LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING JOINT COMMITTEE ON OFFICIAL LANGUAGES
COMITÉ MIXTE PERMANENT DES LANGUES OFFICIELLES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 4 décembre 2001
Le coprésident (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)): Messieurs, mesdames, je vais commencer par demander à monsieur de nous quitter, ou de sortir la caméra et de rester. On vous attend.
• 1530
Nous poursuivons nos travaux sur le service qu'offre
Air Canada dans les deux langues officielles du pays.
Nous recevons aujourd'hui la présidente du Conseil du
Trésor, Mme Robillard, et le ministre des Transports,
M. Collenette.
Soyez les bienvenus à notre comité. Merci d'être
là.
Je vais d'abord vous donner la parole et nous passerons ensuite à la traditionnelle période de questions et réponses. Si j'ai bien compris, monsieur le ministre et madame la ministre, vous ne pouvez être là que pour une heure. C'est bien cela?
Messieurs et mesdames du comité, je vais vous accorder des périodes de cinq minutes pour que tout le monde puisse poser des questions. Cela ne vous dérange pas trop?
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Est-ce qu'on va poser des questions avant?
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Non, on va entendre les présentations, monsieur Sauvageau, et on passera ensuite aux questions.
Madame Robillard, donnez-nous 30 secondes pour que le sénateur Gauthier puisse s'installer. Assurons-nous que le sénateur Gauthier ait le texte et nous pourrons commencer.
Madame Robillard, allez-y.
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Merci beaucoup.
Madame la coprésidente, monsieur le coprésident, mesdames et messieurs du Comité des langues officielles, j'aimerais tout d'abord vous dire que j'apprécie cette occasion qui nous est offerte d'échanger nos points de vue au niveau des services offerts par Air Canada dans le contexte des langues officielles.
Permettez-moi de vous présenter les gens du Secrétariat du Conseil du Trésor qui m'accompagnent. Ce sont Mme Carole Swan, qui est la secrétaire déléguée du Secrétariat du Conseil du Trésor, et Mme Diana Monnet, qui est la secrétaire adjointe responsable de la Direction des langues officielles.
Je sais que vous avez accompli beaucoup de travail en regard de ce dossier. Vous avez déjà entendu mes fonctionnaires, comme vous avez entendu hier M. Milton. J'essayerai donc de répondre à vos questions et de clarifier un certain nombre de points qui semblent vous préoccuper plus particulièrement.
Mon collègue le ministre des Transports vous parlera tout à l'heure des responsabilités qui incombent à son ministère, notamment en matière de sécurité dans le transport aérien.
Clarifions d'abord le rôle du Secrétariat du Conseil du Trésor. La Loi sur les langues officielles établit clairement qu'il incombe à toutes les institutions visées, dont Air Canada, de mettre en oeuvre les dispositions des parties IV, V et VI, portant respectivement sur la prestation des services au public, la langue de travail et la participation des Canadiens et des Canadiennes tant d'expression française que d'expression anglaise.
La partie VIII de cette même loi confie au Conseil du Trésor le rôle et les responsabilités de veiller à l'élaboration et à la coordination générales des principes et programmes fédéraux d'application des parties nommées précédemment, ainsi que de surveiller et de vérifier l'observation, par les institutions assujetties à cette loi, des obligations en matière linguistique.
[Traduction]
Le Conseil du Trésor utilise divers moyens pour faire respecter la Loi sur les langues officielles. À titre d'exemple, il a mené en 2000-2001 les plus importantes vérifications jusqu'ici sur l'offre active et la prestation de services au public voyageur dans les aéroports de Vancouver, Calgary, Winnipeg, à l'aéroport Pearson de Toronto, ainsi qu'à Dorval, de même que Moncton et Halifax. Dans l'ensemble, les constatations portant sur les services offerts par Air Canada étaient satisfaisantes. Nous prévoyons mener des suivis à ces vérifications en 2002, pour nous assurer que les améliorations nécessaires ont été apportées.
D'ailleurs, vos préoccupations quant aux statistiques incomplètes et floues recueillies chez Air Canada par rapport au nombre d'employés francophones et anglophones ont été entendues: la Direction des langues officielles et Air Canada ont convenu, l'été dernier, d'une question plus précise sur l'identification à l'une des deux langues officielles du Canada. Cette nouvelle question nous permettra, nous le croyons fermement, d'obtenir de nouvelles données plus précises dès la parution en 2002 des résultats du sondage effectué auprès des employés à l'été 2001.
• 1535
Suite à l'entrée en vigueur des modifications à la Loi sur la
participation publique au capital d'Air Canada en juillet 2000, et
à l'intégration des employés des Lignes aériennes Canadien
International Ltée, Air Canada a fourni au Secrétariat du Conseil
du Trésor, dans son bilan pour 2000-2001, des renseignements
concernant les mesures prises pour assurer des services bilingues
sur les nouveaux trajets. La réponse du Secrétaire du Conseil du
Trésor au président et chef de la direction d'Air Canada
reconnaissait le travail accompli à ce sujet et l'incitait à
poursuivre ses efforts dans ce domaine.
En regard de la mise en oeuvre des autres aspects du programme, le Secrétaire a demandé que des mesures soient prises afin de corriger les lacunes identifiées, telles la capacité linguistique des points de service désignés bilingues, ainsi que les données sur la participation équitable. Nous continuerons également à surveiller la qualité des services bilingues sur les trajets où la prestation de tels services est obligatoire. Bien entendu, c'est avant tout à Air Canada que revient la responsabilité de prendre les mesures qui s'imposent pour assurer la prestation des services dans les deux langues officielles, là où il est tenu de le faire.
[Français]
Ayant lu le compte rendu de certaines de vos délibérations, je sais également que vous vous inquiétez ou que vous vous posez des questions sur le Règlement sur les langues officielles—communication avec le public et prestation de services. Ce règlement s'appuie sur de solides assises juridiques, soit la Loi sur les langues officielles, qui assujettit les institutions, dont Air Canada, à son application, de même que sur la Charte canadienne des droits et libertés, qui prévoit que les services doivent être assurés dans les deux langues officielles lorsque la demande est importante ou que la vocation du bureau le requiert.
J'aimerais d'ailleurs souligner que 94 p. 100 de la population minoritaire de langue officielle a droit à des services locaux dans sa langue. De plus, le règlement garantit que les voyageurs ont droit à une gamme de services fédéraux dans les deux langues officielles, notamment dans un certain nombre d'aéroports.
Est-ce à dire que tout est parfait? Non, et je n'oserais le prétendre. Nous devons effectuer, au secrétariat, le travail qui nous est dévolu par la loi, mais nous devons le faire en étroite collaboration avec le Commissariat aux langues officielles et avec Air Canada, en premier lieu, pour veiller à ce que les Canadiens et les Canadiennes qui voyagent reçoivent les services qu'ils réclament dans la langue officielle de leur choix, là où ils y ont droit.
C'est dans cet esprit de collaboration que j'accueillerai vos commentaires et vos questions.
[Traduction]
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Collenette.
[Français]
L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Merci, monsieur le président et madame la présidente. Ça me fait grand plaisir d'être ici cet après-midi pour vous parler.
Permettez-moi de passer tout de suite au vif du sujet et de récapituler rapidement ma réponse à certains des enjeux que vous avez soulevés, de même que notre réponse à votre rapport intérimaire.
Je dois d'abord vous dire que je suis accompagné de Mme Dufour, la directrice générale de la politique du transport aérien à Transports Canada, et de M. Jacques Pigeon, avocat général principal à Transports Canada.
Je commencerai par le régime linguistique applicable à Air Canada.
Lorsque le gouvernement a décidé de privatiser Air Canada, le transporteur a cessé d'être une institution fédérale. Toutefois, il a également été décidé que l'entreprise continuerait d'être assujettie aux dispositions de la Loi sur les langues officielles, question de protéger les droits linguistiques existants.
L'année dernière, le gouvernement a clarifié, dans la législation applicable à la restructuration de l'industrie du transport aérien, les obligations d'Air Canada vis-à-vis de ses filiales pour la prestation des services dans les deux langues officielles.
[Traduction]
Spécifiquement, en vertu de ces modifications législatives apportées à l'article 10 de la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada et entrées en vigueur le 5 juillet 2000, Air Canada est tenue, en ce qui concerne ces filiales dont elle contrôle le capital-actions à plus de 50 p. 100, de veiller à ce que celles-ci offrent les services aériens aux clients dans l'une ou l'autre des langues officielles selon les exigences de la partie IV de la Loi sur les langues officielles et le règlement connexe. La prise d'effet de cette obligation varie, selon la région ou la filiale qui offre le service.
Ma collègue, Mme Robillard, le Commissaire aux langues officielles, les cours et moi-même en tant que ministre des Transports avons tous un rôle à jouer pour veiller à la mise en application de la loi.
En ma qualité de ministre des Transports, je suis bien placé, j'en conviens, pour faire valoir auprès d'Air Canada l'importance qu'accorde le gouvernement à cette question. Je suis convaincu que la prestation de services aériens bilingues représente une bonne pratique en affaires, et le gouvernement s'attend de l'entreprise qu'elle se conforme à toutes les exigences de la loi.
Je serai heureux de discuter de la réponse envoyée le 5 juillet 2001 à la suite d'une demande de votre comité. Dans cette réponse, j'ai clarifié la question des responsabilités des transporteurs aériens, y compris celles d'Air Canada, sur le plan des annonces faites aux passagers et des cartes des mesures de sécurité.
À cette occasion, j'ai fourni un exemplaire du protocole d'entente intervenu entre notre ministère et le commissaire aux langues officielles relativement au traitement des présumés manquements aux consignes de sécurité données aux passagers à bord des aéronefs. Le protocole reconnaît explicitement la responsabilité de notre ministère à l'égard des sanctions à prendre à ce chapitre.
[Traduction]
J'ai avec moi des copies supplémentaires du matériel que je peux distribuer si vous le désirez.
[Français]
En conclusion, je tiens à vous assurer que le gouvernement n'est pas disposé à donner suite aux suggestions récentes pour qu'Air Canada soit libérée de ses obligations linguistiques sous prétexte qu'elles sont plus strictes que celles d'autres transporteurs. Ces obligations demeurent en vigueur, même pour les autres fournisseurs fédéraux de services de transport qui exercent leurs activités avec succès dans le secteur privé, par exemple le chemin de fer Canadien National.
Merci beaucoup.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci.
[Traduction]
Monsieur Moore.
M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Je vous remercie.
Ma question s'adresse au ministre des Transports. Robert Milton a indiqué hier que depuis la fusion l'année dernière avec Lignes aériennes Canadien, qui n'était pas assujettie à la Loi sur les langues officielles, le personnel d'Air Canada a pratiquement doublé et est passé de 23 000 à 40 000. Il a dit au comité qu'étant donné qu'Air Canada est le seul transporteur canadien mandaté pour assurer des services dans les deux langues officielles, il devrait obtenir un financement plus généreux de la part du fédéral pour la formation en langue seconde. Quelle est votre réaction?
M. David Collenette: Tout d'abord, j'aimerais simplement rectifier certains de vos propos. Vos paroles ne correspondaient peut-être pas à votre pensée.
Comme je l'ai expliqué dans mon allocution, un important aspect de la transaction du 21 décembre 1999, c'était l'engagement de la part d'Air Canada, au moment de l'acquisition de Lignes aériennes Canadien, de faire appliquer la Loi sur les langues officielles à Lignes aériennes Canadien et aux filiales de cette compagnie, de façon graduelle sur trois ans, selon la région du pays.
M. Moore m'a posé une question semblable au comité des transports, et je n'ai pas l'intention d'en démordre. Lorsque Air Canada a été privatisée en 1987 ou en 1988, les personnes qui ont acheté des actions savaient, auraient dû savoir, ou auraient dû en être informées par les courtiers, qu'Air Canada serait une société cotée en bourse, mais qui aurait certaines obligations. Ces obligations consistaient en particulier à conserver le siège social à Montréal et à assurer l'application de la Loi sur les langues officielles. En ce qui concerne le gouvernement, cela n'est pas négociable, et nous avons l'intention de soutenir cette position.
En ce qui concerne le financement souhaité par M. Milton, nous savons qu'il fait ce genre de demandes à l'occasion, mais en ce qui concerne en particulier la demande concernant la formation linguistique, je pourrais peut-être céder la parole à Mme Robillard. Mais le fait est qu'Air Canada ne peut pas se soustraire à ses obligations légales, et nous ne pouvons pas récrire l'histoire et essayer de faire croire aux gens que, parce qu'il s'agit d'une entreprise privée qui connaît des difficultés financières, elle ne devrait plus respecter la Loi sur les langues officielles.
M. James Moore: Donc, il n'est pas question de fournir les fonds demandés.
M. David Collenette: Les fonds, le cas échéant, devraient provenir de ma collègue. C'est elle qui a tout l'argent.
[Français]
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Désirez-vous faire un commentaire?
[Traduction]
Mme Lucienne Robillard: Il n'en est pas question.
M. James Moore: J'ai une autre question.
Le ministre des Transports a cité de façon légèrement inexacte ce que j'ai dit à une séance de comité. Ce que j'avais proposé, c'est que si les langues officielles sont un élément essentiel de l'identité canadienne—et nous sommes peut-être d'accord là-dessus; en tant que résultat de l'immersion française, je crois effectivement au principe du bilinguisme officiel dans ce pays—pourquoi alors ne pas retirer de la Loi sur la participation publique d'Air Canada le mandat selon lequel cette compagnie doit respecter la Loi sur les langues officielles, et inscrire ce mandat dans la Loi sur les langues officielles de façon à ce que tous les transporteurs soient assujettis aux mêmes règles du jeu et doivent respecter le principe des langues officielles?
M. David Collenette: Cela néglige une réalité fondamentale à savoir que Lignes aériennes Trans-Canada/Air Canada était un transporteur public, un instrument de politique nationale, et continuait effectivement à suivre certains principes de la politique gouvernementale en ce qui concerne les lois sur les langues officielles, lorsque la compagnie a été privatisée.
Personne ne peut contester le fait qu'Air Canada est le transporteur dominant, qu'il est présent partout au pays et qu'il a par conséquent l'obligation de servir les Canadiens dans les deux langues officielles. Certains pourraient peut-être faire valoir que cela défavorise légèrement la compagnie comparativement à d'autres transporteurs, mais je ne suis pas de cet avis. J'ai parlé aux dirigeants des autres compagnies, comme Canada 3000 à l'époque, ou WestJet. Ils comprenaient tous la réalité fondamentale qui existe, à savoir que si vous voulez desservir un marché au Canada, vous devez offrir des services bilingues. Si WestJet offre ce service à Montréal et veut s'assurer l'amour et l'affection des Québécois, cette compagnie devra s'assurer qu'elle s'adresse à ces personnes dans les deux langues.
M. James Moore: Dans un certain sens donc vous venez de réfuter votre propre argument. Vous dites que sont les forces du marché qui obligeront les transporteurs à offrir des services dans les langues officielles, mais malgré l'existence des forces du marché, le gouvernement doit d'une certaine façon continuer à imposer cette obligation.
M. David Collenette: Dans le cas d'Air Canada, nous ne pouvons pas laisser ce transporteur affaiblir une obligation résiduelle qui date de 60 ans.
M. James Moore: Laissez-moi alors vous poser la question suivante—et c'est ma dernière question.
Des bruits courent selon lesquels Air Canada lancerait un autre transporteur à rabais. Il y a eu Tango, puis Canada 3000 qui a disparu. Il est question maintenant d'une compagnie à bas prix qui serait une filiale d'Air Canada et qui desservirait principalement l'Ouest canadien et aurait des bureaux à Hamilton et Calgary, ce qui lui permettrait de faire directement concurrence à WestJet. Est-ce que vous obligeriez Air Canada à offrir des services dans les deux langues officielles à ces endroits sans assujettir WestJet à la même obligation, ce qui représenterait alors un inconvénient concurrentiel pour Air Canada?
M. David Collenette: Il ne s'agit pas d'une décision arbitraire de la part du ministre des Transports, il s'agit de ce que prévoit la loi, ainsi modifiée dans le projet de loi C-26. Je laisserai Mme Dufour et M. Pigeon me reprendre, mais comme je l'ai dit dans mon allocution, d'après ce qui a été entendu, la Loi sur les langues officielles s'applique à toute filiale d'Air Canada dont elle détient au moins 50 p. 100 des actions et Air Canada ne peut pas remplacer les services sur un parcours quelconque par une autre entité—un transporteur à faibles coûts par exemple—sans suivre les principes de la Loi sur les langues officielles.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Je vous remercie.
[Français]
Sénateur Gauthier.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ontario, Lib.): Monsieur Collenette, je veux vous poser une question afin de clarifier une situation qui est un petit peu confuse.
La loi qui porte sur l'aviation canadienne prévoit que les transporteurs aériens doivent donner des consignes de sécurité, des exposés et des cartes d'information à leurs clients dans les deux langues officielles. Vrai ou faux?
M. David Collenette: Vrai.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Donc, cela élimine la question d'hier soir. On nous a fait croire que parce qu'on n'avait pas le nombre pour le justifier... Est-ce qu'on utilise encore les mots «là où le nombre le justifie»? À ce que sache, ça n'existe plus dans le langage. On dit plutôt: «là où il y a une demande importante». On ne parle pas de nombre. Est-ce que je me trompe ou si j'ai raison?
Hier, j'ai relu la correspondance que vous nous avez envoyée le 5 juillet. Il y a des exigences qui s'appliquent à certains transporteurs aériens qui utilisent, par exemple, un aéronef de 19 ou 20 places, comme celui que M. Godin prend souvent. Il y a des exigences linguistiques qui s'appliquent dans ces cas. Pour les aéronefs d'au-delà de 20 places, excluant celles des pilotes, d'autres exigences s'appliquent, à Air Canada comme à tous les transporteurs aériens. Dans le cas de l'avion que M. Godin prend, qui a 19 places ou moins, les exigences linguistiques ne sont pas les mêmes. Pouvez-vous m'expliquer cela clairement?
Mme Lucienne Robillard: Sénateur Gauthier, vous avez d'abord fait allusion à la question de la sécurité. Parlez-vous maintenant du règlement lui-même?
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je parle toujours de la sécurité.
Mme Lucienne Robillard: Ah, de la sécurité.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je vais bientôt vous revenir, ne vous inquiétez pas.
Mme Lucienne Robillard: Non, on ne s'inquiète pas.
M. David Collenette: M. le sénateur parle de la sécurité, ce qui est contenu dans la Loi sur l'aéronautique. Il y a des procédures différentes à suivre dans le cas d'un appareil de 19 passagers ou moins. Peut-être M. Pigeon pourrait-il trouver l'article précis qui en parle.
Me Jacques Pigeon (avocat général, Services juridiques, Transports Canada): La Loi sur l'aéronautique exige de fournir aux passagers des instructions concernant la sécurité quand ils sont 20 ou moins. Il faut aussi leur fournir des cartes sur les règles de sécurité dans les deux langues officielles.
Quand il s'agit d'un aéronef qui comporte entre 10 et 19 sièges, ce qui est en-deçà de 20, on n'exige pas d'instructions orales, mais on exige quand même la distribution de cartes dans les deux langues officielles.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Monsieur Pigeon, j'ai ici la lettre que vous m'avez envoyée au mois de juillet. Je l'ai lue; elle est claire et ceux qui n'ont pas compris devraient en obtenir une copie. C'est très facile à lire et très compréhensible.
M. David Collenette: [Note de la rédaction: inaudible]...nous sommes d'accord sur la réponse.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je suis d'accord avec lui puisque c'est en accord avec la loi.
Madame Robillard, vous recevez des chiffres, des statistiques, des sondages, toutes sortes de rapports d'Air Canada. L'an dernier, j'ai écrit à M. Milton au sujet de certaines réductions d'effectifs parce que je m'inquiétais du fait qu'on laisserait peut-être aller des employés bilingues. On m'avait dit, en effet, que l'ancienneté prévaudrait et que, par conséquent, un employé bilingue pourrait très bien, même si c'était dommage, perdre son emploi au profit d'un employé qui avait plus d'ancienneté mais ne parlait pas les deux langues officielles.
J'ai donc demandé à M. Milton de m'expliquer s'il en était ainsi. Il m'a répondu que cette question ne soulevait aucune difficulté et que le problème ne se posait pas. En effet, m'a-t-il dit, il y a 23 ou 24 p. 100 des employés d'Air Canada qui sont francophones. J'ai trouvé cela étrange parce que ça allait à l'encontre de ce que je croyais.
Alors, j'ai écrit à Mme Dyane Adam, la commissaire aux langues officielles, et je lui ai demandé plus d'explications. Elle m'a envoyé une lettre, le 28 février de cette année. Sur les 22 000 employés, 37,7 p. 100, soit 8 294, portaient la mention «inconnu». On parle de chiffres datant de 1999. Ce sont les plus récents que j'ai. On estimait le pourcentage d'anglophones à 45,7 p. 100, c'est-à-dire 10 043 employés, et les francophones à 16,7 p. 100. Or, j'entendais M. Milton, hier soir, nous dire qu'on avait été obligé de comprimer les effectifs, donc de laisser aller un tas de gens qui étaient bilingues, et qu'il faudrait composer, pendant un certain temps, avec des gens unilingues.
Vous a-t-on remis des chiffres un peu plus clairs cette année? Quand on me dit qu'il y a 37 p. 100 d'«inconnus» parmi les employés, je bondis et me dis que la question a été mal posée. Avez-vous fait quelque chose pour corriger cela quelque peu?
Mme Lucienne Robillard: Oui, monsieur le sénateur. De fait, cela touche à toute la question de la participation équitable. Il faut donc baser notre analyse sur des données vérifiables et avec 37 p. 100 d'«inconnus», on ne peut pas savoir ce qui se passe vraiment.
Depuis longtemps, je pense, le Secrétariat du Conseil du Trésor et le commissariat exigent d'Air Canada que d'autres moyens soient utilisés pour clarifier cette donnée-là. Finalement, nous avons conclu une entente avec Air Canada cet été, comme je l'ai dit dans mes propos d'ouverture, ce qui fait que les prochaines données devraient nous informer plus exactement de la répartition équitable entre francophones et anglophones.
Mais c'est tout récent, ce qui veut dire que cela s'appliquera au prochain sondage auprès des employés qui aura lieu bientôt.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, Sénateur.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: [Note de la rédaction: inaudible]...déposer chez vous...
Mme Lucienne Robillard: Oui.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: ...et les rendre publics.
Mme Lucienne Robillard: Oui.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Merci.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Sauvageau, s'il vous plaît.
M. Benoît Sauvageau: Monsieur le ministre, madame la ministre et distingués invités, c'est un plaisir de vous recevoir tous les deux en même temps ici.
Madame la ministre ou madame Monnet, pourquoi a-t-il fallu tant de temps pour formuler une question aussi simple, à savoir combien y a-t-il de francophones et d'anglophones chez Air Canada? Pourquoi a-t-il fallu tant de temps au Conseil du Trésor pour la poser cette question?
Mme Lucienne Robillard: Au secrétariat?
M. Benoît Sauvageau: Oui.
Mme Lucienne Robillard: Madame Monnet.
Mme Diana Monnet (secrétaire adjointe, Langues officielles, Secrétariat du Conseil du Trésor): Il a fallu du temps, d'abord parce que la première question prêtait à confusion, parce qu'il y avait des employés, chez Air Canada, qui ne voulaient pas s'identifier comme anglophones ou francophones; ceux qui étaient vraiment bilingues ou biculturels n'ont pas voulu choisir. Il y avait aussi le cas des allophones.
Cette fois-ci nous avons assorti la question d'une explication et j'espère qu'elle sera plus claire. Le libellé exact de la question—je pense qu'on en avait parlé hier soir—, c'est:
-
La Loi sur les langues
officielles établit que le français et l'anglais sont
les deux langues officielles du Canada. À laquelle des
deux langues officielles, français ou anglais, vous
identifiez-vous le plus?
Alors, ça donne l'occasion aux allophones d'indiquer une langue ou l'autre comme aux francophones ou aux anglophones.
M. Benoît Sauvageau: Mais vous êtes conscients que dans les formulaires d'emploi, il y avait deux questions sur les langues officielles. La première était: «Quelle est la première langue de votre enfance que vous comprenez encore? anglais, français, autre». C'était la question n° 5. La question n° 7 était: «Au chapitre des langues officielles du Canada, à quel groupe linguistique considérez-vous appartenir?» Il y avait deux questions. Vous en avez retenu une au Conseil du Trésor. Ce devait être la mauvaise. Si vous aviez choisi l'autre, auriez-vous obtenu un nombre plus faible d'«inconnus»?
Mme Diana Monnet: C'est possible, oui.
M. Benoît Sauvageau: Et l'avez-vous regardée avant d'essayer de négocier?
Mme Diana Monnet: Non.
Mme Lucienne Robillard: Écoutez, monsieur Sauvageau, vous nous dites que cela fait partie du formulaire qu'on remplit quand on fait une demande d'emploi à Air Canada. De notre côté, nous vous parlons des employés déjà en poste pour lesquels Air Canada doit nous fournir des chiffres.
Ce que vous êtes en train de démontrer, ce que vous semblez dire, c'est que le service des ressources humaines d'Air Canada, s'il a gardé toutes les demandes d'emploi qu'il a reçues, aurait pu nous fournir des données bien plus fiables. C'est ce que vous dites.
M. Benoît Sauvageau: C'est ça. Vous êtes d'accord avec moi sur ce point.
Mme Lucienne Robillard: Oui.
M. Benoît Sauvageau: Parfait. Merveilleux. Quand c'est clair, c'est toujours mieux.
J'aimerais avoir votre opinion sur un autre point. Votre prédécesseur, M. Guénette je crois, a prononcé cette phrase:
-
...la Loi sur les langues officielles [...] C'est une obligation
quant à l'effort à consentir qui est visée et non pas à
l'obligation d'atteindre des résultats.
Mme Lucienne Robillard: Vous nous sortez une citation dont il connaître le contexte.
M. Benoît Sauvageau: Il faudrait connaître le contexte. C'est hors contexte. Vous dites viser à obtenir des résultats concrets.
Mme Lucienne Robillard: Mais oui. Toute la gestion du gouvernement est basée sur l'obtention de résultats. Il en va de même pour les langues officielles. Il faut avoir des mesures de rendement et être capables de mesurer les résultats.
M. Benoît Sauvageau: Parmi les trois axes d'action du Secrétariat du Conseil du Trésor sur les langues officielles, le deuxième, désigné tel dans un discours prononcé ici, porte sur l'évaluation des objectifs atteints et des résultats obtenus par le gouvernement et les institutions assujetties à la loi. Donc, vous devez, éventuellement, obtenir des résultats sur le nombre de plaintes concernant Air Canada et sur le suivi qu'on leur donne, etc.
Est-ce que le Secrétariat du Conseil du Trésor pourrait obliger Air Canada à avoir un formulaire de plaintes simple et uniforme afin que tout le monde puisse déposer une plainte lorsque la Loi sur les langues officielles n'est pas respectée ou appliquée dans un avion ou dans un aéroport?
Mme Lucienne Robillard: Est-ce que ce point n'a pas déjà été soulevé auprès de M. Milton directement, afin qu'il mette cela en application?
M. Benoît Sauvageau: Oui. Cependant, étant donné qu'un des axes de votre action est de faire respecter la loi et d'avoir des moyens d'évaluer les résultats et l'atteinte d'objectifs, vous dites vouloir que les plaintes chez Air Canada diminuent. Pour que les plaintes diminuent, il faut que vous sachiez d'où elles viennent. Et pour le savoir...
C'est que, dans le moment, à ce qu'on nous a dit, c'est tout un imbroglio que d'arriver à déposer une plainte, surtout lorsqu'on est dans un avion d'Air Canada et qu'on ne nous indique pas comment ouvrir la porte si jamais on frappe un arbre. N'est-ce pas, monsieur Godin?
• 1600
Dans ce capharnaüm, on nous disait qu'il fallait
écrire à la commissaire aux langues officielles, à
Mme Robillard, au ministre des Transports ou à Air
Canada. Personne ne le sait. Dans le fond, personne
n'est capable de répondre à ça.
M. Collenette a
dit que ce n'était pas de ses affaires, mais de celles
d'Air Canada.
Il s'agit d'avoir un formulaire simple. Vous qui êtes responsable de l'application de la Loi sur les langues officielles, pourriez-vous obliger Air Canada à avoir un formulaire de plaintes simple pour que vous puissiez évaluer l'évolution de la situation des langues officielles, au lieu de prononcer des phrases cute mais pas très concrètes?
Mme Lucienne Robillard: Je puis le recommander fortement à la compagnie.
M. Benoît Sauvageau: D'accord, vous pouvez le lui recommander très fortement. Et vous aimeriez cela.
Mme Lucienne Robillard: Vous me demandez ce que le Secrétariat du Conseil du Trésor peut faire. Je vous dis qu'il peut le recommander fortement, mais non obliger la compagnie à le faire.
M. Benoît Sauvageau: Monsieur Collenette, trouvez-vous qu'on pourrait vérifier les choses facilement par la suite si on fournissait à tous les passagers et à tous les employés un formulaire uniforme de plaintes? Cela ne coûterait pas très cher. On nous disait hier qu'il faudrait 30 millions de formulaires, mais après avoir vérifié, on sait qu'ils ont environ 100 000 sièges et 137 plaintes. Donc, ils n'auront pas à les renouveler trop souvent.
Pensez-vous qu'il serait souhaitable qu'il existe un tel formulaire pour que vous puissiez voir l'évolution de la situation, pour que Mme la présidente du Conseil du Trésor puisse voir l'évolution de la situation et pour que nous le puissions aussi? Pourriez-vous le recommander?
M. David Collenette: Si on leur donne la possibilité d'obtenir des plaintes d'une telle manière, oui. Par exemple, dans la Loi C-26, nous avons établi le poste de commissaire aux plaintes, qui est occupé par M. Hood. Depuis sa nomination, il y a eu une augmentation du nombre de plaintes. Si on donne des cartes aux passagers, si les passagers savent qu'ils peuvent porter plainte, il y aura sans doute un plus grand nombre de plaintes. Est-ce le point que vous vouliez faire ressortir?
M. Benoît Sauvageau: Est-ce que cela améliorerait la situation?
M. David Collenette: Peut-être.
M. Benoît Sauvageau: Merci.
[Traduction]
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Godfrey.
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le ministre, Robert Milton a dit hier que l'un des problèmes auxquels fait face Air Canada depuis le 11 septembre, c'est la diminution du nombre de jeunes agents de bord bilingues. Selon les règles de la convention collective—c'est-à-dire dernier arrivé, premier sorti—les jeunes agents de bord engagés en partie à cause de leurs compétences linguistiques dans les deux langues officielles ont été mis à pied les premiers, ce qui paradoxalement signifie que la capacité bilingue des agents de bord depuis le 11 septembre a diminué.
Lorsque vous avez deux objectifs contradictoires en matière de politique gouvernementale—d'une part le souhait que des entités comme Air Canada assure des services bilingues et d'autre part le souhait qu'Air Canada assure sa propre survie économique et prenne les décisions voulues en ce sens—avez-vous votre mot à dire dans la façon dont, par exemple, Air Canada élabore ses conventions collectives, si le résultat net de ces conventions collectives est de réduire la capacité bilingue de la compagnie aérienne? Avez-vous votre mot à dire à cet égard? Comment pouvez-vous concilier ces deux objectifs impérieux contradictoires?
M. David Collenette: Il s'agit d'une société cotée en Bourse. Elle fait partie du secteur privé et par conséquent elle est libre de négocier ses conventions collectives, mais elle doit le faire en étant pleinement consciente de ses obligations en vertu de la loi, c'est-à-dire la Loi sur les langues officielles.
Je n'ai pas lu le commentaire de M. Milton, mais je trouve un peu curieux qu'il affirme que les employés récemment mis à pied sont en majeure partie des employés bilingues c'est-à-dire qu'Air Canada a engagé plus de gens bilingues dernièrement qu'elle ne l'a fait auparavant—compte tenu du fait qu'il me semble qu'à l'époque où Air Canada était une société d'État, la Loi sur les langues officielles était bel et bien en vigueur. Je serais alors parti du principe qu'elle aurait engagé le même nombre d'employés bilingues. Si on poursuit ce raisonnement jusqu'au bout, cela voudrait dire que les employés ayant les plus longues années de service ont tendance à ne pas être bilingues. Je trouve cela bizarre, mais je ne suis pas un expert dans ce domaine en particulier.
M. John Godfrey: Si c'était effectivement le cas—que malgré l'obligation de longue date d'Air Canada d'offrir des services dans les deux langues, la réalité de l'embauche, de la situation en ce qui concerne les ressources humaines c'est que l'embauche d'employés bilingues n'a augmenté que tout récemment—existe-t-il des instances gouvernementales qui ont l'autorité d'intervenir, ou de remédier à la situation?
M. David Collenette: Non, puisqu'il s'agit maintenant d'une société privée. Elle a l'obligation d'assurer le service, donc on peut partir du principe qu'elle engagerait suffisamment d'employés pour assurer un service bilingue, mais pour ce qui est de la participation du gouvernement, elle a pris fin lorsque nous avons privatisé la société.
M. John Godfrey: Donc, même si vous vous seriez attendus à ce qu'elle agisse différemment, si elle n'a pas en fait engager autant d'employés bilingues dès le départ comme elle aurait dû le faire, avec pour résultat la diminution de sa capacité, nous n'avons aucun moyen d'intervenir.
M. David Collenette: Je ne suis pas au courant des faits de façon précise. Il faudrait peut-être demander à M. Milton ou à ses collaborateurs d'expliquer la situation. J'ignore si Mme Robillard est d'accord ou non avec moi, mais je trouve curieux qu'un grand nombre d'employés ayant de nombreuses années d'ancienneté, ne soient pas bilingues, étant donné que beaucoup d'entre eux auraient été engagés lorsque la société était une société d'État. Par conséquent, le gouvernement participait beaucoup plus directement à l'administration de la société et s'assurait que la Loi sur les langues officielles était respectée. Donc, pour répondre à votre question, il faudrait qu'Air Canada nous fournisse des explications plus détaillées sur la situation.
M. John Godfrey: Je vous remercie.
[Français]
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Madame Robillard, voulez-vous ajouter quelque chose?
Mme Lucienne Robillard: Je veux simplement dire qu'Air Canada a toujours été soumise à la Loi sur les langues officielles. Ce n'est pas depuis récemment que cette compagnie est soumise à la Loi sur les langues officielles.
Par ailleurs, je reconnais que les conventions collectives peuvent poser un problème. Ce que j'ai compris, c'est que le syndicat de la compagnie est lui-même prêt à respecter la Loi sur les langues officielles. Je n'ai pas encore vu l'entente qui a été signée avec la commissaire aux langues officielles. Il serait intéressant que nous analysions cette entente qui a été conclue entre la commissaire, le syndicat et la compagnie afin que cela ne se produise pas. Cette entente vient d'être signée et je ne l'ai pas encore vue. Monsieur le président, je ne sais pas si vous avez demandé qu'elle soit déposée auprès de votre comité afin qu'on regarde cela de plus près.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Non, on ne l'a pas reçue. On vient tout juste de la demander. On a appris cela hier.
Merci, monsieur Godfrey.
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le président, cinq minutes, c'est court.
Monsieur le ministre, je suis très déçu d'entendre ce qu'on entend aujourd'hui. J'ai été représentant syndical pendant plusieurs années et je n'ai jamais pu négocier une convention collective qui était contraire à la loi. Il faut respecter la loi. La seule chose qu'on peut faire, c'est améliorer les choses, et non aller vers le bas.
Je pense que c'est ça qui est le problème d'Air Canada. Vous lui ouvrez la porte. Vous l'invitez à violer la loi. Vous lui dites que vous allez respecter les conventions collectives de la compagnie parce qu'elle est dans le secteur privé.
Depuis quand le secteur privé a-t-il le droit de violer la loi? J'aimerais vous entendre là-dessus. Je pense que vous avez fait un erreur et que vous avez mal compris la question.
[Traduction]
M. David Collenette: Je pourrais peut-être répondre en anglais, parce que...
M. Yvon Godin: Allez-y, je comprends aussi l'anglais.
M. David Collenette: ... il sera plus facile pour moi de faire valoir cet argument.
Il ne s'agit pas d'une question dont je m'occupe habituellement, mais d'après ce que je crois comprendre, lorsque Air Canada négocie des conventions collectives, elle doit respecter la Loi sur les langues officielles. Je crois que vous me faites dire ce que je n'ai pas dit. J'ai dit à M. Godfrey que je trouve curieux ce que M. Milton a dit hier soir et je pense que nous devrions lui demander des éclaircissements. En partant du principe que la loi était suivie—et je suis sûr qu'elle l'a été—il devait alors y avoir un répertoire des employés bilingues tout aussi important auparavant que récemment. C'est pourquoi j'ai de la difficulté à comprendre la déclaration selon laquelle il y a plus d'employés bilingues parmi les employés embauchés récemment que parmi ceux qui ont de l'ancienneté, compte tenu du fait que toutes les conventions collectives doivent respecter la Loi sur les langues officielles.
M. Yvon Godin: Monsieur le ministre, par l'intermédiaire de la présidence, je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit, mais j'aimerais que vous vérifiez la transcription pour voir ce que vous avez dit. Vous avez dit que même si nous avons une loi, Air Canada est une société privée et est autorisée—je crois que c'est à peu près ce que vous avez dit—à négocier ses conventions collectives. Dans les faits, toutefois, cela n'a rien à voir à la question. Je dis non, la loi, c'est la loi.
M. David Collenette: Nous avons dit la même chose.
M. Yvon Godin: Eh bien, alors vous avez mal compris notre... vérifiez la transcription pour voir ce que vous avez dit.
• 1610
Dans votre allocution, vous dites:
-
En ma qualité de ministre des Transports, je suis bien placé, j'en
conviens, pour faire valoir auprès d'Air Canada l'importance
qu'accorde le gouvernement à cette question, convaincu que la
prestation de services aériens bilingues représente une bonne
pratique en affaires, et pour lui signifier qu'il s'attend de
l'entreprise qu'elle se conforme à toutes les exigences de la loi.
[Français]
Je ne peux même pas comprendre pourquoi vous parlez de ça. C'est aussi simple que ça. Il y a une loi, et on veut qu'elle soit respectée. Quand je prends l'avion pour aller d'Ottawa à Montréal, je veux que le service me soit donné en français, et non en anglais comme cela a été le cas au mois de juin. C'était avant le 11 septembre. Quand j'ai pris l'avion au mois d'août pour aller de Montréal à London, Ontario, je voulais que le service me soit donné en français. Cela n'a pas été possible sur un vol d'Air Canada, qui est pourtant assujettie à la loi.
Je vais vous donner un autre exemple. Le 2 mai dernier, nous avons entendu Mme Dufour, du ministère des Transports, qui nous a indiqué que c'était au Secrétariat du Conseil du Trésor de se charger des plaintes. Le 8 mai, Mme Monnet du Secrétariat du Conseil du Trésor nous a dit que c'était le contraire. Air Canada peut bien avoir 137 plaintes: elle ne respecte pas la loi. Vous vous renvoyez la balle tous les deux. Qui est capable de faire respecter la loi?
Je vous répète ce qui est écrit dans les comptes rendus. Les deux se sont renvoyé la balle du 2 au 8 mai. C'est tout ce qu'on entend ici. Personne ne veut prendre la responsabilité de dire qu'il y a une loi et qu'il faut la respecter, peu importe que ce soit bon pour les affaires ou pas. Quelle punition la loi nous permet-elle d'imposer à une compagnie qui ne respecte pas la loi? Est-ce qu'on va simplement attendre que les compagnies décident d'être de bons citoyens?
Mme Lucienne Robillard: Monsieur Godin, c'est pour cela que vous recevez les deux ministres en même temps aujourd'hui.
M. Yvon Godin: Qui est responsable, si on a deux ministres?
Une voix: Stéphane Dion.
Mme Lucienne Robillard: Responsable de quoi? Posez-moi une question directe.
M. Yvon Godin: Qui est responsable de faire respecter la Loi sur les langues officielles à bord des avions d'Air Canada? Quel ministère est responsable de faire respecter la loi par Air Canada?
Mme Lucienne Robillard: Au Conseil du Trésor, nous sommes responsables non seulement d'émettre les politiques aux institutions fédérales, mais aussi de surveiller ces dernières. Quand on les surveille pour voir comment ces politiques sont appliquées et qu'on voit des problèmes comme ceux qu'il y a chez Air Canada et dans certaines institutions fédérales, on demande à l'institution d'établir un plan d'action pour corriger ces problèmes.
Dans votre question, vous êtes allé plus loin. Vous avez demandé quelles punitions la loi prévoyait.
M. Yvon Godin: Ça fait 30 ans que ce problème existe, madame la ministre. Quand sera-t-il réglé une fois pour toutes?
Mme Lucienne Robillard: J'avais compris de ce que vous avez entendu hier qu'Air Canada avait la volonté de regarder les problèmes de près et de déposer un plan d'action public pour régler ces problèmes. Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse exactement, monsieur Godin? Allez donc jusqu'au bout de votre idée.
M. Yvon Godin: Quand le gouvernement adopte une loi, il doit la faire respecter. Je suis allé au bout de mon idée.
Mme Lucienne Robillard: Si vous voulez parler de mesures coercitives à l'intérieur d'une loi... Attendez, laissez-moi finir. Si vous voulez parler d'outils et de mesures coercitives que prévoit la loi qui régit Air Canada pour faire respecter cette partie de la Loi sur les langues officielles, mon collègue pourra vous répondre. Ce n'est pas mon domaine.
M. Yvon Godin: Vous vous renvoyez la balle.
Mme Lucienne Robillard: Non, on ne se renvoie pas la balle. On est ici tous les deux en même temps pour vous répondre.
M. Yvon Godin: Je n'ai pas de réponse.
Mme Lucienne Robillard: Je pense qu'il n'y a pas de mesures coercitives dans la loi, mais c'est David qui va vous répondre.
M. David Collenette: Elle a raison.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Je vais poser une question, si vous me le permettez. Dans le projet de loi C-26, monsieur le ministre Collenette, on prévoyait des mesures punitives ou coercitives si les conditions de la fusion n'étaient pas respectées. D'accord? Dois-je comprendre que ces pénalités s'appliquaient strictement à des mesures autres que celles découlant de la Loi sur les langues officielles?
M. David Collenette: Je pense que cela s'applique simplement à la fusion physique des deux compagnies aériennes, et non à l'application de la Loi sur les langues officielles.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Donc, la loi qui régit Air Canada ne prévoit pas de pénalités si Air Canada ne respecte pas les obligations que lui donne la Loi sur les langues officielles. C'est ça? Et il n'y en a pas non plus dans la Loi sur les langues officielles.
Mme Lucienne Robillard: Non.
M. Yvon Godin: Elle n'est donc pas forcée de la respecter.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Si je comprends bien, cela dépend de leur bonne volonté.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu (Rougemont, Lib.)): Je ne sais pas à qui je dois adresser mes commentaires et mes questions, mais j'aimerais entendre les réponses des deux ministres présents.
Il a été question hier de situation idéale, c'est-à-dire une situation où les Canadiens peuvent vivre et choisir de voyager dans la langue de leur choix.
Étant une anglophone du Québec, je me sens vraiment vraiment mal placée. J'ai une famille qui est fondamentalement francophone et je défendrai leurs droits jusqu'à la fin de mes jours, comme je défendrais les droits des anglophones. Comment peut-on parler d'un pays qui a deux langues officielles?
[Traduction]
David, nous sommes censés avoir deux langues officielles. Nous n'avons pas deux langues officielles si le présent gouvernement, et les nombreux gouvernements qui vous ont précédé, n'ont jamais fait appliquer cette loi.
Monsieur le ministre, je me souviens vous avoir demandé à un autre moment à quoi bon avoir une Loi sur les langues officielles. Je vous ai demandé, monsieur le ministre, si vous préféreriez vous en débarrasser que de la faire appliquer. Votre réponse a été, non, vous voulez faire respecter la Loi sur les langues officielles. Monsieur le ministre, depuis 30 ans le présent gouvernement et tous les gouvernements canadiens n'ont jamais obligé qui que ce soit à respecter la Loi sur les langues officielles. Comment pouvez-vous penser que nous allons croire que vous allez décider tout d'un coup de le faire?
Les francophones ne sont pas des citoyens de deuxième ordre. Ils sont tout à fait en droit...
[Français]
Madame Robillard, je le dis à une Québécoise, ce qui est gênant: nous ne sommes pas des citoyens de deuxième classe. Nous avons des droits et si notre cabinet et notre gouvernement ne sont pas capables de faire respecter nos droits, que peut faire ce comité? Que faites-vous avec la Loi sur les langues officielles?
Mme Lucienne Robillard: Madame Maheu, je tiens à dire que je suis tout à fait d'accord avec vous quand vous faites la promotion du respect de l'égalité des deux langues et du choix linguistique que font les citoyens. Vous le savez très bien, madame Maheu.
Nous cherchons à savoir quels sont les moyens d'intervention si une institution fédérale ne respecte pas les obligations contenues dans la loi. C'est ce que j'ai compris de l'intervention de M. Godin. Nous vous avons expliqué, tout au long de ces délibérations, que selon la Loi sur les langues officielles, le seul moyen d'intervention passe par la commissaire aux langues officielles qui peut soumettre une situation directement à la cour fédérale. Nous vous avons expliqué que c'est ce que prévoit la loi actuelle.
Vous me demandez quels sont les moyens. Je vous explique ce que contient la Loi sur les langues officielles. Par le biais de la commissaire, un cas peut aboutir en Cour fédérale. Par contre, si on considère la Loi sur Air Canada, comme l'a dit monsieur le ministre des Transports, il n'y a pas de pénalité spécifique prévue pour le non-respect de cette loi.
De façon générale, nous surveillons ce qui se passe dans toutes nos institutions qui ont l'obligation de respecter la loi. Quand il y a des lacunes, dans la majorité des cas, le problème est identifié par la personne visée par l'obligation. Il y a une reconnaissance du problème et on tâche de déterminer comment s'attaquer au problème et le corriger. Le Secrétariat est là pour donner un coup de main, tout comme la commissaire aux langues officielles, mais d'abord et avant tout, c'est une question d'attitude de la haute direction d'une institution fédérale. Il faut que le respect de cette loi fasse partie de la culture de l'organisation. Cela est aussi important. Nous travaillons dans ce contexte de façon régulière, sénatrice Maheu.
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Avec votre permission, madame Robillard et monsieur Collenette, que peut faire le gouvernement libéral qui est au pouvoir dans ce pays? Que peut-on faire pour faire cesser un tel abus? Selon moi, ce non-respect des deux langues officielles de notre pays est un abus. Si nous n'apportons pas un amendement à la loi pour forcer les gens à donner du mordant à la loi, qui va le faire?
Mme Lucienne Robillard: Vous regardez les moyens actuels. Est-ce qu'on parle toujours d'Air Canada, madame la sénatrice?
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): On parle d'Air Canada. On parle d'un pays qui a, en principe, deux langues officielles.
Mme Lucienne Robillard: Oui, oui. Vous n'allez pas m'enseigner ça. Je sais très bien que je vis dans un pays qui a deux langues officielles, n'est-ce pas?
La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Oui, d'accord. Comment va-t-on faire pour faire mettre en pratique nos deux langues officielles?
Mme Lucienne Robillard: Madame la sénatrice, je ne vous répéterai pas ce que je viens de vous dire et quels sont les moyens d'action. Votre comité peut juger que ce sont des moyens insatisfaisants et recommander autre chose au gouvernement. C'est votre privilège comme comité.
Je vous ai parlé des moyens d'action qui existent à l'heure actuelle. Cela peut passer par la commissaire ou cela peut aller directement au tribunal. Cela peut se produire dans certains cas. Je pense que notre commissaire, c'est une femme qui va au tribunal quand c'est nécessaire. Ce sont là les moyens d'action qui sont prévus par la loi actuelle.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur le ministre, la parole est à vous.
M. David Collenette: Monsieur le président, j'ai quelques mots à dire.
Nous avons des pénalités. Quant à la sécurité, nous avons force de loi avec la Loi sur l'aéronautique. Si on ne donne pas les instructions, les procédures dans les deux langues officielles, et qu'il s'agit d'une question de sécurité, Air Canada peut être pénalisée.
M. Benoît Sauvageau: Pour combien de temps peut-elle l'être?
M. David Collenette: Mais il me semble que le problème dont on discute aujourd'hui porte plutôt sur le service aux passagers, le marketing, par exemple. En anglais, on parle de «on board service». On ne parle pas présentement de la sécurité des passagers.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci. Sénateur Rivest, la parole est à vous.
Le sénateur Jean-Claude Rivest (Stadacona, PC): En ce qui concerne la question des sanctions, c'est un peu étrange et extrêmement décevant d'entendre cela. Évidemment, au niveau des ministères, les responsables de l'application des langues officielles ont toujours les moyens de le faire, mais si la loi ne prévoit aucune sanction qui puisse s'appliquer à Air Canada depuis que celle-ci a été privatisée... Mme Robillard nous a signalé la possibilité qu'il y ait peut-être un recours possible plus tard. Est-ce que le recours devant la Cour fédérale s'appliquerait uniquement aux organismes gouvernementaux ou s'appliquerait-il aussi à Air Canada?
Mme Lucienne Robillard: Non, cela s'appliquerait aussi à Air Canada.
Le sénateur Jean-Claude Rivest: Sans recourir à une intervention législative qui demeure toujours la prérogative du gouvernement même à l'égard d'une entreprise privée, il n'en demeure pas moins qu'Air Canada fait très souvent appel à vos services, monsieur le ministre des Transports, et demande une contribution financière du gouvernement pour ses opérations. En raison de l'importance politique de la question de la dualité linguistique au Canada, des plaintes très sérieuses qui ont été soulevées et du scepticisme des usagers quant à l'application que fait Air Canada de la Loi sur les langues officielles, ne pourriez-vous pas, à ce moment-là et à bon droit dire: «No money without bilingualism»?
M. David Collenette: La politique du gouvernement, c'est de ne pas donner de subventions aux compagnies privées. Le gouvernement a donné 100 millions de dollars à Air Canada après les événements du 11 septembre uniquement en raison des pertes qu'Air Canada avait enregistrées. En général, le gouvernement n'octroie pas de subventions aux compagnies privées.
Le sénateur Jean-Claude Rivest: Ils font également appel à vous pour toutes sortes d'autres choses, toutefois.
M. David Collenette: C'est possible.
Une voix: Vous avez dit non, toutefois.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Il y a encore plusieurs autres personnes qui veulent prendre la parole. Est-ce que vous pouvez rester encore quelques minutes? Le prochain, c'est M. Binet. Monsieur Binet, je vous demanderais de faire ça rapidement.
M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.): Madame Robillard, monsieur Collenette, bonjour.
On a rencontré différents groupes depuis notre retour, après les élections. C'est sûr qu'en ce qui a trait au français au sein d'Air Canada, tout ce qui est ressorti de nos rencontres est loin d'être très positif.
Hier, on a rencontré M. Milton et son équipe. On voit qu'ils forment ensemble une bonne équipe. Je lui ai parlé d'un invité que l'on avait rencontré et qui avait fait un sondage sur les langues officielles à la demande du comité. En ce qui a trait aux langues officielles, il nous a dit que l'on ne verrait pas de changement véritable avant 15 ans encore. Quinze ans, c'est inacceptable.
Je lui ai dit aussi que c'était sa responsabilité, à titre de président de la compagnie, d'inculquer cette philosophie à sa compagnie. Je lui ai demandé de faire une intervention spectaculaire. Quand je parle d'intervention spectaculaire, cela suppose que son intervention va être connue non seulement au sein de son organisation et de ses employés, mais qu'elle le sera à la grandeur du Canada. Ainsi, les citoyens pourront dire aux employés d'Air Canada que c'est précisément ce à quoi ils s'attendaient, qu'il faut que ça soit comme cela, que c'est la philosophie de leur président qui représente Air Canada.
• 1625
Seriez-vous en mesure, en tant que ministre, d'exiger
une action vraiment visible à la grandeur du Canada? Je
parle de quelque chose de plus que le respect des
règlements qu'on doit respecter de toute façon? Mme
Dyane Adam a des dents pour le mordre, mais vous, en
tant que ministre, pouvez-vous dire à M. Milton qu'il
doit absolument adopter une ligne de conduite qui
permette de régler cette situation?
Je puis vous dire qu'au Comité des langues officielles, ici, on travaille bien en équipe et on ne lâchera pas le morceau, c'est sûr.
M. David Collenette: Le fait est que nous pouvons suggérer des changements relatifs à l'application de la Loi sur les langues officielles au Canada, mais nous n'avons pas le pouvoir législatif de la renforcer et ça, c'est un fait de la vie, sauf en ce qui touche à la sécurité, comme je l'ai expliqué.
M. Gérard Binet: Ne serait-il pas possible que, de votre plein gré, vous vous rencontriez—M. Milton, Mme Robillard et M. Collenette—et décidiez de vous donner l'objectif de mettre plus de pression? Oui?
Mme Lucienne Robillard: Écoutez...
M. Gérard Binet: D'après moi, ce serait la chose à faire, parce que la philosophie d'une compagnie passe toujours par son président et, selon moi, M. Milton a le talent pour faire passer celle-ci. Je les voyais sortir hier; ils forment vraiment une équipe et, toujours selon moi, M. Milton est capable de diriger sa compagnie très facilement.
Mme Lucienne Robillard: Le message que vous soulevez est intéressant dans le sens que, lorsqu'on parle d'attitudes et de culture d'organisation, ça doit venir d'en haut. Et, comme vous le dites, il est le chef de la compagnie, donc, il devrait...
M. Gérard Binet: ...piloter sa compagnie.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Sénateur Setlakwe.
Le sénateur Raymond C. Setlakwe (Les Laurentides, Lib.): Il semble prévaloir ici une opinion voulant que, sans sanctions, on ne progressera vraiment pas dans ce domaine-là. Est-ce une façon de penser que le gouvernement a déjà partagée ou est prêt à endosser?
M. David Collenette: Il y a des pénalités qui relèvent du domaine de la sécurité, mais pas qui ont trait au service aux passagers.
Monsieur Pigeon va ajouter quelque chose.
Me Jacques Pigeon: En vertu de la partie X de la Loi sur les langues officielles, la cour peut rendre des ordonnances lorsqu'il y a infraction à la loi.
Je vais vous lire la disposition à l'effet que... C'est le paragraphe 77(4) de la Loi sur les langues officielles qui autorise la cour à rendre des ordonnances qu'elle estime justes et équitables dans les circonstances.
Dans certains cas, à ce qu'on m'a dit, des dommages ont été accordés quand des institutions fédérales avaient été trouvées coupables d'avoir manqué à leurs obligations. Les spécialistes que j'ai consultés m'ont parlé d'un arrêt de la Cour fédérale, qui s'appelle l'arrêt Leblanc. La cour a examiné s'il était possible, en s'appuyant sur ce paragraphe, d'accorder des dommages, et elle l'a fait. Elle a même examiné s'il était possible d'accorder des dommages qui puissent servir d'exemple, ce qu'elle n'a pas fait dans ce cas-là, sans exclure toutefois que cela puisse se faire. Je voulais seulement apporter cette précision.
Quant à moi, je crois que la raison pour laquelle le ministre nous dit que la Loi sur la participation publique au capital d'Air Canada ne prévoit pas de sanctions, c'est que le but de l'article 10 est simplement d'étendre la portée de la Loi sur les langues officielles. Cette dernière prévoit, aux parties IX et X, des mécanismes de mise en oeuvre, lesquels sont les mêmes pour Air Canada que pour les institutions fédérales.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Combien de temps avons-nous encore à notre disposition, monsieur et madame les ministres?
M. David Collenette: Il va falloir que je parte.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Permettez-moi, chers collègues, de poser deux ou trois petites questions rapides, quitte à ce que j'obtienne les réponses plus tard. Lorsqu'un gouvernement rédige une loi sur un sujet quel qu'il soit, est-ce la coutume de se fier à la bonne volonté de ceux qui ont le mandat de mettre en oeuvre la volonté du gouvernement? Lorsque le gouvernement ou le Parlement adopte une loi qui reflète sa volonté, si cette loi stipule qu'une institution doit faire telle ou telle chose, est-ce la coutume de se fier à la bonne volonté des êtres qui sont responsables de la mise en oeuvre de la loi, ou ne serait-il pas plutôt normal de prévoir des sanctions pour le cas où cette volonté ne serait pas respectée?
Mme Lucienne Robillard: Je ne suis pas avocate, mais je suppose que tel est le cas. Je crois que mon collègue peut mieux répondre que moi à cela, parce qu'au fond...
M. David Collenette: Je ne suis pas avocat.
Mme Lucienne Robillard: Sérieusement, la Loi sur les langues officielles contient un recours judiciaire que nous venons de vous expliquer, que Me Pigeon vient de vous expliquer. Suite à une plainte à la commissaire, cette plainte peut être déposée devant le tribunal et il peut y avoir une ordonnance de la cour. Je ne nommerai pas certains ministères qui se sont fait rappeler à l'ordre et qui ont été obligés d'agir en conséquence, mais ce recours a été utilisé et de façon très efficace. Il existe, mais cela fait partie de la Loi sur les langues officielles. Cela ne fait pas partie de la Loi sur Air Canada.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Quant à Air Canada, monsieur le ministre, vous dites que pour des questions sécuritaires et du respect des langues officielles, des sanctions peuvent être imposées, n'est-ce pas?
M. David Collenette: Oui, mais ce n'est pas en vertu de la Loi sur Air Canada, c'est en vertu de la Loi sur l'aéronautique.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): D'accord. Il existe des sanctions pour le non-respect de la dualité linguistique.
M. David Collenette: Oui.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): A-t-on déjà imposé des sanctions à un transporteur quelconque au pays?
M. David Collenette: [Note de la rédaction: inaudible]...avec les résultats.
Me Jacques Pigeon: Je pense qu'il y a eu très peu de plaintes. Nous avions expliqué, dans la lettre que vous aviez mentionnée, que lorsqu'on infligeait des pénalités à une corporation, des sanctions administratives ou des sanctions monétaires administratives, son nom était affiché sur le site Internet de Transports Canada où on publie les infractions et les mises en oeuvre des lois et des règlements en vertu de la Loi sur l'aéronautique.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Nous vérifierons. J'aimerais revenir sur un autre sujet qui m'a vraiment frappé. Plus tôt, on a dit que le gouvernement n'avait pas la responsabilité de faire respecter le pourcentage, le rapport entre les employés d'origine francophone et les employés d'origine anglophone. Je croyais que le gouvernement avait cette responsabilité.
Mme Lucienne Robillard: Les termes utilisés ont peut-être porté à confusion, monsieur le président. J'ai dit que notre tâche de surveillance nous amène à surveiller autant les parties 4, 5 et 6, qui comprennent la participation équitable. Surveiller cette partie de la loi fait donc partie de nos responsabilités.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Si on apprenait, car nous aurons dorénavant des statistiques plus précises, qu'Air Canada ne respecte pas cette partie de la Loi sur les langues officielles, quelles mesures le Conseil du Trésor pourrait-il ou entendrait-il prendre pour corriger cette lacune?
Mme Lucienne Robillard: Dans un tel cas, nous n'agirions pas seul. Cela se ferait en collaboration avec la commissaire aux langues officielles, qui reçoit aussi ce rapport sur la participation équitable. Pour toute institution fédérale, y compris Air Canada, dès qu'une lacune de ce genre est prouvée et documentée, nous nous asseyons ensemble pour trouver une piste de solution et établir un plan d'action, décider comment ce problème sera réglé. Nous procédons ainsi à chaque fois.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Sauvageau, vous pouvez poser une question rapide.
M. Benoît Sauvageau: La population canadienne souhaiterait probablement que vous soyez tous les deux ministres du Revenu. Je vous imagine dire que vous insistez pour que la population respecte la Loi de l'impôt sur le revenu. Si vous étiez ministre de la sécurité routière, vous diriez que vous insistez fortement pour qu'on roule à 100 km/h sur les autoroutes et que, si on ne le fait pas, vous établirez un plan d'action afin qu'on abaisse éventuellement un peu la limite de vitesse. Je pense que la population apprécierait beaucoup ce genre d'ouverture d'esprit de la part d'un ministre et verrait là un gouvernement vraiment plus libéral.
• 1635
La façon dont on gère une plainte est maintenant
assez claire. Si on ne se fait pas
répondre en ce qui concerne la porte de l'avion, on écrit à M.
Collenette. Si on ne se fait pas répondre en ce qui
concerne le verre
d'eau, on écrit à Mme Robillard. Si on ne se fait pas
répondre...
Voici ma question. J'aimerais vous permettre d'aller au fond de votre pensée, comme vous l'avez suggéré à M. Godin. Vous nous avez très bien démontré que la loi ne fonctionnait pas. Pour ma part, j'ai parlé d'un formulaire, mais c'était peut-être trop simple. Madame Robillard et monsieur Collenette, donnez-moi un geste concret qui pourrait être posé pour améliorer l'application de cette loi. Si l'idée du formulaire est trop simple, trouvez-m'en une autre. Nommez-moi chacun une chose concrète qui pourrait être faite.
M. David Collenette: Je prends note de votre suggestion.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): [Note de la rédaction: inaudible] ...un peu de respect. On fonctionne bien.
M. Yvon Godin: [Note de la rédaction: inaudible].
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Oui, oui. Je pense qu'on fait du chemin. Y a-t-il d'autres commentaires?
Mme Lucienne Robillard: Je trouve dommage qu'on utilise ce ton, parce que je pense qu'on est tous préoccupés par la problématique qui est devant nous. Comme je vous l'ai dit au début, je reconnais tout le travail qui a été fait par le comité et je pense que des pas en avant ont été faits. Le problème a été reconnu de façon formelle par le président de la compagnie, qui était devant vous hier. Je me trompe peut-être, mais à ma connaissance, c'était la première fois que le président de la compagnie reconnaissait publiquement le problème, dans le cadre des travaux parlementaires, et s'engageait à déposer un plan d'action pour 2002 et à signer une entente avec le Commissariat aux langues officielles pour régler le problème avec l'aide des syndicats. Je ne dis pas que la situation est parfaite. Je dis juste que des pas en avant sont faits.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Sénateur Gauthier, une question.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Monsieur Collenette, madame Robillard, j'ai l'impression que l'industrie aérienne se sert de plus en plus de petits avions plutôt que de gros avions dans l'Est, dans l'Ouest et dans le Nord. Après la discussion qu'on a eue avec M. Milton hier, j'ai aussi l'impression qu'il a un personnel dont la tête est surchargée d'unilingues et qui, dans le bas, perd ses employés bilingues. C'est ce que j'ai retenu de ce qu'il nous a dit hier.
[Traduction]
Au sommet, il y a une pléthore d'unilingues et, très peu d'employés bilingues, et cela lui pose un énorme problème. Est-ce que vous comprenez cela? Est-ce que mon interprétation de la situation est trop poussée? Vous pourriez peut-être me reprendre si c'est le cas.
M. David Collenette: Posez-moi d'abord votre question.
[Français]
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Il nous a dit hier qu'il avait un plan d'action. Une de ses adjointes nous a répondu que le plan d'action serait disponible d'ici la fin de l'hiver, probablement avant le mois de mars. J'imagine que dans le plan d'action, il sera question de consultations avec le Conseil du Trésor et le ministère des Transports. Comment peut-on résoudre le problème?
Hier, M. Milton semblait vouloir nous demander de l'argent pour l'aider à faire la formation de ses employés. Pour ma part, je n'étais pas trop sympathique à cela. J'ai dit que j'entendais parler de cela depuis 1971. J'ai regardé mes rapports annuels. On parle de formation linguistique depuis 1971. Il ne me fera pas croire qu'il n'a pas eu le temps de changer ses méthodes d'embauche. En tout cas, si vous avez l'intention de lui donner de l'argent pour la formation, pensez-y sérieusement. Voilà le commentaire que je voulais faire.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Godin, une dernière question. On terminera après cela.
M. Yvon Godin: Cette dernière question s'adresse à vous, monsieur Collenette. Vous parliez plus tôt de la sécurité. Est-ce que la sécurité est assurée seulement quand l'avion décolle et atterrit? Y a-t-il de la sécurité entre le décollage et l'atterrissage? Quand je monte dans un avion où il y a seulement un anglophone, il met une cassette en français pour me dire de mettre ma ceinture de sécurité et toutes ces bonnes choses-là. Jusque-là, c'est correct. Mais si l'avion commence à tomber, qui va me dire quelles sont les procédures de sécurité en français?
M. David Collenette: Je pense que vous avez raison. Mais la sécurité couvre toute la sécurité dans l'avion, celle des aspects mécaniques et aussi des services. Je pense que vous avez raison.
M. Yvon Godin: Une autre question très courte et très simple.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Vous avez eu le dernier mot hier. Je vais donner le dernier mot aujourd'hui à notre nouvelle sénatrice, membre du comité, madame Léger.
La sénatrice Viola Léger (Nouveau-Brunswick, Lib.): Ma première question se rattache aux mises à pied qu'on a dû faire. On a dit que cela s'appliquait aux plus jeunes. Est-ce que, avant la fusion d'Air Canada et de Canadien, cette dernière tombait sous le coup de la même loi qu'Air Canada?
M. David Collenette: Non.
La sénatrice Viola Léger: Non. C'est peut-être pourquoi maintenant, tout à coup, on est passé de 20 000 à 40 000 et qu'automatiquement, le bloc d'employés compte moins de personnes. Ce doit en être la raison, et non seulement les événements du 11 septembre.
M. David Collenette: C'était un défi pour Air Canada de fusionner deux compagnies dont une respectait la Loi sur les langues officielles et l'autre non.
La sénatrice Viola Léger: C'est là la raison. Merci beaucoup.
Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Madame Robillard et monsieur Collenette, je vous remercie. Si les membres du comité ont d'autres questions, nous allons les recueillir et vous les acheminer par écrit. Merci de votre comparution.