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Rapport
Une délégation du Groupe canadien de l’Union interparlementaire (UIPU) a participé à la 68e session de la Commission de la condition de la femme au siège de l’Organisation des Nations unies (ONU), à New York, du 12 au 13 mars 2024. Les activités de la délégation se sont concentrées autour de la réunion parlementaire organisée par l’Union interparlementaire (UIP) et ONU Femmes, l’entité des Nations Unies consacrée à l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, tenue le 12 mars 2024. La délégation canadienne a également participé à plusieurs événements parallèles et réunions de travail au cours de sa mission à New York.
La délégation canadienne était composée des parlementaires suivantes :
- l’honorable Rosemary Moodie, sénatrice;
- l’honorable Flordeliz (Gigi) Osler, sénatrice;
- Mme Pam Damoff, députée;
- Mme Lena Metlege Diab, députée;
- Mme Leah Gazan, députée;
- Mme Andréanne Larouche, députée.
La délégation était accompagnée de Mme Lyla Malow, secrétaire d’association, et de Mme Dominique Montpetit, conseillère.
RÉUNION PARLEMENTAIRE
La réunion parlementaire organisée par l’UIP le 12 mars 2024 avait pour thème « Des parlements sensibles au genre : faire progresser l’égalité des sexes pour mettre fin à la pauvreté ». La réunion a été organisée autour de séances et un volet spécial :
- Séance 1 – Donner la priorité à la réduction de la pauvreté pour atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes.
- Volet spécial – Des budgets tenant compte des questions de genre : un outil pour réduire la pauvreté.
- Séance 2 – Des institutions sensibles au genre pour briser le cycle de la pauvreté.
Mme Véronique Riotton, députée (France) et membre du Bureau des femmes parlementaires de l’UIP, a ouvert la rencontre. Elle a expliqué que l’UIP travaille de concert avec ONU Femmes pour promouvoir l’égalité des femmes et que l’organisation croit fermement que sans parlements efficaces et sensibles au genre aucun progrès ne peut être réalisé. Cette réunion parlementaire permettra donc d’unir les forces afin d’inciter les parlements à prendre des mesures plus vigoureuses pour atteindre l’égalité des genres.
Mme Tulia Ackson, présidente de l'UIP et Présidente l’Assemblée nationale de Tanzanie, a aussi offert des observations liminaires lors de l’ouverture de la réunion. Elle a souligné qu’il est essentiel de continuer à faire valoir la cause des femmes et des filles et de lutter contre les discriminations intergénérationnelles pour aboutir à des résultats concrets pour ces personnes. La pauvreté des femmes, a-t-elle souligné, est le symptôme des inégalités entre les femmes et les hommes. Mme Ackson a aussi fait le plaidoyer pour des parlements plus sensibles au genre, paritaires et sécuritaires pour les femmes.
Mme Sarah Hendriks, directrice exécutive adjointe à ONU Femmes, a terminé les observations liminaires en soulignant que cette réunion parlementaire est une occasion pour les parlementaires d’intégrer leurs observations et perspectives dans les travaux de la Commission de la condition de la femme. Elle a mis l’emphase sur l’importance de faire davantage d’efforts pour répondre et prévenir la pauvreté des femmes, par exemple en soutenant le développement de lois qui respectent l’égalité des genres et les droits des femmes et la mise en œuvre de la budgétisation sensible au genre.
A. Séance 1 – Donner la priorité à la réduction de la pauvreté pour atteindre l’égalité entre les femmes et les hommes
La séance 1 a examiné « la manière dont les parlements peuvent conduire le changement et redynamiser l’élaboration des politiques pour répondre aux besoins des femmes et des filles vivant dans la pauvreté, et veiller à ce que la législation et les politiques dans les secteurs de l’économie et de la finance soient équitables et inclusives, et ne maintiennent pas, ne perpétuent pas et n’exacerbent pas la pauvreté[1] ». La séance a été organisée autour de cinq présentations :
- Mme Clara Mattei, professeure associée d'économie à la New School for Social Research : Mme Mattei a débuté son intervention en soulignant le fait que les modèles et les théories économiques ne sont pas neutres sur le plan du genre. Leurs impacts bénéficient souvent les personnes en situation de pouvoir et masquent les effets des systèmes économiques capitalistes. La pauvreté est la conséquence directe du fonctionnement de ces systèmes qui ne privilégient pas le bien-être des populations. Elle a souligné que les parlements peuvent combattre cette logique économique au bénéfice des femmes en s’opposant aux politiques d’austérité et en favorisant la distribution des ressources vers les personnes qui en ont besoin.
- Mme Mona Sinha, directrice exécutive mondiale de Equality Now : Mme Sinha a débuté sa présentation en stipulant que les liens entre les lois discriminatoires et la pauvreté sont clairs. Au moins 3,9 milliards de femmes ne jouissent toujours pas d’une pleine égalité, ce qui les empêche de participer pleinement dans le marché du travail ou orientent leurs choix; ceci résulte en un déficit de leadership féminin. Elle a ajouté que les systèmes économiques font fi de plusieurs aspects qui contribuent au bien-être personnel et économique en plaçant une attention disproportionnée sur les activités qui ne sont pas bénéfiques pour la planète. Elle a partagé trois recommandations pour mettre fin à la pauvreté des femmes à travers des réformes juridiques. Premièrement, elle recommande d’éliminer toutes les lois discriminatoires et sexistes. Deuxièmement, elle demande de remplacer ces lois par des lois qui font la promotion de l’égalité des genres. Finalement, elle souligne l’important de soutenir les mouvements féministes.
- Mme Rebecca Riddell, responsable Politique, Justice économique et raciale à Oxfam America : Mme Riddell a concentré son intervention sur le lien entre la taxation et l’égalité des genres. Elle a débuté son intervention en notant que les systèmes de taxation exacerbent souvent la situation économique des femmes en les appauvrissant. Pour amasser des revenus sans appauvrir les femmes, les gouvernements peuvent se tourner vers les corporations dans le but de taxer la richesse, et non les revenus. Elle a soulevé la nécessité de développer une architecture internationale de taxation transparente, forte et juste.
- M. Georgios Stamatis, député (Grèce) : M. Stamatis a souligné le besoin d’avoir accès à des données ventilées pour mettre sur pied des politiques sensibles aux besoins des femmes et des filles. Il a aussi mis de l’avant l’importance d’augmenter la représentation des femmes dans les postes de décisions, notamment dans les parlements. Relativement aux femmes en politique, il a fait un plaidoyer pour la mise en place de quotas pour augmenter leur représentation ainsi que pour des cadres juridiques visant à prévenir la violence dont sont victimes les femmes en politique.
- Mme Julie LaShell Adderley, Présidente du Sénat (Bahamas) : Mme LaShell Adderley a débuté son intervention en notant que l’autonomisation économique des femmes promeut la stabilité financière et la croissance économique durable. Elle a noté que les femmes et les filles ont été affectées de manière disproportionnée par les impacts de l’ouragan Dorian et de la pandémie de COVID-19. Elle a partagé des exemples de programmes mis sur pied par le gouvernement des Bahamas et par la Bahamas Development Bank qui visent l’autonomisation des femmes, notamment des programmes de prêts et de garde d’enfants.
Durant la période d’échanges, Mme Damoff a pris la parole pour partager la perspective canadienne. Elle a noté que la pauvreté des femmes et des filles est enracinée dans la discrimination systémique fondée sur le genre avec laquelle elles doivent composer à toutes les étapes de leur vie. La pauvreté chez les femmes et les filles est non seulement une cause d’inégalité entre les genres; il s’agit également d’une conséquence. Les inégalités observées dans l’accès à l’éducation et au marché du travail, l’écart salarial entre les sexes et le fardeau rattaché au travail non rémunéré et à la prestation de soins sont tous des facteurs qui viennent compromettre la sécurité économique des femmes.
Mme Damoff a également partagé des informations sur les investissements du gouvernement du Canada en matière de garde d’enfants. Elle a ajouté que la participation des femmes sur le marché du travail au Canada a récemment atteint un niveau record, avec 80 %. Malgré tout, elle a souligné que les progrès devront être beaucoup plus rapides si l’on veut atteindre l’objectif d’éradication de la pauvreté extrême d’ici à 2030. La crise liée à la COVID-19 a fait ralentir, ou a même renversé, les tendances à la baisse dans les taux de pauvreté et a engendré une deuxième pandémie de violence envers les femmes.
De plus, Mme Damoff a souligné que les stratégies de réduction de la pauvreté doivent tenir compte des expériences fondées sur le genre et des inégalités systémiques. Elle a cité un rapport de la Chambre de commerce du Canada qui mentionne que le faible taux de progrès signifie que cela prendra des décennies pour atteindre la parité numérique entre les femmes et les hommes dans les entreprises et sur les conseils d’administration. Mme Damoff a ajouté que si l’on souhaite s’attaquer efficacement à la pauvreté chez les femmes et les filles, il est primordial de chercher à atteindre l’objectif de développement durable 5, l’égalité entre les sexes. Cela signifie :
- de mettre fin à toutes les formes de discrimination;
- d'éliminer la violence fondée sur le genre;
- de reconnaître la valeur réelle des services de soins et du travail domestique non rémunérés;
- de veiller à la pleine participation des femmes à tous les niveaux des processus décisionnels;
- de réaliser des réformes qui accorderont aux femmes les mêmes droits lorsqu’il s’agit de profiter des ressources économiques.
Mme Damoff a précisé que les femmes et les filles vivant avec un handicap ou racisées sont encore plus affectées par les politiques gouvernementales, qui souvent les poussent à vivre dans la pauvreté. Pour cette raison, ces femmes et filles doivent être prises en compte dans le développement des politiques. Elle a ajouté que l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive doit être une priorité. Finalement, Mme Damoff a insisté sur la nécessité d’intégrer dès maintenant la question de l’égalité entre les genres dans les processus d’établissement des lois, d’élaboration des budgets et de vérification de nos parlements pour garantir l’élimination des inégalités et de la discrimination fondées sur le genre dans les lois, les politiques et les programmes nationaux.
Des représentants des parlements et institutions suivants ont ensuite partagé de l’information sur les actions prises par leur parlement ou leur gouvernement visant l’atteinte de l’égalité des genres : Chili, République de Corée, Maroc, Italie, Mexique, Grèce, Brésil, la Banque mondiale, Tchad, Royaume-Uni, Pologne, Afrique du Sud et France.
B. Volet spécial – Des budgets tenant compte des questions de genre : un outil pour réduire la pauvreté
Le volet spécial a offert aux parlementaires une plateforme pour partager des informations, des pratiques et des enseignements tirés de la conception et de la mise en œuvre d’une budgétisation sensible au genre (BSG) dans leurs pays respectifs. Cinq présentations ont été offertes aux participants.
Mme Patty Hajdu, ministre des Services aux autochtones et ministre responsable de l'Agence fédérale de développement économique pour le nord de l'Ontario (Canada), a commencé les présentations en soulignant la présence de nombreuses participantes qui se battent pour les droits des femmes. Elle a ajouté que plusieurs défenseures des droits des femmes dans le monde sont découragées parce que le concept d’égalité des genres est attaqué à plusieurs endroits dans le monde. Même dans les pays comme le Canada, où plusieurs avancées en matière d’égalité ont été enregistrées, les femmes font toujours face à de la discrimination en raison des systèmes sexistes et coloniaux. Ces personnes font aussi face à des conséquences pour défendre les droits des femmes. Elle a mentionné quelques initiatives canadiennes en matière d’égalité des genres, notamment :
- l’annonce du premier cabinet des ministres paritaire au Canada en 2015;
- la mise en place de la budgétisation sensible au genre;
- la Loi sur l’équité salariale dans le secteur public fédéral;
- la législation au sujet du harcèlement des travailleurs fédéraux;
- l’accès à des produits menstruels gratuits sur les lieux de travail fédéraux.
Mme Hajdu a aussi souligné les impacts dévastateurs de la violence envers les femmes, y compris la cyberviolence. Elle a terminé en rappelant que les activistes pour les droits des femmes doivent travailler ensemble et se soutenir entre elles pour faire avancer la cause des femmes.
Mme Flavia Rwabuhoro, députée (Ouganda), a présenté l’agenda lié à l’égalité des genres en Ouganda. En particulier, elle a souligné que la Constitution ougandaise prévoit la possibilité de mettre en œuvre des actions positives en faveur des groupes marginalisés pour lutter contre les inégalités auxquelles ils font face. De plus, la loi sur les finances publiques et la gestion prévoit que tous les ministères développent des mesures pour combattre les inégalités. D’ailleurs, Mme Rwabuhoro a fait part du fait que le gouvernement de l’Ouganda a adopté une politique nationale sur les femmes en 1997 avec l’objectif de guider l’allocation des ressources et la planification des programmes gouvernementaux, ce qui a permis d’intégrer les questions de genre dans tous les secteurs de l’économie. Elle a terminé en présentant quelques exemples de programmes gouvernementaux visant l’égalité des genres et l’autonomisation économique des femmes et des personnes vulnérables.
Mme Céline Calvez, députée (France), a présenté l’historique de la mise en place de budgets genrés en France. Elle a souligné que la première approche mise en place manquait d’ampleur et était limitée. Un groupe a été mis sur pied afin d’identifier comment les budgets genrés pourraient voir le jour en France. Ce groupe a émis des recommandations à cet égard, notamment d’avoir une impulsion politique, d’inviter le gouvernement français à faire partie de la mise en œuvre, d’inscrire dans la loi la pratique et de préconiser la formation des acteurs. Mme Calvez a identifié de grandes leçons tirées de l’expérience française :
- les finances ne sont jamais neutres;
- il n’est pas nécessaire de partir de zéro, car des pays ou municipalités ont déjà des expériences en la matière;
- toutes les données nécessaires ne sont pas encore disponibles;
- trouver la façon pour intéresser et engager les gouvernements dans la mise en œuvre de la budgétisation sensible au genre.
Mme Teresa da Silva Neto, députée (Angola) et présidente du Groupe des femmes parlementaires à l’Assemblée nationale angolaise, a informé les participantes qu’en 2021 le président angolais a signé un décret permettant l’application de la budgétisation sensible au genre. Elle a souligné que la budgétisation sensible au genre est un outil permettant d’intégrer la problématique homme-femme dans toutes les politiques gouvernementales. Elle a ajouté que depuis que l’Angola a intégré cet outil dans ses procédures, les rapports sur le développement humain des Nations Unies font état d’une amélioration de l’égalité des genres au niveau national. Mme da Silva Neto a toutefois mentionné qu’il restait beaucoup à faire pour atteindre l’égalité, mais que les parlementaires sont mobilisés en ce sens.
Mme Khadouj Slassi, députée (Maroc), a débuté sa présentation en soulignant que les problèmes sociaux et environnementaux affectent les femmes différemment des hommes, notamment en raison du manque de considération des besoins des femmes dans le développement des politiques publiques. Parlant de son pays, elle a avancé que la promotion de l’égalité des genres permet de promouvoir le développement durable qui est une question essentielle et prioritaire au Maroc. Le pays fait face à une inégalité de genre importante et, au cours des dernières années, l’intégration de la dimension de genre dans les politiques publiques, y compris dans le budget, a été priorisée. Mme Slassi a ajouté que la budgétisation sensible au genre est un point d’entrée pour réaliser l’égalité des genres. Pour terminer, elle a présenté quelques programmes en place au Maroc ayant pour objectif l’atteinte de l’égalité des genres, comme l’enseignement gratuit et obligatoire pour quelques années et les programmes visant l’alphabétisation.
C. Séance 2 – Des institutions sensibles au genre pour briser le cycle de la pauvreté
La séance 2 a examiné « la manière dont les parlements peuvent s’attaquer à la pauvreté des femmes en plaçant la question de l’égalité des sexes au centre de leur composition et de leurs structures organisationnelles et fonctionnelles[2] ». Mme Beatrice Duncan, conseillère politique à ONU Femmes, a ouvert la séance en abordant quelques enjeux liés à l’inégalité de genre et au rôle des parlements. Dans un premier temps, elle a souligné l’importance de créer des parlements sensibles au genre pour favoriser l’atteinte de l’égalité des genres. Ensuite, elle a expliqué que les parlementaires doivent être informés des enjeux socio-économiques et ceux liés à l’inégalité de genre dans leur pays ainsi que des causes profondes de l’inégalité de genre. Elle a conclu en soulignant que les parlements peuvent demander des comptes au gouvernement en matière d’inégalité des genres et qu’ils peuvent travailler de concert avec le système judiciaire pour s’assurer que les lois sont respectées.
La séance a ensuite été organisée autour de trois présentations :
- Mme Priskila Arulpragasam, co-responsable de Delete Nothing : Mme Arulpragasam a partagé son expérience de collaboration avec des parlementaires pour des projets liés à l’éducation sexuelle pour les jeunes au Sri Lanka. Elle a ajouté que les parlementaires ont travaillé pour que ces projets soient couronnés de succès, en collaboration avec les organisations de la société civile. Elle a toutefois observé que la voix des militantes pour les droits des femmes est souvent limitée aux organes parlementaires plus directement liés aux enjeux sociaux, même si tous les enjeux ont une dimension de genre. Elle a souligné que les parlementaires devraient travailler avec les organisations de la société civile pour assurer que l’analyse de genre et les besoins des femmes soient intégrés dans le développement des politiques et des lois.
- Mme Zainab Gimba, députée (Nigéria) et présidente du Réseau des femmes parlementaires du Commonwealth : Durant sa présentation, Mme Gimba a présenté les travaux du Réseau des femmes parlementaires du Commonwealth. Elle a précisé que l’organisation travaille avec les organisations de la société civile pour s’assurer que ses actions sont pratiques et non uniquement théoriques. Elle a offert quelques exemples d’initiatives visant à renforcer l’égalité des genres menées par des parlements membres du Commonwealth (équité salariale, transferts sociaux, droit du travail, etc.). Elle a terminé en encourageant les parlementaires présents à la rencontre à mettre sur pied des caucus multipartisans pour répondre aux enjeux auxquels font face les femmes.
- Mme Daniella Cicardini Milla, deuxième vice-présidente de la Chambre des députés (Chili) : Mme Cicardini Milla a concentré ses propos autour de la question de la pauvreté des femmes. Les femmes rencontrent des défis dans plusieurs aspects de leur vie qui les empêchent d’émerger. Les parlements jouent un rôle essentiel pour apporter des réponses aux besoins des femmes. Elle a mentionné quelques initiatives en place au Chili : la représentation proportionnelle des femmes au parlement et l’accès aux services de santé reproductive pour les femmes. Elle a souligné l’importance d’avoir des femmes au parlement pour prendre part aux décisions et d’avoir un canal indépendant dans les parlements pour traiter des questions liées aux femmes (un comité parlementaire par exemple).
Les présentations ont été suivies par une période de question laquelle a été ouverte par la sénatrice Osler. Elle a souligné qu’intégrer les questions liées au genre dans les parlements peut permettre de promouvoir et d’atteindre l’égalité des genres. Elle a aussi partagé que le Sénat du Canada comptait désormais près de 55 % de femmes grâce aux efforts mis en place par le premier ministre pour atteindre l’égalité des genres dans la Chambre haute. Elle a continué son intervention en indiquant que les processus d’intégration des questions de genre aux travaux des parlements, comme ceux visant l’élaboration de lois et de budgets sensibles au genre, peuvent contribuer à mettre en évidence les inégalités économiques et sociales entre les femmes et les hommes dans nos sociétés et à trouver des pistes de solutions pour y remédier. Elle a noté que, pour cette raison, le Canada réitère son soutien aux engagements énoncés dans la Déclaration de Kigali – Égalité des sexes et parlements sensibles au genre : moteurs du changement pour un monde plus résilient et pacifique, approuvée par l’UIP en 2022.
La sénatrice Osler a ensuite souligné que la question de la prise en compte de la dimension de genre dans les processus législatifs a récemment été étudiée par le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie. Dans son rapport final, le Comité a recommandé que l’analyse comparative entre les sexes Plus (ACS Plus) soit prise en compte lors du dépôt et de l’examen des projets de loi au Parlement. Elle a partagé les obstacles à la mise en œuvre complète de l’ACS Plus au Canada relevés par le Comité, notamment :
- la disponibilité limitée de la formation;
- le choix du moment où l’analyse est réalisée;
- le manque de capacités, comme le manque de temps et le manque de disponibilité des outils et des ressources;
- le manque de données désagrégées et de données de qualité;
- le manque de mécanismes pour évaluer les résultats de l’Analyse comparative entre les sexes Plus et pour en améliorer la mise en œuvre.
La sénatrice Osler a terminé son intervention en notant que le Comité a notamment proposé que Femmes et Égalité des genres Canada mette en place des ressources pour soutenir les comités parlementaires dans leurs travaux d’examen législatif.
Des représentants des parlements suivants ont ensuite partagé de l’information sur les actions prises par leur parlement ou leur gouvernement visant l’atteinte de l’égalité des genres : Mexique, Chili, Italie, Maroc, République de Corée, Royaume-Uni, Bolivie, Nigéria, Pologne, Afrique du Sud et Grèce.
ÉVÉNEMENTS PARALLÈLES ET RÉUNIONS DE TRAVAIL
A. Événement parallèle organisé par l’Union interparlementaire
L’UIP, en collaboration avec quelques partenaires[3], a organisé un événement parallèle sur le thème « L'égalité de participation et de leadership pour un monde plus pacifique : les enseignements tirés et la voie à suivre » le 13 mars 2024. Les membres de la délégation canadienne ont participé à cette activité. Mme Nicole Ameline, membre du Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes (CEDEF), a ouvert la rencontre. Elle a mis l’emphase sur l’importance d’atteindre la parité femme-homme pour créer un nouveau modèle de gouvernance. Elle a affirmé que l’absence de parité dans les postes de prise de décision est une violation des droits des femmes et ralentit l’atteinte des objectifs de développement durable.
Par la suite, Mme Ackson a abordé la question de la représentation des femmes dans les parlements nationaux. Elle a souligné que la parité entre les femmes et les hommes est essentielle pour bâtir des communautés et des institutions plus fortes, innovantes et résilientes. Elle a ajouté qu’une meilleure inclusion des femmes dans les postes de décision peut mener à des processus de paix plus durables. Elle a ajouté que la mise en place de quotas visant une meilleure représentation des femmes, de politiques contre le harcèlement et de politiques sensibles à la famille sont les voies à suivre pour les parlements.
Le premier exposé a été livré par Mme Mariana Duarte, chargée du Programme du partenariat entre hommes et femmes pour l’UIP, qui a présenté le nouveau rapport de l’UIP sur les femmes dans les parlements. En moyenne, les femmes représentaient près de 27 % des parlementaires dans le monde en 2023, une augmentation de 0,4 point de pourcentage par rapport à l’an dernier. Malgré cela, le taux de progrès a atteint un plateau et a ralenti par rapport aux années précédentes. Les femmes sont également sous-représentées parmi les présidents d’assemblées législatives dans le monde; elles représentaient près de 24 % des présidences en 2023. Mme Duarte a souligné que les quotas de représentation des femmes sont liés à une meilleure représentation des femmes dans les parlements. De plus, elle a affirmé que les femmes parlementaires sont davantage ciblées par de la violence et de la désinformation. Elle a terminé sa présentation en partageant les engagements des membres de l’UIP envers l’augmentation de la représentation des femmes dans les postes de décision au sein de l’ONU, notamment avec l’adoption d’une résolution à cet égard.
Le deuxième exposé a été offert par Mme Maria Noel Leoni, directrice exécutive adjointe du Centre pour la justice et le droit international et fondatrice de la campagne GQUAL. L’objectif de cette campagne est l’atteinte de la parité entre les femmes et les hommes dans les postes de décision. Mme Leoni a mentionné que les États sont un frein à une meilleure représentation des femmes dans les postes de leadership, car ils tendent à nommer plus d’hommes que de femmes dans les postes sous leur responsabilité. Elle a souligné qu’il est essentiel de demander aux États de collecter davantage de données sur la représentation des femmes, mais aussi de mieux disséminer l’information sur les ouvertures de postes pour que plus de femmes y appliquent.
L’exposé final a été donné par Mme Melissa Torres, vice-présidente de la Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté. Elle a mis l’emphase sur le besoin de démanteler les systèmes d’oppression qui affectent les femmes dans les positions de leadership, et non de seulement se concentrer sur l’augmentation du nombre de femmes dans ces postes. Augmenter la présence des femmes dans des systèmes qui perpétuent le patriarcat et les inégalités de genre n’est pas équitable.
Durant la période de questions et d’échange, la sénatrice Moodie a souligné que les femmes sont désormais majoritaires au Sénat du Canada. Elle a ajouté que l’objectif ultime ne devrait pas être l’égalité en soi, mais bien que toutes les femmes et les filles se sentent incluses et en sécurité dans les parlements et dans la société. Elle a ajouté que les femmes parlementaires au Canada subissent de la violence, en ligne et en personne, et que des conséquences doivent être appliquées pour les personnes qui perpétuent ces actes de violence.
B. Événement parallèle organisé par l’Assemblée parlementaire de la Francophonie
L’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) a organisé une activité parallèle le 13 mars 2024 sur le thème « La budgétisation sensible au genre : un outil pour l’égalité dans le financement des politiques publiques » et a invité Mme Larouche à représenter le Parlement du Canada et UIPU lors de cette activité. En plus du Canada, des panélistes de la Belgique et du Sénégal ont présenté leurs expériences avec la BSG.
L’événement s’est ouvert avec une présentation du concept de budgétisation sensible (BSG) au genre offerte par Mme Isabelle Gueguen. La BSG est un « outil de gestion des finances publiques qui peut être utilisé pour intégrer des considérations de genre dans la prise de décisions budgétaires. Elle peut être utilisée pour cerner les mesures budgétaires qui seront efficaces pour combler les écarts entre les hommes et les femmes et faire progresser les objectifs d’égalité des genres »[4].
À la suite de la présentation de Mme Gueguen, les panélistes ont détaillé la situation relative à la BSG dans leur pays respectif. Durant sa présentation, Mme Larouche a souligné que l’intégration de la dimension de genre dans les politiques publiques s’inscrit dans une longue histoire au Canada. Elle a précisé qu’à la suite de l’adoption du document Déclaration et Programme d’action de Beijing en 1995, le gouvernement du Canada s’est engagé à mettre en œuvre l’analyse comparative entre les sexes, aujourd’hui devenue l’analyse comparative entre les sexes Plus, dans tous ses ministères et organismes.
En particulier, Mme Larouche a noté qu’en 2018, le Parlement du Canada a adopté la Loi canadienne sur la budgétisation sensible aux sexes qui établit une nouvelle politique qui exige du gouvernement fédéral qu’il tienne compte des questions de genre et de diversité dans le budget fédéral, ainsi que dans les décisions relatives à la fiscalité et à l’allocation des ressources. Depuis 2019, les budgets fédéraux canadiens comportent un énoncé sur les répercussions des mesures budgétaires sur le genre, la diversité et la qualité de vie. Elle a présenté quelques avenues permettant l’intégration de la dimension de genre dans les travaux du Parlement du Canada, soit :
- lors de l’étude des projets de loi de mise en œuvre du budget;
- dans le cadre des études menées par les comités parlementaires;
- à travers l’étude du budget des dépenses.
Pour terminer, Mme Larouche a donné un aperçu de travaux du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes, qui travaille sur les questions liées à la condition féminine et l’égalité des genres.
C. Réunion de travail avec la délégation du Royaume-Uni
Les membres de la délégation canadienne ont participé à une réunion de travail avec la délégation du Royaume-Uni le 12 mars 2024. Cette rencontre a permis aux membres des deux délégations d’échanger sur des sujets d’intérêt commun, par exemple le respect et la mise en œuvre des droits des femmes dans les deux pays, et de comparer les systèmes politiques du Canada et du Royaume-Uni.
D. Réunion de travail avec la délégation de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe
Les membres de la délégation canadienne ont pu s’entretenir avec des représentants de la Commission sur l’égalité et la non-discrimination de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 13 mars 2024. Cette réunion de travail a été l’occasion pour les deux délégations d’échanger sur des sujets d’intérêt commun, comme les impacts de l’invasion russe en Ukraine sur les femmes et les filles, la représentation des femmes dans les postes de décision, notamment dans les parlements, la violence envers les femmes et les filles, et la santé reproductive.
Le tout respectueusement soumis,
L’honorable David McGuinty, C.P., député
Président du Groupe canadien de l’Union interparlementaire