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Rapport
Une délégation de la Section canadienne de l’Association parlementaire du Commonwealth s’est rendue en Afrique du Sud et au Kenya du 31 août au 8 septembre 2018. Mme Yasmin Ratansi, députée et présidente de la Section, dirigeait cette délégation composée des députés Kerry Diotte et Anthony Rota. M. Rémi Bourgault, secrétaire de la Section canadienne, accompagnait la délégation.
La constitution de l’Association encourage les visites entre les pays membres pour que les parlementaires puissent discuter de questions d’intérêt commun dans les relations bilatérales et de dossier liés à l’ensemble de l’organisation du Commonwealth. La visite en Afrique du Sud et au Kenya visait à renforcer les liens avec nos partenaires africains du Commonwealth et à échanger des idées dans des domaines d’intérêt mutuel.
De nombreux sujets ont été abordés au cours de la visite bilatérale, notamment l’état de la démocratie parlementaire par rapport aux pratiques du régime de Westminster, les questions de justice sociale, les défis des changements climatiques et les objectifs de développement durable sur le plan de la réduction de la pauvreté, de la sécurité régionale, du commerce et des investissements, de la violence fondée sur le sexe, de la santé et de l’accès à l’éducation.
VISITE EN RÉPUBLIQUE D’AFRIQUE DU SUD
Géographie
La République sud-africaine est située à l’extrémité méridionale de l’Afrique; elle est bordée, au nord, par la Namibie, le Botswana, le Zimbabwe et le Mozambique et, à l’est, par le Swaziland. Le pays du Lesotho est complètement enclavé à l’intérieur de l’Afrique du Sud, laquelle s’étend sur 1,2 million de km2, soit environ la taille de l’Ontario. En 2017, la population de l’Afrique du Sud était de 57 millions d’habitants[1]Le pays compte 11 langues officielles : l’isizoulou, l’isixhosa, l’afrikaans, le sepedi, l’anglais, le setswana, le sesotho, le xitsonga, le siswati, le tshivenda et le süd ndebele. La capitale administrative est Pretoria (c’est aussi le siège de la branche exécutive); la capitale législative est Le Cap (c’est là également que se trouve le Parlement du pays); et la capitale judiciaire est Bloemfontein (siège de la Cour suprême d’appel). L’Afrique du Sud a neuf provinces : Le Cap Est, Le Cap Nord, Le Cap Ouest, l’État libre, Gauteng, Kwazulu Natal, Limpopo, Mpumalanga et Nord Ouest. Chaque province a un Parlement élu selon un système de représentation proportionnelle.
Contexte politique
Le 18 décembre 2017, M. Cyril Ramaphosa remplace M. Zuma à la tête de l’ANC, suite aux scandales financiers impliquant le président. Le 14 février 2018, M. Zuma démissionne en tant que président et est remplacé par M. Ramaphosa.[2]Les prochaines élections législatives et présidentielles se tiendront en 2019.
La Constitution de l’Afrique du Sud institue une présidence et un gouvernement central fort. Un Parlement bicaméral est établi, formé d’une Assemblée nationale composée de 400 députés élus et d’un Conseil national des provinces de 90 membres choisis par les partis représentés dans les assemblées provinciales. Chacune des neuf assemblées législatives provinciales choisit en son sein six délégués permanents et quatre délégués spéciaux. Chaque délégation est dirigée par le premier ministre de la province, lequel est également l’un des délégués spéciaux. La Déclaration des droits enchâssée dans la Constitution demeure l’une des plus libérales au monde; elle interdit toute discrimination fondée sur la race, le sexe, l’âge, l’orientation sexuelle, la grossesse et l’état matrimonial. Elle consacre notamment le droit à un logement convenable, à la nourriture, à l’eau, aux soins de santé et à l’éducation ainsi que le droit à la vie (la peine de mort a déjà été abolie).
Les deux chambres du Parlement ont pour responsabilité de rédiger les lois, mais l’Assemblée nationale est chargée en particulier de surveiller les projets de loi concernant les questions financières. Le Conseil national des provinces doit approuver toute loi de compétence à la fois nationale et provinciale. Au moins six des neuf provinces au sein du Conseil national doivent s’entendre sur les projets de modification à la Constitution qui touchent directement les provinces.
La question de la réforme agraire et de la redistribution des terres est à la fois complexe et controversée. Après l’abolition de l’apartheid, des dispositions sur la réforme agraire et la restitution des terres ont été incorporées à la Constitution. Le gouvernement avait prévu de redistribuer 30 % des terres appartenant à l’État avant 2014, mais seulement 4 % l’ont été jusqu’ici.
Sous la pression populaire grandissante, l’ANC a commencé à explorer des solutions plus radicales, y compris l’expropriation des terres sans compensation, adoptant une politique en ce sens en décembre 2017. En février 2018, le Parlement sud-africain a voté une motion autorisant l’expropriation des terres sans compensation. De même, un comité chargé d’étudier l’article 25 de la Constitution et de tenir des audiences publiques sur l’expropriation des terres a été créé. Parallèlement à ces événements, vers la fin de juillet 2018, le président Ramaphosa a annoncé que l’ANC parachèverait un projet de modification de la Constitution, pour y énoncer plus clairement les conditions autorisant l’expropriation des terres sans compensation.
Economie
Au chapitre de l’économie, l’Afrique du Sud est classée par la Banque mondiale comme un pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure. Les ressources naturelles y sont abondantes. En 2017, le produit intérieur brut (PIB) s’élevait à environ 349 milliards de dollars américains, ce qui faisait de ce pays la deuxième économie d’Afrique subsaharienne, derrière le Nigéria, qui a toutefois une population plus de trois fois plus élevée [3]. L’économie repose principalement sur les services (68 % du PIB), le secteur manufacturier (30 %) et l’agriculture (3 %).[4]En 2017, le PIB réel (tenant compte de l’inflation) s’est accru de 1,3 %, après des hausses de 0,6 % en 2016, 1,3 % en 2015 et 1,8 % en 2014. En 2009, lors de la récession mondiale, le pays avait connu une baisse de son PIB réel de 1,5 %. Selon certains prévisionnistes, la croissance du PIB réel devrait augmenter légèrement à 1,7 % en 2018 et 1,8 % en 2019[5].
L’Afrique du Sud est le premier partenaire commercial du Canada en Afrique subsaharienne; en 2017, les exportations canadiennes vers l’Afrique du Sud avait une valeur de 354 millions de dollars et les importations canadiennes en provenance de ce pays valaient 917 millions de dollars, ce qui a produit pour le Canada une balance commerciale négative de 563 millions de dollars. Le Canada y exporte principalement des pièces de machinerie, des hélicoptères et de la viande. Les importations canadiennes en provenance de l’Afrique du Sud comprennent l’or, le palladium, des voitures, des oranges et du vin[6]. En 2017, le Canada a investi 2,6 milliards de dollars en Afrique du Sud[7].
L’investissement direct étranger est en forte hausse en Afrique du Sud, notamment dans les infrastructures. Le Royaume Uni et la Hollande, pour des raisons historiques, demeurent les principaux pays investisseurs, mais la Chine y est aussi présente, tout comme dans l’ensemble du continent africain[8].
Entretiens de la délégation au Cap, en Afrique du Sud
Visite dans le canton de Langa
La visite du canton de Langa dans les Cape Flats et des bureaux du Development Action Group (DAG) a donné aux délégués l’occasion de comprendre les défis de la prestation de services et de la gouvernance, ainsi que les inégalités criantes en Afrique du Sud post-apartheid et de noter la contribution positive de l’initiative canadienne de 2,5 M$ sur quatre ans (le projet Espaces égaux) pour répondre aux besoins des ménages pauvres des zones urbaines, dont un grand nombre sont dirigés par des femmes. Abri international s’efforce d’annuler l’effet de la Group Areas Act (Loi sur les zones réservées), qui reléguait les Sud-Africains noirs dans des cantons éloignés (ce qui a forcé de nombreuses personnes à consacrer 40 % de leur salaire au transport vers le travail ou à confier la garde de leurs enfants à des parents éloignés) en créant des logements abordables et sécuritaires pour les familles des zones urbaines. Parmi les partenaires d’Abri international, mentionnons la National Association of Social Housing Organizations (NASHO) et le DAG.
Entretien avec des représentants de l’AIMS et rencontre avec des étudiants
L’Institut africain des sciences mathématiques (AIMS) est un réseau panafricain de centres d’excellence (six à travers l’Afrique) qui permet aux étudiants africains talentueux de devenir des innovateurs au service de l’autosuffisance scientifique, pédagogique et économique du continent. L’AIMS forme les meilleurs étudiants africains. En 2003, l’AIMS a ouvert ses portes au Cap, en Afrique du Sud, et son siège social se trouve à Kigali, au Rwanda.
Les centres d’excellence de l’AIMS offrent le programme phare de maîtrise structuré d’un an en sciences mathématiques, lequel plonge les étudiants dans un environnement d’apprentissage immersif axé sur la collaboration, la résolution de problèmes et l’autonomie dans les domaines des sciences, des technologies, de l’ingénierie et des mathématiques (STIM) tout en abordant les enjeux socioéconomiques de l’Afrique.
L’initiative industrielle de l’AIMS vise à optimiser les possibilités et le potentiel des sciences mathématiques pour contribuer aux économies africaines par le capital humain, le transfert de connaissances et la recherche appliquée pour l’excellence scientifique et technologique. L’initiative relie les sciences mathématiques aux besoins de l’industrie tandis que l’AIMS s’efforce de combler les lacunes dans les compétences en Afrique grâce à des partenariats stratégiques avec des intervenants qualifiés.
À ce jour, le réseau de l’AIMS est fier de compter 1 682 diplômés originaires de 43 pays, dont 32 % sont des femmes. En Afrique du Sud, l’AIMS continue de contribuer aux activités de recherche régionales et nationales en organisant ou en coorganisant des cours et des ateliers de courte durée dans divers domaines mathématiques.
Le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) met en œuvre la contribution de 44,6 millions de dollars du Canada pour élargir le réseau de l’Institut africain des sciences mathématiques (AIMS).
Entretien avec des experts et des analystes politiques
Ce déjeuner de travail en compagnie de Mme Phephelaphi Dube, directrice, Centre des droits constitutionnels, M. Richard Calland, professeur, Université de Cape Town, M. Ben Cousins, professeur, Université de Western Cape, fondateur de l’Institut d’études sur la pauvreté, les terres et l’agriculture (PLAAS), M. Jolobe Zwelethu, professeur, Université de Cape Town et Mme Crystal Oderson, envoyée en Afrique du Sud pour l’Africa Report, avait pour but de donner à la délégation une idée des priorités de l’Afrique du Sud en matière de politique étrangère et nationale, notamment la réforme agraire, la gouvernance, la fonction publique, l’égalité entre les sexes et les médias. La réforme agraire est un enjeu majeur depuis plusieurs années; puisqu’il est question de terres volées pendant la période coloniale, l’expropriation sans compensation est une solution possible.
Pendant que la délégation était au Parlement, elle a assisté aux travaux d’un comité qui recevait des intervenants en audience. Ce comité tenait des consultations sur les meilleures solutions et il doit faire rapport bientôt. Il a aussi été question des défis que le changement à la présidence a soulevés. Les intervenants ont parlé de l’importance de l’éducation pour l’avenir du pays. Le taux de chômage est élevé, particulièrement pour les personnes de 18 à 35 ans. Cela fait craindre pour la sécurité et l’avenir du pays.
Entretien avec le Groupe de contrôle parlementaire
Le Groupe de contrôle parlementaire (GCP) est un organisme non gouvernemental qui fournit de l’information objective et à jour sur l’ensemble des débats des comités parlementaires sud-africains. En outre, le GCP rend compte de l’état de progression des projets de loi dont est saisi le Parlement sud-africain et fournit des renseignements sur les audiences publiques.
Au cours de leur entretien avec le GCP, les membres de l’Association ont pu mieux comprendre le système parlementaire de l’Afrique du Sud, y compris les travaux menés par ses comités. L’Association a appris que l’Assemblée nationale et le Conseil national des provinces comptent plus de 50 comités.
Les séances du Parlement sont télévisées et le Parlement a une chaîne YouTube. Les services du Groupe de contrôle parlementaire sont nécessaires, car le Parlement ne publie pas de transcription officielle de ses délibérations.
Entretien avec des représentants de l’Institut pour la justice et la réconciliation (IJR)
L’Institut pour la justice et la réconciliation (IJR) est une entité de la société civile fondée il y a 18 ans, à la conclusion de la Commission de vérité et de réconciliation pour assurer la mise en place des recommandations de cette dernière. Par la suite, l’IJR a étendu ses efforts au reste du continent, surtout en Afrique méridionale. L’institut se veut un forum d’échange entre les intervenants et non un organe imposant des mesures contraignantes.
Entretien avec le whip en chef de l’opposition officielle, l’Alliance démocratique, M. John Steenhuisen.
M. Steenhuisen a décrit le fonctionnement et la structure de l’Assemblée nationale : l’ANC, le parti au pouvoir, détient 246 sièges et le parti du Economic Freedom Fighther en détient 25. Il a aussi parlé du système électoral proportionnel de l’Afrique du Sud. M. Steenhuisen a décrit brièvement aux membres de l’Association le système de gouvernement sud-africain, et a abordé la question de la réforme électorale. Il a expliqué que les élections nationales en Afrique du Sud sont fondées sur un scrutin direct de liste avec répartition proportionnelle, ce qui a pour avantage de permettre à de petits partis d’être tout de même représentés au parlement. Cependant, il a ajouté que le système crée une scission entre les électeurs et les élus parce que le les députés à l’Assemblée nationale n’obtiennent pas leur siège pour représenter directement une circonscription. Il a aussi été question du taux de chômage élevé au pays et des difficultés économiques. Les délégués ont aussi échangé sur les défis que son parti pourrait connaître au cours des prochaines élections.
Entretien avec l’honorable Baleka Mbete, présidente de l’Assemblée nationale
Pour cet entretien, la présidente Mbete était accompagnée de M. L. Tsenoli, député, vice-président de l’Assemblée nationale, de Mme A. T. Didiza, députée, présidente des Femmes parlementaires du Commonwealth, région africaine, et de Mme L. Maseko, députée, ancienne présidente de l’APC région africaine. Les délégués ont discuté des changements au sein de l’APC international, comme le changement du statut de l’organisation, ainsi que les changements aux paramètres pour tenir la conférence internationale. Mme Ratansi a mentionné l’intention du Canada de proposer au comité international de tenir la conférence internationale au Canada en janvier 2021, après celle qui sera tenue en Ouganda en septembre 2019. Pour s’assurer que la présidente était au courant de la collaboration entre le Canada et l’Afrique du Sud, Mme Ratansi a loué la contribution de M. Tsenoli et de Mme Didiza lors de la rencontre de planification stratégique des FPC à Wilton Park. La présidente Mbete s’est montrée heureuse de l’apprendre et a indiqué qu’elle se concentrait sur les réunions de l’UIP alors que la présidente du NCOP se concentrait sur celles de l’APC. Elle a aussi souligné la forte présence des femmes à la tête des assemblées législatives des provinces de l’Afrique du Sud.
Entretien avec des représentants du Conseil national des provinces (NCOP)
Lors de cet entretien, les délégués ont rencontré M. A. J. Nyambi, député du Conseil national des provinces et président des Comités, de la surveillance et des relations intergouvernementales. Il était accompagné de Mme M. C. Dikgale, députée du Conseil national des provinces ainsi que de M. L. Tsenoli, député, vice-président de l’Assemblée nationale, et de Mme A. T. Didiza, députée, présidente des Femmes parlementaires du Commonwealth, région africaine. Le NCOP serait l’équivalent du Sénat dans plusieurs législatures et il est l’une des composantes du Parlement sud africain, avec l’Assemblée nationale. Le NCOP comprend 54 membres permanents et 36 membres spéciaux, dont 10 représentants par province. Le Conseil comprend aussi des représentants des gouvernements locaux. Le NCOP se déplace dans les provinces et peut ainsi entendre les préoccupations des provinces. Il est possible de tenir une assemblée conjointe avec l’Assemblée nationale. Les participants ont aussi discuté de l’historique de la réforme agraire.
Autres
La délégation a été officiellement reconnue à l’Assemblée nationale et a assisté à une partie des délibérations du Comité sur la réforme agraire.
Remerciements
En conclusion, la délégation souhaite exprimer sa reconnaissance au personnel dévoué du haut-commissariat du Canada à Pretoria pour la réalisation d’un programme très élaboré et pour le bon déroulement de la visite.
VISITE AU KENYA
Géographie
La République du Kenya (le Kenya) est un pays de l’Afrique de l’Est. Traversé par l’équateur, il a un littoral de 536 kilomètres sur l’océan Indien et bordé par l’Éthiopie au nord, la Somalie à l’est, la Tanzanie au sud, l’Ouganda à l’ouest et le Soudan du Sud au nord ouest. En juillet 2017, la population kényane était estimée à 47,6 millions de personnes. La densité de sa population, d’environ 82 habitants par km2, était au 14e rang en Afrique continentale[9]. La capitale du Kenya est Nairobi, ville la plus peuplée du pays, avec environ 3,9 millions d’habitants en 2015, quoique l’agglomération compte plutôt 8,3 millions d’habitants. La deuxième ville en importance est Mombasa, sur l’océan Indien, près de la frontière de la Tanzanie, avec une population d’environ 1,2 million d’habitants.
Le pays est composé de 47 comtés. Il compte sept groupes tribaux : les Kikuyus (22 %), suivis des Luhyas (14 %), des Luos (13 %), des Kalenjins (12 %), des Kambas (11 %), des Kisiis (6 %) et des Merus (6 %); 16 % de la population est étrangère (15 % d’Afrique et 1 % d’autres continents). L’anglais et le swahili sont les deux langues officielles, mais 22 % et 13 % de la population, respectivement, ont le kikuyu et le luo comme langue maternelle. Selon des estimations de 2009, 48 % de la population kényane était protestante, 23 % était catholique, 12 % était d’une autre confession chrétienne et 11 % était musulmane. La population musulmane est plus élevée sur la côte et dans le nord est du pays, où la population est principalement d’origine somalienne.
En 2017, on estimait que 40 % de la population avait moins de 15 ans, l’âge médian se situant à 19,7 ans. À titre de comparaison, au Canada dans la même année, 16 % de la population avait moins de 25 ans, et l’âge médian se situait à 40,6 ans[10].
Contexte politique
Lors des élections présidentielles du 8 août 2017, le président Kenyatta (du Jubilee Party) a obtenu la majorité (54 %) des 16 millions de votes. Cependant, ces résultats électoraux ont été annulés par la Cour suprême du Kenya en raison de procédures électorales inappropriées et de problèmes liés au décompte électronique des votes. Il y a eu reprise des élections le 26 octobre 2017, malgré le retrait du principal candidat de l’opposition, Raila Odinga (de la National Super Alliance – NASA) le 10 octobre 2017 en raison d’un processus qu’il jugeait illégitime. Le 30 octobre 2017, l’Independent Electoral and Boundaries Commission (IEBC) du Kenya a déclaré président élu le président sortant Kenyatta, qui a obtenu 98 % des 7,4 millions de votes (soit 38 % des électeurs inscrits).
En novembre 2017, la Cour suprême du Kenya a livré un verdict unanime validant les résultats de la reprise des élections d’octobre 2017. Le leader de l’opposition a initialement refusé de reconnaître Kenyatta comme chef du gouvernement, allant jusqu’à tenir une cérémonie symbolique, s’investissant « président du peuple » en janvier 2018. Odinga a par la suite participé à un discours surprise avec le président Kenyatta le 9 mars 2018. Leur poignée de main symbolique a propulsé un nouveau consensus politique et une approche inclusive et collaborative pour un dialogue large sous l’initiative Building Bridges’, qui en, date d’août 2018, a peu avancé.
Le Kenya est une république présidentielle et est membre du Commonwealth depuis son indépendance, en 1963. Le pouvoir exécutif est détenu par le président, qui est élu au suffrage universel par majorité simple pour un mandat de cinq ans, renouvelable une fois. Depuis mars 2013, moment où le poste de premier ministre a été aboli, le président assume le rôle de chef d’État et de chef du gouvernement.
Le pouvoir législatif est entre les mains d’un parlement bicaméral. Le Sénat compte 67 sièges, dont 47 sont élus directement (un sénateur par comté), 16 sont réservés à des femmes, deux aux jeunes et deux aux personnes handicapées. Les sénateurs sont nommés par chaque parti, selon la part de sièges remportés aux élections. Les sénateurs ont un mandat de cinq ans. À l’issue des élections du 8 août 2017, le JP détenait 24 sièges, la NASA 28, 14 sénateurs provenaient d’autres partis et un autre a obtenu un mandat à titre d’indépendant. Le Sénat comptait 21 femmes[11].
L’Assemblée nationale compte 349 députés, dont 290 sont élus directement par circonscription, 47 femmes élues dans chaque comté, et 12 députés sont nommés par l’Assemblée nationale, soit six représentant les jeunes et six représentant les personnes handicapées. Les députés sont choisis par leur parti, selon la part de sièges obtenus par chaque parti[12]aux élections. Les députés ont un mandat d’une durée de cinq ans. À la conclusion des élections du 8 août 2017, qui, contrairement aux élections présidentielles, n’ont pas été annulées, le JP détenait 140 sièges, la NASA, 62, et 118 étaient détenus par d’autres partis. L’Assemblée nationale comptait 76 femmes[13].
Économie et indice de développement humain
En 2016, 35,0 % du PIB provenait du secteur agricole, 17,6 % de l’industrie et 47,7 % des services. Le nombre de touristes a crû de 17 % et les revenus provenant du tourisme, de 37 %.
En 2017, les exportations de biens et de services du Kenya avaient une valeur de 909 millions de dollars américains, alors que les importations totalisaient 2,0 milliards de dollars américains, pour un déficit commercial de 1,1 milliard de dollars américains. En 2014, les principaux biens exportés étaient le thé (1,1 milliard de dollars américains), les arbres, plantes et fleurs (622 millions) et les produits du pétrole raffiné (606 millions). Les principaux pays vers lesquels ces biens étaient exportés étaient l’Ouganda (11,2 % du total), la Tanzanie (8,0 %) et les Pays Bas (7,6 %).
Les principaux biens importés étaient les produits du pétrole raffiné (3,8 milliards de dollars américains), la machinerie et l’équipement (3,2 milliards) et les véhicules et matériel de transport (3,0 milliards). Les principaux pays desquels ces biens étaient importés étaient l’Inde (16,3 % du total), la Chine (15,3 %) et les États Unis (10,4 %).
Le taux de chômage était estimé à 40 % en 2013, ce qui est très élevé. Il est possible qu’une grande part de l’emploi se retrouve dans l’économie souterraine. Néanmoins, en 2012, on estimait que 43 % de la population avait un revenu sous le seuil de pauvreté.
En 2015, le Kenya se classait au 146e rang mondial de l’Indice de développement humain de l’ONU sur 188 pays et était donc considéré comme ayant un développement humain moyen, mais tout juste au dessus du 148e rang, qui lui aurait conféré le statut de pays à développement faible[14]
Le taux de mortalité maternelle (morts maternelles par 100 000 naissances vivantes) est passé de 687 en 1990 à 510 en 2015, une légère amélioration qui place le Kenya au milieu de ses voisins, à savoir l’Ouganda (343), l’Éthiopie (353), la Tanzanie (398), la Somalie (732) et le Soudan du Sud (789)[15].
Le 30 juin 2018, le Kenya comptait relativement peu de soldats et de policiers (et quelques civils) déployés dans huit missions de maintien de la paix de l’ONU, soit 196, ce qui le plaçait au 57e rang des pays contributeurs. Les deux principales missions où ils étaient déployés étaient UNAMID (mission conjointe de l’ONU et de l’Union africaine au Darfour – 120 personnes) et UNMISS (mission de l’ONU au Soudan du Sud – 41 personnes)[16]
Le Kenya est considéré comme étant partiellement libre par la Freedom House; l’accès à Internet est jugé libre, mais la presse est considérée comme étant partiellement libre[17]. Le 14 août 2017, le gouvernement kényan a annulé l’inscription de la Commission kényane des droits de la personne en tant qu’organisation non gouvernementale, une situation qui l’empêche de remplir son mandat. Cette décision a fait suite aux élections du 8 août 2017, après lesquelles la Commission a émis des doutes quant à l’écart entre les résultats provisoires et les résultats finaux et formulé des critiques concernant la réaction des forces de sécurité aux manifestations qui ont suivi les élections [18].
Entretiens de la délégation à Nairobi, au Kenya
Entretien avec des groupes environnementaux à la résidence de la haute commissaire
La première soirée de sa visite, la délégation a été reçue par la haute-commissaire canadienne, Sara Hradecky. Elle avait invité des groupes de la société civile ainsi que des représentants politiques s’intéressant aux questions environnementales. Les délégués ont ainsi pris connaissance des difficultés que vit la population agricole et rurale, notamment dans la Vallée du Rift. De même, au sujet de la migration de la population rurale vers des villes comme Nairobi, les délégués ont pu échanger des idées sur les différences entre expérience rurale et urbaine. Comme ce sont surtout les femmes du milieu rural qui sont touchées par les changements climatiques, les délégués ont parlé de la politique d’aide internationale féministe du Canada et de la façon dont elle pourrait appuyer ces femmes. Les délégués ont aussi appris l’existence d’un programme environnemental national qui aide les pays africains à atténuer les effets des changements climatiques.
Entretien avec l’honorable Justin B.N. Muturi, président de l’Assemblée nationale, président de la section kényane de l’APC, et président de la région africaine de l’APC
Le président Muturi est le nouveau président de la région africaine de l’APC et siège au comité d’experts de l’APC avec la députée Alexandra Mendès, la représentante canadienne au comité exécutif. Les délégués ont discuté avec le président Muturi de la Sustainable Blue Economy Conference, qui était parrainée conjointement par le Canada et le Kenya à Nairobi en novembre 2018. La conférence explore les thèmes suivants : la croissance des économies maritimes des pays en développement et la répartition des bénéfices de celles-ci, la surexploitation des ressources maritimes, la sécurité maritime, ainsi que les effets des changements climatiques sur les océans, tels que l’acidification. Le Canada consacre 2 millions de dollars américains à la conférence à titre d’hôte conjoint, entre autres pour faciliter la participation d’autres pays en développement, des petits États insulaires en développement, ainsi que des femmes.
Le président Muturi a rapidement abordé les changements au règlement que l’Assemblée nationale du Kenya devra apporter pour progresser. Comme le président Muturi devait partir, les délégués ont poursuivi leurs discussions sur l’autonomisation des femmes, l’éducation, l’environnement et les questions économiques avec M. Njagena, député, et Mme Stienei, députée.
Entretien avec l’honorable Kenneth M. Lusaka, Président du Sénat
Le Président était accompagné de plusieurs sénateurs pour cette rencontre. Le Président a mentionné le besoin de renforcement des capacités parce que les nouveaux sénateurs ont besoin de formation. Plus de 70 % d’entre eux n’obtiennent pas de nouveau mandat aux élections. La haute-commissaire du Canada a rappelé qu’une grande collaboration existe déjà entre le Kenya et le Canada. Les intervenants ont discuté de l’expérience et de la transition qu’implique le passage d’un régime parlementaire de Westminster à un régime présidentiel, y compris en ce qui a trait au rôle du Sénat.
Réunion avec le Comité de la défense et des affaires étrangères de l’Assemblée nationale
Le président du Comité, l’honorable Katoo Ole Metito, député, accompagné de plusieurs membres du Comité, a rencontré la délégation. Des membres du Comité ont voyagé au Canada en juin 2018 et ils ont rencontré des membres de l’Association. Le Comité vient de déposer le rapport de cette visite. Les membres du Comité ont mentionné être satisfaits du réengagement du Canada en Afrique et ont rappelé que le Kenya souhaitait obtenir le statut d’observateur au Conseil de sécurité de l’ONU et qu’ils appuyaient la candidature du Canada en vue d’obtenir un siège au Conseil de sécurité de l’ONU en 2021. Le président a discuté de l’engagement du Kenya en Somalie, de la question de la radicalisation de même que des problèmes à la frontière entre le Kenya et la Somalie. La participation des jeunes et l’autonomisation économique ont aussi fait l’objet de discussions.
Réunion avec le Réseau Aga Khan de développement (AKDN) et visite de l’hôpital universitaire
Les délégués ont eu l’occasion de rencontrer plusieurs représentants de l’AKDN au Kenya lors d’une séance d’information sur les institutions et les programmes offerts. Présent au Kenya depuis plus de 100 ans, l’AKDN est composé de 11 organismes de développement socioéconomique au Kenya et de 175 initiatives et programmes individuels, qui emploient plus de 16 000 personnes à temps plein au Kenya, dont plus de 99 % sont kényanes. Chaque année, l’AKDN touche environ 7 millions de Kényans directement, et des millions d’autres indirectement, sans égard, entre autres, au sexe, à la race, à l’origine ethnique et à la religion.
La délégation a assisté aux présentations des groupes suivants : la Fondation Aga Khan Afrique de l’Est (AKF EA), le Fonds Aga Khan pour le développement économique (AKFED) et l’Université Aga Khan (AKU). Elle a aussi visité l’Hôpital universitaire Aga Khan de Nairobi (AKUHN). L’AKUHN est un hôpital d’enseignement de classe mondiale axé sur la recherche et les soins tertiaires (Université Aga Khan) et qui est doté d’un centre de soins intégraux en oncologie et en cardiologie. L’AKUHN gère également un réseau de 43 centres médicaux et de diagnostic à travers le Kenya. L’hôpital compte 280 lits et offre une gamme complète de services dans toutes les disciplines. Il dispose d’une technologie de pointe pour le diagnostic et la prise en charge de maladies complexes. On prévoit agrandir progressivement l’hôpital pour atteindre 600 lits.
Visite du projet d’enseignement Ujama
L’Ujamaa soutient les garçons et les filles et mobilise d’autres parties prenantes essentielles pour améliorer les normes sociales concernant la violence à l’égard des femmes afin d’instaurer une société plus stable. L’objectif principal de cette intervention est d’opérer un changement générationnel à l’échelle de la communauté : transformer les normes de genre et réduire la violence contre les femmes et les filles. Des recherches antérieures ont démontré que le programme Empowered Transformation Training (ETT) contribue également à réduire les problèmes sociaux et de santé publique connexes, notamment le décrochage scolaire lié à la grossesse, le mariage précoce et la radicalisation des jeunes. L’ETT atteint ces objectifs parce qu’il donne directement aux filles, aux garçons, aux femmes et aux hommes les moyens nécessaires pour résister efficacement s’ils se trouvent en situation d’agression sexuelle potentielle. Les délégués ont assisté à une démonstration des techniques enseignées aux jeunes pour se défendre en cas d’agression. Par la suite, ils ont visité et rencontré des étudiants dans une école où les techniques sont enseignées.
Autres
La délégation a visité une école faisant partie du projet d’enseignement Ujamaa. Sur place, les délégués ont assisté à des cours portant sur l’autonomisation et l’autodéfense. Ils ont fait don de plus de 200 paquets de produits d’hygiène féminine aux jeunes femmes.
Enfin, à l’occasion d’un déjeuner, les délégués ont rencontré plusieurs représentants de la société civile pour discuter des questions des droits de la personne. Le samedi 8 septembre, la délégation s’est rendue au cimetière de guerre de Nairobi, un cimetière sous la responsabilité de la Commission des sépultures de guerre du Commonwealth. Quatre Canadiens ont été inhumés dans ce cimetière et la délégation y a déposé une couronne au nom de la Section canadienne de l’Association parlementaire du Commonwealth.
Remerciements
La délégation tient à remercier la haute-commissaire du Canada au Kenya, Sara Hradecky, d’avoir offert et organisé un dîner pour discuter de l’atténuation des changements climatiques et des occasions dans le contexte africain que présentent le Programme des Nations Unies pour l’environnement, le Programme des Nations Unies pour le développement et les autres partenaires travaillant sur les questions environnementales au Kenya.
Conclusion
La délégation souhaite exprimer sa reconnaissance au haut-commissaire et au personnel dévoué du Haut-Commissariat du Canada à Nairobi pour la réalisation d’un programme très élaboré et pour le bon déroulement de la visite. En plus du personnel des Hauts-Commissariats du Canada en Afrique du Sud et au Kenya, les délégués tiennent à remercier les représentants d’Affaires mondiales Canada et de la Bibliothèque du Parlement qui ont participé à la préparation des documents d’information nécessaires.
Respectueusement soumis,
Yasmin Ratansi, députée
Présidente de la Section canadienne de
l’Association parlementaire du Commonwealth (APC)