Passer au contenu

PDAM Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Opinion complémentaire

Soumise au Comité mixte spécial sur l’aide médicale à mourir
par les députés néo‑démocrates Brigitte Sansoucy (Saint-Hyacinthe-Bagot) et Murray Rankin (Victoria)

Le Comité a travaillé avec diligence –– malgré les courts délais et le caractère très délicat de la question –– pour présenter un rapport reflétant la diversité des témoignages recueillis, et faire d’importantes recommandations que le gouvernement devra prendre en compte dans sa réponse législative. Il s’agit d’un rapport auquel nous avons consacré beaucoup de temps et de soin et que nous sommes fiers d’appuyer. À ce propos, nous tenons à remercier chacun des 61 témoins qui se sont mis à la disposition du Comité ainsi que tout le personnel dévoué grâce à qui le Comité a pu s’acquitter de son mandat dans les délais prévus.

Nous tenons néanmoins à soumettre la présente opinion complémentaire afin de fournir aux Canadiens des informations additionnelles, qui viendront compléter celles contenues dans le rapport principal et qui, selon nous, les aideront à mieux comprendre le contexte dans lequel le Comité a travaillé ainsi que les choix qui s’offrent au gouvernement. Le gouvernement devra d’ailleurs continuer d’engager les Canadiens dans les démarches qu’il entreprendra.

Adopter une approche fondée sur des principes pour légiférer en matière d’aide médicale à mourir.

Les néo‑démocrates croient qu’en matière de politiques de la santé, une approche centrée sur le patient est de mise. Dans le cas de l’aide médicale à mourir, cette approche est la seule façon de se montrer attentif aux problèmes complexes et délicats auxquels font face les malades et leurs proches, et sensible à l’urgence de la situation dans laquelle ils se trouvent eu égard à leurs souffrances. Pourtant, pendant les cinq mois qui ont suivi la décision unanime de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Carter, le gouvernement précédent a décidé non seulement de ne pas s’en remettre au Parlement, mais en plus de ne pas consulter les Canadiens. Par son inaction, le précédent gouvernement  a affiché son mépris pour cette approche centrée sur le patient et a manqué à son devoir de gouverner pour tous les Canadiens, particulièrement pour ceux dont les souffrances préoccupaient la Cour et ce comité. Ces cinq mois perdus ont créé des difficultés additionnelles que le Comité s’est efforcé de surmonter de façon admirable. Ayant maintenant reçu le rapport du Comité, le gouvernement doit agir afin de présenter un projet de loi qui protégera les droits de ces patients garantis par la Charte canadienne des droits et libertés.

Le projet de loi devra tenir compte non seulement des recommandations particulières qu’a formulées le Comité dans son rapport principal, mais aussi des principes qui ont guidé ses délibérations. Il devra veiller à ce que le droit de chaque patient admissible à l’aide médicale à mourir soit respecté, et à ce que tous les professionnels de la santé s’y objectant pour  des raisons de conscience soient à l’abri de sanctions disciplinaires. Le projet de loi devra aussi respecter l’autonomie et le libre arbitre des patients –– en les protégeant contre toute violation de leur vie privée et en veillant à ce que leurs droits ne soient pas bafoués pour des considérations bureaucratiques arbitraires ––, et ce tout en mettant en place des garanties efficaces pour protéger les personnes vulnérables. Reconnaissant la valeur du travail entrepris par les provinces et les territoires depuis la décision Carter, ainsi que du processus de consultation exemplaire suivi par le Québec dans le cadre du projet de loi 52, le gouvernement fédéral devra suivre une approche axée sur le fédéralisme de collaboration, dans le respect des compétences provinciales tout en faisant preuve du leadership nécessaire pour éviter des disparités régionales.

En tant que parlementaires, les députés néo‑démocrates comprennent qu’en dépit de leurs possibles différences de vues sur la question de l’aide médicale à mourir, chaque parlementaire doit être guidé par ses valeurs, l’intérêt supérieur de ses concitoyens et le respect des diverses opinions des Canadiens alors que nous tentons de protéger les droits de tous et chacun garantis par la Charte.  Nous avons été heureux de constater que tous les membres du Comité partageaient la volonté de travailler de manière non partisane et respectueuse. C’est ce à quoi s’attendent les Canadiens du Parlement. Nous espérons que cette approche puisse être maintenue dans les prochains mois alors que le  Parlement devra se pencher sur la législation suivant le rapport du comité.

Respecter les priorités des Canadiens : Étendre les soins palliatifs et soutenir les aidants naturels.

Dans le mandat qu’il a reçu du Parlement, le Comité devait formuler des recommandations sur une réponse fédérale à l’aide médicale à mourir « respectueuse de la Constitution, de la Charte canadienne des droits et libertés et des priorités des Canadiens ».

La nécessité d’améliorer les soins palliatifs a été soulignée par chacun des témoins interrogés sur la question par le Comité, réaffirmée par des représentants de tous les partis, de même que par les  deux chambres du Parlement. Récemment, cet enjeu a fait l’objet d’une motion déposée par le député du NPD Charlie Angus (Timmins-Baie James) et adoptée pratiquement à l’unanimité à la Chambre des communes en 2014. Ceci est la preuve on ne peut plus manifeste que les soins palliatifs sont réellement une priorité pour les Canadiens, inextricablement liée à la question de l’aide médicale à mourir.

À notre avis, formuler des recommandations sur l’amélioration des soins palliatifs faisait partie intégrante du mandat du Comité et est essentiel pour répondre de façon équilibrée à la question de l’aide médicale à mourir. Nous avons donc proposé un ensemble de mesures concrètes pour améliorer les soins palliatifs au pays.

Plusieurs motions proposées par M. Rankin le 4 février 2016 font l’objet de recommandations dans le rapport final; elles concernent :

  • le rétablissement du Secrétariat des soins palliatifs;
  • la création d’une stratégie pancanadienne de soins palliatifs et de fin de vie dûment financée;
  • l’offre de services adaptés à la culture et aux croyances des communautés autochtones.

Les néo-démocrates croient tout de même que le rapport aurait pu aller plus loin et qu’il aurait dû présenter des recommandations qui s’inscrivent dans le mandat du Comité et sur lesquelles le gouvernement se doit d’agir.  Ces omissions sont une occasion manquée, mais pas encore perdue. En plus de suivre les recommandations figurant dans le rapport principal, le gouvernement pourrait :

  1. 1.    Faire preuve de leadership en fournissant des soins palliatifs dans la sphère de juridiction du gouvernement  fédéral.
  2. Les soins palliatifs peuvent et doivent être améliorés, et le gouvernement fédéral a beaucoup de latitude pour agir. En effet, le gouvernement fédéral est le cinquième fournisseur de soins de santé en importance au Canada, puisqu’il sert des populations particulières, comme les Premières Nations et les Inuits, les anciens combattants ainsi que les membres en service des Forces armées canadiennes. En prenant des mesures là où il a compétence, le gouvernement fédéral pourrait améliorer les soins offerts à un grand nombre de Canadiens et montrer ainsi l’exemple aux provinces et aux territoires.
  3. 2.    Soutenir les familles canadiennes en bonifiant les prestations de compassion.
  4. Les familles qui prennent soin d’un être cher peuvent être aux prises avec des difficultés chroniques de nature financière, physique ou psychologique. Soutenir les aidants naturels procure des avantages considérables, en soulageant non seulement les familles, mais aussi le système de santé.
  5. En raison des pressions exercées, l’ancien gouvernement a adopté la proposition du NPD consistant à faire passer les prestations de compassion  versées dans le cadre de l’assurance‑emploi de six semaines à six mois. Malheureusement, il a omis d’élargir les critères d’admissibilité, de sorte que trop de familles prenant soin d’un proche sont encore laissées pour compte.
  6. Nous croyons que les familles devraient pouvoir profiter de ce soutien, pas uniquement pour prendre soin d’un être cher atteint d’une maladie terminale, mais aussi pour faire face à d’autres types de problèmes de santé sérieux de leurs proches qui les obligent à s’absenter du travail.

Voir le contexte de la santé dans son ensemble.

Le rapport du Comité aborde plusieurs questions, qualifiées de « considérations secondaires », notamment la nécessité de consulter véritablement les communautés autochtones, d’offrir un meilleur soutien en santé mentale, d’améliorer les soins palliatifs et d’avoir une stratégie nationale en matière de démence.

Nous tenons à saluer les initiatives de plusieurs parlementaires, qui ont travaillé fort pour s’attaquer à ces priorités des Canadiens, notamment le projet de loi sur la prestation de soins continus aux Canadiens, de l’ancienne députée Libby Davies; le projet de loi de l’ancien député Claude Gravelle concernant la création d’une stratégie nationale sur la démence; et la motion du député Charlie Angus pour établir une stratégie pancanadienne en matière de soins palliatifs et de fin de vie.

Les néo-démocrates considèrent que ces questions sont intrinsèquement liées à l’aide médicale à mourir, mais qu’elles sont aussi essentielles à la réussite du modèle de santé publique canadien du XXIe siècle. Les Canadiens revendiquent un meilleur accès aux soins de première ligne et le renforcement du continuum des soins, notamment en ce qui concerne les soins à domicile, les soins de longue durée et les soins palliatifs. Ils réclament une plus grande égalité dans l’accès et les résultats, peu importe l’endroit où ils vivent au Canada. Ils demandent aussi que le gouvernement non seulement soutienne fermement la Loi canadienne sur la santé, mais qu’il s’engage aussi à la faire appliquer pleinement d’un océan à l’autre. Ils souhaitent finalement qu’on règle le problème honteux du manque de soins dans les réserves et qu’on traite les communautés autochtones comme des partenaires à part entière dans le développement et la mise en œuvre de programmes de santé.

Nous exhortons donc le gouvernement à ne pas traiter isolément la question de l’aide médicale à mourir, mais à l’aborder dans une perspective plus large en tenant compte des liens avec d’autres aspects des politiques sur la santé, notamment les déterminants sociaux de la santé. En effet, les néo‑démocrates reconnaissent que ces déterminants — comme le revenu, le statut social, le niveau de scolarité, les conditions de travail, l’environnement social et les réseaux d’entraide, le sexe et un développement sain durant l’enfance — jouent un rôle dans les conditions de santé. Ces déterminants doivent être pris en considération, dans l’aide médicale à mourir, afin de voir comment ils pourraient avoir une incidence sur la santé, l’accès aux soins et la vulnérabilité des personnes. Le gouvernement doit prendre des mesures pour lutter contre la pauvreté et s’attaquer à l’insécurité alimentaire croissante ainsi qu’au manque de logements abordables, afin que les Canadiens soient davantage sur un pied d’égalité lorsqu’ils seront appelés à prendre des décisions de fin de vie.

Pour conclure, nous sommes fiers d’appuyer le rapport principal du Comité et voulons souligner le dévouement de tous nos collègues qui ont travaillé à nos côtés tout au long de la préparation de ce rapport. Ayant abordé le mandat du Comité dans une perspective plus large, nous pressons le gouvernement de prendre acte des enjeux et recommandations mis de l’avant dans la présente opinion complémentaire et de saisir cette occasion pour agir conformément aux priorités de tous les Canadiens.