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Association parlementaire canadienne de l'OTAN

Rapport

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN a l’honneur de présenter son rapport portant sur sa participation à la réunion du Bureau de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP OTAN) et aux réunions annuelles conjointes de la Commission de la défense et de la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité, et de la Commission politique, qui se sont tenues à Bruxelles, en Belgique, du 19 au 22 février 2023[1].

Les réunions annuelles conjointes ont pour objectif principal de permettre aux délégués de faire le point sur les activités et les opérations de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN ou l’Alliance) et de discuter des principaux enjeux avec lesquels l’Alliance devra composer tout au long de l’année. Les membres de la Commission sur la démocratie et la sécurité et de la Commission des sciences et des technologies assistent aussi aux réunions conjointes.

La délégation canadienne se composait des personnes suivantes : Julie Dzerowicz, députée, présidente de l’Association parlementaire canadienne de l’OTAN et cheffe de la délégation; l’honorable Pierre-Hugues Boisvenu, sénateur; l’honorable Clément Gignac, sénateur; l’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia, sénateur; Rachel Blaney, députée; Cheryl Gallant, députée; l’honorable Steven MacKinnon, C.P., député; et Christine Normandin, députée. La délégation était accompagnée de Céline Ethier, secrétaire de l’Association, et de James Lee, conseiller auprès de l’Association.

RÉUNION DU BUREAU DE L’AP OTAN

Le 19 février 2023, Mme Dzerowicz a participé à la réunion du Bureau de l’AP OTAN en sa qualité de vice-présidente de l’AP OTAN (membre d’office). Les points à l’ordre du jour comprenaient l’examen des partenariats de l’Assemblée, une discussion des projets de déclaration qui seront présentés à la Commission permanente lors de la Session du printemps au Luxembourg, le point sur les activités du président et une discussion des finances de l’Assemblée.

RÉUNIONS CONJOINTES

Les réunions conjointes ont réuni quelques 120 législatrices et législateurs de 28 pays membres de l’OTAN. Les réunions ont commencé par une minute de silence en hommage aux victimes du tremblement de terre dévastateur qui avait frappé la Türkiye quelques semaines auparavant, la catastrophe naturelle la plus meurtrière ayant touché le territoire de l’Alliance depuis sa création en 1949.

Les réunions conjointes ont eu lieu un an après l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par la Russie, et l’ordre du jour portait sur les répercussions de la guerre sur la sécurité et la stabilité internationales. Les députés et les représentants ont réitéré l’engagement ferme des Alliés à soutenir l’Ukraine et à amener la Russie à rendre compte de ses actes.

Les discussions se sont déroulées selon les règles de Chatham House.

Résumé des discussions

Les délégués ont participé, à l’occasion des réunions conjointes, à neuf séances thématiques au cours desquelles ils ont entendu des hauts fonctionnaires et de hauts gradés du quartier général de l’OTAN, de hauts fonctionnaires de l’Union européenne (UE) et divers représentants permanents auprès de l’OTAN. Les sujets abordés étaient les suivants :

  • La guerre illégale menée par la Russie contre l’Ukraine;
  • Le concept stratégique 2022 de l’OTAN;
  • La défense aérienne et antimissile intégrée de l’OTAN;
  • La manipulation de l’information et l’interférence étrangères;
  • L’assertivité de la Chine et la région indo-pacifique;
  • Les politiques de l’UE en matière de climat et d’énergie;
  • La réponse de l’OTAN aux nouveaux défis en matière de sécurité;
  • L’adaptation militaire de l’OTAN au nouvel environnement stratégique;
  • La politique nucléaire de l’OTAN.

Dans le nouvel environnement de sécurité d’aujourd’hui, les membres et partenaires de l’OTAN font face à des menaces mondiales interreliées. Les sujets ci-dessus n’ont pas été traités en vase clos, et pendant les discussions, les délégués faisaient souvent référence aux thèmes principaux, de portée générale. En discutant de la guerre en Ukraine, par exemple, ils ont débattu entre autres de questions comme l’adaptation militaire et la manipulation de l’information. D’une manière générale, trois grands thèmes sont ressortis de ces échanges : la réponse de l’Alliance à la guerre en Ukraine, la réponse de l’Alliance aux défis nouveaux et émergents et l’assertivité de la Chine. Les paragraphes suivants résument les discussions autour de ces thèmes.

Réponse de l’OTAN à la guerre contre l’Ukraine

On a rappelé aux délégués que la Déclaration du sommet de Madrid de juin 2022 avait décrit la Russie comme étant « la menace la plus importante et la plus directe pour la sécurité des Alliés et pour la paix et la stabilité dans la zone euro-atlantique[2] ».

On a informé les délégués que, devant cette menace mondiale, l’OTAN était entrée dans une période de profonde adaptation. Dans le contexte particulier de la guerre contre l’Ukraine, les discussions sur ce sujet ont porté sur la décision de l’OTAN d’adapter sa posture de dissuasion et de défense, notamment en renforçant sa présence militaire sur son flanc oriental; ses efforts visant à élaborer de nouvelles méthodes dans des domaines comme la mise sur pied et l’état de préparation d’une force; et les leçons retenues concernant l’importance d’une défense aérienne et antimissile intégrée.

En ce qui concerne l’aide à l’Ukraine, les représentants ont attiré l’attention sur le fait que l’entraînement fourni à l’Ukraine par le Canada et les Alliés et partenaires de l’OTAN depuis 2014 avait consolidé la capacité de l’Ukraine à se défendre. Du côté de l’appui militaire, ils ont souligné que, collectivement, l’OTAN avait renforcé son appui non létal à l’Ukraine depuis le début de la guerre. Même si les alliés fournissent, individuellement, du soutien – y compris du soutien létal – par le biais du Groupe consultatif de défense de l’Ukraine, dirigé par les États-Unis, il a été souligné que cette aide est soigneusement « échelonnée » pour réduire au minimum le risque d’escalade.

Réitérant l’appui indéfectible de l’OTAN envers l’Ukraine, les fonctionnaires ont indiqué que maintenir l’approvisionnement en munitions et autres ressources posait des difficultés. Les Alliés ont été encouragés à améliorer leur capacité industrielle de défense pour garantir une assistance continue à l’Ukraine et soutenir la transformation en cours de la posture de défense et de dissuasion de l’OTAN. L’importance de traiter d’autres enjeux, dont les dépenses militaires, la production pour la défense et le partage du fardeau, a aussi été soulignée.

Des préoccupations ont par ailleurs été soulevées concernant le discours « irresponsable » de la Russie par rapport au nucléaire dans le contexte de la guerre en Ukraine. On a rappelé aux délégués que l’approche de l’OTAN concernant les armes nucléaires se basait sur leur « valeur dissuasive ». Il a aussi été noté que si trois membres de l’OTAN – la France, les États-Unis et le Royaume-Uni – avaient leur propre programme stratégique d’armement nucléaire, la responsabilité de dissuasion nucléaire incombait à tous les Alliés. Les autres Alliés contribuent à cette responsabilité entre autres par la mise en commun du savoir et la fourniture d’avions à double capacité pouvant livrer, au besoin, des armes nucléaires américaines.

Réponse de l’OTAN aux défis nouveaux et émergents

On a expliqué aux délégués qu’en plus des défis « traditionnels » en matière de défense et de sécurité, l’OTAN doit faire face à ce qu’on appelle souvent des défis « nouveaux et émergents ». Ces défis, parmi lesquels la désinformation et l’utilisation malveillante des technologies nouvelles et émergentes, menacent les intérêts communs et les valeurs démocratiques de l’Alliance.

Une attention particulière a été accordée aux efforts de désinformation de la Russie, notamment la diffusion de théories du complot et les tentatives de miner l’unité au sein de l’Alliance. Les délégués ont appris que, pour contrer ces efforts, les Alliés se montrent plus proactifs dans la diffusion de renseignements classifiés et de nature diverse. Par exemple, lors de la première invasion de l’Ukraine par la Russie, en 2014, il avait fallu des mois avant que les images satellites témoignant des actions de la Russie soient déclassifiées. En revanche, dans les mois précédant l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022, les États-Unis et d’autres États ont déclassifié et diffusé des renseignements prouvant que la Russie préparait une invasion, ce qui a facilité une réponse rapide lorsque la guerre a éclaté. De manière plus générale, l’OTAN est passée d’une méthode d’action réactive consistant à démentir les affirmations russes à une méthode proactive de diffusion d’informations visant à expliquer ses politiques et décisions, ce qui permet de « démentir à l’avance » toute affirmation que pourrait faire la Russie.

De plus, en ce qui concerne la désinformation russe, des représentants ont parlé des mesures prises par l’OTAN pour contrer les tentatives par la Russie de propager de la désinformation sur les programmes nucléaires de l’OTAN. Entre autres mesures, l’OTAN prône la transparence en annonçant publiquement ses exercices de routine des mois à l’avance. L’Alliance travaille aussi à mieux comprendre la perception du public à ce sujet.

Parmi les autres solutions proposées pour contrer la désinformation, citons la mise en commun des pratiques exemplaires, l’élaboration de politiques de portée générale et l’adoption d’une approche pansociétale. Les délégués ont été avisés que l’OTAN collabore étroitement avec ses partenaires, dont l’UE, pour surmonter les défis associés à la désinformation. Sur ce point, il a été noté que si l’UE reconnaît l’importance de combattre la manipulation de l’information et l’interférence étrangères, les différents États membres ne mesurent pas toujours ce défi de la même manière ou ne lui accordent pas la même priorité, ce qui complique les efforts déployés à cet égard.

Un autre enjeu récent en matière de sécurité, l’utilisation malveillante des technologies émergentes et perturbatrices, a aussi fait l’objet d’une discussion. Les technologies émergentes et perturbatrices permettent aux Alliés de l’OTAN de conserver leur interopérabilité et leur avantage militaire, mais entre les mains d’agents malveillants, elles présentent des risques. Les délégués ont appris que, pour conserver son avantage concurrentiel, l’OTAN n’a pas un problème d’innovation – de nombreuses percées technologiques provenant des pays occidentaux –, mais plutôt un problème d’« adoption ». L’OTAN s’attaquera à ce problème en partie grâce à une plus grande collaboration avec le secteur privé. L’Accélérateur d’innovation de défense pour l’Atlantique Nord (DIANA), dont le bureau régional pour l’Amérique du Nord sera à Halifax, a été nommé comme cadre potentiel pour cette coopération.

L’assertivité de la Chine et la région indo-pacifique

Les délégués ont appris que, dans les récentes années, l’OTAN a dû faire face à une Chine de plus en plus assertive. Les intervenants ont indiqué que, dans le cadre de ce processus, l’OTAN a consacré beaucoup de temps à améliorer sa compréhension de la Chine et de l’incident de ses actions sur la sécurité de la zone euro-atlantique. Il a été souligné que, bien que l’OTAN soit une organisation régionale, les événements et actions qui ont lieu dans la région indo-pacifique revêtent tout de même de l’importance pour l’Alliance.

Si les Alliés n’ont pas tous la même vision de la Chine, il a été signalé que l’OTAN, en tant qu’organisation, ne perçoit pas la Chine comme une menace militaire. Cela dit, l’OTAN prend des mesures pour s’adapter à l’assertivité grandissante de la Chine. On a fait remarquer, par exemple, qu’il y a eu une intensification de la coopération avec des pays aux vues similaires de la région indo-pacifique, notamment l’Australie, le Japon, la Corée du Sud et la Nouvelle-Zélande.

Parmi les autres défis que la Chine peut poser à la sécurité des Alliés, les délégués ont parlé du fait qu’elle soutient fermement la Russie. Il a été rappelé aux délégués que, malgré ce soutien, rien ne prouve qu’elle a envoyé des armes à la Russie, et les dirigeants des pays alliés l’ont avertie de ne pas le faire. La crainte d’une coopération plus étroite entre la Russie et la Chine persiste néanmoins.

Autres questions

Les délégués ont aussi discuté de la nécessité d’adopter une stratégie multidimensionnelle pour relever les défis liés au climat et à l’énergie. Il a été soutenu que les États doivent agir fermement pour limiter la hausse des températures mondiales, tout en veillant à ce que la transition vers des technologies plus propres soit « juste ». En veillant à ce que personne ne soit laissé pour compte, les institutions peuvent contribuer à rétablir la confiance du public envers la politique et les gouvernements.

AUTRES RÉUNIONS

Avant le début des réunions conjointes, les délégués canadiens ont rencontré le représentant permanent du Canada à l’OTAN, l’ambassadeur David Angell, ainsi que le représentant militaire adjoint du Canada à l’OTAN, le colonel Richard Pamplin. Pendant les réunions conjointes, les délégués ont rencontré le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, et les représentants permanents nationaux au Conseil de l’Atlantique Nord. Les délégués ont également eu pour interlocuteurs le ministre belge des Affaires étrangères, ainsi que des représentants de haut niveau de l’OTAN et de l’Union européenne[3].

CONCLUSION

Les réunions conjointes de 2023 de la Commission de la défense et de la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité et de la Commission politique ont permis aux délégués canadiens de mener des discussions approfondies avec des représentants de haut niveau de l’OTAN et d’autres organisations, ainsi qu’avec des parlementaires de l’OTAN, sur des questions de défense, d’économie et de politique qui intéressent l’Alliance. Ils se sont ainsi familiarisés avec les questions clés à l’ordre du jour de l’Alliance, tout en contribuant au débat et en défendant les intérêts du Canada sur des questions telles que la guerre contre l’Ukraine et la transformation de l’OTAN.



Respectueusement soumis,




Julie Dzerowicz, députée
Présidente, Association parlementaire canadienne de l’OTAN



[2] Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), Déclaration du sommet de Madrid, publiée par les chefs d’État et de gouvernement des pays membres de l’OTAN à l’issue de la réunion du Conseil de l’Atlantique Nord tenue à Madrid le 29 juin 2022.