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Du 10 au 19 octobre 2016, l’Association parlementaire Canada-Europe a envoyé une délégation de six parlementaires à Strasbourg, en France, et une délégation de quatre parlementaires à La Valette, à Malte, pour participer à la quatrième partie de la Session ordinaire de 2016 de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) et dans le cadre de la mission parlementaire auprès du prochain pays qui assurera la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne : M. Scott Simms, député et chef de la délégation (pour la participation à l’APCE); l’honorable Percy Downe, sénateur; l’honorable David Wells, sénateur; M. Nick Whalen, député (pour la participation à l’APCE); M. David Tilson, député (chef de la délégation par intérim pour la mission à Malte); M. Don Davies, député. La délégation était accompagnée de la secrétaire de l’Association, Mme Guyanne Desforges, et de M. Maxime-Olivier Thibodeau, conseiller de l’Association.
PARTICIPATION À LA QUATRIÈME PARTIE DE LA SESSION ORDINAIRE DE 2016 DE L’ASSEMBLÉE PARLEMENTAIRE DU CONSEIL DE L’EUROPE
Du 10 au 13 octobre, la délégation a participé à la quatrième partie de la Session de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, auprès de laquelle le Canada a un statut d’observateur. M. Alan Bowman, chef adjoint de la Mission du Canada auprès de l’Union européenne (UE) et observateur permanent du Canada auprès du Conseil de l’Europe s’est joint à la délégation à Strasbourg.
A. Aperçu de l’ordre du jour de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe
- Rapport d’activité du Bureau et de la Commission permanente;
- Observation des élections législatives au Bélarus (11 septembre 2016);
- Observation des élections législatives anticipées en Jordanie (20 septembre 2016);
- Activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2015-2016;
- Droits de l’enfant liés à la maternité de substitution;
- Enseignements à tirer de l’affaire des « Panama Papers » pour assurer la justice sociale et fiscale;
- Le sport pour tous : un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale;
- Discussion commune : conséquences politiques du conflit en Ukraine; recours juridiques contre les violations des droits de l’homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes;
- Coopération avec la Cour pénale internationale : pour un engagement étendu et concret;
- Débat d’actualité sur la situation en Turquie dans le contexte de la tentative de coup d’État;
- Mutilation génitale des femmes en Europe;
- Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés en Europe;
- L’incidence de la dynamique démographique européenne sur les politiques migratoires;
- Débat libre.
L’Assemblée a également entendu les orateurs suivants :
- M. Thorbjørn Jagland, secrétaire général du Conseil de l’Europe;
- M. François Hollande, président de la République française;
- M. Jürgen Ligi, ministre des Affaires étrangères de l’Estonie et président du Comité des ministres;
- M. Mevlüt Çavuşoğlu, ministre des Affaires étrangères de la Turquie;
- M. Frank-Walter Steinmeier, ministre fédéral des Affaires étrangères de l’Allemagne.
B. Activités canadiennes durant la Session
1. Aperçu
Les membres de la délégation canadienne ont participé activement aux séances de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, y compris aux plénières et aux réunions des commissions, en plus des réunions du groupe politique. Par ailleurs, M. Alan Bowman a tenu une réunion d’information à l’intention de la délégation et une rencontre spéciale a eu lieu avec Mme Mari Kiviniemi, secrétaire générale adjointe de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Cinq réunions spéciales ont été tenues avec des représentants d’États membres du Conseil de l’Europe et d’un État observateur, soit Malte, la Bulgarie, le Mexique, la Roumanie et le Royaume-Uni (R-U), afin de discuter d’enjeux bilatéraux et liés à l’UE.
2. Exposé de l’Observateur permanent du Canada au Conseil de l’Europe
M. Bowman, chef adjoint de la Mission du Canada auprès de l’Union européenne et observateur permanent du Canada auprès du Conseil de l’Europe, a fait le point avec les délégués sur le rôle du Canada en tant qu’observateur au Comité des ministres et à l’APCE. Il a distribué un document dans lequel sont énumérés les principaux domaines d’intérêt pour le Canada :
- Codexter (comité de lutte contre le terrorisme);
- le Comité de coopération en matière pénale;
- le Comité des conseillers juridiques sur le droit international public;
- le Comité sur la démocratie et la gouvernance;
- le programme de travail axé sur les femmes et les enfants;
- travaux conjoints Conseil de l’Europe – UNESCO sur la reconnaissance des titres de compétences;
- le Comité sur la cybercriminalité;
- le groupe Pompidou (autorités frontalières);
- le programme de travail pour contrer la violence dans les sports;
- la coopération occasionnelle du Canada auprès de la Cour européenne des droits de l’homme;
- l’intérêt du Canada dans les travaux de la Commission de Venise sur la Turquie, l’Ukraine et la Pologne;
- la candidature du Canada auprès d’Eurimages.
Le document de M. Bowman fait également état des contributions financières du Canada dans le cadre des interventions du Conseil de l’Europe en Ukraine (le dernier grand projet s’est terminé en 2015; il étudie activement un soutien accru) et Eurimages (dès que la candidature du Canada aura été approuvée).
Ce document présente les conventions du Conseil de l’Europe suivantes, ratifiées par le Canada :
- la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées;
- la Convention concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale;
- la Convention contre le dopage;
- la Convention sur la cybercriminalité.
Enfin, les conventions du Conseil de l’Europe suivantes, que le Canada a signées, mais qu’il n’a pas ratifiées, sont également mentionnées dans le document :
- la Convention sur la reconnaissance des qualifications relatives à l’enseignement supérieur dans la région européenne;
- le Protocole additionnel à la Convention contre le dopage;
- le Protocole additionnel à la Convention sur la cybercriminalité, relatif à l’incrimination d’actes de nature raciste et xénophobe commis par le biais de systèmes informatiques.
Récemment, le Comité des ministres s’est principalement consacré à la situation en Ukraine et à la situation en Turquie à la suite du coup d’État; il s’est surtout intéressé à l’aspect des droits humains. En ce qui concerne la situation en Ukraine, M. Bowman a rappelé que le Conseil de l’Europe a apporté un soutien démocratique et il a assuré à la délégation qu’il suit l’évolution de ce dossier de près. Quant à la situation en Turquie, M. Bowman a souligné que le Canada s’efforce d’adopter une approche équilibrée.
M. Bowman a indiqué que le conflit entre le gouvernement polonais et la Commission européenne, qui a trait au Tribunal constitutionnel de Pologne, n’est toujours pas réglé et qu’il faudra y donner suite. Il a d’ailleurs souligné l’importance de la Commission de Venise à cet égard : l’une des institutions les plus importantes du Conseil de l’Europe.
En ce qui concerne la candidature du Canada auprès d’Eurimages, qui s’occupe de coproductions cinématographiques internationales, M. Bowman s’est montré optimiste. Devenir membre signifie que le Canada devra participer au financement de ce fonds dans l’espoir que les retombées pour le pays soient supérieures à sa contribution. Il a mentionné les films Room, une coproduction Canada-Irlande, et Brooklyn, une coproduction Canada-Irlande- R-U, comme exemples de réussites récentes dans ce domaine.
En réponse aux questions des délégués, M. Bowman a exposé les difficultés liées au processus de ratification de l’Accord économique et commercial global (AECG), que la Commission européenne a présenté comme un accord de compétences mixtes. M. Bowman a souligné que le chapitre sur les investissements, qui comprend le mécanisme controversé de règlement des différends entre un investisseur et un État, ne fera pas partie de l’accord au moment où celui-ci s’appliquera de façon provisoire. Par la suite, les 28 États membres de l’Union européenne devront le ratifier conformément à leur propre processus national. Selon M. Bowman, dans l’éventualité où un État membre décidait de ne pas le ratifier, il ne serait pas visé par les dispositions n’ayant pas été appliquées à titre provisoire. Il a argué qu’il faudrait l’unanimité pour suspendre l’application provisoire de l’AECG.
M. Bowman a mentionné quatre pays pour qui l’AECG pose problème : l’Autriche, la Belgique, la Bulgarie et la Roumanie. Dans le cas de la Belgique, M. Bowman a expliqué que le consentement des gouvernements régionaux est requis pour que le gouvernement fédéral puisse ratifier l’accord. Or, le gouvernement wallon a déjà fait savoir qu’il ne consentirait pas à la ratification de l’AECG dans sa forme actuelle.
En ce qui concerne la question des visas pour les citoyens roumains et bulgares, M. Bowman soutient que ces deux pays ont tenté d’utiliser la levée de l’obligation de visa en échange de leur soutien envers l’AECG. Il a rappelé que le ministre McCallum avait rencontré des représentants roumains et bulgares en juin 2016 et qu’il s’était engagé à leur présenter un échéancier quant à la levée de l’obligation de visa au début de l’automne 2016 (cet échéancier n’a pas encore été rendu public).[1]
Au sujet de l’incidence de la sortie du R-U de l’UE, ou « Brexit », sur la ratification de l’AECG, M. Bowman a rappelé que ce pays demeurera membre à part entière de l’UE jusqu’à deux ans après la date à laquelle il aura déclenché l’application de l’article 50 du Traité sur l’Union européenne. Il a également mentionné les quatre raisons suivantes pour lesquelles le Royaume Uni aurait intérêt à soutenir le programme de l’UE en ce qui a trait à la ratification de l’AECG :
- Le R-U a tout avantage à ce que l’AECG soit conclu parce qu’il sera le prochain pays à négocier une entente semblable avec l’UE;
- Le R-U profitera de l’AECG pendant les deux ans au cours desquels il fait encore partie de l’UE;
- Le R-U a déclaré qu’il souhaitait entretenir de bonnes relations avec ses amis dans l’espoir que ceux-ci se montrent coopératifs avec lui une fois qu’il aura quitté l’UE;
- Le R-U a tout intérêt à établir de bons liens avec les représentants de l’UE sur les questions commerciales en vue de prochaines négociations.
Sur la question des forces motrices à l’origine du coup d’État en Turquie, M. Bowman a indiqué que le président Erdogan est issu d’un milieu islamique conservateur et il a expliqué les relations complexes de ce dernier avec le mouvement Gülen et la vieille garde militaire. Depuis le coup d’État raté de juillet 2016, le président Erdogan purge le pays et il se débarrasse de ceux qui – selon lui – sont liés au Gülen. Selon M. Bowman, l’objectif du Canada consiste à donner à un tribunal (possiblement la Cour suprême de Turquie) le pouvoir d’entendre les causes en lien avec le coup d’État raté. Le problème, c’est que le gouvernement turc n’a pris aucune décision officielle en ce sens.
3. Rencontre spéciale avec Mme Mari Kiviniemi, secrétaire générale adjointe de l’Organisation de coopération et de développement économiques
Une rencontre officielle a eu lieu avec Mme Mari Kiviniemi, secrétaire générale adjointe de l’OCDE. Cette dernière soutient que les faibles taux d’intérêt ont donné une plus grande marge de manœuvre financière à de nombreux pays, notamment le Canada. Elle a insisté sur l’importance d’investir dans les infrastructures publiques et a rappelé que le nouveau gouvernement canadien avait fait connaître son intention à cet égard.
Mme Kiviniemi a attiré l’attention des délégués sur les publications de l’OCDE suivantes qui pourraient s’avérer utiles dans le cadre de leurs travaux :
- Regards sur l'éducation 2016
- Panorama de la société 2016
- Étude économique du Canada 2016
- Perspectives des migrations internationales 2016
- How’s Life in Canada?(mai 2016)
En réponse aux questions des délégués, Mme Kiviniemi a expliqué que l’OCDE utilise les statistiques nationales dans le cadre de ses enquêtes sur les pays, par exemple l’Étude économique du Canada 2016. Elle a fait valoir que les investissements en éducation constituent un bon moyen de réagir à la difficulté de trouver du travail au Canada puisqu’ils favorisent la croissance économique. Elle a cité les pays scandinaves comme exemples de tels investissements, là où il n’y a pas de frais de scolarité.
4. Réunion bilatérale avec les parlementaires de la délégation maltaise
Une rencontre a eu lieu avec des membres de la délégation maltaise présents à l’APCE, principalement dans le but de discuter des questions du Brexit et de la migration. Concernant cette dernière, les délégués maltais ont expliqué les différences entre le programme du Nord et celui du Sud, qui sont mis de l’avant par différents partis politiques en Europe. Les partis d’extrême droite par exemple exploitent les problèmes découlant de la crise migratoire et de la proximité de la Libye. Au lieu de rétablir les contrôles frontaliers, ce qui de l’avis des délégués maltais ne réglerait pas le problème, l’une des solutions proposées serait de créer des points d’entrée efficaces pour accéder aux pays de l’UE.
En ce qui concerne le Brexit, les représentants maltais ont rappelé que leur gouvernement avait manifesté son opposition par rapport à cette question et que la sortie du R-U allait à l’encontre des intérêts de Malte. Ils ont fait remarquer que la France et l’Allemagne favorisent l’harmonisation fiscale au sein de l’UE alors que Malte et le R-U craignent que ce projet ne menace l’avantage que leur procure leur régime d’imposition plus favorable. Ils ont par ailleurs indiqué que de nombreux Maltais travaillent et étudient au R-U et que les deux pays entretiennent des relations de longue date. En réponse aux questions des délégués canadiens concernant la « citoyenneté économique » que peuvent acheter les ressortissants étrangers auprès du gouvernement maltais, les délégués ont expliqué que cette question suscite la controverse. Selon eux, le principal objectif d’acheter la « citoyenneté économique » serait d’accéder au R-U.
5. Réunion bilatérale avec les parlementaires de la délégation bulgare
Une rencontre a eu lieu avec des membres de la délégation bulgare présents à l’APCE, principalement dans le but de discuter de la question des visas et de l’AECG. M. Bowman a aussi pris part à cette rencontre. En ce qui a trait à la question des visas, les délégués bulgares ont noté des développements récents. En effet, les premiers ministres des deux pays se sont entendus pour lever l’obligation de visa à compter de 2018.
Dans le dossier de l’AECG, les délégués bulgares ont fait remarquer que les socialistes au pays pourraient créer des problèmes. En effet, ceux-ci s’opposent farouchement au Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (TTIP), un accord de libre-échange faisant l’objet de négociations entre l’UE et les États Unis. Ceux qui s’opposent à l’AECG sont d’avis qu’il s’agit d’un moyen détourné que prennent les États-Unis pour accéder au marché de l’UE. M. Bowman a réagi en expliquant les principales différences entre l’AECG et le TTIP (en gardant à l’esprit qu’aucun texte n’a encore été rendu public en ce qui concerne le TTIP). Il a par ailleurs rappelé que la Bulgarie et les États-Unis avaient conclu un traité bilatéral d’investissement en 1992 et que la modernisation de ce dernier pourrait s’avérer la meilleure solution pour la Bulgarie sur le plan de ses relations commerciales avec les États-Unis.
D’autres enjeux ont fait l’objet de discussions pendant cette rencontre, notamment le Brexit et l’immigration. Les délégués bulgares ont manifesté leur déception concernant le Brexit; ils ont en effet souligné que de nombreux Bulgares travaillent au R-U. Les délégués bulgares ont ajouté que les jeunes sont nombreux à quitter la Bulgarie pour aller travailler à l’étranger. Quant à la crise des réfugiés, ils ont fait valoir que la plupart traversent la Bulgarie pour rejoindre l’Allemagne ou d’autres pays riches de l’Europe. Si la présence de partis xénophobes dans certains pays européens est susceptible de mener à la réintroduction de contrôles aux frontières des pays membres de l’UE, à l’heure actuelle, c’est plutôt aux frontières extérieures que la pression se fait sentir.
6. Réunion bilatérale avec les parlementaires de la délégation mexicaine
Une rencontre a eu lieu avec des membres de la délégation mexicaine présents à l’APCE, principalement dans le but de discuter d’enjeux commerciaux entre les deux pays. M. Bowman a également pris part à cette rencontre. Les délégués mexicains ont indiqué qu’ils sont en train de moderniser leur accord commercial avec l’UE – conclu en 1999 –, mais que le processus a été ralenti par certains événements se déroulant au sein de l’UE. Par ailleurs, ils se sont dits préoccupés par les prochaines élections aux États-Unis et par la possible victoire de Donald Trump. Ce dernier a en effet affirmé qu’il était contre le libre-échange. Dans ce contexte, il y a de quoi s’inquiéter de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Les délégués mexicains ont également expliqué que la possible victoire de Donald Trump avait des répercussions négatives sur les investissements étrangers au Mexique.
Les délégués mexicains ont rappelé que le Partenariat transpacifique (PTP) est actuellement soumis à l’examen du Sénat mexicain pour approbation. Ils ont ajouté que les élections aux États-Unis pourraient avoir une incidence sur la ratification du PTP. En effet, les deux candidats ont manifesté leurs réserves à cet égard. Pour les Mexicains, le PTP serait l’occasion de mettre à jour certains aspects du commerce international dont l’ALENA ne tient pas compte, comme les répercussions du commerce international sur l’environnement et les approvisionnements du gouvernement et du secteur public, par exemple.
M. Bowman a fait remarquer qu’au moment où le Mexique lève ses restrictions sur le bœuf canadien, le Canada annonce qu’il lèvera l’obligation de visa pour les Mexicains à compter du 1er décembre 2016.
7. Réunion bilatérale avec les parlementaires de la délégation roumaine
Une rencontre a eu lieu avec des membres de la délégation roumaine présents à l’APCE, principalement dans le but de discuter de la question des visas et de l’AECG. M. Bowman a également pris part à cette rencontre. Les délégués roumains ont rappelé que le Canada et la Roumanie entretiennent de bonnes relations qui reposent, entre autres, sur la présence de la technologie CANDU en Roumanie et sur une coopération militaire active au sein de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). S’ils appuient l’AECG et qu’ils envisagent favorablement son entrée en vigueur, les délégués roumains doutent que leur gouvernement ne signe cet accord sans avoir l’assurance que le Canada lèvera l’obligation de visa. Par ailleurs, ils sont d’avis que le Parlement roumain doit donner un mandat au gouvernement roumain, sans quoi ce dernier n’aurait pas l’autorité de ratifier l’AECG.
Quant à la question des visas, les délégués roumains soutiennent que le Canada a deux poids, deux mesures à l’égard de la Roumanie et les représentants de ce pays demandent à être traités comme tous les autres citoyens de l’UE. Ils croient que les problèmes qui se posaient par le passé relativement aux réseaux d’immigrants illégaux ont été résolus. Ils ont rappelé que le Canada a envoyé une mission d’expert en Roumanie en juin 2016 et que leurs conclusions se sont avérées positives. Dans ce contexte, les délégués roumains ne voient pas l’utilité d’envoyer une autre mission d’experts ni de raisons de retarder encore davantage la levée de l’obligation de visa.
8. Réunion bilatérale avec les parlementaires de la délégation britannique
Une rencontre a eu lieu avec des membres de la délégation du R-U présents à l’APCE, principalement dans le but de discuter du Brexit et de l’AECG. Les délégués britanniques ont rappelé que l’immigration et le commerce faisaient partie des principaux enjeux dans le débat entourant le Brexit. L’argument selon lequel le Brexit permettrait au R-U d’exploiter de nouveaux marchés ne les convainc pas. En effet, pourquoi le R-U n’aurait-il pas exploité ces marchés auparavant? Ils ont affirmé qu’il y a une contradiction dans ce débat, qui découle du fait que les Britanniques veulent reprendre le contrôle – ce qui en réalité veut dire se retirer du marché unique – tout en gardant l’accès au marché unique.
Les délégués britanniques ont rappelé que leur pays n’a négocié aucun accord commercial dans les 40 dernières années. Ils doutent que le R-U fasse obstacle à la ratification de l’AECG : cet accord serait dans l’intérêt du pays et pourrait servir de point de départ à un éventuel accord commercial avec le Canada. La recherche d’un possible accord multilatéral entre l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Canada et le R-U a aussi fait l’objet d’une discussion. Les délégués britanniques ont par ailleurs souligné que leur pays souhaite conclure des accords commerciaux avec l’Inde et la Chine. Ils conviennent qu’il est encore trop tôt en ce moment pour dire si le Brexit sera ou non avantageux pour le R-U.
C. Interventions canadiennes durant les débats de l’Assemblée
Les délégués canadiens ont participé aux débats de l’Assemblée pendant la partie de session et ils sont intervenus en 12 occasions dans des débats sur une variété de sujets. Les liens vers leurs allocutions sont indiqués ci-dessous.
a. Mardi 11 octobre 2016
- Les activités de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) en 2015-2016
M. Scott Simms et M. Nick Whalen ont prononcé une allocution sur les activités de l’OCDE en 2015-2016.[2]
- Enseignements à tirer de l’affaire des « Panama Papers » pour assurer la justice sociale et fiscale
M. Don Davies, le sénateur Percy Downe et le sénateur David Wells ont prononcé une allocution dans le contexte du débat sur les enseignements à tirer de l’affaire des « Panama Papers » pour assurer la justice sociale et fiscale.[3]
b. Mercredi 12 octobre 2016
- Le sport pour tous : un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale
Le sénateur David Wells et M. Scott Simms n’ont pas été en mesure de s’adresser aux personnes présentes, mais ont déposé leur allocution dans le contexte du débat sur le sport pour tous : un pont vers l’égalité, l’intégration et l’inclusion sociale.[4]
- Discussion commune : conséquences politiques du conflit en Ukraine; recours juridiques contre les violations des droits de l’homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes
Le sénateur Percy Downe, M. Don Davies et M. Nick Whalen ont prononcé une allocution dans le contexte de la discussion commune : conséquences politiques du conflit en Ukraine; recours juridiques contre les violations des droits de l’homme commises dans les territoires ukrainiens se trouvant hors du contrôle des autorités ukrainiennes.[5]
- Coopération avec la Cour pénale internationale : pour un engagement étendu et concret
M. Don Davies a prononcé une allocution dans le contexte du débat sur la Coopération avec la Cour pénale internationale : pour un engagement étendu et concret.[6]
c. Jeudi 13 octobre 2016
- Débat d’actualité : situation en Turquie dans le contexte de la tentative de coup d’État
M. David Tilson a prononcé une allocution dans le contexte du débat d’actualité sur la situation en Turquie à la lumière de la tentative de coup d’État.[7]
M. Scott Simms n’a pas été en mesure de prendre la parole, mais a présenté une allocution sur cette question.[8]
- Harmoniser la protection des mineurs non accompagnés
M. David Tilson et le sénateur David Wells ont prononcé des allocutions dans le contexte du débat sur l’harmonisation de la protection des mineurs non accompagnés.[9]
MISSION PARLEMENTAIRE À MALTE, LE PROCHAIN PAYS À ASSURER LA PRÉSIDENCE TOURNANTE DU CONSEIL DE L’UNION EUROPÉENNE
Du 17 au 19 octobre 2016, la délégation a participé à une mission parlementaire à Malte, le pays qui assurera la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne de janvier à juin 2017. Lors de cette mission, la délégation a rencontré des parlementaires de Malte et de l’UE, des représentants du gouvernement, des représentants d’organismes non gouvernementaux, des experts politiques et économiques et des groupes du monde des affaires et du milieu syndical. La délégation a aussi eu droit à une séance d’information donnée par des porte-parole du Haut-commissariat du Canada basés à Rome. Les discussions qui se sont déroulées lors de ces réunions portaient sur les priorités de Malte en vue de sa future présidence du Conseil de l’Union européenne; des questions clés liées aux relations entre le Canada et l’UE et le Canada et Malte, y compris l’AECG; et d’autres enjeux importants auxquels font face Malte et l’UE, y compris la migration.
A. Séance d’information avec le consul honoraire du Canada à Malte
La délégation a rencontré M. Pier Luca Demajo, le consul honoraire du Canada à Malte. M. Demajo a attiré l’attention des délégués sur une publication produite par Ernst & Young intitulée EY’s Malta Attractiveness Survey 2016 – The future is today. Il a souligné l’importance du bilinguisme de Malte (le maltais et l’anglais sont les deux langues officielles) pour son développement. M. Demajo a précisé que les trois principaux secteurs d’activité de Malte sont les suivants :
- le tourisme, avec 1,2 million de visiteurs par année par air et par mer;
- les services financiers, les jeux électroniques et les technologies de l’information (pour les services financiers en particulier);
- l’industrie manufacturière.
Selon M. Demajo, Malte n’a pas souffert autant que le reste de l’UE à la suite de la dernière crise financière. Il a aussi expliqué que Malte possède un système politique bipartite sans grande différence entre les deux partis. M. Demajo a souligné la récente perte de confiance de la population envers ses politiciens, faisant valoir que les allégations actuelles de corruption au sein du gouvernement – issues du scandale des « Panama Papers » – n’aident certainement pas. M. Demajo considère que la présidence du Conseil de l’Union européenne par Malte tombe à un mauvais moment. Le pays n’est pas prêt et est déjà occupé avec l’organisation des événements entourant la désignation de La Valette comme capitale culturelle de l’UE en 2018.
En réponse aux questions des délégués concernant la possibilité d’acheter une « citoyenneté économique » maltaise, M. Demajo a expliqué que le coût de cette transaction controversée s’élève à un million d’euros, dont 600 000 doivent être investis dans l’économie maltaise. Il en coûte 50 000 euros supplémentaires pour chaque membre de la famille additionnel qui acquiert la citoyenneté. Selon M. Demajo, ce sont surtout des Russes, des Chinois, des personnes provenant d’autres pays asiatiques et de certains pays sud-américains qui achètent la « citoyenneté économique ».
En ce qui a trait à l’effet du Brexit sur Malte, M. Demajo a fait observer que le R-U appuyait le maintien par Malte de son régime financier actuel. Il a indiqué qu’il n’est pas convaincu que le Brexit se produira réellement, faisant valoir qu’il est encore possible de trouver une porte de sortie. À son avis, il serait extrêmement difficile de détacher le R-U de l’économie de l’UE. M. Demajo a mis en lumière la position stratégique de Malte pour le R-U et l’UE se situant à mi-chemin pour les investisseurs européens en Afrique du Nord. Ces investisseurs se servent de Malte comme « endroit sûr » pour conduire leurs affaires dans les pays nord-africains, qu’ils considèrent comme peu sûrs.
M. Demajo et les délégués ont aussi discuté de la question de la migration. Selon M. Demajo, les solutions proposées pour régler la crise migratoire – comme le blocage des frontières – n’ont pas abouti. Il ne sait pas si la rumeur voulant que Malte et l’Italie aient conclu un accord selon lequel l’Italie accueille tous les migrants essayant de se rendre à Malte est fondée, mais il a souligné qu’il n’y a plus de migrants qui arrivent à Malte. M. Demajo considère que la migration sera au cœur de la présidence du Conseil de l’Union européenne de Malte.
B. Réunion avec le président de la Chambre des représentants au Parlement de Malte
La délégation a ensuite rencontré l’honorable Angelo Farrugia, le président de la Chambre des représentants au Parlement de Malte. M. Farrugia a souligné la présence d’une importante diaspora maltaise au Canada. Il considère que la première présidence du Conseil de l’Union européenne de Malte sera un défi de taille dans un contexte où il existe un décalage entre la « bulle bruxelloise » et les citoyens des différents pays européens. M. Farrugia a cerné les priorités suivantes pour Malte lors de sa présidence du Conseil de l’Union européenne :
- la politique de l’Europe élargie – Voisinage, où la sécurité est primordiale et où les menaces émanant des pays limitrophes, comme la Libye, doivent être prises en compte;
- la migration, où la mise en œuvre rapide de mesures déjà convenues s’impose;
- une politique maritime intégrée, où l’UE doit s’assurer de tirer parti de chaque occasion;
- les marchés internes, où il y a une nécessité, entre autres choses, d’avoir un « marché unique du numérique »;
- la croissance et les emplois;
- les changements climatiques.
En ce qui a trait aux relations entre le Canada et Malte, M. Farrugia a fait observer que les deux pays ont des valeurs communes, soit les droits de la personne, la primauté du droit et la bonne gouvernance partout dans le monde. Il a aussi souligné l’importance de l’AECG pour les deux pays.
C. Réunion avec des représentants de la Chambre de commerce, d’entreprise et d’industrie de Malte
La rencontre de la délégation avec des représentants de la Chambre de commerce, d’entreprise et d’industrie de Malte a coïncidé avec le jour du dépôt du budget pour le gouvernement maltais. En ce qui a trait à l’incidence du Brexit sur l’économie maltaise, les représentants de la Chambre de commerce, d’entreprise et d’industrie de Malte ont signalé des effets positifs pour les investissements, attribuables au fait que certaines entreprises ont quitté le R-U pour s’installer à Malte. Selon eux, la France et l’Allemagne doivent faire attention de ne pas rendre leur offre du Brexit trop attrayante afin de ne pas encourager d’autres pays membres de l’UE à emboîter le pas.
Pour ce qui est de l’AECG, les représentants de la Chambre de commerce, d’entreprise et d’industrie de Malte ont mentionné que les deux parties représentées au Parlement de Malte appuient l’accord.
D. Réunion avec des représentants de Malta Enterprise
La délégation a rencontré des représentants de Malta Enterprise, l’agence de développement économique du gouvernement maltais. Ces représentants ont indiqué que Malta Enterprise essaie d’établir une chaîne d’approvisionnement pour l’industrie manufacturière et soutient l’industrie automobile ainsi que les petites et moyennes entreprises (qui comptent moins de 100 employés). Malta Enterprise s’efforce aussi d’exploiter l’avantage concurrentiel de Malte attribuable à son emplacement. Entre autres projets, elle met l’accent sur la formation spécialisée pour certains secteurs d’activité, en collaboration avec des collèges qui offrent une formation dans ces secteurs. Les représentants de Malta Enterprise ont mentionné que les services financiers et les jeux électroniques ne relèvent pas de son mandat.
Dans le cas de la ratification de l’AECG, ils ont souligné que le gouvernement maltais est favorable au commerce. Le Brexit a toutefois changé les priorités au sein de l’UE et il est trop tôt pour savoir ce qui arrivera dans ces deux dossiers.
E. Réunion avec le chef de l’Organisation internationale pour les migrations à Malte
La délégation a rencontré M. Federico Soda, le chef de l’Organisation internationale pour les migrations à Malte. M. Soda a expliqué que l’OIM a été fondée il y a 65 ans pour s’occuper des personnes déplacées à la suite de la Deuxième Guerre mondiale. L’OIM compte environ 10 000 employés, possède un budget de 2 milliards de dollars américains et se charge de chaque aspect de la migration et de la situation des réfugiés. Selon lui, l’organisme prend toute son importance dans le contexte actuel de la crise migratoire.
M. Soda a précisé que l’OIM est un organisme intergouvernemental – devenu un organisme des Nations Unies après de longues discussions – qui compte 165 États membres, la Chine s’étant jointe dernièrement à l’organisation (la Russie n’est pas membre, ni aucun État du Golfe). M. Soda a fait valoir qu’alors que les migrants qui traversent la Méditerranée ne sont pas un phénomène nouveau, la détérioration de la situation en Libye et les naufrages au large des côtes italiennes ont mieux fait comprendre à la population l’ampleur du problème. Il a indiqué que la façon dont les personnes entrent clandestinement dans un pays a évolué, des canots pneumatiques – conçus pour couler – étant maintenant utilisés par les passeurs de clandestins qui connaissent l’existence des opérations de « sauvetage en mer ».
Selon M. Soda, à la fin de 2015, l’OIM gérait un nombre de cas composé de 70 % de personnes admissibles à la protection internationale et de 30 % de personnes non admissibles à une telle protection. La situation s’est à présent inversée : l’OIM doit composer avec 70 % de personnes qui n’ont pas droit à la protection internationale parce qu’elles ont quitté leur pays pour trouver un emploi, par exemple. M. Soda a souligné que l’Italie est responsable d’environ 50 % des personnes sauvées en mer. Il a soutenu que l’Europe devrait mieux gérer la crise migratoire; elle possède davantage d’outils que les autres parties concernées.
M. Soda a souligné certaines conséquences de la crise migratoire : enjeux démographiques, questions environnementales et problèmes liés à l’instabilité (radicalisme, terrorisme, mais aussi populations de jeunes traversant l’Afrique du Nord). Selon lui, si les questions de migration et d’environnement étaient entièrement séparées il y a 10 ans, les questions environnementales liées à la migration ne peuvent plus être ignorées : dévastation des terres, changements climatiques (causant des cyclones et des inondations), problèmes d’eau, urbanisation (présence de bidonvilles). Pour les différents gouvernements concernés, le défi qui en résulte consiste à relier les divers aspects de la crise migratoire et à intervenir efficacement.
F. Réunion avec le représentant de Today Public Policy Institute
La délégation a rencontré M. Martin Scicluna, directeur général de Today Public Policy Institute, un groupe de réflexion maltais qui n’est rattaché à aucun parti politique. En ce qui concerne la relation entre Malte et l’UE, M. Scicluna a souligné les modifications plus fondamentales qui ont eu cours à Malte depuis son adhésion à l’UE en 2004, et à l’Eurozone en 2008. Il a aussi indiqué que Standard & Poor’s a haussé récemment la note de crédit internationale de Malte, laquelle est passée à A- pour la première fois en 20 ans. M. Scicluna a mentionné que l’Europe compte maintenant plus de réfugiés qu’il y en avait à toute autre période depuis la Deuxième Guerre mondiale. Selon lui, la crise migratoire a frappé le plus durement les économies les plus fragiles de l’UE et alimenté une réaction anti-immigration et un développement pour le pire, comme en témoignent l’arrêt de l’espace Schengen, un sentiment anti-UE et un désir de contrôler les frontières.
M. Scicluna considère qu’il est pratiquement impossible de connaître l’incidence du Brexit sur l’UE et le R-U, mais il est convaincu que les conséquences seront importantes pour Malte. M. Scicluna a souligné que le débat entourant le Brexit, associé à la crise migratoire, permet l’expression d’une certaine forme de racisme et de xénophobie. À cet égard, il a aussi fait observer que les structures d’acceptation des migrants de Malte ont besoin d’être améliorées et financées.
Pour ce qui est de la question des changements climatiques, M. Scicluna a indiqué que Malte est partie à l’Accord de Paris et faisait partie de l’Accord de Kyoto en 1997. À son avis, Malte sera méconnaissable, « dans l’hypothèse la plus optimiste », d’ici dix ans. La probabilité d’un nombre accru d’inondations et de sécheresses, le manque d’eau et la désertification, pour ne donner que quelques exemples, auront des conséquences dévastatrices pour Malte. M. Scicluna s’inquiète du fait qu’aucune mesure n’est en place – voire envisagée – pour faire face à cette situation.
La question de la ratification de l’AECG a conduit M. Scicluna à faire valoir que les difficultés à venir à la suite du Brexit sont mises en relief avec l’évolution actuelle de la région belge de la Wallonie qui refuse de laisser la Belgique signer l’accord. À son avis, la position de Malte concernant l’AECG ne pose pas problème.
G. Réunion avec des représentants du Bureau européen d’appui en matière d’asile
La délégation a rencontré des représentants du Bureau européen d’appui en matière d’asile (BEAA), un organisme de l’UE. Ces représentants ont indiqué que le travail du BEAA est intégré au travail du Parlement européen. Les représentants ont aussi mentionné qu’en mai 2015, la Commission européenne a publié un programme européen en matière de migration pour répondre à la crise, donnant lieu à une feuille de route. Cette feuille de route a mené, entre autres choses, à la création de « points névralgiques » : établissement de camps pour recevoir les migrants, les enregistrer et leur permettre de faire une demande d’asile. Le BEAA a établi neuf de ces camps en Grèce, par exemple.
À l’heure actuelle, le BEAA n’a pas son propre personnel; il dépend des États membres pour déployer des personnes. Un nouveau règlement a été proposé pour transformer le bureau d’appui en une ambitieuse agence de l’UE chargée de l’asile. Au cours des deux à trois prochaines années, ce nouveau règlement permettrait à l’organisme d’embaucher entre 50 et 500 membres du personnel grâce à un budget revu à la hausse. Il créerait aussi un groupe d’experts obligatoire – détaché des États membres – qui pourrait participer à un déploiement. Les grands changements découlant de l’entrée en vigueur du nouveau règlement englobent les activités de surveillance de l’organisme dans chaque État membre (une mesure prêtant à controverse au sein des États membres) et la capacité d’intervenir s’il y a lieu.
Les représentants du BEAA ont souligné que le Règlement de Dublin a établi un mécanisme de réinstallation permanent pour faire face à la crise migratoire. Ils ont aussi souligné que chaque État membre de l’UE a créé une « unité de Dublin » pour gérer la mise en œuvre du règlement, à laquelle le BEAA participe activement. Au dire des représentants du BEAA, les États membres recourent ou non aux services du BEAA, comme ils le jugent approprié, de la même façon qu’ils ne respectent pas tous l’accord intervenu entre l’UE et la Turquie à propos de la réinstallation des migrants. Par exemple, le R-U ne participe pas au programme de réinstallation, s’occupant lui-même de la réinstallation qui le concerne.
En réponse aux questions des délégués, les représentants du BEAA ont expliqué que les demandeurs d’asile dont la demande est rejetée sont traités différemment dans chaque État membre. À l’heure actuelle, la nouvelle approche au sein de l’UE consiste à mettre l’accent sur la protection à la frontière et à renvoyer rapidement les demandeurs d’asile dont la demande est rejetée. Ils ont aussi expliqué que lorsque ces demandeurs d’asile ne peuvent pas être renvoyés dans le pays qu’ils ont quitté, ils peuvent être réinstallés dans des pays tiers par d’autres voies.
H. Réunion conjointe du Comité des affaires étrangères et européennes, du Comité des affaires économiques et financières et du Comité de l’environnement du Parlement de Malte
La délégation a participé à une réunion conjointe avec le Comité des affaires étrangères et européennes, le Comité des affaires économiques et financières et le Comité de l’environnement du Parlement de Malte . Entre autres sujets, les délégués et parlementaires maltais ont discuté de la diaspora maltaise au Canada, de la présidence du Conseil de l’Union européenne de Malte, du Brexit, de la crise migratoire et de la question des réfugiés au Canada et en Europe, de l’AECG et des changements climatiques à la lumière de l’Accord de Paris. Le secteur des services financiers et les incitations fiscales, son secteur des jeux électroniques et le besoin de travailleurs – et de conditions de travail connexes – issus de la croissance économique de Malte ont aussi été des questions soulevées par les parlementaires maltais.
I. Réunion avec des représentants du Comité directeur et d’action de Malte et de l’Union européenne
La délégation a rencontré des représentants du Comité directeur et d’action de Malte et de l’Union européenne (CDAMUE), lequel est un organisme gouvernemental relevant du ministre du Dialogue social, de la Consommation et des Libertés civiles de Malte, et libre de tout lien de dépendance avec celui-ci. Les représentants ont fait observer que certains problèmes soulevés par la Belgique, la Roumanie et la Bulgarie avaient empêché l’approbation de l’AECG par le Conseil de l’Union européenne la veille (18 octobre), comme prévu. Ils ont expliqué que l’UE finance une partie importante du travail du CDAMUE.
Le CDAMUE a d’abord été créé en 1999 pour préparer l’adhésion de Malte à l’UE et gérer la période de transition qui s’ensuivit, notamment les dérogations issues des négociations d’adhésion. Le comité a été dynamisé en 2008 pour consulter la population maltaise sur des questions liées à l’UE. Le CDAMUE est composé de représentants gouvernementaux et de représentants de la société civile. Il comprend aussi des comités sénatoriaux ayant une plus large représentation comme des organismes non gouvernementaux (ONG), et participe aux consultations ouvertes avec des représentants du monde des affaires. Le CDAMUE a également comme mandat de communiquer de l’information concernant la participation de Malte en tant que membre de l’UE. De plus, il fournit de l’information sur le financement de l’UE et détermine les projets pour lesquels les ONG et les organismes pourraient recevoir un financement, par exemple. L’organisme sert aussi de groupe de réflexion sur des questions liées à l’UE.
Les représentants du CDAMUE ont souligné qu’alors que la population maltaise est généralement favorable à l’UE, des préoccupations sont soulevées concernant la crise migratoire et la réponse de l’UE à la crise. Le Brexit a aussi soulevé des questions à Malte sur le genre d’UE que veulent avoir les Maltais. Selon eux, un consensus unanime a été atteint à Malte en faveur de son adhésion à l’UE. Les représentants du CDAMUE ont mentionné que les priorités de la présidence de Malte seront annoncées en avril 2017 lors d’un événement soulignant le 60e anniversaire de la Commission européenne.
J. Réunion avec le ministre des Affaires étrangères de Malte
La délégation a rencontré l’honorable George W. Vella, ministre des Affaires étrangères de Malte. M. Vella considère que l’AECG est un fait accompli pour Malte : chaque aspect de cet accord est très positif. Il est d’avis que la réticence des Wallons de Belgique ne découle pas vraiment de l’AECG : elle vient plutôt de l’opposition entre les Flamands et les Wallons. M. Vella a indiqué que, bien que les deux accords soient totalement différents, l’AECG est associé au TTIP, auquel certains États membres de l’UE s’opposent vigoureusement.
En ce qui concerne le Brexit, M. Vella considère que, lorsque l’article 50 du Traité sur l’Union européenne s’appliquera, une période de deux ans sera trop courte pour négocier la séparation du R-U de l’UE. À son avis, Malte se retrouvera un peu comme un orphelin en l’absence du R-U au sein de l’UE. M. Vella a prévenu qu’il faut s’attendre à un marathon de discussions entre les deux parties. Bien qu’il serait dans l’intérêt du R-U d’établir des liens aussi étroits que possible avec l’UE, l’UE ne peut pas permettre au R-U de maintenir l’accès au marché unique en raison du message que cela enverrait aux autres États membres. Sur une note positive, M. Vella a indiqué que le Brexit pourrait être avantageux pour Malte : certaines entreprises de services financiers du R-U pourraient se réinstaller à Malte.
Pour ce qui est de la situation en Ukraine, M. Vella a argué que l’Ukraine fait véritablement partie de la Russie et que les membres de l’OTAN ont été naïfs de croire que la Russie aurait permis à l’Ukraine d’adhérer à l’OTAN à sa frontière. Il considère que les États-Unis ont renoncé à leurs obligations sur le front européen et que la Russie a le haut du pavé. Il a aussi souligné le manque d’implication des États-Unis en Syrie, où la Russie joue un rôle sans précédent.
Selon M. Vella, la présidence du Conseil de l’Union européenne de Malte mettra l’accent sur la migration, le chômage et une perspective méditerranéenne en raison de la situation et de l’emplacement particuliers de Malte. Il aimerait attirer l’attention de l’UE sur les questions méridionales, notamment l’Afrique. Il a soulevé des préoccupations concernant la situation politique instable en Libye et le rôle joué par ce pays dans la crise migratoire ainsi que le problème du passage de clandestins et de la contrebande de drogues. M. Vella a indiqué que certains pays producteurs de pétrole influent sur les guerres et financent le terrorisme.
K. Réunion avec des représentants de l’Union générale des travailleurs
La délégation a rencontré des représentants de l’Union générale des travailleurs (General Workers Union [GWU]), la plus grande organisation syndicale de Malte. Ces représentants ont expliqué que la GWU participe à différents secteurs d’activité, comme l’industrie manufacturière et la construction. Ils ont souligné que l’économie de Malte se porte bien et qu’ils sont très satisfaits du budget déposé par le gouvernement il y a deux jours, qui montre que le gouvernement a tenu compte de leurs recommandations. Ils considèrent que Malte n’était pas prête à absorber la croissance qu’elle a enregistrée dernièrement. Si le chômage ne pose pas problème à Malte – le taux de chômage s’établissant à 2,5 %, le plus bas taux de l’UE – ils considèrent que le système d’éducation doit être amélioré. Les représentants de la GWU ont fait valoir que la formation que les étudiants reçoivent aux niveaux secondaire, collégial et universitaire ne correspond pas à la réalité du marché du travail. Ils ont aussi souligné que l’information concernant les organisations syndicales doit être incluse dans le programme d’études des étudiants.
En réponse aux questions des délégués, les représentants de la GWU ont expliqué que Malte compte un des taux de syndicalisation les plus élevés de l’UE : de 30 à 35 % des travailleurs du secteur public, un taux encore plus élevé dans le secteur privé. Il s’agit d’une priorité principale pour la GWU. Ils ont mentionné que le salaire minimum à Malte n’est pas suffisant pour garantir des conditions de vie décentes (aucune convention collective ne prévoit le salaire minimum) et que le salaire moyen s’élève à environ 15 000 euros par année.
Les représentants de la GWU ont expliqué que la principale préoccupation à Malte – et dans l’ensemble de l’UE – est l’immigration, même si l’Italie accueille la plupart des migrants à l’heure actuelle. Ils ont précisé que ce ne sont pas tous les migrants qui arrivent par bateau : certains migrants arrivent à Malte par voie aérienne depuis l’Italie avec des permis de travail temporaires. Les représentants de la GWU ont fait valoir que Malte rencontre des problèmes posés par l’intégration des immigrants et l’application des droits des travailleurs immigrants. La numérisation et la mobilité des travailleurs ont aussi été relevées comme des défis pour la GWU.
L. Réunion avec des députés du Parlement européen
La délégation a rencontré des députés du Parlement européen. Les délégués ont appris que les parlementaires maltais ne travaillent pas à temps plein (le Parlement siège du lundi au mercredi, de 18 h à 21 h); ils doivent avoir un autre emploi. Les députés du Parlement européen ont souligné l’importance du Brexit pour l’UE et Malte. Ils font fait valoir que beaucoup de débats et de négociations auront lieu avant l’application de l’article 50 du Traité de l’Union européenne. En outre, il est peu probable que toutes les négociations soient terminées dans les deux ans suivant cette date. Leur seule certitude est que le R-U sera le plus grand perdant à l’issue de ce processus, même s’ils souhaitent que le R-U soit dans une bonne position.
En ce qui concerne l’AECG, les députés du Parlement européen ont mentionné qu’il s’est retrouvé empêtré dans le TTIP, ce qui est la pire chose qui aurait pu arriver. Même avec le Parti populaire européen (dont les députés du Parlement européen rencontrés faisaient partie), généralement favorable au commerce, l’AECG est remis en question. Comme explication possible de cette situation, les députés du Parlement européen ont laissé entendre que les institutions de l’UE pourraient ne pas avoir communiqué efficacement en ce qui concerne l’accord. Ils ont fait valoir que le manque de transparence entourant le processus a conduit certaines populations des États membres à critiquer l’accord. Pour ce qui est du TTIP, ils ont souligné que personne ne sait encore de quoi il s’agit : même les députés du Parlement européen n’ont pas encore vu son texte.
M. Réunion avec des représentants de Malta Marittima
La délégation a rencontré des représentants de Malta Marittima, un organisme gouvernemental relevant du ministère de la Compétitivité et de l’Économie numérique, maritime et des services. Ces représentants ont informé les délégués que Malta Marittima a débuté ses opérations récemment, soit en avril 2016. Ils ont mentionné que Malte possède la plus importante activité maritime au sein de l’UE en termes de tonnage brut. Les représentants de Malta Marittima ont annoncé que la déclaration de Malte concernant sa présidence du Conseil de l’Union européenne en avril 2017 représentera une bonne occasion de revoir sa politique maritime et les objectifs de la stratégie « croissance bleue », soit le développement du transport maritime.
Les représentants de Malta Marittima ont indiqué qu’une conférence aura lieu en octobre 2017 sur la politique internationale de gouvernance des océans. Entre autres sujets d’intérêt abordés durant cette conférence, ils ont cité les suivants :
- la possibilité d’une reconnaissance mutuelle de chefs de bord (pour les petites embarcations);
- le tourisme nautique (mis à part l’activité entourant les navires de croisière);
- les investissements futurs;
- l’utilisation durable des océans.
Ils ont dit espérer qu’une politique maritime intégrée serait élaborée lors de cette conférence. Ils ont mentionné qu’un grand projet gouvernemental vise à construire un nombre accru de marinas pour pouvoir accueillir plus de bateaux; ils font des efforts pour que davantage de navires procèdent à leur immatriculation à Malte. Ils ont attribué le succès de l’immatriculation des navires à Malte aux facteurs suivants :
- l’environnement attrayant qui a été créé;
- l’ampleur du registre;
- le succès du régime de taxation au tonnage;
- la bonne réputation de Malte;
- la souplesse du système de Malte;
- d’autres incitations financières;
- le fait que les banques font confiance au système de Malte (qui a été éprouvé) pour leurs investissements.
Ils ont aussi mentionné la nécessité de changer la perception des jeunes concernant l’industrie maritime pour attirer de nouveaux travailleurs. À cet égard, ils considèrent que l’éducation est indispensable et ils essaient de s’associer à des universités pour concevoir des programmes qui correspondent aux besoins de l’industrie maritime.
Respectueusement soumis,
M. Scott Simms, président
Association parlementaire Canada-Europe