Projet de loi C-382
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1re session, 39e législature,
55 Elizabeth II, 2006
chambre des communes du canada
PROJET DE LOI C-382
Loi visant à assurer aux Canadiens un logement sûr, adéquat, accessible et abordable
Préambule
Attendu :
que la prestation d’un logement adéquat et l’accès à celui-ci est un droit fondamental de la personne selon le paragraphe 25(1) de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations Unies, selon lequel :
« Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté. »;
que le Canada a signé en 1976 le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, un traité légalement obligatoire par lequel le Canada s’est engagé à faire des progrès pour assurer la pleine réalisation de tous les droits économiques, sociaux et culturels, notamment du droit à un logement adéquat, ainsi que l’indique le paragraphe 11(1) du Pacte :
« Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu’à une amélioration constante de ses conditions d’existence. Les États parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit [...] »;
que l’exercice d’autres droits de la personne, comme les droits à la protection de la vie privée, au respect de son domicile, à la liberté de circulation, à l’absence de discrimination, à la salubrité de l’environnement, à la sécurité de la personne, à la liberté d’association et à l’égalité devant la loi, sont inséparables de l’exercice du droit à un logement adéquat et indispensables à cette réalisation;
que les États parties au Pacte se sont engagés au paragraphe 2(1) à agir immédiatement par tous les moyens appropriés pour assurer le plein exercice des droits reconnus dans ce pacte, en particulier par l’adoption de mesures législatives;
que, selon l’interprétation du Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies, cela signifie que les États parties doivent immédiatement commencer à adopter des mesures pour assurer à chacun le plein exercice de son droit au logement;
que le Comité des Nations Unies a beaucoup critiqué le Canada, qui n’a pas fait de progrès pour assurer un logement adéquat à tous les Canadiens; voici un extrait des observations finales de sa plus récente critique, en date du 10 décembre 1998 :
« Le Comité est profondément préoccupé de voir qu’un pays aussi riche que le Canada a laissé le problème des sans-abri et du manque de logements décents prendre une ampleur telle que les maires des 10 plus grandes villes du pays ont fini par le déclarer catastrophe nationale. »;
que le Comité des Nations Unies a formulé une recommandation particulière selon laquelle le Canada doit appliquer une stratégie nationale pour réduire le phénomène des sans-abri et la pauvreté, dont voici un extrait :
« Le Comité recommande que les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux cherchent à réduire le phénomène des sans-abri et à résoudre le problème des logements inhabitables qui sont des situations d’urgence nationale, en rétablissant les programmes de logements sociaux ou en augmentant le nombre de ces programmes, selon le cas, pour ceux qui sont dans le besoin, en améliorant et en appliquant adéquatement la législation visant à assurer l’absence de discrimination dans le domaine du logement, en augmentant à des niveaux réalistes les taux d’allocation aux locataires et d’aide sociale, en fournissant des services de soutien adéquats aux personnes handicapées, en augmentant la protection du bail des locataires et en améliorant la protection des logements locatifs abordables pour éviter qu’ils soient convertis à d’autres usages. Le Comité recommande à l’État partie d’appliquer une stratégie nationale pour réduire le phénomène des sans-abri et la pauvreté. »;
que la prospérité et le budget national du Canada sont plus qu’adéquats pour faire en sorte que chaque femme, chaque enfant et chaque homme qui habitent au Canada aient un logement sûr, adéquat, accessible et abordable pour maintenir un niveau de vie qui puisse assurer un bon développement physique, intellectuel, affectif, spirituel et social ainsi qu’une bonne qualité de vie;
que la meilleure façon d’améliorer les conditions de logement est d’établir des partenariats axés sur la collaboration entre les gouvernements et la société civile et de mettre à contribution les collectivités locales;
que le Parlement du Canada désire assurer l’établissement d’objectifs et de programmes nationaux afin que tous les Canadiens aient une meilleure qualité de vie, ce qui est un droit fondamental,
Sa Majesté, sur l’avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte :
TITRE ABRÉGÉ
Titre abrégé
1. Déclaration des droits au logement.
DÉFINITIONS
Définitions
2. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.
« logement abordable »
“affordable housing”
“affordable housing”
« logement abordable » Logement disponible à un coût qui n’empêche pas une personne de satisfaire ses autres besoins fondamentaux, notamment les besoins de nourriture, d’habillement et d’accès à l’éducation.
« logement accessible »
“accessible housing”
“accessible housing”
« logement accessible » Logement accessible aux personnes auxquelles il est destiné, notamment à celles défavorisées par l’âge, une incapacité physique ou mentale ou leur état de santé, ou à celles qui sont victimes d’un désastre naturel.
« logement adéquat »
“adequate housing”
“adequate housing”
« logement adéquat » Logement habitable dont la structure est solide, qui est suffisamment grand et qui protège adéquatement du froid, de l’humidité, de la chaleur, de la pluie, du vent, du bruit, de la pollution et d’autres menaces pour la santé.
« ministre »
“Minister”
“Minister”
« ministre » Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux.
DROITS AU LOGEMENT
Droit à la prestation d’un logement
3. (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente loi, toute personne a droit à un logement sûr, adéquat, accessible et abordable, au sens de la présente loi.
Droits exercés sans discrimination
(2) Toute personne a droit à un logement du type décrit au paragraphe (1) sans faire l’objet d’une des formes de discrimination visées au paragraphe (3).
Motifs
interdits de discrimination
(3) Nul ne peut faire de discrimination envers une personne à l’égard du droit à un logement au titre de la présente loi pour des motifs d’origine raciale, nationale ou ethnique, de couleur, de religion, de sexe, d’âge, d’incapacité mentale ou physique, de situation de famille ou de la présence d’enfants, d’orientation sexuelle, d’état de santé, de citoyenneté, de niveau d’instruction, de situation d’emploi, de condition sociale ou de dépendance à l’égard de l’aide sociale ou d’une autre forme d’aide publique.
Droits relatifs à la jouissance d’un logement
4. Toute personne a les droits suivants en matière de logement :
a) le droit au maintien dans les lieux en cas d’expulsion arbitraire, de déménagement forcé, d’expropriation ou de menace de l’un ou de l’autre, ou en cas de toute autre forme de harcèlement;
b) le droit à un logement convenable pour les individus ayant des besoins spéciaux, y compris l’accessibilité aux soins et le droit à l’indépendance;
c) le droit de tous les enfants, femmes et hommes à un foyer situé dans un milieu sûr et salubre;
d) le droit à un foyer sans violence, menace de violence ou harcèlement de quelque autre forme, que les auteurs de la violence ou du harcèlement se trouvent à l’intérieur ou à l’extérieur de celui-ci;
e) le droit de jouir de sa vie privée au foyer et d’exiger le respect de celle-ci;
f) le droit à la sécurité économique qui découle de la protection contre les augmentations de loyer, d’impôt foncier ou d’autres frais de logement qui, selon le cas :
(i) sont soudaines ou excessives,
(ii) visent principalement à engendrer un profit déraisonnable ou à accroître la valeur d’un immeuble locatif,
(iii) ont pour effet de réduire les autres droits conférés par la présente loi.
CONTRÔLE D’APPLICATION, INFRACTIONS ET PEINES
Respect des droits
5. (1) Toute personne a le droit d’entamer une poursuite devant un tribunal compétent pour faire respecter ses droits aux termes des articles 3 et 4 ou d’une autre disposition de la présente loi ou d’une autre loi visant à reconnaître le droit d’accès à un logement, à assurer la sécurité de cet accès et à empêcher toute discrimination à cet égard.
Protection d’autres recours
(2) Le paragraphe (1) n’a pas pour effet de porter atteinte à tout autre recours prévu par la loi.
Infractions et peines
6. (1) Toute personne physique ou morale qui contrevient à une disposition de la présente loi ou qui empêche ou menace d’empêcher une personne d’exercer un droit conféré par la présente loi est coupable d’une infraction et passible, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire :
a) d’une amende maximale de 5 000 $ pour une première infraction;
b) d’une amende maximale de 10 000 $ et d’un emprisonnement maximal de six mois, ou de l’une de ces peines, en cas de récidive.
Infractions distinctes
(2) Pour l’application du paragraphe (1), une action ou une omission qui empêche ou menace d’empêcher plus d’un individu d’exercer leurs droits constitue une infraction distincte à l’égard de chacun de ces individus.
POLITIQUES GOUVERNEMENTALES ET STRATÉGIE RELATIVE À L’HABITATION
Politiques générales du gouvernement en matière de logement
7. (1) Le ministre élabore et adopte, en collaboration avec les gouvernements de toutes les provinces et des représentants des administrations municipales et des collectivités autochtones, notamment en convoquant la conférence prévue à l’article 12, des politiques pour veiller à ce que les coûts de logement au Canada n’empêchent pas ou ne menacent pas d’empêcher la satisfaction des autres besoins fondamentaux, notamment les besoins en nourriture, vêtements et accès à l’éducation.
Aide financière
(2) Les politiques mentionnées au paragraphe (1) doivent prévoir :
a) la prestation d’une aide financière pour le loyer destinée à ceux qui n’ont pas les moyens d’exercer leur droit à un logement locatif conféré par la présente loi;
b) l’accessibilité à une aide financière et de crédit, sans discrimination fondée sur un motif de distinction illicite mentionné au paragraphe 3(3), pour ceux qui peuvent ainsi être en mesure d’acheter un logement.
Stratégie nationale relative à l’habitation des personnes défavorisées sur le plan économique
8. (1) Le ministre élabore et adopte, en collaboration avec les gouvernements de toutes les provinces et des représentants des administrations municipales et des collectivités autochtones, notamment en convoquant la conférence prévue à l’article 12, une stratégie nationale relative à l’habitation et des programmes de mise en oeuvre afin d’assurer le plein exercice des droits conférés par la présente loi.
Éléments de la stratégie
(2) La stratégie nationale relative à l’habitation doit assurer, au plus tard le 1er janvier 2007, la disponibilité de logements qui satisfont aux exigences de la présente loi et qui :
a) sont sûrs, adéquats, abordables, acces-sibles et fournis sans but lucratif à ceux qui n’ont pas les moyens de les payer autrement;
b) reflètent les besoins de la collectivité locale, y compris ceux des collectivités autochtones;
c) ne coûtent pas plus de trente pour cent du revenu du ménage avant impôts;
d) satisfont différents besoins et offrent des options raisonnables par leur conception, notamment, dans une proportion appropriée, des logements pour les personnes âgées ou handicapées;
e) sont conçus et équipés de façon normalisée, selon les besoins, pour accélérer leur construction et minimiser leur coût;
f) comprennent des projets de logements locatifs sans but lucratif, des coopératives de logements sans but lucratif pour les personnes à revenu mixte, des logements pour les personnes ayant des besoins spéciaux et des logements qui permettent aux personnes âgées de demeurer dans leur foyer aussi longtemps que possible;
g) comprennent des logements pour les sans-abri conformément à l’article 11;
h) comprennent des logements et des abris temporaires destinés à servir en cas d’urgence lors de désastres et de situations de crise;
i) sont conformes aux normes relatives à l’entretien des logements existants ou à la construction et l’entretien de nouveaux logements, ainsi qu’aux normes pertinentes en matière de salubrité et de sécurité.
Date d’application
(3) La stratégie nationale relative à l’habitation visée au présent article doit être mise en oeuvre dès que possible conformément à l’article 12 afin d’assurer le respect du paragraphe (4).
Faculté de faire valoir le droit
(4) La faculté de faire valoir son droit à un logement sûr, adéquat, accessible et abordable conféré par la présente loi peut être exercée à compter du 1er janvier 2007.
Priorité aux personnes habituellement mal logées et défavorisées
9. Les programmes élaborés en vertu de l’article 8 doivent assurer la prestation d’un logement sûr, adéquat, accessible et abordable en priorité :
a) aux personnes qui n’ont pas eu de logement sûr, adéquat, accessible et abordable pendant une période prolongée;
b) aux personnes ayant des besoins spéciaux en matière de logement à cause de leur situation de famille, de la taille de celle-ci ou d’une incapacité physique ou mentale;
c) aux personnes qui ont de la difficulté à se trouver un logement à cause d’une caractéristique qui représente un motif de distinction illicite visé au paragraphe 3(3).
Programmes pour les sans-abri
10. Les programmes élaborés en vertu de l’article 8 doivent prévoir des dispositions relatives aux droits des sans-abri visés à l’article 11.
Droits spéciaux des sans-abri
11. (1) Tout sans-abri a droit à un logement adéquat, autonome et convenable fourni sans délai par les autorités publiques.
Logements inadéquats
(2) Une maison d’hébergement, un refuge d’urgence ou une résidence qui n’offre qu’un lit et le petit déjeuner n’est pas un logement adéquat pour l'application du paragraphe (1).
Appel
(3) Tout sans-abri à qui un logement du type visé au paragraphe (1) est refusé a le droit de porter ce refus en appel devant un tribunal compétent.
Conférence
12. (1) Le ministre convoque, dans les cent quatre-vingts jours suivant l’entrée en vigueur de la présente loi, une conférence des ministres provinciaux responsables du logement et de représentants des administrations municipales et des collectivités autochtones.
Rôle de la conférence
(2) La conférence convoquée conformément au paragraphe (1) doit :
a) élaborer les normes et les objectifs de la stratégie nationale relative à l’habitation visée à l’article 8 et prévoir des programmes pour la mise en oeuvre de celle-ci;
b) fixer les dates de début des programmes;
c) recommander une date à laquelle une somme représentant une proportion additionnelle de un pour cent des dépenses annuelles des gouvernements fédéral et provinciaux et des administrations municipales, au cours de l’exercice se terminant le 31 mars 2007, doit être affectée aux programmes nationaux de construction de logements dans tout le Canada;
d) élaborer les principes d'un accord entre le gouvernement fédéral, d’une part, et les gouvernements de toutes les provinces et des représentants des administrations muni-cipales et des collectivités autochtones, d’autre part, en vue de l’élaboration et de la mise en oeuvre de ces programmes.
Rapport au Parlement
13. Le ministre fait déposer un rapport sur les délibérations de la conférence, notamment sur les questions mentionnées aux alinéas 12(2)a) à d), devant chaque chambre du Parlement au cours des cinq premiers jours de séance de celle-ci suivant l’expiration d’une période de cent quatre-vingts jours après la clôture de cette conférence.
ENTRÉE EN VIGUEUR
Entrée en vigueur
14. Les articles 5 et 6 et le paragraphe 11(3) entrent en vigueur le 1er janvier 2007.
Publié avec l'autorisation du président de la Chambre des communes
Disponible auprès de :
Les Éditions et Services de dépôt
Travaux publics et Services gouvernementaux Canada
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Les Éditions et Services de dépôt
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