SJNS Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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SPECIAL JOINT COMMITTEE ON THE AMENDMENT TO TERM 17 OF THE TERMS OF UNION OF NEWFOUNDLAND
COMITÉ MIXTE SPÉCIAL CONCERNANT LA MODIFICATION À LA CLAUSE 17 DES CONDITIONS DE L'UNION DE TERRE-NEUVE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 25 novembre 1997
[Traduction]
Le coprésident (M. Gerry Byrne (Humber—St. Barbe—Baie Verte, Lib.)): Mesdames et messieurs, membres du comité, bienvenue à cette neuvième séance du Comité mixte spécial concernant la modification à la clause 17 des Conditions de l'Union de Terre-Neuve—et j'ajoute, du Labrador.
Nous avons un programme très spécial cet après-midi. Il y a longtemps que plusieurs membres du comité attendent ce moment. Nous allons profiter aujourd'hui des avancées de la communication à longue distance et de la technologie des vidéoconférences.
Avant de commencer, je vais faire quelques suggestions à mes collègues. Pour ce qui est de la technologie que nous employons ici, ce que je veux, c'est que les membres traitent la caméra de télévision que nous avons devant nous comme s'il s'agissait d'une personne. Autrement dit, chaque fois que vous vous adressez aux témoins, posez vos questions et écoutez les réponses en fixant l'appareil de télévision. Je vous le demande parce que c'est l'image qu'ils vont voir. En fixant l'appareil de télévision, vous vous trouvez à regarder directement les témoins. Si c'est moi que vous regardez, les témoins ne verront que votre nuque. Quelques autres petites choses: vous n'êtes pas obligés d'articuler exagérément, mais si vous le pouvez, tâchez de parler lentement et clairement, et à l'autre bout de la ligne, on pourra saisir tout ce que vous avez à dire.
Vous avez une petite question?
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Nos témoins ont-ils également accès à l'interprétation?
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Très bonne question. Oui, ils entendront l'interprétation qui viendra de chez nous.
Cela dit, nous sommes en duplex avec St. John's, Terre-Neuve et le Labrador. Nous recevons aujourd'hui John Whelan, étudiant à la Brother Rice High School; M. Eugene Vaters du Pentecostal Collegiate High School...
Des voix: Ah, ah!
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Non? Désolé.
Mlle Robyn Lamswood (étudiante, Eugene Vaters Pentecostal Collegiate High School): Ici Robyn Lamswood de Eugene Vaters.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Oui, Robyn Lamswood, étudiante à la Eugene Vaters Pentecostal Collegiate High School. Toutes mes excuses. Je ne suis pas allé à cette école.
De la Booth Memorial, nous avons Jennifer Bragg, Erin Riche et Tara Snelgrove, trois étudiantes.
Je tiens à vous souhaiter la bienvenue très chaleureusement et à vous remercier vivement d'avoir pris le temps d'être des nôtres. Je sais qu'il est un peu plus tard là-bas qu'ici à Ottawa; vous êtes à l'heure du dîner là-bas.
Chers collègues, nous allons écouter ces cinq jeunes gens, qui vont nous faire un bref exposé—mais ils n'ont pas de mémoire—et ils vont nous dire ce qu'ils pensent de la modification à la clause 17 des Conditions de l'Union de Terre-Neuve dans la mesure où elle concerne les droits confessionnels.
Chers collègues, c'est un processus très ouvert. Comme vous le savez, nous allons entendre des témoins qui sont des experts juridiques ou constitutionnels. Mais nous voulons aussi entendre les jeunes gens.
Autrement dit, nous voulons vous entendre, vous, les jeunes. Nous allons vous céder le microphone et la caméra. Si vous avez choisi quelqu'un qui va commencer, vous pouvez y aller. Nous sommes tout yeux et tout oreilles.
M. John Whelan (vice-président, Conseil étudiant, Brother Rice High School): Merci beaucoup. Bonsoir au comité. Je tâcherai d'être bref, si je le peux. C'est une question très importante pour moi.
La première chose que je tiens à dire, c'est que la participation au référendum n'était pas acceptable s'il s'agit de modifier la Constitution de Terre-Neuve et du Labrador. Si vous le permettez, j'aimerais citer quelques pourcentages de la participation référendaire. Il s'agit de quelques chiffres pris au hasard: 45 p. 100, 47 p. 100, 49 p. 100, 41 p. 100, 38 p. 100, 30 p. 100, 58 p. 100 et 52 p. 100. Et l'ensemble de la participation référendaire se chiffrait à 53 p. 100. C'est inacceptable.
Je m'en veux de dire ça, et je n'aime pas jouer les trouble-fête, pour effectuer un tel changement à la Constitution de Terre-Neuve et du Labrador, l'accord qui a été conclu en 1949, ce n'est pas acceptable. C'est seulement un peu plus de la moitié de la population qui a voté. Comment peut-on modifier notre Constitution à partir d'un vote auquel seulement un peu plus de la moitié de la population a pris part?
Il y a une autre question importante ici, et c'est le choix. C'est le choix du peuple de Terre-Neuve et du Labrador. C'est le choix qu'ont les parents, et c'est aussi dans une certaine mesure le choix qu'ont les étudiants d'aller ou non à l'école catholique, protestante, juive ou laïque. Il leur appartient de décider. C'est un choix.
Il y a un autre argument que certaines personnes ont invoqué au cours de la campagne référendaire. Certains ont dit que leurs fils ou leurs filles aiment rester avec leurs amis à l'école. Mais j'ai plusieurs amis...et peut-être que ce que je vais vous dire vous dépasse. J'habite rue Whiteway, ce qui est très loin de Cowan Heights, par exemple. Si j'ai un ami qui habite à Cowan Heights, il m'est tout à fait impossible d'aller à l'école avec lui simplement parce que...
[Note de la rédaction: difficulté technique]
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Nous allons réessayer.
Le sénateur William C. Doody (Harbour Main-Bell Island, PC): ...le comité communiquait avec Ottawa.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): En fait, monsieur le sénateur, j'allais dire que j'ai toujours de la difficulté à communiquer avec St. John's.
Le sénateur William Doody: C'est vrai. Ce n'est qu'un prolongement du même problème.
Une voix: Toutes nos excuses. Nous avons perdu la ligne téléphonique qui nous reliait à Terre-Neuve. Nous essayons de la rétablir.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): D'accord. Ah, c'est reparti. Il y a eu une brève interruption dans la transmission. Il se peut que ça se reproduise.
Monsieur Whelan.
M. John Whelan: D'accord. Je n'ai pas joué avec les boutons.
Des voix: Ah, ah!
M. John Whelan: Comme je disais, si j'ai un ami qui vit loin de chez moi en ville, peu importe où, je ne pourrai pas aller à l'école avec cette personne. C'est pour des raisons géographiques et socio-économiques que les gens changent d'école. La religion n'est qu'une de ces raisons. C'est aux parents et aux étudiants de décider s'ils choisiront l'école catholique ou non.
• 1545
Je fréquente une école catholique, une école très catholique,
et j'adore mes professeurs, et j'aimerais prendre quelques instants
pour vous expliquer pourquoi je crois que l'éducation religieuse
est une bonne chose pour les gens de notre province.
On apprend l'histoire, on apprend la culture, et on apprend tout ça dans des cours comme Patrimoine culturel 2201—ou quelque chose du genre, je ne sais plus. On apprend tout ça, mais qu'est-ce qu'on nous montre? On nous montre que les gens de Terre-Neuve et du Labrador—et c'est une chose que j'ai apprise à l'école—sont des gens très pieux. On ne va peut-être pas à l'église tous les dimanches, on ne s'agenouille peut-être pas pour prier tous les soirs, nous ne vivons peut-être pas toujours dans la crainte de Dieu, mais nous croyons en Dieu et tout le reste est à l'avenant.
J'ai peut-être l'air d'un curé en chaire, mais c'est vrai, il nous faut apprendre ces choses-là, parce que si on ne les apprend pas, un mot suffira à nous décrire: des ignorants. On ne connaît pas nos concitoyens, on ne connaît pas notre passé, et dans une certaine mesure, on ne saura rien de notre avenir si on impose un changement aussi rapide, aussi brutal, qui nous a été imposé par—je ne veux pas nommer personne, mais nous savons tous qui était au pouvoir il y a quelques années—par une personne qui, franchement, n'avait pas à coeur l'intérêt des étudiants, leur avenir, les enfants de demain...
Nous sommes l'avenir. Nous qui sommes assis autour de cette table ici à St. John's, nous représentons l'avenir de la province de Terre-Neuve et du Labrador.
Le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador ne pense pas à nous. Il est obnubilé par les économies d'argent qu'il peut réaliser en faisant cela, argent que l'on pourra ensuite mettre dans une caisse de retraite, car bien des gens au gouvernement ne pensent qu'aux fonds de pension.
En terminant, je voudrais dire que le taux de participation au vote dans ce référendum visant à modifier la Constitution a été très loin d'un niveau qui serait acceptable. Si 53 p. 100 de mes amis disaient «Allons manger chez A&W», cela ne me convaincrait pas d'aller manger chez A&W, parce que 53 p. 100, ce n'est pas suffisant pour introduire des changements draconiens.
Par ailleurs, c'est à la population de choisir. Quand j'aurai des enfants, ce sera à moi de choisir si je veux les envoyer dans une école catholique ou une école publique, ce sera à moi et à moi seul de choisir. Quant à savoir si je pourrai exercer ce droit, cela dépend de vous et de votre comité. C'est à vous de décider si nous aurons ce choix ou bien si nos étudiants seront forcés d'aller dans une école où ils n'apprendront rien au sujet de leurs ancêtres, de leur religion, c'est une décision draconienne et c'est... Excusez-moi, j'ai perdu le fil de ma pensée.
En terminant, donc, je voudrais dire que c'est inacceptable et que cela ne devrait absolument pas être adopté par la Chambre des communes. Cela avait l'air d'une bonne idée au début. Quand Clyde Wells nous a présenté cela, cela semblait une bonne idée, mais maintenant, cela donne plutôt l'impression d'une tonne de vous savez quoi, Gerry, et nous savons tous de quoi je parle. À moins que cette mesure soit bloquée dès maintenant à la Chambre, à moins que l'on ne mette le holà à tout cela, je crains ce qui va se passer dans la province de Terre-Neuve et du Labrador. J'ai de très vives craintes. Merci.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci beaucoup, John. Je tiens à vous rappeler que je m'appelle Gerry Byrne, et non pas Gerry Boyle, et si vous pouvez tracer un X, je vous ouvre les bras.
Des voix: Oh, oh!
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci John. Cette question vous tient manifestement à coeur.
Nous allons maintenant donner la parole à certains de vos collègues qui sont autour de la table. Nous reviendrons à la période des questions dans quelques minutes. Je voudrais d'abord que nous entendions Mlle Lamswood, si elle veut ajouter quelques mots.
Mlle Robyn Lamswood: Je n'ai pas préparé de discours.
M. John Whelan: Je n'en avais pas non plus.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Vous avez la parole. Si vous ne vous sentez pas à l'aise, si vous préférez participer plutôt à la période des questions, libre à vous de le faire. Mais vous avez là l'occasion de dire le fond de votre pensée. Il n'y a absolument aucune pression ici. Nous sommes simplement venus ici pour écouter et vous pouvez dire tout ce que vous voulez.
Mlle Robyn Lamswood: Merci monsieur.
Je dois dire que je ne suis pas d'accord avec vous. C'est une question très très pressante et je suis contente d'avoir l'occasion de vous faire part ce soir de mes sentiments et de ceux de mes collègues.
J'ai quand même préparé une petite intervention, c'est-à-dire que j'ai mis par écrit ce qui doit être dit et je vais m'en inspirer.
• 1550
Je dois exprimer mon accord avec mon ami au sujet des
53 p. 100 pour opérer un tel changement. Ce changement nous touche
tellement profondément dans nos vies que ce n'est pas simplement un
changement dans le domaine de l'éducation; cela va complètement
changer tout notre mode de vie, c'est un changement de société.
Je pense que de part et d'autre dans ce débat, on veut la même chose—du moins, je l'espère, en tant que jeunes—à savoir, mettre sur pied le meilleur système d'éducation possible dans cette province. On peut donc tout ramener à une seule question: est-ce que, pour établir le meilleur système d'éducation, il faut supprimer les écoles confessionnelles? Ce n'est pas nécessaire.
Nous savons tous que l'argent, on n'en a jamais assez, et surtout pas assez pour en gaspiller, et que dernièrement, la refonte du système d'éducation a soulevé bien des débats au gouvernement et a fait couler beaucoup d'encre dans les journaux.
Le gouvernement et les églises de la province ont fait des propositions et je dois dire que ces propositions financières étaient presque identiques. Changer la constitution ne nous fera pas économiser de l'argent. Cela entraînera la perte du soutien financier fourni par nos églises. Qui se peut se permettre de perdre des appuis financiers? Certainement pas la province de Terre Neuve.
Au sujet des autobus, des conseils scolaires et des enseignants, les églises sont prêtes à négocier en fonction d'une analyse coûts/avantages. Parlons donc de la qualité de l'éducation. Serait-elle meilleure dans un système non confessionnel? Certainement pas! En fait, mon école, qui s'appelle Eugene Vaters Pentecostal Collegiate, est réputée pour la qualité de son enseignement. Les étudiants peuvent rivaliser avec les meilleurs au Canada. Il y a peu de temps, le ministre de l'éducation Chris Decker a dévoilé les résultats des examens pan-canadiens des habilités de base qu'ont subi tous les élèves de 7e année à Terre-Neuve, et les résultats étaient supérieurs à la moyenne nationale en mathématiques et pour les techniques d'étude. Les étudiants de Terre-Neuve se tirent très bien d'affaire et on ne le dit pas suffisamment. Les gens ne voient que les aspects négatifs.
La réforme de l'éducation est nécessaire à certains égards, mais cela ne veut pas dire qu'il faut fouler aux pieds les droits des groupes minoritaires. Les étudiants de Terre-Neuve doivent apprendre non seulement les mathématiques et les sciences, l'anglais et les sciences sociales, mais aussi la morale et la richesse spirituelle. C'est cet aspect de l'éducation qui peut le mieux être réalisé dans le cadre d'un système scolaire confessionnel.
J'ignore si vous vous rappelez combien de temps vous avez passé à l'école, mais les jeunes passent treize années de leur enfance, treize années de leur vie, à l'école, et pendant qu'ils fréquentent l'école, ils y passent jusqu'à six heures par jour. Pour ma part, je passe probablement dix heures par jour à l'école à cause de toutes les activités auxquelles je participe, mais il y a jusqu'à six heures par jour de classes. Pendant ce temps, l'élève passe de l'enfance à l'adolescence et de l'adolescence à l'âge adulte. C'est beaucoup de temps et beaucoup de changement et, en sortant de l'école, on s'attend à ce que les finissants soient des personnes responsables sur le plan social et, encore plus important, au point de vue moral. Qui, dans un système non confessionnel, est sensé inculquer ce sens moral?
Le système d'écoles confessionnelles assure non seulement l'apprentissage pédagogique des étudiants, mais aussi leur épanouissement social et spirituel. Je dois vous poser la question: En quoi cela est-il mauvais?
Bien sûr, la question globale qui plane sur tout cela est celle des droits des minorités. Au départ, le gouvernement voulait réorganiser le transport scolaire. Très bien. Ensuite, il a voulu réduire le nombre des conseils scolaires. Bonne idée. Toutes ces mesures d'économie sont excellentes, parce que cela veut dire que quand je finirai l'école, je pourrai compter, du moins je l'espère, sur une meilleure économie pour m'appuyer.
Mais ces changements d'ordre pratique ne semblaient pas aller assez loin. Voilà maintenant qu'ils veulent exercer un contrôle total. C'est comme si les églises et la population de la province comptaient pour des prunes. Quant au référendum de septembre 1997, c'était à tout le moins, pour reprendre les propos de Hugh Segal dans le Financial Post, «la pire manifestation du libéralisme». C'était effectivement le pire. Quiconque n'allait pas voter était compté parmi les partisans du système non confessionnel—que pensez-vous de cela?
Ce n'est pas démocratique et je pense que nous savons tous de quoi il retourne. Si nous supprimons aujourd'hui les droits des pentecôtistes et des catholiques, qui viendra ensuite? Les autochtones, les homosexuels ou les hindous? Dans cinq ans, serais-je réduite, quand je regarderai mon pays, à me dire, voilà les droits de tous ces groupes ont été supprimés et leur individualité a disparu?
• 1555
Si nous ne protégeons pas les droits de nos groupes
minoritaires aujourd'hui, la mosaïque canadienne va disparaître.
C'est pourquoi c'est tellement important. Nous n'avons pas besoin
de modifier la clause 17. Elle est très bien comme elle est. Elle
protège nos droits et préserve la réalité canadienne.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci beaucoup. C'est toujours bon d'entendre citer Hugh Segal.
Nous allons maintenant donner la parole à Jennifer Bragg.
Si vous n'avez pas préparé de mémoire écrit, cela ne fait rien. Je le répète, nous sommes venus ici pour écouter. Nous voulons entendre vos idées, vos réflexions et vos points de vue sur cette modification que le Parlement examine actuellement. Jennifer, vous avez la parole.
Mlle Jennifer Bragg (étudiante, Booth Memorial): Je voudrais souhaiter la bienvenue au comité, en mon nom personnel et au nom de mon école, qui s'appelle Booth Memorial. Je n'ai pas préparé d'intervention écrite et les autres étudiants de mon école n'en ont pas fait non plus. Je suis venue pour exprimer mon opinion dans le cadre d'une période de questions et de réponses. Si l'un ou l'autre de mes collègues a quelque chose à dire, je vais leur céder la parole, sinon, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je voudrais que nous passions à la période des questions.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): C'est tout à fait acceptable. Les deux autres étudiantes, Erin et Tara, veulent-elles elles aussi passer aux questions, ou veulent-elles prendre quelques minutes pour dire quelques mots?
Mlle Jennifer Bragg: Tara voudrait dire quelques mots, ainsi qu'Erin. Ce n'est pas que je n'ai rien à dire, croyez-moi.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Vous avez la parole.
Mlle Tara Snelgrove (étudiante, Booth Memorial): Je fréquente l'école Booth Memorial. Comme mon amie l'a dit, nous n'avons pas...c'est seulement vers 9 heures ce matin que j'ai appris la tenue de cette audience et je n'ai donc rien préparé.
Je voulais seulement dire qu'à mon avis, un système d'écoles non confessionnelles serait préférable. Je ne pense pas que le choix de l'école que l'on va fréquenter devrait dépendre de la religion.
Il y a quatre écoles secondaires situées dans le même quartier, et c'est la religion de chacun qui décide quelle école il ou elle va fréquenter. Je ne pense pas que ce soit vraiment juste. En fait, c'est discriminatoire: vous ne pouvez pas aller ici parce que vous n'êtes pas catholique, ou bien vous ne pouvez pas aller là parce que vous êtes catholique. Je trouve que ce n'est pas juste.
Je pense que des cours d'enseignement religieux doivent être donnés. Peut-être qu'ils pourraient compter pour l'obtention du diplôme. Il faut faire deux crédits d'étude du monde dans des domaines comme l'économie et autres, mais l'on pourrait avoir aussi un cours d'enseignement religieux qui serait non pas obligatoire, mais facultatif, et qui pourrait compter comme crédit pour l'obtention du diplôme. Si cela vous intéresse et si vous estimez avoir un bagage approprié ou bien si vous pensez avoir de bonnes notes à ce cours, vous pouvez le suivre et en être avantagé.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Très bien, Tara. C'est très bien. Vous avez dit qu'Erin avait également quelques mots à dire.
Mlle Erin Riche (étudiante, Booth Memorial): Je voulais seulement dire qu'à mon avis, la religion n'a pas sa place à l'école, sauf dans le cadre d'un cours qui, comme Tara l'a dit, traiterait des nombreuses religions du monde. Ainsi, les étudiants auraient une meilleure connaissance du vaste monde, au lieu de connaître seulement la religion de leurs parents ou celle qu'on leur a apprise à l'école.
Je pense que le fait d'avoir des écoles confessionnelles séparées, c'est une forme de ségrégation qui n'est bonne à aucun point de vue. Quand nous finirons l'école, nous travaillerons aux côtés de gens qui sont catholiques, pentecôtistes, juifs, témoins de Jéhovah. Je trouve que c'est très important de pouvoir travailler avec tous ces gens-là et d'apprendre à comprendre leur religion et leurs croyances pendant que nous sommes tous ensembles à l'école secondaire.
C'est ridicule de les séparer. Ce qui compte par-dessus tout, c'est que nous ayons tous et toutes une aussi bonne éducation.
• 1600
C'est à peu près tout. Merci.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Très bien. C'est très bien.
Nous allons commencer la période de questions. Des députés à la Chambre des communes ou des sénateurs poseront à tour de rôle des questions précises à l'une des personnes, ou bien nous poserons simplement une question à la ronde et donneront à chacun l'occasion d'y répondre.
Je vous demanderais d'essayer d'être le plus bref possible dans vos réponses, sans pour autant restreindre votre capacité de répondre à la question. Comme vous vous en doutez, le temps nous est relativement compté, mais nous tenons à entendre chacun et nous essayerons d'obtenir le plus de réponses possibles à nos questions.
Tout d'abord, je voudrais savoir ce que vous pensez. Pensez-vous que cette formule de la vidéoconférence est bonne? Vous sentez-vous à l'aise? Je pose la question de façon générale à tous ceux qui sont dans la salle là-bas.
Mlle Erin Riche: Je crois que c'est bon, parce qu'on ne se trouve pas vraiment devant beaucoup de monde. C'est un peu intimidant quand il y a plein de gens qui vous regardent, mais parler à un écran de télévision, c'est bien plus facile, selon moi.
Des voix: Ah! Ah!
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Nous garderons sans doute la prise de vue que nous avons là pour les questions et réponses, puisque nous vous voyons tous les cinq et nous pouvons vous entendre tous les cinq, je suppose.
Nous passons donc à la période de questions. Nous commencerons par M. Rompkey.
Le sénateur William H. Rompkey (North West River, Labrador, Lib.): Merci, monsieur le président.
Merci d'être là et d'avoir bien voulu vous entretenir avec nous. J'ai quelques questions à vous poser. La première concerne le taux de participation, qui était de 53 p. 100. Je voulais simplement nous rappeler à tous que lors du référendum par lequel Terre-Neuve est entré dans la Confédération, le vote—pas le taux de participation, mais le vote en tant que tel—était d'environ 52 p. 100. Aux dernières élections fédérales aussi, le taux de participation était d'environ 52 p. 100 ou 53 p. 100 dans la province—à peu près le même pourcentage.
Je me demande si vous avez quelque chose à dire à ce sujet. Vous avez semblé indiquer que le taux de participation était plutôt faible pour une décision de cette importance, et il l'était, mais je tenais à vous faire remarquer que d'autres décisions ont déjà été prises avec des chiffres semblables.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Y a-t-il quelqu'un qui veut répondre à cette question?
Mlle Robyn Lamswood: J'aimerais bien y répondre, moi. Je me disais justement que, si le taux de participation avait été de 53 p. 100 et que les votes avaient été comptés en tant que tel—un vote pour le oui, un vote pour le non—ce serait là une question. C'est toutefois quand autre chose tous les votes non exprimés sont mis du même côté, de sorte que le vote n'est évidemment plus équitable.
Dans un cas comme celui-là, certains de ceux qui auraient peut-être voulu voter ou qui auraient voté en faveur du système scolaire non confessionnel ne sont peut-être tout simplement pas allé voter parce qu'ils savaient que, s'ils n'y allaient pas, le vote serait remporté pour leur côté de toute façon. Il y a trop de gens qui se fichent de ce qui se passe; d'une façon ou d'une autre, c'est la même chose pour eux. Cela veut-il dire que ces gens-là qui s'en fichent, ceux qui ne s'en fichent pas et ceux qui ont une position bien arrêtée...qu'il y a un côté qui a un avantage énorme?
M. John Whelan: En réponse à ce qu'a dit le dernier intervenant d'Ottawa, 53 p. 100, c'est le taux de participation habituel chez nous. Je ne dis pas que c'est bien; c'est mauvais. Les gens de Terre-Neuve et du Labrador ont un parti pris contre les votes. Nous n'aimons pas aller voter. Nous n'aimons pas faire entendre notre opinion.
Il y a toutefois une différence énorme—et je ne veux pas passer pour un hypocrite, même si je sais que mes propos paraîtront choquants—entre élire un gouvernement fédéral et changer la Constitution de notre province. Il est inacceptable qu'on puisse changer la Constitution—pas seulement élire quelqu'un pour un mandat de quatre ans, mais changer la Constitution, et y apporter un changement pratiquement permanent—quand le taux de participation n'est que de 53 p. 100.
Une voix: Exactement.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci.
Mlle Erin Riche: C'est pour cette raison que le taux de participation a été si faible: les Terre-Neuviens n'aiment pas le changement. Je suis sûre que nous sommes tous prêts à le reconnaître, n'est-ce pas?
• 1605
Mes grands-parents vivent chez nous. Mon père a dit à ma
grand-mère que le moment était venu de voter sur la modification de
la clause 17 qui permettrait de créer un système scolaire non
confessionnel, sur la question de savoir si nous voulions de ce
nouveau système. Elle a regardé mon père et lui a dit: «Pourquoi
changer? Pourquoi aller voter? Tu sais que ça ne changera pas de
toute façon. Ça restera tel que c'est à l'heure actuelle. Pourquoi
changer?»
Mlle Tara Snelgrove: Ce qui compte, c'est l'opinion de ceux qui sont allés voter, de ceux qui avaient le système scolaire à coeur. Quant à ceux qui ne se sont pas donné la peine d'aller voter, tant pis pour eux. S'ils n'ont pas d'opinion, ils ne vont pas voter. S'ils avaient voulu voter, ou s'ils avaient cru important de voter, ils l'auraient fait.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Pas mal comme début. Je tiens à faire remarquer que la discussion semble bien engagée dans la salle là-bas, et cela me paraît très bien. Pour que nous puissions toutefois vous poser autant de questions que possible, si les membres sont d'accord—et c'est une excellente façon de procéder que de répondre à tour de rôle—je vous demande simplement de respecter les opinions de vos camarades. Tâchons donc d'avoir une bonne discussion, franche et ouverte. Nous nous interrompons parfois les uns les autres au Parlement, mais vous savez sans doute mieux vous comporter que nous.
Madame Folco.
[Français]
Mme Raymonde Folco: Je voudrais remercier tout le monde d'être à l'écoute avec nous. J'aimerais faire plusieurs commentaires et je les ferai en anglais parce que je pense que ça passera un peu plus facilement.
[Traduction]
Tout d'abord, quelqu'un demandait ce que c'était que la démocratie. Vous disiez qu'un vote où 53 p. 100 de la population de Terre-Neuve avaient voté n'était pas assez démocratique. Je répondrai à cela—et je voudrais savoir ce que vous en pensez—que, si 47 p. 100 de la population estimait qu'elle ne voulait pas voter, ou a choisi de ne pas aller voter pour quelque raison que ce soit, c'est aussi ça la démocratie. C'est aussi le signe que les gens font ce qu'ils veulent faire. Il y a des pays qui obligent les gens à voter. Le Canada n'est pas de ce nombre. Dans notre régime démocratique, les gens sont libres d'aller voter ou de ne pas y aller.
Ainsi, il y a certaines personnes qui décident de ne pas aller voter, mais nous devons quand même écouter ceux qui se donnent la peine d'aller déposer leur bulletin dans l'urne.
C'est ça la démocratie, selon moi. Ce qui est malheureux, c'est que, pour les raisons que vous avez vous-mêmes citées, certaines personnes ne veulent pas aller voter. Peut-être ne veulent-elles pas d'un changement.
Cela m'amène à mon deuxième point, à savoir que, d'après ce que j'ai entendu chacun de vous dire là-bas à St. John's, il semble que vous voulez simplement maintenir le type d'éducation que vous avez en ce moment.
M. Whelan, qui fréquente une école secondaire catholique, si j'ai bien compris, voudrait qu'il y ait des écoles de différents types, comme dans le système actuel, qui est celui qu'il connaît le mieux. Puis, j'ai écouté les deux jeunes femmes, Tara et Erin qui fréquentent toutes deux une école intégrée et qui disent pour le maintien du modèle scolaire qui est celui qu'elles connaissent le mieux.
Il me semble que chacun comprend le système dans lequel il se trouve et veut que ce système soit maintenu. D'après ce que j'en sais, dans l'optique qui est la mienne—et je suis du Québec—, le maintien de la situation actuelle ne serait pas vraiment dans l'intérêt de Terre-Neuve.
Troisièmement, je voudrais vous interroger au sujet du rôle de l'Église. Deux personnes ont soulevé le fait que, si la religion était retirée des écoles ou si les écoles échappaient à la gestion confessionnelle, la religion n'aurait plus sa place à l'école, d'une part, et quelqu'un, je crois que c'était Robin Lamswood, a demandé qui alors serait chargé d'inculquer ces valeurs morales si ce n'était pas là le rôle de l'école?
La réponse évidente, selon moi, du point de vue où je me place, c'est que ce sont l'Église et la famille qui ont la plus grande part de responsabilité à cet égard. Si l'école n'assume plus cette responsabilité comme elle le faisait par le passé, il ne faut pas conclure pour autant que la religion n'occupe plus une place importante dans votre vie. Il faut plutôt en conclure que la religion serait la responsabilité, comme elle aurait dû l'être au départ, selon moi, de l'Église et de votre famille. L'école en tant que telle demeurerait terrain neutre sauf, comme le précise la modification, dans les cas où, si les parents le souhaitaient, il y aurait un certain enseignement religieux.
J'ai présenté ici trois arguments de poids: votre propre expérience et c'est à quoi, je crois, se résume votre argument; le rôle de l'église dans l'enseignement de la religion et de la morale—je vous ferais d'ailleurs remarquer en passant que morale et religion ne se confondent pas toujours, et le troisième argument, à savoir ce que vous appelez la démocratie.
Je vous remercie.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Quelqu'un demande-t-il à intervenir sur l'un de ces trois arguments? Décidez entre vous qui prendra la parole.
M. John Whelan: Pour quelqu'un qui fréquente, comme moi, l'école catholique, je considère que ce n'est pas la même chose que de suivre, ou de ne pas suivre un cours de religion. C'est une question de culture, d'atmosphère, des relations qui s'établissent au sein de l'école même.
Tous les jours j'arpente les corridors. Je suis le vice-président, les gens m'adressent la parole, ils sourient. Ce n'est pas qu'on ne sourit pas dans une école laïque, ou dans une école multiconfessionnelle, mais il règne, dans notre école, une atmosphère toute particulière, fondée sur les croyances et les vertus que prône une école catholique—la justice et l'équité, entre autres—vertus qui font de l'école un endroit où il fait bon apprendre, où il fait bon se trouver.
J'ai fréquenté une autre école catholique qui n'était pas autant empreinte de catholicisme: vous suiviez les cours de 9 heures à 15 heures et vous en sortiez aussi rapidement que possible, mais maintenant que je suis à Brother Rice, tout est différent: c'est une école catholique prestigieuse, je m'y plais, les heures de cours passent sans que je m'en aperçoive, et je m'y attarde chaque jour bien au-delà des heures de cours, simplement parce qu'il y fait bon s'y trouver.
Ce n'est pas simplement la qualité de l'enseignement qui joue: cela tient également aux idées et aux croyances qu'enseigne l'école.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Y a-t-il quelqu'un, de l'autre côté de la table, qui voudrait faire un commentaire sur les trois arguments présentés par Mme Folco?
Mlle Tara Snelgrove: Je voudrais simplement faire remarquer que notre école, elle aussi, est accueillante, chaleureuse et abonde en expériences passionnantes. La religion n'y joue pas un grand rôle, à mon avis, c'est plutôt une question d'atmosphère. Nous nous sentons chez nous. Je suis sûre que nous avons tous cette impression.
Un témoin: Moi aussi.
Mlle Tara Snelgrove: Je voudrais ajouter que ce ne sont pas que les étudiants qui subissent les inconvénients du système confessionnel. En effet, les enseignants des écoles catholiques et pentecôtistes sont engagés pour leurs croyances religieuses, et non pour leurs qualifications ou leur expérience. Mes parents sont tous deux enseignants, et je sais que, malgré leur formation et leur expérience, ils ne seraient jamais engagés dans une école catholique ou dans une école pentecôtiste, alors qu'un enseignant catholique ou pentecôtiste qui poserait sa candidature à un poste dans une école intégrée serait jugé d'après sa formation et son expérience, et non sa religion, qui n'entrerait même pas en jeu.
Je ne pense pas qu'il soit juste de choisir les enseignants en fonction de leurs croyances religieuses. Ne pourraient-ils pas d'ailleurs se convertir, ne serait-ce que pour obtenir un emploi?
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Que pensez-vous, d'une façon générale de l'enseignement de la religion en salle de classe, ce qui était l'un des arguments soulevés par Mme Folco? Si nous adoptons cette modification à la loi, est-ce qu'il devrait y avoir une instruction religieuse à l'école, ou non? Nous vous soumettons la question.
Mlle Robyn Lamswood: Si l'on tient compte de tout le temps que les gens passent à l'école, on ne peut tout simplement pas s'en remettre, pour l'enseignement de la religion, à l'Église et à la famille. Nous passons trop de temps à l'école, avec nos camarades et avec nos professeurs, et c'est pourquoi nous avons besoin non seulement d'un enseignement religieux, mais également, comme le disait John, d'une atmosphère religieuse.
Dans mon école, les élèves ne sont pas tous pentecôtistes—je crois que seuls un peu plus de la moitié le sont—mais ces croyances se propagent et influencent tous les actes de la vie quotidienne. Il y a des choses que l'on attend de vous, des choses qui se font et d'autres qui ne se font pas, une certaine façon de traiter votre prochain et de le respecter. Cela est dû, j'en suis sincèrement convaincue, aux principes fondamentaux de notre religion que pratique notre école.
Mlle Tara Snelgrove: Je respecte l'opinion de ma collègue, mais je pense que le choix devrait être laissé aux élèves. Personnellement, je ne suis pas d'un milieu très religieux, à la différence de certains de mes amis. Si certains d'entre eux veulent suivre un cours de religion, ils devraient être libres de le faire. Cependant, il devrait également y avoir un cours de religion qui ne soit pas exclusivement chrétien, mais qui soit ouvert à toutes les religions, un cours qui soit ouvert à ceux qui le voudraient.
Personnellement je n'irais pas à un cours pareil, non parce que je suis hostile à la religion, ni parce que je ne suis pas croyante, car en réalité je le suis. Je pense tout simplement que cela n'a rien à voir avec l'enseignement. Si vous vous intéressez à la religion et voulez en savoir davantage là-dessus, vous devriez vous adresser à votre Église ou à votre famille: c'est là qu'on devrait vous inculquer vos croyances, et non dans des cours obligatoires, à l'école.
Mlle Erin Riche: Je viens d'un milieu modérément religieux. Toute la famille—moi, mon frère et mes deux parents—va à l'église chaque dimanche, mais personne ne devrait se voir imposer une religion. Je n'ai jamais fait partie du système d'enseignement catholique, et il ne me paraît pas juste de fréquenter une école confessionnelle, parce que la religion, comme je le disais tout à l'heure, est une chose personnelle.
Si des cours de religion se donnent dans une école, ce ne devrait pas être pour amener les gens à pratiquer plus régulièrement leur religion, mais pour leur permettre de découvrir d'autres religions, d'en apprendre davantage sur elles, de mieux comprendre les autres, et le monde autour de soi.
Je suis actuellement à l'école un cours de choix éthiques: ce n'est pas vraiment un cours de religion, mais c'est un cours qui porte sur les religions. À l'heure actuelle nous faisons une étude comparative de l'Islam et du Christianisme, des différences entre ces deux religions. C'est un cours qui remplit assez bien sa mission.
C'est là, à mon avis, le genre de cours d'enseignement religieux qui devrait être donné dans les écoles, parce que les religions sont souvent à l'origine de la plupart des guerres et troubles entre pays, très souvent, en particulier, des guerres civiles, où les parties en conflit n'ont pas la même religion. La connaissance des différentes religions nous permet de mieux comprendre nos différences, et peut-être de les voir sous un autre jour, d'en reconnaître les points communs au lieu de nous attacher exclusivement aux différences.
Mlle Robyn Lamswood: Vous avez bien raison. Dans mon école nous avons un cours sur les grandes religions. Mais pourquoi ne pourrais-je pas choisir d'étudier le Christianisme? C'est moi qui devrais décider si je veux ou non fréquenter une école catholique ou pentecôtiste; John aussi, j'en suis sûre, voudrait décider d'aller à l'école d'à côté ou, si c'est possible, de fréquenter une église catholique. Ce choix ne devrait pas nous être retiré.
Je sais que je me répète, mais c'est important de le dire: l'école occupe une place considérable dans notre vie. Si je souhaite en savoir davantage sur le Christianisme, et également sur les autres religions, mais fréquenter cette école, c'est moi qui devrais pouvoir choisir. Ce devrait être à moi d'en décider.
Mlle Erin Riche: Je pense que la religion, c'est une chose, et l'enseignement en est une autre.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Je vous écoute avec un vif intérêt et suis vraiment heureux de vous entendre ainsi discuter entre vous.
Je vais maintenant donner la parole à M. Doyle, qui est député de St. John's-Est et qui va vous poser une ou deux questions.
M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Je vais d'abord poser ma question à John, et ceux d'entre vous qui veulent faire un commentaire y sont invités. C'est à John que je voudrais poser ma question parce qu'il m'a dit qu'il habite rue Whiteway, et moi j'habite rue Baltimore, à moins d'une centaine de mètres de là.
Vous disiez qu'il y avait eu beaucoup d'abstentions lors de ces élections. Les Terre-Neuviens, d'après vous, étaient-ils bien informés de la question avant de devoir voter là-dessus? Je vous pose cette question parce que cette nouvelle clause 17 était bien compliquée, et n'a été publiée officiellement que 16 heures avant l'ouverture des bureaux de scrutin par anticipation. J'aimerais savoir si à votre avis les gens de Terre-Neuve et du Labrador étaient ou non, bien informés.
M. John Whelan: J'ai l'impression que M. Brian Tobin et son gouvernement n'avait qu'une hâte, c'est de faire adopter la clause 17 dans les plus brefs délais. Le jour du référendum j'étais en voiture avec mon cousin et je lui ai demandé: «Frankie, est-ce que tu es allé voter?» À quoi il m'a répondu: «Comment cela, c'est aujourd'hui le jour des élections?»
• 1620
Leur précipitation était telle qu'ils en ont oublié d'informer
les gens à temps. Ce n'était certes pas tout à fait la faute de
M. Tobin, parce qu'enfin il a des subalternes pour faire ce
travail. Ce n'était la faute de personne en particulier, mais la
population, dans son ensemble, n'a pas été suffisamment informée de
la date et du lieu où le vote aurait lieu.
Vous avez raison, le texte de la clause 17 n'a été publié que 16 heures avant l'ouverture des bureaux de vote par anticipation. Moi-même je n'ai pas encore vu ce texte, et pourtant j'ai été dans toutes sortes d'endroits.
Dans votre circonscription, Gerry—certains d'entre vous ont été à St. Mary's—seulement 46 p. 100 des électeurs ont voté et ce sont là de vrais gens du peuple. Je connais l'endroit, j'ai des racines à St. Mary's, j'y suis souvent et je parle aux gens. Ils sont furieux. Ils disent que le gouvernement les a eus, qu'il a essayé de les duper, ils regrettent de ne pas être allés voter, et nous nous demandons pourquoi ils n'y sont pas allés.
Ce n'est pas parce qu'ils ne sont pas allés voter que nous devons brûler la clause 17. Non, ce n'est pas ce que je préconise. Mais ce que je soutiens, c'est que lorsque la demande est suffisante et que les bâtiments existent nous devrions avoir des écoles catholiques, protestantes et autres à Terre-Neuve et au Labrador, si le nombre le justifie.
Je ne demande pas au gouvernement de fonder des écoles religieuses dans des localités où il n'y a qu'une cinquantaine de personnes à les demander; ce n'est pas ça. Mais je sais de source sûre que l'an dernier, lorsque l'école Brother Rice High School a posé la question aux parents, 70 p. 100 d'entre eux ont demandé que l'école reste catholique. Dans ce référendum, 70 p. 100 des gens, 70 p. 100 des 53 p. 100 qui ont voté, ont voté pour, mais 70 p. 100 des parents d'élèves de cette école ont demandé à ce que celle-ci reste catholique.
Dans des endroits pareils, où les installations existent et la demande le justifie, les écoles devraient avoir le droit de rester catholiques. Ne tolérons pas la destruction d'un élément clé de notre culture et de notre patrimoine.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Nous avons demandé si les gens comprenaient la question posée lors du référendum du 2 septembre? Y a-t-il d'autres opinions, ou des opinions semblables quant à savoir si les gens ont, ou non, compris la question du référendum? Nous vous posons la question en particulier à vous, les jeunes: avez-vous exactement compris la question du référendum qui a eu lieu le 2 septembre?
Mlle Erin Riche: Je ne l'ai pas comprise à l'époque, et même maintenant je ne suis pas sûre de tout à fait la comprendre. Non, les Terre-Neuviens ne savaient pas suffisamment sur quoi ils étaient censés voter. Je suis donc d'accord avec ce qu'a dit John.
Mlle Robyn Lamswood: Non seulement la question n'a pas été comprise de tous, mais beaucoup n'en ont même pas eu connaissance. Avez-vous déjà vu Brian Tobin faire sa campagne électorale? Il ne va certainement pas déclarer: «Oh, à propos, voici quel est le jour des élections.» Normalement, il s'y prend des mois et des mois à l'avance, encourageant les gens à aller voter, et voter libéral, mais en l'occurrence on a parlé de la question pendant une semaine, et la semaine suivante le tour était joué, personne ne savait au juste comment, personne ne connaissait la teneur de la question, personne ne la comprenait. L'information et la publicité ont laissé beaucoup à désirer.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Je vous remercie. Nous allons maintenant donner la parole à M. Goldring.
Avez-vous une question à poser à ces témoins?
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Réf.): Je vous remercie, monsieur le président. Je dois dire que l'avenir m'a l'air prometteur à St. John's.
Je comprends très bien votre point de vue sur la démocratie, John. Ma question s'adresse à Robyn, qui est Pentecôtiste.
Les Pentecôtistes ont reçu tout récemment, en 1987, la protection de la Constitution pour l'enseignement religieux. Peut-être pourriez-vous nous dire, Robyn, ce que vous pensez de voir se perdre les privilèges ou droits qui vous ont été accordés par la Constitution, de vous les voir confisqués non par la volonté de la communauté Pentecôtiste, mais par celle de la majorité?
Mlle Robyn Lamswood: La plupart des parents Pentecôtistes, et l'ensemble de notre communauté voit là une confiscation, un escamotage de nos droits. Nous en avons bénéficié pendant une certaine période, mais maintenant on nous les reprend.
• 1625
On en revient là aux droits des minorités et à leur existence
même dans ce pays qui n'est pas un creuset de communautés, mais un
pays où coexistent toutes sortes de petits groupes avec chacun ses
caractères distinctifs. Mais peut-on vraiment parler de coexistence
de groupes distincts si nous devons tous être pareils, aller dans
les mêmes écoles et adopter les mêmes pratiques?
Quelqu'un a dit tout à l'heure que l'enseignement et la religion étaient deux choses distinctes, mais ce n'est pas le cas. Les membres de notre communauté fondent leur vie sur leur croyance en Dieu. Cette croyance est inséparable de la vie quotidienne, des activités et occupations: tout s'interpénètre, et c'est pourquoi on ne peut comment cela, tout simplement, retirer la religion des écoles.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Je vous remercie. Y en a-t-il d'autres qui voudraient faire des commentaires?
Mlle Tara Snelgrove: À mon avis notre école, celle qui est intégrée, ne fonde pas tout le monde dans une même masse. C'est précisément le contraire qui se produit, à mon avis. C'est plutôt ce que nous risquons avec les écoles catholiques et pentecôtistes, qui voudraient nous uniformiser.
Dans notre école, qui est intégrée, beaucoup de religions sont représentées, et nos camarades appartiennent à différentes religions, sans que cela nous pose un problème; c'est un fait que nous tenons pour acquis. C'est ainsi, et à l'heure du déjeuner ce n'est pas de religion dont nous parlons: chacun a sa religion, ce n'est pas important. Nous rentrons chez nous, nous pratiquons notre religion et nous respectons celle des autres. C'est comme cela que les choses se passent.
Mlle Jennifer Bragg: Et le respect va de soi.
Mlle Tara Snelgrove: C'est exact.
Mlle Jennifer Bragg: C'est ainsi tout au moins que cela se passe dans notre communauté. Un jour nous serons obligés d'aller travailler et nous aurons à faire à des gens de religions différentes. Ce n'est pas parce que nous nous fréquentons qu'on nous demande d'être tous pareils, d'adopter tous la même religion et de vivre la vie de la même façon. On nous demande seulement de respecter la religion des autres, de travailler avec eux, d'avoir avec eux des rapports ordinaires. Dans notre prochain, nous voyons, au-delà de sa religion, quelle est sa personnalité.
Le coprésident (Gerry Byrne): Merci beaucoup.
M. John Whelan: Je ne suis pas du tout d'accord avec votre déclaration. C'est comme en Russie sous le régime communiste, où le gouvernement disait: «Écoutez, voici la religion que vous allez pratiquer. Vous allez pratiquer cette religion, sinon, nous allons vous fusiller.»
Des voix: Oh, oh!
M. John Whelan: C'est comme le gouvernement de Terre-Neuve et du Labrador qui dit: «Voici le moule dont nous allons nous servir pour vous donner la forme que nous recherchons et vous n'allez pas apprendre quoi que ce soit au sujet de la religion. C'est à vos parents de vous éduquer. L'école n'aura rien à voir avec cette question. Nous allons vous envoyer à un endroit pour apprendre certaines choses, mais non pas les choses que vous devriez savoir.»
Les mathématiques, les sciences, la littérature, c'est bien beau, mais cela ne suffit pas. Nous avons tous besoin d'une certaine instruction religieuse pour comprendre d'où nous venons, où nous allons et ce que nos ancêtres ont fait.
Nous ne sommes pas en train de former les gens...ce n'est pas du tout comme si, à l'école secondaire Brother Rice, on allait, à tout moment, faire entrer dans votre tête l'idée qu'il faut haïr les Protestants et qu'il faut haïr les Juifs.
Des voix: Oh, oh!
M. John Whelan: Ce n'est pas ce que nous enseignons. Nous disons qu'il y a des gens qui vivent dans ce monde et qu'il faut les respecter. Voilà ce que le Catholicisme—voilà un grand mot...
Des voix: Oh, oh!
M. John Whelan: ...enseigne. C'est ce que nous enseignons dans nos écoles. Nous enseignons le respect d'autrui. Le respect est fondamental dans la foi catholique. Nous ne disons pas qu'il faut haïr les gens qui ne sont pas comme nous. Nous n'enseignons pas à interner les gens dans des camps et à les tuer, à l'instar d'Adolf Hitler. Ce n'est pas ce que nous faisons.
Par contre, nous enseignons les préceptes de la foi catholique; oui, vous allez faire cela; et non, vous n'allez pas haïr les autres peuples du monde parce que vous avez fréquenté une école séparée. Je crois que l'école catholique—et je dis cela parce que toute ma famille y est allée—vous donne une bonne perspective du monde. Une telle instruction vous donne une bonne perspective en ce qui concerne les autres gens.
À l'heure actuelle, je suis le cours de religion 1108, et c'est un bon cours. J'apprends toutes sortes de choses au sujet d'Israël et des Juifs. J'apprends à respecter leurs traditions. Je ne suis plus ignorant des choses que j'ignorais auparavant.
Ce sont ces choses-là... Gerry rit de moi, et l'autre aussi: ils rient de moi à cause de ma façon de parler.
Des voix: Oh, oh!
Le coprésident (Gerry Byrne): Je dois le faire. Nous essayons d'accorder à tout le monde la même occasion d'exprimer son point de vue. Cependant, il faut convenir d'une chose, c'est qu'on ne doit pas cogner sur la table, parce que chaque fois que vous le faites, vous coupez le son du micro. Chaque fois que vous cognez sur la table, le micro semble se fermer. Vous pouvez dire ce que vous voulez à condition de respecter les autres personnes assises autour de la table. Alors je vous prie d'arrêter de cogner sur la table. J'apprécie énormément vos observations.
M. Pagtakhan, suivi de Mme Caplan.
Monsieur Pagtakhan, très brièvement s'il vous plaît, parce que nous voulons entendre le point de vue des autres étudiants.
M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Très bien.
J'aimerais poser quelques questions à l'intention de tout le monde.
Premièrement, quels rites religieux vous sont les plus importants?
Si on décidait d'offrir un cours de religion qui se ne limite pas à une seule religion, combien parmi vous suivraient le cours?
Comme dernière question, je voudrais vous demander si vous savez qu'il n'est pas nécessaire de procéder par référendum pour amender la Constitution. Cela a été une décision de l'Assemblée législative et ce n'était pas obligatoire afin de modifier la clause 17 comme élément de la Constitution.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Quelqu'un veut-il répondre?
Mlle Tara Snelgrove: Dans notre école, Booth Memorial High School, nous fêtons Noël et Pâques, n'est-ce pas? Le Jour du souvenir n'est pas vraiment une fête religieuse même si nous avons une cérémonie dans la chapelle de l'Armée du salut.
Notre fête de Noël ne se passe pas à l'église, mais nous avons une assemblée de l'école où on lit un extrait de l'Évangile sur la naissance du Christ et on distribue des écrits religieux auprès des élèves. Je ne sais pas si on lit les extraits en question, on voit beaucoup de papiers jetés par terre après les assemblées.
À Pâques nous faisons essentiellement la même chose.
Mlle Robyn Lamswood: Pour ce qui est des pratiques religieuses qui sont importantes ou non, je pense que la plupart de nos écoles observent les mêmes fêtes puisque ce sont toutes des écoles chrétiennes, même si ces filles-là vont dans une école intégrée qui relève de l'Armée du salut, de l'Église unie et de l'Église anglicane. C'est quand même des fêtes chrétiennes. Je dirais que dans notre école les observances religieuses les plus importantes se passent à Pâques.
Je ne sais pas s'il faut vous expliquer quelles sont les grandes fêtes chrétiennes, je ne sais pas si vous êtes chrétiens ou non, mais Pâques et Noël sont certainement nos plus grandes fêtes. J'ai du mal à imaginer le vendredi saint comme jour non férié. C'est des choses qu'on changerait si on décidait de nous donner des vacances le printemps. Est-ce que j'aurai toujours la possibilité de me rendre à l'église le vendredi saint et prendre le temps qu'il faut pour observer ce jour si important?
Quelle était votre autre question concernant les différentes confessions?
Mlle Erin Riche: Pouvez-vous répéter la deuxième et la troisième question?
M. Rey Pagtakhan: Décideriez-vous de suivre un cours de religion qui ne se limite pas à la doctrine d'une seule confession?
Un témoin: Oui.
Un témoin: Moi aussi.
Mlle Jennifer Bragg: Si c'était un cours qui portait sur toutes les religions, et pas seulement la foi chrétienne, je m'inscrirais.
M. John Whelan: Cela soulève un point intéressant. Il y a tellement de différentes religions dans le monde, comment est-il possible d'organiser un cours qui les enseigne toutes?
Vous avez constaté tout le mal que vous avez avec la clause 17 simplement pour plaire à la population d'une province. Comment cela se passerait-il si vous essayiez de contenter toutes les religions? Il faudrait un manuel épais comme une brique.
Mlle Robyn Lamswood: On consacrerait une semaine au Christianisme, une autre au Bouddhisme, une semaine à l'Hindouisme en présentant les grandes lignes des différentes religions.
Mlle Erin Riche: Grâce à la semaine consacrée à telle ou telle religion, vous serez en mesure de mieux comprendre bien des choses.
Un témoin: On peut le faire déjà.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Eh bien, il va falloir passer à la prochaine question. C'est bon d'avoir un débat animé.
Madame Caplan, vous avez la parole.
Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): Merci.
C'est un plaisir pour moi de vous écouter et d'apprendre les opinions des étudiants de Terre-Neuve sur cette question.
Je voudrais vous parler du fait qu'il y a eu vote unanime dans votre assemblée législative provinciale. En fait, la loi permet un accord entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial afin d'effectuer un changement à la Constitution. Le gouvernement fédéral et le Parlement fédéral doivent être satisfaits qu'il existe un appui suffisant en faveur de cette initiative.
• 1635
Il faut tenir compte du vote. Comment les députés provinciaux
qui représentent la population ont-ils voté? Même si le référendum
est important, il est intéressant pour nous de constater que
53 p. 100 de la population, une majorité, ont pris le temps
d'exprimer son opinion en votant et que sur ce groupe, 73 p. 100
ont appuyé l'initiative proposée.
Ce qui est vraiment important pour moi c'est de voir que tous les députés de votre assemblée provinciale, de tous les partis politiques ont dit qu'ils estiment que cette modification dans la clause 17 sera salutaire pour Terre-Neuve et pour la qualité de l'enseignement et qu'elle profitera à la province. Cela après un débat de 10 ans.
Je voudrais que les élèves me disent ce qu'ils pensent être les raisons de l'appui donné par tous les représentants politiques de tous les partis de l'Assemblée législative de Terre-Neuve.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): C'est à vous de répondre. Vous avez donc la parole, répondez comme vous voudrez.
Mlle Jennifer Bragg: Vous demandez pourquoi nous pensons que les législateurs ont voté en faveur de cette mesure à l'unanimité?
Je pense qu'il s'agissait simplement d'améliorer la qualité de l'éducation. Comme mon ami l'a mentionné, on engage les professeurs en fonction de leurs croyances religieuses plutôt qu'en fonction de leurs qualifications. C'était peut-être un facteur.
C'était aussi pour des raisons économiques. Il y a quatre écoles secondaires dans un rayon de deux pâtés de maisons. Il y en a une directement derrière notre école et deux écoles, Brother Rice et Holy Heart se trouvent une à côté de l'autre.
Mme Elinor Caplan: Compte tenu de la polémique et de tout le débat à ce sujet, même autour de votre table tout le monde n'est pas d'accord, ne pensez-vous pas qu'il était extraordinaire d'avoir un vote unanime dans votre assemblée législative? Les députés ont voté en faveur d'une modification de la clause 17.
Mlle Robyn Lamswood: Vous avez raison de parler de quelque chose d'extraordinaire parce que ça l'était effectivement. Le vote unanime peut se comprendre non tellement par rapport à l'éducation, à la qualité de l'enseignement et à la préparation des jeunes pour affronter le monde du travail mais surtout par rapport à un souci d'économie, le coût des autobus scolaires etc... Je suis tout à fait prête à reconnaître qu'il faut faire quelque chose pour le coût du transport scolaire et le coût de maintenir deux ou trois écoles dans de petites localités mais cela ne signifie pas qu'il faut supprimer la religion dans les écoles. C'est loin d'être le cas.
Si vous demandez pourquoi il y a une telle diversité dans les deux groupes, les parents et les citoyens contre cette mesure ou ceux qui sont en faveur de la position du gouvernement, je pense que ça reflète beaucoup l'attitude des parents. Les parents se préoccupent de la qualité de l'éducation et du milieu scolaire tandis que le gouvernement semble se soucier davantage des économies éventuelles et de la réduction de la dette. La mesure en elle-même n'est pas forcément mauvaise mais il faut garder le sens de l'équilibre.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Y a-t-il d'autres commentaires? Essayons donc de résumer.
Mlle Jennifer Bragg: Je serai brève. Il y a sans doute eu d'autres facteurs qui sont intervenus dans les débats du gouvernement dont nous ne sommes pas au courant. Les membres du gouvernement peuvent aussi être des parents qui doivent faire des choix personnels aussi et ce n'est pas seulement l'argent ou l'économie qui entre en ligne de compte.
C'est une approche raisonnable car il y a des gens qui habitent à cinq minutes d'une école mais ils n'y vont pas à cause de leur appartenance religieuse. Ils doivent au contraire faire un trajet en autobus pendant 30 minutes pour se rendre à l'école qui correspond à leur confession religieuse. Ce n'est pas du tout raisonnable compte tenu de notre problème d'endettement.
M. John Whelan: Puis-je dire quelque chose?
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Très brièvement, John, car nous avons rendez-vous avec Corner Brook.
M. John Whelan: Je serai très bref. Je pense que le gouvernement provincial était pressé de se rallier au mouvement en faveur de la suppression des écoles confessionnelles comme ça semble être le cas un peu partout au Canada maintenant.
On a parlé du fait que les écoles Holy Heart et Brother Rice se trouvent l'une à côté de l'autre et l'école Booth est juste derrière une autre école. Mais il faut se rendre compte que Brother Rice et Holy Heart sont des écoles tout à fait différentes. Holy Heart est une école d'immersion en langue française, Brother Rice est une école catholique et ce sont des écoles qui offrent deux sortes...
Le coprésident (M. Gerry Byrne): On va devoir s'arrêter là. On a du mal à croire qu'une heure s'est écoulée depuis le début de cette conversation.
Au nom du comité et des députés et des sénateurs qui en font partie, nous voudrions vous remercier de votre contribution à cette discussion. Cela a été très utile. Vous avez répondu à de nombreuses questions et vous nous avez fait réfléchir à d'autres.
Encore une fois je vous remercie. J'apprécie que vous ayez pris le temps de nous parler et j'espère que nous pourrons vous revoir. Merci.
Nous allons maintenant préparer la communication avec Corner Brook.
Mesdames et messieurs, nous venons d'avoir une vidéoconférence avec des élèves de St. John's Terre-Neuve. Nous passons à ce que je considère comme la meilleure côte, la côte ouest—n'est-ce pas, Norm? Nous recevons Jennifer Thornhill, élève de Regina High School, mon ancienne école, Erika Budgell de Deer Lake Pentecostal School et de Heardman Collegiate nous avons Andrea Hall et Stéphanie Short.
Je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de votre participation à cette téléconférence. Il s'agit évidemment d'un comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes qui examine l'amendement à la clause 17 de la Loi sur Terre-Neuve. Comme vous le savez, cela se rapporte au système scolaire à Terre-Neuve et au Labrador. Nous sommes ravis de pouvoir vous parler grâce à la technologie.
Mesdemoiselles, nous n'avons que 45 minutes. Malheureusement nous avons perdu 15 minutes à cause de problèmes techniques. Nous allons essayer de tirer le maximum de cette période. Nous vous serions reconnaissants de faire des observations concises dans la mesure du possible. Essayez de respecter le droit de chacun à la parole. Quand on vous pose une question, vous pouvez décider de l'ordre dans lequel vous voulez répondre. Si vous avez envie de répondre, n'hésitez pas à le faire. C'est très détendu, ne vous inquiétez pas.
• 1645
Nous allons commencer de la façon suivante. Si quelqu'un veut
faire une brève déclaration liminaire sur la question, il peut le
faire. Quelqu'un veut-il commencer?
Mlle Jennifer Thornhill (représentante des élèves catholiques, Regina High School): Je tiens d'abord à dire que j'apprécie cette occasion d'exprimer mon opinion. Je sais bien que de nombreuses personnes ont déjà des idées faites sur cette question. En même temps, j'espère que ma voix se fera entendre avec celles des autres ici.
Je vais simplement vous parler de mes expériences car je ne sais pas exactement quels sont tous les aspects juridiques et constitutionnels de cette question.
Mlle Erika Budgell (représentante des élèves pentecôtistes, Deer Lake Pentecostal School): Je voudrais faire le même genre d'observation que Jennifer. Je me réjouis que les politiciens demandent aux jeunes concernés ce que nous voulons et ce que nous pensons de cette question. C'est important et je l'apprécie car depuis longtemps on nous a négligés en estimant que c'étaient les adultes et les politiciens qui devaient prendre une décision. Nous faisons partie du système scolaire et c'est nous et nos amis qui serons affectés.
Mlle Andrea Hall (étudiante, Heardman Collegiate): Je suis d'accord que c'est bon de demander l'avis des étudiants, car c'est notre système scolaire et c'est nous qui devons nous y adapter.
Mlle Stéphanie Short (étudiante, Heardman Collegiate): Je partage l'avis de mes collègues ici. Je vous remercie d'avoir pris le temps de nous écouter. On me dit toujours que nous sommes trop jeunes pour voter ou pour exprimer nos opinions. Nous sommes ici ce soir pour montrer qu'une telle attitude n'est pas justifiée. J'espère que nos propos auront une incidence sur vos délibérations.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci de ces remarques préliminaires. Nous passerons maintenant directement à la période des questions. Notre méthode de travail n'est pas du tout rigide, et n'hésitez donc pas à intervenir quand vous voulez, tout en respectant bien sûr l'opinion des autres participants. Nous commencerons avec une question de la sénatrice Pearson.
La sénatrice Landon Pearson (Ontario, Lib.): C'est un grand privilège pour nous d'entendre vos commentaires. Je suis contente que la technologie existe. Il aurait été agréable de vous rencontrer ici, mais cela aurait pu être plus compliqué.
Nous avons entendu au cours de nos délibérations que si le gouvernement proposait le nouvel article 17, c'était pour améliorer la qualité d'éducation pour tous les étudiants de Terre-Neuve. À votre avis, quelles sont actuellement les lacunes dans vos écoles respectives? Que faut-il faire pour améliorer la situation?
Mlle Erika Budgell: J'aimerais qu'on améliore la qualité de notre système scolaire. C'est triste de constater que certains de mes camarades de classe ne savent ni écrire une dissertation ni analyser une phrase. Dans notre province on ne devrait pas s'inquiéter tellement de la séparation des systèmes scolaires. Pour ma part, je ne crois pas qu'il faille les séparer. On devrait s'inquiéter davantage des éléments de base de notre éducation.
Mlle Jennifer Thornhill: À mon avis, on ne devrait pas changer le système actuel. Ce n'est pas une question d'école confessionnelle par rapport aux écoles non confessionnelles.
Prenez par exemple le cas de mon école. L'an dernier nous avons perdu trois unités et demie d'enseignement. Nous avons un demi conseiller d'orientation pour 512 étudiants. Cela ne suffit pas. Il y a des familles monoparentales. Il y a tellement de problèmes familiaux. Nous avons besoin d'un conseiller d'orientation. Nous avons besoin de ces enseignants.
Nos programmes ont souffert. Nous avons perdu des cours de replacement en biologie et en rédaction. Nous avons tant perdu. Il ne s'agit pas ici d'un conflit entre les écoles catholique pentecôtiste. C'est un problème tout à fait différent. Il faut investir davantage dans le système. Il y a trop de coupures.
Mlle Stéphanie Short: Je partage l'avis de mes collègues. Je me sens tout à fait à l'aise dans l'école où je me trouve actuellement. En toute sincérité, je n'ai pas de problème. J'ai étudié dans les systèmes catholique et pentecôtiste, et j'étais très contente dans les deux cas. Je n'ai pas de regret. Mes 12 années d'études ont été merveilleuses. Je n'ai pas de plainte du tout.
Mlle Andrea Hall: Le seul changement que j'aimerais apporter au système scolaire serait de diversifier les cours. Ils sont sensiblement les mêmes depuis 25 ou 30 ans. Les seules choses qu'on cherche à moderniser sont les méthodes d'enseignement, ce qui n'est pas suffisant.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci beaucoup. Je vous demanderai de vous identifier avant d'intervenir pour permettre aux députés et aux sénateurs de reconnaître la personne qui parle. Donc, avant de répondre, prière de donner rapidement votre nom.
Monsieur Goldring.
M. Peter Goldring: Merci, monsieur le président.
Je m'adresse à Erika. Vous fréquentez l'école pentecôtiste de Deer Lake. Ma question porte sur les droits religieux dont vous avez joui brièvement en vertu de la Constitution, car en effet votre religion ne peut les faire valoir que depuis 1987. Quels sont les sentiments des étudiants et des parents à l'idée qu'ils pourraient perdre ces droits qui étaient censés être protégés dans la Constitution? Quel est votre point de vue à vous? Pensez-vous que le processus a été juste et que votre groupe a été suffisamment consulté?
Mlle Erika Budgell: Je pense que c'est ahurissant. Je ne peux pas accepter la décision qu'on est en train de prendre actuellement. Pour les parents, pour les enseignants et pour les étudiants, la religion constitue une part capitale de notre instruction. L'idée que nous allons perdre la religion... La religion fait partie de notre vie quotidienne; elle est intimement liée à notre vie 24 heures par jour, sept jours par semaine.
Cette semaine, je me suis entretenue avec certains enseignants et certains parents. Ils disaient que ce serait dévastateur... Certes, nous constituons une minorité et je ne conteste pas cela. Mais en tant que minorité, nous formons une communauté et nous avons voix au chapitre. À mon avis il faut que cela soit dit haut et fort.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Quelqu'un d'autre a-t-il quelque chose à ajouter?
Nous allons donc passer à la question suivante.
Monsieur Pagtakhan, avez-vous...
M. Peter Goldring: Monsieur le président, puis-je poser une question dans la même veine?
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Oui, absolument.
M. Peter Goldring: Merci.
Je voudrais poser une question semblable à Jennifer. Comment les étudiants et les parents réagissent-ils face à la possibilité de perdre l'enseignement confessionnel? Quels sont les sentiments des étudiants et des parents quand ils constatent que cet enseignement sera supprimé du fait que c'est le vote de la majorité qui s'est prononcée sur les droits de la minorité?
Mlle Jennifer Thornhill: Je pense que tout le monde a à peu près les mêmes sentiments. J'ai étudié dans le système catholique pendant 13 ans et j'y ai toujours trouvé le prolongement de ma vie familiale et de ma vie spirituelle. Ainsi je retrouve avec moi les mêmes valeurs fondamentales, les mêmes traditions, la culture et le patrimoine qui sont les miens. Si cela devait disparaître de ma vie, je perdrais toutes ces traditions, ces valeurs culturelles, et cela me semble également ahurissant. J'en conviens.
Je pense que chaque école projette sa propre philosophie, son propre cadre et quand on retire à une école le cadre qui constitue son fondement, comme dans le cas de l'école pentecôtiste, c'est effarant. Il y a du bon dans la différence.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Andrea ou Stéphanie?
Mlle Stéphanie Short: Permettez-moi d'ajouter quelque chose. Je ne sais pas si le libellé de la question est vraiment à mon goût. En effet, le député parle de supprimer la religion dans les écoles mais c'est comme si le système intégré n'allait pas véhiculer de valeurs religieuses. Je n'irai pas jusqu'à dire que je trouve cela offensant mais c'est vraiment le premier mot qui me vient à l'esprit. Ces valeurs religieuses existent à l'école dans la mesure où les étudiants les véhiculent. Si les étudiants apportent ces valeurs à l'école, on les y retrouvera.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Stéphanie, avez-vous quelque chose à rajouter? Merci.
Monsieur Rompkey, vouliez-vous poser une ou deux questions?
Le sénateur William Rompkey: Oui, je poursuis dans la même veine que les questions précédentes. Je songe ici aux étudiants qui actuellement fréquentent des écoles intégrées. Quant à vous, si on offrait un cours de religion sur toute une gamme de religions, considéreriez-vous que ce cours est important et le suivriez-vous?
Mlle Jennifer Thornhill: Je dirais que ce genre de cours est important. Il existe déjà un cours de ce genre, que j'ai suivi en huitième année, si je ne m'abuse. On nous apprenait des choses sur les religions du monde. En septième année, on nous a enseigné les diverses religions chrétiennes.
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Ainsi je vous réponds qu'effectivement c'est un cours
important. Ce cours m'a beaucoup apporté et après l'avoir suivi,
j'en n'étais pas aussi ignorante à propos des autres, de ces gens
que j'avais rencontrés une fois l'école terminée, à l'université.
Ce genre de cours est bénéfique. On devrait offrir à un plus grand
nombre d'étudiants ce genre de cours général.
Mlle Andrea Hall: À mon avis, un cours qui explique diverses religions est plus important qu'un cours qui se confine à une seule religion. Je l'ai dit tout à l'heure, la diversité est importante. En l'absence de diversité, l'on vit dans la ségrégation.
Mlle Jennifer Thornhill: Permettez-moi d'ajouter quelque chose. Je suis en douzième année. Dans mon école, on offre trois cours: les religions du monde, la catéchèse chrétienne, et un cours de religion fondamental. L'étudiant a le choix.
Toutefois, il ne s'agit pas ici des cours de religion mais de toute l'atmosphère des écoles. Quand je parle atmosphère, je songe au cadre sur lequel repose mon école, toute école publique, une école pentecôtiste également. Aucune école n'est meilleure que l'autre. Elle est tout simplement différente et la différence est positive.
Il ne s'agit donc pas uniquement des cours. La diversité des cours existe.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Erika, avez-vous quelque chose à ajouter.
Mlle Erika Budgell: Cela ne signifie pas non plus que nous vivons en vase clos. Nous savons très bien qu'il existe d'autres religions et qu'elles sont tout aussi valables que la nôtre. À mon école, on offre aussi un cours sur les religions du monde. Je l'ai suivi l'an dernier. C'est très général. On y apprend toutes sortes de choses sur les religions qui existent de par le monde.
Toutefois, ce qui me plaît à moi, c'est le fait que nous puissions aller à l'école une semaine et retrouver l'écho de cela la semaine suivante en classe. Nous allons à l'église avec les mêmes gens, avec des gens qui croient aux mêmes choses que nous. Le matin, lors du rassemblement, il y a la prière, qui est très importante pour moi. C'est ma nourriture spirituelle. J'en ai besoin pour le reste de la journée.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Monsieur Rompkey, vous voulez poser une question complémentaire, n'est-ce pas?
Le sénateur William Rompkey: Quand nous nous sommes entretenus avec des étudiants de St. John's, certains nous ont dit qu'il était bon que l'école soit le miroir de la collectivité. Si dans une école on mettait ensemble des gens de diverses religions et confessionnalités, ces gens se parlaient, apprenaient à se connaître, apprenaient à s'apprécier. L'école devenait donc un miroir du monde. Ces étudiants nous ont dit qu'une fois dans le monde, ils allaient rencontrer des gens de toutes sortes de religions et de croyances, qu'ils allaient travailler avec eux. Selon eux, c'est une bonne chose donc que l'école soit le miroir de la collectivité.
Comment vous sentez-vous?
Mlle Stéphanie Short: Celui ou celle qui a dit cela a bien parlé. Quand on met tout un groupe de gens ensemble, on a une idée assez précise—et c'est le cas dans mon école—de ce qui se passe dans le «vrai monde», si je puis dire. C'est le reflet de la collectivité.
À l'école, nous avons un groupe pentecôtiste, Jeunesse vivante. Beaucoup des membres de ce groupe sont amis, se fréquentent. Quand vous les rencontrez, vous sentez les valeurs pentecôtistes. Ils irradient. Il se forme divers groupes dans l'école. Des valeurs sont véhiculées au sein de ces groupes. Les groupes expriment leurs opinions mais la diffusion de leurs idées est limitée. Je pense que cela permet d'avoir une idée générale de la réalité.
À mon avis, les écoles devraient être le reflet de la collectivité, car nous vivons au sein d'une collectivité et cela n'est pas appelé à changer plus tard.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Quelqu'un d'autre a-t-il des remarques à faire?
Mlle Jennifer Thornhill: Je voudrais ajouter quelque chose à ce propos. Je pense qu'on aurait tort de croire qu'il y a un abîme entre les étudiants d'une école catholique, d'une école pentecôtiste et d'une école publique. Ce n'est absolument pas le cas.
Nous ne sommes pas des extrémistes dans mon école. Nos copains ne sont pas que des catholiques. Ce n'est pas comme si je refusais d'écouter mon employeur s'il n'est pas catholique. Ce n'est pas comme ça.
Une école doit refléter la vie de la communauté. Les traditions que j'ai absorbées pendant mes années d'école—le patrimoine, la culture et les valeurs—seront avec moi toute ma vie. C'est quelque chose que je vais toujours utiliser dans mes rapports avec la communauté.
Mlle Stéphanie Short: Jennifer a dit quelque chose de très important. Il n'y a pas de division entre les étudiants dans les écoles. On s'entend tous, et on est tous bons copains. Après les cours, des gens de Heardman vont chercher leurs copains à Regina pour aller faire les courses ensemble, par exemple.
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Parfois on perçoit une différence au jeu de basket, et on
entend des commentaires religieux. Mais on ne dit pas des choses
comme: «Ils sont protestants et nous sommes catholiques». On dit des
choses comme: «Notre école est meilleure que la vôtre.» Des choses
comme ça.
Mlle Jennifer Thornhill: Oui, c'est ça. Ce n'est pas une question de religion. C'est la concurrence entre les écoles.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Merci.
Monsieur Pagtakhan, avez-vous une question?
M. Rey Pagtakhan: Oui. Comment percevez-vous les dispositions de la modification proposée—l'enseignement religieux offert par la province qui ne visera pas de religion en particulier? L'observance d'une religion sera aussi permise si les parents le demandent. Appuyez-vous ces changements? Est-ce qu'elles assureront une éducation de qualité supérieure dans votre école, et pour vous?
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Vous avez entendu la question. Pouvez-vous nous donner votre nom avant de répondre, pour aider les gens qui font la transcription.
Mlle Jennifer Thornhill: J'ai déjà dit que, d'après moi, l'aspect le plus important d'une école ce n'est pas la religion, ou la confession. Cela n'a rien à faire avec la notion d'améliorer la qualité de l'éducation. D'après moi, toute école est dévouée à l'éducation.
Il est vrai que dans différentes écoles on enseigne des choses différentes et une approche à la vie qui est différente. Cela n'affecte pas la qualité de l'éducation. Cela veut simplement dire que nous sommes différents. Ce n'est pas que nous sommes meilleurs que les autres, mais tout simplement différents. C'est très sain, ça.
Mlle Andrea Hall: Pour ce qui est d'assurer la qualité de l'éducation, d'après moi les changements ne vont pas nécessairement améliorer la qualité de l'éducation. Mais il y aura sûrement des changements.
L'évolution en elle-même n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Mais probablement, ici on aura rien que des changements, qui ne vont pas faire une grande différence. C'est là, les parents le veulent. Une fois qu'on a l'observance religieuse, elle reste.
Même les étudiants veulent qu'il y ait des observances religieuses. Notre conseil d'étudiant organise des activités pour Noël et pour Pâques. Ils ne sont pas obligés de le faire, ce n'est pas parce que leurs parents insistent, et ce n'est pas parce que leurs enseignants insistent. C'est parce qu'ils représentent les étudiants, et les étudiants veulent ces activités. Donc si les étudiants et les enseignants veulent avoir quelque chose à l'école qu'ils ont légalement le droit d'avoir, eh bien on l'aura.
Oui, les modifications assurent que ces choses-là seront maintenues. Mais elles vont tout simplement changer les choses.
Mlle Erika Budgell: J'aimerais ajouter quelque chose. Vous dites «si les parents le demandent», et je trouve cela un peu ironique. Si vous voulez vraiment savoir ce que les parents demandent, il faut qu'on entende ce qu'ils ont à dire sur les droits des minorités. Eh bien là, on ne les entend pas.
Cette fois encore, je citerai mon école comme exemple. Cette année, 97 p. 100 des étudiants sont revenus. Cinq sont allés à des écoles publiques, mais 12 nouveaux étudiants sont entrés. Je vais donc conclure avec cette question: qu'en pensez-vous? Est-ce qu'on entend vraiment les parents?
Mlle Andrea Hall: J'avais encore une chose à ajouter au sujet de ce que veulent les parents, sans vouloir vous faire oublier ce que disait Jennifer. Je ne veux pas nommer l'école, mais une de mes amies fréquentait une école catholique, non pas à Corner Brook, mais ailleurs dans la province. L'une des règles écrites de l'école disait: «Tu aimeras Dieu». Cela me semble quelque peu étrange. On ne peut pas obliger quelqu'un à aimer une chose à laquelle il risque de ne pas croire. On m'a dit que, d'après bon nombre des parents des élèves de l'école, c'est quelque peu ridicule d'avoir écrit: «Tu aimeras Dieu.» Tu aimeras Dieu si tu crois en Dieu, mais si tu veux aimer Dieu, tu le feras seul.
Pour ce qui est de l'observance des pratiques religieuses, c'est très bien si c'est ce que veulent les parents, mais je pense que le changement permettrait surtout de se débarrasser de choses comme cette règle écrite disant «Tu dois aimer Dieu» pour une école.
Mlle Stéphanie Short: Si on demande aux parents ce qu'ils veulent que leurs enfants apprennent, pourquoi ne pas poser la question aux élèves? Vu que c'est notre religion et notre système scolaire, on devrait tenir compte non seulement de ce que veulent nos parents, mais aussi de ce que nous voulons nous-mêmes dans notre système scolaire.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): C'est vraiment un très bon point.
Nous allons maintenant donner la parole à la sénatrice Pearson.
La sénatrice Landon Pearson: Vous venez de dire quelque chose qui a répondu à la question que j'allais moi-même poser, en l'occurrence dans quelle mesure pensez-vous pouvoir maintenant influer sur la façon dont se font les choses dans vos écoles?
Je sais que, dans les écoles intégrées, par exemple, l'instruction religieuse n'est pas obligatoire. Vous pouvez décider de ne pas prendre ce cours et de le remplacer par autre chose. Est-ce vous qui décidez ou avez-vous besoin de la signature de vos parents?
Mlle Andrea Hall: En réalité, le cours est obligatoire, mais vous pouvez obtenir une autorisation écrite pour ne pas le suivre. Vous avez besoin de deux crédits d'instruction religieuse pour obtenir votre diplôme à moins d'avoir une note signée par vos parents disant qu'ils ne veulent pas que vous suiviez ce cours. J'ai l'impression que les élèves de Regina peuvent aussi obtenir une autorisation écrite pour ne pas suivre ce cours. Je peux me tromper, mais c'est ce que je pense.
Mlle Jennifer Thornhill: C'est vrai, mais cela arrive très rarement. D'habitude, les élèves suivent le cours d'instruction religieuse, mais il y a quelques cas d'élèves qui ne l'ont pas fait.
Mlle Erika Budgell: Il n'y a pas vraiment de cours religieux pentecôtiste pour les élèves. Ces cours ne sont même pas offerts à notre école, ce qui montre bien que nous n'imposons pas notre religion à qui que ce soit. Nous voulons simplement ce que nous avons. Les deux cours d'instruction religieuse qui sont offerts portent sur les différentes religions du monde et différents sujets généraux. Ces cours portent sur le monde entier et nous éclairent sur notre vie future. Je ne pense pas qu'il nous manque quoique ce soit.
Le monde est fait de toute sorte de gens, de petites sectes et de groupes plus importants. Si nous gardons nos écoles, cela rendra le monde peut-être différent, ou peut-être comme il l'est maintenant. C'est quelque chose de spécial. Je n'ai rien à redire aux écoles intégrées ou aux écoles catholiques et pentecôtistes. Je pense que ce sont toutes les écoles merveilleuses. Une autre chose que j'aime bien, c'est que nous ne sommes pas vraiment très nombreux dans nos classes parce que les écoles sont maintenant séparées, ce qui veut dire que nous avons beaucoup d'occasions de dialoguer avec nos enseignants. Si les écoles étaient toutes réunies, cela réduirait les occasions de dialogue entre les élèves et les enseignants et c'est quelque chose de très utile.
Mlle Andrea Hall: Pour poursuivre dans la même veine, les dialogues entre les élèves et les enseignants sont vraiment un grand avantage dans les écoles où il y a peu d'élèves dans chaque classe. Par exemple, il y a près de 40 élèves dans la classe de patrimoine littéraire, ce qui est tout à fait honteux parce qu'on ne peut pas enseigner et on ne peut pas apprendre dans une classe où il y a 40 élèves. Un autre facteur qu'on devrait examiner relativement au système scolaire de Terre-Neuve, c'est combien d'élèves on veut concentrer dans la même école.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Pourquoi y a-t-il une telle différence? Dans une école, on dit que le rapport élèves-enseignants est très faible et une autre élève nous dit qu'à son école, le rapport est très élevé. Y a-t-il des commentaires?
Mlle Erika Budgell: Cela dépend de la population de l'endroit où nous habitons. Andrea habite dans une ville et je suis de Deer Lake. Il y a cependant une très grosse école intégrée à Deer Lake aussi. Je veux parler de l'école secondaire régionale Elwood. Cette école a un grand nombre d'élèves. Le nombre de diplômés chaque année varie de 90 à un peu plus de 100. Si vous ajoutiez les élèves de notre école à ce groupe, cela réduirait davantage les rapports entre élèves et enseignants.
Mlle Andrea Hall: Oui, j'allais dire essentiellement la même chose. Dans ma localité, les pentecôtistes sont un petit groupe par opposition aux élèves de tous les autres groupes dans le système intégré, ce qui veut dire qu'il y a très peu d'élèves dans les écoles pentecôtistes mais c'est à leur avantage d'être moins nombreux en classe.
Mlle Erika Budgell: Pourtant, si on les ajoutait aux autres, ce serait encore trop. Nous avons déjà environ 400 élèves à notre école et si l'on ajoute à cela les élèves des écoles secondaire et primaire Elwood, cela fera une très grosse école. Nous sommes peut-être une petite école maintenant, mais cela représente encore beaucoup d'élèves à ajouter aux écoles plus grosses.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Très bien. Merci beaucoup.
Avez-vous d'autres questions à poser à ces jeunes femmes?
Voulez-vous dire un dernier mot?
Tout ce que je veux dire avant de terminer, c'est que, à mon avis, nous venons d'entendre le point de vue de quatre jeunes extrêmement intelligentes et éloquentes qui risquent de me donner une forte concurrence lors des élections des années à venir.
Le sénateur Rompkey me dit qu'il va voter pour l'une d'entre vous.
Merci beaucoup à toutes. Si vous avez un mot à dire pour terminer, nous serons heureux de vous entendre.
Mlle Jennifer Thornhill: Il y a quelque chose que je voudrais dire. Il s'agit d'une analogie.
Il y a toujours diverses entreprises dans une localité et on s'adresse à différentes entreprises selon le service qu'on veut obtenir. On va où on obtiendra le service voulu. Si nous supprimons les écoles catholiques et pentecôtistes et les autres écoles confessionnelles, il n'y aura plus de choix. Il me semble que cela ne respecte pas vraiment les droits des groupes minoritaires.
Pour ma part, je pense que nous avons besoin de choix. Nous avons besoin d'écoles différentes. Ce n'est pas qu'une école soit meilleure que les autres, et je sais que je l'ai déjà dit au moins 50 fois, mais, d'après moi, c'est une bonne chose d'avoir des différences. On ne peut pas simplement mettre tous les élèves dans la même école. Il faut qu'il y ait un choix. Si ce choix disparaît, que nous restera-t-il?
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Andrea, Stéphanie ou Erika, voulez-vous ajouter quelque chose?
Mlle Andrea Hall: Je voudrais dire pour terminer que je veux que cette modification soit adoptée. Je le veux vraiment. Je pense que ce serait une bonne chose. Surtout à notre époque où l'on insiste tellement sur l'égalité, on continue à nous séparer selon notre religion. Cela me semble très mesquin de demander à des gens de passer des heures à discuter du fait que nous soyons séparés à cause de notre religion. Il y a tellement d'autres problèmes dans le système d'enseignement sur lesquels on pourrait se pencher au lieu de perdre son temps à dire à quelle école on ira à cause de la religion dont on fait partie.
C'est une discussion qui me semble très insignifiante alors qu'on pourrait améliorer de beaucoup la qualité de l'enseignement.
Certains de mes amis reviennent de l'université en disant à quel point les élèves de l'Ontario sont brillants. Pendant ce temps-là, nous nous tournons les pouces en nous demandant si nous fréquenterons une école pentecôtiste ou catholique. Cela me semble vraiment ridicule.
Il me semble qu'il y a ségrégation. On voit de la publicité à la télévision nous disant que le racisme doit cesser et que la haine est une idée dépassée. Les jeunes à notre époque font passer ce même message, mais nous sommes encore séparés jusque dans les petites classes. Quel genre de message cela donne-t-il aux élèves de l'école primaire? Mon meilleur ami habite à côté de chez-moi, mais je ne peux pas fréquenter la même école que lui parce qu'il appartient à une église différente de la mienne.
Mlle Stéphanie Short: Pour terminer, je dois dire que je m'oppose encore à l'idée de la ségrégation et des écoles séparées parce que, si nous continuons ainsi, nous finirons par avoir le même genre de guerre entre les protestants et les catholiques qu'en Angleterre et en Irlande à l'époque où nos ancêtres sont venus s'établir au Canada. Ils l'avaient probablement fait pour fuir ces guerres, mais nous sommes en train de recommencer.
Mlle Erika Budgell: Je tiens simplement à vous remercier de nous avoir écoutés.
Même si nous sommes un groupe minoritaire, nous sommes des Terre-Neuviens et nous sommes satisfaits de ce que nous avons. Nous voulons seulement conserver nos écoles là où elles sont viables. Nous ne voulons pas imposer un enseignant confessionnel à la majorité. Nous voulons simplement conserver nos droits.
Le coprésident (M. Gerry Byrne): Je vous remercie toutes beaucoup. C'était vraiment un plaisir que de pouvoir vous écouter exprimer vos opinions, vous poser des questions et entendre les réponses. Je tiens à vous dire au nom du comité que nous avons devant nous quatre porte-parole très éloquentes pour des idées et des philosophies différentes et je vous félicite d'avoir consacré le temps, l'énergie et l'effort nécessaires à ces questions pour pouvoir vous exprimer aussi bien que vous l'avez fait. Merci encore au nom du comité. Nous espérons avoir de vos nouvelles bientôt.
La séance est maintenant levée. Nous nous réunirons demain à 15 h 30 de l'autre côté du couloir. Merci beaucoup à tous.