1re session, 37e législature,
49-50 Elizabeth II, 2001

Chambre des communes du Canada

PROJET DE LOI C-351

Loi visant à favoriser la prévention des conduites répréhensibles dans la fonction publique en établissant un cadre pour la sensibilisation aux pratiques conformes à l'éthique en milieu de travail, le traitement des allégations de conduites répréhensibles et la protection des dénonciateurs

      Sa Majesté, sur l'avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte :

TITRE ABRéGé

1. Loi sur la dénonciation dans la fonction publique.

Titre abrégé

OBJET

2. La présente loi a pour objet :

Objet

    a) de sensibiliser les personnes travaillant dans le lieu de travail de la fonction publique aux pratiques conformes à l'éthique en milieu de travail et d'encourager le respect de ces pratiques;

    b) de protéger l'intérêt public en instituant un mécanisme pour permettre aux fonctionnaires de la fonction publique de dénoncer en toute confidentialité des abus ou omissions dans le lieu de travail à un commissaire indépendant qui pourra mener des enquêtes à leur sujet, assurer le suivi nécessaire et faire rapport au Parlement relativement à toute irrégularité vérifiée et non corrigée;

    c) de protéger ces fonctionnaires contre des mesures de représailles pour avoir dénoncé de bonne foi - ou avoir l'intention de le faire - , pour des motifs raisonnables, des conduites répréhensibles au sein du lieu de travail.

DéFINITIONS

3. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

Définitions

« abus ou omission » Acte ou omission ayant l'une ou l'autre des caractéristiques suivantes :

« abus ou omission »
``wrongful act or omission''

      a) il constitue une infraction à toute loi en vigueur au Canada;

      b) il risque d'entraîner un gaspillage considérable de fonds publics;

      c) il risque de compromettre soit la santé publique, soit la sécurité, soit l'environnement;

      d) il constitue un manquement à une politique ou à une directive publique et confirmée dans les documents de la fonction publique;

      e) il constitue un cas flagrant de mauvaise gestion ou d'abus de pouvoir.

« commissaire » Le commissaire de la Commission de la fonction publique désigné à titre de Commissaire de l'intérêt public en vertu de l'article 4.

« commissair e »
``Commission er''

« fonctionnaire » S'entend au sens de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

« fonctionnai re »
``employee''

« fonction publique » Les secteurs de l'administration publique fédérale auxquels s'applique la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.

« fonction publique »
``Public Service''

« loi en vigueur au Canada » Loi fédérale ou provinciale ou tout texte réglementaire d'application de celle-ci.

« loi en vigueur au Canada »
``law in force in Canada''

« ministre » Tout membre du Conseil privé de la Reine pour le Canada qui exerce les fonctions de ministre.

« ministre »
``minister''

COMMISSAIRE DE L'INTéRêT PUBLIC

4. (1) Le gouverneur en conseil désigne l'un des commissaires de la Commission de la fonction publique pour agir à titre de Commissaire de l'intérêt public pour l'application de la présente loi.

Désignation

(2) Les fonctions du commissaire prévues par la présente loi font partie du mandat de la Commission de la fonction publique pour l'application de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique.

Fonctions

(3) Les pouvoirs conférés au commissaire par la Loi sur l'emploi dans la fonction publique pour l'application de cette loi peuvent être exercés pour l'application de la présente loi.

Pouvoirs

5. (1) Sous réserve de l'article 10, s'il estime que l'intérêt public le justifie, le commissaire peut rendre publics les renseignements dont il prend connaissance dans l'exercice des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi.

Intérêt public

(2) Le commissaire peut divulguer, ou autoriser les personnes agissant en son nom ou sous son autorité à divulguer, les renseignements qui, à son avis, sont nécessaires :

Divulgation de renseignemen ts nécessaires

    a) soit pour mener une enquête prévue par la présente loi;

    b) soit pour motiver les conclusions et recommandations contenues dans les rapports prévus par la présente loi.

(3) Le commissaire peut divulguer, ou autoriser les personnes agissant en son nom ou sous son autorité à divulguer, des renseignements dans le cadre des procédures intentées :

Divulgation dans le cadre de poursuites

    a) soit pour infraction à l'article 21;

    b) soit pour infraction à l'article 132 du Code criminel (parjure) se rapportant à une déclaration faite en vertu de la présente loi.

(4) Dans les cas où, à son avis, il existe des éléments de preuve touchant la perpétration d'une infraction à une loi en vigueur au Canada, le commissaire peut faire part au procureur général du Canada ou d'une province, selon le cas, des renseignements dont il prend connaissance dans l'exercice des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi.

Dénonciation autorisée

6. En ce qui concerne les questions venues à leur connaissance dans l'exercice des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi, le commissaire ou les personnes qui agissent en son nom ou sous son autorité n'ont qualité pour témoigner que dans les procédures intentées :

Habilité à témoigner

    a) soit pour infraction à l'article 21;

    b) soit pour infraction à l'article 132 du Code criminel (parjure) se rapportant à une déclaration faite en vertu de la présente loi.

7. (1) Le commissaire et les personnes qui agissent en son nom ou sous son autorité bénéficient de l'immunité en matière civile ou pénale pour les actes accomplis, les rapports établis et les paroles prononcées de bonne foi dans l'exercice effectif ou censé tel des pouvoirs et fonctions qui lui sont conférés en vertu de la présente loi.

Immunité du commissaire

(2) Ne peuvent donner lieu à des poursuites pour diffamation verbale ou écrite :

Diffamation

    a) les paroles prononcées, les renseignements fournis ou les pièces produites de bonne foi et pour des motifs raisonnables au cours d'une enquête menée par le commissaire ou en son nom dans le cadre de la présente loi;

    b) les rapports établis de bonne foi par le commissaire dans le cadre de la présente loi, ainsi que les relations qui en sont faites de bonne foi par la presse.

SENSIBILISATION

8. Le commissaire doit encourager dans le lieu de travail de la fonction publique des pratiques conformes à l'éthique et un environnement favorable à la dénonciation de conduites répréhensibles, par la diffusion d'information relative à la présente loi, à son objet et à son processus d'application, ainsi que par tout autre moyen qui lui semble approprié.

Diffusion de l'information

DéNONCIATION

9. (1) Le fonctionnaire qui a des motifs raisonnables de croire qu'une autre personne au service de la fonction publique ou au sein du lieu de travail de la fonction publique a commis ou s'apprête à commettre un abus ou une omission peut :

Dénonciation d'un fonctionnaire

    a) présenter une dénonciation écrite au commissaire;

    b) demander que la confidentialité de son identité soit assurée relativement à la dénonciation.

(2) La dénonciation précise :

Forme et contenu

    a) l'identité du fonctionnaire qui en est l'auteur, attestée par sa signature;

    b) l'identité de la personne qui en fait l'objet;

    c) les motifs que le fonctionnaire a de croire qu'un abus ou une omission a été commis ou est sur le point de l'être, ainsi que les détails connus de lui.

(3) La dénonciation présentée au commissaire conformément au paragraphe (1), si elle est faite de bonne foi et pour des motifs raisonnables, ne constitue pas une violation du serment professionnel ou du serment de secret souscrit par le fonctionnaire et, sous réserve du paragraphe (4), ne constitue pas un manquement à son devoir.

Violation du serment

(4) Le fonctionnaire ne peut, lorsqu'il fait une dénonciation conformément au paragraphe (1), violer une loi en vigueur au Canada ou une règle de droit protégeant les communications confidentielles entre un avocat et son client, à moins qu'il ne soit motivé par une préoccupation raisonnable concernant la santé ou la sécurité publiques.

Secret professionnel de l'avocat

10. Sous réserve de toute obligation légale qui lui est imposée par la présente loi ou toute autre loi en vigueur au Canada, le commissaire est tenu de garder confidentielle l'identité du fonctionnaire qui lui a présenté une dénonciation conformément au paragraphe 9(1), auquel il a donné, sous réserve de la présente loi, l'assurance de l'anonymat.

Caractère confidentiel

11. Sur réception de la dénonciation, le commissaire l'examine et peut demander des renseignements additionnels au fonctionnaire qui la lui a présentée et procéder à toute autre forme d'enquête qu'il estime nécessaire.

Examen initial

12. (1) Le commissaire rejette la dénonciation si, après un examen préliminaire, il détermine, selon le cas :

Rejet de la dénonciation

    a) qu'elle est vexatoire ou que l'objet en est trivial ou frivole;

    b) qu'elle ne représente pas une allégation d'abus ou d'omission ou ne donne pas de détails suffisants au sujet d'un abus ou d'une omission;

    c) qu'elle contrevient au paragraphe 9(4);

    d) qu'elle n'a pas été faite de bonne foi ou pour des motifs raisonnables.

Dans chacun de ces cas, le commissaire clôt le dossier de l'affaire.

(2) Si la dénonciation d'un fonctionnaire comporte des déclarations que ce dernier savait fausses ou trompeuses au moment où il les a faites, le commissaire peut conclure que la dénonciation n'a pas été faite de bonne foi.

Déclaration fausse ou trompeuse

(3) Le commissaire n'est pas tenu de conclure qu'une dénonciation n'a pas été faite de bonne foi pour le seul motif qu'elle est fondée sur une erreur de fait.

Erreur de fait

(4) S'il rend une décision conformément au paragraphe (1), le commissaire en informe par écrit, en temps opportun, le fonctionnaire qui a fait la dénonciation.

Rapport

(5) S'il conclut en vertu du paragraphe (1) que la dénonciation a été faite en violation du paragraphe 9(4) ou qu'elle n'a pas été faite de bonne foi et pour des motifs raisonnables, le commissaire peut en aviser la personne qui en fait l'objet et le ministre responsable du fonctionnaire qui en est l'auteur.

Rapport à la personne visée et au ministre

13. (1) Le commissaire accepte la dénonciation faite conformément au paragraphe 9(1) s'il conclut :

Dénonciation valide

    a) qu'elle n'est pas vexatoire ou que l'objet n'en est pas trivial ou frivole;

    b) qu'elle représente une allégation d'abus ou d'omission et donne des détails suffisants au sujet d'un tel abus ou d'une telle omission;

    c) qu'elle ne contrevient pas au paragraphe 9(4);

    d) qu'elle a été faite de bonne foi et pour des motifs raisonnables.

(2) S'il rend une décision conformément au paragraphe (1), le commissaire en informe par écrit, en temps opportun, le fonctionnaire qui a fait la dénonciation.

Rapport à l'employé

ENQUÊTE ET RAPPORT

14. (1) Le commissaire fait enquête sur la dénonciation qu'il a acceptée conformément à l'article 13 et, sous réserve du paragraphe (2), établit un rapport écrit faisant état des conclusions de son enquête ainsi que de ses recommandations.

Enquête

(2) Il n'est toutefois pas tenu d'établir un tel rapport s'il est convaincu, selon le cas :

Exception

    a) que le fonctionnaire devrait épuiser les recours internes ou les procédures d'appel qui lui sont normalement ouverts;

    b) que la question pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une loi en vigueur au Canada autre que la présente loi;

    c) que la période qui s'est écoulée à compter du moment ou l'abus ou l'omission faisant l'objet de la dénonciation a eu lieu jusqu'à la date où la dénonciation a été présentée aurait pour effet de rendre un tel rapport inutile.

(3) S'il rend une décision conformément au paragraphe (2), le commissaire en informe par écrit, en temps opportun, le fonctionnaire qui a fait la dénonciation.

Rapport au fonctionnaire

(4) Il envoie, en temps opportun dans l'année qui suit la réception de la dénonciation, une copie du rapport visé au paragraphe (1) au ministre responsable du fonctionnaire qui fait l'objet de la dénonciation.

Rapport au ministre

15. (1) Le ministre qui reçoit un rapport en application du paragraphe 14(4) examine la question et répond au commissaire.

Réponse du ministre

(2) La réponse du ministre indique soit les mesures qu'il a prises ou entend prendre à l'égard du rapport du commissaire, soit son intention de ne prendre aucune mesure.

Contenu de la réponse

(3) Si le ministre indique, pour l'application du présent article, qu'il entend prendre des mesures, il assure le suivi que le commissaire juge indiqué jusqu'à ce qu'il informe celui-ci que la situation a été réglée.

Suivi supplémentai re

16. (1) Le commissaire peut, s'il le juge dans l'intérêt public, exiger que le président du Conseil du Trésor fasse déposer devant le Parlement, le prochain jour où siège l'une des deux chambres de celui-ci, un rapport d'urgence établi par le commissaire.

Rapport public d'urgence

(2) Un tel rapport décrit la teneur du rapport fait au ministre en vertu du paragraphe 14(4) et fait état de la réponse fournie par le ministre en application de l'article 15 ou de l'absence d'une telle réponse.

Contenu du rapport

17. (1) La Commission de la fonction publique inclut dans son rapport annuel présenté au Parlement conformément à l'article 47 de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique un relevé, établi par le commissaire, des activités découlant de l'application de la présente loi, où figurent notamment :

Rapport annuel

    a) la description des activités de celui-ci prévues à l'article 8;

    b) le nombre de dénonciations reçues en vertu de l'article 9;

    c) le nombre de dénonciations rejetées en vertu de l'article 12;

    d) le nombre de dénonciations acceptées en vertu de l'article 13;