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Section canadienne de ParlAmericas

RAPPORT

Une délégation de cinq parlementaires représentant la Section canadienne de ParlAmericas a participé à des réunions tenues à Buenos Aires (Argentine), du 22 au 24 mai 2017, sur l’autonomisation des femmes dans la société et en politique. La délégation était dirigée par l’honorable Robert D. Nault, C.P., député et président de la Section canadienne de ParlAmericas. M. Nault était accompagné de l’honorable Michael MacDonald, sénateur; de l’honorable Mobina Jaffer, sénatrice; de Mme Julie Dzerowicz, députée; de M. Randy Hoback, député; et de Mme Brigitte Sansoucy, députée.

ParlAmericas est une tribune multilatérale créée en 2001 qui rassemble et met en contact des parlementaires des 35 pays des Amériques. Le secrétariat international de ParlAmericas est constitué au Canada. Il demeure la seule tribune interparlementaire ayant son siège à Ottawa.

Depuis la création de ParlAmericas, les pays d’Amérique latine et des Caraïbes ont connu une forte croissance économique et leur situation politique s’est stabilisée. Les pays de la région, qui étaient des marchés émergents, sont en train de devenir des démocraties modernes prospères. Parallèlement, leurs relations avec le Canada continuent de prendre de l’ampleur.

Les travaux et objectifs de ParlAmericas s’articulent principalement autour de trois grands axes : l’équité entre les sexes, l’ouverture des parlements et le changement climatique. En 2003, à l’occasion de la 2e assemblée plénière de ParlAmericas, les délégués ont adopté à l’unanimité la proposition de créer au sein de ParlAmericas une entité permanente qui militerait en faveur de l’égalité des sexes. Ainsi, en 2012, à l’occasion de la 9e assemblée plénière, la nouvelle entité, appelée Groupe des femmes parlementaires (GFP), a mis sur pied un comité exécutif composé d’une présidente, d’une vice-présidente et d’une secrétaire. En 2016, la sénatrice Jaffer a été élue vice-présidente du GFP.

Au cours des réunions du GFP tenues cette année à Buenos Aires, la délégation canadienne a participé aux discussions des parlementaires sur d’importants sujets liés à l’égalité des sexes, notamment la recherche de solutions pour permettre aux femmes d’obtenir la sécurité et l’autonomie économiques ainsi que des stratégies législatives et sociales pour mettre fin à la violence faite aux femmes.

Relations Canada–Argentine

A. Contexte

Les liens entre le Canada et l’Argentine remontent à au moins 1911, année au cours de laquelle le délégué commercial H.R. Pousette a ouvert à Buenos Aires le premier bureau commercial du Canada en Amérique du Sud[1] . Le Canada et l’Argentine entretiennent des relations diplomatiques officielles ininterrompues depuis 1940. L’actuel ambassadeur du Canada en Argentine, M. Robert Fry, a été nommé en 2015.

Les deux pays ont beaucoup en commun, notamment leur approche à l’égard de la promotion des droits de la personne, de l’accroissement de la sécurité dans l’hémisphère, de la lutte contre le changement climatique et de l’appui aux opérations de maintien de la paix. Sur le plan géographique, le Canada et l’Argentine ont tous deux une faible densité de population et un territoire vaste et diversifié où abondent les ressources naturelles.

L’Argentine possède également l’une des plus importantes économies de l’Amérique latine et est l’un des quatre membres du Mercosur[2], un bloc commercial qui, en 2016, représentait un marché de 260 millions de personnes dont le produit intérieur brut se chiffrait à 3,2 billions de dollars[3]. En 2016, les échanges bilatéraux entre le Canada et l’Argentine ont totalisé 1,9 milliard de dollars et, de ce total, la part des exportations canadiennes vers l’Argentine représentait 307,7 millions de dollars. La même année, le commerce bilatéral de marchandises entre le Canada et les pays membres de ce bloc commercial sud-américain totalisait près de 8,1 milliards de dollars[4]. Selon Affaires mondiales Canada, l’Argentine et les pays membres du Mercosur ont manifesté leur intérêt à l’égard de la négociation d’un éventuel traité de libre-échange avec le Canada.

Par ailleurs, certains ponts culturels favorisent également les liens entre le Canada et l’Argentine. Les leaders autochtones de l’Argentine ont accueilli des délégations autochtones du Canada dans le but d’échanger sur leurs positions et leurs expériences respectives. En outre, l’industrie cinématographique de l’Argentine et celle du Canada ont travaillé en étroite collaboration dans le passé. En effet, l’Institut national argentin du cinéma, Téléfilm Canada et l’Office national du film du Canada ont à de nombreuses occasions coproduit des longs métrages de fiction et des documentaires[5].

Dans le domaine des sciences, les chercheurs des deux pays participent conjointement à de nombreuses initiatives. Parmi les exemples de collaboration entre le Canada et l’Argentine, mentionnons les études conjointes dans les domaines de la nanotechnologie, de la biomédecine, de l’environnement et du développement durable, de la science et de la salubrité des aliments et de l’énergie verte. Des bourses d’études sont également offertes aux étudiants argentins désireux de poursuivre au Canada des études supérieures dans certains domaines scientifiques[6].

B. Séance d’information avec des fonctionnaires de l’ambassade du Canada en Argentine

Dans la soirée du 21 mai 2017, la délégation canadienne a rencontré l’ambassadeur Fry et les fonctionnaires qui travaillent à l’ambassade du Canada en Argentine, à l’occasion d’une séance d’information sur des enjeux liés à la politique, au commerce et à la sécurité. La séance s’est tenue à l’ambassade canadienne à Buenos Aires.

La délégation a appris que le Canada et l’Argentine prennent actuellement d’importantes mesures pour renouveler leurs relations bilatérales établies depuis longtemps. L’Argentine constitue un partenaire régional précieux pour le Canada. À titre de participant actif à de nombreuses tribunes multilatérales, l’Argentine est un pays qui a pris des positions similaires à celles du Canada à l’égard de questions comme la promotion des droits de la personne, la diversité et la non-prolifération nucléaire. L’Argentine fait également figure de chef de file au chapitre de l’égalité des sexes et affiche un fort taux de participation des femmes en droit et en politique.

La ville de Buenos Aires demeure un grand centre culturel qui compte le plus grand nombre de théâtres par habitant au monde et une abondance de librairies, de journaux, de dramaturges et d’intellectuels. Approximativement 50 000 Canadiens visitent l’Argentine chaque année.

Au cours du survol de l’histoire politique de l’Argentine présenté à la délégation, il a été souligné que, pendant la première moitié du XXe siècle, l’Argentine affichait des indicateurs socioéconomiques similaires à ceux du Canada et de l’Australie en matière de développement. Toutefois, le pays a été sous le joug de plusieurs dictatures militaires pendant une longue période au cours de la deuxième moitié du XXe siècle. Cette période s’est finalement terminée en 1983 avec le retour à la démocratie.

Dans le but de renforcer la stabilité économique du pays, le gouvernement a récemment pris des mesures pour réduire le taux d’inflation annuel – pour 2018, il vise 5 % –, et, pour lutter contre la corruption endémique, l’Argentine s’est récemment doté d’un poste d’ombudsman anti-corruption.

Pour le Canada, l’Argentine offre un grand potentiel en tant que partenaire commercial et constitue déjà une destination recherchée par les investisseurs canadiens dans les secteurs minier, pétrolier et gazier. Il a été souligné que, dans les années 1970, le Canada a construit le premier réacteur nucléaire de l’Argentine.

Neuvième Rencontre du Groupe des femmes parlementaires

A. Atelier : Les hommes comme alliés dans le travail parlementaire pour l’égalité des sexes

Dans l’après-midi du 22 mai 2017, les parlementaires canadiens ont participé à un atelier sur l’égalité des sexes et sur les enjeux liés aux droits des femmes. Cet atelier, tenu dans la salle Delia Parodi du palais du congrès national argentin, a été animé par Mme Virginia Garcia Beaudoux.

Deux parlementaires ont prononcé une allocution de bienvenue. En premier lieu, la sénatrice Jaffer a déclaré aux participants que les droits des femmes s’inscrivaient dans le droit fil des droits de la personne et elle a demandé aux participants à la discussion de faire preuve de courage et d’aborder des questions difficiles liées à la parité entre les sexes. En second lieu, M. José Luis Riccardo, membre de la Chambre des députés de l’Argentine, a souligné aux participants la nécessité de valoriser les différences entre les sexes dans le but de renforcer le système démocratique.

Pour amorcer la discussion, Mme Garcia Beaudoux a présenté de nombreux arguments pour appuyer l’idée selon laquelle les femmes doivent considérer leurs collègues masculins comme des alliés dans le milieu parlementaire. Elle a entre autres souligné que, sur la scène mondiale, les femmes parlementaires n’occupent que 22 % des sièges dans les assemblées législatives et que seulement 17 % d’entre elles sont ministres. Elle a ajouté qu’au rythme où vont les choses actuellement, il faudra 200 ans pour atteindre l’égalité des sexes au sein des assemblées législatives. Mme Garcia Beaudoux a également affirmé qu’on trouve de grandes lacunes au chapitre de l’égalité des sexes dans les conseils d’administration et que les médias jouent souvent un rôle néfaste en renforçant des stéréotypes dépassés au sujet des femmes parlementaires. Elle a fait état des nombreux avantages que procurerait un accroissement de la participation des femmes en politique.

Au cours de la discussion qui s’en est suivie, les parlementaires ont parlé de leur expérience et des défis qu’ils ont rencontrés lorsqu’ils ont tenté d’améliorer l’égalité des sexes dans les assemblées législatives de leurs pays respectifs. Mentionnons à titre d’exemple que l’assemblée législative de la Bolivie compte plus de 50 % de femmes, que Haïti a mis en œuvre des quotas constitutionnels pour garantir la présence d’un nombre minimal de femmes parlementaires et que le Chili, le Salvador et le Panama se sont dotés de lois prévoyant des quotas pour garantir la participation d’un certain nombre de femmes parlementaires. Les participants ont également convenu que les partis politiques ont un rôle important à jouer pour favoriser et appuyer une participation égale des hommes et des femmes.

Après la pause, les participants à l’atelier ont discuté de l’importance d’inclure davantage de femmes dans la prise de décisions politiques. M. Nault a souligné l’importance d’un partage du pouvoir entre les hommes et les femmes et il a ajouté que comme la politique donne souvent lieu à des affrontements, les acteurs, particulièrement les hommes, doivent s’efforcer d’employer des tactiques et un langage respectueux. M. Hoback a pour sa part indiqué aux participants que le Parlement du Canada n’a établi aucun quota au chapitre de la représentation et que, selon lui, cet état de fait favorise la reconnaissance du mérite.

B. Ouverture officielle de la rencontre

L’ouverture officielle de la neuvième rencontre du Groupe des femmes parlementaires a eu lieu le 23 mai 2017 en matinée. La cérémonie, qui s’est amorcée avec les mots de bienvenue de trois participants et qui s’est poursuivie par une allocution principale, a eu lieu dans la salle de réunion de la Chambre des députés, au palais du Congrès national argentin.

Mme Margarita Stolbizer, membre de la Chambre des députés de l’Argentine et hôte de la rencontre, a fait un survol du passé et du présent politique de l’Argentine. Elle a souligné que les éprouvantes périodes de dictature qu’a connues le pays ont débouché sur l’édification de la solide démocratie d’aujourd’hui. Mme Stolbizer a indiqué que les problèmes d’inégalité et de pauvreté de l’hémisphère affligent les femmes de façon disproportionnée. Elle réclame des changements sur les plans social, juridique et économique. La sénatrice mexicaine Marcella Guerra, présidente de ParlAmericas, a fait état des problèmes sociaux liés à la discrimination et à la violence fondée sur le sexe. Elle a indiqué que l’éducation constituait le principal outil pour lutter contre l’inégalité et la pauvreté. La sénatrice a entre autres souligné qu’il faut réduire les écarts salariaux entre les hommes et les femmes et éliminer la violence fondée sur le sexe. Mme Patricia Gimenez, membre de la Chambre des députés de l’Argentine, a informé les délégués des mesures prises par l’assemblée nationale argentine pour promouvoir l’égalité des sexes. Mme Gimenez a précisé que le pays a établi un quota visant à assurer que les femmes occupent 30 % des sièges à l’assemblée législative et que, à l’heure actuelle, environ 33 % des députés sont des femmes. Mme Gimenez a néanmoins indiqué que, à son avis, l’imposition de quotas n’est pas aussi importante que les changements culturels et sociétaux.

En dernier lieu, c’est Mme Minou Tavarez Mirabel, une ancienne parlementaire de la République dominicaine, qui a prononcé le discours principal lors de la cérémonie d’ouverture. Mme Mirabel a entre autres déclaré que les gouvernements devraient imposer des normes d’équité et d’égalité entre les sexes et que de nombreux problèmes sociaux, notamment la corruption, la subornation, la fraude électorale, l’impunité, l’appât du gain et la faiblesse des institutions gouvernementales désavantagent les femmes de façon disproportionnée. Elle a également ajouté que, à la lumière de son expérience, quand une seule femme se lance en politique, le milieu change cette femme, mais que lorsqu’un grand nombre de femmes évoluent dans la sphère politique, ce sont les femmes qui changent la politique.

C. Séance 1 – Mouvements sociaux pour l’égalité des sexes : expériences de collaboration dans les milieux politiques

La première séance de la rencontre s’est tenue en fin de matinée et en début d’après-midi le 23 mai 2017. Trois représentants du mouvement social ont fait une présentation sur leur expérience d’organisation de mouvements sociaux à l’échelle locale. Après ces présentations, les délégués ont participé à une période de questions et d’observations. La séance s’est tenue dans la salle de réunion de la Chambre des députés, au palais du Congrès national argentin.

La première présentation a été faite par Mme Ana Correa, une des organisatrices du mouvement argentin #NiUnaMenos (c’est-à-dire « pas une de moins »). Ce mouvement a vu le jour en réaction à la découverte du corps d’une jeune fille de 16 ans qui avait été assassinée et enterrée dans le jardin de son petit ami dans la province de Santa Fe. Mettant à profit non seulement les médias sociaux et le bouche-à-oreille, le mouvement a organisé une manifestation de 350 000 personnes dans le but de sensibiliser la population au problème de la violence faite aux femmes en Argentine. Depuis lors, #NiUnaMenos a préparé diverses pétitions, notamment pour réclamer la justice et l’éducation pour les femmes, défendre les droits des victimes de violence et créer une base de données centrale sur les femmes assassinées en Argentine. Mme Correa a déclaré que, en Argentine, une femme est assassinée toutes les 24 heures.

Mme Nadeen Spence de la Jamaïque a parlé de son travail à titre d’organisatrice de la Tambourine Army en Jamaïque, un mouvement de justice sociale qui s’emploie à lutter contre la violence sexuelle et à protéger les droits des jeunes filles et des femmes. Le mouvement a pris naissance après la condamnation d’un ministre de l’Église évangélique qui avait eu des relations sexuelles avec une adolescente de 15 ans. En réaction, la Tambourine Army a organisé une marche pour l’amélioration de la situation des survivantes, en l’occurrence la plus grande manifestation non politique de l’histoire nationale. Le groupe, maintenant devenu un mouvement à l’échelle des Caraïbes, s’emploie à faire de la sensibilisation au sujet du harcèlement sexuel, des abus, de la violence et du viol. Mme Spence a également précisé que le groupe utilise une méthode plutôt controversée qui consiste à inciter les survivantes à dénoncer publiquement leurs agresseurs, en utilisant le mot-clic #SayTheirNames, avant que ces derniers ne soient traduits devant les tribunaux. Récemment, le groupe a contesté la législation sur la cybercriminalité en Jamaïque, pour attirer l’attention sur le fait que les technologies de l’information sont utilisées pour faire des communications malveillantes.

Mme Olga Amparo Sanchez, directrice de la Casa de la Mujer (c’est-à-dire « la maison de la femme ») en Colombie, a expliqué aux participants que son organisation s’emploie à obtenir le respect des droits en matière d’égalité des sexes dans le cadre des négociations sur un accord de paix entre le gouvernement colombien et les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie). La Casa de la Mujer a participé aux efforts de lobbying pour que l’égalité des sexes figure à titre de principe clé dans l’accord final. Mme Sanchez a également parlé des défis auxquels est actuellement confrontée la société colombienne en matière d’égalité des sexes. Elle a notamment fait état de la négligence qui existe dans les régions rurales et de l’insuffisance au chapitre des ressources et de la prestation de services destinés aux femmes.

Ces trois présentations ont été suivies par des discussions générales sur divers sujets liés à l’égalité des sexes. Certains intervenants ont indiqué que les principaux défis des mouvements sociaux visant l’égalité des sexes étaient notamment de maintenir leur élan, de tisser des liens avec d’autres groupes et d’élargir leur portée et leur influence.

Mme Dzerowicz a présenté aux participants son point de vue sur les mouvements sociaux militant pour l’égalité des sexes au Canada. Elle a entre autres souligné que si les femmes constituent 51 % de la population canadienne, elles ne représentent que 28 % des députés au Parlement du Canada; que le Cabinet canadien compte un nombre égal d’hommes et de femmes; et que d’importantes mesures ont été prises pour financer les groupes sociaux au Canada.

Parmi les autres observations et suggestions faites dans le cadre des discussions, mentionnons la nécessité de prévoir, dans les budgets nationaux, la mise en œuvre d’une analyse comparative entre les sexes; les difficultés et les défis liés à l’obtention d’un financement suffisant pour les programmes et les mouvements sociaux; la nécessité de mettre à jour les lois concernant les infractions d’ordre sexuel; et le recours aux médias sociaux pour contrer les préjugés exprimés dans les médias traditionnels à l’égard des femmes parlementaires.

D. Séance 2 – Mouvements sociaux : occasions et défis pour la représentation politique

La deuxième séance de la rencontre s’est tenue dans l’après-midi du 23 mai 2017, dans la salle de réunion de la Chambre des députés, au palais du Congrès national argentin. La séance comportait deux parties. En premier lieu, des parlementaires en fonction et d’anciens parlementaires ont participé à une discussion dirigée ayant pour objectif de favoriser la participation citoyenne aux travaux législatifs sur l’égalité des sexes. En second lieu, s’en sont suivis des ateliers en tables rondes dans le cadre desquels les délégués devaient répondre aux questions posées par un animateur sur les possibilités de collaboration avec les mouvements sociaux.

Mme Sandra Moran, députée au Congrès de la République du Guatemala, a été la première à prendre la parole pendant la discussion dirigée. Elle a indiqué aux délégués qu’elle avait dû s’exiler pendant la dictature militaire qui a régné sur son pays de 1960 à 1996. Mme Moran a souligné l’importance de la participation des femmes aux accords de paix qui ont marqué la fin du conflit guatémaltèque en 1996. Elle a également tenu à dire qu’il est fondamental que les citoyens, notamment les femmes, jouissent de droits civiques et en connaissent la teneur. En dernier lieu, Mme Moran a indiqué qu’elle s’employait maintenant à renforcer les institutions de son pays. L’intervenant suivant, M. Alberto de Belaunde, député au Congrès de la République du Pérou, a parlé de son expérience en tant que rare parlementaire homosexuel à avoir ouvertement déclaré son orientation sexuelle. Il a notamment parlé de ses efforts pour faire adopter une loi instituant l’union civile, mesure qu’il considère comme une étape précédant une éventuelle reconnaissance, dans le cadre d’une loi, du mariage entre conjoints de même sexe au Pérou. Mme Guerda Benjamin, qui siège à la Chambre des députés d’Haïti, a parlé de son enfance dans une collectivité rurale à l’époque de la dictature du président François Duvalier. Mme Benjamin est actuellement l’une des quatre femmes qui siègent à la Chambre des députés d’Haïti. Elle a également précisé qu’Haïti ne compte actuellement qu’une seule sénatrice. Elle a souligné qu’en Haïti, un écart considérable existe encore au chapitre de l’égalité des sexes. Mme Benjamin continue à collaborer avec des groupes communautaires locaux qui s’emploient à faire en sorte que leurs propositions débouchent sur des changements législatifs. En dernier lieu, la sénatrice Jaffer a déclaré qu’en offrant de meilleures perspectives économiques aux femmes il est possible de renforcer leur autonomie. Elle a ajouté que, au Canada, de nombreuses femmes sont bien instruites mais qu’on ne leur donne pas nécessairement les mêmes possibilités qu’aux hommes pour acquérir une expérience professionnelle pertinente. La sénatrice Jaffer a également présenté un bref aperçu des problèmes de harcèlement vécus au sein de la Gendarmerie royale du Canada et des Forces armées canadiennes et elle a précisé que, dans la plupart des cas, les femmes concernées démissionnent alors que les hommes restent en fonction. La sénatrice a conclu en déclarant que, selon elle, ce n’est que dans un contexte de véritable parité entre les sexes que les hommes et les femmes pourront se réaliser.

Au cours du volet d’échange de la discussion dirigée à laquelle participaient des parlementaires en fonction et d’anciens parlementaires, la sénatrice Jaffer a souligné que les femmes devaient avoir la possibilité de réussir dans des postes de direction et que, pour y arriver, elles avaient besoin du soutien et de la bonne volonté des hommes. M. Benjamin a déclaré aux délégués que, au départ, il n’avait pas l’intention de devenir militant mais que les circonstances l’y avaient amené. Il a mentionné avoir entre autres réussi à faire adopter un projet de loi visant la protection des personnes handicapées, et qu’il collabore régulièrement avec des mouvements sociaux et d’autres militants. Les délégués se sont ensuite interrogés sur les raisons de la sous-représentation des femmes dans des postes de pouvoir et de privilège. Certains ont fait état de la difficulté de faire changer les rôles traditionnellement attribués aux hommes et aux femmes dans la culture et la société. D’autres ont indiqué que certains hommes étaient réticents à céder leurs postes à des femmes et d’autres encore, que les femmes doivent trouver un équilibre entre de nombreux rôles concurrents. Les participants ont ensuite parlé du bien-fondé de mettre en place un seuil minimal quant à la représentation des femmes dans les assemblées législatives nationales. Certains délégués voyaient d’un œil très favorable l’imposition de telles normes alors que d’autres les désapprouvaient fortement.

Comme la première partie de la deuxième séance a duré plus longtemps que prévu, la plupart des délégués n’ont pas participé aux discussions en tables rondes. Seulement un groupe a répondu à la question qui visait à savoir comment faire adopter des mesures législatives concrètes pour donner suite aux demandes et aux propositions des mouvements sociaux et des organisations de la société civile.

M. Nault, le représentant des délégués à cette table, a communiqué les réponses obtenues. Il faut notamment financer adéquatement les organisations féminines, sans égard à leur position exprimée à l’égard du gouvernement; mettre en place un processus officiel pour intégrer dans la loi les propositions des mouvements sociaux et de la société civile; évaluer les budgets nationaux à la lumière de l’analyse comparative entre les sexes plus; favoriser la formation des parlementaires dans le domaine; envisager l’imposition de quotas; se concentrer sur la participation économique des femmes; et appuyer les médias d’information indépendants. Enfin, les pays riches doivent soutenir davantage les pays moins favorisés au chapitre des ressources économiques.

E. Séance 3 – Défis pour l’autonomisation : autonomie économique et violence sexiste

La troisième et dernière séance s’est tenue dans la matinée du 24 mai 2017, dans la salle de réunion de la Chambre des députés, au palais du Congrès national argentin. La séance a débuté par la présentation de Mme Mercedes D’Alessandro, experte argentine en matière de violence sexiste et d’autonomie économique. Cette présentation a été suivie par une discussion générale sur l’autonomie économique et la violence fondée sur le sexe. La séance s’est terminée par un atelier au cours duquel les délégués ont répondu aux questions posées à leurs tables respectives.

Au cours de sa présentation, Mme D’Alessandro a entre autres parlé de la disparité entre les hommes et les femmes en milieu de travail; à la maison, notamment en ce qui concerne les tâches ménagères; et dans la sphère politique nationale. Elle a indiqué qu’une enquête réalisée en 2013 en Argentine, sur l’utilisation du temps par les hommes et les femmes respectivement, avait révélé que 76 % des tâches domestiques non rémunérées étaient effectuées par les femmes. Selon Mme D’Alessandro, ce fardeau domestique empêche les femmes d’avoir un travail rémunéré. Elle a également ajouté que, en Argentine, les conditions de travail des femmes différaient substantiellement de celles des hommes. À preuve, elle a fait état de l’existence d’un écart salarial de 26 % entre les hommes et les femmes et elle a ajouté que les femmes bénéficient rarement d’avantages sociaux et que les plupart des emplois qu’elles occupent sont considérés comme précaires. Enfin, elle a affirmé aux délégués que dans la sphère politique argentine, uniquement trois femmes siègent actuellement au Cabinet et que, depuis 1983, seulement 16 femmes y avaient accédé. Selon Mme D’Alessandro, le Congrès national est la seule institution argentine au sein de laquelle les femmes ont excellé, notamment à cause de l’imposition d’un quota réservant un certain nombre de sièges aux femmes.

La présentation de Mme D’Alessandro a été suivie par une discussion générale sur l’égalité des sexes et l’autonomisation économique. Certains délégués ont exposé les avantages et les inconvénients de l’adoption d’une loi exigeant que le gouvernement rémunère le travail domestique. D’autres ont déclaré que le coût du travail domestique devrait être assumé par la personne qui en bénéficie. Mme D’Alessandro a fait remarquer que le travail domestique en tant que bien ou service n’est généralement pas pris en compte dans l’économie nationale, mais qu’il pourrait représenter de 10 à 30 % du produit intérieur brut d’un pays, et que le fardeau du travail domestique augmente au fur et à mesure que croissent les besoins de services de soutien d’une société vieillissante. Mme D’Alessandro a déclaré aux délégués qu’il est nécessaire de reconsidérer les normes actuellement en place dans la société et d’accorder davantage d’importance à l’amélioration de la collecte de données. La discussion a également porté sur les moyens d’améliorer l’accès des femmes aux outils financiers, notamment pour le financement et le crédit.

Mme D’Alessandro a ensuite posé deux questions aux délégués et elle a demandé aux participants de préparer leurs réponses en équipe à leurs tables respectives. Voici les questions :

• Quels sont les principaux liens entre l’inégalité économique, la dépendance et la violence fondée sur le sexe?

• Quels sont les éléments clés que devrait comporter toute politique publique complète visant à remédier à ces problèmes?

Si les réponses à ces questions ont différé d’une table à l’autre, les délégués ont néanmoins convenu qu’il faut : faire en sorte que les femmes touchent un salaire équitable; assurer l’égalité dans les domaines du travail et de l’éducation pour permettre aux femmes d’intervenir davantage dans la société; recueillir des données sur le travail non rémunéré effectué par les femmes; conclure des accords de libre-échange susceptibles d’accroître l’égalité entre les sexes; mettre en place des programmes d’éducation, pour faire comprendre aux enfants, dès un très jeune âge, l’importance de l’égalité des sexes et de la lutte contre le harcèlement sexuel; faire légiférer des incitatifs fiscaux pour offrir de meilleures perspectives d’emploi aux femmes; et créer des programmes visant à améliorer la santé mentale des femmes (renforcer l’estime de soi et lutter contre la dépression).

La neuvième rencontre du Groupe des femmes parlementaires de ParlAmericas s’est conclue par plusieurs allocutions.

SÉANCES SUPPLÉMENTAIRES

A. 43e Réunion du conseil d’administration de ParlAmericas

Le 22 mai 2017, ParlAmericas a tenu la 43e réunion de son conseil d’administration dans la salle de réunion de la Chambre des députés, au palais du Congrès national argentin. Après avoir disposé de formalités comme l’approbation de l’ordre du jour et du procès-verbal de la 42e réunion, les membres du conseil d’administration ont entre autres abordé les questions suivantes :

• Séance d’information sur la prochaine rencontre du GFP et examen de l’ordre du jour proposé.

• Mise à jour sur la prochaine conférence du Réseau pour un parlement ouvert de ParlAmericas, de même que sur un prochain atelier sur la participation citoyenne à la budgétisation ouverte.

• Présentation d’un rapport sur les travaux du Réseau parlementaire sur les changements climatiques de ParlAmericas. La prochaine rencontre de ce réseau doit avoir lieu au cours de la première semaine d’août 2017.

• Mise à jour sur l’assemblée plénière annuelle 2017 qui doit se tenir à Medellin, en Colombie, du 14 au 17 novembre 2017.

• Présentation du rapport du comité des finances concernant les recettes et les dépenses de l’organisation.

• Présentation par le Secrétariat international de ParlAmericas d’une mise à jour budgétaire, d’un rapport de dotation et d’un calendrier des événements pour 2017.

• Poursuite de la crise politique et économique au Venezuela.

B. Rencontre avec le Groupe d’amitié Argentine-Canada

Dans l’après-midi du 24 mai 2017, la délégation canadienne, accompagnée de l’ambassadeur Fry, a rencontré les membres du Groupe d’amitié Argentine-Canada, composé de membres de Chambre des députés de l’Argentine. Dans son allocution de bienvenue, la présidente du groupe a souligné l’importance de renforcer les relations bilatérales. Elle a fait remarquer que le Canada et l’Argentine présentent de nombreuses similitudes et elle a reconnu que le Canada fait figure de chef de file au chapitre de la promotion de la démocratie. La présidente a également remercié l’ambassadeur Fry de ses efforts pour renforcer les liens entre le Canada et l’Argentine. M. Nault a pour sa part invité les membres du groupe à visiter le Canada et il a profité de l’occasion pour remercier ParlAmericas de jouer un rôle de rassembleur.

Le tout respectueusement soumis,


L’honorable Robert D. Nault, c.p., député

Président

Section canadienne de ParlAmericas



[1] Gouvernement du Canada, Relations Canada – Argentine.
[2] Les pays membres du Mercosur sont l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay. Alors que la participation du Venezuela au Mercosur est actuellement suspendue, la Bolivie s’apprête pour sa part à accéder au bloc commercial sud-américain.
[3] Gouvernement du Canada, Contexte (Mercosur).
[4] Ibid.
[5] Gouvernement du Canada, Ambassade du Canada en Argentine et au Paraguay, Relations Canada – Argentine
[6] Ibid.