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Rapport
Une délégation canadienne a assisté au Sommet des parlementaires de l’Arctique – Collaboration nordique et nord-américaine ( le Sommet ) à Nuuk, au Groenland, du 11 au 12 septembre 2022. Le Sommet a été organisé par le Folketing, ou le Parlement du Danemark, et était la première rencontre en personne des parlementaires de l’Arctique depuis 2018[1] . La délégation canadienne comprenait l’honorable Yvonne Jones, C.P., députée (cheffe de la délégation, membre du Comité permanent des parlementaires de la région arctique), M. Mel Arnold, député, Mme Marilène Gill, députée, Mme Lori Idlout, députée, et l’honorable Mohamed-Iqbal Ravalia, sénateur.
La délégation comprenait également Mme Sara Fryer, conseillère en association des Services d’information, d’éducation et de recherche parlementaires de la Bibliothèque du Parlement, et Mme Jessica Kulka, secrétaire d’association de l’Association parlementaire Canada-Europe.
Des délégués de cinq États de l’Arctique ont assisté au Sommet : Canada, Danemark, Finlande, Islande et Norvège, ainsi que des délégués du Parlement européen. Des députés du Groenland étaient également présents, ainsi que des représentants d’organisations autochtones et de défense des droits de la personne, dont le Conseil circumpolaire inuit et le Conseil saami.
RÉSUMÉ DE LA RÉUNION
Le Sommet était organisé en deux sessions. La première session consistait en une série de débats sur les thèmes suivants : La démocratie dans l’Arctique, le leadership des femmes dans l’Arctique, les films et les médias dans l’Arctique, et le droit Arctique. La deuxième session était consacrée au Sommet des Parlementaires de l’Arctique avec des séances plénières et des séances de groupe.
LES DÉBATS SUR L’ARCTIQUE
Le 11 septembre 2022, le Sommet s’est ouvert sur les allocutions de bienvenue de l’hôte de la conférence, Mme Aaja Chemnitz, présidente du Comité permanent des parlementaires de la région arctique et députée du Folketing danois pour le Groenland.
Mme Chemnitz a souligné la nécessité de poursuivre le travail de coopération dans l’Arctique, car il s’agit d’un moyen important de mettre en évidence les priorités des États de l’Arctique. Elle a souligné que les thèmes généraux du Sommet sont communs à tous les États de l’Arctique, notamment l’accent sur la reconnaissance des droits des peuples autochtones, la prise en compte des effets du changement climatique sur l’Arctique et la nécessité d’un développement durable. Les membres de la délégation canadienne ont participé activement aux débats et ont apporté des contributions importantes en tant que modérateurs/modératrices et présentateurs/présentatrices, et également par leurs questions et interventions.
1. La démocratie dans l’Arctique
Mme Lori Idlout, députée au Nunavut, a fait une présentation au cours du premier débat du Sommet à propos de la Commission Pikialasorsuaq, qui recommandait une stratégie inuite pour la sauvegarde et la surveillance de l’état de santé de la polynie des eaux du Nord, tout en soulignant l’importance de la mobilité des Inuits entre le Canada et le Groenland.
2. Le leadership des femmes dans l’Arctique
L’honorable Yvonne Jones, députée du Labrador, et Mme Marilène Gill, députée de Manicouagan, ont toutes deux fait des présentations lors des panels sur le leadership des femmes dans l’Arctique. Leur discussion a mis en lumière leurs expériences de leadership en tant que parlementaires au service des commettants/commettantes des régions rurales et éloignées du Canada.
3. Les films et les médias dans l’Arctique
M. Mel Arnold, député de North Okanagan–Shuswap, a assisté à la séance sur les films et les médias dans l’Arctique, qui était animée par Film Greenland. Au cours des dernières années, l’industrie cinématographique groenlandaise s’est développée, les habitants ayant développé une expertise dans la production de longs métrages, de documentaires et de courts métrages. Les panélistes ont discuté de l’importance de la production cinématographique pour le tourisme et ont noté que l’industrie cinématographique du Groenland s’est développée de façon importante malgré le soutien financier limité des gouvernements.
4. Le droit Arctique
La session sur le droit Arctique a présenté une évaluation du cadre juridique international de l’Arctique. Parmi les thèmes abordés figurait la manière d’adapter les conventions internationales et les organes de décision aux réalités futures d’un éventuel océan Arctique sans glace. Par exemple, les activités de navigation devraient augmenter dans l’Arctique en raison du dégel rapide de la glace de mer. Le Recueil international de règles applicables aux navires exploités dans les eaux polaires (ou « Polar Code ») régit le transport maritime et la navigation dans les glaces et basses températures des eaux polaires. Les présentateurs/présentatrices ont observé que le Polar Code pourrait devoir être adapté si les mers arctiques deviennent libres de glace à l’avenir. Le débat a également souligné la nature unique de la propriété foncière au Groenland, puisque la terre en est une publique. Les intervenants ont décrit l’élaboration des règlements et de la législation liés au développement des ressources minérales dans ce contexte, l’utilisation des terres et de l’eau au Groenland, et les processus connexes d’évaluation environnementale.
L’honorable Yvonne Jones a parlé de l’obligation du gouvernement du Canada de consulter les peuples autochtones dans le cadre de l’évaluation environnementale pour l’approbation de grands projets au Canada. Elle a fait remarquer qu’il est important de financer la participation des Autochtones au processus de réglementation afin de comprendre comment le développement des ressources peut affecter le savoir et les terres autochtones.
La présidence a clôturé le premier jour de la réunion et il a été convenu entre les États de publier les conclusions de la présidence reflétant les discussions entre les États au cours du Sommet.
LE SOMMET DE L’ARCTIQUE
Le 12 septembre 2022, le Sommet parlementaire de l’Arctique a débuté par l’allumage d’une lampe par un aîné du Groenland. Mme Avaaraq Olse, mairesse de Nuuk, au Groenland, et M. Jeppe Kofod, ministre des Affaires étrangères du Danemark, ont souhaité la bienvenue aux délégués par vidéoconférence. Dans ses remarques aux participants au Sommet, Mme Sara Olsvig, présidente internationale du Conseil circumpolaire inuit, s’est dite préoccupée par l’interruption des activités du Conseil de l’Arctique en raison de la guerre de la Fédération de Russie contre l’Ukraine et a insisté sur le fait que la coopération multilatérale entre les États de l’Arctique et les peuples autochtones de l’Arctique doit se poursuivre.
La deuxième session du Sommet comprenait des présentations de fond sur : Les peuples de l’Arctique, le changement climatique dans l’Arctique, l’économie dans l’Arctique et l’avenir de l’Arctique. Le Sommet s’est clôturé par un débat d’experts sur la viabilité économique dans l’Arctique.
1. Les peuples de l’Arctique
La première session du Sommet portait sur les peuples de l’Arctique et était animée par Mme Lori Idlout. Mme Idlout a demandé un moment de silence pour les personnes qui ont été touchées par la violence dans la nation crie de James Smith, au Canada. Elle a présenté les deux intervenants du panel, M. Håkan Jonsson, président du Conseil parlementaire saami et président du conseil d’administration du Parlement saami en Suède et Mme Arnârak Patricia Bloch, chercheuse en santé publique. M. Jonsson a évoqué la coopération saami entre la Finlande, la Norvège et la Suède, où se trouvent les terres saami. Les Saami qui vivent dans ces trois pays ont subi des conséquences d’assimilation similaires, comme la perte de leur langue. Une priorité commune est la revitalisation de la langue saami. En Finlande, en Norvège et en Suède, les expériences des Saami en matière d’injustices historiques ont été documentées par les commissions de la vérité tenues dans chaque État. M. Jonsson constate que les Saami conservent davantage le contrôle des affaires saami au sein de leurs États respectifs.
Mme Arnârak Patricia Bloch a parlé de ses recherches sur la cartographie des facteurs de protection qui contribuent au bien-être des peuples autochtones de l’Arctique, en tant que chercheuse inuite travaillant dans le domaine de la santé publique. Les modes de vie inuits sont enseignés par les Aînés – la transmission du savoir à la génération suivante est importante pour la survie. Elle a constaté que la famille et les relations, la langue, la spiritualité, la récolte, le savoir autochtone, l’humilité et le lien avec la terre sont des facteurs de protection importants pour la santé physique et mentale des peuples autochtones.
Mme Lori Idlout a fait une intervention sur l’importance du droit autochtone et a souligné la récente nomination de la première personne autochtone au Canada à siéger à la Cour suprême du Canada, la juge Michelle O’Bonsawin. Elle a discuté de la manière dont les lois autochtones peuvent contrer les effets de la colonisation.
Mme Sara Olsvig, a discuté de l’importance d’une coopération circumpolaire plus large entre les peuples autochtones de l’Arctique. Elle a noté les processus de vérité et de réconciliation qui ont eu lieu dans différents États. Elle a parlé de la Commission de réconciliation groenlandaise créée en 2014 et de la nécessité de répondre aux expériences partagées par les peuples autochtones. Elle a également indiqué que les différents processus de colonisation des États ont affecté les droits de la personne des femmes et des filles autochtones.
M. Mel Arnold a posé une question sur l’importance des activités terrestres pour la santé des jeunes dans l’Arctique et sur la façon dont les liens avec la terre peuvent être renforcés. Des données provenant de l’Alaska ont été fournies pour souligner l’importance de l’apprentissage intergénérationnel par le biais d’activités traditionnelles qui ont amélioré la santé des aînés et des jeunes.
2. Le changement climatique dans l’Arctique
La deuxième session du Sommet de l’Arctique a été animée par l’honorable Yvonne Jones sur le changement climatique dans l’Arctique. Mme Jones a prononcé une allocution d’ouverture concernant le fait que le réchauffement climatique rend la glace de mer imprévisible et que les déplacements sur la glace de mer signifie, pour les Inuits, une prise de risques considérable pour leur sécurité. Elle a indiqué que la glace de mer est essentielle à la pratique de la culture inuite.
M. Lars Haltbrekken, député du Parlement norvégien, a expliqué comment les accords internationaux ont permis de résoudre les problèmes environnementaux par le passé, tels que les pluies acides. Il a relevé que la coopération dans l’Arctique était un élément essentiel de la cartographie des zones où des polluants tels que le carbone noir sont présents, et que l’accumulation de carbone noir peut accélérer la fonte de la neige et de la glace. M. Haltbrekken a remarqué que la réduction des émissions de carbone noir aura un impact plus important sur le réchauffement que la réduction dans l’utilisation de combustibles fossiles et a évoqué des exemples de réduction des émissions à Svalbard, notamment le passage aux énergies renouvelables au lieu de l’utilisation du diesel pour l’énergie. Il espère que la crise climatique pourra être résolue si la communauté internationale fait bloc et s’appuie sur des solutions qui respectent les droits des peuples autochtones.
Dr. Minik Rosing, géoscientifique à l’Université du Groenland, a affirmé que l’innovation qui se produit dans les régions arctiques peut apporter des solutions aux problèmes du réchauffement climatique. Par exemple, la glace de mer fond, ce qui produit une grande quantité d’eau de fonte. À ce titre, le Groenland possède un potentiel hydroélectrique important. L’eau de fonte contient également de fines particules et des minéraux qui fournissent aux plantes tous les nutriments dont elles ont besoin pour survivre. Dans les régions du monde telles que les tropiques et les subtropiques, ces minéraux peuvent être utilisés comme engrais pour enrichir le sol afin qu’il soit plus productif pour l’agriculture. Il a également évoqué la manière dont la Norvège a fait passer ses traversiers du diesel à l’électricité et comment le développement de navires à base d’hydrogène et d’ammoniac pourrait permettre une navigation sans émissions à l’avenir.
Le sénateur Mohamed-Iqbal Ravalia a souligné l’importance de la pêche dans les eaux du Groenland et la façon dont la productivité dans les eaux de l’Atlantique Nord est parmi les plus élevées au monde. Il a demandé si des recherches avaient été menées pour déterminer si la forte teneur en minéraux de l’eau de fonte du Groenland était liée à la biodiversité et à la bonne santé des stocks de poissons dans les eaux côtières du Groenland.
En réponse à une question relative aux contributions financières des États de l’Arctique aux pays en développement pour lutter contre les changements climatiques, l’honorable Yvonne Jones a indiqué que le Canada avait établi des objectifs nationaux pour l’atteinte de zéro émission nette d’ici 2050 et s’était engagé à doubler son financement aux pays en développement pour les changements climatiques internationaux lors de la conférence des Nations Unies sur les changements climatiques de 2021, la Conférence des Parties (COP 26).
LES SÉANCES DE GROUPE
1. L’économie dans l’Arctique
Au cours de la session sur l’économie dans l’Arctique, M. Christian Keldsen, PDG de l’Association des entreprises du Groenland, et M. Mads Qvist Frederiksen, du Conseil économique de l’Arctique, ont donné un aperçu de l’économie du Groenland et de ses liens avec l’Arctique circumpolaire. Le Groenland a réalisé d’importants investissements en infrastructure, qui ont profité aux gens partout sur le territoire. Par exemple, 92 % de la population dispose d’une couverture cellulaire et de l’internet, et les transports sont fortement subventionnés entre les communautés. Leur présentation a mis en évidence les principaux moteurs de l’économie du Groenland, notamment sa pêche, principalement dirigée par la Royal Greenland Fisheries, qui est une entreprise publique. Il existe également un potentiel de développement des ressources minérales sur le territoire. Cependant, le Groenland est confronté à des problèmes de capacité de son réseau énergétique. Il existe également une initiative visant à consolider les recherches internationales sur le climat menées au Groenland, afin que les habitants puissent bénéficier du large éventail de recherches menées sur le territoire.
2. L’avenir de l’Arctique
La session sur l’avenir de l’Arctique a abordé le système d’éducation du Groenland et comprenait des présentations de jeunes leaders locaux. Parmi les panélistes figurait le fondateur de la première entreprise sociale du Groenland, Siu Tsiu, qui offre aux jeunes la possibilité d’accéder à un emploi permanent ou de poursuivre leurs études en créant des réseaux communautaires. Le travail comprend la construction et la production d’aliments locaux en plein air et dans des serres. Une autre présentation a porté sur l’école Kofoeds, qui propose des programmes d’éducation aux jeunes sans abri ou confrontés à d’autres difficultés, afin de leur offrir une formation et une éducation par le biais de l’emploi. Les jeunes se voient également proposer d’autres services, tels que des programmes de repas et des services de conseil.
Mme Gill a souligné le problème de la faible participation électorale des jeunes au Canada et les mesures que les politiciens/politiciennes peuvent prendre pour engager les jeunes.
3. La santé mentale dans l’Arctique
Au cours de la session sur la santé mentale dans l’Arctique, Mme Arnârak Patricia Bloch, de l’Institut national de santé publique au Groenland, a parlé des initiatives nationales pour la prévention du suicide, y compris la formation des travailleurs de première ligne. Un autre panéliste a discuté des approches de la promotion des initiatives de santé mentale des jeunes en Islande.
4. La durabilité économique
Le Sommet s’est clôturé par un aperçu du développement économique au Groenland et des exemples de transition vers l’énergie verte dans l’ensemble des États de l’Arctique, modéré par M. Mikko Kärnä, député, Finlande. Mme Aaja Chemintz a parlé du développement à grande échelle qui a lieu au Groenland, y compris le développement de deux nouveaux aéroports et les travaux du territoire pour créer des conditions économiques stables afin d’encourager le développement des entreprises. M. Mads Qvist Frederiksen, a décrit quelques exemples de développement économique durable. Des modèles innovants pour la transition vers l’énergie verte ont été mis en avant, notamment les installations solaires à Old Crow, au Yukon, et la manière dont les parcs éoliens de Berlevåg, en Norvège, sont utilisés pour produire de l’hydrogène et de l’ammoniac vert afin de ravitailler les navires naviguant dans les eaux du Nord.
Les délégués à la conférence ont accepté les conclusions de la présidence annexées au présent rapport.
Respectueusement soumis,
M. Francesco Sorbara, député
Président, Association parlementaire Canada-Europe