Passer au contenu
;

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Association parlementaire Canada-Europe

RAPPORT

Du 4 au 13 octobre 2017, une délégation de l’Association parlementaire Canada Europe, composée de quatre parlementaires, s’est rendue à Sofia, en Bulgarie, et à Strasbourg, en France, dans le cadre d’une mission auprès du prochain pays appelé qui assurera la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne et pour prendre part à la quatrième partie de la Session ordinaire de 2017 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE). Les délégués étaient M. Scott Simms, député et chef de délégation pour le volet APCE de la mission, l’honorable Percy Downe, sénateur et chef de délégation (pour le volet bulgare de la mission), l’honorable David Wells, sénateur (pour le volet APCE de la mission), M. David Tilson, député, et M. Nick Whalen, député. La délégation était accompagnée de la secrétaire de l’Association, Mme Guyanne Desforges, et de la conseillère de l’Association, Mme Laura Barnett.

MISSION PARLEMENTAIRE AUPRÈS DE LA RÉPUBLIQUE DE BULGARIE, PROCHAIN PAYS À ASSURER LA PRÉSIDENCE TOURNANTE DU CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE

Du 4 au 6 octobre 2017, la délégation a participé à une mission parlementaire en République de Bulgarie, pays qui assumera la présidence tournante du Conseil de l’UE de janvier à juin 2018. Pendant cette mission, la délégation a rencontré des parlementaires bulgares, la ministre responsable de la présidence bulgare du Conseil, la conseillère du premier ministre aux Affaires de l’UE, la sous-ministre des Affaires étrangères, le chef adjoint de la représentation de la Commission européenne en Bulgarie, des entreprises canadiennes dans ce même pays et des représentants de centres de réflexion et de groupes de la société civile et du monde du travail. Elle a aussi reçu de l’information des membres de l’ambassade du Canada en Bulgarie. Les discussions tenues lors de ces réunions ont porté sur les priorités de la Bulgarie en vue de sa présidence du Conseil de l’UE, les grands enjeux des relations Canada-UE et Canada-Bulgarie, dont l’Accord économique et commercial global (AECG), et d’autres questions d’intérêt pour la Bulgarie et l’UE, dont l’élargissement de l’UE, la migration et le Brexit.

Séance d’information avec l’ambassade du Canada en République de Bulgarie

La délégation a entrepris sa mission en assistant à une séance d’information donnée par Son Excellence Kevin Hamilton, ambassadeur, qui a souhaité la bienvenue à ses membres à Sofia et a présenté M. Ivor Prokopiev, dont le mandat en tant que consul honoraire du Canada en Bulgarie est en voie d'être renouvelé, ainsi que M. Christopher Duggan, conseiller politique de l’ambassade. Il a souligné qu’il s’agissait là de la première visite politique de haut niveau du Canada en Bulgarie et que celle ci revêtait donc une certaine importance aux yeux des représentants bulgares. L’ambassadeur et M. Duggan ont aussi évoqué l’importance de l’imminente abolition complète de l'exigence de visas et ont décrit la démarche derrière l’évaluation ayant finalement permis au Canada de mettre un terme à cette exigence.

L’ambassadeur Hamilton a donné à la délégation un aperçu de l’histoire de la Bulgarie en Europe, parlant tour à tour de son passé au sein de l’Empire ottoman, de ses relations traditionnellement étroites avec la Russie et des défis que ce pays a dû relever depuis qu’il est entré dans l’UE en 2007. Il a aussi parlé de l’économie de la Bulgarie en faisant remarquer que celui-ci est le pays le plus pauvre de l’UE pour le PIB, mais qu'il a aussi l’une des économies les plus en croissance au sein de l’UE. Il a mis en relief dans ce contexte les problèmes démographiques qui se posent à la Bulgarie avec une population qui vieillit et une forte émigration de jeunes travailleurs qualifiés vers les autres pays de l’UE et ailleurs dans le monde.

Il a également décrit le climat politique actuel sous le premier ministre Boyko Borissov (parti GERB) et le président Ruman Radev (du parti socialiste bulgare). Il a évoqué la controverse que suscitent actuellement le gouvernement de coalition, avec les membres du parti d’extrême-droite nationaliste des Patriotes unis occupant des ministères clés, dirigeant le secrétariat du Conseil national de coopération sur les questions ethniques et d’intégration et présidant des réunions de première importance pendant la présidence bulgare du Conseil de l’UE.

L’ambassadeur a également signalé que le président Radev avait soumis à la cour constitutionnelle le projet de loi national sur la mise en œuvre de l’AECG et qu’une décision en était attendue sous peu. Une fois la décision rendue publique, le parlement bulgare devrait être en mesure de tenir un vote sur ce projet législatif d’ici la fin de 2017. On s’attend largement à ce que ces propositions soient approuvées.

M. Prokopiev a enchaîné avec une présentation de divers indicateurs économiques en Bulgarie en précisant que, malgré sa croissance comparativement rapide, le pays ne réalise pas tout son potentiel de développement économique et que, s’il y a des succès à Sofia, l’économie se trouve en difficulté dans les régions plus rurales. Le PIB par habitant est bon, en grande partie parce que la population décroît et que 5 % du PIB vient des fonds versés par l’UE. La délégation a appris avec intérêt que la Bulgarie pratiquait un taux fixe de 10 % d’imposition du revenu. M. Prokopiev a aussi évoqué les inquiétudes dans ce pays au sujet de l’indépendance des médias et de la primauté du droit en faisant remarquer que la Bulgarie est 109e à l’indice mondial de la liberté de la presse de Journalistes sans frontières. La réunion s’est close sur une discussion du problème que présente la corruption et des problèmes de la Bulgarie liés à l’évaluation annuelle que fait l’UE dans le cadre du Mécanisme de coopération et de vérification, portant sur les mesures que devra prendre ce pays en matière de lutte contre la corruption et de réforme judiciaire.

Rencontre des parlementaires bulgares

Après avoir visité le parlement bulgare, le Narodno Sabranie, la délégation a rencontré des membres et des employés des commissions parlementaires des affaires européennes et de la surveillance des fonds européens, de la politique étrangère et de la politique économique et du tourisme.

M. Kristian Vigenin, président de la Commission affaires européennes, a parlé du rôle de celui ci dans le contexte de la présidence prochaine du Conseil de l’UE en mentionnant que l’avenir de l’UE sera probablement un des enjeux à débattre pendant ce mandat. La Bulgarie croit fermement en une Europe à une seule vitesse où les mêmes efforts d’intégration sont exigés de tous les États membres. En réponse à des questions de la délégation, il a évoqué les conséquences du Brexit en précisant que le budget de l’UE changera avec le Brexit, mais sans qu’on sache encore au juste comment. Le budget d’ensemble pourrait décroître ou rester le même en obligeant les États membres à payer chacun davantage, ou encore une réforme budgétaire pourrait s’opérer. Il a informé la délégation que la Bulgarie s’est proposée pour accueillir l’Agence européenne des médicaments quand elle quittera Londres. Dans ce contexte, il a souligné que les travailleurs bulgares qui ont migré au Royaume-Uni comblent actuellement des vides sur le marché du travail plutôt que d’enlever des emplois aux Britanniques. Il a dit espérer qu’on finisse par trouver des solutions, compte tenu particulièrement de la frontière en Irlande du Nord, de manière à ne pas provoquer une intensification es tensions nationalistes dans cette région.

En ce qui concerne la priorité que se donne une présidence bulgare de travailler de près avec les pays de l’ouest des Balkans, il a signalé que l’effort que font les pays balkaniques en vue d’entrer un jour dans l’UE profite à la Bulgarie, puisqu’il rend le marché des Balkans plus attrayant aux investisseurs. M. Hristo Gadzhev, membre de la Commission de la politique étrangère, a aussi fait observer que la Bulgarie fait beaucoup de commerce avec les pays de la région en raison de la possibilité d’exporter des marchandises en UE en franchise de droits.

M. Vigenin a ensuite soulevé les questions d’importance pour les relations canado bulgares en faisant ressortir la nécessité de resserrer les liens économiques. Dans cet ordre d’idées, il s’est dit satisfait que la question des visas soit maintenant réglée en faisant observer que son gouvernement était généralement pour l’AECG, et ce, malgré une certaine résistance de la part des membres du parti socialiste bulgare. M. Gadzhev a en outre insisté sur l’importance de l’AECG. Pour sa part, M. Petar Kanev, président de la Commission de la politique économique et du tourisme, a dit espérer que l’AECG étendra les échanges actuellement limités de marchandises entre le Canada et la Bulgarie. Il a indiqué que les préoccupations exprimées au sujet de cet accord en Bulgarie étaient généralement liées aux négociations maintenant interrompues de l’UE avec les États-Unis au sujet du Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP). Le Canada n’est donc pas en cause.

En ce qui concerne les problèmes démographiques de la Bulgarie, M. Gadzhev a indiqué que, quand les frontières se sont ouvertes au départ, 20 % de la population a quitté le pays. On estime que, de nos jours, trois millions de Bulgares vivent hors du pays. Le travail des politiciens comme lui consiste notamment à créer des conditions auxquelles les immigrants pourraient vouloir retourner, à offrir plus de possibilités de migration aux minorités ethniques bulgares des pays voisins et à promouvoir un système de garde d'enfants de sorte que les familles aient plus d’enfants.

Pour ce qui est de la politique de défense, M. Gadzhev a mis en relief les initiatives récemment adoptées par l’UE pour harmoniser les politiques de la défense et les marchés publics en soulignant l’importance de l’OTAN, mais il convenait aussi de l’importance pour la communauté internationale de trouver une façon de travailler avec la Russie. Dans le même ordre d’idées, M. Kanev a dit que la Bulgarie avait toujours recherché l’équilibre pour ménager de bonnes relations de voisinage.

La délégation a poursuivi son dialogue avec les parlementaires à l’occasion d’un déjeuner avec le Groupe d’amitié Bulgarie-Canada et le personnel parlementaire. Le président du Groupe, M. Tasko Ermenkov, a mentionné l’importance des relations interpersonnelles et évoqué l’importante diaspora bulgare au Canada. M. Hasan Ademov a mis en évidence un accord canado-bulgare récent en matière de sécurité sociale grâce auquel les Canadiens en Bulgarie et les Bulgares au Canada peuvent accumuler des prestations de retraite transférables. On a fait valoir que, souvent, le Canada est un modèle de tolérance et de respect des droits de l’homme. Parlant de corruption et de primauté du droit, M. Nikolay Aleksandrov a fait observer que la Bulgarie progressait sur ce front, plus particulièrement sur les questions d’évasion fiscale. M. Hristo Gadzhev a ajouté que, si on entend combattre la corruption, on se doit de mettre au jour tout ce qui est économie clandestine. Pour lui, les services électroniques sont un moyen d’accroître la transparence et la cybergouvernance tend généralement à éliminer la corruption dans un pays.

Rencontre de la représentation de la Commission européenne en Bulgarie

La délégation a conclu sa première journée par une rencontre avec M. Hristo Hristov, chef adjoint de la représentation de la Commission européenne en Bulgarie. M. Hristov a commencé par mettre en relief les préoccupations politiques bulgares au sujet de l’AECG selon une perception erronée faisant le lien entre cet accord et le TTIP et l’utilisation d’organismes génétiquement modifiés. Le président Radev a renvoyé l’accord à la cour constitutionnelle, mais la question posée à la cour consiste à déterminer si la ratification de l’accord serait contraire à la constitution de la Bulgarie, et la cour ne trouvera probablement pas que le processus de ratification est inconstitutionnel. M. Hristov a aussi fait remarquer que, bien que le parti socialiste bulgare soit insatisfait de l’accord, il est peu probable qu’il fasse obstacle à sa ratification par les parlementaires. Il a dit à la délégation que la Commission européenne travaillait fort pour diffuser une information objective sur l’AECG. Que l’accord ait été mis en application provisoire le 21 septembre 2017 sans répercussions négatives évidentes est bon signe. On pourrait devoir attendre un certain temps que l’accord soit finalement ratifié par tous les États membres, mais il est persuadé que la volonté politique mènera finalement ce processus à bon port..

Sur la question des aspirations bulgares à entrer dans l’espace Schengen, M. Hristov a indiqué que la Bulgarie respecte les exigences techniques, qu’il s’agisse de la capacité d’accueil des nouveaux venus ou de la mise en place d’autres éléments d’infrastructure. Cependant, le projet d’adhésion de la Bulgarie à l’UE se bute à une certaine opposition politique, certains pays ayant argué que la Bulgarie n’était pas encore prête. Dans ce contexte, M. Hristov a aussi évoqué l’engagement bulgare en ce qui concerne le Mécanisme de coopération et de vérification. La Commission européenne avait fixé au départ six critères de référence auxquels la Bulgarie devait répondre dans la perspective que ce mécanisme puisse être levé trois ans après l’entrée bulgare dans l’UE. Dix années se sont écoulées et ces critères n’ont pas été respectés. Des préoccupations ont en outre été exprimées à propos du manque de clarté de ce système de référence. C’est ainsi que, en janvier 2017, la Commission a fixé 17 mesures précises que doit prendre la Bulgarie pour que le mécanisme puisse être levé. Et malgré certains progrès, la Bulgarie n’a pas encore pleinement mis en œuvre quelque mesure que ce soit. D’après M. Hristov, la Bulgarie doit à cette fin entreprendre une réforme bien réelle, chose improbable avec le gouvernement de coalition qui est en place.

En matière de migration, il a insisté pour dire que la crise des migrants qui sévissait actuellement en Europe avait pris tout le monde par surprise et que la Commission avait travaillé fort pour s’assurer que les États membres s’en tiennent aux règles de l’UE dans le régime d’accueil des réfugiés. Dans le contexte bulgare, l’Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l’UE (Frontex) a posté une centaine de personnes à la frontière bulgaro-turque et la Commission a versé au pays 160 millions d’euros pour la formation, l’amélioration des conditions et l’équipement. M. Hristov a précisé que, en application des règles de l’UE, la Bulgarie a l’obligation d’accueillir 1 000 migrants et que jusqu’ici elle n’en a pris que 50. La raison en est partiellement que, malgré l’afflux à la frontière, les migrants sont déjà passés à un autre pays au moment où leurs demandes sont finalement traitées et acceptées.

Rencontre avec l’Open Socitey Institute

La délégation a entrepris sa deuxième journée par une présentation sur l’indice européen de rattrapage de M. Georgi Stoytchev, directeur général, et de M. Marin Lessenski, directeur de programme, à l’Open Society Institute à Sofia. Avec cet indice, on analyse des données visant à établir dans quelle mesure les 10 nouveaux États membres issus du postcommunisme européen rattrapent les États membres plus anciens de l’Europe de l’Ouest. L’indice recourt à 47 indicateurs pour constater le degré de convergence ou de divergence dans quatre domaines, à savoir l’économie, la qualité de vie, la démocratie et la gouvernance. Dans sa présentation de ces données, M. Lessenski a bien mentionné que, si les États membres plus récents sont généralement plus bas dans le classement, ils n’en progressent pas moins, plus particulièrement sur le plan des indicateurs économiques. La gouvernance et la qualité de vie demeurent un problème dans les jeunes États membres, fait digne de mention si on considère que la réussite économique n’est pas nécessairement synonyme d’amélioration de la qualité de vie. L’Estonie et la République tchèque se classent en général aux premiers rangs parmi les nouveaux États membres, tandis que la Roumanie et la Bulgarie ont encore beaucoup de chemin à faire dans presque toutes les catégories. La Bulgarie en particulier a une faible dette publique, mais ne s’en tire pas aussi bien dans les catégories sociales, qu’il s’agisse d’éducation, d’espérance de vie, d’inégalité, de risque de pauvreté ou de chômage de longue durée. On peut noter avec intérêt que certains États membres plus anciens accusent un recul en réalité et que certains sont même dépassés par des États membres plus jeunes.

M. Stoytchev a fait part à la délégation de certaines observations plus générales sur les données en parlant du processus d’accession à l’UE et en indiquant que les pays préparant leur accession ont tendance à faire des progrès rapides, mais que, une fois devenus membres, ils n’ont plus réellement à subir un mécanisme de surveillance et il est alors difficile pour la Commission européenne d’influer sur la gouvernance et la démocratie dans les États membres (contrairement à sa capacité à réglementer les affaires économiques). Il a signalé à la délégation que l’importance du Mécanisme de coopération et de vérification pour la Bulgarie et la Roumanie va en s’estompant et que celui ci devient parfois même contreproductif. Il a indiqué que Transparency International classe la Bulgarie à un niveau pire que ne le fait l’UE à son indice de la perception de la corruption. En Bulgarie, les institutions se doivent de mieux rendre des comptes.

Rencontre avec la Confédération des syndicats indépendants

La délégation a ensuite rencontré des représentants de la Confédération des syndicats indépendants avec à sa tête M. Plamen Dimitrov, président. Celui ci a indiqué que la Confédération des syndicats indépendants est le plus grand des deux principaux syndicats bulgares. La main-d’œuvre de ce pays est syndiquée dans une proportion approximative de 20 % (quelque 300 000 travailleurs) et 14 % des travailleurs appartiennent à la Confédération des syndicats indépendants. À propos de la population active, M. Dimitrov s’est étendu sur la crise démographique qui sévit en Bulgarie et sur les pénuries de main-d’œuvre engendrées par de hauts niveaux d’émigration. Le pays se situe au dernier rang pour les salaires dans l’UE et la rémunération y est même inférieure à celle des pays de l’ouest des Balkans hors UE. Même si les salaires sont en hausse, ils demeurent modestes dans l’ensemble. En ce qui concerne le taux fixe de 10 % d’imposition du revenu des entreprises et des particuliers en Bulgarie, il a dit ne pas être opposé à l’impôt des sociétés dans la mesure où les entreprises sont en mesure de croître et de faire preuve de transparence. Il reste que l’absence d’un seuil d’assujettissement à l’impôt crée de la pauvreté dans les classes laborieuses. Il recommande de mettre en œuvre un seuil de non-assujettissement équivalant au salaire minimum.

M. Dimitrov a fait remarquer que la syndicalisation a été en régression entre le début des années 1990 et le début des années 2010 au gré de la restructuration de l’économie nationale et d’une montée des privatisations et des fermetures d’usines. En 1998, le pays présentait un taux de chômage de plus de 20 %, mais depuis 2012, la syndicalisation est en croissance. Depuis lors, son syndicat a tenté de se repositionner dans une conjoncture en évolution rapide grâce aux technologies émergentes. Il a fait remarquer la difficulté que l’on a à syndiquer la main-d’œuvre dans les nouveaux secteurs, car il est parfois difficile de distinguer les simples travailleurs des entrepreneurs. Il a précisé que la Bulgarie se heurte au défi d’un fossé numérique dans sa population où 35 % des gens sont très bien formés à celui ci et où 33 % n’ont par ailleurs jamais utilisé Internet.

Sur la question du Brexit, il a indiqué que les négociations ont représenté un enjeu important pour le mouvement syndical. Quelle que soit l’issue de l’affaire, la libre circulation des gens ne sera plus la même et les deux camps auront perdu au change. Il a signalé que les syndicats au Royaume-Uni craignent que, après le Brexit, les lois et les normes de l’UE ne s’appliquent plus, d’où un effet négatif possible sur les droits sociaux et les droits du travail dans le pays.

Pour ce qui est de l’AECG, il a dit que la Confédération des syndicats indépendants ne s’oppose pas radicalement à cet accord et qu’elle adopte une position modérée, puisque nombre de ses préoccupations, notamment en ce qui concerne le mécanisme de règlement des différends entre investisseur et État, ont trouvé une solution en cours de négociation. Elle continue cependant à se préoccuper de tout ce qui est services publics en se demandant, par exemple, comment l’AECG influera sur les prix du service des eaux. La Bulgarie est un pays pauvre où on ne peut donc se permettre de payer davantage. Dans ce pays, l’industrie agricole reçoit aussi moins de subventions que dans le reste de l’UE, et on ne sait au juste si cette situation créera un problème dans l’avenir.

Rencontre avec la sous-ministre des Affaires étrangères

La délégation a ensuite rencontré Son Excellence Mme Emilia Kraleva, sous-ministre des Affaires étrangères en compagnie de M. Harizan Harizanov, de la direction ministérielle pour les politiques et les institutions de l’UE, et de Mme Tsveta Mineva, chef du bureau de l’Amérique de ce même ministère. L’ambassadrice Kraleva a commencé la réunion en discutant de la présidence bulgare prochaine de l’UE, soulignant que les temps étaient difficiles et énumérant certaines des priorités de son pays. Une de ses grandes préoccupations est du côté des voisins de l’ouest des Balkans. C’est là un choix logique pour la Bulgarie qui a besoin de sécurité et de stabilité dans la région. Elle a insisté sur l’importance d’attirer l’attention de l’UE à long terme sur cette région malgré la fatigue que cause actuellement la question de l’élargissement de l’UE. La Bulgarie vise à rapprocher les dirigeants de l’UE et de l’ouest des Balkans le plus possible ces prochains mois.

Cet examen des priorités a été suivi d’un vaste aperçu des événements des dernières années dans les Balkans. Il a été question d’un certain nombre de gouvernements favorables à l’UE qui sont maintenant en place dans des pays comme la Macédoine, la Serbie et l’Albanie. Récemment, la Bulgarie et la Macédoine ont également signé un traité d’amitié, jalon d’importance dans leurs relations bilatérales. L’ambassadrice Kraleva a dit néanmoins se soucier de la situation du Kosovo, pays qui n’est pas encore reconnu par tous les pays de l’UE et qui est encore loin d’une intégration à l’UE.

En réponse à des questions, l’ambassadrice Kraleva et M. Harizanov ont parlé des initiatives actuelles de l’UE en gestion des migrants en faisant valoir l’importance d’un contrôle des frontières, d’un partage des charges et d’une protection des migrants en attente des décisions dans leur dossier. L’ambassadrice a indiqué que, bien qu’étant une nation de première ligne pour la migration, la Bulgarie n’est pas pour autant dans une situation très difficile à cet égard aujourd’hui. Elle demeure vigilante et reconnaît l’importance de l’accord entre l’UE et la Turquie pour la gestion des migrants.

Pour ce qui est des relations entre le Canada et la Bulgarie, elle a souligné l’appui que prête la Bulgarie à l’AECG et noté l’importance de la coopération par des tribunes comme celle de l’OTAN. Elle a dit espérer une rencontre bilatérale des ministres des Affaires étrangères dans un proche avenir.

Rencontre avec Telus International Europe

La délégation s’est ensuite rendue à Telus International Europe, centre de contact multilingue, fournisseur de services externalisés de processus d’affaires et de technologies de l’information et société canadienne. M. Xavier Marcenac, président, a donné à la délégation un aperçu de l’expansion de l’entreprise en Europe de l’Est. Celle ci compte aujourd’hui 3 700 employés dans toute la Bulgarie et la Roumanie. Elle entend devenir un fournisseur de services de choix. Elle travaille actuellement en 35 langues et sert une clientèle paneuropéenne.

M. Marcenac et ses collègues ont renseigné la délégation sur les initiatives de Telus en matière de responsabilité sociale de l’entreprise en insistant sur le milieu de travail favorable que crée la société avec un accès à un éventail d’installations (gymnase, par exemple) et de services (navette gratuite pour le quart de nuit, massages, services psychologiques, etc.) pour les employés et avec de généreux salaires qui sont de cinq fois le salaire minimum en Bulgarie. Il a signalé que Telus International Europe s’appuie sur une main-d’œuvre hautement qualifiée et qu’elle aura besoin de plus en plus de compétences à mesure qu’elle prendra de l’expansion. Les perspectives d’avancement professionnel sont importantes chez Telus. La délégation a appris que l’âge moyen des travailleurs de l’entreprise est de 24 à 26 ans et que les deux tiers des gens sont bulgares. Un des grands problèmes auxquels doit faire face la société est le fort roulement de personnel, dont le fait que les employés les plus qualifiés quittent souvent leur emploi pour exploiter les possibilités qui s’offrent à l’étranger. À l’heure actuelle, Telus essaie d’attirer les Bulgares qui ont émigré par des primes à la réinstallation.

La délégation a conclu la rencontre en faisant le tour des installations de Telus International Europe.

Rencontre avec Mme Denica Zheleva, conseillère du premier ministre sur la politique étrangère et les affaires de l’UE

La délégation s’est ensuite entretenue avec Mme Denica Zheleva, conseillère du premier ministre pour les affaires de l’UE. L’intéressée a souligné l’importance de la visite de la délégation et fait valoir les grandes perspectives de développement des relations canado-bulgares. Elle s’est dite convaincue que l’AECG serait ratifié ces prochains mois par le parlement de son pays.

Aux questions posées par la délégation sur la prochaine présidence bulgare du Conseil de l’UE, Mme Zheleva a insisté sur le vif enthousiasme que suscitent l’UE et les institutions européennes dans son pays comparativement à certains autres pays membres. Elle a fait remarquer que l’adhésion à l’UE avait été une des meilleures choses qui soient arrivées à son pays ces dernières années, plus particulièrement dans le contexte de son affranchissement du communisme. Elle a souligné le fait que, depuis le Traité de Lisbonne, le Conseil européen est responsable au premier chef de la gestion quotidienne de l’UE. En revanche, la présidence du Conseil de l’UE est l’occasion pour les États membres de mettre leur propre pays en valeur et d’attirer l’attention sur des enjeux qui autrement ne trouveraient pas leur place dans le programme d’action de l’Union. La présidence bulgare donnera la possibilité de se focaliser sur la région de l’ouest des Balkans et de poursuivre la réalisation du programme du numérique. En Bulgarie, l’inégalité est un enjeu bien réel dans l’accès au numérique, puisque 40 % des travailleurs n’ont aucune compétence de base en informatique et que certains ministères ne logent pas encore à l’enseigne du numérique.

Mme Zheleva a aussi parlé de sécurité énergétique et de la nécessité de diversifier les sources et les filières de l’énergie, surtout si on considère que 97 % de l’énergie du pays vient actuellement de la Russie. Accroître le nombre d’interconnexions dans toute l’Europe est une priorité bien concrète. La Bulgarie pourrait aussi se donner un jour la capacité d’exploiter les ressources de la mer Noire en gaz naturel. Elle augmente déjà son recours aux énergies renouvelables en délaissant l’énergie nucléaire.

À une question au sujet de la Corée du Nord, Mme Zheleva a bien fait voir que la Bulgarie compte parmi les quelques États membres de l’UE à entretenir des relations diplomatiques avec la Corée du Nord et qu’elle tente de maintenir un certain dialogue malgré les difficultés. Dans ce contexte, elle a insisté sur l’importance de veiller à ce que la Chine soit conviée à la table d’un règlement si on entend accomplir de véritables progrès.

Rencontre avec des membres d’organismes de la société civile

La délégation a ensuite tenu une table ronde à huis clos avec des organismes de la société civile, plus précisément avec des représentants des médias, d’une entreprise d’études de marché et de recherche sociale et de centres de réflexion comme la Konrad Adenauer Stiftung, la Friedrich Naumann Foundation for Freedom et le Centre for the Study of Democracy. Il a été question entre autres de la migration, de la liberté de la presse et de l’évolution des médias, des niveaux de revenu, du chômage, de l’émigration de jeunes travailleurs qualifiés, de l’état de l’économie bulgare et de la corruption dans le pays.

Réception tenue par l’ambassade

La deuxième journée s’est terminée par une réception tenue par l’ambassadeur Hamilton et les services de l’ambassade. Les délégués ont pu continuer à converser avec un grand nombre de personnes qu’ils avaient rencontrées au fil de la mission, ainsi qu’avec certaines personnes incapables de participer aux rencontres des jours précédents.

Visite de Dundee Precious Metals

Le dernier jour de la mission, la délégation a visité en compagnie de M. Duggan les installations de la Dundee Precious Metals à Chelopech. C’est là une société minière canadienne à vocation internationale qui exerce des activités en Bulgarie. Il y a d’abord eu une présentation par M. Iliya Garkov, directeur général, et ses collègues. À cette rencontre ont également assisté un certain nombre de représentants des collectivités environnantes, ainsi que de députés bulgares de divers partis. M. Garkov a brossé à l’intention de la délégation un tableau technique de l’exploitation aurifère. Il a parlé du souci de sa société de protéger l’environnement, de ses initiatives dans le milieu en matière de sécurité et d’initiatives en responsabilité sociale de l’entreprise (investissements communautaires, programmes de stages, initiatives en santé, activités sportives, etc.). À l’heure actuelle, l’entreprise compte 1 250 employés dans ses deux lieux d’implantation en Bulgarie. La mine d’or de Chelopech devait au départ fermer ses portes en 2010, mais la société a pu jusqu’ici accroître sa longévité. L’exposé de M. Garkov a été suivi d’une visite avec explications dans les installations de surface de cette exploitation minière.

Rencontre et déjeuner avec les maires de Chelopech et Chavdar

Les activités de la Dundee Precious Metals ont transformé les collectivités voisines en apportant des emplois et des fonds pour des améliorations de l’infrastructure (notamment par une mobilisation de fonds de l’UE). Les maires de Chelopech et de Chavdar ont accueilli la délégation chacun dans leur municipalité et exposé les avantages pour leur milieu à avoir cette mine dans la région. Il reste que la mine n’existera pas indéfiniment et que les municipalités sont à la recherche d’autres entreprises garantes du maintien de leur prospérité. Les maires ont incité la délégation à faire part aux entreprises canadiennes de l’intérêt qu’elles auraient à être actives et à investir dans la région.

Rencontre avec la ministre responsable de la présidence bulgare du Conseil de l’UE

La délégation a conclu sa mission en Bulgarie par une rencontre avec Mme Lilyana Pavlova, ministre responsable de la présidence bulgare du Conseil de l’UE. Celle ci a donné un aperçu des priorités de son pays pour la présidence : représenter la région de l’ouest des Balkans à l’UE, notamment en organisant un sommet sur les relations entre l’UE et la région de l’ouest des Balkans, se concentrer sur la connectivité (marché commun du numérique, connectivité en matière d’énergie et de transport, etc.), se concentrer sur l’immigration et la sécurité (union pour la défense, contrôle des frontières, réinstallation des demandeurs d’asile, relations de travail avec la Turquie, etc.) et sonder l’avenir de l’Europe, plus particulièrement dans le contexte du Brexit. La ministre Pavlova a fait remarquer que, quoi qu’il arrive, la Bulgarie ne peut que s’attendre à l’inattendu en donnant l’exemple de l’agitation qu’a récemment suscitée le mouvement indépendantiste de la Catalogne. Répondant aux questions de la délégation, la ministre Pavlova a signalé que les priorités que s’est fixées provisoirement la Bulgarie sont maintenant débattues en commission parlementaire et que les comités en question présenteront leur rapport en plénière. Elle a évoqué les perspectives du gouvernement en place en ce qui concerne la présidence et signalé que même les membres nationalistes de la coalition appuient le programme gouvernemental à cet égard. En dépit de certaines appréhensions manifestées par l’UE, elle avait l‘impression que les ministres de la Défense et de l’Environnement, issus du parti des Patriotes unis, se montreraient favorables aux positions de l’UE et de la Bulgarie lorsqu’ils présideraient des réunions clés en cours de présidence.

Pour ce qui est de l’avenir de l’UE, la ministre Pavlova a affirmé que, malgré le Brexit ou peut-être à cause de lui, l’EU27 était plus unie que jamais, tout en soulignant les tensions qui règnent entre les États membres prônant une Europe à deux vitesses que les États membres peuvent intégrer à différents niveaux et à différentes vitesses et ceux qui s’opposent à cette approche.

La ministre Pavlova a insisté sur la position pro-européenne de la Bulgarie compte tenu des avantages qu’elle a tirés de l’UE depuis qu’elle y a adhéré. Son pays a néanmoins à progresser encore dans la voie de la convergence. Sur la question de la Bulgarie et de son accession à l’espace Schengen, elle a fait observer que le pays répond dès à présent aux critères d’accession en s’étant doté d’une solide sécurité à la frontière, alors que d’autres qui appartiennent déjà à cette zone ne répondent même pas aux critères et qu’aucune mesure n’est prise pour les amener à s’y conformer davantage. À ses yeux, d’importantes réformes sont nécessaires dans l’espace Schengen. Elle a aussi indiqué que la Bulgarie était prête à accéder à la zone euro, la monnaie bulgare étant raccordée à l’euro depuis déjà un certain temps.

Enfin, sur la question de la sécurité de l’énergie et des changements climatiques, la ministre Pavlova a dit que la Bulgarie avait atteint tôt ses objectifs en matière d’énergie renouvelable, mais que maintenant il y avait une montée des coûts et un prix des plus élevés pour l’énergie renouvelable. Pour elle, la Bulgarie ne tirait pas son épingle du jeu dans les mesures d’efficacité énergétique, notamment en matière d’entretien de bâtiments et d’usines. Le pays devait aussi s’employer à réduire les émissions de CO2 des véhicules. Elle a enfin évoqué la question du gazoduc South Stream en mentionnant que la Bulgarie est un carrefour pétrolier pour la région des Balkans entre le Moyen-Orient et la Russie.

PARTICIPATION À LA QUATRIÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE 2017 DE L’ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DU CONSEIL DE L’EUROPE

Du 9 au 13 octobre, la délégation a participé à la quatrième partie de la Session ordinaire de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, où le Canada a un statut d’observateur. S’est joint à la délégation à Strasbourg M. Alan Bowman, chef adjoint de la mission du Canada auprès de l’Union européenne et observateur permanent du Canada au Conseil de l’Europe.

A.         Aperçu de l’ordre du jour de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

Au cours de la quatrième partie de la Session, de nombreux sujets ont été débattus à l’Assemblée et dans les commissions et les groupes politiques. L’Assemblée a tenu des débats sur les sujets suivants :

  • rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente;
  • observation des élections législatives en Albanie (25 juin 2017);
  • activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2016-2017;
  • suivi de la Résolution 1903 (2012): la promotion et le renforcement de la transparence, de la responsibilité et de l’intégrité des membres de l’Assemblée parlementaire;
  • évaluation du partenariat pour la démocratie concernant le Parlement de Jordanie;
  • fonctionnement des institutions démocratiques en Azerbaïdjan;
  • présidence azerbaïdjanaise du Conseil de l’Europe: quelles sont les suites à donner en matière de respect des droits de l’homme?
  • appel pour un sommet du Conseil de l’Europe afin de réaffirmer l’unité européenne et de défendre et promouvoir la sécurité démocratique en Europe;
  • défendre l’acquis du Conseil de l’Europe : préserver le succès de 65 ans de coopération intergouvernementale;
  • « Liste des critères de l’État de droit » de la Commission de Venise;
  • nouvelles menaces contre la primauté du droit dans les États membres du Conseil de l’Europe - exemples sélectionnés;
  • débat d’urgence sur la nouvelle loi ukrainienne sur l’éducation : une entrave majeure à l’enseignement des langues maternelles des minorités nationales;
  • poursuivre et punir les crimes contre l’humanité voire l’éventuel génocide commis par Daech;
  • débat des affaires courantes sur la nécessité d’une solution politique à la crise en Catalogne;
  • le recours aux nouvelles technologies génétiques chez les êtres humains;
  • promouvoir des droits humains et éliminer les discriminations à l’égard des personnes intersexes;
  • les jeunes contre la corruption;
  • débat libre.

L’Assemblée a également entendu les orateurs suivants :

  • M. Lubomír Zaorálek, ministre des Affaires étrangères de la République tchèque et président du Comité des ministres;
  • M. Angel Gurría, secrétaire général de l’OCDE;
  • M. Miloš Zeman, président de la République tchèque;
  • M. Petro Poroshenko, président de l’Ukraine;
  • M. Gianni Buquicchio, président de la Commission européenne pour la démocratie par le droit.

De plus, un vote s’est tenu sur le remplacement de M. Pedro Agramunt, ex-président de l’Assemblée ayant donné sa démission le 6 octobre 2017. Après trois tours de scrutin, Mme Stella Kyriakides de Chypre a été élue présidente de l’Assemblée. Elle demeurera en poste jusqu’à l’ouverture de la prochaine session ordinaire en janvier 2018.

B.         Activités de la délégation canadienne durant la session

1.         Aperçu

Les membres de la délégation canadienne ont pris une part active aux séances de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en plénière et en commission. Ils ont par ailleurs assisté aux réunions de divers groupes politiques au sein de l’Assemblée.

De plus, la délégation a eu droit à une séance d’information tenue par M. Alan Bowman et elle a rencontré M. Gurría, secrétaire général de l’OCDE, et M. Bernd Kölmel, chef de la délégation du Parlement européen pour les relations avec le Canada.

Enfin, deux membres de la délégation se sont rendus à Paris le 11 octobre pour participer à la réunion du Réseau parlementaire mondial de l’OCDE.

2.         Séance d’information donnée par l’observateur permanent du Canada au Conseil de l’Europe

Le 9 octobre, la délégation a rencontré M. Bowman, chef adjoint de la mission du Canada auprès de l’UE et observateur permanent du Canada au Conseil de l’Europe. L’intéressé a d’abord donné un aperçu de la position actuelle de la Russie à l’égard du Conseil de l’Europe et de l’Assemblée parlementaire. Les droits de vote de la Russie à l’Assemblée ont été suspendus en 2014 en réaction aux événements en Crimée. Ainsi, la Russie n’a pas présenté ses lettres de créance à l’Assemblée en 2016 et 2017. Cette année, la Russie a demandé au secrétaire général du Conseil de l’Europe quelle partie de sa propre contribution au budget du Conseil allait à l’Assemblée. Le secrétaire général a refusé de ventiler la somme et, par conséquent, la Russie a interrompu jusqu’à nouvel ordre le paiement de sa contribution à tout le budget du Conseil de l’Europe en juin. Elle a été par le passé un des plus généreux bailleurs de fonds du Conseil et le retrait de son financement a laissé un large déficit à l’organisme pour l’exercice en cours.

M. Bowman a ensuite parlé plus généralement du rôle du Conseil de l’Europe sur la scène internationale comparativement à celui de l’UE, faisant ressortir la constante importance de la Cour européenne des droits de l’homme, la mission d’édification des capacités du Conseil de l’Europe et l’intérêt que présente le Conseil comme tribune pour l’examen des questions qui n’auraient pas la même priorité dans le programme européen ou international, qu’il s’agisse de bioéthique ou de cybercriminalité. Il a fait remarquer que le Canada n’a pas un très fort engagement auprès du Conseil, parce que dans ses politiques d’aide, il tend à privilégier les pays plus pauvres. Le Conseil de l’Europe n’en demeure pas moins une grande tribune d’examen des enjeux européens, et nous sommes signataires de certaines des conventions du Conseil. À titre d’exemple, M. Bowman a signalé qu’une convention sur la reconnaissance des diplômes que le Canada a signée dans les années 1980 sera bientôt ratifiée et sans doute déposée au Parlement.

En ce qui concerne l’AECG, il a indiqué que l’application provisoire de cette entente semble donner déjà de bons résultats et que, par exemple, les exportations de fruits de mer et de homards paraissent bien marcher. Le Canada ne veut pas pour autant pousser les divers pays à ratifier l’AECG, puisqu’ils pourront vite constater eux-mêmes que certains des scénarios négatifs invoqués par les opposants à cet accord ne se matérialisent pas.

Sur la question du Brexit, il a parlé de l’état actuel des négociations dans trois dossiers de première importance, ceux des droits des citoyens, des engagements financiers et de la frontière avec l’Irlande du Nord. Il a souligné que l’UE désire que des progrès suffisants se fassent dans la négociation du « divorce » pour ces enjeux avant qu’il ne soit question des relations futures, alors que le Royaume-Uni souhaiterait aborder ces deux aspects de front. La première ministre May semble néanmoins réceptive à la perspective d’une période de transition où le Royaume-Uni continuerait à verser sa contribution à l’UE. Tout compte fait, le Canada entend être un bon partenaire des deux côtés, mais se trouve dans l’incapacité de négocier officiellement un traité commercial avec le Royaume-Uni tant que ce pays n’aura pas quitté l’UE.

Pour ce qui est des élections récentes en Allemagne, M. Bowman a mentionné la montée de partis allemands plus marginaux et, en particulier, celle de l’AfD dans l’est du pays. Ce résultat peut être lié à l’ouverture de l’ancien gouvernement en matière d’immigration, mais les sentiments anti-immigrants ont toujours existé. Pour lui, c’est que la voix de ce mouvement semble mieux se faire entendre.

La délégation a aussi parlé des prochaines affaires courantes à traiter et des débats d’urgence. M. Bowman a mis en évidence les commentaires de la ministre des Affaires étrangères à propos du mouvement indépendantiste de Catalogne; celle ci s’inquiétait des incidents signalés de violence en insistant sur la nécessité d’en venir à un règlement par des moyens pacifiques conformes au droit constitutionnel. Sur la question de la législation ukrainienne en éducation, M. Bowman a mentionné les tensions diverses dans ce dossier en soulignant que le Canada a vu d’un bon œil les initiatives de l’Ukraine pour une collaboration étroite dans ce dossier avec le Conseil de l’Europe et la Commission de Venise.

En préparation des interventions de la délégation dans le débat à l’OCDE et la rencontre avec M. Gurría, M. Bowman a mis en lumière les compétences et les priorités actuelles de l’OCDE en mentionnant entre autres comme enjeux le ressac dans le domaine du commerce, la fragilité de l’économie mondiale, l’interconnexion, les moteurs de l’innovation et le développement durable. Sur la question de l’élargissement de l’OCDE, il a souligné que le Canada avait un rôle de chef de file à jouer, celui de s’assurer que des critères objectifs (et non pas politiques) seraient appliqués dans ce mouvement d’expansion.

3.         Rencontre avec le secrétaire général de l’OCDE

La délégation a rencontré M. Gurría, secrétaire général de l’OCDE, le 10 octobre dans le cadre d’un débat élargi sur les activités de cet organisme. M. Gurría a signalé un certain nombre de rapports d’intérêt pour le Canada qui avaient été publiés par l’OCDE dans la dernière année. La délégation et lui ont échangé sur diverses questions, notamment sur l’AECG et les difficultés actuellement liées à l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). À son avis, l’AECG envoyait un puissant message positif à un monde qui semblait s’en prendre de diverses façons à la libéralisation des échanges. La délégation a fait valoir l’importance de la consultation, tout comme le devoir de veiller à ce que de tels accords commerciaux soient aussi liés à des ententes politiques, de sorte que le commerce ne soit pas vu comme isolé des autres enjeux.

La délégation et M. Gurría ont ensuite parlé des questions d’inégalité de revenu dans le travail, la culture et l’éducation, ainsi que du problème des disparités régionales en matière d’abordabilité du logement au Canada et dans d’autres pays. Dans les questions d’immigration, M. Gurría a fait observer que le Canada ne connaissait pas les problèmes démographiques auxquels se heurtaient certains autres pays, ayant des politiques de l’immigration qui encouragent une intégration durable. Il a indiqué que le Canada présentait un des plus hauts pourcentages de membres de la population active nés à l’étranger. Le Canada parvient à tirer ce qu’il y a de mieux de ses immigrants et il les met à l’aise en évitant la ghettoïsation qui pose aujourd’hui un problème dans d’autres pays d’Europe. M. Gurría a reconnu que les immigrants syriens accueillis par le Canada sont généralement plus instruits que les migrants qui arrivent dans l’UE. Il a bien dit que, selon l’OCDE, la migration est payante pour les pays d’accueil. Dans le même ordre d’idées, il a insisté sur l’importance de l’éducation de la petite enfance qui permet aux mères de revenir sur le marché du travail et aide les enfants à obtenir de meilleurs résultats scolaires à long terme.

4.         Rencontre avec le Réseau parlementaire mondial de l’OCDE

Le 11 octobre, le chef de la délégation, M. Scott Simms, et le sénateur David Wells ont assisté à la réunion du Réseau parlementaire mondial de l’OCDE à Paris. Le secrétaire général Gurría a ouvert la séance et mentionné les principaux thèmes à l’ordre du jour.

La première séance a porté sur les idées phares dans Perspectives de l’économie numérique de l’OCDE 2017, document qui traite surtout de la façon dont la transformation numérique agit sur les économies et les sociétés. M. Dirk Pilat, directeur adjoint, Direction de la science, de la technologie et de l’industrie, a donné un aperçu des tendances de la convergence, de l’évolution des politiques et des données sur l’offre et la demande dans l’économie numérique en illustrant en quoi cette transformation se met au service de la croissance et du bien-être. Il a aussi fait voir l’importance de procurer aux décideurs les outils dont ils ont besoin pour élaborer des stratégies pangouvernementales du numérique et favoriser une fructueuse coopération entre les pays. Cela demande de la connectivité, et l’effet est d’enrichir les compétences pour l’ensemble des citoyens. Par ailleurs, un recours efficace à la technologie avancée et une solide coordination en matière stratégique aident à combler l’écart entre la technologie et l’élaboration des politiques. Il a été noté que la sécurité et la protection de la vie privée sont un défi croissant à relever.

La deuxième séance a porté sur des études de cas en intégration des migrants. L’intégration des immigrants et de leurs enfants représente un important souci des artisans des politiques dans nombre de pays de l’OCDE. On a signalé que plus de une personne sur cinqdans ces pays est née à l’étranger ou encore au pays, mais avec au moins un parent issu de l’immigration. On a dit que cette proportion devrait encore s’accroître. Toutefois, les résultats des immigrants sont à la traîne de ceux des parents nés au pays pour tous les grands aspects de l’immigration : marché du travail, éducation, inclusion sociale, etc. On a souligné que les immigrants ont tendance à se concentrer en région urbaine et dans les capitales. Les deux tiers de la population née à l’étranger dans les pays de l’OCDE vivent en moyenne dans les villes et les demandeurs d’asile semblent d’une répartition plus homogène encore. On jugeait qu’il était essentiel de s’attaquer aux entraves à l’intégration de manière à ménager une cohésion sociale et une acceptation de l’immigration future par la population du pays d’accueil compte tenu de la diversité des situations locales. Les participants ont récapitulé les grands défis et les bonnes pratiques en matière de politiques qui favorisent une intégration durable des immigrants et de leur famille.

À cette séance, M. Simms a été invité à parler de l’histoire unique du Canada en matière d’immigration. Il a présenté des cas de réussite appartenant à sa province d’origine, Terre-Neuve-et-Labrador. Son exposé a démontré avec quelle efficacité les politiques d’intégration peuvent enrichir les provinces économiquement, socialement et culturellement en proposant une meilleure vie aux gens et de riches perspectives de développement.

La troisième séance a porté sur l’innovation et la cocréation dans le secteur public. Sur le mode interactif, les parlementaires ont fait ressortir le rôle qu’ils peuvent jouer dans l’innovation du secteur public en évoquant une fonction de moteur de changement dans le domaine des politiques. M. Marco Daglio, chargé de projet à l’Observatory for Public Sector Innovation, a livré la rétroaction des différents groupes de travail.

La dernière séance a été consacrée au plan d’action de l’OCDE pour la prévention des inégalités dans le vieillissement. M. Stefano Scarpetta, directeur, Direction de l’emploi, du travail et des affaires sociales, et M. Hervé Boulhol, économiste principal, ont montré en quoi les deux tendances mondiales au vieillissement de la population et à la montée des inégalités se sont développées et sont entrées en interaction sur le double plan intragénérationnel et intergénérationnel. Dans un nouveau rapport ayant pour titre « Preventing Ageing Unequally », on adopte une perspective de cycle de vie en décrivant l’interaction des inégalités de l’éducation, de la santé, de l’emploi et du revenu et ce qui peut s’ensuivre comme grandes disparités de cycle de vie parmi les groupes. On a discuté de politiques d’inclusivité dans le vieillissement, le but étant la prévention, l’atténuation et la prise en charge des inégalités et une meilleure retraite pour tous avec des politiques coordonnées par les ministères et les organismes s’occupant de famille, d’éducation, d’emploi et de vie sociale. On a évoqué un certain nombre de facteurs clés visant à juguler les inégalités avant qu’elles ne s’accumulent au fil des ans. Il s’agissait de favoriser un bon départ dans la vie professionnelle, de rompre les liens entre une situation socioéconomique défavorisée et l’état de santé, de limiter les répercussions des pertes d’emploi, de combattre le chômage de longue durée, d’accorder les mêmes chances à tous les travailleurs de parfaire leurs compétences, d’adopter un cadre unifié pour les prestations de retraite de tous les travailleurs et d’écarter les obstacles au recrutement et au maintien en poste des travailleurs âgés. À l’heure actuelle, l’OCDE prévoit une suite de réunions à ce sujet. On présentera aux ministres en 2022 un rapport d’étape sur la mise en œuvre du plan d’action adopté en juin 2017 pour la prévention des inégalités dans le vieillissement.

5.         Rencontre avec le chef de la délégation du Parlement européen pour les relations avec le Canada

La délégation a conclu sa mission à l’APCE en rencontrant M. Bernd Kölmel, chef de la délégation du Parlement européen pour les relations avec le Canada, ainsi que M. Adam Isaacs, chef du bureau des pays transatlantiques et du G8 au Parlement européen. On a d’abord discuté des élections récentes en Allemagne et des pourparlers que mène actuellement la chancelière Merkel en vue de former un nouveau gouvernement de coalition. Les délégués ont ensuite soulevé la question de l’avenir de la Bulgarie comme partie de la zone euro. M. Kölmel est d’avis que la zone euro est compromise et fonctionne seulement aujourd’hui à cause des mesures que prend la Banque centrale européenne pour la préserver. Son parti pense que cette zone devrait rétrécir à l’avenir. On a aujourd’hui une bulle qui pourrait bientôt éclater et toute cette situation a une incidence sur le bien-être des travailleurs et, en définitive, sur l’état de la démocratie dans l’UE. Il a fait observer que l’Allemagne n’a aucun problème à être un pays contributeur net à l’UE avec tant de succès comme l’espace Schengen et la coopération dans des dossiers comme celui de l’environnement. À son avis, il n’est pas bon cependant de continuer à multiplier les compétences de l’UE. Il veut que l’Allemagne ait voix au chapitre dans la mise en place des futures structures de l’UE à la suite du livre blanc déposé par M. Juncker. D’après lui, l’Europe a besoin d’une UE petite et efficace qui n’est pas là à assumer de plus en plus de rôles. Selon lui, les États membres doivent prendre la responsabilité de leur propre développement et les États qui ne peuvent tirer leur épingle du jeu dans la zone euro devraient renoncer à la monnaie commune.

En réponse à des questions de M. Kölmel, la délégation a ensuite abordé des questions diverses : mission en Bulgarie avec les observations de la délégation sur les défis démographiques, la corruption et l’initiative de rapprochement avec l’ouest des Balkans; l’avancement des négociations de l’ALENA et les préoccupations et les priorités du Canada; et les problèmes de l’heure en matière de migration comme l’afflux de migrants haïtiens à la frontière du Québec, le débat politique au sujet de l’Entente entre le Canada et les États-Unis sur les tiers pays sûrs et l’immigration vers les provinces canadiennes de l’Atlantique comme solution aux problèmes démographiques de cette région. La rencontre s’est terminée par l’examen des dates des futures réunions, dont la prochaine réunion interparlementaire à Ottawa en mai 2018.

C.         Interventions des délégués canadiens dans le cadre des débats de l’Assemblée

M. Scott Simms, le sénateur David Wells, M. David Tilson et M. Nick Whalen ont participé aux débats de l’Assemblée pour cette partie de session, faisant huit interventions et déposant trois autres discours sur un éventail de grands sujets. Les hyperliens vers les discours des délégués sont disponibles au site Web de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe[1].

1.         Le mardi 10 octobre 2017

M. Scott Simms a prononcé une allocution sur les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2016 2017. M. Nick Whalen n’a pas été en mesure de s’adresser aux personnes présentes, mais a déposé un discours sur cette question.

M. Simms a prononcé une allocution sur le suivi de la Résolution 1903 (2012) : la promotion et le renforcement de la transparence, de la responsabilité et de l’intégrité des membres de l’Assemblée parlementaire.

2.         Le mercredi 11 octobre 2017

M. David Tilson a prononcé une allocution sur l’appel pour un sommet du Conseil de l’Europe afin de réaffirmer l’unité européenne et de défendre et promouvoir la sécurité démocratique en Europe.

M. Whalen n’a pas été en mesure de s’adresser aux personnes présentes, mais a déposé un discours sur défendre l’acquis du Conseil de l’Europe : préserver le succès de 65 ans de coopération intergouvernementale.

M. Tilson n’a pas été en mesure de s’adresser aux personnes présentes, mais a déposé un discours sur les nouvelles menaces contre la primauté du droit dans les États membres du Conseil de l’Europe - exemples sélectionnés.

3.         Le jeudi 12 octobre 2017

M. Whalen a prononcé une allocution sur poursuivre et punir les crimes contre l’humanité voire l’éventuel génocide commis par Daech.

M. Simms a prononcé une allocution dans le contexte du débat d’actualité sur la nécessité d’une solution politique à la crise en Catalogne.

Le sénateur David Wells et MM. Whalen et Tilson ont aussi présenté des discours sur le recours aux nouvelles technologies génétiques chez les êtres humains.




Respectueusement soumis,





M. Scott Simms, député
Association parlementaire Canada-Europe



[1] Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, Comptes rendus, 2017 – Quatrième partie de session.