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Section canadienne de ParlAmericas

RAPPORT

Introduction

Une délégation formée de quatre parlementaires canadiens a assisté à la réunion interparlementaire de ParlAmericas sur l’égalité des genres les 24 et 25 janvier 2018 à Kingston, en Jamaïque. La délégation était dirigée par Mme Joyce Murray, députée. Elle était accompagnée de l’honorable Anne Cools, sénatrice, de M. Murray Rankin, député, et de l’honorable David Wells, sénateur.

ParlAmericas est l’une des seules organisations qui rassemble des parlementaires des 35 pays des Amériques. Depuis la création de ParlAmericas en 2001, les pays de la région de l’Amérique latine et des Caraïbes ont beaucoup évolué : alors qu’ils étaient des marchés émergents à l’époque, ils sont aujourd’hui en train de devenir des démocraties modernes prospères. De nombreux pays de la région ont les mêmes valeurs et perspectives que le Canada, ce qui en fait d’excellents partenaires aux vues similaires.

Les travaux de ParlAmericas sont axés sur l’égalité des sexes, l’environnement et la promotion de parlements transparents et responsables. La réunion ayant eu lieu en Jamaïque avait pour objectif de bâtir des partenariats pour transformer les relations entre les genres et d’évaluer les mesures que les parlementaires peuvent prendre pour contribuer à l’élimination de l’inégalité entre les sexes.

Les parlementaires ont un rôle important à jouer pour éliminer les préjugés fondés sur le sexe lorsqu’ils légifèrent, représentent leurs électeurs et examinent les plans de dépenses du gouvernement. Ils peuvent également contribuer considérablement à l’intégration du public et de leurs commentaires auprès des différents intervenants.

Séance d’information avec des fonctionnaires du Haut-commissariat du Canada en Jamaïque

Le 23 janvier 2018, la délégation canadienne a rencontré le haut-commissaire du Canada, Laurie Peters, ainsi que des fonctionnaires du Haut-commissariat du Canada en Jamaïque à l’occasion d’une séance d’information sur la politique, le commerce, l’aide humanitaire et la sécurité en Jamaïque.

Il y a été question du lien étroit qui unit depuis longtemps la Jamaïque et le Canada et qui repose sur 55 années de relations diplomatiques officielles. En effet, le commerce du poisson salé et du rhum entre les deux pays remonte à plusieurs siècles.

Les fonctionnaires ont fait le point auprès des membres de la délégation sur l’état d’urgence récemment décrété dans la Paroisse de Saint James en raison de la violence des gangs. Ils ont aussi discuté de l’incidence de la criminalité sur l’économie locale.

Les échanges bilatéraux entre la Jamaïque et le Canada sont équilibrés et s’élèvent à environ 1 milliard de dollars par année. Les membres de la délégation ont appris que les technologies de l’information et des communications, l’infrastructure (p. ex. les routes et les autoroutes qui risquent toujours d’être emportées) et la préparation aux répercussions des changements climatiques constituent les secteurs prioritaires de l’économie jamaïcaine. La Jamaïque souhaite diversifier ses sources de production d’énergie afin de se consacrer davantage aux énergies renouvelables. Le pays s’efforce de relever ses normes environnementales, en particulier en ce qui concerne le traitement des eaux.

Les fonctionnaires ont indiqué que l’Argentine, qui présidera le G20 en 2018, a invité la Jamaïque à assister à la réunion du G20 en 2018 en tant que représentante des Caraïbes.

Les membres de la délégation ont été informés des importants progrès réalisés par la Jamaïque en ce qui concerne l’égalité des genres. Les femmes y sont plus nombreuses que les hommes dans différents domaines professionnels et occupent davantage de postes de direction d’entreprise ainsi que dans le secteur universitaire, les hautes instances de la justice et le service extérieur. En outre, la Jamaïque a récemment établi un plan d’action national contre la violence faite aux femmes. Toutefois, la proportion de femmes sur la scène politique demeure faible, et l’île ne compte qu’un seul refuge pour les victimes de violence conjugale.

La réunion a également porté sur les programmes d’échange d’étudiants postsecondaires présentement en vigueur entre la Jamaïque et le Canada; la forte influence des églises des Caraïbes sur les politiques sociales; les enjeux relatifs à l’administration de la justice; ainsi que le succès et l’importance du Programme des travailleurs agricoles saisonniers, qui permet aux employeurs canadiens d’embaucher temporairement des travailleurs étrangers et dont la portée pourrait être élargie afin d’encourager la participation des femmes.

Cérémonie d’ouverture de la réunion interparlementaire

Mme Saphire Longmore, docteure, sénatrice jamaïcaine et membre du conseil d’administration de ParlAmericas a ouvert la réunion en souhaitant la bienvenue aux délégués et en donnant un aperçu du travail effectué par ParlAmericas dans l’hémisphère. Dans son discours, elle a insisté sur le fait que le réseau pour l’égalité entre les sexes constitue une tribune diversifiée et inclusive où les parlementaires, les experts de la société civile et différents intervenants peuvent échanger des idées et travailler ensemble pour faire avancer la cause de l’égalité entre les sexes et la promouvoir. Elle invite également les délégués à utiliser l’outil de planification stratégique relatif à la création d’un caucus multipartite pour l’égalité des genres élaboré par ParlAmericas. Ce questionnaire, lancé à Ottawa en 2016, est mis à la disposition des parlements qui souhaitent créer un caucus multipartite sur la question de l’égalité des genres.

M. Denzil Thorpe, député de la Jamaïque et secrétaire permanent du ministre de la Culture, des Genres, du Divertissement et du Sport, prend ensuite la parole et parle des préjugés inconscients et généralisés envers les femmes et leur rôle dans la société. Il a invité les hommes à promouvoir l’égalité entre les genres, et a cité des recherches qui démontrent qu’en améliorant les conditions économiques des femmes, on peut améliorer la situation économique de tout un pays. De plus, les entreprises qui favorisent l’égalité entre les genres bénéficient d’une productivité accrue et voient la satisfaction des employés par rapport à leur emploi augmenter. M. Thorpe a ajouté que les femmes jamaïcaines sont toujours sous-représentées au Parlement, et qu’il est nécessaire d’accroître les mesures d’éducation et de sensibilisation ainsi que les ressources à cet égard afin d’améliorer la situation.

C’est Mme Sheila Roseau, sous-directrice régionale pour les Amériques et les Caraïbes au sein du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), qui a prononcé le discours principal. Elle a d’abord souligné le mouvement populaire et rassembleur qui a permis aux femmes de lever le voile sur les comportements inappropriés d’hommes puissants. Ce mouvement a suscité un débat public sur le caractère quasi normal du harcèlement qui, pendant trop longtemps, a été toléré, voire ignoré. Mme Roseau a précisé que les hommes sont aussi victimes de harcèlement de la part de femmes et d’hommes, mais qu’ils hésitent davantage à le signaler.

Mme Roseau a aussi dit que, selon des recherches récentes, si les choses continuent d’évoluer au rythme où elles le font présentement, il faudra environ 150 ans avant que les femmes reçoivent un salaire égal à celui des hommes pour faire le même travail. Les données quant au travail des femmes utilisées pour faire ce calcul ne tiennent pas compte du travail non payé et des responsabilités en matière de soins qui sont habituellement assumées par des femmes. Mme Roseau estime que les législateurs ont un rôle important à jouer dans l’élaboration et la mise en œuvre de politiques qui mèneront à l’égalité entre les genres. Or, comme elle l’a fait remarquer, la représentation des femmes au sein des assemblées parlementaires de l’hémisphère se situe en général en dessous de 30 %, et aucune assemblée ne compte plus de 50 % de femmes.

Mme Roseau a terminé son discours en dressant un portrait de son rôle au sein du FNUAP. Elle se consacre principalement à la santé des femmes, à l’amélioration des relations entre les genres et à l’aide apportée aux femmes des Caraïbes lorsque surviennent des catastrophes naturelles.

Séance 1 – Approches complètes pour réduire l’inégalité entre les genres

L’objectif de la première séance consistait à explorer les cadres d’égalité entre les genres mis en place dans les Caraïbes et au Canada afin de favoriser la collaboration entre divers groupes de la société civile et les parlements. La séance a été dirigée par Mme Patricia Mohammed, professeure à l’Institute for Gender and Development Studies de la University of the West Indies.

Mme Mohammed a commencé son intervention en parlant du terme « genre ». Elle estime que le genre est un réseau de relations de pouvoirs idéologiques et matériels qui se renforcent mutuellement. Elle croit également que divers segments de la population ont une compréhension différente du terme « genre ». Mme Mohammed s’est ensuite attardée à plusieurs enjeux relatifs au genre : elle a donné des exemples de lois de première et de deuxième générations qui traitent de harcèlement sexuel; elle a indiqué que la réussite des initiatives liées à l’égalité des genres dans les Caraïbes a eu une incidence négative imprévue et aurait poussé certains jeunes hommes à se tourner vers la criminalité et à obtenir de moins bons résultats à l’école; elle a également fourni de l’information sur l’Indice d’inégalités de genre du Programme des Nations Unies pour le développement, lequel a permis de constater que l’augmentation de l’égalité entre le nombre d’hommes et le nombre de femmes occupant des postes de pouvoir est liée au développement de l’ensemble du pays.

Mme Mohammed a présenté aux délégués certains points que les parlements devraient prendre en considération, à son avis, lorsqu’ils souhaitent adopter des mesures législatives sur l’égalité des genres. Les voici :

• Il faut une volonté politique pour faire progresser et adopter une telle mesure législative.

• Il est important que les partisans d’une mesure législative sur l’égalité des genres s’efforcent de mobiliser des appuis pour leur initiative au sein des membres du parlement.

• En menant de vastes consultations auprès des intervenants et des membres de la société civile, les assemblées pourront renforcer la crédibilité des mesures législatives proposées.

• Il est essentiel d’établir et de respecter un échéancier pour la mise en œuvre de mesures relatives à l’égalité des genres.

Elle a ajouté que les mesures législatives sur l’égalité des genres doivent être fondées sur la recherche. Il est possible de tirer profit de l’influence des groupes de pression pour rallier les parlementaires réticents, et les assemblées doivent examiner la possibilité d’intégrer un mécanisme d’examen des mesures législatives sur l’égalité entre les genres.

Pendant la période réservée aux questions, Mme Murray a parlé des initiatives relatives à l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) prises par le Parlement du Canada. Plus particulièrement, elle a expliqué que des ACS+ sont effectuées pour les comités parlementaires et pour les propositions stratégiques présentées au Cabinet fédéral aux fins d’examen. Elle a également affirmé qu’à la suite d’une motion déposée par le Nouveau Parti démocratique, la Chambre des communes a formé un comité spécial qui devra se pencher sur le régime actuel d’équité salariale du Canada et présenter des recommandations à la Chambre.

D’autres sujets ont été abordés pendant la période réservée aux questions, y compris l’importance d’affecter des ressources aux initiatives sur l’égalité entre les genres; la mesure dans laquelle le manque d’engagement politique se traduit par un manque de financement des initiatives sur l’égalité entre les genres; les coûts sociaux associés à la mise de côté systématique des femmes; les progrès accomplis par la Jamaïque grâce aux initiatives sur l’égalité entre les genres; et le rôle des comités mixtes spéciaux pour faire progresser l’égalité entre les genres au sein des assemblées parlementaires. À ce sujet, la sénatrice Cools a parlé de l’expérience qu’elle a vécue en 1998 en tant que membre du comité mixte spécial – formé de représentants du Sénat et de la Chambre des communes – sur la garde et le droit de visite des enfants au Canada.

Séance 2 – Stratégies efficaces pour mobiliser les hommes

La deuxième séance a pris la forme d’une discussion sur la mesure dans laquelle les initiatives sur l’égalité entre les genres devraient rallier les hommes et en faire des partenaires actifs afin de transformer les courants de pensée actuels sur le genre et la masculinité. La discussion était dirigée par M. Humberto Carolo, directeur exécutif de White Ribbon, et M. Patrick Prendergast, directeur intérimaire de la University of Western Indies.

M. Carolo a présenté White Ribbon comme une organisation qui fait la promotion d’une saine masculinité et qui enseigne aux hommes à ne jamais encourager les mauvais traitements infligés aux femmes en gardant le silence. White Ribbon a été fondée par un groupe de professeurs d’universités et de collèges dans la foulée de la tuerie perpétrée contre des femmes en 1989 à l’École polytechnique de Montréal.

M. Carolo a affirmé qu’une très large proportion des actes de violence envers les femmes sont commis par des hommes. Par conséquent, il est important de mobiliser les hommes lors de la création et de la mise en œuvre de projets visant à défendre les droits des femmes. Il a ensuite fait la description des ressources utilisées par White Ribbon dans le cadre de ses campagnes d’information et de sensibilisation. Par exemple, les hommes peuvent être des ambassadeurs de l’égalité entre les genres en écoutant les autres, en particulier les femmes, en s’informant sur les enjeux relatifs à l’égalité entre les genres, ainsi qu’en appuyant la cause et en participant aux efforts de sensibilisation. M. Carolo a également donné des exemples de programmes et de campagnes lancés par White Ribbon à Toronto, qui s’est notamment associée à des équipes de sport professionnel.

La présentation de M. Prendergast avait une vaste portée et traitait d’un grand nombre de sujets. À son avis, les hommes se trouvent au sommet de la structure du pouvoir au sein de notre société, alors que les femmes se trouvent au milieu. Il a ajouté que le mot « genre » n’est pas un synonyme de « femmes »; que l’accès à l’éducation doit être fondé sur les capacités, et non sur le genre ou le revenu; qu’il existe des problèmes de partage de la paternité en Jamaïque et que des pères se voient refuser la garde de leurs enfants parce que les tribunaux jamaïcains se montrent partiaux et ne croient pas que les hommes soient en mesure d’élever des enfants; et que les comportements des hommes ne sont pas sains.

M. Prendergast a aussi déclaré que les jeunes hommes jamaïcains sont de plus en plus impliqués dans les gangs et les actes de violence et de criminalité. Selon lui, les armes à feu sont un symbole de pouvoir pour ces jeunes hommes, qui ne considèrent plus l’éducation comme une priorité. Il a aussi parlé des programmes d’égalité des genres à l’intention des hommes qu’il a lui-même organisés ainsi que des points forts qu’il a observés et des difficultés qu’il a rencontrées. Il a terminé son intervention en affirmant que le respect et l’amour étaient des valeurs fondamentales pour toute l’humanité.

De nombreux sujets ont été abordés pendant la période réservée aux questions. Les délégués ont notamment discuté de la notion de privilège masculin; des comportements fondés sur des normes sociales dans les Caraïbes; du caractère adéquat du cursus scolaire en Jamaïque; et des progrès réalisés par les femmes dans les Caraïbes malgré l’intransigeance associée à la culture socioéconomique de la région. À la fin de la discussion, les participants ont reconnu qu’il était nécessaire de continuer à prôner un dialogue respectueux, à s’appuyer, et à accepter que les changements sociaux ne se fassent pas du jour au lendemain et qu’ils sont souvent de faible ampleur.

Séance 3 – Médias et agents culturels

La séance no 3 était animée par deux organisations de la société civile œuvrant en Jamaïque qui ont pris des mesures novatrices pour sensibiliser la population aux causes profondes de l’inégalité entre les genres et pour réclamer des réformes juridiques. Les deux présentatrices étaient Mme Lana Finikin, directrice exécutive du Sistren Theatre Collective, et Mme Patricia Phillips, directrice exécutive de WMW Jamaica (anciennement appelée Women’s Media Watch), et la discussion était dirigée par Mme Elaine Wint.

Mme Finikin a présenté aux délégués le contexte ayant mené à la création de Sistren et a brossé un portrait des projets récemment lancés par l’organisation. Fondée en 1977, Sistren se sert des arts de la scène pour influer sur des questions d’importance locale et faire des commentaires sociaux à cet égard. L’organisation présente des spectacles écrits et joués par des membres de la collectivité locale. Les spectacles de Sistren sont présentés autant dans la rue que dans de grandes salles. Leurs projets visent à rejoindre les collectivités touchées par la pauvreté et la violence des gangs. On peut également visionner les vidéos des spectacles sur le Web.

Mme Phillips a indiqué aux délégués que WMW a été fondée en 1987 afin d’atteindre plusieurs objectifs : militer en faveur d’une société pacifique et bienveillante, réduire la violence liée au sexe, stimuler la pensée positive, et accroître le rôle des femmes dans le processus décisionnel. À de nombreuses reprises, WMW a travaillé auprès de ministères du gouvernement jamaïcain et a exercé des pressions sur ceux-ci afin d’améliorer le régime juridique du pays par rapport à certains enjeux sociaux. Par exemple, WMW a milité pour faire adopter des mesures législatives contre le harcèlement sexuel, des normes sur les références à la violence dans les paroles de chansons et un code relatif au contenu des émissions pour enfants. L’organisation a aussi réclamé un examen de la Sexual Offences Act en vigueur en Jamaïque.

Pendant la période réservée aux questions, Mme Murray a félicité les deux présentatrices pour la force et le courage dont elles font preuve dans le cadre de leur travail. Elle a aussi souligné le fait que les deux organisations fournissent aux enfants une tribune leur permettant de renforcer leur confiance. Selon Mme Murray, les enfants doivent acquérir un sentiment de confiance pour être en mesure de contribuer à la société, sans quoi ils risquent d’adopter des comportements antisociaux.

Séance 4 – L’avancement des réformes juridiques sur l’égalité en milieu de travail : une période cruciale de changements

La séance no 4 portait sur les mesures juridiques mises en place dans différents pays afin de traiter les cas d’agression sexuelle et de harcèlement en milieu de travail compte tenu du désir de plus en plus marqué de la population de mettre fin à ces comportements inappropriés au travail. Les quatre présentatrices suivantes ont donné de l’information sur les réformes juridiques visant à assurer l’égalité en milieu de travail : Mme Rose-Marie Antoine, doyenne de la Faculté de droit de la University of the West Indies (UWI); Mme Sharon Coburn Robinson, directrice principale par intérim du Bureau de promotion de l’égalité des sexes; Mme Joyce Murray, députée de Vancouver Quadra et secrétaire parlementaire du président du Conseil du Trésor; et Mme Velma Newton, directrice de projet régionale dans le cadre de l’IMPACT Justice Project et ancienne parlementaire.

Mme Antoine a donné un aperçu général du cadre juridique relatif au harcèlement sexuel en vigueur dans la région des Caraïbes. Elle a indiqué que les plaignants avaient accès à un grand nombre de recours judiciaires, comme les mesures législatives sur le licenciement abusif, la loi anti-discrimination et la loi sur l’emploi. Elle a également précisé que le harcèlement sexuel n’est pas synonyme de viol ou d’agression : ces dernières constituent des infractions distinctes qui relèvent plutôt du droit pénal. Elle a donné son point de vue sur les différents critères qui permettent de cerner le harcèlement sexuel : les comportements inappropriés sont considérés comme déplacés, la personne visée est offensée par ceux-ci, les comportements peuvent rendre l’environnement de travail hostile, et toute personne raisonnable est en mesure de reconnaître que les comportements de l’intimé sont offensants. Mme Antoine a aussi fait remarquer que, règle générale, le harcèlement sexuel peut être vu comme une manifestation d’un problème social complexe, c’est-à-dire l’inégalité des rapports de force entre les hommes et les femmes.

Mme Murray a commencé son exposé en expliquant aux délégués que sa mère et sa grand-mère ont elles aussi milité pour obtenir l’égalité des genres et pour faire tomber les obstacles liés au sexe. Mme Murray a ensuite affirmé qu’au cours des dernières années, le Canada a fait d’importants progrès en ce qui concerne l’égalité des genres. Elle a présenté brièvement les accomplissements suivants :

• Le Canada a un Cabinet fédéral paritaire.

• Le premier ministre du Canada a présenté des excuses historiques aux membres de communautés vulnérables qui ont été systématiquement désavantagés ou qui ont souffert de discrimination et de représailles indues, y compris les lesbiennes, gais, bisexuels, transgenres et bispirituels (LGBTQ2) de la fonction publique, ainsi que les membres des peuples autochtones.

• Une commission d’enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues ou assassinées a été lancée et est toujours en cours.

• Le gouvernement a demandé à ce que les budgets nationaux les plus récents fassent l’objet d’une analyse comparative entre les sexes plus (ACS+).

• En 2016, le gouvernement a adopté une mesure législative visant à accroître la diversité de la représentation au sein des conseils d’administration du Canada.

• En 2017, le gouvernement a adopté une mesure législative visant à renforcer les lois et les politiques sur la violence et le harcèlement dans les milieux de travail de compétence fédérale.

• Le gouvernement compte déposer bientôt une mesure législative en matière d’équité salariale qui viserait tous les milieux de travail sous réglementation fédérale.

Mme Robinson a présenté un compte rendu détaillé de l’ébauche de la politique nationale sur le harcèlement sexuel qui sera déposée au Parlement de la Jamaïque. La politique comporte une définition de la notion de harcèlement et nomme des comportements qui ne relèvent pas du harcèlement (les interactions entre adultes consentants; une attirance mutuelle; des relations consensuelles; et des manifestations d’amitié). L’ébauche de la politique contient également :

• un processus informel de règlement;

• un processus officiel qui comprend la tenue d’une enquête sur les allégations de comportements inappropriés;

• des mesures de protection contre les représailles afin de protéger les plaignants;

• l’imposition de sanctions aux personnes qui formuleraient des allégations fausses ou vexatoires;

• des dispositions quant à la protection des renseignements personnels;

• un volet sur l’éducation et la prévention.

Dans le même ordre d’idées, Mme Newton a pris part à un projet financé par le gouvernement du Canada afin de créer un nouveau modèle de loi contre le harcèlement à la Barbade. L’initiative était dirigée par IMPACT, un projet de réforme judiciaire du système juridique de la région qui a aussi reçu l’appui des Nations Unies.

Pendant la période réservée aux questions, Mme Murray a donné plus de détails sur l’intégration des ACS+ dans les présentations au Conseil du Trésor (ces présentations visent à obtenir l’autorisation de mettre en œuvre de nouveaux programmes) et dans les mémoires au Cabinet. Elle a précisé que les ACS+ doivent être effectuées au début et pendant ces deux processus. D’autres sujets ont été abordés au cours de la discussion, comme le harcèlement avec lequel les femmes qui travaillent en politique doivent composer, plus particulièrement dans les médias sociaux, et le fardeau que cela représente; le recours à des ententes de confidentialité lors du règlement des cas de harcèlement; la réaction hostile des hommes à l’égard des changements apportés aux normes sociales; les représailles auxquelles s’exposent les dénonciateurs; les avantages du fardeau de la preuve civile par rapport au fardeau de la preuve pénale dans les cas de harcèlement présumé; les difficultés liées à la conformité et à l’application des lois sur le harcèlement; et l’importance de l’éducation, de la sensibilisation et de l’acceptation lorsqu’il est question de changements des normes sociales.

Séance 5 – La mobilisation de partenariats : créer une campagne sur l’égalité des genres

Au cours de la dernière séance de ce rassemblement interparlementaire, les délégués ont été invités à élaborer une campagne pour la Journée internationale des femmes en tenant compte des nombreuses différentes approches possibles en ce qui concerne la transformation des normes relatives au genre. Les participants ont visité six tables différentes au cours de cinq rondes de remue-méninges. Voici les résultats obtenus :

Table 1 : Les participants ont dressé la liste des normes et des obstacles fondés sur le genre qui nuisent à la participation des femmes en politique. Ils ont convenu qu’il était nécessaire de mettre en place des politiques contre le harcèlement au sein des assemblées parlementaires et ils se sont entendus pour dire que les barrières qui nuisaient traditionnellement à la pleine participation des femmes dans la société existent toujours. Ils ont aussi convenu que les hommes continuent à recevoir un salaire plus élevé que les femmes qui font le même travail, et qu’il existe bel et bien un déséquilibre quant aux droits des hommes et des femmes.

Table 2 : Les participants ont déterminé qu’il était nécessaire de former des partenariats stratégiques pour transformer les relations entre les genres. Ils souhaitent que les rapports entre les sexes changent dans tous les groupes de la société et à tous les niveaux (p. ex. dans les sports, les forces armées, le secteur de l’éducation et les organisations religieuses). La transformation doit se faire autant dans les centres urbains que dans les régions, et il doit y avoir des partenariats à l’échelle régionale et à l’échelle mondiale.

Table 3 : Les participants ont discuté de la façon dont ils pourraient s’y prendre pour que la campagne rejoigne les assemblées législatives et les parlementaires. Ils ont proposé d’encourager tout le monde à suivre une formation sur les ACS+, de tenir des assemblées générales sur la question du genre, d’organiser des forums pour les jeunes, de lancer des campagnes dans les médias sociaux, de confier à un comité spécial mixte la responsabilité d’entreprendre une étude sur les rapports entre les sexes, et d’organiser des rassemblements publics. Les participants ont souligné que l’égalité entre les genres n’est pas un enjeu partisan.

Table 4 : Les participants ont examiné différentes façons de faire connaître leur campagne afin de trouver la meilleure. Ils ont établi que le message de la campagne devait être bien conçu et positif, que l’utilisation des médias sociaux était essentielle, qu’ils devaient rejoindre les jeunes, et qu’il serait intéressant d’approcher les médias comme la télévision et la radio. Les participants ont aussi établi la liste de tous les endroits que les porte-parole devraient visiter pour faire connaître la campagne, comme des milieux de travail, des événements sportifs, des espaces publics et des centres communautaires. Enfin, ils ont déterminé qu’il fallait mettre en place des mécanismes d’évaluation de l’efficacité de la campagne.

Table 5 : Les participants ont discuté de façons d’assurer la pérennité de la campagne. Ils ont proposé de créer un secrétariat permanent qui effectuerait des recherches sur les enjeux relatifs aux femmes au pays et dans la région. Les services du secrétariat seraient mis à la disposition de tous les intervenants pertinents. Le secrétariat se servirait des médias sociaux et œuvrerait tant à l’échelle locale qu’à l’échelle mondiale.

Table 6 : Les participants se sont efforcés de trouver des façons de recruter des membres dans le cadre de la campagne. Ils se sont entendus sur l’importance de la sensibilisation des collectivités et ont convenu de recueillir des données sur les enjeux liés au genre. Ils ont aussi noté qu’un grand nombre des éléments de leur présentation et de celles des cinq tables précédentes se recoupaient.


Respectueusement soumis,


L’honorable Robert Nault, C.P., député

Président

Section canadienne de ParlAmericas