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Association parlementaire Canada-Afrique

RAPPORT

MISSION BILATÉRALE AU CAMEROUN

L’Association parlementaire Canada-Afrique (l’Association) a effectué une visite bilatérale à Yaoundé, au Cameroun, du 13 au 17 novembre 2023. La délégation était dirigée par la coprésidente de l’Association, l’honorable sénatrice Amina Gerba, et comprenait l’honorable sénateur René Cormier, le député Joël Lightbound, la députée Lianne Rood, le député Alexis Brunelle-Duceppe et le député Richards Cannings. La délégation était accompagnée de Freddy Bobo Mukinayi, secrétaire de l’Association, et d’Offah Obale, conseiller de l’Association.

OBJECTIFS DE LA MISSION

Il s’agissait de la deuxième mission bilatérale de l’Association au Cameroun, après une première visite en 2012. Les objectifs de la mission de l’Association au Cameroun étaient les suivants :

  • Renforcer les relations bilatérales et la coopération parlementaire;
  • Nouer le dialogue avec des parlementaires sur des questions touchant la démocratie multipartite, la gouvernance, les droits de la personne, le bilinguisme officiel et la primauté du droit;
  • S’informer sur le rôle joué par les femmes à l’Assemblée nationale et au Sénat du Cameroun;
  • Discuter de l’autonomisation des femmes avec des groupes communautaires;
  • Discuter de la communauté LGBTQ+ avec des organisations de la société civile;
  • Rencontrer des représentants gouvernementaux afin de permettre à l’Association de mieux comprendre la situation politique actuelle au Cameroun;
  • Discuter des crises d’insécurité dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun;
  • Rencontrer des groupes d’affaires pour obtenir de nouvelles perspectives sur la situation économique au Cameroun et discuter de l’incidence des perspectives économiques mondiales sur le pays.

Pour atteindre ses objectifs, la délégation a rencontré le premier ministre du Cameroun, le ministre délégué à la Présidence, chargé des Relations avec les Assemblées, et le ministre délégué auprès du ministre des Relations extérieures, chargé de la Coopération avec le Commonwealth. La délégation a également rencontré le président de l’Assemblée nationale du Cameroun, le vice-président du Sénat camerounais et des membres de diverses commissions parlementaires. La délégation s’est aussi entretenue avec des membres de la société civile et des groupes d’affaires.

Le présent rapport fournit des renseignements généraux sur le Cameroun. Il résume également les rencontres de la délégation au Cameroun et présente ses observations à la suite de ces discussions.

LA RÉPUBLIQUE DU CAMEROUN

A. Système de gouvernement

Selon la Constitution du Cameroun, le pays est une république unitaire avec un président, élu tous les sept ans, qui nomme le premier ministre et les membres du cabinet [1]. Le président est le chef de l’État et le chef des Forces armées. La Constitution prévoit que toutes les lois adoptées par le parlement doivent être approuvées par le président. Les dispositions constitutionnelles permettent également au président de dissoudre le parlement et de déclarer l’état d’urgence, période pendant laquelle il peut s’arroger de pouvoirs supplémentaires à titre temporaire.

Le Parlement du Cameroun se compose d’un Sénat et d’une Assemblée nationale. Le Sénat – la chambre haute du Parlement – est composé de 100 membres. Chacune des dix régions du pays est représentée par dix sénateurs : trois sont nommés par le président et sept sont élus indirectement par un collège électoral de conseillers régionaux et municipaux. Les sénateurs sont nommés ou élus pour un mandat de cinq ans. Les 180 membres de l’Assemblée nationale sont élus au suffrage universel direct et secret pour un mandat de cinq ans.

Outre la présentation et l’adoption de lois, le Parlement du Cameroun exerce une fonction de contrôle de l’action gouvernementale. Cette fonction de contrôle du Parlement consiste à poser des questions orales et écrites aux membres du gouvernement ainsi qu’à établir des commissions d’enquête parlementaire avec des mandats précis.

B. Récents développements politiques

En octobre 2018, le Président Paul Biya a remporté un septième mandat [2]. L’élection présidentielle de 2018 s’est déroulée à un moment où le Cameroun fait face à la violence terroriste liée à Boko Haram dans la région de l’Extrême-Nord et à des crises d’insécurité dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du pays.

Les dernières élections pour les sièges électifs du Sénat ont eu lieu le 12 mars 2023. Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) du Président Biya est le plus grand parti, détenant l’ensemble des 70 sièges électifs du Sénat [3].

Lors des dernières élections à l’Assemblée nationale, le 9 février 2020, le parti au pouvoir, le RDPC, a remporté 139 des 167 sièges à pourvoir [4]. Son allié, l’Union nationale pour la démocratie et le progrès, dirigée par M. Bello Bouba Maigari, est arrivé en deuxième position avec sept sièges. Le Conseil constitutionnel du Cameroun a invalidé les résultats dans 13 circonscriptions des régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où les boycottages et les tensions persistantes ont entraîné une faible participation aux élections. De nouveaux scrutins ont eu lieu en mars 2020, et le RDPC a remporté 13 des sièges en jeu. Les sièges restants à l’Assemblée nationale sont détenus par le Front social démocrate, le Parti camerounais pour la réconciliation nationale, l’Union démocratique du Cameroun, le Front pour le salut national du Cameroun, le Mouvement pour la défense de la République et l’Union des mouvements socialistes [5].

LES RENCONTRES DE LA DÉLÉGATION AU CAMEROUN

1. Rencontre avec l’honorable Joseph Dion Ngute, Premier ministre

La délégation, accompagnée de la Haute-commissaire du Canada à Yaoundé, a rencontré l’honorable Joseph Dion Ngute, premier ministre du Cameroun. Les membres de la délégation et le premier ministre Dion Ngute ont discuté de divers sujets, notamment des relations bilatérales entre le Canada et le Cameroun, de la coopération multilatérale, des crises d’insécurité dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun et des questions liées au changement climatique.

Le premier ministre Dion Ngute a parlé du dialogue national que le gouvernement camerounais a organisé pour tenter de résoudre les crises d’insécurité dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Il a ajouté que des participants de divers secteurs de la société camerounaise ont assisté au dialogue national.

En abordant les questions liées au changement climatique, le premier ministre Ngute a mentionné que le lac Tchad – situé aux frontières du Cameroun, du Tchad, du Nigéria et du Niger – s’est réduit à un dixième de sa taille au cours des cinquante dernières années. Selon lui, la diminution des eaux du lac Tchad a affecté les moyens de subsistance des pêcheurs locaux.

La délégation et le premier ministre Dion Ngute ont échangé leurs points de vue sur des questions d’intérêt commun pour le Canada et le Cameroun. Ils ont notamment discuté des droits de la personne, de la coopération bilatérale en matière de sécurité, ainsi que des réfugiés et des personnes déplacées à l’intérieur du pays. Ils ont également parlé du nombre croissant d’infirmiers et infirmières formé(e)s au Cameroun qui émigrent au Canada.

2. Rencontre avec l’honorable Felix Mbayu, Ministre délégué auprès du ministre des Relations extérieures, chargé de la Coopération avec le Commonwealth

Les discussions de la délégation avec l’honorable Felix Mbayu, ministre délégué auprès du ministre des Relations extérieures, chargé de la Coopération avec le Commonwealth, ont porté sur le bilinguisme officiel, ainsi que sur la situation politique et des droits de la personne au Cameroun.

Le ministre Mbayu a déclaré que les langues officielles du Cameroun sont le français et l’anglais, 80 % de la population appartenant à la majorité francophone et 20 % à la minorité anglophone. Il a ajouté que des centaines de langues autochtones sont également parlées.

Pour assurer la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles relatives à l’égalité de statut du français et de l’anglais en tant que langues officielles, le ministre Mbayu a souligné que le gouvernement du Cameroun a créé la Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (la Commission du bilinguisme). Les objectifs de la Commission du bilinguisme comprennent la promotion du multiculturalisme au Cameroun en vue de maintenir la paix et de renforcer l’unité nationale.

En outre, le ministre Mbayu a souligné que, bien que le gouvernement ait mis en place des mesures destinées à améliorer les libertés civiles et les droits de la personne, il éprouve des difficultés à garantir le droit des Camerounais à la vie, à la nourriture et au logement.

Les délégués ont posé des questions sur la manière dont le Canada pourrait mieux soutenir le Cameroun et se mobiliser auprès de celui-ci. Le Ministre Mbayu a exprimé le souhait de voir se renforcer la coopération entre le Canada et le Cameroun, en particulier dans les secteurs de l’agriculture et de l’éducation. Il a également souligné l’importance de l’adhésion conjointe des deux pays au Commonwealth et à la Francophonie comme moyen de coopérer sur des questions multilatérales d’intérêt mutuel.

3. Rencontre avec l’honorable Wakata Bolvine, Ministre délégué à la Présidence, chargé des Relations avec les Assemblées

La délégation a rencontré l’honorable Wakata Bolvine, ministre délégué à la Présidence, chargé des Relations avec les Assemblées, afin de s’informer sur la collaboration entre le pouvoir exécutif du gouvernement et le parlement du Cameroun. Le ministre Wakata Bolvine a expliqué que le processus législatif au Cameroun commence lorsque le ministère concerné rédige un projet de loi qui est ensuite transmis au président de la République. Après consultation des parties prenantes, le président de la République transmet le projet de loi à l’Assemblée nationale pour examen par les commissions parlementaires compétentes. Lorsqu’un projet de loi a été adopté par l’Assemblée nationale, il est transmis au Sénat pour examen. Une fois que le Sénat a adopté le projet de loi, celui-ci est transmis au président de l’Assemblée nationale, qui le transmet à son tour au président de la République pour qu’il soit promulgué en tant que loi.

Répondant aux questions des délégués sur la fonction de contrôle de l’action gouvernementale du Parlement, le ministre Wakata Bolvine a déclaré que le pouvoir législatif contrôle le pouvoir exécutif en posant des questions orales et écrites. Le pouvoir exécutif est tenu de fournir des réponses et des justifications à propos des politiques gouvernementales concernant les différents ministères.

4. Rencontre avec l’honorable Cavayé Yeguie Djibril, Président de l’Assemblée nationale

La délégation s’est rendue à l’Assemblée nationale pour rencontrer l’honorable Cavayé Yeguie Djibril. La délégation a discuté avec le président Cavayé Yeguie de l’éducation des filles et de la représentation des femmes au Parlement. Il a indiqué que les femmes représentent 34 % de l’ensemble des membres de l’Assemblée nationale du Cameroun.

5. Rencontre avec l’honorable Aboubakary Abdoulaye, Vice-président du Sénat

La délégation a rencontré l’honorable Aboubakary Abdoulaye, vice-président du Sénat camerounais. Les sénateurs camerounais suivants étaient également présents à la réunion : l’honorable Ndieb-Nso Tabetando; l’honorable Vanigansen Mochiggle; l’honorable Hayatou Aïcha Pierrette; l’honorable Obam Assam Samuel; l’honorable Ngayap Pierre Flambeau; l’honorable Etamè Massoma David; l’honorable Neba Ndosiri Bridget.

Le vice-président Aboubakary Abdoulaye a souhaité la bienvenue à la délégation et a donné un aperçu des responsabilités du Sénat camerounais. M. Justin Njomatchoua, directeur de cabinet du président du Sénat, a informé la délégation du fonctionnement du parlement bicaméral du Cameroun, composé de l’Assemblée nationale et du Sénat. Il a expliqué que le Parlement du Cameroun se réunit trois fois par an, en sessions ordinaires en mars, juin et novembre. La Conférence des Présidents est chargée d’établir l’ordre du jour du Sénat, de renvoyer les projets de loi aux commissions parlementaires compétentes et de fixer les dates des séances plénières. Elle est composée du Président et des vice-présidents du Sénat ainsi que des présidents des commissions parlementaires.

Au cours de la discussion qui a suivi, les délégués ont échangé avec les sénateurs camerounais sur des questions liées aux processus parlementaires au Canada et au Cameroun, à la démocratie, au fédéralisme et à la représentation des femmes au Parlement. La délégation a été informée qu’en vertu de la loi électorale camerounaise, les partis politiques participant aux élections doivent présenter une liste de sept candidats, dont au moins une femme.

6. Table ronde avec les présidents des Commissions de l’Assemblée nationale des lois constitutionnelles, des droits de l’homme et des libertés, de la justice, de la législation et du règlement, de l’administration, des affaires étrangères, des affaires culturelles, sociales et familiales et de la production et des échanges, ainsi qu’avec les membres du groupe d’amitié parlementaire Cameroun-Canada

La délégation a participé à une table ronde avec des parlementaires camerounais, y compris les présidents de trois commissions parlementaires et les membres du groupe d’amitié parlementaire Cameroun-Canada. Au total, 17 membres de l’Assemblée nationale du Cameroun ont participé à la réunion.

La discussion a débuté par une présentation de l’honorable Zondol Hersesse, président de la Commission des lois constitutionnelles, des droits de l’homme et des libertés, de la justice, de la législation et du règlement, de l’administration. Il a donné un aperçu du système parlementaire camerounais et de la situation politique actuelle du pays. Il a notamment évoqué les réformes du processus électoral camerounais qui ont abouti à la création de l’organe de gestion des élections du pays, Elections Cameroon (ELECAM).

En ce qui concerne les droits des personnes LGBTQ+, la délégation a été informée que l’activité sexuelle entre personnes de même sexe est interdite par la loi camerounaise. Par conséquent, les relations homosexuelles au Cameroun sont clandestines de facto.

Les discussions ont porté sur la représentation des femmes au Parlement et sur le rôle que le Canada peut jouer pour soutenir l’enseignement professionnel et technique. Les délégués ont également discuté avec des parlementaires camerounais de la « fuite des cerveaux » du personnel médical camerounais.

7. Rencontre avec des associations professionnelles

Les membres de la délégation se sont entretenus avec des représentants d’associations professionnelles au cours de leur visite. Ils ont discuté des façons dont le Canada pourrait approfondir ses relations en matière de commerce et d’investissement avec le Cameroun. La délégation a appris qu’il existe des possibilités d’investissement pour les entreprises canadiennes dans les secteurs de l’énergie, de l’éducation, de l’agriculture et des technologies de l’information et des communications.

8. Réunion avec l’Association des anciens étudiants camerounais des universités et collèges canadiens

La délégation a rencontré des membres de l’Association des anciens étudiants camerounais des universités et collèges canadiens (les Returnees). Après une introduction, la délégation a engagé une discussion avec les participants sur le rôle qu’ils peuvent jouer pour améliorer les relations entre le Canada et le Cameroun.

Les Returnees ont exhorté le gouvernement du Canada à délivrer des visas de longue durée aux anciens membres de la diaspora camerounaise qui souhaitent revenir au Canada en tant que visiteurs ou étudiants.

9. Visite de TechWomen Factory

La délégation a visité le projet TechWomen Factory. Le gouvernement du Canada finance ce projet en partenariat avec le Cameroon Youth School Tech Incubator (CAYSTI). Mme Arielle Kitio, directrice exécutive du CAYSTI, a donné un aperçu du projet, de son histoire et de ses objectifs, ainsi que de certains de ses principaux programmes. Le projet offre aux femmes âgées de 18 à 35 ans une formation en programmation, en robotique, en art numérique et en conception de sites Web.

Les étudiantes ont présenté une application qu’elles ont développée et qui analyse les données des patients pour prédire la pré-éclampsie chez les femmes enceintes. Elles ont également partagé les détails de leur travail de création d’une base de données qui permet de mieux comprendre la composition nutritionnelle des aliments locaux afin de promouvoir un régime alimentaire sain.

10. Visite du Local Youth Corner Cameroon

Le Local Youth Corner Cameroon (LOYOC) est une organisation de la société civile créée en 2002 pour répondre aux défis sociopolitiques et économiques auxquels sont confrontés les jeunes du Cameroun. Achaleke Christian Leke, directeur exécutif du LOYOC, a déclaré que l’organisation se concentre sur les questions liées au chômage des jeunes, à la violence sexiste, à la corruption et à l’exclusion dans les processus de prise de décision.

La délégation a pris connaissance du projet d’initiative pénitentiaire du LOYOC. Ce projet facilite la réhabilitation et la réinsertion des jeunes délinquants en les transformant en « prisonniers entrepreneurs ». Un participant a raconté son parcours : il a passé 13 ans à la prison de Bamenda, a appris à coudre en tant que participant au projet d’initiative pénitentiaire, et est devenu propriétaire d’un atelier à Yaoundé.

La délégation a visité les locaux du LOYOC et a posé des questions au personnel. La délégation a appris que l’organisation crée un réseau d’agents de paix et de changement pour renforcer la cohésion sociale au Cameroun.

Le Haut-commissariat du Canada au Cameroun à Yaoundé a profité de la visite de la délégation pour annoncer que le LOYOC était le lauréat de son Prix du défenseur des droits de la personne au Cameroun pour 2023.

11. Table ronde avec des femmes qui œuvrent à la consolidation de la paix au Cameroun

La délégation a visité le bureau de la Fondation Friedrich-Ebert (FES Cameroun) à Yaoundé pour participer à une discussion avec des femmes qui œuvrent à la consolidation de la paix au Cameroun. La représentante résidente de la FES Cameroun a modéré la séance et présenté les douze femmes participant à la discussion, y compris la témoin M – une victime de la violence liée au conflit dans la région du Sud-Ouest.

En ce qui concerne la situation dans la région de l’Extrême-Nord, la coordinatrice de l’Action Locale pour un Développement Participatif et Autogéré a expliqué que la région est aux prises avec la violence terroriste liée à Boko Haram. Elle a indiqué que le groupe, originaire du Nigéria, s’est propagé au Cameroun en 2014. Selon la coordinatrice, Boko Haram est responsable du recrutement forcé d’enfants, d’enlèvements contre rançon, de violences sexuelles, d’incendies criminels de villages et de raids contre des élèves et des écoles.

De même, la directrice exécutive de Common Action for Gender Development a parlé des causes du conflit dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, qui a commencé en octobre 2016 et s’est exacerbé en octobre 2017 lorsque les forces séparatistes ont déclaré la sécession unilatérale de la prétendue république d’« Ambazonie ». Selon les participantes, le conflit a fait environ 6 000 morts et déplacé plus d’un million de personnes.

Les délégués ont engagé une large discussion avec les participantes sur les questions liées à la consolidation de la paix, aux déplacements internes et à l’exclusion des femmes des processus de paix officiels. Les participantes ont exhorté le Canada à collaborer avec les autorités camerounaises pour créer de nouveaux centres de soutien psychologique et de guérison des traumatismes, et renforcer ceux qui existent déjà. Elles ont également suggéré des mesures visant à renforcer les liens entre les femmes camerounaises qui œuvrent à la consolidation de la paix et leurs homologues internationales. Pour assurer leur protection physique, les participantes ont exprimé le souhait que le Canada délivre des visas aux femmes victimes de violences liées au conflit.

12. Rencontre avec des groupes LGBTQ+

La délégation a rencontré des personnes LGBTQ+ pour connaître les difficultés auxquelles elles se heurtent. La délégation a appris qu’en raison de l’interdiction de l’activité sexuelle entre personnes de même sexe en vertu de la loi camerounaise, les groupes LGBTQ+ n’ont pas de statut juridique.

La délégation a été informée que depuis 2020, un nombre croissant de personnes LGBTQ+ ont été arrêtées par les forces de l’ordre camerounaises. Pendant leur détention, ces personnes subissent souvent des traitements dégradants et risquent la peine maximale de cinq ans d’emprisonnement. Les personnes LGBTQ+ ont également parlé de la violence sociale et des lynchages dont elles sont parfois la cible de la part de membres du public en raison de leur orientation sexuelle réelle ou supposée. Elles ont déclaré que le gouvernement tolérait ces formes de violence à l’encontre des personnes LGBTQ+.

En outre, les groupes LGBTQ+ ont souligné que la stigmatisation qui résulte de l’interdiction des relations sexuelles entre personnes de même sexe crée également des inégalités dans l’accès aux services de santé sexuelle et reproductive. Ces groupes ont également expliqué aux délégués que le système juridique camerounais ne reconnaît pas de troisième sexe aux personnes qui s’identifient comme n'étant ni un homme ni une femme. Par conséquent, ces personnes se heurtent à des obstacles dans l’accès à certains services sociaux et de santé.

Au cours des discussions qui ont suivi, les participants ont expliqué leur stratégie de plaidoyer aux échelles nationale, régionale et internationale en ce qui concerne les droits de la personne de la population LGBTQ+.

13. Visite à Ape Action Africa

La délégation a visité Ape Action Africa, une organisation à but non lucratif qui travaille à la protection des primates menacés d’extinction au Cameroun. L’organisation gère un sanctuaire dans le Parc national de la Méfou qui abrite des groupes de chimpanzés, de gorilles des plaines occidentales et de singes. La délégation a appris qu’Ape Action Africa sauve des primates orphelins ou blessés en leur offrant une réhabilitation et des soins de longue durée dans un environnement protégé.

OBSERVATIONS ET CONCLUSIONS

L’Association a choisi de se rendre au Cameroun pour faire le suivi d’une précédente mission bilatérale effectuée en 2012 et pour obtenir un portrait à jour de la situation dans le pays. Grâce à des rencontres avec des représentants du gouvernement, des parlementaires et des organisations de la société civile, la délégation a pu réfléchir aux façons dont le Canada peut approfondir son partenariat avec le Cameroun d’un point de vue parlementaire, bilatéral et multilatéral.

La délégation estime que les liens parlementaires constituent un mécanisme important pour renforcer les relations entre le Canada et le Cameroun. Lors de ses rencontres avec le président de l’Assemblée nationale, le vice-président du Sénat et d’autres parlementaires camerounais, la délégation a entendu parler de l’intérêt qu’il y a à renforcer cette coopération par le partage de pratiques exemplaires. L’Association estime que le Canada et les parlementaires canadiens pourraient discuter des pratiques exemplaires dans les domaines du pluralisme, de l’autonomisation politique des femmes, de la gouvernance démocratique et du contrôle législatif du pouvoir exécutif du gouvernement dans le cadre de la collaboration du Canada avec le Cameroun.

La visite a également permis à la délégation de s’informer sur les crises d’insécurité et les conflits dans les régions du Nord-Ouest, du Sud-Ouest et de l’Extrême-Nord du pays. Bien que ces crises demeurent préoccupantes, la délégation a été encouragée par les efforts continus déployés par le gouvernement du Cameroun pour trouver des solutions pacifiques à long terme. En ce qui concerne la violence liée à Boko Haram dans la région de l’Extrême-Nord, la délégation a entendu que la coopération avec les partenaires régionaux est nécessaire pour créer un environnement sûr autour du bassin du lac Tchad et dans les zones touchées par les activités du groupe terroriste.

De même, la promotion de l’emploi des jeunes, de l’entrepreneuriat et de l’engagement civique a été abordée par les interlocuteurs camerounais au cours de la mission de la délégation. Les jeunes représentent une partie importante de la population du Cameroun. Selon la Banque mondiale, en 2022, 42 % de la population totale était âgée de 0 à 14 ans[6] . Les délégués ont été ravis d’entendre parler du projet que le Canada soutient par l’intermédiaire de TechWomen Factory, qui offre une formation aux jeunes camerounaises dans le secteur des technologies de l’information et des communications. L’Association estime que les projets de ce type sont importants et méritent que le Canada continue à les soutenir.

Enfin, l’Association pense que le gouvernement du Canada devrait explorer les moyens de renforcer les liens commerciaux avec le Cameroun. Le Canada a exporté pour 58,5 millions de dollars de marchandises vers le Cameroun en 2022, soit une baisse de 32,8 % par rapport à 2021, où les exportations s’élevaient à 87,1 millions de dollars[7] . Au cours de sa mission, la délégation a pris connaissance des nombreuses possibilités commerciales qui existent pour les entreprises canadiennes au Cameroun, notamment dans les secteurs de l’agriculture, des mines, de l’énergie et des infrastructures. L’Association estime que le gouvernement du Canada devrait redoubler d’efforts pour soutenir les entreprises canadiennes désireuses d’exporter au Cameroun.

REMERCIEMENTS

La délégation souhaite remercier la Haute-commissaire Lorraine Anderson, le conseiller politique Marcus Davies et le reste de l’équipe du Haut-Commissariat du Canada au Cameroun pour son soutien avant et pendant la mission au Cameroun.

La délégation remercie également tous les interlocuteurs qu’elle a rencontrés au Cameroun et qui ont pris le temps de partager leurs précieux points de vue et expériences.



Le tout respectueusement soumis,




L’honorable Amina Gerba, sénatrice,Brenda Shanahan, députée,
coprésidente,coprésidente,
Association parlementaire Canada-AfriqueAssociation parlementaire Canada-Afrique


[1] République du Cameroun, La Constitution.
[2] Britannica Digital Learning, « Cameroon », Britannica Academic, base de données, consulté le 28 février 2024.
[3] Union interparlementaire, Cameroun – Sénat, Parline de l’UIP, base de données, consulté le 28 février 2024.
[4] Union interparlementaire, Cameroun – Assemblée nationale, Parline de l’UIP, base de données.
[5] Ibid.
[7] Affaires mondiales Canada, « Les exportations de marchandises du Canada », Commerce annuel de marchandises.