Le troisième séminaire sur le concept
stratégique, intitulé « Les partenariats de l’OTAN et leur
évolution », a eu lieu le 14 janvier 2010 à Oslo. L’événement a réuni des
membres du groupe d’experts sur le nouveau concept stratégique de l’OTAN, des
représentants gouvernementaux et militaires, des représentants d’organismes
internationaux et d’ONG, des experts indépendants et des journalistes. Y
étaient aussi bien représentés les pays partenaires de l’OTAN et d’autres
forums de coopération. Le Sénateur Pierre Claude Nolin a été le représentant
du Canada.
PARTENARIATS
RENSEIGNEMENTS GÉNÉRAUX
·L’OTAN compte plus de partenaires que de
membres. La plupart des participants ont convenu de la nécessité de réévaluer
la structure et les buts du système actuel de partenariats. Les intervenants
des pays partenaires ont fait remarquer que le système ne répond pas
adéquatement à leurs besoins et qu’il y a un fossé important entre leurs
attentes et la réalité. Il faudrait que l’OTAN et les gouvernements partenaires
trouvent un juste équilibre entre les attentes démesurées et les réalisations
trop modestes. Les partenariats doivent être mutuellement avantageux. L’OTAN
doit être attrayante pour les partenaires.
·Le système actuel trouve son origine dans les
réalités stratégiques des années 1990, alors que les partenariats
provenaient principalement des demandes des partenaires d’Europe centrale et de
l’Est; ceux-ci voulaient se rapprocher de l’OTAN et leurs demandes
s’inscrivaient dans les préparatifs en vue de leur adhésion. Il s’agit
maintenant de voir comment rendre le système attrayant à une plus grande
diversité de pays qui ne cherchent pas particulièrement à se rapprocher de
l’Alliance, mais où il existe des occasions de dialogue et de coopération
mutuellement bénéfiques en matière de sécurité.
·Plusieurs intervenants ont fait observer que les
valeurs fondamentales et l’engagement des partenaires à l’égard d’une
coopération efficace correspondent à des degrés variables avec celles de
l’Alliance. Il y a un groupe de pays qui embrassent les valeurs fondamentales
de l’OTAN, qui ont des problèmes de sécurité communs et qui sont profondément
déterminés à resserrer les liens avec l’Alliance. Un autre groupe de
« partenaires clés » ne partagent pas les valeurs fondamentales de l’OTAN
et ne cherchent pas à soutenir un engagement plus étroit avec l’OTAN, mais
trouvent l’entité utile pour coopérer dans certains domaines. Les alliés
devraient-ils accepter cette situation ou établir une différence pour ce qui
est de la portée des partenariats en fonction de l’engagement à l’égard des
valeurs communes et du niveau de cet engagement? Un intervenant a avancé que le
respect du principe de l’auto-différentiation constitue le meilleur moyen de
s’assurer que les partenariats ne s’attendent pas à trop ni n’exigent trop peu.
BUT
·La vision et le but des partenaires actuels ne
sont pas clairs. Nombre de partenaires ont le sentiment que l’OTAN sollicite
activement leurs contributions aux opérations en cours, mais ils ne voient pas
une direction stratégique claire dans leurs relations.
·L’architecture de partenariat devrait-elle être
établie selon une coopération opérationnelle ou une fonction plus vaste? Un
intervenant a demandé quels partenariats sont engagés pour ou contre le
contexte de sécurité mondiale en évolution? Il a affirmé que les buts du
partenariat ont quelque peu évolué par défaut pour traiter des défis urgents de
sécurité, allant de l’instabilité dans les Balkans au cours des
années 1990 au terrorisme transnational depuis 2001, en passant par les
ruptures de la stabilité mondiale et commerciale observées plus récemment.
Quelques partenaires et membres de l’OTAN ont des préoccupations plus
traditionnelles et ne sont pas pleinement engagés dans ce programme mondial.
Certains partenaires participant aux efforts en Afghanistan le font en grande
partie parce qu’ils veulent attirer l’attention et obtenir le soutien des
États-Unis. Y a-t-il lieu de replacer les opérations en cours et d’autres
formes de coopération dans un contexte plus stratégique et plus mondial?
·Plusieurs participants ont soutenu que la
structure des partenariats est largement attribuable à la coopération
opérationnelle, mais qu’elle pourrait servir à atteindre des objectifs plus
vastes, tels que la stabilité et la compréhension régionales.
·En général, les intervenants étaient d’accord
pour dire que la flexibilité devrait demeurer une caractéristique importante
des partenariats : aucune solution ne peut être universelle. Plusieurs
d’entre eux ont bien accueilli les approches spécialisées fonctionnelles et
régionales, par exemple dans la mer Noire et la mer Caspienne, mais se sont
opposés aux répartitions régionales des tâches qui leur feraient assumer ou
limiteraient les responsabilités régionales. L’OTAN et ses partenaires pourraient
augmenter la coopération avec les structures régionales existantes et divers
pays, en particulier avec ceux qui ne sont pas membres d’organismes de
sécurité. Selon certains autres, l’OTAN devrait éviter d’apposer des étiquettes
régionales qui créeraient des « arrière-cours », où certains
organismes voudront jouer un rôle de leadership. Il est important de conserver
les liens Est-Ouest et d’éviter ainsi de régionaliser à l’excès.
·Ressources : Les notes du Partenariat
pour la paix – Document cadre font remarquer que les partenaires
devraient financer leur participation à des activités et des exercices de
partenariat. Un intervenant a fait observer que les ressources limitées
disponibles pour les activités de partenariat ont mené à l’engagement inégal de
certains pays. Il a proposé de solliciter un financement commun et des
contributions volontaires. Les alliés et les partenaires pourraient créer des
fonds fiduciaires pour des domaines de coopération de même que pour certains
pays ayant besoin d’aide.
·Consultations sur des enjeux de sécurité : Plusieurs intervenants ont demandé de rendre le dialogue au
sein de l’EAPC plus centralisé et plus axé sur les préoccupations stratégiques
communes aux membres et aux partenaires de l’OTAN. Au paragraphe 8 du Partenariat
pour la paix – Document cadre, l’OTAN s’engage à consulter tout
participant actif dans le Partenariat pour la paix dans le cas où celui-ci
perçoit une menace directe à son intégrité territoriale, à son indépendance
politique ou à sa sécurité. Un intervenant a mentionné que la guerre entre la
Russie et la Géorgie a montré que de telles consultations étaient
insuffisantes. Cet intervenant a plaidé pour la mise au point d’un nouveau
système de garanties pour certains partenaires vulnérables, différent de celui
de l’Article 5 et plus robuste que les consultations. Cependant, certains
ont avancé que de telles étapes pourraient diluer la valeur de
l’Article 5.
DIALOGUE MÉDITERRANÉEN (DM) ET
INITIATIVE DE COOPÉRATION D’ISTANBUL (ICI)
·Dimension régionale : Les intervenants ont signalé que l’OTAN a adapté des
approches individuelles aux pays de la région (voie Nord-Sud), mais n’a pas
élaboré une dimension sous-régionale qui aiderait le développement d’une
architecture de sécurité commune. Cela est important, car nombre d’enjeux de
sécurité sont transversaux. L’auto-différentiation extrême n’est pas utile, car
elle amène un élément de concurrence et de rivalité entre les pays. Un
intervenant a fait remarquer que les observateurs dans la région posent les questions
suivantes : L’OTAN cherche-t-elle à assurer ses intérêts en matière de
sécurité dans la région, de sécurité à l’échelle régionale ou de sécurité de
divers régimes? Un autre participant a fait une proposition selon laquelle le
Groupe consultatif sur la politique atlantique devrait explorer des moyens de
rassurer la région au sujet des intentions de l’OTAN et améliorer les attitudes
envers l’alliance au moyen d’initiatives diplomatiques publiques conjointes. La
coopération avec l’OTAN n’a aucune incidence sur les conflits locaux
(p. ex. le Maroc et l’Algérie sont davantage engagés dans la
coopération en matière de sécurité à titre individuel avec l’OTAN qu’entre
eux-mêmes, bien que cela s’applique aussi aux relations avec l’UE). Un
intervenant a invité l’OTAN à établir des relations avec le Conseil de
coopération du Golfe pour soutenir la coopération en matière de sécurité visée
par les États concernés et tenter d’amener les pays méditerranéens à collaborer
davantage entre eux-mêmes. Pour ce qui est des liens entre le DM et l’ICI, il
existe des points communs entre les deux, mais dans l’ensemble, l’OTAN devrait
conserver des approches différentes.
·Relations entre le DM et l’ICI : Il existe une croyance répandue selon laquelle le DM
constitue un partenariat de seconde classe, la région n’ayant aucune
« Russie » sur laquelle attirer une attention sérieuse de l’OTAN.
Cette dernière perd son rôle de stabilisateur lorsqu’elle traverse la mer
Méditerranée. Il existe un risque de militariser la réponse aux défis sociaux
comme la migration ou de traiter seulement les conséquences, par opposition aux
causes profondes. Un intervenant a avancé que l’ICI devrait être plus inclusive
et étendue à l’Iraq et au Yémen à un moment donné dans l’avenir, vu leur
importance concernant la sécurité régionale. Cependant, on a également fait
observer que l’Arabie Saoudite et l’Oman ont une certaine réserve à l’égard de
l’ICI.
·Domaines de collaboration potentielle : Il faut mettre davantage l’accent sur les approches
multilatérales – l’objectif du DM devrait consister à stabiliser la
région. L’OTAN devrait envisager d’élaborer un document sur le but stratégique
du DM, car il manque un acte fondateur ou un document cadre comme celui du
Partenariat pour la paix; ce document devrait comprendre des activités
transsectorielles. La discussion sur la dénucléarisation, la
contre-prolifération, y compris la prolifération balistique suscite l’intérêt
(on pourrait notamment se pencher sur l’impact dans la région de l’examen des
défenses antimissiles balistiques des É.‑U.). Un intervenant a mentionné
que l’OTAN devrait éviter la réforme du secteur de la sécurité, car c’est un
dossier très sensible et la participation de l’OTAN effraierait des
représentants gouvernementaux : dans la région, la sécurité nationale, la
sécurité du régime et même la sécurité de la famille au pouvoir sont
inextricablement liées. Un intervenant a soutenu que les petits États du Golfe
entretiennent une importante coopération en matière de sécurité bilatérale avec
plusieurs gouvernements alliés et que l’engagement de l’OTAN pourrait être
mieux coordonné avec ces efforts afin d’assurer une répartition efficace des
tâches et de clarifier la valeur ajoutée apportée par l’OTAN.
·Israël : Un
intervenant a fait remarquer qu’Israël a bien accueilli l’engagement et la
coopération de l’OTAN au Moyen-Orient pour ce qui est des défis de sécurité
mondiale. Israël adapte sa philosophie en matière de sécurité en fonction de
son autonomie quant à l’adoption des principes de coopération en matière de
sécurité. Actuellement, Israël veut approfondir ses relations bilatérales avec
l’OTAN sans tout à fait en devenir membre, en s’engageant dans un éventail de
programmes du Partenariat pour la paix. Cela pourrait créer des tensions avec
d’autres partenaires du DM. Il devrait être possible de créer une entité de
coopération englobante, ce qui continuerait de permettre à différents pays de
suivre leur propre voie. Dans l’ensemble, l’OTAN est de plus en plus pertinente
pour Israël. Néanmoins, il faudrait en faire plus concernant certains aspects
découlant des nouvelles menaces dans la région – l’Iran, le partage de
renseignements, la coopération, les exercices et la planification
anti-terroristes. En ce qui a trait au processus de paix au Moyen-Orient, le
partenariat d’Israël avec l’OTAN ne devrait pas être considéré comme un moyen
d’éviter le processus, mais de renforcer ce dernier, car il donne à Israël un
sentiment de sécurité. L’OTAN devrait en fait considérer une position qui
précède le processus de paix. Un intervenant a avancé que même l’adhésion à
l’OTAN n’est pas à écarter après la conclusion d’un accord de paix au
Moyen-Orient. L’OTAN pourrait également jouer un rôle de garant de l’accord de
paix israélo-palestinien. On a indiqué que cette double perspective rassurait
Israël quant à la conclusion d’un accord de paix. Autrement, les tensions
sous-jacentes habituelles entre les pays du DM et de l’ICI ont refait surface
durant les discussions – les États du Golfe ne veulent aucune participation
d’Israël à l’ICI (bien que celui-ci soit officiellement un État du Golfe). Un
intervenant a soutenu que les soupçons voulant qu’Israël cherche à influencer
le concept stratégique de l’OTAN au moyen d’une campagne organisée n’aideront
pas à convaincre les pays du DM dans le cadre du nouveau processus de concept
stratégique (voir l’article du Jerusalem Post du 13 janvier).
RUSSIE
·Un intervenant d’un pays membre de l’OTAN a
présenté plusieurs propositions concernant l’avenir des relations entre l’OTAN
et la Russie, faisant observer la nécessité de restituer la confiance à la
suite des différends survenus au cours des dernières années :
1)Il faut atteindre un nouveau niveau de transparence : la
confiance ne peut être rebâtie du jour au lendemain et exige des mesures
précises; par exemple, un dialogue sur la planification de la défense (une
proposition russe).
2)Renforcement de la confiance : Le
document de Vienne de l’OSCE comprend un certain nombre de mécanismes
militaires qui pourraient renforcer la confiance et être utilisés plus
efficacement, et on pourrait également élaborer des mesures bilatérales pour
renforcer la confiance; par exemple, le Conseil OTAN-Russie (COR) pourrait
élaborer une liste exhaustive de situations de crise pour éviter des problèmes
à l’avenir.
3)Mettre en œuvre le programme de travail du COR pour 2010 :
cela représente une bonne feuille de route et de bons exercices à réaliser
ensemble sur la base d’un examen conjoint des menaces; par exemple, porter
secours aux sinistrés dans la région baltique.
4)Mener des activités de sécurité maritime d’intérêts et de
bienfaits mutuels; par exemple, des exercices conjoints de lutte contre la
piraterie.
5)Le groupe de travail ayant connu le plus de succès est celui portant
sur la défense antimissile balistique : l’examen des défenses
antimissiles balistiques des États-Unis offre une occasion supplémentaire
d’action coopérative dans ce domaine; par exemple, des exercices sur table et
des séances de préparation en vue d’un exercice de tir réel.
6)Le COR devrait servir à des discussions et des résolutions de
crises plus fondamentales : il doit devenir plus résistant aux crises
potentielles – l’OTAN a commis une erreur en suspendant le COR en
août 2008, car celui-ci n’est pas un établissement visant à rééquilibrer
les pouvoirs politiques; il pourrait plutôt constituer un mécanisme utile pour
la gestion de crises.
7)La Russie est en train de transformer ses forces militaires :
l’OTAN pourrait l’aider dans ses efforts de modernisation.
8)L’OTAN devrait maintenir une politique de porte ouverte envers la
Russie : l’argument voulant que la Russie ne demandera pas l’adhésion
à l’OTAN n’est pas coulé dans le béton; ainsi, l’OTAN devrait commencer à
envisager quels seraient les paramètres nécessaires à l’adhésion et quels
autres la Russie devrait modifier avant de pouvoir devenir membre.
·Relations avec la Russie : Un intervenant russe a formulé un commentaire selon lequel
la coopération dans certains domaines ne signifie pas nécessairement qu’on
établit un partenariat coopératif. Un autre intervenant a avancé qu’il
s’agissait d’une relation transactionnelle et non un partenariat dans le sens
où Moscou cherche à lier la coopération en Afghanistan à un frein à
l’élargissement de l’OTAN. En réalité, c’est que le partenariat est plus faible
que durant les années 1990. Le sommet du partenariat a été atteint lors de
la participation de la Russie aux opérations de mise en œuvre de la paix au
sein de la SFOR en Bosnie-Herzégovine. Un intervenant russe a fait observer que
le dialogue entre l’OTAN et la Russie n’a pas amélioré la confiance. Le premier
ministre Poutine a exprimé sa déception par rapport au fait que la
représentation de l’OTAN dans le cadre de réunions se fait au moyen d’une
position établie et coordonnée qui laisse peu de place au compromis. La crise
géorgienne a montré la valeur ajoutée limitée du partenariat étant donné que
celui-ci peut être suspendu. Un intervenant a affirmé que la balle est dans le
camp de la Russie et qu’elle devra décider ce qu’elle veut : un
partenariat, de la realpolitik ou une relation de premier plan. Le nombre
décroissant de partisans russes du partenariat avec l’OTAN constitue un
problème. Cependant, un intervenant russe a soutenu que le président Medvedev
ouvre des portes, car il est favorable aux perspectives d’établissement de
bonnes relations avec l’OTAN, et la crise économique a poussé Moscou à revoir
toute sa vision du monde. Le défi pour l’OTAN est de trouver un nouveau modus
vivendi avec la Russie. La coopération en Afghanistan dans le cadre du
Programme d’aide à la distribution dans le Nord peut aider dans une certaine
mesure. Cependant, la priorité de la Russie consiste à continuer à exercer de
l’influence en Asie centrale et dans le Caucase, et elle est profondément
sceptique par rapport aux intentions des États-Unis et de l’OTAN dans la
région. Elle mettra en péril ses relations avec l’Occident pour défendre ses intérêts
là-bas. Historiquement, comme la Russie est un intégrateur et non un intégré,
elle se méfie aussi des institutions européennes. Un intervenant a offert
quatre solutions de rechange :
1)Le modèle bureaucratique composé de groupes de travail et de
conférences, qui est mieux que rien, n’est toutefois pas assez, ce qu’indiquent
les résultats de la réunion ministérielle de décembre.
2)Une coopération pratique dans des enjeux sectoriels : sûreté en mer, sécurité maritime, etc., non essentielles aux
intérêts en matière de sécurité.
3)Une coopération entre l’OTAN et l’OTSC
au lieu d’une coopération bilatérale, telle que l’a proposée Zbigniew
Brzezinski, bien que deux intervenants aient fait remarquer que même si l’OTSC
a développé une coopération utile sur des questions de sécurité frontalière,
cette organisation n’a pas encore été éprouvée et elle pourrait avoir plus
d’utilité en Asie centrale que dans le Caucase, où seulement l’Arménie en fait
partie. Plusieurs participants ont proposé que l’OTAN explore également un
partenariat avec l’Organisation de coopération de Shanghai, qui a favorisé le
contre-terrorisme et la lutte contre les stupéfiants en Asie centrale.
4)Une approche plus stratégique à savoir la formation d’un groupe de
travail visant à étudier l’intégration potentielle de la Russie.
·Plan de Medvedev :
Selon un intervenant, le plan reflète le désir de la Russie de se faire
entendre sur des enjeux qui soulèvent des préoccupations particulières et
d’avoir le sentiment qu’elle a établi un nouveau forum permettant de mieux
répondre à celles-ci. Il subsiste encore de la frustration liée au fait que
l’OTAN a survécue et que l’Organisation du Traité de Varsovie s’est éteinte, ce
qui explique certaines des réserves au sujet de la coopération entre l’OTAN et
la Russie. Le processus de Corfou est le forum approprié pour traiter de cela,
parce qu’il réunit tous les intervenants et offre une approche complète en
matière de sécurité. Les résultats de Corfou sont quand même décevants et ils
risquent de diluer la dimension humaine de l’OSCE, qui est essentielle. Les
propositions russes devraient être prises en compte si elles fournissent une
valeur ajoutée à la sécurité de l’Alliance. Un intervenant a mentionné que le
plan de Medvedev était l’équivalent du Concert européen du XIXe siècle.
·Stratégie rassurante : Un intervenant russe a affirmé que le renforcement de
l’Article 5 par des exercices militaires renouvelés est inutile et qu’il
pourrait mener à la remilitarisation des régions frontalières étant donnée la
probabilité nulle d’une attaque russe. Un autre intervenant a soutenu que les
militaires russes connaissaient une crise grave; moins de 10 % des
effectifs militaires auraient atteint un seuil de préparation élevée et nombre
de commandants supérieurs sont en train de se faire remplacer en raison des
échecs opérationnels mis au jour durant la guerre avec la Géorgie.
L’intervenant a néanmoins convenu qu’un conflit entre la Russie et l’OTAN était
toujours possible en raison d’un risque d’escalade. Un participant a fait remarquer
que la Russie devrait également en faire plus pour rassurer ses voisins, faire
un usage plus intensif du document de Vienne et d’autres mesures de
transparence. Un autre intervenant a fait une mise en garde, affirmant que la
« spirale de rassurance » pourrait se révéler improductive.
·Politique de la porte ouverte : Plusieurs intervenants ont insisté pour qu’on prenne en
compte la volonté d’élargissement de la Russie, particulièrement en matière
d’économie, bien que ce pays ne dispose d’aucun droit de veto. La Géorgie et
l’Ukraine représentent des tests clés en ce qui a trait aux relations entre la
Russie et l’OTAN. D’après un intervenant, l’adhésion rapide des voisins de la
Russie aggravera le contexte de sécurité européen. Selon d’autres intervenants,
le problème réside dans le fait que la Russie se préoccupe du manque de
codification ou d’officialisation de la situation actuelle. L’adhésion de la
Russie à l’OTAN ne doit pas être exclue. En fait, l’OTAN devrait évaluer tous
les avantages et inconvénients de l’adhésion de la Russie et les coûts sur le
système de sécurité de l’Europe encore divisé, en réalisant quelque chose de
semblable au rapport Cecchini (un rapport de 1988 qui a examiné les avantages
et les coûts de la création d’un marché européen unique). Le défi existentiel
de l’OTAN consiste à savoir si la participation de la Russie consolidera ou non
l’Organisation.
·Désarmement :
L’Iran montre que le concept de la dissuasion doit être repensé. Plusieurs
intervenants ont soutenu que la Russie ne devrait pas être considérée comme un
adversaire, que la mentalité de guerre froide doit cesser et que l’OTAN doit
réviser son dispositif militaire. L’Allemagne recourra à la Conférence d’examen
du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires pour faire retirer les
armes nucléaires préstratégiques de son territoire. Or, cela ne devrait pas
interférer avec d’autres initiatives de désarmement. Le Conseil OTAN-Russie
(COR) devrait discuter d’enjeux nucléaires comme le faisait l’ancien Conseil
conjoint permanent OTAN-Russie. Le désarmement nucléaire devrait s’accompagner
de progrès en matière de désarmement classique.
·Un intervenant russe a affirmé être rassuré par
l’ouverture et l’équité de la discussion globale sur les relations entre l’OTAN
et la Russie lors de la conférence et que c’est cette impression qu’il
rapporterait à Moscou.
RAPPORTEUR
·Le rapporteur a présenté des perspectives
supplémentaires et récapitulé les discussions du séminaire. Le nouveau concept
stratégique devrait donner une direction et une légitimité à l’OTAN dans un
contexte de sécurité mondiale. L’OTAN peut traiter des défis de sécurité à
l’échelle de la planète sans devenir une alliance mondiale. Dans l’avenir,
l’OTAN établira probablement plus de partenariats étroits qu’il ne recrutera de
nouveaux membres. Les partenariats permettent de forger des relations adaptées
en fonction de besoins et d’intérêts distincts : ils peuvent préparer
des partenaires à une adhésion ultérieure; augmenter l’interopérabilité dans le
cadre d’opérations conjointes; favoriser la confiance mutuelle; soutenir la
transformation; et avoir des répercussions normatives en rapprochant certains
pays des normes politiques de l’OTAN. Les partenariats devraient continuer à
être fondés sur les intérêts. Les partenaires peuvent être utiles, même
lorsque ceux-ci ne sont pas toujours des pays démocratiques, bien que de tels
rapports aient des limites, car les valeurs partagées tiennent compte de liens
plus profonds. Il règne une certaine confusion quant à ce que l’OTAN aurait à
offrir : l’OTAN doit clarifier les limites de sa coopération.
L’OTAN ne peut pas fournir de garanties de sécurité à tous ses
partenaires, mais pourrait élargir le concept de consultation. Les
partenaires pourraient participer à la détection rapide et à l’anticipation des
risques pour éviter la déroute des États. Il vaut la peine d’évaluer les
menaces et les défis, ainsi que les partenaires. La réforme du secteur de la
sécurité est une priorité élevée, mais ce sujet est sensible pour certains
partenaires. L’OTAN doit également contribuer à renforcer la confiance parmi et
avec les partenaires au moyen de ses relations bilatérales.
·Le partenariat avec la Russie est beaucoup plus
complexe : les perceptions varient d’une relation antagoniste à un
partenariat stratégique. Il n’y a aucun consensus au sein de l’OTAN au sujet du
rôle actuel de la Russie, mais il existe une incertitude parmi chacun des
28 alliés au sujet du destin de la Russie. Le fait que les alliés se
confrontent les uns les autres dépend davantage d’eux-mêmes que de la Russie.
L’OTAN devrait améliorer la coopération sur les intérêts communs, qui sont plus
vastes avec la Russie qu’avec n’importe quel autre partenaire. La Russie peut
être à la fois un partenaire pour ce qui est de l’architecture de sécurité
européenne et de la gouvernance mondiale. Nombre de personnes croyaient que
l’OTAN devrait demeurer ouverte par rapport à l’adhésion de la Russie advenant
que celle-ci prenne un virage reflétant le plein respect de la souveraineté et
de l’intégrité nationales de ses voisins et qu’elle exprime le souhait de
devenir un intervenant coopératif dans le domaine de la sécurité
euro-atlantique. L’OTAN changerait inéluctablement, et il serait important
qu’elle ne prenne pas un rôle de direction pour des tiers. L’Organisation
devrait tisser des liens avec d’autres pays figurant parmi les principales
puissances mondiales.
·Les derniers intervenants ont fait observer que
les partenariats de l’OTAN ont levé des obstacles et bâti une confiance. Le
partenariat stratégique avec la Russie devrait se fonder sur des intérêts
communs et ne pas être bloqué par des différences persistantes. On a fait
remarquer que les individus peuvent jouer un rôle important en établissant des
relations et que le secrétaire général Rasmussen et le président Medvedev ont
fait de l’élaboration d’une nouvelle relation entre l’OTAN et Russie une
priorité.
Respectueusement soumis,
M. Leon Benoit, député
Président
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)