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Rapport
Introduction
La délégation canadienne à l’Assemblée parlementaire de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (AP OTAN) a l’honneur de présenter son rapport sur la réunion conjointe de la Commission de la défense et de la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité et de la Commission politique, qui s’est tenue à Bruxelles (Belgique) du 18 au 20 février 2017. Le Canada était représenté par Mme Cheryl Gallant, députée et chef intérimaire de la délégation canadienne, par les sénateurs Raynell Andreychuk et Donald Plett, par les députées Leona Alleslev et Rachel Blaney et par les députés Pierre Paul Hus et Francesco Sorbara. La délégation était accompagnée de Mme Melissa Radford, conseillère de l’Association, et par M. Jean-François Pagé, secrétaire de l’Association.
Les réunions annuelles conjointes des commissions à Bruxelles, auxquelles prennent aussi part des agents de la Commission sur les dimensions civiles de la sécurité et de la Commission des sciences et des technologies, ont pour principal but de fournir aux délégués une mise à jour sur les activités et les opérations de l’Alliance avec des hauts fonctionnaires et des officiers militaires en poste au Quartier général de l’OTAN. Les délégués du Canada se sont aussi réunis avec M. Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN, et ils ont assisté à un exposé de Mme Kerry Buck, représentante permanente du Canada à l’OTAN.
À Bruxelles, les réunions se sont tenues en vertu de la règle de Chatham House.
Résumé des discussions
Les délégués ont assisté à sept séances où ils ont entendu des hauts fonctionnaires et des officiers militaires en poste au Quartier général de l’OTAN, des dignitaires de l’Union européenne (UE), des représentants de l’industrie de défense et divers représentants permanents à l’OTAN.
Ces séances ont notamment porté sur ce qui suit : une mise à jour sur les opérations actuelles de l’OTAN; la mise en œuvre par l’OTAN du programme des femmes, de la paix et de la sécurité; la coopération entre l’OTAN et l’UE; le renforcement de la coopération entre les industries de défense dans toute l’Alliance. Pour la première fois, les délégués ont entendu un exposé de la division du renseignement nouvellement créée à l’OTAN.
En outre, trois grands thèmes ont transpiré au cours des deux journées de réunions : le partage du fardeau et les dépenses en matière de défense; la lutte contre le terrorisme; les relations entre l’OTAN et la Russie. Ces thèmes constituent des priorités clés pour l’Alliance et ils continueront de l’être, notamment au prochain sommet des dirigeants de l’OTAN.
Les sections qui suivent résument les discussions tenues sur ces trois thèmes.
Les dépenses en matière de défense et le partage du fardeau
Ces réunions de l’AP OTAN ont eu lieu dans la foulée des réunions des ministres de la Défense de l’OTAN au cours desquelles Jim Mattis, secrétaire à la Défense des États-Unis, a déclaré que son pays réduirait son engagement envers l’Alliance si les Alliés ne se soucient pas davantage de la défense commune de la région transatlantique.
Les délégués ont eu l’occasion de discuter de ces commentaires entre eux et avec les conférenciers qui les ont renseignés à ces égards. On leur a dit que les Alliés devaient prendre les préoccupations des États-Unis au sérieux. Les États Unis portent une part importante du fardeau que constituent la défense et la sécurité de la zone euro-atlantique, et il convient de remettre en question et de rectifier cette inégalité. On leur a aussi dit qu’il ne fallait pas se surprendre que la question du partage du fardeau ait été soulevée à la récente réunion des ministres de la Défense de l’OTAN. Certains interlocuteurs européens ont convenu que le déséquilibre actuel n’est pas sain pour le partenariat transatlantique et ils ont ajouté qu’en général, l’Europe doit assumer un rôle accru dans le domaine de la sécurité mondiale. Par extension, certains ont aussi fait valoir que le rôle de l’UE aux chapitres de la défense et de la sécurité doit être renforcé et ils ont soutenu qu’en dépensant plus au titre de la défense, on investissait dans la sécurité de l’avenir.
Certains interlocuteurs européens ont été invités à expliquer comment leurs gouvernements respectifs comptaient atteindre l’objectif des 2 % du PIB à consacrer à la défense, comme les pays de l’OTAN en avaient convenu au sommet de 2014, au Pays de Galles. Bien que certains pays européens aient l’intention d’atteindre ce seuil au cours des prochaines années, des interlocuteurs ont soutenu que ce critère n’est pas le seul que l’on puisse employer pour mesurer l’ampleur de l’engagement d’un pays envers l’Alliance. Ils ont profité de l’occasion pour énumérer les nombreuses autres façons dont leurs pays contribuent à l’Alliance, notamment en participant aux opérations de cette dernière.
Lutte contre le terrorisme
Les délégués ont parlé du terrorisme et du rôle que l’OTAN doit jouer pour lui faire échec. Divers alliés ont été la cible d’attentats terroristes, de sorte que les menaces de ce genre sont maintenant très présentes dans le territoire de l’OTAN. La sécurité nationale incombe au premier chef aux organismes du gouvernement civil tels que les forces policières et les services du renseignement. Par ailleurs, il incombe à chaque pays d’écraser et de prévenir le terrorisme à l’intérieur de ses propres frontières. Cela dit, les délégués ont été informés que l’OTAN peut ajouter de la valeur sans faire concurrence à ces organismes civils et sans empiéter sur les compétences nationales. Par exemple, d’aucuns ont proposé que les membres de l’OTAN accroissent le partage du renseignement entre eux, étant donné que le terrorisme constitue une menace transnationale.
L’OTAN ajoute aussi de la valeur quand elle projette la stabilité dans les zones en crise et en conflit. Les missions qu’elle mène au Moyen Orient et en Afrique du Nord (MENA), par exemple, montrent fort bien comment elle travaille pour enrayer le terrorisme et ses causes premières. Une des principales opérations de l’OTAN se poursuit en Afghanistan où 1 300 soldats alliés continuent d’entraîner les Forces de sécurité nationale afghanes (FSNA) qui finiront par assumer la responsabilité de la défense et de la sécurité de leur pays. Les parlementaires ont appris qu’à l’heure actuelle, les FSNA peuvent exécuter 80 % de leurs opérations sans le soutien de l’OTAN et protéger les deux tiers de la population afghane. L’expertise que l’OTAN possède en matière de renforcement des capacités est employée également au Kosovo, en Iraq, en Jordanie et en Tunisie. En outre, le gouvernement de transition en Libye a récemment demandé à l’OTAN d’établir un centre d’instruction dans le pays à l’intention de la garde côtière libyenne et d’aider le gouvernement à fusionner les diverses milices armées pour en faire une seule entité militaire nationale.
Les parlementaires ont été informés que la population tend à accorder plus d’attention aux effets cinétiques de la lutte contre le terrorisme; c’est sans doute là une attitude acquise par suite des opérations de combat menées par l’OTAN en Afghanistan et en Libye. En outre, l’OTAN a récemment accepté de fournir l’appui d’avions AWACS à la coalition dirigée par les États Unis contre Daech. Cependant, une fois que Daech aura été anéanti au point de ne plus contrôler aucun territoire, des mesures de stabilisation non cinétiques seront nécessaires pour appuyer le gouvernement iraquien et l’aider à retrouver sa légitimité et à reprendre les rênes du pays. Il se pourrait que l’OTAN soit appelée à fournir son aide à cet égard. D’aucuns ont proposé que l’OTAN renforce sa coopération avec l’ONU, l’UE, la Ligue arabe et l’Union africaine afin de gérer avec elles sa capacité d’établir la stabilité politique là où ses opérations cinétiques sont menées.
L’OTAN joue déjà un rôle dans la lutte contre le terrorisme, mais de nombreux conférenciers ont convenu qu’elle peut faire davantage au niveau tant stratégique qu’opérationnel. Lors de la dernière réunion des ministres de la Défense, la France, le Portugal, l’Espagne et l’Italie ont demandé à leurs alliés d’appuyer la création d’un centre de l’OTAN dans le Sud afin de faire face aux menaces provenant du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord (MENA). Les ministres de la Défense ont souscrit à cette proposition et décidé que ce centre serait situé au sein du Commandement des forces interarmées de l’OTAN (JFC), à Naples. Tous les détails n’ont pas encore été arrêtés, mais les parlementaires ont été informés qu’environ 100 militaires seraient nécessaires pour commander les opérations et contrôler le renseignement dans la région.
Pour ce qui est des prochaines étapes, l’OTAN cherche à mieux définir son rôle et ses responsabilités relativement à la lutte contre le terrorisme, notamment quant à la façon dont elle peut compléter l’action des gouvernements nationaux et coopérer avec ces derniers. L’expérience qu’elle a acquise en Afghanistan l’a aidée à parfaire ses stratégies antiterroristes. Par exemple, l’OTAN avait investi des milliards de dollars pour faire échec aux engins explosifs improvisés et protéger ainsi les soldats en rendant leur équipement et leur dispositif de protection davantage à l’épreuve des explosions. Maintenant, elle met aussi l’accent sur les moyens d’enrayer l’action du réseau criminel qui finance le terrorisme et achète les produits chimiques pour fabriquer les bombes, sur la collecte des données biométriques des individus mêmes qui construisent les bombes et sur la collaboration avec le système de justice afghan pour poursuivre ces criminels devant les tribunaux. L’OTAN étudie aussi des moyens non meurtriers de faire face à d’éventuelles menaces terroristes et de les neutraliser en recourant à la technologie.
L’OTAN fait particulièrement diligence pour trouver des moyens d’aider les gouvernements nationaux et les organisations régionales à gérer les conséquences de la crise des réfugiés actuelle engendrée par les conflits et l’instabilité qui règnent dans la région. On a rappelé aux délégués que 99,9 % des réfugiés fuient le terrorisme et qu’ils n’en sont pas des agents. Les conférenciers ont souligné que, si les réfugiés sont traités de façon inhumaine et qu’ils ne sont pas bien intégrés dans leur nouvelle société, ils deviendront des cibles idéales pour les recruteurs des entités terroristes.
Les délégués canadiens ont manifesté un intérêt particulier pour les moyens à prendre afin d’enrayer le financement des groupes terroristes et pour le rôle que les systèmes AWACS de l’OTAN jouent à l’appui de la coalition dirigée par les États-Unis contre Daech.
Relations entre l’OTAN et la Russie
On a rappelé aux délégués qu’avant 2014, les relations entre l’OTAN et la Russie étaient positives et productives. À ce moment là, l’OTAN songeait à approfondir ces relations. Les délégués ont appris que, même si l’OTAN préférait avoir de bonnes relations avec son voisin, elle ne peut accepter que la Russie envahisse un autre pays souverain voisin. Tant que la Russie ne respectera pas les accords de Minsk concernant le conflit en Ukraine orientale, les relations entre l’OTAN et la Russie, a-t-on confirmé aux délégués, ne reviendront pas à la normale.
Les délégués ont été informés que, dans l’avenir, l’OTAN continuera de soulever la question du conflit en Ukraine dans ses rapports avec la Russie et qu’elle fera toujours valoir que celle-ci se doit de respecter le droit international. Afin de défendre ses valeurs, l’OTAN aidera ses membres à décourager les menaces contre leur intégrité territoriale et leur indépendance politique et les défendra, notamment grâce à sa mission de présence avancée renforcée (PAR) et à la consolidation des partenariats et en faisant échec aux provocations russes dans les airs et en mer.
La mission susmentionnée offre un bon exemple de la solidarité de l’Alliance à l’égard de ses membres de la Baltique et d’Europe de l’Est. On a expliqué aux délégués que les bataillons multinationaux exécutant la mission axée sur la PAR jouent le rôle d’un fil de détente. Les forces nationales baltes sont totalement prêtes, avec leurs alliés de l’OTAN, à défendre leur territoire et à ralentir toute avance qui violerait leurs frontières. Au besoin, la force de réaction rapide de l’OTAN leur emboîterait le pas. Les commandants de l’OTAN ont reçu des pouvoirs maximums de manière à ce que les troupes et l’équipement puissent être déployés rapidement s’il le faut.
Un certain nombre de pays n’appartenant pas à l’OTAN ont été la cible d’actes de provocation et d’agression russes. Cela étant, l’OTAN a renforcé ses partenariats avec certains d’entre eux. Par exemple, l’Alliance a approfondi ses rapports avec la Suède et la Finlande. Elle coopère davantage également avec la Géorgie et la Moldova. Les délégués ont appris que la Russie s’ingérait plus dans les affaires de pays du sud-est européen et, par conséquent, ils ont été exhortés à ratifier le protocole d’accession du Monténégro à l’OTAN dans leurs parlements respectifs.
Enfin, les pays de l’OTAN ont aussi convenu, lors de la réunion des ministres de la Défense, d’intensifier leur présence avancée dans la région de la mer Noire. Les délégués ont été informés que la coopération entre l’Alliance, la Géorgie et l’Ukraine dans cette région est précieuse. L’OTAN continue de s’inquiéter des activités russes qui y ont cours, notamment la prolifération des ressources militaires russes telles que des missiles et des sous-marins en Crimée.
Les délégués canadiens se sont particulièrement intéressés à certains des obstacles législatifs qui entravent encore le mouvement rapide de troupes et d’équipement en Europe. Enfin, Ojārs Ēriks Kalniņš, chef de la délégation lettone à l’AP OTAN et président de la Commission politique de l’AP OTAN, a remercié le Canada de l’appui qu’il accorde aux centres d’excellence de l’OTAN dans les pays baltes et du rôle de chef de file qu’il joue dans le bataillon multinational pour la PAR en Lettonie.
Conclusion
Les réunions annuelles conjointes des commissions à Bruxelles offrent aux délégués du Canada la possibilité de tenir des discussions approfondies avec de hauts représentants de l’OTAN et de l’UE et avec des parlementaires des États membres de l’Alliance au sujet des priorités actuelles concernant la défense et l’économie. Parmi les sujets abordés dans les présentations, mentionnons les priorités de l’Alliance après la réunion des ministres de la Défense de l’OTAN : les dépenses en matière de défense et le partage du fardeau, la lutte contre le terrorisme et les relations entre l’OTAN et la Russie. Ce seront sans doute là également les priorités qui seront étudiées au prochain sommet des dirigeants de l’OTAN. Les délégués ont aussi été mis à jour sur les opérations en cours de l’OTAN, sur la mise en œuvre par l’OTAN du programme Femmes, paix et sécurité, sur la coopération entre l’OTAN et l’UE et sur le renforcement de la coopération entre les industries de défense dans toute l’Alliance. En outre, ils ont assisté pour la première fois à un exposé de la division du renseignement de l’OTAN, nouvellement créée.
Le Canada continue de s’intéresser vivement à toutes ces questions.
Respectueusement soumis,
Mme Leona Alleslev, députée
Présidente de l’Association parlementaire canadienne de l’OTAN