoire au Comité, l’Association canadienne des libertés civiles a résumé quelques-unes des conclusions de la Commission au sujet des difficultés éprouvées par les services de police, notamment le fait que plusieurs témoins ont déclaré que « le problème n’était pas une question de pouvoirs législatifs, mais plutôt un problème de coordination, de planification et de ressources au sein des services policiers et entre eux[139] ».

Dans sa comparution devant le Comité en février 2024, Michael Duheme, maintenant commissaire de la GRC, a indiqué que le recours aux ressources additionnelles policières a évolué dans les deux dernières années suivant la déclaration d’état d’urgence, en ce que la demande d’assistance sur la Colline parlementaire n’est plus adressée en premier lieu à la GRC, mais bien à PPO. La GRC pourrait intervenir ultérieurement en vue d’établir l’ordre sur la Colline, à la demande de la PPO, le cas échéant[140]. Michael Duheme a précisé que « [du] point de vue des forces de l'ordre, nous sommes dans un contexte différent de celui où nous étions lorsque le convoi est arrivé[141] ».

Le Comité convient que le gouvernement fédéral devrait consulter de manière appropriée les services de police compétents avant d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Cette recommandation émane de la preuve recueillie aussi bien par la Commission que par le Comité.

Il existe des éléments probants qui donnent à penser que les chefs de police n’ont pas utilisé tous les outils à leur disposition pour mettre un terme aux manifestations et aux blocages lorsque le gouvernement fédéral a décidé d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Devant la Commission, dans un courriel de Brenda Lucki du 14 février 2022 adressé au chef de cabinet de l'ancien ministre Mendicino, on pouvait y lire ce qui suit :

Cela étant dit, je pense que nous n’avons pas encore épuisé tous les outils disponibles dans le cadre des lois existantes. Dans certains cas, des accusations pourraient être portées en vertu des instruments législatifs en vigueur pour diverses infractions au Code criminel commises en ce moment même pendant les manifestations. La Loi sur la protection civile et la gestion des situations d’urgence de l’Ontario, qui vient d’être promulguée, sera un nouvel outil de dissuasion qui s’ajoutera aux moyens dont nous disposons actuellement.
Ces moyens sont pris en compte dans nos plans actuels et seront utilisés en temps voulu si besoin est[142].

Brenda Lucki a témoigné au sujet de ce courriel devant la Commission le 15 novembre 2022[143]. De plus, selon un élément de preuve reçu par la Commission, Brenda Lucki était présente à une réunion du Cabinet du 13 février, mais dans le procès-verbal de cette réunion rien n’indique qu’elle y ait pris la parole[144].

Jody Thomas a mentionné tant devant la Commission que devant le Comité ses consultations auprès de Brenda Lucki. À la Commission, Jody Thomas a déclaré qu’on s’attendait de ceux qui ont assisté à la réunion du Groupe d’intervention en cas d’incident (GII) qu’ils « donne[nt] des informations aux décideurs, c’est-à-dire au premier ministre et son cabinet[145] ». Elle a ajouté devant la Commission que Brenda Lucki n’avait rien dit de particulier indiquant que les forces de l’ordre avaient épuisé tous les moyens à leur disposition[146].

Jody Thomas a expliqué au Comité qu’elle s’était entretenue plusieurs fois avec Brenda Lucki avant le 14 février 2022, et qu’elle ne lui avait pas demandé s’il existait d’autres moyens que l’on pouvait utiliser à part recourir à la Loi sur les mesures d’urgence[147]. Elle a indiqué également qu’elle n’avait pas lu le plan opérationnel préparé par les services de police pendant la déclaration de situation de crise[148].

Par ailleurs, Peter Sloly a déclaré devant le Comité que le SPO avait un plan prêt pour dégager le centre-ville d’Ottawa, et que pendant qu’il était le chef de police, le SPO a gardé le contrôle de ce plan[149].

Maintien de l’ordre dans la Cité parlementaire

Quelques témoins ont parlé des mesures extraordinaires mises en place pour assurer la sécurité sur la Colline du Parlement pendant les manifestations du « Convoi de la liberté », dans le cadre du mandat de la GRC de protéger le Parlement et les parlementaires[150]. Brenda Lucki a expliqué comment l’accès des véhicules et des manifestants à la Colline du Parlement a été restreint, et comment la GRC a créé une zone de transit où les parlementaires pouvaient se rassembler pour se faire conduire jusqu’au Parlement s’ils le souhaitaient[151].

Plusieurs témoins ont décrit les défis propres au maintien de la sécurité dans la Cité parlementaire pendant les manifestations à Ottawa. Par exemple, Larry Brookson a déclaré que pendant ces manifestations, il avait des inquiétudes au sujet de la sécurité des parlementaires voulant traverser la rue Wellington pour se rendre à l’édifice de l’Ouest[152]. Julie Lacroix, directrice de la Sécurité institutionnelle au Sénat, a évoqué les difficultés liées à la technologie et à l’infrastructure, en déclarant qu’à l’avenir, elle « recommanderai[t] de faire en sorte que nous disposions de la technologie et de l’infrastructure nécessaires pour fermer et sécuriser la Cité parlementaire, au besoin[153] ». Larry Brookson et Patrick McDonell, sergent d’armes et dirigeant de la sécurité institutionnelle de la Chambre des communes, ont insisté pour dire que le manque de connaissance de la situation était une préoccupation majeure tout au long des manifestations au centre-ville d’Ottawa[154].

Patrick McDonell a également fait état du harcèlement subi par le personnel du Parlement pendant les manifestations du « Convoi de la liberté » à Ottawa :

Ce qui arrivait, c’était que nos employés étaient harcelés tous les jours. […] Nous avions des employés qui utilisaient ces stationnements tous les jours. On tapait sur les voitures et il y avait une voiture de patrouille bien visible, avec des policiers à bord témoins de la scène, et personne ne sortait de la voiture de patrouille[155].

Patrick McDonell a expliqué que les cas de harcèlement à l’endroit d’employés du Parlement n’étaient pas pris en charge par le SPO et que c’est le Service de protection parlementaire (SPP) qui devait s’en occuper[156].

Larry Brookson a déclaré devant le Comité qu’environ une semaine avant l’arrivée du « Convoi de la liberté », le SPP a recommandé qu’il soit interdit de stationner des véhicules sur la rue Wellington, mais le SPO a quand même permis aux manifestants de stationner leurs véhicules à cet endroit, et que cette décision avait compromis la sécurité dans la Cité parlementaire[157]. Jim Watson a laissé entendre que le fait de laisser les manifestants utiliser la Colline du Parlement comme base arrière a pu contribuer à des manifestations prolongées, en disant qu’« [i]l n’y a rien de spectaculaire dans le paysage [des rues] Slater et Albert, et [que les manifestants] ne seraient probablement pas restés longtemps [si la rue Wellington avait été fermée][158] ».

Larry Brookson et Patrick McDonell ont recommandé tous les deux l’élargissement de la Cité parlementaire afin d’y inclure des portions de la rue Wellington[159]. Le Comité est d’accord sur ce point et fait les recommandations suivantes :

Recommandation 10

Que la Cité parlementaire soit agrandie afin d’inclure la rue Wellington et que des agrandissements supplémentaires de la Cité parlementaire soient envisagés en consultation avec le Service de protection parlementaire, le Service de police d’Ottawa, la Police provinciale de l’Ontario, les gouvernements fédéral et provinciaux ainsi que les administrations municipales.

Recommandation 11

Que, compte tenu de la recommandation précédente, le gouvernement fédéral envisage d’affecter des ressources au Service de protection parlementaire pour pouvoir agrandir la Cité parlementaire et que la rue Wellington soit fermée à la circulation automobile afin d’assurer une meilleure protection de la Colline du Parlement pour les parlementaires, les visiteurs et les résidents du secteur.

En ce qui concerne les services policiers dans la Cité parlementaire, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 12

Que les décisions concernant les opérations de sécurité du Parlement, et plus particulièrement celles visant à trouver un juste équilibre entre le maintien de la sécurité du Parlement du Canada et l’ouverture et l’accessibilité à tous, y compris ceux qui manifestent pacifiquement, relèvent de la responsabilité des professionnels de la sécurité et du maintien de l’ordre, et qu’elles soient assujetties au contrôle du Parlement.

Au deuxième anniversaire de la déclaration d’état d’urgence, Shawn Tupper, sous-ministre de la Sécurité publique du Canada, a témoigné devant le Comité que des pourparlers étaient toujours en cours au sujet de la Cité parlementaire; d’une part, à propos de la définition de celle-ci et les limites qui la balisent; d’autre part, en ce qui concerne sa surveillance et son entretien[160].

Le Comité prend note que dans sa réponse aux recommandations du rapport de la Commission, le gouvernement fédéral a déclaré :

[Qu’il] réaffirme son engagement à continuer les discussions avec la Ville d’Ottawa pour le transfert d’une portion de la rue Wellington au gouvernement fédéral, dans le but de circonscrire les limites juridiques et géographiques de la Cité parlementaire et définir clairement les rôles et responsabilités en matière de sécurité et de service de police dans la zone[161].

Chapitre 6 : Sécurité nationale et le « Convoi de la liberté »

La sécurité nationale ainsi que la collecte et l’évaluation du renseignement s’y rapportant relèvent de plusieurs ministères et organismes fédéraux. Dans le domaine de la sécurité et du renseignement au Canada, il y a huit grands organismes fédéraux ayant des mandats relatifs à la sécurité nationale, au renseignement ou aux deux : le conseiller ou la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement, le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), le ministère de la Défense nationale/les Forces armées canadiennes, l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), le Centre de la sécurité des télécommunications, la GRC, Affaires mondiales Canada et le Centre intégré d’évaluation du terrorisme (CIET)[162]. Il y aussi neuf autres ministères et organismes fédéraux chargés de la sécurité nationale et du renseignement, dont le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE), Sécurité publique Canada et Justice Canada[163]. La plupart de ces ministères et organismes ont soumis des rapports institutionnels à la Commission au sujet de leurs activités pendant les manifestations du « Convoi de la liberté[164] ».

Pendant l’examen par le Comité de l’exercice des attributions découlant de la déclaration de crise de février 2022, il a été question de deux types de menaces contre la sécurité nationale : la menace représentée par l’extrémisme violent à caractère idéologique (EVCI) et les menaces envers les infrastructures essentielles.

Les adeptes de l’EVCI – lequel se distingue de l’extrémisme violent à caractère religieux et de l’extrémisme violent à caractère politique – « sont souvent mus par une série de récriminations et d’idées qui couvrent tout le spectre idéologique traditionnel », et leur vision s’articule autour « d’un discours personnalisé, axé sur la volonté de mobiliser des personnes, de les inciter à perpétrer des actes de violence et de leur donner les moyens de passer à l’action[165] ». Le SCRS a identifié quatre formes d’EVCI, à savoir : la violence xénophobe, la violence antiautoritaire, la violence sexiste et la violence fondée sur d’autres récriminations ou idéologies[166].

Sécurité publique Canada définit comme suit les infrastructures essentielles :

Ensemble des processus, des systèmes, des installations, des technologies, des réseaux, des biens et des services nécessaires pour assurer la santé, la sûreté, la sécurité ou le bien-être économique des Canadiens ainsi que l’efficacité du gouvernement. Il peut s’agir d’infrastructures autonomes ou caractérisées par des interdépendances au sein d’une province ou d’un territoire, entre des provinces et des territoires ou à l’échelle du pays. La perturbation de ces infrastructures essentielles pourrait se traduire en pertes de vie et en effets économiques néfastes, et pourrait considérablement ébranler la confiance du grand public[167].

La Stratégie nationale sur les infrastructures essentielles identifie 10 secteurs d’infrastructures essentielles au Canada : énergie et services publics; finances; alimentation; transport; gouvernement; technologies de l’information et de la communication; santé; eau; sécurité; secteur manufacturier[168].

Il convient de noter ici que le chapitre 7 du présent rapport – Invocation de la Loi sur les mesures d’urgence – traite des questions relatives « aux menaces envers la sécurité nationale ».

En ce qui concerne la réponse du gouvernement fédéral aux menaces envers la sécurité nationale pendant les manifestations du « Convoi de la liberté », plusieurs témoins ont décrit le rôle des différents ministères et organismes fédéraux ayant pris part à la surveillance et à l’évaluation de la situation. Selon Jody Thomas, parmi ces organismes, il y avait le SCRS, la GRC, le Commandement du renseignement des Forces canadiennes, le groupe responsable du renseignement extérieur d’Affaires mondiales Canada, l’ASFC, et Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada[169].

David Vigneault, directeur du SCRS, a déclaré que pendant les manifestations du « Convoi de la liberté », le SCRS a utilisé ses ressources d’enquête pour surveiller les menaces connues et informer les partenaires du maintien de l’ordre ainsi que le gouvernement de la nature des menaces envers la sécurité nationale qui se dessinaient[170]. Lors de sa seconde comparution devant le Comité en février 2024, David Vigneault a ajouté qu’en plus de l’échange de renseignement avec les organismes d’application de la loi, le SCRS a travaillé de concert avec les partenaires de la GRC et de l’ASFC et que, dépendamment du contexte, les trois organismes prenaient des « mesures opérationnelles précises » pour faire face à la situation[171].

Marie-Hélène Chayer, directrice exécutive du CIET, a dit que le rôle de son organisme consistait à évaluer la probabilité d’une attaque terroriste au Canada et à l’étranger[172]. Enfin, Jody Thomas a déclaré que son mandat comme conseillère à la sécurité nationale et au renseignement était de donner des conseils coordonnés et non partisans au premier ministre, et de « coordonner la communauté de la sécurité nationale et du renseignement, en plus d’assurer une fonction de remise en question[173] ».

Barry MacKillop, sous‑directeur du renseignement au CANAFE, a expliqué que son organisme était chargé de produire « des renseignements financiers exploitables pour les services de police, les organismes d’application de la loi et les organismes de sécurité nationale du Canada[174] ». Barry MacKillop a ajouté que le Règlement et le Décret n’ont pas changé le rôle du CANAFE en ce qui concerne son mandat habituel et qu’ils n’ont pas « étendu ou accru les pouvoirs de CANAFE en matière de renseignement financier[175] ».

En ce qui concerne le rôle du CANAFE, outre l’utilité supplémentaire applicable à l’ensemble des organismes d’application de la loi, y compris au-delà de l’application de la Loi sur les mesures d’urgence, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 13

Que le gouvernement fédéral revoie la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes pour déterminer si le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada devrait être investi de pouvoirs supplémentaires lorsqu’il y a des « menaces envers la sécurité du Canada » au sens de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité.

Certains témoins ont parlé également du groupe mixte du renseignement, qui a été créé pour communiquer des renseignements pendant toute la durée des manifestations du « Convoi de la liberté ». David Vigneault a expliqué que le groupe mixte du renseignement était une tribune pour échanger de l’information avec les partenaires chargés du maintien de l’ordre et pour conseiller le gouvernement sur les menaces envers la sécurité nationale. Brenda Lucki a ajouté que toute information concernant le « Convoi de la liberté » était relayée par ce groupe[176].

L’une des menaces envers la sécurité nationale la plus souvent invoquée était celle que représente l’EVCI. Comme l’a expliqué Peter Sloly, au départ, le « Convoi de la liberté » se voulait une manifestation contre la vaccination, puis il « a rapidement évolué pour être récupéré par différents individus et mouvements d’insurrection animés par des idéologies radicales[177] ». Rob Stewart a toutefois déclaré devant le Comité que le SCRS n’avait pas décelé de menaces particulières d’EVCI, mais que le gouvernement fédéral était au courant de la présence d’extrémistes qui tentaient de se raccrocher au « Convoi de la liberté »[178]. Brenda Lucki a confirmé par la suite que des extrémistes ayant des motivations idéologiques avaient probablement pris part aux manifestations à Ottawa et qu’ils avaient essayé de s’en servir pour faire la promotion de leurs objectifs idéologiques[179].

Certains témoins ont parlé du rôle des médias sociaux et d’Internet, qui servent à répandre l’EVCI et à pousser des gens à passer à l’acte. Marie-Hélène Chayer a expliqué que depuis le début de la pandémie de COVID-19, il y avait eu une augmentation de la rhétorique de l’EVCI diffusée en ligne et sur les médias sociaux[180]. David Vigneault a ajouté que les extrémistes violents se servent des manifestations et des mouvements de contestation pour commettre des actes de violence, recruter des membres et propager leur idéologie[181]. Jody Thomas a parlé également du nombre sans précédent de menaces graves et crédibles proférées en ligne contre des politiciens et des titulaires de charge publique, tous gouvernements confondus, depuis les élections fédérales de 2021[182].

Dans sa seconde comparution devant le Comité en février 2024, David Vigneault a ajouté que les événements du février 2022 sont un exemple de la façon dont la menace envers le Canada est devenue « plus complexe et omniprésente[183] » et que « l’extrémisme violent au pays, à la fois motivé par des idéologies et des motifs religieux[184] » a continué d’augmenter dans les deux dernières années suivant la déclaration d’état d’urgence.

L’ancien ministre Blair a décrit un autre type de menace envers la sécurité nationale : les menaces contre les infrastructures essentielles, c’est-à-dire les perturbations visant les installations manufacturières et les transports causées par le « Convoi de la liberté », et il a expliqué que les blocages aux points d’entrée représentaient « une menace très importante pour la sécurité nationale » en raison de leurs effets sur les infrastructures essentielles[185]. Leah West, professeure adjointe à la Norman Paterson School of International Affairs de l’Université Carleton, a ajouté toutefois que la définition actuelle d’« état d’urgence » dans la Loi sur les mesures d’urgence n’envisage pas les situations d’urgence causées par des menaces visant les infrastructures essentielles[186].

Chapitre 7 : Invocation de la Loi sur les mesures d’urgence

L’article 16 de la Loi sur les mesures d’urgence, qui définit l’« état d’urgence », prévoit deux volets principaux pour déterminer si le seuil légal applicable a été atteint pour qu’il puisse être déclaré. La définition d’« état d’urgence » est : « [s]ituation de crise causée par des menaces envers la sécurité du Canada d’une gravité telle qu’elle constitue une situation de crise nationale[187] » [italique ajouté]. Le premier volet est que l’état d’urgence doit découler de « menaces envers la sécurité du Canada » au sens de l’article 2 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité (Loi sur le SCRS)[188]. Le deuxième volet est qu’il doit y avoir une « situation de crise nationale » au sens de l’article 3 de la Loi sur les mesures d’urgence.

L’article 2 de la Loi sur le SCRS définit comme suit les « menaces envers la sécurité du Canada » :

a) l’espionnage ou le sabotage visant le Canada ou préjudiciables à ses intérêts, ainsi que les activités tendant à favoriser ce genre d’espionnage ou de sabotage;
b) les activités influencées par l’étranger qui touchent le Canada ou s’y déroulent et sont préjudiciables à ses intérêts, et qui sont d’une nature clandestine ou trompeuse ou comportent des menaces envers quiconque;
c) les activités qui touchent le Canada ou s’y déroulent et visent à favoriser l’usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens dans le but d’atteindre un objectif politique, religieux ou idéologique au Canada ou dans un État étranger;
d) les activités qui, par des actions cachées et illicites, visent à saper le régime de gouvernement constitutionnellement établi au Canada ou dont le but immédiat ou ultime est sa destruction ou son renversement, par la violence.
La présente définition ne vise toutefois pas les activités licites de défense d’une cause, de protestation ou de manifestation d’un désaccord qui n’ont aucun lien avec les activités mentionnées aux alinéas a) à d).

L’article 3 de la Loi sur les mesures d’urgence définit ainsi ce que l’on entend par « situation de crise nationale » :

[U]ne situation de crise nationale résulte d’un concours de circonstances critiques à caractère d’urgence et de nature temporaire, auquel il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada et qui, selon le cas :
a) met gravement en danger la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens et échappe à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces;
b) menace gravement la capacité du gouvernement du Canada de garantir la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale du pays.

Il importe de souligner que la Loi sur les mesures d’urgence précise que le gouverneur en conseil doit avoir des motifs raisonnables de croire « qu’il se produit un état d’urgence justifiant en l’occurrence des mesures extraordinaires à titre temporaire[189] ». Ainsi, en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence, il n’est pas nécessaire d’avoir la certitude qu’il existe une situation d’état d’urgence.

Le volume 3 du rapport de la Commission décrit le critère relatif aux « motifs raisonnables de croire » et explique ceci :

Pourvu que le fondement factuel requis existe, le critère des « motifs raisonnables de croire » intègre le concept de la marge d’appréciation. Des esprits raisonnables peuvent diverger sur une même question, et une décision n’est pas erronée ou déraisonnable parce qu’un résultat jugé probable ne se concrétise pas[190].

Le rapport de la Commission dit ensuite :

Pour revenir une fois de plus aux principes théoriques qui sous-tendent les pouvoirs d’exception, le seuil d’invocation est le moment où l’ordre s’effondre et la liberté ne peut être assurée ou est gravement menacée. À mon avis, ce seuil a été atteint en l’espèce.
Je ne tire pas cette conclusion à la légère, car je ne considère pas que le fondement factuel qui la sous-tend est écrasant et je reconnais que les arguments contraires sont très solides. Il se peut fort bien qu’on ait pu éviter une violence grave même sans la déclaration d’une urgence. La possibilité qu’elle ait pu être évitée ne rend pas pour autant la décision erronée. La conviction du Cabinet reposait sur un fondement objectif, sur des renseignements convaincants et crédibles. C’est ce qui était requis. Le critère des motifs raisonnables de croire n’exige pas la certitude[191]. [Souligné par l’auteur]

La déclaration publique (faite oralement) le 17 février 2023 par le commissaire Paul S. Rouleau traite aussi de l’importance de la norme de motifs raisonnables dans ses conclusions :

Après mûre réflexion, je suis arrivé à la conclusion que les critères très stricts à respecter pour pouvoir invoquer la [Loi] ont été remplis.
En particulier pour des raisons que j’expose en détail dans le rapport, j’ai conclu que lorsque la décision a été prise d’invoquer la [Loi] le 14 février 2022 le Cabinet avait des motifs raisonnables de croire qu’il existait une crise nationale en raison de menaces pour la sécurité du Canada et que cette crise exigeait de prendre temporairement des mesures spéciales.
Je ne suis pas parvenu facilement à cette conclusion, car à mes yeux, les faits qui la sous-tendent ne sont pas manifestes. Ainsi, des personnes raisonnables et informées pourraient tirer une conclusion différente de la mienne. C’est donc à contrecœur que je parviens à cette conclusion. L’état devrait normalement être en mesure de réagir aux situations d’urgence sans avoir recours à des pouvoirs exceptionnels[192]. [Souligné par l’auteur]

Dans son mémoire au Comité, Ryan Alford a écrit ce qui suit :

De très nombreux témoignages ont montré que la situation de crise ne satisfaisait pas aux critères prévus par la Loi et la Constitution. Cela dit, étant donné la norme rigoureuse d’examen qui doit être utilisée dans le cadre de l’enquête, il est possible que la commission Rouleau établisse, dans son rapport définitif, qu’il est impossible de déterminer avec la certitude nécessaire que le gouvernement avait des motifs raisonnables de conclure qu’il existait un état d’urgence[193]. [Souligné par l’auteur]

Leah West a aussi déclaré ceci :

Je pense que la Loi sur les mesures d’urgence confère un pouvoir discrétionnaire extraordinaire à l’exécutif, et c’est ainsi que quiconque l’interpréterait : c’est au gouvernement de décider s’il y a ou non des motifs raisonnables de croire qu’une menace à la sécurité du Canada existe, puis s’il est nécessaire ou non de l’invoquer. Il dispose d’un pouvoir discrétionnaire incroyable, mais quand le législateur a choisi une approche restrictive – en l’occurrence, dans la définition des menaces à la sécurité du Canada et dans les cas où elle s’applique –, il est important de respecter cette approche parce qu’il s’agit d’un choix délibéré et que la primauté du droit est le pilier qui fait de notre régime politique une démocratie libérale qui en bénéficie[194]. [Souligné par l’auteur]

En réponse aux propos de Leah West, Kent Roach a ajouté ceci :

Je suis d’accord avec Mme West pour dire qu’il faut avoir l’alinéa 2c), plus l’article 3, mais le paragraphe 17(1) dit : « Le gouverneur en conseil […], s’il croit, pour des motifs raisonnables, qu’il se produit un état d’urgence justifiant en l’occurrence des mesures extraordinaires à titre temporaire. » Il me semble que la question que doit se poser le Cabinet, et la question à explorer dans cet avis juridique, est de savoir s’il a des motifs raisonnables de croire qu’il se produit effectivement un état d’urgence[195]. [Souligné par l’auteur]

Cette question a également été abordée devant la Commission par le professeur Robert Diab, de la Faculté de droit de l’Université Thompson Rivers, et Morris Rosenberg, ancien sous-ministre de la Justice et ancien sous-procureur général du Canada. Voici ce que Robert Diab a dit devant la Commission :

Ce que je propose, la façon dont ça fonctionne actuellement d’après la Loi sur les mesures d’urgence, le décideur, c’est le Fédéral qui doit décider si les critères sont remplis, et puis la Commission est en fait l’arbitre après coup.
Si on avait une loi ordinaire, le modèle, ça serait en fait une situation où un seul décideur indépendant agirait[196]. [Souligné par l’auteur]

Morris Rosenberg a également déclaré devant la Commission :

Le gouvernement doit croire pour des raisons que cette urgence existe et nécessite donc de prendre des mesures temporaires pour faire face à la situation. Donc c’est sujet toujours à une révision judiciaire par le tribunal, par le Parlement et par une commission d’enquête qui doit être lancée après la mesure d’urgence. Donc ça explique clairement, il faut voir s’il y a d’autres lois qui auraient pu être utilisées, pourquoi on ne l’a pas fait[197]. [Souligné par l’auteur]

La question de savoir si le seuil légal pour invoquer la Loi sur les mesures d’urgence avait été atteint a été longuement débattue, non seulement au sein du Comité, mais aussi à la Commission. Devant la Commission, David Vigneault a déclaré que le SCRS ne considérait pas les manifestations contre les mesures de santé publique et les activités des manifestants comme une menace pour la sécurité du Canada, et qu’il n’avait pas enquêté sur elles comme telles[198]. Cependant, on considérait que les manifestations étaient susceptibles de devenir une menace[199].

À ce propos, le premier ministre Justin Trudeau a expliqué devant la Commission qu’aux fins de la Loi sur les mesures d’urgence, c’est le Cabinet, et non le SCRS, qui doit déterminer s’il existe une menace pour la sécurité du Canada au sens de la Loi sur le SCRS[200]. Le premier ministre a ajouté que, pour ce faire, le Cabinet ne s’est pas fié uniquement aux informations fournies par le SCRS, mais qu’il a aussi pris en compte celles provenant de la GRC; de Transports Canada; d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada; du greffier du Conseil privé; de la conseillère à la sécurité nationale et au renseignement et de l’ensemble du gouvernement avant que ne soit invoquée la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement fédéral en février 2022[201].

Dans le même ordre d’idées, Jody Thomas a dit devant la Commission qu’à son avis, la Loi sur les mesures d’urgence avait permis au Cabinet de ne pas se limiter aux seuls renseignements recueillis par le SCRS lorsqu’il a décidé d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence[202].

Justification

Certains témoins ayant comparu devant le Comité ont fait état de préoccupations liées à la sécurité publique pour justifier la décision du Cabinet d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence. Par exemple, l'ancien ministre Mendicino a dit que le gouvernement fédéral avait été avisé que « les organisations d’exécution de la loi avaient besoin de la Loi sur les mesures d’urgence pour être certaines de pouvoir résoudre, par exemple, les ambiguïtés concernant les personnes qui restaient près des points d’entrée[203] ». Il a rappelé que cette loi a été invoquée « parce que des organisations d’exécution de la loi impartiales [les avaient] avisés que les pouvoirs existants ne permettaient pas, à l’époque, de rétablir la sécurité publique[204] ». L’ancien ministre Blair a déclaré également que les organismes d’application de la loi avaient besoin de pouvoirs supplémentaires[205]. Jody Thomas a évoqué en particulier les inquiétudes concernant l’EVCI et la présence d’armes pour justifier la décision du Cabinet d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence[206].

Certains témoins ont par ailleurs fait état des craintes pour l’économie pour justifier la décision[207]. Jody Thomas a déclaré qu’elle avait recommandé que le Cabinet invoque la Loi sur les mesures d’urgence à cause de « l’ensemble des événements se produisant partout au pays », y compris des conséquences sur l’économie, et aussi à cause de « l’incapacité des Canadiens de vivre leur vie[208] ». De son côté, l’honorable Chrystia Freeland, ministre des Finances, a insisté sur le fait qu’il fallait rétablir la réputation du Canada pour éviter que cette situation ne malmène ses relations commerciales avec d’autres pays, notamment les États‑Unis[209].

Enfin, certains témoins ont justifié l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence par le fait qu’il s’agissait d’une situation d’envergure nationale. L’honorable David Lametti, ancien ministre de la Justice et procureur général du Canada, a, pour sa part, dit au Comité : « Nous avons invoqué la Loi sur les mesures d’urgence quand, d’abord, il nous est apparu évident que la situation était devenue de portée nationale[210]. » Jody Thomas a aussi parlé de la « dimension nationale » des blocages et des manifestations[211]. Lors de sa comparution devant le Comité en février 2024, le ministre LeBlanc a déclaré qu’au moment des événements, il y avait un « risque accru de multiplication ou de propagation » des blocages ayant des répercussions économiques[212].

Deux ans après la déclaration de la situation de crise, le gouvernent du Canada a réitéré sa position sur le caractère exceptionnel et sans précédent des circonstances ayant mené à l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, soutenant que l’action gouvernementale était raisonnable, nécessaire et fondée sur les informations dont il disposait au moment des événements[213].

Dans le rapport final de la Commission, le commissaire Paul S. Rouleau a conclu, avec réticence, que le seuil très élevé à respecter pour invoquer la Loi sur les mesures d’urgence a été atteint :

J’ai conclu qu’en l’espèce, le seuil très élevé à respecter pour invoquer la Loi a été atteint. Je l’ai fait avec réticence. L’État devrait généralement faire face à des situations de crise sans recourir à des pouvoirs d’urgence. Dans de rares cas seulement, lorsque l’État ne peut autrement remplir son obligation fondamentale de garantir la sécurité des citoyens et des biens, le recours à des mesures d’urgence sera jugé pertinent. Quant aux mesures que le Cabinet a mises en place pour faire face à la situation d’urgence, je conclus que, si la plupart des mesures étaient pertinentes et efficaces, d’autres n’étaient pas satisfaisantes[214].

Or, dans une décision du 23 janvier 2024 de la Cour fédérale, le juge Richard G. Mosley a conclu « qu’il n’y avait pas d’urgence nationale justifiant le recours à la Loi sur les mesures d’urgence et que la décision d’invoquer cette loi était donc déraisonnable et ultra vires de la Loi[215] », notamment parce que la crise ne touchait pas l’ensemble du Canada[216] et que d’autres lois canadiennes auraient pu être invoquées pour mettre fin à la situation[217].

Dans cette affaire, l’Association canadienne des libertés civiles et la Canadian Constitution Foundation, ainsi qu’un groupe de demandeurs ayant participé aux manifestations, ont demandé un contrôle judiciaire de la décision du gouvernement du Canada de déclarer l’état d’urgence en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence en février 2022, porté devant la Cour fédérale.

Le 22 février 2024, cette affaire a été portée en appel par le gouvernement fédéral devant la Cour d’appel fédérale et le litige suit son cours[218].

Seuil légal

Pour ce qui est du volet concernant les « menaces envers la sécurité du Canada » de la définition de ce qui constitue un état d’urgence, à l’article 16 de la Loi sur les mesures d’urgence, le gouvernement fédéral a déterminé que l’alinéa 2c) de la définition de la Loi sur le SCRS (menaces de violence contre des personnes ou des biens) s’appliquait, lorsque la déclaration de situation de crise a été proclamée, en février 2022[219]. La signification et l’application de cette définition ont fait l’objet de discussions devant le Comité, et l'ancien ministre Lametti a déclaré que les dommages économiques causés par le « Convoi de la liberté » étaient considérés comme « des menaces de violence contre des biens[220] ». François Daigle, sous-ministre de la Justice et sous-procureur général du Canada, a précisé par ailleurs que selon l’article 2 de la Loi sur le SCRS, le gouvernement fédéral ne devait satisfaire qu’aux dispositions d’un seul des alinéas de la définition de l’article 2, et non de tous[221].

Concernant l’alinéa 2c) de la Loi sur le SCRS, Leah West a insisté sur le fait qu’il devait y avoir un lien de cause à effet entre la menace envers la sécurité du Canada et l’état urgence, ce qui signifie que la menace devait être la justification de l’état d’urgence, plutôt que d’en être un élément secondaire[222].

Elle a également mentionné que la définition d’« état d’urgence » contenue dans la Loi sur les mesures d’urgence pourrait être modifiée afin d’inclure les menaces visant des infrastructures critiques, afin de mieux refléter la nature de la situation de crise qui s’est produite en février 2022[223].

Même si David Vigneault avait déclaré devant la Commission que le SCRS ne considérait pas que la sécurité nationale était menacée au sens de la Loi sur le SCRC, devant le Comité, de nombreux témoins ont qualifié des éléments du « Convoi de la liberté » ou le « Convoi de la liberté » lui-même comme étant une menace pour la sécurité nationale. L'ancien ministre Lametti a dit que les manifestations et les blocages « menaçaient la sécurité du Canada[224] », et l’ancien ministre Blair a déclaré que les blocages à différents points d’entrée ont « représenté une menace très importante pour la sécurité nationale[225] ». Jody Thomas a elle aussi indiqué au Comité que le « Convoi de la liberté » constituait une menace pour la sécurité nationale, et que le gouvernement fédéral avait examiné « l’ensemble [de la] situation » pour déterminer si une telle menace était réelle[226].

Par ailleurs, Brenda Lucki et Thomas Carrique s’entendaient pour dire que certaines personnes faisant partie du « Convoi de la liberté » pouvaient représenter une menace pour la sécurité nationale[227].

Certains témoins ont répondu aux arguments avancés devant la Commission quant à savoir s’il existait une menace pour la sécurité nationale au sens de la Loi sur le SCRS. Leah West est revenue sur les déclarations du premier ministre devant la Commission au sujet de l’alinéa 2c) par rapport à celles du SCRS, indiquant que le seuil légal n’avait pas été atteint[228]. Elle a expliqué que le premier ministre avait « tenu compte de facteurs différents de ceux du SCRS pour déterminer si la définition […] s’appliquait [et que ce dernier] considérait aussi que l’alinéa 2c) était plus large[229] ». Jody Thomas a expliqué également que la détermination de ce qui constitue une menace envers la sécurité nationale n’incombe pas à une seule personne, et que ce n’est pas au directeur du SCRS d’en décider seul[230].

Dans son rapport final, la Commission a recommandé que « l’incorporation par renvoi dans la Loi sur les mesures d’urgence de la définition de “menaces envers la sécurité du Canada” de la Loi sur le SCRS [soit] retirée[231] ». Dans sa réponse aux recommandations, le gouvernement fédéral a indiqué qu’il « examinera attentivement » cette question dans le cadre du litige en cours, ainsi que d’autres facteurs, pour déterminer si ces modifications à la Loi sur le SCRS sont nécessaires[232].

En ce qui concerne la notion de « menaces envers la sécurité du Canada », le Comité fait les recommandations suivantes :

Recommandation 14

Que le gouvernement fédéral revoie la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité pour s’assurer que la définition de « menaces envers la sécurité du Canada » et le mandat opérationnel du Service canadien du renseignement de sécurité soient adéquats et conformes à la Loi sur les mesures d’urgence.

Recommandation 15

Que le gouvernement fédéral supprime l’incorporation par renvoi, dans la Loi sur les mesures d’urgence, la définition de « menaces envers la sécurité du Canada » de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité.

Au sujet de la question de la « situation de crise nationale » de l’article 3, François Daigle a déclaré que, dans les circonstances, on aurait pu invoquer l’alinéa 3a) ou b) de la Loi sur les mesures d’urgence, mais que le gouvernement avait opté pour l’alinéa 3a) (grave danger pour la vie, la santé ou la sécurité des Canadiens échappant à la capacité des provinces[233]). L'ancien ministre Lametti a expliqué que dans ce cas particulier on a recouru à l’alinéa 3a) de la Loi sur les mesures d’urgence :

[P]arce que [la situation de crise] mettait gravement en danger la vie et la sécurité des Canadiens et, en particulier, parce que cela échappait à la capacité ou aux pouvoirs d’intervention des provinces[234].

Certains témoins ont clarifié différents aspects d’une partie de la définition de crise nationale de l’article 3 (« auquel il n’est pas possible de faire face adéquatement sous le régime des lois du Canada »). François Daigle a expliqué que le critère juridique de l’article 3 consiste à déterminer si d’autres lois permettaient de faire face adéquatement à la situation de crise, plutôt que de savoir si elles existaient, et dans ce cas particulier, le gouvernement fédéral a déterminé que ces lois n’étaient pas adéquates[235].

Au sujet du critère de « situation de crise nationale », le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 16

Que le gouvernement fédéral évalue le rôle que les facteurs économiques peuvent jouer dans la détermination de l’existence d’une « crise nationale » et, le cas échéant, modifie la Loi sur les mesures d’urgence en conséquence.

Chapitre 8 : Mesures extraordinaires à titre temporaire

Le Comité a entendu de nombreux témoignages sur l’étendue et la justification des mesures extraordinaires à titre temporaire prises par le gouvernement fédéral pour mettre un terme aux manifestations et blocages illégaux, y compris leur financement[236]. Il s’agit du Règlement et du Décret, comme énoncé plus haut.

Ces mesures temporaires ont pris fin le 23 février 2022, avec la révocation de la déclaration d’état d’urgence en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence.

Règlement sur les mesures d’urgences

Le Règlement a introduit différents types d’interdictions :

  • interdiction de participer à une assemblée publique « dont il est raisonnable de penser qu’elle aurait pour effet de troubler la paix[237] », autrement appelée « assemblée interdite »;
  • interdiction d’entrer au Canada de l’étranger en vue de participer à une assemblée interdite[238];
  • interdiction de se déplacer « à destination ou à l’intérieur d’une zone » où se tenait une assemblée et d’y amener un mineur[239];
  • interdiction de fournir une aide matérielle aux participants d’une assemblée interdite[240].

Il ressort de la preuve recueillie devant le Comité que l’objectif de cette mesure extraordinaire temporaire était de répondre aux défis rencontrés par les services policiers dans le maintien de la paix et de doter le gouvernement fédéral d’outils additionnels pour mettre fin aux manifestations et d’empêcher qu’elles surviennent à nouveau[241].

Lors des réunions, certains témoins ont précisé les effets et la portée des mesures prévues par le Règlement[242]. Brenda Lucki a indiqué au Comité que « le [Règlement sur les mesures d’urgences] est venu compléter les pouvoirs existants et a fourni de nouveaux instruments aux organismes d’application de la loi pour mettre fin à ces barrages illégaux[243] ». De son côté, François Daigle a spécifié que :

Chacune des interdictions énumérées aux articles 2 à 5 du Règlement visait des comportements observés lors des blocages illégaux et de l’occupation des rues d’Ottawa. L’interdiction clé est celle qui est prévue au paragraphe 2(1), qui vient compléter les pouvoirs dont dispose la police, en common law, pour maintenir la paix par l’interdiction de certaines assemblées publiques[244].

D’une part, plusieurs témoins ont évoqué la nécessité d’une interdiction d’approvisionner les manifestants, notamment en carburant ou en nourriture[245].

Par ailleurs, selon certains, il était primordial de protéger les infrastructures essentielles et d’interdire l’accès des mineurs aux zones des manifestations[246].

À cet effet, plusieurs témoins ont jugé nécessaire et utile la création d’une zone d’exclusion[247]. Selon Steve Bell, il s’agissait du « pouvoir le plus important conféré par la [Loi sur les mesures d’urgence] », permettant « de bloquer l’entrée du centre-ville et de stabiliser l’environnement avant l’opération qui a permis de dégager de façon sécuritaire le centre-ville [d’Ottawa] et de rétablir l’ordre[248] ».

D’autre part, comme discuté dans le chapitre 5 du présent rapport – Réponse policière au « Convoi de la liberté », Défis auxquels se sont heurtées les forces policières – de nombreux témoins ont abordé la question des difficultés pratiques d’obtenir les services des entreprises de remorquage en vue d’enlever des véhicules lourds appartenant aux manifestants et composant les blocages[249].

En effet, des témoins ont rapporté que les conducteurs des dépanneuses étaient hésitants ou refusaient tout simplement le mandat de remorquer les camions se trouvant dans les zones de manifestations, que ce soit par crainte d’atteinte à leur sécurité ou celle de leur équipement, ou bien en raison de l’intimidation, du harcèlement et des menaces de mort de la part de manifestants[250].

Sur cette question, Peter Sloly a dit devant le Comité qu’« [implicitement], le pouvoir d’obtenir de manière prévisible suffisamment de dépanneuses appartiendrait bien à la police[251] ».

Par ailleurs, certains témoins ont précisé que le recours au Code criminel, aux lois provinciales ou règlements municipaux ne permettait pas d’atteindre les mêmes objectifs que ceux du Règlement en temps requis ou de manière sécuritaire[252].

Dans son témoignage, l’honorable Perrin Beatty a noté que :

Pour donner un exemple, je crois comprendre que la loi sur les mesures d’urgence de l’Ontario, contrairement aux autres provinces, ne donne pas le pouvoir aux autorités de faire pression sur les entreprises pour qu’elles fournissent des services pendant une crise. Elles ne pouvaient donc pas exiger des conducteurs de dépanneuses qu’ils le fassent. Je dirais que le problème relève de la loi ontarienne, et que si ce pouvoir est nécessaire, c’est là où il faut l’accorder[253].

En revanche, Thomas Carrique a mentionné que pour réquisitionner des remorqueuses, une « demande d’indemnisation à la province dans le cadre d’un processus d’approvisionnement […] en cas d’urgence[254] » était en cours lorsque la Loi sur les mesures d’urgence a été invoquée.

Enfin, certains témoins ont commenté l’utilité et l’efficacité du pouvoir intégré au Règlement, enlevant l’exigence d’assermentation pour les membres de la GRC ou les policiers qui arrivaient d’autres provinces, en les rendant opérationnels dans les meilleurs délais[255].

À ce sujet, Steve Bell a expliqué que « compte tenu du grand nombre de policiers de l’extérieur qui ont participé [aux opérations du SPO], le retrait du processus d’assermentation [leur] a fait gagner un temps et des ressources précieux[256] ».

De son côté, Peter Sloly a souligné que « [le] fait de faciliter l’assermentation du statut de gendarme spécial à l’échelle du pays pour permettre le transport aérien d’agents arrivant de toutes les provinces vers la ville a représenté une mesure extrêmement importante[257] ».

Cependant, l’honorable Perrin Beatty a déclaré devant le Comité que :

[Si] on soutient qu’il aurait fallu trop de temps pour assermenter les agents de police à Ottawa venant d’autres provinces et que c’est un problème, il faut modifier la loi concernée pour régler ce problème. Il ne faut pas forcer le gouvernement à invoquer la loi fédérale sur les mesures d’urgence pour régler ce genre de situation[258].

Décret sur les mesures économiques d’urgence

Le Décret a institué deux principales mesures financières[259] :

  • gel des avoirs[260];
  • nouvelles obligations pour les plateformes de sociofinancement et les fournisseurs de services de paiement auprès du CANAFE[261].

Du point de vue de la sous-ministre adjointe du ministère des Finances, Direction de la politique du secteur financier, Isabelle Jacques, l’objectif des mesures financières temporaires était de deux ordres[262] : « mettre fin au financement d’activités illégales, ou du moins de le réduire », constituant l’objectif principal, et « dissuader les gens de participer à des activités illégales sur la Colline[263] ».

Au sujet du second objectif, le Comité a entendu de nombreux témoignages soutenant que ces mesures ont eu un effet dissuasif important auprès des manifestants, les incitant à quitter les assemblées publiques interdites, une fois ces mesures entrées en vigueur[264].

En revanche, dans son mémoire présenté au Comité, la professeure Nomi Claire Lazar est d’avis que le gouvernement fédéral n’a pas suffisamment justifié pourquoi l’adoption de ce décret était nécessaire :

Or, le raisonnement derrière les prétentions sur la nécessité est souvent laissé implicite. On peut vaguement voir un lien entre les moyens et la fin, mais le gouvernement ne l’explicite pas. C’était incontestablement le cas, par exemple, lorsque le Décret sur les mesures économiques d’urgence pour mettre fin à la situation d’urgence de février 2022 a été pris. Le décret précisait que les mesures étaient « fondées » pour résoudre la crise, mais n’expliquait pas pourquoi. Il n’était pas évident non plus de dégager quel but précis visaient ces mesures : étaient-elles « fondées » pour dissuader la participation, afin de disperser la foule et de réduire le risque de violence et de méfaits? Ou étaient-elles « fondées » pour limiter le financement des dirigeants et dans quel objectif précis? Le gouvernement n’a pas énoncé clairement les liens justifiant ces mesures. La force de chaque lien doit être mise à l’épreuve, mais pour cela, il faut voir les liens. Serait-il judicieux d’envisager de modifier le paragraphe 61(1) pour obliger le gouvernement à expliciter le lien nécessaire entre les mesures prises et l’objectif visé?[265]

Dans sa comparution de février 2024, l’honorable Arif Virani, ministre de la Justice et procureur général du Canada, a affirmé que les mesures financières édictées dans le Décret visaient à déstabiliser le blocage illégal en coupant le financement des manifestants, qui pouvait provenir de sources étrangères ou en ayant recours à des bitcoins[266].

Portée des mesures financières

La prise du Décret a entraîné le gel d’environ 280 produits financiers, dont des comptes bancaires, des cartes de crédit et des marges de crédit, représentant une valeur totale de 8 millions de dollars, dont 3,8 millions provenant d’un fournisseur de services de paiement[267]. La GRC a rapporté un chiffre de 257 produits financiers gelés et la divulgation de l’identité de 57 entités aux institutions financières[268]. Dans son témoignage, Brenda Lucki a mentionné que « 170 adresses de portefeuilles de cryptomonnaie ont été communiquées aux fournisseurs de services liés aux actifs virtuels[269] ».

Angelina Mason, avocate en chef et vice-présidente, Affaires juridiques, de l’Association des banquiers canadiens, a précisé qu’environ 180 comptes ont été bloqués par les banques, dont la valeur cumulative des comptes gelés s’élevait à environ 8,3 millions de dollars. Il s’agissait pour la plupart de comptes avec des fonds importants[270]. Par ailleurs, selon Michael Hatch, vice-président, Relations gouvernementales, de l’Association canadienne des coopératives financières, moins de 10 comptes de coopérative d’épargne et de crédit, représentant en valeur de moins d’un demi-million de dollars, ont été bloqués, dont le plus important était un compte hypothécaire d’environ 200 000 $[271].

Le dégel des comptes a eu lieu le 21 février 2022 et tous les comptes ont été rendus accessibles à leurs propriétaires au plus tard le 24 février 2022[272]. Le Décret n’a pas eu d’effet rétroactif[273].

Quant à la décision de procéder par voie de décret plutôt que par ordonnance judiciaire distincte pour bloquer les comptes des personnes participant aux activités illégales, le gouvernement fédéral a exprimé ses préoccupations d’agir dans les meilleurs délais, chose qui aurait pu prendre des jours par la voie judiciaire[274]. D’ailleurs, certains témoins ont souligné avoir disposé de peu de temps pour agir dans les circonstances, que ce soit dans la prise décisionnelle ou d’application de la Loi et des mesures spéciales d’urgence[275]. Isabelle Jacques a mentionné devant le Comité qu’aucune évaluation écrite des répercussions économiques n’a été menée par le ministère des Finances avant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence et des mesures financières qui en découlent[276].

Par ailleurs, des témoins ont confirmé qu’aucun cas de blanchiment d’argent, de financement d’activité terroriste ou d’EVCI n’a été rapporté justifiant la prise du Décret[277]. Barry MacKillop, du CANAFE, a ajouté que dans le contexte du convoi, « les fonds n’étaient pas recueillis en vue de soutenir des activités d’[EVCI][278] ».

Enfin, des témoins ont confirmé que ni la GRC ni la PPO n’ont porté d’accusations criminelles pour une violation du Règlement ou du Décret suivant les événements de février 2022[279].

Rôle des institutions financières

Des témoins ont exprimé le rôle accru des institutions financières dans la sélection des comptes ou autres produits financiers qui allaient être bloqués, concernant les personnes désignées[280] [italique ajouté].

Certains témoins ont évoqué le fait qu’une liste de noms a été transmise directement par la GRC aux institutions en cause, qui avaient la latitude ou non de cesser les opérations de la personne inscrite sur cette liste[281]. Il a été confirmé devant le Comité qu’aucune sanction ne pesait contre les institutions financières qui décidaient de ne pas suivre cette liste, en plus de bénéficier d’une immunité de poursuite prévue par l’article 7 du Décret[282].

Brenda Lucki a précisé que la GRC travaillait en étroite collaboration avec les institutions financières, en élaborant un processus simplifié selon lequel des renseignements pertinents étaient régulièrement transmis en vue du gel ou dégel des produits financiers pour les personnes visées[283]. En principe, tous les renseignements compris dans les dossiers pour identifier la personne désignée [italique ajouté], parfois seulement le numéro de la plaque d’immatriculation, mais pas les casiers judiciaires, ont été transmis aux institutions financières[284].

Il semblerait que la liste des personnes désignées [italique ajouté] à laquelle font référence les témoignages ne doit pas être confondue avec la liste de donateurs, mentionnée dans déclaration publiée par la GRC le 21 février 2022 et qui disait : « À aucun moment nous n’avons fourni une liste de donateurs aux institutions financières[285]. »

D’ailleurs, à cet effet, des témoins ont confirmé devant le Comité que le nom des donateurs n’a jamais été transmis aux institutions financières[286]. Ainsi, les comptes gelés ne visaient pas les petits donateurs ou acheteurs qui ont encouragé les manifestants[287], sauf s’ils se trouvaient à l’intérieur de la zone interdite[288]. Qui plus est, la nette majorité des titulaires de comptes n’a pas été touchée par ces mesures financières temporaires[289]. De ce fait, certains témoins ont précisé que les allégations de gel de compte pour des dons de 25 $ étaient « peut-être un peu exagérées[290] ».

Lors de la mise en vigueur du Décret, les institutions financières envoyaient un rapport des activités au ministère des Finances, indiquant le nombre de comptes gelés et la valeur de ces derniers, sans donner de détails sur les titulaires des comptes[291]. Quatre ou cinq comptes se trouvant en dehors de la liste fournie par la GRC ont été bloqués par les banques en cause[292].

Des témoins ont ajouté qu’aucun compte bancaire n’a été gelé directement par le gouvernement fédéral et que la GRC a agi de manière indépendante dans la transmission de sa liste aux institutions financières[293]. Par ailleurs, Barry MacKillop a précisé que le CANAFE n’avait pas le pouvoir de geler les comptes bancaires[294].

Le dégel des comptes a eu lieu aussitôt que la GRC a communiqué aux institutions financières que les personnes inscrites sur la liste ne contrevenaient plus au Règlement ou, dans un cas, lorsque la personne a pu démontrer à son institution financière qu’elle ne participait plus aux activités interdites[295]. En revanche, certains comptes pouvaient demeurer bloqués en vertu d’une ordonnance du tribunal[296].

Il semble y a avoir une contradiction dans les témoignages quant à la portée du pouvoir discrétionnaire accordé aux institutions financières. Alors que, selon certains témoins, ces dernières étaient autonomes dans la prise décisionnelle sur les comptes à être gelés, sans qu’il y ait eu de directives politiques gouvernementales[297], Angelina Mason a plutôt indiqué que les institutions financières n’avaient pas de pouvoir discrétionnaire dans le fait de suivre ou non la liste fournie par la GRC[298]. Michael Hatch a néanmoins confirmé l’existence d’un pouvoir discrétionnaire résiduel en vertu du décret, dans le blocage des comptes se trouvant en dehors de la liste fournie par la GRC[299].

Ces représentants des institutions financières ont également déclaré avoir reçu des instructions ou orientations insuffisantes au sujet du gel des comptes[300]. Ils ont néanmoins eu l’occasion de poser des questions au gouvernement fédéral sur la conformité, la portée et l’application des mesures temporaires d’urgence, y compris sur la définition de la personne désignée [italique ajouté] participant aux activités interdites[301]. Dans son témoignage, Rob Stewart a admis qu’il y a eu des « difficultés au niveau de la mise en œuvre des mesures économiques[302] », entraînant des malentendus sur leur portée ou leur application.

De plus, Michael Hatch a soulevé le fait que les coopératives n’ont pas été traitées sur le même pied d’égalité que les six grandes banques, lesquelles auraient été consultées et informées par le gouvernement fédéral des jours plus tôt[303].

Par ailleurs, il serait utile de préciser que la mise en œuvre des mesures financières en cause a également soulevé des préoccupations relatives à la protection de la vie privée. Lors de son témoignage, Isabelle Jacques a affirmé qu’il n’y a pas eu de consultations avec le commissaire à la protection de la vie privée[304]. En revanche, elle a précisé qu’aucun renseignement précis n’a été reçu par le ministère des Finances, seulement des « agrégats de données[305] ».

Au sujet des renseignements personnels figurant sur la liste confidentielle transmise par la GRC aux institutions financières, Angelina Mason s’est exprimée ainsi : « [L]es lois sur la protection des renseignements personnels s’appliquent, ce qui exige que vous ne reteniez que les renseignements nécessaires et aux fins pour lesquelles ils ont été recueillis[306]. »

Le Comité a également reçu le mémoire du commissaire à la protection de la vie privée du Canada, qui a élaboré sur les répercussions sur la vie privée que pouvait avoir le recours à la Loi sur les mesures d’urgence, en concluant ce qui suit :

[Le] droit à la vie privée est un droit fondamental, et veiller à ce qu’il soit protégé permet de susciter la confiance nécessaire et de servir d’importants intérêts publics. En situation de crise, il est important d’élaborer et de mettre en œuvre un cadre clair de gouvernance de la protection de la vie privée afin que les institutions fédérales et les organisations du secteur privé puissent remplir efficacement leurs obligations en vertu de la [Loi sur la protection des renseignements personnels] et de la [Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques][307].

Le Comité retient que les mesures financières édictées par le Décret, dont le gel des avoirs par les institutions financières visées, ont suscité de nombreuses interrogations et préoccupations sur leur portée et mise en œuvre. Pour cette raison, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 17

Que le gouvernement fédéral, en collaboration avec l’Association des banquiers canadiens, l’Association canadienne des coopératives financières et le Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada, établisse des processus standardisés concernant le gel et le dégel des comptes, advenant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence.

Plateformes de sociofinancement

De nombreux témoins ont commenté le rôle des plateformes de sociofinancement dans le financement du « Convoi de la liberté »[308].

Kim Wilford, conseillère juridique principale de la plateforme GoFundMe, a confirmé au Comité qu’un peu plus de 10 millions de dollars a été amassé via cette plateforme, avant la suspension de la collecte le 2 février 2022, dont 88 % provenaient du Canada. Ce pourcentage correspond à environ 133 000 donateurs du Canada, 14 000 des États-Unis et 4 000 d’autres pays, soit environ 3 %[309].

Jacob Wells, cofondateur de la plateforme GiveSendGo, a mentionné que le chiffre récolté sur celle-ci s’élève à environ 13 millions de dollars, dont environ 600 000 $ en pourboires. Le don moyen était d’environ 100 $ et le pourboire moyen de 5 $[310].

Kim Wilford et Jacob Wells ont déclaré ne pas avoir reçu de fonds en provenance de la Chine[311] ou de la Russie[312]. Certains témoins ont également affirmé l’absence de preuve pour soutenir la prétention selon laquelle les fonds récoltés proviendraient d’activités criminelles[313].

Il ressort du témoignage en Comité que les fonds versés sur la plateforme GoFundMe ont été restitués aux donateurs depuis le 5 février 2022, y compris les frais de traitement des transactions et les pourboires. Ils pouvaient par ailleurs être remis à des organismes de bienfaisance crédibles et établis[314]. Quant à la plateforme GiveSendGo, Jacob Wells a confirmé que la grande majorité des dons a été restituée aux donateurs vers la mi‑mars 2022[315].

Alors que Kim Wilford a affirmé avoir maintenu une étroite collaboration avec la Ville d’Ottawa et son service de police afin de suivre de l’évolution de la situation au centre‑ville d’Ottawa[316], Jacob Wells a soutenu n’avoir été contacté par aucun service de police ou représentants du gouvernement fédéral ou provincial en lien avec le financement du « Convoi de la liberté »[317].

Au sujet de la légalité du financement de ces manifestations via les plateformes de sociofinancement, Kim Wilford a expliqué que les activités de la campagne sur la plateforme GoFundMe ont été suspendues le 2 février 2022 pour un retrait complet le 4 février 2022, soit avant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence. L’entreprise estimait alors que ses conditions n’étaient plus respectées[318]. De son côté, Jacob Wells a fait part au Comité du mécanisme de vérification interne pour vérifier si un destinataire de fonds pouvait légalement les recevoir (p. ex : si l’individu ne figure pas sur une liste) ou si les objectifs de la collecte étaient légitimes et conformes aux lois du pays[319].

L’enjeu de l’application des lois canadiennes à l’étranger ou de compétence a également été abordé par plusieurs témoins[320].

Par ailleurs, la prise du Décret a eu pour effet d’introduire de nouvelles obligations d’inscription et de déclaration d’opérations douteuses auprès du CANAFE pour les plateformes de sociofinancement et certains fournisseurs de services de paiement[321].

Malgré l’introduction de cette nouvelle obligation, le processus d’inscription n’a pu être complété avant la levée des mesures spéciales d’urgence[322]. Kim Wilford a confirmé que GoFundMe s’est inscrite auprès du CANAFE suivant l’entrée en vigueur de cette exigence, le tout en collaboration avec Stripe, une entreprise responsable du traitement des paiements[323]. Jacob Wells a précisé que le processus de conformité à la nouvelle réglementation suivait son cours[324].

Ces nouvelles obligations ont par la suite été reprises par modifications réglementaires, en vigueur depuis le 27 avril 2022[325]. En effet, l’expérience du mois de février 2022 a permis de moderniser la réglementation fédérale pour suivre l’évolution du secteur financier[326]. À ce sujet, Julien Brazeau, directeur général au ministère des Finances, Division des crimes financiers et de la sécurité, Direction de la politique du secteur financier, a expliqué devant le Comité :

En bref, essentiellement, le nouveau règlement a rendu permanent ce qui figurait dans les mesures d’urgence, à savoir l’obligation pour les plateformes de sociofinancement et les fournisseurs de services de paiement de s’inscrire et de signaler les opérations suspectes, et leur responsabilité accrue en matière de diligence raisonnable et de vérification des clients[327].

Le Comité accueille favorablement les nouvelles mesures réglementaires visant les plateformes de sociofinancement et certains fournisseurs de services de paiement. Cependant, à la lumière de la récente invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 18

Que le gouvernement fédéral revoie les mesures financières prises en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence ainsi que les modifications faites à la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes en avril 2022, pour déterminer leur efficacité et s’il conviendrait d’adopter une loi visant à combler les lacunes en matière de réglementation des plateformes de sociofinancement.

Chapitre 9 : Respect de la Charte

Le préambule de la Loi sur les mesures d’urgence dit que toute mesure extraordinaire prise à titre temporaire suivant une déclaration de situation de crise doit se faire dans le respect de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte), ainsi que de la Déclaration canadienne des droits et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, en ce qui concerne les « droits fondamentaux auxquels il ne saurait être porté atteinte même dans les situations de crise nationale ».

La Loi sur le ministère de la Justice prévoit en outre que le ministre de la Justice doit examiner les règlements transmis au greffier du Conseil privé pour enregistrement, afin de déterminer si leurs dispositions sont compatibles avec celles de la Charte[328]. La Loi sur les textes réglementaires dit également que les projets de règlement doivent être examinés préalablement pour s’assurer qu’ils ne sont pas incompatibles avec la Charte[329].

En mai 2022, le ministère de la Justice a publié un « Document d’information sur la Charte » portant sur le Règlement et le Décret pris en vertu de la déclaration de situation de crise de février 2022. Dans ce document, on explique qu’aussi bien le Règlement que le Décret ont été revus pour déterminer s’ils étaient conformes à la Charte, et on expose les répercussions possibles des mesures extraordinaires prises à titre temporaire sur les droits et les libertés garantis par celle-ci[330].

Même si la Loi sur le ministère de la Justice exige du ministre de la Justice qu’il dépose, pour chaque projet de loi du gouvernement, un énoncé « qui indique les effets possibles du projet ou de la proposition de loi sur les droits et libertés garantis par la [Charte] », cette exigence ne s’applique pas à la déclaration de situation de crise ou à l’égard des règlements ou des décrets[331]. Par conséquent, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 19

Que le gouvernement fédéral modifie l’article 4.2 de la Loi sur le ministère de la Justice, concernant l’obligation pour le ministre de la Justice de déposer un « énoncé concernant la Charte » pour les projets de loi émanant du gouvernement pour exiger que ce type d’énoncé soit déposé à l’égard de toute déclaration de situation de crise et de chaque règlement ou décret adopté relativement à une crise nationale.

Certains ministres et représentants gouvernementaux étaient d’accord pour dire que les mesures extraordinaires à titre temporaire prises en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence respectaient la Charte[332]. François Daigle a déclaré également que non seulement ces mesures étaient conformes à la Charte, mais que la déclaration de situation de crise n’a pas eu pour effet de suspendre son application[333]. L'ancien ministre Lametti a également expliqué que les mesures extraordinaires prises à titre temporaire ont été examinées de façon à relever toute incompatibilité avec la Charte[334]. François Daigle a précisé toutefois que même si le ministère de la Justice avait évalué ces mesures extraordinaires pour savoir si elles se conformaient à la Charte, l’application de ces mesures par les corps policiers et d’autres groupes n’avait pas été prise en compte dans cette évaluation[335].

Certains témoins du gouvernement ont insisté sur le caractère proportionnel des mesures extraordinaires à titre temporaire, sur la durée limitée de celles-ci et sur le fait qu’elles étaient ciblées. François Daigle a souligné à plusieurs reprises durant sa comparution le fait que les mesures étaient proportionnelles, en disant qu’« [elles] étaient ciblées, proportionnelles, de durée limitée et conformes à la Charte[336] ». L'ancien ministre Lametti a fait une déclaration semblable en indiquant que les mesures extraordinaires prises à titre temporaire étaient « nécessaires, raisonnables et proportionnées à la situation[337] ». Pour sa part, Jody Thomas a dit que ces mesures étaient « raisonnables, proportionnelles et, heureusement, de courte durée[338] ».

Plusieurs représentants gouvernementaux ont évoqué la tension entre les mesures extraordinaires prises à titre temporaire et les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique garantis par l’article 2 de la Charte. Voici ce qu’a déclaré l'ancien ministre Mendicino à ce propos :

[N]ous devons défendre la liberté d’expression, de rassemblement et de manifestation légale. Dans une démocratie, toutefois, la liberté ne permet pas de bafouer les droits d’autrui, ou d’empêcher les familles qui exploitent de petites entreprises de mettre de la nourriture sur la table ou des parents de marcher jusqu’à l’école avec leurs enfants. Jamais nous ne devrions encourager ou tolérer les comportements illégaux ou en être complices, car il s’agit là d’un affront à l’administration de la justice et à la primauté du droit[339].

Dans le même ordre d’idées, l'ancien ministre Lametti a dit que la « liberté d’expression ne prive personne de ses droits », et que « [c]e n’était pas seulement une question de liberté d’expression[340] ». François Daigle a ajouté que la Charte ne protège que le droit de réunion pacifique, et que les mesures extraordinaires à titre temporaire n’interdisaient pas tout rassemblement public[341].

Il a été également question, devant le Comité, de la légalité du gel des comptes bancaires et d’autres produits financiers effectué dans le cadre du Décret en regard des dispositions de l’article 8 de la Charte. Isabelle Jacques a expliqué que le « gel » des comptes n’entrait pas dans la définition de « saisie » au sens de l’article 8 de la Charte, car il n’y avait pas de créanciers impliqués[342]. D’autres témoins ont expliqué que des comptes ont été suspendus ou gelés[343], et François Daigle a ajouté que cela ne constituait pas une saisie au sens de la Charte, parce qu’il « n’y a pas eu de transfert de propriété[344] ». Dans le même ordre d’idées, Kent Roach a expliqué que les institutions financières pouvaient être assujetties à la Charte, en ce qui concerne l’exercice de leur pouvoir de geler des comptes bancaires en vertu des mesures extraordinaires prises à titre temporaire, même si les décisions en la matière n’étaient pas prises par le gouvernement fédéral en tant que tel[345].

Enfin, certains témoins ont souligné la possibilité de contestations judiciaires, particulièrement pour demander réparation en vertu de la Charte. Par exemple, Kent Roach a expliqué que « [n]’importe qui peut dire que des actes sont conformes à la Charte » et que de nombreux aspects des mesures extraordinaires prises à titre temporaire « pourraient être contestés en vertu de la Charte[346] ». Plus précisément, il a mis en doute la conformité à la Charte des mesures de saisie des actifs financiers et de celles visant les manifestations[347]. Dans le même ordre d’idées, Leah West a déclaré devant le Comité qu’il était possible que des personnes prétendent que leurs droits garantis par la Charte ont été violés de manière injustifiée et demandent réparation devant les tribunaux, et que ces demandes pourraient se fonder sur une éventuelle conclusion de la Commission, du Comité ou de la Cour fédérale selon laquelle il était injustifiable d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence[348].

Plus récemment, des questions relatives aux droits protégés par la Charte ont été analysées dans le cadre d’un contrôle judiciaire soumis devant la Cour fédérale.

En effet, dans sa décision rendue le 23 janvier 2024[349], le juge Mosley a cherché à déterminer si le Règlement et le Décret, pris en vertu de la Proclamation déclarant une urgence d’ordre public, enfreignaient les articles 2b), 2c), 2d), 7 ou 8 de la Charte et si ces atteintes étaient justifiées au regard de l’article premier.

Il a conclu qu’ils portaient atteinte à l’alinéa 2b), qui garantit le droit à la liberté d’expression, et à l’article 8, qui garantit le droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives[350]. Il a également jugé que ces atteintes n’étaient pas justifiées au regard de l’article premier de la Charte[351]. Il a toutefois conclu qu’il n’y avait pas eu violation des alinéas 2c), 2d) et de l’article 7 de la Charte – qui garantissent, respectivement, la liberté de réunion pacifique, la liberté d’association, et le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne[352].

Chapitre 10 : Accès à l’information et aux documents

Le présent Comité est un comité mixte spécial, composé de membres des deux Chambres du Parlement.

Le paragraphe 108(1)a) du Règlement de la Chambre des communes[353] prévoit que les comités permanents « sont autorisés à convoquer des personnes et à exiger la production de documents et dossiers ». Le paragraphe 116(1) de ce règlement spécifie qu’un comité spécial « observe le Règlement de la Chambre dans la mesure où il y est applicable[354] ».

La procédure et les usages de la Chambre des communes explique plus en détail les pouvoirs d’un comité parlementaire relatifs à la tenue des audiences devant celui-ci, notamment concernant les questions de procédure et de privilège[355].

Quant à l’article 62 de la Loi sur les mesures d’urgence, en vertu duquel le présent Comité a été constitué, il est muet sur la façon dont le Comité devrait conduire son examen parlementaire et recueillir des témoignages ou des documents.

Dans le cadre de la présente étude, le Comité a été confronté à de multiples reprises au refus ou à l’impossibilité de témoins de répondre aux questions ou de soumettre des documents en raison de différents privilèges liés à la preuve.

Dans un document préparé en réponse à une motion du Comité du 22 septembre 2022[356], les bureaux de la Direction des comités et des services législatifs de la Chambre des communes, des Comités du Sénat, du Légiste et conseiller parlementaire de la Chambre des communes et du Légiste et conseiller parlementaire du Sénat ont précisé ce qui suit :

Le droit primordial qu’ont les membres des comités d’obtenir une réponse à leurs questions découle du pouvoir des deux Chambres de procéder à des enquêtes, de convoquer des personnes et de demander la production de documents et de dossiers. De tels privilèges parlementaires sont définis dans le préambule et à l’article 18 de la Loi constitutionnelle de 1867, ainsi qu’à l’article 4 de la Loi sur le Parlement du Canada. Les deux Chambres ont délégué ces pouvoirs aux membres du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, par l’entremise des ordonnances des Chambres visant à former le Comité.
Vu leur nature constitutionnelle, les pouvoirs d’un comité l’emportent sur le droit législatif et les autres privilèges, comme le secret professionnel de l’avocat[357].

On peut également lire dans ce mémo :

Dans La procédure et les usages de la Chambre des communes, on indique que les membres des comités accordent une attention particulière à l’interrogatoire de fonctionnaires :
L’obligation faite aux témoins de répondre à toutes les questions posées par un comité doit être mise en équilibre avec le rôle que jouent les fonctionnaires lorsqu’ils donnent des avis confidentiels à leur ministre. La tradition veut qu’on envisage ce rôle par rapport à la mise en œuvre et à l’exécution de la politique gouvernementale plutôt qu’à la détermination de celle-ci. En conséquence, les comités ont dispensé les fonctionnaires de commenter les décisions stratégiques prises par le gouvernement. En outre, les comités acceptent ordinairement les raisons données par un fonctionnaire pour refuser de répondre à une question précise afin d’éviter d’exprimer un avis juridique, d’être en conflit avec sa responsabilité envers le ministre, de déborder de son domaine de responsabilité, ou d’influer sur des opérations commerciales.
Les membres des comités peuvent insister pour qu’un témoin réponde à des questions précises, mais ils ne disposent pas de pouvoirs leur permettant de sanctionner l’irrespect des ordres qu’ils adoptent. Seuls le Sénat et la Chambre des communes peuvent exercer leur pouvoir disciplinaire de punir un témoin pour son refus. Ce pouvoir disciplinaire englobe, par exemple, celui de blâmer une personne qui n’est pas député ou sénateur.

Lors des audiences du Comité, plusieurs ministres et représentants du gouvernement fédéral ont invoqué le fait que les informations ou documents demandés par les membres du Comité étaient couverts par un privilège de non-divulgation, dont le secret des délibérations ou des renseignements du Cabinet ou le secret professionnel avocat-client[358]. À titre d’exemple, l'ancien ministre Lametti a invoqué trois types de privilèges dans son témoignage devant le Comité, soit le caractère confidentiel des renseignements du Cabinet, le secret professionnel et le privilège relatif au litige[359].

La plupart des témoins ont mentionné qu’ils ne pouvaient pas, n’étaient pas autorisés ou n’ont pas été consultés sur la possibilité de renoncer au privilège invoqué dans le contexte de l’examen mené par le Comité[360]. Selon François Daigle, du ministère de la Justice, le fait de recevoir les témoignages à huis clos ne permettrait pas de lever le secret professionnel pour autant[361]. De son côté, Stephen Laskowski, de l’Alliance canadienne du camionnage, a invoqué la règle de la pertinence pour certaines questions qui lui ont été posées par plusieurs membres du comité[362].

Le Comité a également eu connaissance de l’existence d’un avis juridique interne du gouvernement fédéral pour déterminer si l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence était justifiée dans les circonstances, sans toutefois réussir à en obtenir une copie, en raison de l’invocation du secret professionnel avocat-client. Leah West et Kent Roach ont pourtant indiqué que la connaissance de cet avis aurait été souhaitable pour une analyse juridique complète de la situation[363].

Kent Roach a souligné l’importance pour les membres du Comité d’avoir accès à des informations ou des documents, même s’ils étaient couverts par le secret professionnel avocat-client[364]. En ce sens, il a suggéré ceci au Comité :

Je ne pense pas que vous pourrez vraiment aller au fond des choses si vous ne menez pas une enquête à huis clos, sous réserve de la confidentialité en matière de sécurité nationale.
J’ajouterais que je pense qu’à l’avenir, vous devriez envisager une enquête qui pourrait déroger au secret professionnel de l’avocat. [L’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement], par exemple, est habilité à le faire[365].

Dans son mémoire soumis au Comité, l’Association canadienne des libertés civiles a souligné à ce propos :

Plusieurs témoins de la Commission ont affirmé que le ministère de la Justice avait produit un avis juridique qui donnait à penser que les « menaces envers la sécurité du Canada » au sens de la Loi n’avaient pas la même signification que le terme utilisé dans la Loi sur le SCRS, même si la définition du SCRS a été directement incorporée dans la Loi. Le gouvernement du Canada a invoqué le secret professionnel de l’avocat à propos de cet avis.
L’[Association canadienne des libertés civiles] reconnaît l’importance fondamentale du secret professionnel de l’avocat. Toutefois, dans la mesure où le gouvernement se fie à cet avis juridique pour appuyer l’argument selon lequel il a agi de bonne foi et que le critère minimal pour déclarer l’état d’urgence a été respecté, il ne peut le prouver qu’en révélant l’avis[366].

La possibilité d’une renonciation formelle ou implicite a également été abordée en Comité. Jody Thomas a spécifié que le client, pouvant y renoncer, était le gouverneur en conseil[367]. Selon Leah West, le client serait le Cabinet ou le premier ministre[368].

À la suite de son témoignage devant le Comité, Jody Thomas a envoyé une lettre à ce dernier, maintenant le refus de communiquer l’information demandée relativement à cet avis juridique, en raison du secret professionnel invoqué :

En ce qui concerne l’opinion juridique du gouvernement fédéral sur l’interprétation des seuils juridiques nécessaires pour déclarer l’état d’urgence :
(a) à quelle date a-t-on demandé cette opinion;
(b) à quelle date l’opinion juridique a-t-elle été rédigée;
(c) qui a demandé la préparation de cette opinion;
(d) qui a rédigé cette opinion; (e) qui a approuvé cette opinion;
(f) les conclusions ont-elles été modifiées au cours du processus d’approbation?
Le secret professionnel de l’avocat m’oblige à refuser respectueusement de répondre à cette question[369].

Il sera utile de préciser que le 31 mai 2022, le Comité a adopté une motion pour émettre « [un] ordre de soumettre l’ensemble des évaluations de sécurité et avis juridiques utilisés par le gouvernement pour déterminer que[370] » les différents seuils prévus par la Loi sur les mesures d’urgence ont été atteints et que les mesures temporaires prises en vertu de celle-ci respectaient la Charte.

Le ou vers le 29 juin 2022, une lettre de réponse à l’ordonnance de production des documents du Comité a été transmise par François Daigle pour le ministère de la Justice, dans laquelle il indique « [qu’après] une pleine considération, notre ministère a déterminé que tous les avis juridiques détenus qui pourraient répondre à l’ordonnance du Comité sont assujettis au secret professionnel de l’avocat[371] ». Dans sa lettre, il souligne également ce qui suit :

Bien que d’autres pays aient pu à l’occasion, s’écarter de cette règle, au Canada, il est du seul ressort du gouvernement du Canada et de ses ministres de renoncer au secret professionnel de l’avocat à l’égard des avis juridiques fournis à la Couronne. Pour des raisons de principe et de pratique, cela se produit rarement et la règle générale demeure que de tels avis ne seront normalement pas communiqués aux comités du Parlement, sous réserve de la discrétion ministérielle et de considérations d’ordre public[372].

Il serait utile de mentionner que cette lettre explique les motifs de refus uniquement sous l’angle des renseignements protégés par le secret professionnel, mais pas celui du secret du Cabinet.

Le ministère de la Justice a cependant partagé avec le Comité certains documents pour expliquer le contexte juridique de l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence[373]. D’autres ministères et organismes du gouvernement fédéral ont également soumis des documents au Comité pour répondre à l’ordre émis, dont certains étaient caviardés[374].

En réponse à une autre motion du Comité, adoptée le 20 octobre 2022, les ministères, personnes et organismes qui ont fourni les documents pour répondre à l’ordonnance de production du 31 mai 2022 étaient tenus de formuler des motifs justifiant chaque caviardage ou expurgation[375].

Certaines informations sont demeurées inaccessibles au Comité en raison de différents privilèges ou pour des motifs d’intérêt public, de relations internationales ou de sécurité nationale[376].

À titre d’exemple, dans une lettre transmise au Comité, le ou vers le 4 novembre 2022, le sous-ministre du ministère des Transports, Michael Keenan, a répondu à cet ordre de la manière suivante :

Le texte aux pages 3 à 4 du document a été caviardé au motif qu’il contient des renseignements qui sont visés par le secret professionnel de l’avocat. Comme il est mentionné dans la lettre du 29 juin 2022 de François Daigle, sous-ministre de la Justice et sous-procureur général du Canada, les conseils juridiques à la Couronne qui sont protégés par le secret professionnel de l’avocat sont habituellement retenus et ne sont pas divulgués aux comités du Parlement. Ces caviardages ont été appliqués de façon constante dans la production de documents pour la Commission sur l’état d’urgence[377].

Une divulgation partielle des renseignements protégés a néanmoins eu lieu sur une base exceptionnelle, à la suite du déroulement des procédures devant la Commission ou dans le cadre des poursuites civiles où des caviardages ont été retirés[378].

En effet, il importe de noter que la Commission, au même titre que le Comité, a également été confrontée aux difficultés de recueillir la preuve en raison des différents privilèges invoqués.

Dans son mémoire présenté au Comité, le professeur Ryan Alford a écrit ce qui suit :

Dans le cadre de l’enquête, le gouvernement a omis de produire des éléments de preuve nécessaires pour déterminer si le Cabinet avait des motifs raisonnables de conclure qu’il existait un état d’urgence. Plus particulièrement, il a invoqué le secret professionnel d’une manière qui allait à l’encontre de l’enquête et de l’article 63 de la [Loi]. […]
Malheureusement, dans le cadre de l’enquête publique, le ministre de la Justice a invoqué le secret professionnel de l’avocat pour ne pas avoir à fournir les avis juridiques de son ministère qui donnaient au Cabinet une définition « évolutive » de l’état d’urgence, plus souple que celle prévue par la [Loi]. De plus, le ministre de la Justice a refusé de commenter les témoignages de la conseillère à la sécurité nationale et de la sous-greffière du Conseil privé selon lesquels la norme juridique a été mise à jour ou interprétée d’une manière évolutive ou globale. Plus particulièrement, il a refusé de dire si les avis juridiques relatifs à la nouvelle norme étaient la raison pour laquelle le directeur du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) avait changé d’idée au sujet de la norme applicable le jour même de la déclaration de l’état d’urgence.
[…]
Dans les derniers propos qu’il a échangés avec le ministre de la Justice, le commissaire Paul Rouleau est celui qui a le mieux résumé l’impasse que le gouvernement a créée lorsqu’il a invoqué le secret professionnel de l’avocat pour ne pas avoir à communiquer des renseignements sur l’enjeu au cœur de l’enquête :
Commissaire Paul Rouleau : Je vais peut-être m’attirer des ennuis [en posant des questions qui portent atteinte au secret professionnel de l’avocat], mais votre avocat peut intervenir au besoin. J’essaie simplement de comprendre. La Commission est chargée d’examiner la décision du Cabinet dont le caractère raisonnable est mis en cause, comme l’a mentionné l’avocat de la Commission. J’ai un peu de difficulté à déterminer, et je ne sais pas si vous pouvez m’aider, comment nous pouvons déterminer le caractère raisonnable lorsque nous ignorons sur quoi il se fondait. Pouvons-nous simplement tenir pour acquis qu’ils agissaient de bonne foi sans connaître les fondements ou les assises de cette décision? Vous savez de quoi je parle. […] Quelle était la teneur de la loi selon ceux qui ont pris la décision? Je suppose que la réponse est que nous devons simplement partir du principe qu’ils ont agi de bonne foi dans l’application de ce qu’on a leur a dit. Est-ce en quelque sorte ce que vous voulez dire?
[L’ancien] ministre David Lametti : Ça me semble juste. [traduction]
Ces propos, moment charnière des audiences tenues dans le cadre de l’enquête, sont troublants. Ils confirment que, compte tenu de la décision du gouvernement de créer une situation où le commissaire peut s’« attirer des ennuis » en raison du secret professionnel de l’avocat, nous devrions « simplement tenir pour acquis qu’ils agissaient de bonne foi[379] ».

Ryan Alford a conclu dans son mémoire :

L’obligation de rendre compte du gouvernement est la raison d’être de l’enquête publique et de l’enquête du Parlement sur la déclaration de l’état d’urgence. Selon la Commission : « Le point de départ de la commission est d’enquêter sur les raisons pour lesquelles le gouvernement a déclaré l’état d’urgence. Comme c’est le gouvernement qui a jugé nécessaire d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence, il lui appartient d’expliquer sa décision. » Comme l’a souligné l’auteur principal de la [Loi] : « Lorsqu’il existe des pouvoirs extraordinaires, il faut une reddition de comptes extraordinaire[380]. » [traduction]

Par ailleurs, dans un document produit devant la Commission, la Canadian Constitution Foundation abondait dans le même sens :

Le paragraphe 58(1) de la Loi sur les mesures d’urgence exige déjà que le gouvernement fédéral dépose devant le Parlement une explication des raisons de la déclaration de situation de crise. L’exposé des motifs de la déclaration de crise nationale de février explique en une phrase pourquoi les outils juridiques existants n’ont pas été suffisants. La Loi devrait être modifiée pour exiger du procureur général qu’il publie un avis juridique fournissant une analyse détaillée des instruments juridiques existants et expliquant pourquoi ils n’ont pas suffi.
[…] L’exigence de la Loi selon laquelle il s’agit d’un outil de dernier recours doit être renforcée, et le gouvernement qui souhaite l’invoquer doit procéder à un examen complet de tous les outils juridiques à sa disposition pour faire face à la situation de crise et expliquer pourquoi ces outils sont insuffisants[381].

Au sujet du secret du Cabinet, dans un communiqué de presse publié sur le site de la Commission, on peut lire ce qui suit :

Le gouvernement du Canada a répondu à une demande du Commissaire Paul Rouleau et a accepté de ne pas revendiquer le privilège du Cabinet quant aux documents dont le Cabinet a tenu compte dans la décision de déclarer l’état d’urgence et de mettre en œuvre des mesures spéciales pour faire face à cette urgence en février 2022[382].

Dans son témoignage devant la Commission, le premier ministre Trudeau a précisé à ce sujet :

[Qu’il] y a eu des centaines d’enquêtes publiques au fil de l’histoire de ce pays et seulement quatre fois cette confiance du Cabinet a été levée. Dans cette situation-ci, il était très important pour moi que toutes les informations, tout ce qui nous est remonté, tout ce qui nous est parvenu au Cabinet pour prendre nos décisions, donc que tout cela soit aussi visible que possible aux citoyens du Canada. Mais, comme vous avez dit, les délibérations restent confidentielles[383].

Dans les deux années suivant l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, le Comité a rappelé à témoigner certains représentants du gouvernement fédéral, notamment pour obtenir des réponses au sujet de ses multiples demandes d’accès à la preuve, y compris l’avis juridique sur lequel le gouvernement s’est fondé avant de recourir à la [Loi].

En février 2024, le ministre Virani a réaffirmé la position du gouvernement selon laquelle l’avis juridique en question était protégé par le secret professionnel de l’avocat[384], dont bénéficiait le gouvernement du Canada, qui était le client en l’occurrence[385]. Il a ajouté qu’à titre de Ministre de la Justice et procureur général du Canada, il portait à la fois le chapeau de conseiller du gouvernement et de membre du Cabinet[386]. Enfin, il a indiqué que, dans les circonstances, le gouvernement ne visait pas nécessairement à protéger le contenu de l’opinion juridique en soi, mais l’existence-même d’une relation privilégiée « qui favorise la franchise et des conseils libres, complets et équitables[387] ».

Quant au secret des délibérations ou des renseignements du Cabinet, le ministre Virani a déclaré que son existence servait à « favoriser, dans l'intérêt public, les discussions ouvertes et franches autour de la table du Cabinet sur des questions qui seront courageusement abordées à cette table, pour être ensuite défendues publiquement[388] ». Par ailleurs, il a mentionné qu’il était très rare que le secret du Cabinet soit levé, tout en reconnaissant le pouvoir du Parlement d’en faire la demande[389].

À la lumière de ce qui précède, le Comité estime préoccupant ne pas avoir eu accès à l’ensemble des informations et des documents sur lesquels le gouvernement fédéral s’est fondé pour invoquer la Loi sur les mesures d’urgence et les mesures spéciales temporaires en cause, notamment en raison de différents privilèges liés à la preuve soulevés par de nombreux témoins.

Le Comité convient que l’accès à l’ensemble des informations et documents détenus par le gouvernement fédéral, relatifs à l’invocation de Loi sur les mesures d’urgence, devrait être amélioré. Par conséquent, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 20

Que le gouvernement fédéral soit tenu de conserver un registre écrit complet du processus menant à la décision de déclarer un état d’urgence, afin d’éviter tout témoignage contradictoire, et que ce registre écrit devrait être remis au comité d’examen parlementaire une fois celui-ci nommé.

Quant à l’administration de la preuve devant un comité d’examen parlementaire, le Comité est d’accord qu’une modification des règles encadrant ses travaux futurs s’impose, notamment pour assurer la transparence et l’exhaustivité de l’examen.

Pour cette raison, le Comité fait la recommandation suivante :

Recommandation 21

Que le gouvernement fédéral modifie la Loi sur les mesures d’urgence pour mieux définir le rôle du comité d’examen parlementaire, et que la nouvelle définition porte notamment sur la question de l’accès aux documents, en plus de l’accès aux décrets et règlements actuellement prévu par cette loi.


[1]                La Presse canadienne, « La Ville d’Ottawa déclare l’état d’urgence face aux manifestations », Le Devoir, 7 février 2022.

[3]                Gouvernement de l’Ontario, Infrastructures essentielles et voies publiques, Règl. de l’Ont. 71/22.

[4]                Loi sur les mesures d’urgence, L.R.C. (1985), ch. 22 (4e suppl.), art. 17.

[5]                Proclamation déclarant une urgence d’ordre public, DORS/2022-20, 15 février 2022.

[6]                Règlement sur les mesures d’urgences, DORS/2022-21, 15 février 2022; Décret sur les mesures économiques d’urgence, DORS/2022-22, 15 février 2022.

[7]                Règlement sur les mesures d’urgences, par. 7(1).

[8]                Décret sur les mesures économiques d’urgence, art. 1.

[9]                La liste des mémoires et documents se trouve sur le site Web du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise.

[10]              Bureau du Conseil privé, Décret 2022-0392, 25 avril 2022.

[11]              Commission sur l’état d’urgence, Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022, rapport final, 17 février 2023.

[12]              Sécurité publique Canada, Réponse du gouvernement du Canada aux recommandations de la Commission sur l’état d’urgence, 6 mars 2024.

[13]              Loi sur les mesures d’urgence, art. 58 à 63.

[14]              Chambre des communes, Journaux, 16 février 2022.

[15]              Chambre des communes, Journaux, 21 février 2022.

[16]              Sénat, Journaux, 22 février 2022.

[17]              Ibid.; Sénat, Journaux, 23 février 2022.

[18]              Proclamation abrogeant la déclaration d’état d’urgence, DORS/2022-26, 23 février 2022.

[19]              Chambre des communes, Journaux, 2 mars 2022.

[20]              Sénat, Journaux, 3 mars 2022.

[21]              Parlement du Canada, Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise (DEDC), Procès-verbal, 5 avril 2022.

[22]              Loi sur les mesures d’urgence, par. 62(5) et 62(6).

[23]              DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 1840 (Philippe Hallée, Philippe Dufresne). Sauf indication contraire, les témoins sont mentionnés avec les titres qu’ils portaient au moment où ils sont comparus.

[24]              DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 2050 (l’hon. Perrin Beatty).

[25]              Ibid.

[26]              Ryan Alford, Responsabilité principale du Parlement aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023.

[27]              Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2050 (l’hon. David Lametti).

[28]              DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 2050 (Beatty).

[29]              Nomi Claire Lazar, La nécessité et la reddition de comptes dans le cadre de la Loi sur les mesures d’urgence, mémoire présenté à DEDC, 13 février 2023.

[30]              Ibid., p. 6.

[31]              Ibid.

[32]              Commission sur l’état d’urgence, Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022 : Volume 3 – Analyse (partie 2) et recommandations, rapport final, 17 février 2023, p. 371 (recommandation 51).

[33]              Sécurité publique Canada, Réponse du gouvernement du Canada aux recommandations de la Commission sur l’état d’urgence, 6 mars 2024.

[34]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (l’hon. Marco Mendicino); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840, 1940, 2115 (Mathieu Fleury), 1930, 1935, 2115 (Jim Watson); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835, 1945 (Drew Dilkens); 1840‑1845 (Jim Willett).

[35]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840 (Fleury); 1935, 2115 (Watson).

[36]              Ibid., 1930.

[37]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1840 (Willett).

[38]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840 (Fleury).

[39]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840 (Fleury); 1930 (Watson).

[40]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1940 (Steve Kanellakos).

[41]              Ibid., 2115 (Watson); 2110 (Kanellakos).

[42]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 2005, 2025 (Stephen Laskowski).

[43]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1940 (Fleury); 2130 (Watson); 1905, 1945 (Dilkens); 1840-1845 (Willett).

[44]              Ibid., 1920 (Kim Ayotte); 2130 (Watson); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1905 (Dilkens); 1845 (Willett).

[45]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1935 (Watson).

[46]              Ibid., 2130.

[47]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1845 (Willett).

[48]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2025 (Watson); 2030 (Fleury); 2055 (Kanellakos).

[49]              Ibid., 2025 (Watson); 2030 (Fleury); 1930 (Dilkens).

[50]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 2005 (Rob Stewart); Témoignages, 14 juin 2022, 1855, 1900, 1915 (l’hon. Chrystia Freeland); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840 (Fleury); 1930 (Watson); 1835, 1850 (Dilkens); 1845 (Willett).

[51]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840 (Fleury).

[52]              Ibid., 1840 et 2045.

[53]              Ibid.

[54]              Ibid., 2115 (Watson).

[55]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835 (Freeland); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835, 1855 (Dilkens); 1845 (Willett); 2005, 2035 (Laskowski).

[56]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835, 1905, 1940 (Dilkens). Le 29 décembre 2022, L'ancien ministre Mendicino a annoncé que le gouvernement fédéral accorderait jusqu’à 6,9 millions de dollars à la Ville de Windsor pour compenser les frais engagés par cette ville pour mettre fin au blocage du pont Ambassador : Sécurité publique Canada, Le gouvernement du Canada appuiera la ville de Windsor dans la couverture des coûts extraordinaires liés au blocage du pont Ambassador, communiqué, 29 décembre 2022.

[57]              Association canadienne des libertés civiles, Observations de l’Association canadienne des libertés civiles au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023, p. 4.

[58]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835, 1840 (Freeland); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1850, 1910 (Dilkens); 2010 (Brian Kingston); 2005 (Laskowski).

[59]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1845 (Freeland); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835, 1910 (Dilkens).

[60]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1850, 1910 (Dilkens); 2010, 2045 (Kingston); 2045 (Laskowski).

[61]              DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835, 1840, 1845, 1855, 1900, 1915 (Freeland); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835, 1910, 1920 (Dilkens); 2010, 2055 (Kingston).

[62]              DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2015 (L’honorable Dominic LeBlanc).

[63]              Gouvernement de l’Ontario, Règlement de l’Ontario 71/22 : Infrastructures essentielles et voies publiques.

[65]              Chambre des communes, Journaux, 16 février 2022; Sécurité publique Canada, Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement : Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence, 16 février 2022.

[66]              Sénat, Journaux, 21 février 2022.

[67]              Sécurité publique Canada, Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement : Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence, 16 février 2022, p. 5.

[68]              DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 2020 (Leah West).

[69]              Commission sur l’état d’urgence, « Closing Submissions of the Government of Saskatchewan », Observations finales, p. 11-7, 23-4; Commission sur l’état d’urgence, « Government of Alberta Closing Submissions  », Observations finales, 9 décembre 2022, p. 9-12, 23 [disponibles en anglais seulement].

[70]              Commission sur l’état d’urgence, Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022 : Volume 3 – Analyse (partie 2) et recommandations, rapport final, 17 février 2023, p. 269.

[71]              Ibid., p. 271.

[72]              Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 25 novembre 2022, p. 48-50.

[73]              Ibid., p. 176.

[74]              Ibid., p. 54-5.

[75]              Sécurité publique Canada, Compte rendu présenté aux deux chambres du Parlement : Consultations prévues par la Loi sur les mesures d’urgence, 16 février 2022, p. 6-7.

[76]              DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 2100 (Beatty).

[77]              Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 1er décembre 2022, p. 158.

[78]              Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2005 (l’hon. Bill Blair); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1925-1930, 2120 (Watson, Kanellakos); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835, 1900 (Dilkens, Willett); DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2045, 2100, 2115 (LeBlanc).

[79]              DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino).

[80]              Ibid., 1855.

[81]              DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2005 (Blair).

[82]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1925-1930 (Watson).

[83]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835 (Dilkens).

[84]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2120 (Kanellakos).

[85]              Ibid.

[86]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835 (Dilkens). Voir aussi la note de bas de page 56.

[87]              DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1930 (Watson).

[88]              Ibid., 2020.

[89]              Association canadienne des libertés civiles, Observations de l’Association canadienne des libertés civiles au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023, p. 4.

[90]              DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2015 (Jody Thomas).

[91]              DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 1835 (Dilkens).

[93]              Ces trois corps policiers ont fourni des rapports institutionnels à la Commission sur l’état d’urgence. Voir Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel de la Gendarmerie royale du Canada », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Ontario Provincial Police Institutional Report », Preuves, présentations et rapports [disponible en anglais seulement]; et Commission sur l’état d’urgence, « Ottawa Police Services Institutional Report », Preuves, présentations et rapports [disponible en anglais seulement].

[94]              Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel de la Gendarmerie royale du Canada », Preuves, présentations et rapports, p. 25.

[95]              Gendarmerie royale du Canada, Police contractuelle.

[96]              Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, L.R.C. 1985, ch. R-10, par. 5(1). Bien que cette loi précise que le ministre responsable est le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, le gouvernement fédéral a scindé les portefeuilles de la Sécurité publique et de la Protection civile en 2021, de sorte que ces fonctions sont désormais exercées par deux ministres distincts.

[97]              Ibid.

[98]              Ontario, Loi sur les services policiers, L.R.O. 1990, ch. P.15, par. 55(1).

[99]              Association canadienne des libertés civiles, Observations de l’Association canadienne des libertés civiles au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023, p. 4.

[100]           Service de protection parlementaire, Questions de suivi aux témoins du jeudi 29 septembre 2022 devant le Comité DEDC (réunion no 13), document présenté à DEDC, 28 octobre 2022, p. 1.

[101]           Ibid., p. 4.

[102]           Ibid.

[103]           Bureau du sergent d’armes et de la sécurité institutionnelle, Protocole d’entente entre la Gendarmerie royale du Canada et la Chambre des communes, document présenté à DEDC, p. 1.

[104]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1940 (Brenda Lucki); DEDC, Témoignages, 29 septembre 2022, 1850 (Patrick McDonell, Larry Brookson, Julie Lacroix); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1955 et 2100 (Watson, Kanellakos); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1835 et 2005 (Steve Bell, Thomas Carrique).

[105]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2045 (Michael Duheme); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1840 (Peter Sloly); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1925, 1935 (Patricia Ferguson, Bell).

[106]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1915 (Lucki).

[107]           DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1925 (Ferguson).

[108]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1840 (Sloly).

[109]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2035 (Lucki); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1900 (Sloly); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1940, 2020 (Kanellakos, Watson).

[110]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1900 (Sloly).

[111]           DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1845 (Kanellakos).

[112]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1920 (Lucki); DEDC, Témoignages, 29 septembre 2022, 1855 (Brookson); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1930 (Sloly); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1840, 2055, 1950 (Fleury, Kanellakos, Watson); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1850 (Bell).

[113]           DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1930 (Watson).

[114]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1955 (Lucki); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1955 (Sloly); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1950 (Watson); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1905 (Bell).

[115]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1955 (Lucki).

[116]           DEDC, Témoignages, 29 septembre 2022, 1855 (Brookson).

[117]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1955 (Sloly); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2135 (Watson); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1845 (Bell).

[118]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1935 (Sloly).

[119]           Ibid., 1830.

[120]           DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1845 (Bell).

[121]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1950, 2105 (Watson, Kanellakos); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1855 (Bell); DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1905 (Kent Roach).

[122]           DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2105 (Kanellakos).

[123]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1925 (Roach).

[124]           Ibid., 1905.

[125]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1935, 2050 (Duheme, David Vigneault); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1920, 2140 (Ayotte, Kanellakos).

[126]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1935 (Duheme); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1920 (Ayotte).

[127]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1935 (Duheme).

[128]           Ibid., 2125.

[129]           Ibid., 2135 (Lucki).

[130]           Ibid., 2040 (Duheme).

[131]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1915 (Lucki).

[132]           DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2140 (Kanellakos).

[133]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 2020 (Sloly); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1910, 2005 (Bell, Carrique).

[134]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 2020 (Sloly).

[135]           Voir, par exemple, DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2120 (Duheme); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1835 (Sloly); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2005 (Carrique).

[136]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1915 (Sloly); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2005 (Watson); DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1845 (Roach).

[137]           DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2110 (Watson).

[138]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1845 (Roach).

[139]           Association canadienne des libertés civiles, Observations de l’Association canadienne des libertés civiles au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023, p. 4.

[140]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2040 (Duheme).

[141]           Ibid., 2045.

[142]           Commission sur l’état d’urgence, « PB. NSC.CAN.00003256_REL.0001 RE: Follow ups », Preuves, présentations et rapports, 14 février 2022 [traduction].

[143]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 15 novembre 2022, p. 59-61.

[144]           Commission sur l’état d’urgence, « SSM.NSC.CAN.00000216_REL.0001 Cabinet Minutes 2022-02-13 », Preuves, présentations et rapports, 13 février 2022 [disponible en anglais seulement].

[145]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 17 novembre 2022, p. 164-5.

[146]           Ibid.

[147]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1935 (Thomas).

[148]           Ibid., 2020.

[149]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1905 (Sloly).

[150]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1915 (Lucki); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2100 (Duheme).

[151]           Ibid.

[152]           DEDC, Témoignages, 29 septembre 2022, 1850 (Brookson).

[153]           Ibid., 1920 (Lacroix).

[154]           Ibid., 2020 (Brookson, McDonell).

[155]           Ibid., 1925 (McDonell).

[156]           Ibid., 1945.

[157]           Ibid., 1920 (Brookson).

[158]           DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2025 (Watson).

[159]           DEDC, Témoignages, 29 septembre 2022, 1900, 2000 (Brookson, McDonell).

[160]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2055 (Shawn Tupper).

[161]           Sécurité publique Canada, Réponse du gouvernement du Canada aux recommandations de la Commission sur l’état d’urgence, 6 mars 2024; Voir également les engagements précédemment entrepris par le gouvernement fédéral dans : Bill Blair, ancien président du Conseil privé du Roi pour le Canada et ministre de la Protection civile, Réponse du gouvernement sur le dix-neuvième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre intitulé Protéger la Cité parlementaire : répondre à l’évolution des risques, déposé le 14 décembre 2022.

[162]           Comité des parlementaires sur la sécurité nationale et le renseignement, Rapport annuel 2018, avril 2019, p. 15.

[163]           Ibid., p. 21.

[164]           Voir la Commission sur l’état d’urgence, « Service canadien du renseignement de sécurité et Centre intégré d’évaluation du terrorisme : Rapport institutionnel préparé pour la Commission sur l’état d’urgence », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Affaires mondiales Canada », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Agence des services frontaliers du Canada », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Sécurité publique Canada », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Ministère de la Justice », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada (CANAFE) », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Gendarmerie royale du Canada », Preuves, présentations et rapports; Commission sur l’état d’urgence, « Rapport institutionnel : Ministère de la Défense nationale », Preuves, présentations et rapports.

[165]           Service canadien du renseignement de sécurité, « Menaces pesant sur la sécurité du Canada et les intérêts canadiens », Rapport public du SCRS 2019, avril 2020.

[166]           Ibid.

[167]           Sécurité publique Canada, Un cadre de sécurité civile pour le Canada, 3éd., mai 2017, p. 22.

[168]           Sécurité publique Canada, Stratégie nationale sur les infrastructures essentielles, 2009, p. 2.

[169]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1905 (Thomas).

[170]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1905 (Vigneault).

[171]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2105 (Vigneault).

[172]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1855 (Marie-Hélène Chayer).

[173]           Ibid., 1830 (Thomas).

[174]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1835 (Barry MacKillop).

[175]           Ibid., 1900.

[176]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1920 (Vigneault); 1950 (Lucki).

[177]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1830 (Sloly).

[178]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 2005 (Stewart).

[179]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1925 (Lucki).

[180]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1855 (Chayer).

[181]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1905 (Vigneault).

[182]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1910 (Thomas).

[183]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2055 (Vigneault).

[184]           Ibid., 2120.

[185]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2015, 2020 (Blair).

[186]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1950 (West).

[187]           Loi sur les mesures d’urgence, art. 16.

[188]           Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, L.R.C. 1985, ch. C-23.

[189]           Loi sur les mesures d’urgence, par. 17(1).

[190]           Commission sur l’état d’urgence, Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022 : Volume 3 – Analyse (partie 2) et recommandations, rapport final, 17 février 2023, p. 250.

[191]           Ibid., p. 264.

[192]           Commission sur l’état d’urgence, Webdiffusion de la déclaration publique du commissaire, 15:40-16:53 [interprétation simultanée].

[193]           Ryan Alford, Responsabilité principale du Parlement aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023, p. 2 et 3.

[194]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1855 (West).

[195]           Ibid., 1955 (Roach).

[196]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 30 novembre 2022, p. 127.

[197]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 2 décembre 2022, p. 11.

[198]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 21 novembre 2022, p. 32, 40.

[199]           Ibid., p. 33, 40.

[200]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 25 novembre 2022, p. 41.

[201]           Ibid., p. 41 et 42.

[202]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 17 novembre 2022, p. 238 et 239.

[203]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1845 (Mendicino).

[204]           Ibid., 1850.

[205]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2035 (Blair).

[206]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1845 (Thomas).

[207]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2015 (L’hon. Arif Virani); 2100 (LeBlanc).

[208]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1840 (Thomas).

[209]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1845 (Freeland).

[210]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2045 (Lametti).

[211]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1840 (Thomas).

[212]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2100 (LeBlanc).

[213]           Ibid., 2015 (Virani, LeBlanc); 2030, 2050, 2100 (LeBlanc).

[214]           Commission sur l’état d’urgence, Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022 : Volume 1 – Aperçu, rapport final, 17 février 2023, p. 276.

[215]           Canadian Frontline Nurses c. Canada (Procureur général), 2024 CF 42, par. 255; Voir aussi le sommaire des dossiers et des motifs de décision dans : Cour fédérale, Dossiers T-306-22, T-316-22, T-347-22 et T-382-22, Bulletins de nouvelles, 23 janvier 2024.

[216]           Canadian Frontline Nurses c. Canada (Procureur général), 2024 CF 42, par. 248.

[217]           Ibid., par. 254.

[218]           Cour d’appel fédérale, Canadian Frontline Nurses et al. c. Attorney General of Canada, Dossiers A-73-24, A‑74-24, A‑75-24, A-76-24; détails disponibles sur la Base de données des dossiers de la cour, consultée le 31 octobre 2024. Une copie du mémoire d’appel du gouvernement fédéral est accessible en ligne dans: « Ottawa appeals court decision calling use of Emergencies Act on convoy protests unreasonable », CBC News, 23 février 2024 [disponible en anglais seulement].

[219]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1935 (François Daigle); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1835 (Thomas).

[220]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2025 (Lametti).

[221]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1935 (Daigle).

[222]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1855 (West).

[223]           Ibid., 1950.

[224]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2010 (Lametti).

[225]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2020 (Blair).

[226]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1835 (Thomas).

[227]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2105 (Lucki); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2025 (Carrique).

[228]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1855 (West).

[229]           Ibid.

[230]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1835 (Thomas).

[231]           Commission sur l’état d’urgence, Rapport de l’Enquête publique sur l’état d’urgence déclaré en 2022 : Volume 3 – Analyse (partie 2) et recommandations, rapport final, 17 février 2023, p. 355 (recommandation 31).

[233]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1935 (Daigle).

[234]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2020 (Lametti).

[235]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1835 (Daigle).

[236]           Pour une étude sur les mesures financières édictées, voir également : Chambre des communes, Comité permanent des finances, Invocation de la Loi sur les mesures d’urgence et les mesures connexes, cinquième rapport, juin 2022.

[237]           Par l’un des trois moyens énumérés au par. 2(1) du Règlement sur les mesures d’urgences, DORS/2022-21 : a) en entravant gravement le commerce ou la circulation des personnes et des biens; b) en entravant le fonctionnement des infrastructures essentielles; c) en favorisant l’usage de la violence grave ou de menaces de violence contre des personnes ou des biens.

[238]           Règlement sur les mesures d’urgences, DORS/2022-21, art. 3.

[239]           Ibid., art. 4.

[240]           Ibid., art. 5.

[241]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1900 (Mendicino); 2005 (Lametti); DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 2025 (Isabelle Jacques); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835, 1915, 1920 (Lucki); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1835, 1840, 1850 (Daigle); 2010 (Stewart); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 2010 (Sloly); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2025, 2050 (Carrique).

[242]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2005 (Lametti); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1835, 1840 (Daigle); Association canadienne des libertés civiles, Observations de l’Association canadienne des libertés civiles au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, mémoire présenté au comité DEDC, 3 février 2023, p. 6.

[243]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1835 (Daigle).

[244]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1835 (Daigle).

[245]           Ibid., 1835, 1840; 2105 (Stewart); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1950 (Freeland).

[246]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2005 (Lametti); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2110 (Lucki); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2050 (Blair); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1925 (Sloly); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2025 (Carrique).

[247]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2005, 2020 (Blair); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1835, 1845 (Bell); 1900 (Ferguson); 2025 (Carrique).

[248]           DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1835 (Bell).

[249]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1910 (Mendicino); 2005 (Lametti); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1915, 1920 (Lucki); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 2010, 2020 (Stewart); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2005, 2020, 2050, 2105 (Blair); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1925, 1930, 2005 (Sloly); voir également Peter Sloly, Réponse écrite à des questions, document présenté à DEDC, 3 novembre 2022; DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1930, 1945, 1950, 2005 (Watson); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1905 (Bell); 2025 (Carrique).

[250]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1910, 1945 (Mendicino); 2045 (Lametti); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1955 (Lucki); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2020 (Blair); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 1950 (Watson); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2025, 2055 (Carrique); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1845 (Thomas).

[251]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1930 (Sloly).

[252]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1910, 1945 (Mendicino); 2020 (Lametti); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1915 (Lucki); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2005 (Watson); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1905 (Bell); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1845 (Thomas).

[253]           DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 2120 (Beatty).

[254]           DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2100 (Carrique).

[255]           DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 2120 (Beatty); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1935 (Lucki); 2005 (Duheme); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 2105 (Stewart); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 2105, 2115 (Blair); DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1910, 1930, 2000, 2010 (Sloly); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1835 (Bell).

[256]           DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1835 (Bell).

[257]           DEDC, Témoignages, 6 octobre 2022, 1910 (Sloly).

[258]           DEDC, Témoignages, 29 mars 2022, 2120 (Beatty).

[259]           Le Décret prévoyait également la suspension des polices d’assurance pour les véhicules utilisés lors d’une assemblée interdite, même si ce pouvoir ne semble pas avoir été mis en œuvre. Voir à ce sujet : Décret sur les mesures économiques d’urgence, DORS/2022-22, art. 2 et 3, 5 à 7; DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1935, 2045 (Jacques); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1950 (Jenifer Aitken); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1950 (Freeland); DEDC, Témoignages, 27 octobre 2022, 2135, 2140 (Kanellakos); DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 2035 (Laskowski).

[260]           Décret sur les mesures économiques d’urgence, DORS/2022-22, art. 2 et 3, 5 à 7.

[261]           Ibid., art. 4.

[262]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1850, 2100, 2020 (Jacques).

[263]           Ibid., 1850.

[264]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2005, 2105 (Lametti); DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1935, 2045, 2100 (Jacques); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835, 1850, 2110 (Lucki); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1835 (Daigle); 2105 (Stewart); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835, 1950 (Freeland); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 1925, 1930 (Bell); 2025, 2050 (Carrique).

[265]           Nomi Claire Lazar, La nécessité et la reddition de comptes dans le cadre de la Loi sur les mesures d’urgence, mémoire présenté au comité DEDC, 13 février 2023.

[266]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2125 (Virani).

[267]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1830 (Jacques); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835 (Freeland).

[268]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki); 2030 (Duheme).

[269]           Ibid., 1835 (Lucki). Sur l’utilisation des cryptomonnaies, tel le Bitcoin, en lien avec le financement du Convoi, voir également : DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 2055, 2115 (Jacques); 2115 (Julien Brazeau); 2055, 2115 (Donna Achimov); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2030 (Duheme); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835, 1915 (Freeland).

[270]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2040, 2045 (Angelina Mason).

[271]           Ibid., 2005, 2020, 2035, 2040, 2050 (Michael Hatch).

[272]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1830 (Jacques); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1915 (Freeland).

[273]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1830, 2025 (Jacques).

[274]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1915 (Freeland).

[275]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1905, 2035 (Jacques); 1835 (MacKillop); 1905 (Donna Achimov).

[276]           Ibid., 2035 (Jacques). En revanche, un document en réponse à la motion du 31 mai 2022 du Comité a été communiqué par le ministère des Finances : Ministère des Finances, Document soumis au Comité conformément à la motion adoptée le mardi 31 mai 2022, document présenté à DEDC, 30 juin 2022.

[277]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1840, 1925, 1930, 1945, 1950 (MacKillop); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2055, 2100 (Jacob Wells).

[278]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1945 (MacKillop).

[279]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2100 (Duheme); DEDC, Témoignages, 3 novembre 2022, 2015 (Carrique).

[280]           Personnes physiques ou entités qui participaient, même indirectement, aux activités interdites, telles que définies à l’article 1 du Décret sur les mesures économiques d’urgence, DORS/2022-22.

[281]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1845, 1850, 1920 (Jacques); 1935 (MacKillop); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835, 1850 (Lucki); 2050 (Duheme).

[282]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1930, 1950, 1955 (Jacques).

[283]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki).

[284]           Ibid., 2125; 2125 (Duheme).

[285]           Gendarmerie royale du Canada, Déclaration sur le gel de comptes financiers, 21 février 2022.

[286]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1905 (Freeland).

[287]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1920 (Freeland).

[288]           DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 2025 (Lucki).

[289]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2005 (Mason).

[290]           Ibid., 2035 (Hatch).

[291]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1855, 1920, 1940 (Jacques).

[292]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2030 (Mason).

[293]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1935, 2020, 2025 (Jacques); 1940 (MacKillop); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835, 1850 (Lucki); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835 (Freeland).

[294]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1845 (MacKillop).

[295]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2005, 2020, 2055 (Mason).

[296]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1915 (Freeland); DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2005, 2030 (Mason).

[297]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1855 (Jacques); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki), DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1835 (Freeland).

[298]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2015, 2020, 2040, 2055 (Mason).

[299]           Ibid., 2005, 2015, 2020, 2035 (Hatch).

[300]           Ibid., 2015, 2030, 2035; 2045, 2110, 2115, 2120 (Mason); 2005, 2110, 2115 (Hatch).

[301]           Ibid., 2110 (Mason); 2005 (Hatch).

[302]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 2050 (Stewart).

[303]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2005 (Hatch).

[304]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1845 (Jacques).

[305]           Ibid., 2025.

[306]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2050 (Mason).

[307]           Commissariat à la protection de la vie privée du Canada, La vie privée pendant une situation de crise, mémoire présenté à DEDC, 24 janvier 2023.

[308]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1835, 1900, 1915, 1920 (MacKillop); 1905 (Achimov); 2000, 2040 (Julien Brazeau); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1835 (Lucki); DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840 (Kim Wilford); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2040 (Wells).

[309]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840, 1850 (Wilford).

[310]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2045, 2125 (Wells).

[311]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1855 (Wilford).

[312]           Ibid., 1855, 1940; DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2050 (Wells).

[313]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1910 (Wilford); 2015 (Hatch); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2100 (Wells).

[314]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840, 1940 (Wilford).

[315]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2045, 2110 (Wells).

[316]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840, 1900 (Wilford).

[317]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2045, 2055 (Wells).

[318]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840, 1925, 1935, 2120 (Wilford).

[319]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2040, 2105 (Wells).

[320]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 2000, 2040 (Brazeau); 2000 (MacKillop); DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840, 1850 (Wilford); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2055 (Wells).

[321]           Décret sur les mesures économiques d’urgence, DORS/2022-22, art. 4.

[322]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1835 (MacKillop).

[323]           DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 1840, 1930, 1940 (Wilford).

[324]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 2115 (Wells).

[325]           Gouvernement du Canada, Obligations des plateformes de sociofinancement et de certains fournisseurs de services de paiement de s’inscrire auprès du CANAFE et modification de la définition de « télévirement », 27 avril 2022; DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1855, 1950 (Jacques); 2040 (Achimov); 1920 (MacKillop).

[326]           DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1915, 1955 (Freeland).

[327]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1950 (Brazeau).

[328]           Loi sur le ministère de la Justice, L.R.C. 1985, ch. J-2, par. 4.1(1).

[329]           Loi sur les textes réglementaires, L.R.C. 1985, ch. S-22, par. 3(2).

[331]           Loi sur le ministère de la Justice, par. 4.2(1).

[332]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1900, 2010 (Mendicino, Lametti); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1840 (Daigle).

[333]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1840 (Daigle).

[334]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2010 (Lametti).

[335]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1840 (Daigle).

[336]           Ibid.

[337]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2005 (Lametti).

[338]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1830 (Thomas).

[339]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1830 (Mendicino).

[340]           Ibid., 2015 (Lametti).

[341]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1850 (Daigle).

[342]           DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1850 (Jacques).

[343]           Voir DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2040 (Lametti); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1920, 1950 (Daigle, Aitken); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1920 (Freeland); DEDC, Témoignages, 17 novembre 2022, 2055 (Mason, Hatch).

[344]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1920 (Daigle).

[345]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1925 (Roach).

[346]           Ibid., 1925.

[347]           Ibid.

[348]           Ibid., 2025 (West).

[350]           Ibid., par. 309, 341, 359 et 373.

[351]           Pour en savoir plus sur l’article premier de la Charte, voir : ministère de la Justice, « Article 1 – Limites raisonnables », Chartepédia; critères établis dans : R. c. Oakes, [1986] 1 RCS 103.

[352]           Canadian Frontline Nurses c. Canada (procureur général), par. 314, 317 et 324; Cette décision a été portée en appel et le litige suit son cours devant la Cour d’appel fédérale: Cour d’appel fédérale, Canadian Frontline Nurses et al. c. Attorney General of Canada, Dossiers A-73-24, A-74-24, A-75-24, A-76-24; détails disponibles sur la Base de données des dossiers de la cour, consultée le 31 octobre 2024.

[353]           Chambre des communes, Règlement de la Chambre des communes – Version codifiée au 18 septembre 2023, al. 108(1)a). Il sera utile de préciser qu’après l’adoption des motions à la Chambre des communes et au Sénat, le Comité a entrepris ses travaux en suivant le Règlement de la Chambre des communes. Voir Chambre des communes, Journaux, 2 mars 2022; Sénat, Journaux, 3 mars 2022.

[354]           Ibid., par. 116(1).

[355]           Marc Bosc et André Gagnon, dir., « Chapitre 20 : Les comités », La procédure et les usages de la Chambre des communes, 3e éd., 2017.

[356]           DEDC, Procès-verbal, 22 septembre 2022.

[357]           Parlement du Canada, Le droit des comités d’obtenir des réponses à des questions orales, document préparé pour DEDC, 24 octobre 2022.

[358]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 1850 (Mendicino) 2020, 2025, 2045, 2050, 2105 (Lametti); DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1840 (Jacques); DEDC, Témoignages, 10 mai 2022, 1845, 1930, 2005 (Lucki); 1900 (Vigneault); DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1855, 1900, 1905 (Daigle); 2015 (Stewart); DEDC, Témoignages, 14 juin 2022, 1840 (Freeland); 2015, 2030 (Blair); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1900, 1905, 1950 (Thomas); DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2020, 2025, 2040, 2050, 2105, 2120 (Virani).

[359]           DEDC, Témoignages, 26 avril 2022, 2020, 2025, 2045, 2050, 2105 (Lametti).

[360]           Ibid., 2050; DEDC, Témoignages, 3 mai 2022, 1840, 2015 (Jacques); DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1900 (Thomas).

[361]           DEDC, Témoignages, 7 juin 2022, 1900 (Daigle).

[362]           DEDC, Témoignages, 24 novembre 2022, 2025, 2030 (Laskowski).

[363]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 1905, 1910, 1915 (West); 1910 (Roach).

[364]           Ibid., 1910, 1950.

[365]           Ibid., 1910.

[366]           Association canadienne des libertés civiles, Observations de l’Association canadienne des libertés civiles au Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023, p. 6.

[367]           DEDC, Témoignages, 1er décembre 2022, 1900 (Thomas).

[368]           DEDC, Témoignages, 8 décembre 2022, 2025, 2030 (West).

[369]           Bureau du Conseil privé, Réponse écrite à des questions, document présenté à DEDC, 28 décembre 2022.

[370]           DEDC, Procès-verbal, 31 mai 2022.

[371]           Ministère de la Justice, Document soumis au Comité conformément à la motion adoptée le mardi 31 mai 2022, document présenté à DEDC, 29 juin 2022, p. 2.

[372]           Ibid., p. 4.

[373]           Ibid.

[375]           DEDC, Procès-verbal, 20 octobre 2022.

[376]           Voir les motifs fournis par chacun des ministères ou organismes fédéraux dans Documents soumis au Comité conformément à la motion adoptée le jeudi 20 octobre 2022.

[377]           Ministère des Transports, Document soumis au Comité conformément à la motion adoptée le jeudi 20 octobre 2022, document présenté à DEDC, 4 novembre 2022.

[378]           Bureau du Conseil privé, Document soumis au Comité conformément à la motion adoptée le mardi 31 mai 2022, document présenté à DEDC, 22 septembre 2022; Gendarmerie royale du Canada, Documents soumis au Comité conformément à la motion adoptée le jeudi 20 octobre 2022, document présenté à DEDC, 4 novembre 2022.

[379]           Ryan Alford, Responsabilité principale du Parlement aux termes de la Loi sur les mesures d’urgence, mémoire présenté à DEDC, 3 février 2023.

[380]           Ibid., p. 5.

[381]           Commission sur l’état d’urgence, « Canadian Constitution Foundation – Reforming the Emergencies Act », Observations finales, 9 décembre 2022, p. 6 [traduction].

[382]           Commission sur l’état d’urgence, Le gouvernement du Canada accepte de communiquer des documents du Cabinet à la Commission sur l’état d’urgence, communiqué, 28 juin 2022.

[383]           Commission sur l’état d’urgence, Audiences publiques, 25 novembre 2022, p. 80.

[384]           DEDC, Témoignages, 27 février 2024, 2020, 2025, 2040, 2050, 2105, 2115, 2120 (Virani).

[385]           Ibid., 2105.

[386]           Ibid., 2115.

[387]           Ibid., 2050.

[388]           Ibid., 2040.

[389]           Ibid., 2040, 2120.