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Association parlementaire canadienne de l'OTAN

Rapport

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN a l’honneur de présenter son rapport concernant sa participation au Séminaire du Groupe Spécial Méditerranée et Moyen-Orient, à la Réunion conjointe du Conseil interparlementaire Ukraine-OTAN, de la Sous-commission sur les partenariats de l’OTAN et de la Sous-commission sur la gouvernance démocratique et à la Visite de la Sous-commission sur la coopération transatlantique en matière de défense et de sécurité.

Les trois visites ont été réunies dans ce même rapport, car elles ont eu lieu successivement.

RAPPORT DE LA VISITE DU GROUPE SPÉCIAL MÉDITERRANÉE ET MOYEN-ORIENT LA MADDALENA, ITALIE, DU 4 AU 5 JUILLET 2011

À la Maddalena, le Canada a été représenté par la Sénatrice Raynell Andreychuk, le Sénateur Joseph A. Day, M. Darryl Kramp, député et M. Stephen Woodworth, député.

Les 4 et 5 juillet, les membres du Groupe spécial Méditerranée et Moyen-Orient (GSM) – présidé par Vahit Erdem (Turquie) – et de la Sous-commission sur la coopération transatlantique en matière de défense et de sécurité – présidée par Sir John Stanley (Royaume-Uni) – de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN se sont réunis à La Maddalena, en Italie, pour un séminaire consacré à l’étude de la situation dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MOAN), situation en mutation rapide. La délégation de l’Italie auprès de l’Assemblée, dirigée par Sergio de Gregorio, organisait et accueillait ce séminaire pour le compte du GSM. Les participants ont passé en revue les récents événements sur le double plan national et régional. Parmi les orateurs qui ont pris la parole devant une bonne cinquantaine de parlementaires figuraient de hauts responsables italiens, égyptiens et iraquiens, ainsi que d’éminents spécialistes de la dynamique propre à cette partie du monde. Un haut commandant de l’OTAN a, par ailleurs, présenté un exposé sur l’opération que mène actuellement l’OTAN en Libye. A l’initiative du pays hôte, un haut responsable iranien est également intervenu.

L’allocution d’ouverture a été prononcée par Giuseppe Cossiga, secrétaire d’État au ministère de la Défense, qui a fait observer que l’intérêt de l’Italie pour le Proche-Orient et la Méditerranée trouvait son origine dans les rapports de longue date qui existaient entre ce pays et la région. Le rôle clé joué par la jeune génération arabe est un aspect unificateur primordial du Printemps arabe. L’Ouest entretient certaines idées fausses sur la place de la religion dans la vie politique et culturelle régionale. L’Italie est particulièrement sensible aux changements en Libye et, de l’avis de l’intervenant, l’opération Protecteur unifié est un jalon important pour l’Alliance. Cependant, la crise libyenne ne peut être apaisée, en dernier ressort, que par des moyens politiques, non militaires. Quant à la situation en Syrie, elle pourrait être plus lourde de conséquences encore qu’en Libye.

Les grandes orientations du séminaire ont été données par Mohammed Moustafa Kamal, ministre adjoint des Affaires étrangères de la République arabe d’Égypte et chargé des questions parlementaires ; celui-ci a indiqué que sa présence au séminaire montrait que son pays aspirait à une solide coopération avec l’Assemblée parlementaire de l’OTAN. Pratiquement personne n’avait prévu que le paysage politique égyptien connaîtrait des bouleversements aussi profonds et aussi rapides aux mois de janvier et de février 2011. Des changements politiques et constitutionnels nombreux et variés sont en cours. Le Conseil suprême jouera un rôle crucial dans la transition, mais il devra aussi remettre le pouvoir au chef de l’État et au Parlement après les élections présidentielles et législatives. Des politiques sociales et économiques conçues pour faire reculer le chômage, attirer les investissements étrangers et dynamiser les petites entreprises seront essentielles pour une démocratisation en douceur. En outre, une solution juste et durable doit être apportée au problème palestinien pour instaurer la stabilité et la paix dans la région.

Une déclaration constitutionnelle sera rédigée par une commission parlementaire de 100 membres. Elle reposera sur le principe de la citoyenneté égyptienne et ne définira pas de communautés minoritaires ou majoritaires. La prochaine Constitution sera sous-tendue par la charia, mais il n’y a rien de nouveau à cela. Aux élections, les Frères musulmans pourraient bénéficier d’un avantage puisqu’ils existent depuis quelque 60 ans. Selon les estimations actuelles, ils récolteront de 25 à 30 % des voix. Le nouvel État respectera les traités conclus avec Israël, mais la population voudra certainement des progrès tangibles dans le processus de paix.

La délégation de l’Italie a invité Ali Ahani, vice-ministre des Affaires étrangères de la République islamique d’Iran et chargé de l’Europe et de l’Amérique, à prendre la parole au séminaire. Cette invitation a immédiatement suscité un débat entre parlementaires. La délégation d’Israël a fait remarquer que le président iranien avait appelé à « effacer Israël de la carte » et a choisi de quitter la salle pour la durée de l’exposé. Plusieurs parlementaires, y compris la Sénatrice Raynell Andreychuk et M. Stephen Woodworth, député de la délégation canadienne, ont alors émis des objections quant à la présence d’un haut responsable iranien. M. de Gregorio a expliqué que l’invitation avait pour but de donner aux participants l’occasion d’avoir un franc échange de vues avec un responsable iranien, de manière à favoriser la compréhension mutuelle entre les parties, et qu’elle ne représentait en aucune façon une approbation de la vision du monde selon Téhéran. Ce serait la première fois qu’un responsable iranien prendrait la parole devant l’Assemblée. Le Secrétaire général de l’AP-OTAN, David Hobbs, est intervenu ensuite pour dire que les dirigeants iraniens avaient tenu des propos répréhensibles et inacceptables et que l’Iran avait fait l’objet d’une série de sanctions en raison de sa politique nucléaire, mais qu’il n’existait aucune règle interdisant expressément de discuter avec un responsable iranien. Le règlement de l’Assemblée dispose que le président de la commission et le pays hôte peut prendre des décisions politiques au sujet de questions controversées de cette nature, et toutes les procédures ont été respectées.

M. Ahani a ensuite été invité à s’exprimer. Il a exposé le point de vue de ses autorités sur les récents événements survenus dans la région. Il a insisté sur trois questions : la place de l’Iran dans cette partie du monde, l’opinion de Téhéran sur les soulèvements, et enfin, les perspectives qui s’offrent au Proche-Orient nouveau. Il a rappelé que l’Iran avait une histoire millénaire. Sa culture est ancienne et son peuple s’est doté d’un régime constitutionnel il y a plus d’un siècle. L’Iran symbolise la paix dans la région et contribue ou a contribué au règlement de plusieurs crises, dont les conflits dans les Balkans, en Iraq, au Koweït et en Afghanistan. Il joue un rôle de premier plan dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, la prise en charge des réfugiés et le contre-terrorisme, et il tente de créer une région exempte de l’arme nucléaire. Les soulèvements favorables à la démocratie dont la Tunisie, l’Égypte et d’autres pays ont été le théâtre adressent au monde un message important. On ne saurait nier que certains régimes se sont tenus aux côtés de dictateurs régionaux qui faisaient fi de l’opinion de leurs peuples. L’intervenant a évoqué les forces qui s’employaient à faire barrage à la démocratie pour servir exclusivement leurs propres intérêts.

L’intervenant a déclaré que l’heure était venue de changer sa façon d’envisager les autres et d’œuvrer à l’avènement d’un monde stable, caractérisé par une véritable compréhension des diverses cultures, par le respect mutuel, par le dialogue et par la loyauté. La question palestinienne pourrit depuis des décennies parce que l’Ouest bafoue les principes fondamentaux des droits de l’homme. La Libye est riche en pétrole et se trouve dans une région d’une grande importance géopolitique : voilà qui explique l’engagement des États-Unis et d’autres pays là-bas. L’« interprétation opportuniste de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU » par l’OTAN a ouvert la voie à une opération militaire massive menée sous prétexte de sauver des civils. Or cette opération n’a fait qu’engendrer des dégâts et des souffrances supplémentaires. La Libye est un deuxième Afghanistan en devenir pour l’OTAN. M. Ahani a aussi appelé l’attention sur l’application implicite du principe des deux poids et des deux mesures au Bahreïn, où les droits de la majorité chiite sont ignorés. L’intervention saoudienne n’aurait pu se faire sans l’approbation des États-Unis. M. Ahani a lancé un avertissement : une intervention étrangère en Syrie compromettra la sécurité et la stabilité et déclenchera la montée du radicalisme et du terrorisme. L’Iran a joué un rôle précurseur et constructif en Afghanistan et en Iraq, en même temps qu’il a introduit un modèle de démocratie nouveau et efficace pour les sociétés religieuses. Il offre des solutions à la région, mais les puissances interventionnistes le dépeignent comme une menace.

Au cours du débat qui a suivi, M. Ahani a souligné que les médias occidentaux donnaient souvent de son pays une image déformée. Il a soutenu que la démocratie prospérait en Iran et que « la volonté des électeurs [était] respectée ». Les autorités iraniennes ne travaillent pas à la fabrication d’armes nucléaires et respectent toutes les obligations que lui impose le Traité de non-prolifération. M. Ahani a ajouté que l’ensemble des installations nucléaires iraniennes étaient surveillées et soumises à de multiples inspections inopinées. Par ailleurs, le programme de missiles balistiques de l’Iran a pour objectif la conception d’engins d’une portée n’excédant pas 2 000 km. Des parlementaires ont contesté ces deux affirmations.

M. Ahani a déclaré que Téhéran soutenait les autorités de l’Iraq et respectait l’intégrité territoriale de ce pays. Il a affirmé par ailleurs que les droits de l’homme étaient respectés chez lui mais que l’Ouest avait tendance à user de critères occidentaux pour porter un jugement sur l’Iran à cet égard. Il s’est référé notamment à la question des droits de la femme. Cette remarque a amené un participant à dire que les droits de l’homme étaient de nature universelle, et non nationale, contrairement à ce que l’intervenant donnait à entendre. M. Ahani a rappelé que son pays avait accueilli trois millions de réfugiés afghans auxquels il prodiguait toute une gamme de services sociaux. L’Iran et l’Afghanistan sont étroitement liés ; aussi les autorités iraniennes ne peuvent-elles « demeurer les bras croisés » à un moment où leur voisin est confronté à d’aussi nombreux problèmes. L’intervenant a lancé un appel à la prudence à propos de la Syrie : toute ingérence internationale dans ce pays compromettrait la stabilité et la paix. Il a nié que M. Ahmadinedjad ait jamais demandé à ce qu’Israël soit effacé de la carte ou qu’il ait mis en doute la réalité de l’Holocauste. Il a ensuite reproché à Israël de n’avoir pas rétabli les droits fondamentaux des Palestiniens.

Antonello Cabras (Italie) a présenté son projet de rapport, intitulé Incidences des soulèvements dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. La vague de manifestations que connaît cette région a montré qu’une mobilisation politique massive pouvait effectivement déclencher de profonds changements politiques dans des sociétés longtemps figées par l’autoritarisme. Elle a aussi prouvé qu’il n’y avait pas d’« exception arabe » lorsqu’on en venait aux aspirations à la démocratie, au respect des droits de l’homme et à l’exploitation des possibilités économiques. Les soulèvements ont souligné les points communs aux pays de la région en même temps que leur hétérogénéité. Face à l’exclusion politique, économique et sociale, une frustration populaire grandissante est apparue dans toute la région. Les soulèvements sont, en partie, la conséquence de l’explosion démographique de la jeunesse et d’une marginalisation économique croissante de celle-ci.

L’Ouest a eu du mal à élaborer une réponse calibrée à ces événements et, de fait, les gouvernements occidentaux n’ont pas fait montre d’une cohérence à toute épreuve dans leur attitude. Ils ont exprimé leur soutien aux mouvements d’opposition démocratiques, mais à des degrés divers. En Libye, l’OTAN a fini par jouer un rôle de premier plan et participe pleinement à l’application des résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui portent sur l’aménagement d’une zone d’exclusion aérienne, le respect d’un embargo sur les livraisons d’armements et la protection des populations civiles. En revanche, elle s’est montrée beaucoup plus réticente à manifester son soutien aux opposants en Syrie et à Bahreïn, et ce pour diverses raisons. Ainsi, Bahreïn accueille la 5e Flotte de la Marine des États-Unis et est largement réputé – une réputation qu’il entretient d’ailleurs – pour être un rempart contre la présence iranienne dans le Golfe. Étant donné sa situation géographique, sa puissance militaire et ses liens régionaux, la Syrie revêt, elle aussi, une importance stratégique considérable. Bien qu’elle apparût généralement à l’Ouest comme un adversaire, elle était potentiellement utile aux décideurs occidentaux. Cette notion a désormais disparu. La crise syrienne risque maintenant de déborder dans les pays voisins, tels le Liban, la Turquie et l’Iran ; elle pourrait aussi avoir des répercussions sur la politique intérieure palestinienne et sur la dynamique du processus de paix israélo-arabe. Le régime iranien a voulu faire cause commune avec les protestataires à l’étranger, mais cela n’est guère crédible, compte tenu du traitement extrêmement violent qu’il réserve aux Iraniens qui ont exigé plus d’ouverture dans une société répressive.

D’autre part, il est encore bien trop tôt pour dire si l’une ou l’autre de ces rébellions populaires débouchera réellement sur l’installation de régimes démocratiques et sur un regain de stabilité régionale. Sans doute l’enseignement le plus important à en tirer a-t-il trait à la fragilité et à la vulnérabilité que peuvent afficher les régimes non démocratiques, surtout lorsqu’ils ne satisfont pas aux besoins élémentaires des citoyens. Faute d’exutoires propices à l’expression du mécontentement, des explosions politiques se produiront inévitablement.

Les effets du « Printemps arabe » se font ressentir aussi en Europe. On assiste à une crise des réfugiés, qui alarme les autorités italiennes, alors que des milliers de personnes ont débarqué sur l’île de Lampedusa en quête d’un abri. L’Italie soutient qu’elle n’est pas seule concernée par un problème qui, selon elle, a une dimension européenne et même internationale. La Turquie est également menacée par une crise des réfugiés à la frontière qu’elle partage avec la Syrie. L’Europe, comme l’Amérique du Nord, doit donc redéfinir ses relations avec cette région, mais elle ne sait pas exactement comment influer sur les résultats. L’Europe a été dépassée par la rapidité des événements et n’a pas été capable de réagir rapidement. En fin de compte, de nouveaux systèmes politiques devront être mis en place, alors même que les économies nationales sont soumises à de graves tensions. Le processus de transition sera conditionné par de multiples facteurs, dont la structure de sécurité prééminente, l’incertitude qui règne autour de la nature de diverses forces d’opposition, le pouvoir résiduel détenu par d’anciennes élites qui ne sont pas toujours adeptes de la démocratie, et les risques non négligeables d’une radicalisation, au cas où ces gouvernements se révéleraient incompétents ou céderaient à la tentation de l’autoritarisme.

L’Ouest doit aussi savoir que ses prises de position peuvent se retourner contre lui. Il convient certes d’aider la région, mais ce sont les forces intérieures qui doivent être à la pointe de la redéfinition des systèmes politiques et économiques. Enfin, M. Cabras a estimé que l’Assemblée pouvait aider la région, en particulier après les élections législatives.

Au cours du débat qui a suivi, des participants ont fait observer que l’Assemblée devrait se concentrer sur les secteurs dans lesquels elle pouvait faire la différence, comme celui de la réforme de la sécurité ; les parlementaires conviennent toutefois qu’elle doit inscrire la région MOAN au nombre de ses priorités. Les gouvernements devront également cibler leur assistance extérieure, mais ils doivent être très précis sur les objectifs visés. Le rapporteur a été invité, par ailleurs, à étoffer le chapitre consacré à la Libye, à insister sur le caractère universel de la démocratie et à se pencher, d’une part, sur l’échec du soulèvement en Iran et, d’autre part, sur le paradoxe que représente la combinaison du soutien occidental aux rebelles libyens et de l’absence de soutien occidental aux rebelles syriens.

La secrétaire d’État aux Affaires étrangères de la République italienne, Stefania Craxi, a déclaré que les acteurs des soulèvements de la région MOAN ne cherchaient pas à rejeter sur des boucs émissaires extérieurs les problèmes auxquels ils sont confrontés ; bien plutôt, ils s’attaquent à la véritable racine de ces problèmes. Il est trop tôt pour appréhender pleinement les raisons des soulèvements et les conséquences de ceux-ci. L’un des éléments déclencheurs réside sans doute dans les inégalités économiques, mais la véritable motivation des peuples d’Égypte et de Tunisie a été la nécessité d’une amélioration spectaculaire de la gouvernance. Les révolutionnaires sont jeunes et ont utilisé l’Internet pour échapper à la censure et à la répression. Le risque existe que l’actuelle période de transition soit mise à profit par des groupes religieux mieux organisés. La communauté internationale doit donc s’écarter de sa politique habituelle à l’égard de la région, appeler l’attention du monde sur cette dernière et l’aider à consolider la position des réformateurs démocratiques. L’Europe ne peut se permettre de voir se résorber la dynamique des mouvements populaires et elle est idéalement placée pour apporter son soutien au dialogue démocratique. De plus, la création d’emplois dans la région est indispensable. L’Italie a proposé la création d’une banque de développement pour la région euro-méditerranéenne, banque qui viendrait en aide aux petites et moyennes entreprises. L’Union pour la Méditerranée est au point mort, conséquence des graves difficultés auxquelles se heurte le processus de paix au Moyen-Orient ; ses principes fondateurs, de même que l’accent pratique qu’elle met sur l’infrastructure, l’énergie et les transports, n’en demeurent pas moins importants.

Tarik Yousef a dit se souvenir d’avoir assisté à une réunion du GSM à Naples, il y a deux ans de cela, à une époque où la grande majorité des participants se montraient extraordinairement pessimistes à propos de l’avenir du monde arabe. Manifestement, les perspectives sur le sujet ont considérablement changé, ce qui est assurément une bonne nouvelle. Nombreux sont ceux qui avaient simplement accepté l’idée que les anciens gouvernements étaient des garants de la stabilité et qu’ils resteraient en place pendant très longtemps. Nombreux aussi étaient ceux qui pensaient que la machine répressive était tout bonnement trop puissante. Lorsque le « Printemps arabe » est arrivé, on s’attendait qu’il prenne fin en avril ou en mai, et pourtant, il est toujours là. Il est important aussi d’observer que les manifestants réclament une bonne gouvernance, la justice sociale et des possibilités d’épanouissement économique. Ce sont là des valeurs auxquelles l’Europe souscrit sans réserve. Ces révolutions ont été conduites, dans l’ensemble, par des membres de la classe supérieure, diplômés et vivant en milieu urbain, qui veulent procéder eux-mêmes aux changements, plutôt que se borner à émettre des souhaits. Les médias sociaux ont joué un rôle clé en Libye et ailleurs.

Ainsi, les idées qui forgeront l’avenir entraînent déjà des changements positifs. Il existe maintenant des critères bien définis de ce qui est acceptable et défendable. Ce que la population attend du gouvernement devient plus clair. A court terme, de sérieuses difficultés économiques ne devraient pas surgir en Égypte ou en Tunisie et les gouvernements des deux pays recueilleront l’appui du monde extérieur. A plus long terme, l’économie politique posera un problème capital. Si la communauté internationale veut prêter son concours, elle doit cependant le faire dans le respect des intérêts souverains des sociétés concernées. Dans deux ans, les pays du monde arabe seront très différents, politiquement parlant, et le système des alliances aura changé aussi. Il y a quelques années de cela, beaucoup pensaient que la région se transformerait en un second Doubaï : des gratte-ciel et pas de liberté. Aujourd’hui, elle se divise entre les pays du Golfe et les nouvelles Républiques révolutionnaires. Les relations entre le monde arabe et le monde extérieur vont évoluer et un arrangement régional plus large sera enfin envisageable pour la Méditerranée. Il y a de la place maintenant pour de nouvelles dynamiques, de nouvelles idées, des échanges approfondis. Au cours du débat qui a suivi, M. Yousef a prévenu que de nombreux défis se poseraient dans la région et qu’ils seraient plus graves en Libye, au Yémen et en Syrie qu’en Égypte ou en Tunisie.

Maha Azzam a parlé de la transition vers la démocratie et des rapports entre la religion et l’État en Égypte. Les protestations sont intervenues après des décennies de dictature et d’oppression. Des réunions comme ce séminaire du GSM tendent à privilégier les intérêts économiques et stratégiques au détriment des droits de l’homme. Il y a maintenant des raisons de se montrer optimiste, mais il reste beaucoup à faire. Le sort de la Syrie et de Bahreïn est incertain. L’Égypte et la Tunisie sont dans une position plus forte, mais elles doivent répondre à des questions pressantes. Les militaires égyptiens sont censés vouloir quitter la scène politique, mais ils représentent une formidable puissance avec laquelle il faut compter. A certains égards, on peut établir un parallèle entre les forces armées égyptiennes et turques, ou, du moins, les forces armées turques telles qu’on a pu les connaître dans le passé. Jusqu’ici, les militaires égyptiens tiennent des propos encourageants, mais leurs intérêts économiques sont bien établis et une résistance au changement pourrait se manifester. Le chômage et les problèmes intrinsèques à ce que l’on appelle « l’explosion démographique de la jeunesse » doivent, eux aussi, être résolus, et ils ne le seront pas par des investissements à court terme. Par ailleurs, le système de santé et la sécurité sociale égyptiens se sont désintégrés et le système éducatif est à la dérive.

Associer justice et islam ne pose pas de problème à la majorité des révolutionnaires, qui veulent la mise en place d’un système de freins et de contrepoids et qui demandent que leurs dirigeants soient tenus de rendre des comptes. La religion reste à l’avant-plan des débats sur les obligations des dirigeants envers les dirigés. Les Frères musulmans joueront vraisemblablement dans le processus politique un rôle politique plus grand que certains en Europe ne le souhaiteraient, mais ils font partie du paysage politique depuis des décennies. L’Égypte a maintenant l’occasion de forger de nouvelles relations avec des sociétés véritablement ouvertes dans la région. Cela modifiera aussi ses relations avec l’Ouest. La paix entre l’Égypte et Israël pourrait aussi être mise sur le tapis, tout comme la place des institutions militaires nationales. Dans cette partie du monde, nombreux sont ceux qui estiment qu’Israël devrait faire l’objet de la même vigilance que certains pays de la région, que ce soit pour son dispositif nucléaire ou pour son oppression des Palestiniens.

Iyad Allaoui, ancien Premier ministre de l’Iraq, a ouvert la session du mardi. Il a expliqué que son pays était encore confronté à de multiples obstacles dans son cheminement vers une démocratie en bonne et due forme. Il s’est révélé extrêmement difficile d’y instaurer stabilité et l’État de droit. Des facteurs régionaux extérieurs comme intérieurs engendrent de profonds changements et peuvent être imprévisibles. Le pays occupe une position stratégique entre ses grands voisins, la Turquie et l’Iran ; il est hétérogène sur le double plan ethnique et religieux et recèle de grandes richesses naturelles. Le combat principal se livre entre la modération et diverses formes d’extrémisme à tendances terroristes. La stabilité politique, économique et sociale est liée à la sécurité. L’intervenant a estimé que la vie politique iraquienne devait, en dernière analyse, reposer sur un partenariat authentique entre les diverses communautés, plutôt que sur les divisions ethniques ou confessionnelles.

M. Allaoui a déclaré que les Kurdes avaient joué un rôle vital dans la lutte contre la dictature de Saddam Hussein. Le dialogue avec eux doit reposer sur la compréhension et le partenariat et être sous-tendu par des règles fondamentales : répartition du revenu national, adoption d’une loi sur le pétrole et le gaz naturel et discussions constructives autour des litiges actuels. L’intervenant a déploré les récents attentats contre des chrétiens, attentats qu’il a qualifiés d’inhumains et d’immoraux. Il a appelé le monde extérieur à venir en aide à la communauté chrétienne d’Iraq.

Nechirvan Idris Barzani, ancien Premier ministre du gouvernement du Kurdistan iraquien, a commencé par dire que les Kurdes savaient que rien ne pouvait se substituer à l’aide des pays européens ; c’est la raison pour laquelle ils ont cherché à nouer des relations avec l’Ouest. Il ne faut pas oublier les atrocités commises dans la région kurde : 182 000 disparus, 4 500 villages rasés, emploi d’armes chimiques contre les populations civiles. La Haute Cour iraquienne et le Conseil des représentants ont qualifié ces crimes de génocide, mais cela ne suffit pas.

La région connaît de profonds changements. L’Iraq a été épargné par les émeutes car il est maintenant plus démocratique et plus ouvert que bon nombre de ses voisins. Trois grands problèmes se posent à lui. Il doit instaurer un climat de confiance entre les partis et les forces politiques ; il doit institutionnaliser le système constitutionnel de manière à accorder une autonomie substantielle aux régions : pour leur part, les Kurdes continueront à réclamer un État fédéral, pluraliste et démocratique ; enfin, la Constitution doit aussi régler la question des litiges territoriaux et corriger les erreurs commises par le régime baasiste.

Le Kurdistan a une longue expérience de l’autonomie ; il a prospéré et s’est développé alors même que le reste du pays souffrait. Le peuple kurde accueille des réfugiés et peut apporter une importante contribution à la sécurité énergétique mondiale. L’histoire du Kurdistan montre comment la démocratie peut libérer tout le potentiel d’un peuple qui a longtemps souffert.

Au cours du débat qui a suivi, un participant néerlandais a fait observer que son pays avait insisté pour que l’opération Anfal menée par Saddam Hussein contre les Kurdes soit considérée comme un génocide. M. Barzani a ajouté que la ville de Kirkouk était kurde et symbolisait l’oppression subie par le peuple kurde. Selon lui, cela doit être reconnu, après quoi la question du partage des revenus pétroliers provenant de la région pourra être réglée. Répondant à une question d’un participant, il a reconnu que la corruption posait un très grave problème en Iraq et empêchait l’instauration d’un climat propice aux investissements. Il a demandé aussi que toute la région soit exempte d’armes de destruction massive et que les Iraniens soient associés aux discussions à ce sujet, de manière à leur garantir qu’ils ne seraient victimes d’aucune agression. Il a admis que la corruption posait aussi un problème au Kurdistan mais que son ampleur avait été exagérée. Enfin, il a fait observer que la Turquie était devenue un partenaire majeur du Kurdistan et a ajouté que de nombreuses sociétés turques investissaient dans la région.

L’amiral Samuel J. Locklear III, commandant du Commandement des forces alliées interarmées (Naples), a présenté un récapitulatif des opérations de l’OTAN en Méditerranée. L’OTAN n’est pas engagée qu’en Libye mais opère dans toute la région méditerranéenne, y compris les Balkans. Ces opérations mettent ses ressources à rude épreuve, mais l’Alliance tient le coup.

L’opération Active Endeavor a pour objet d'empêcher toute opération terroriste sur le front maritime. Elle a adopté à cet effet une stratégie infocentrée. En temps ordinaire, l’OTAN est en mesure de surveiller 60 % en moyenne du trafic traversant la Méditerranée ou évoluant dans son voisinage. Cela n’est cependant pas satisfaisant et des améliorations sont nécessaires.

Les opérations de l’Union européenne et de l’OTAN dans les Balkans ont été couronnées de succès, un succès qui a toute son importance. L’effectif des forces de dissuasion déployées au Kosovo a été ramené de 15 000 à 5 000 hommes au cours de ces deux dernières années. La prochaine étape consistera à réduire ce nombre de moitié, objectif qui sera examiné au sein du Conseil de l’Atlantique Nord. Aucune menace grave ne pèse sur la sécurité au Kosovo et l’UE est capable d’exercer une grande influence dans la région. L’admission des Kosovars dans des organisations régionales contribuera à instaurer, à long terme, un climat de confiance avec Belgrade. Il ne faut toutefois pas oublier que la KFOR demeure, au Kosovo, l’entité qui inspire le plus de confiance. L’OTAN continuera à soutenir l’évolution démocratique du Kosovo et de la Serbie.

La Serbie a beaucoup progressé dans le rétablissement de bonnes relations dans la région et sa coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie a revêtu une grande importance à cet égard. Son président a récemment accueilli à Belgrade un sommet sur la stratégie de l’OTAN auquel étaient représentés 56 pays, chiffre impressionnant si l’on songe au sentiment de méfiance assez marqué que suscite encore l’OTAN dans les populations. D’autres problèmes de sécurité se posent dans la région et doivent être résolus. La Bosnie-Herzégovine doit régler la question des propriétés militaires, mais l’impasse politique dans laquelle elle se trouve actuellement ne le permet pas. Cependant, les forces armées ont bien avancé dans la réforme de la défense et ont apporté une contribution significative à la FIAS. Le Monténégro, qui s’est doté de forces armées de taille réduite mais efficaces contribuant, elles aussi, à la réalisation des missions de la FIAS, promeut la coopération régionale dans le domaine de la sécurité. Il avance de manière régulière sur la voie de l’intégration euro-atlantique. L’ex-République yougoslave de Macédoine* continue à participer à une large gamme d’activités relevant du Partenariat pour la paix et a montré qu'elle était prête à rejoindre l'OTAN ; cependant, elle doit maintenant régler avec la Grèce la question de son appellation.

La Mission OTAN de formation en Iraq (NTM-I) a un effectif modeste (200 personnes) mais ses activités ont de vastes répercussions et engendrent des « profits » appréciables pour des investissements relativement réduits.

En Libye, l’opération Protecteur unifié, dont le mandat reposait sur les résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU, a permis de prévenir une catastrophe humanitaire. L’aide arrive en masse dans le pays et la machine de guerre du régime a été durablement détériorée. On estime qu’1,1 million de personnes (sur une population de 7 millions d’habitants) ont quitté la Libye. Pour mettre un terme à l’opération, l’OTAN demande la proclamation d’un cessez-le-feu, le retrait des forces armées dans leurs casernements et la libre circulation de l’aide humanitaire. L’embargo a porté ses fruits : 17 navires de pays alliés ou partenaires ont procédé à 1 500 arraisonnements et à 130 inspections à bord, et huit bâtiments se sont vu interdire l’accès à un port. Les frontières méridionales sont toutefois beaucoup plus difficiles à gérer. La zone d’exclusion aérienne reste en place : seuls sont autorisés les vols nécessaires à l’acheminement de l’aide humanitaire et aux services essentiels. La mission de protection des populations civiles a donné de bons résultats. Dans l’est du pays, les conditions de vie sont à peu près normales si l’on fait abstraction de la pénurie de carburant et de denrées alimentaires. A Misrata, on assiste également au début d’un retour à la normale. Dans l’ouest, les moudjahiddin ou l’opposition ont expulsé les tenants du régime de plusieurs secteurs importants et se sont rapprochés de Tripoli. Les habitants de la capitale ont de la nourriture et de l’eau et assistent aux attaques aériennes de l’OTAN, mais les seuls dangers qui pourraient peser sur leur existence émanent du régime. Les rebelles commencent à se rallier entre eux sur le plan politique et coopèrent de manière plus efficace dans le domaine de la sécurité. Il est important de savoir que le changement de régime n’est pas inscrit dans le mandat de l’OTAN et que l’Alliance ne pourchasse ni ne prend pour cible aucun individu en particulier. Dans la situation sur le terrain, le colonel Kadhafi a tout simplement de moins en moins d’importance.

L’OTAN mène une campagne aérienne complexe. L’opération se déroule sans encombre. On dénombre 13 000 sorties d’aéronefs depuis le début du mois de juillet, dont plus de 5 000 sorties offensives, et 2 600 objectifs effectivement détruits.

Au cours du débat qui a suivi, l’amiral Locklear a admis que le ravitaillement en munitions avait posé un problème durant les tout premiers jours de la campagne libyenne. Les États-Unis ont apporté leur aide et il semble que la question soit réglée pour le moment. L’amiral a refusé de parler d’impasse au sujet de la situation militaire, car les forces de Kadhafi sont systématiquement affaiblies. Il a fait observer que les États-Unis jouaient un rôle clé dans le ravitaillement en vol et la collecte d’informations et de données du renseignement. Il a également récusé l’assertion selon laquelle l’OTAN essayait de gagner une guerre; bien plutôt, l’OTAN veille avant tout à respecter le mandat conféré par l’ONU. Les opérations militaires servent à créer un espace propice à la diplomatie.

La Turquie reconnaît la République de Macédoine sous son nom constitutionnel

RAPPORT DE LA RÉUNION CONJOINTE DU CONSEIL INTERPARLEMENTAIRE UKRAINE-OTAN, DE LA SOUS-COMMISSION SUR LES PARTENARIATS DE L’OTAN ET DE LA SOUS-COMMISSION SUR LA GOUVERNANCE DÉMOCRATIQUE, KYIV, UKRAINE, DU 5 AU 7 JUILLET 2011

À Kyiv, le Canada a été représenté par la Sénatrice Raynell Andreychuk et M. Darryl Kramp, député.

La décision prise par l'Ukraine en juillet 2010 d'opter pour un statut de pays ne dépendant d’aucun bloc et de se fixer comme objectif d’édifier une coopération constructive avec l'OTAN - plutôt que d'y adhérer - a atténué la controverse qui régnait à l’intérieur du pays. Parallèlement, la coopération tant politique que dans des domaines concrets s'est poursuivie, allant même en s'intensifiant. Tels ont été les principaux constats d'une réunion qui s’est tenue à Kiyv, le 5 juillet, entre des parlementaires de l'OTAN et leurs homologues ukrainiens dans le cadre du Conseil interparlementaire Ukraine-OTAN (UNIC). Les dix-sept membres de la délégation de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN (AP-OTAN) et plusieurs députés du Parlement ukrainien ont participé à la réunion du Conseil avant de prendre part, les 6 et 7 juillet, à la visite de la Sous-commission sur la gouvernance démocratique (CDSDG).

Les parlementaires de l'OTAN ont exhorté leurs homologues ukrainiens à accélérer la réforme politique et économique. « Les progrès accomplis par l'Ukraine sur la voie de la démocratie se distinguent incontestablement dans le périmètre post-soviétique, et nous espérons tous que l'Ukraine poursuivra dans cette voie », a déclaré à ses homologues ukrainiens Assen Agov (Bulgarie), coprésident de l’UNIC. Hendrik Jan Ormel (Pays-Bas), président de la CDSDG a ajouté : « C’est en poursuivant le rapprochement avec l'Ukraine que l’Union européenne et l’OTAN appuieront de la meilleure façon les réformes en cours dans ce pays européen d'une importance-clé ».

À la Session annuelle de l'AP-OTAN qui doit se tenir à Bucarest en octobre 2011, la Sous-commission sur la gouvernance démocratique se penchera sur un rapport de Lucio Malan (Italie) traitant de l'évolution des politiques intérieure et étrangère de l'Ukraine. « Je considère que les débats animés et la diversité d'opinions dont nous avons été les témoins au cours de nos réunions à Kiyv, y compris les échanges de vues entre parlementaires du parti au pouvoir et de l'opposition, témoignent d’une évolution nettement positive », a déclaré M. Ormel. « Voilà qui nous sera extrêmement utile pour affiner l'évaluation que nous proposerons, dans le rapport de la sous-commission, des développements récents en Ukraine ».

La réunion de l’UNIC a été inaugurée par le président du Parlement ukrainien, Volodymyr Lytvyn. Celui-ci a souligné que grâce à l'adoption par l'Ukraine de la Loi sur les fondements de la politique intérieure et étrangère et grâce aussi à l'adoption par l’OTAN de son nouveau Concept stratégique, les discussions sur l'OTAN à l'intérieur du pays « se sont hissées de la politique politicienne au débat véritable ». M. Lytvyn a dit espérer que, dans l'avenir, l'Ukraine saura éviter les brusques changements de cap en politique étrangère et concentrer ses efforts sur l'intégration à l'UE et sur la coopération concrète avec l'OTAN, tout en conservant son statut de pays ne dépendant d’aucun bloc. Il a affirmé que l'Ukraine entend rester un partenaire fiable et qu’elle maintiendra sa participation aux opérations dirigées par l'OTAN.

M. Lytvyn a également réitéré l’adhésion résolue des dirigeants de l'Ukraine aux valeurs démocratiques, tout en observant que la consolidation du pouvoir en Ukraine est une condition nécessaire de la mise en œuvre des réformes structurelles. Le Programme national annuel (PNA) adopté avec l'OTAN contribue de façon efficace à l'application du train de réformes internes.

Mykola Tomenko (Ukraine), président adjoint du Parlement ukrainien et coprésident de l'UNIC, a noté que les relations entre l'Ukraine et l'OTAN avaient subi un certain refroidissement au cours de l'année 2010 mais que la politique étrangère de l'Ukraine s'était rééquilibrée en 2011. Récemment, l'Ukraine a manifesté sa détermination à maintenir une coopération intensive avec les Alliés en participant à l’exercice Sea Breeze, mené conjointement avec la Marine militaire américaine. M. Tomenko a également souligné que l'adhésion aux valeurs démocratiques et aux droits humains était le principal catalyseur du processus d'intégration de l'Ukraine à l'Europe.

M. Agov s'est félicité de la vaste portée et de la sincérité de la coopération concrète qui existe entre l'OTAN et l'Ukraine, et ce en dépit du fait que la perspective d'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN ne soit plus à l'ordre du jour. Au nom de l'Assemblée, il a remercié l'Ukraine de son apport substantiel aux opérations dirigées par l'OTAN, avant de citer les propos suivants du Secrétaire général de l'OTAN, Anders Fogh Rasmussen : « Les progrès de la démocratie et de la primauté du droit sont une dimension essentielle des relations entre l'OTAN et l'Ukraine » et de réitérer le vœu que l'Ukraine reste fidèle à son engagement et à ses réalisations en matière de démocratie.

LES PRIORITÉS DE L’UKRAINE EN MATIÈRE DE POLITIQUE ÉTRANGÈRE ET DE DÉFENSE

PRINCIPES GÉNÉRAUX

La façon dont l'Ukraine s’attache à maintenir un équilibre dans ses relations avec l'Est et l’Ouest a été au cœur des discussions portant sur sa politique étrangère et de défense, au cours desquelles la délégation s’est vu présenter des perspectives divergentes. Plusieurs des intervenants ont rejeté la dichotomie « Est - Ouest », autrement dit la nécessité pour l'Ukraine de choisir un camp. Selon eux, il s'agit d'une vision erronée car il est possible de maintenir une approche d'équilibre entre l'Occident et la Russie, et ils y voient même la meilleure démarche pour l'Ukraine, du fait de sa double identité. D'autres interlocuteurs ont soutenu, au contraire, que l'on ne peut pas ignorer le caractère au moins partiellement antinomique de ce double processus et que l'Ukraine doit choisir sa voie.

La signification et les conséquences de la décision ukrainienne d'adopter un statut de non dépendance à l’égard d’un bloc ont également tenu une large place dans les discussions de la délégation. Cette décision continue de faire l'objet de vives critiques de la part des parlementaires de l'opposition, qui en dénoncent la myopie de même que le caractère tactique plutôt que stratégique, tout en soutenant que l'Ukraine ne doit pas renoncer à l'objectif d'adhésion à l'OTAN.

Selon certaines déclarations faites à la délégation, l'Ukraine a adopté une vision élargie de la sécurité, avec, comme objectif à long terme de sa politique étrangère, l'appartenance de plein droit à l'UE, la participation à une architecture européenne de sécurité élargie, le développement des relations avec les nouveaux pôles de pouvoir et la mise en place d'un cadre de coopération efficace pour la région de la mer Noire. Les interlocuteurs ukrainiens ont également mis en relief l'appui apporté par Kiyv aux efforts concertés entrepris à l'échelle internationale pour entraver la prolifération des armes de destruction massive, de même que son rôle comme promoteur de la dénucléarisation et de la démilitarisation à l'échelon régional comme à l'échelle mondiale. Ils ont réaffirmé que l'Ukraine est déterminée à maintenir sa contribution aux opérations internationales de soutien de la paix, en soulignant qu’une telle participation répond à un double but : améliorer la sécurité aux niveaux régional et mondial, et renforcer l'efficacité des forces armées du pays.

L'INTÉGRATION À L’UE

Selon certains exposés présentés à la délégation, le président Yanukovich a fait de l'intégration à l'UE la pierre angulaire de la politique étrangère de l'Ukraine, en déclarant que cette intégration représente la meilleure garantie de non-appartenance à un bloc. De nombreux interlocuteurs de la délégation ont mis l'accent sur la complémentarité entre les priorités en matière de réforme liées au processus d'intégration à l'UE et le PNA arrêté par l'Ukraine avec l'OTAN.

À la fin de l'année 2011, le processus d'intégration de l'Ukraine à l'UE devra subir l’épreuve de vérité : l’Accord d’association ainsi que l’Accord de libre-échange approfondi et global (DCFTA), que Kiyv espère conclure avec l'UE. Selon les déclarations faites à la délégation, le DCFTA aurait rallié les suffrages d'une écrasante majorité des forces politiques du pays. Certains membres de l'Assemblée ont déclaré que, à court terme, le parcours d'intégration à l'UE offre à l'Ukraine des perspectives plus prometteuses que celui proposé par l'OTAN, soulignant les effets bénéfiques que l'adaptation de l'Ukraine aux normes commerciales de l'UE pourrait avoir sur le programme de réformes internes, sur le climat des affaires et sur la lutte contre la corruption. Ils ont cité à titre d’illustration les discussions en cours sur la révision de la législation encadrant la passation de marchés publics.

Certaines préoccupations ont été exprimées quant à la compatibilité du DCFTA avec les projets parallèles de rapprochement avec l'Union douanière entre la Russie, le Bélarus et le Kazakhstan. Certains députés de l'opposition se sont dits sceptiques quant à l’efficacité de la proposition d’accord « 3 + 1 » avec l’Union douanière présentée par le président Yanukovich - à savoir la coopération avec l'Union douanière - mais sans aller jusqu'à l'adhésion. Cependant, la majorité des interlocuteurs ont assuré la délégation que l'accord « 3 + 1 » serait pleinement compatible avec le DCFTA. L'un des intervenants a également observé qu'il n'y avait pas lieu de faire une comparaison directe entre l'UE et l'Union douanière, compte tenu du retard considérable de celle-ci en matière de règles et de normes.

Plusieurs interlocuteurs et parlementaires ukrainiens ont exhorté l'UE à accorder l'accession à l'Ukraine le plus tôt possible, en déclarant que la nation ukrainienne était unie autour de l'idée d'une intégration à l'Europe. Cette déclaration a toutefois été réfutée par l’un des intervenants, qui s’est référé à des sondages d'opinion indiquant que, même si les Ukrainiens se faisaient généralement une idée positive de l'UE, une bonne partie d’entre eux s’opposeraient à l'intégration à l'Europe si cela impliquait une prise de distance à l'égard de la Russie. Quant à Moscou, ses réactions à propos des négociations sur le DCFTA et, de manière plus générale, sur les aspirations européennes de Kiyv sont mitigées, a-t-il été déclaré à la délégation.

LA RÉFORME DU SECTEUR DE LA DÉFENSE ET DE LA SÉCURITÉ ET LES RELATIONS AVEC L’OTAN

La mise en œuvre du PNA 2010 de l'Ukraine conclu avec l’OTAN a fait l'objet d'une appréciation globalement positive. Les responsables de l'OTAN ont expliqué que l'Alliance a pris bonne note de la politique ukrainienne favorable à un statut de non-dépendance à l’égard d’un bloc, tout en réaffirmant que la décision du Sommet de Bucarest selon laquelle la Géorgie et l'Ukraine sont appelées à devenir un jour membres de l'OTAN conserve sa validité. Cependant, l'accent est à présent mis sur le processus plutôt que sur le but final. À ce propos, les représentants officiels de l'OTAN ont affirmé avec la plus grande énergie que la décision de l'Ukraine concernant son statut de non-dépendance à l’égard d’un bloc n'a en rien entaché la coopération politique ni la coopération dans des domaines concrets. Au demeurant celles-ci se sont intensifiées, et s’il est vrai que le PNA n’est plus utilisé comme instrument pour préparer le pays à l'adhésion à l'OTAN, il sert de plus en plus comme support des réformes internes du pays. L’OTAN considère que le PNA représente une base satisfaisante de coopération globale avec l'Ukraine, coopération qui a de fortes chances d'être étendue à l'élimination des matériaux radioactifs de même qu'à l'assistance aux mesures d'urgence dans le domaine civil en vue du prochain Championnat européen de football, en 2012. L'un des représentants officiels de l'OTAN a déclaré que l'Ukraine reste un pays-clé dont l'influence est déterminante pour la sécurité européenne, et il a plaidé pour le maintien du niveau actuel de coopération avec l'Ukraine, faute de quoi, a-t-il averti, les conséquences négatives seraient inévitables.

Les participants ukrainiens ont mis en relief le vaste champ d’application de la coopération avec l'OTAN, dont l’illustration la plus réussie est le PNA. Pendant la période 2010-2011, la coopération entre l'Alliance et l'Ukraine a couvert des domaines aussi variés que les réformes internes d'ordre politique, administratif, judiciaire et économique, ainsi que la cyber-sécurité, environnementaux, la participation aux opérations dirigées par l'OTAN, les initiatives de lutte contre la prolifération à l’échelle mondiale et la sécurité maritime. Le PNA pour l'année 2011 a été adopté le 13 avril 2011, et cinq représentants gouvernementaux ont été désignés pour coordonner le travail accompli dans le cadre de chacun des chapitres qui le composent. Le programme de 2011 tient dûment compte des principes énoncés dans la Loi de 2010 sur les fondements de la politique étrangère et de défense. Les représentants officiels de l'Ukraine ont en outre fait observer que l'on accorde une grande attention à la primauté du droit et à la protection des droits et des libertés. Ils ont signalé en particulier, parmi les priorités, la reconduction du Fonds d'affectation spéciale du Partenariat pour la Paix orienté vers l'élimination des excédents d'armes et de munitions, le recyclage du personnel, les initiatives du programme « La science au service de la paix et de la sécurité », et enfin une meilleure insertion de la société civile dans les débats portant sur la défense et sur la sécurité.

Les responsables ukrainiens ont insisté sur le fait que le PNA est un document essentiellement axé sur les réalisations concrètes et que c’est un outil précieux de renforcement de l'interopérabilité entre les forces ukrainiennes et celles de l'OTAN. Ils ont également souligné que l'Ukraine tire un profit considérable de la coopération avec les experts occidentaux dans des domaines tels que la rédaction de documents stratégiques, l'amélioration des performances des forces ukrainiennes grâce à la participation à des exercices conjoints et aux opérations dirigées par l'OTAN, et le renforcement du contrôle civil sur les forces armées.

Les représentants de l'OTAN et de ses États membres ont rendu hommage à l’apport exceptionnel de l'Ukraine à la quasi-totalité des opérations de l'OTAN. L'Ukraine a renforcé son contingent affecté à la mission de la FIAS en Afghanistan, elle a participé à la force du Kosovo, à l'opération Active Endeavour de lutte contre le terrorisme en Méditerranée ainsi qu'à la mission de formation de l'OTAN en Irak. En outre, les représentants ukrainiens ont rappelé que leur gouvernement avait autorisé la mise à disposition d'un navire pour évacuer des réfugiés à partir de la Libye, et qu’il prévoyait d’accueillir des soldats de l'Armée nationale afghane pour des cours de formation dans les académies militaires ukrainiennes. Par ailleurs, l'Ukraine est le premier partenaire de l'Alliance à participer à la Force de réaction de l'OTAN.

Les représentants officiels de l'OTAN ont néanmoins déploré le retard dans l'adoption du PNA pour 2011. Ils ont encouragé l’Ukraine à persévérer dans la voie des réformes démocratiques et plus particulièrement dans la lutte contre la corruption et dans la réforme électorale, et l’ont instamment invitée à envisager une contribution à l'opération de l'OTAN Ocean Shield au large des côtes de Somalie, à l'opération Unified Protector en Libye et à la mission de formation de l'OTAN en Afghanistan.

Les délégués de l'OTAN ont également pointé du doigt la faiblesse pérenne du financement des dépenses en matière de défense. L'un des représentants de l'OTAN a soutenu que si le statut de non-dépendance à l’égard d’un bloc signifie la neutralité, l'Ukraine doit être prête à se défendre sans aide extérieure, ce qui ne peut manquer d'avoir des conséquences pour sa posture militaire et pour son budget de défense.

Les responsables ukrainiens ont soutenu que l'incidence de la politique de non appartenance à un bloc sur le budget de défense restait à établir, tout en reconnaissant que le niveau de financement du secteur de la défense et de la sécurité reste faible. Par ailleurs, étant donné que les dépenses de personnel absorbent 70 % du budget de la défense, il ne reste plus qu'un montant insuffisant pour les opérations et pour la modernisation. Des réformes substantielles sont donc nécessaires pour maintenir la pertinence de ce secteur et pour qu'il soit capable d'affronter les tâches liées à la sécurité nationale en période d'austérité économique.

Avec l'adoption de la Loi sur le fondement de la politique étrangère et de défense et avec l'achèvement de la Revue de défense stratégique, les autorités gouvernementales se sont attachées à affiner les priorités en matière de réforme du secteur de la défense et de la sécurité. Plusieurs documents importants sont à la veille d'être adoptés, dont une nouvelle stratégie nationale de sécurité, une stratégie de politique étrangère, une doctrine militaire et le Bulletin de défense stratégique. Tous ces documents visent à cerner le concept directeur nécessaire à la poursuite des réformes et du développement des forces armées à l'horizon 2016. Les représentants officiels de l'Ukraine ont par ailleurs énuméré, parmi les priorités à prendre en compte dans le cadre de l'assistance internationale, le perfectionnement professionnel des forces armées, la protection sociale, les orientations en matière de réforme et de perfectionnement des forces armées, ainsi que l'interopérabilité.

La délégation a également été mise au courant des efforts entrepris pour mieux faire connaître l'OTAN et améliorer son image auprès de l’opinion ukrainienne. Le Programme d’État d'information du public sur l'intégration euro-atlantique de l'Ukraine pour la période 2008-2011, lancé sous le gouvernement précédent, comprend plusieurs initiatives de grande portée, y compris la création de centres régionaux d'information et la tenue d'activités destinées à familiariser le public avec l’Alliance, qu’il s’agisse de séminaires, de conférences ou de concours de rédaction. La délégation a ainsi pu se rendre compte que beaucoup de chemin a été parcouru ; toutefois, la mise en œuvre du programme est aujourd'hui entravée par la récession économique et par l'adoption du statut de pays ne dépendant d’aucun bloc, ce qui rend peu probable le renouvellement du programme une fois celui en cours arrivé à expiration.

Le Centre d'information et de documentation sur l'OTAN (NIDC) établi à Kiyv joue un rôle déterminant d'information du public sur l'Alliance. Le centre exécute une série de programmes qui font appel aussi bien à des méthodes traditionnelles qu’à des démarches plus modernes d'information et de communication. Ces programmes ont été conçus pour stimuler l'intérêt de différentes catégories de population tout en les renseignant, notamment les étudiants, les enseignants, les journalistes et les représentants d'ONG, mais aussi des vedettes populaires et des dirigeants religieux.

Selon les responsables du NIDC, le climat général se prête de plus en plus, quoique de façon graduelle, aux discussions portant sur les questions entourant l'OTAN. Ces mêmes responsables sont d’avis qu’il convient de voir dans les nouvelles orientations de la politique étrangère de l'Ukraine une occasion d’encourager sur ce sujet un débat moins passionnel, plus rationnel et davantage basé sur les faits. Les sondages d'opinion indiquent que pour deux tiers des Ukrainiens - répartis dans tout le pays - l’OTAN ne constitue pas une menace ; parallèlement, les reportages des médias ukrainiens se sont faits nettement moins incisifs à l’égard de l’OTAN. Il demeure toutefois que dans leur majorité, les Ukrainiens n'appuient ni l'adhésion à l'OTAN ni même un resserrement de la coopération avec l'Alliance.

L'ÉVOLUTION INTERNE EN UKRAINE

LES DÉVELOPPEMENTS DANS LE DOMAINE POLITIQUE, LA DEMOCRATIE ET L’OPPOSITION

Les parlementaires de l'opposition et certains représentants d’ONG se sont dits préoccupés par ce qu'ils perçoivent comme une tendance préjudiciable, à savoir l'érosion des progrès accomplis en matière de démocratie et de droits humains, parallèlement à une évolution vers le parti unique et une centralisation excessive. Plusieurs intervenants ont évoqué le dernier rapport publié par Freedom House, qui a rétrogradé pour 2010 l'Ukraine de la position de « pays libre » à celle de « pays partiellement libre ». Les parlementaires du parti au pouvoir ont rejeté ces expressions d'inquiétude les considérant infondées et des experts indépendants les ont qualifiées d'exagérées, voyant dans les tendances actuelles un ajustement temporaire susceptible de renversement.

Autre inquiétude de premier plan des parlementaires de l'opposition, les procès au pénal engagés contre des membres éminents de l'opposition - dont l'ex-Premier ministre, Yulia Tymoshenko et l'ancien ministre de l'Intérieur, Yuriy Lutsenko - procès alimentés, selon eux, par des considérations politiques. Leurs homologues du parti au pouvoir ont rejeté l'expression « justice sélective » employée à ce propos et rappelé qu'un certain nombre de dignitaires du gouvernement actuel - y compris l'ancien président du Parlement de Crimée - ont été traduits en justice pour corruption. Ces parlementaires ont déclaré que l'on pouvait s'en remettre au système judiciaire ukrainien, citant en exemple certaines affaires dans lesquelles les accusés ont été acquittés.

Les parlementaires de l'opposition ont en outre rappelé que les élections locales de 2010 avaient été largement considérées comme une régression par rapport aux scrutins précédents en Ukraine. Ils se sont dits inquiets de la proposition de réforme du système électoral visant à introduire un régime mixte pour les prochaines élections parlementaires. La combinaison de listes verrouillées au niveau des partis et de circonscriptions extrêmement vastes munies d'un mandat unique ne manquerait pas, selon eux, de rendre très ardue la tâche des candidats ne disposant pas de ressources financières substantielles et de l’appui du monde des affaires. Là encore, les représentants du parti au pouvoir ont écarté ces craintes, en répliquant que la réforme proposée rendrait le système électoral plus efficace.

Il y avait également divergence de vues entre parlementaires de la majorité et ceux de l'opposition quant aux garanties d'indépendance du corps judiciaire. Alors que la création du Conseil suprême de la justice avait été présentée comme un moyen de renforcer l'indépendance de la justice, les membres de l'opposition y voyaient un vecteur de mainmise politique sur le corps judiciaire.

Les entretiens avec les parlementaires et avec les experts des ONG ont en outre mis au jour des appréciations contradictoires quant à la lutte contre la corruption, le rôle des oligarques dans le système politique ukrainien, les perspectives de consolidation des forces d'opposition, de même que le niveau de militantisme et la maturité démocratique de la société civile ukrainienne.

Ces entretiens ont également permis de mieux cerner le rôle que peut jouer une perspective claire, tant européenne qu’euro-atlantique, dans la promotion du processus démocratique en Ukraine. Mme Tymoshenko a exhorté l'UE et l'OTAN, en tant que partenaires, à ne pas laisser les signes apparents d'une érosion de la démocratie faire échouer les négociations concernant l'Accord d'association et le DCFTA avec l'UE. En effet, la conclusion et la ratification de ces accords avec l'UE contribueraient à ancrer fermement l'Ukraine au sein de la famille des démocraties européennes. Mme Tymoshenko a ainsi souligné son propos : « Les deux principaux défis du pays consistent à maintenir le cap européen de l'Ukraine et à préserver les réalisations démocratiques de la Révolution Orange ».

Plusieurs interlocuteurs et plusieurs membres de la délégation se sont fait l'écho de cette exhortation, en soulignant combien il importait d'appuyer l'évolution démocratique de l'Ukraine et en évoquant les effets positifs que cela pourrait avoir sur l'ensemble de la région post-soviétique.

LES MÉDIAS ET LA LIBERTÉ D’EXPRESSION

La délégation s'est également enquise des développements en matière de liberté des médias, en évoquant notamment la disparition du journaliste Vasyl Klymentyev. Plusieurs hauts fonctionnaires internationaux et représentants d'ONG ont fait observer que le contexte médiatique de l'Ukraine reste ouvert et dynamique et que l'on n’y constate pas de manifestations patentes de la censure. Les représentants du Parti des régions ont ajouté à ce propos que les téléspectateurs ukrainiens jouissent d'une totale pluralité de points de vue.

Les parlementaires de l'opposition ont répliqué en citant le cas de deux stations de télévision dont la bande de fréquence a été réduite par les autorités. Ils se sont en outre alarmés du fait que le chef du service de sécurité de l'Ukraine (SBU) soit également propriétaire du principal empire médiatique du pays.

LES DÉVELOPPEMENTS DANS LE DOMAINE ÉCONOMIQUE

Les consultations portant sur l'économie ukrainienne ont mis en relief le fait que nombre d'indicateurs macro-économiques sont positifs : la croissance annuelle du PNB dépasse 4 %, la production industrielle et les recettes fiscales ont également progressé de façon remarquable et la balance des paiements s'est améliorée de façon tangible au cours de l'an dernier. Cependant, les experts ont rappelé qu’avant cette embellie l'économie avait été au plus bas par suite de la grave récession économique de 2009 et que l'Ukraine était favorisée par la remontée des cours de certaines des principales matières premières produites par le pays.

Les interlocuteurs de la délégation ont en outre exprimé des réserves sur la solidité et sur la durabilité de la croissance actuelle. En effet, ont déploré les experts, en dépit de leur nombre impressionnant, les réformes structurelles entreprises par le gouvernement ne sont bien souvent que de pâles imitations de réformes réelles. A titre d'exemple, le code des impôts récemment promulgué ne fait en réalité qu’augmenter l'assiette fiscale, et il n’affronte pas les véritables défis tels que la simplification du régime d'imposition, l'allégement du fardeau fiscal et la lutte contre l'économie parallèle. Dans le même ordre d'idées, les experts ont déclaré que la réforme récente du régime de pensions de retraite reste superficielle ; en outre, selon l'un d'entre eux, la croissance ne profite pas à l'ensemble de la population - pour preuve, l’absence de croissance réelle du taux d'emploi. Par ailleurs, le faible taux d'investissement étranger direct constitue un facteur particulièrement préoccupant.

La politique économique de l'Ukraine comprend d'autres aspects problématiques, tels que le poids excessif du gouvernement central dans l'économie, l'absence de planification économique à long terme, le manque de transparence dans l’exécution d'importants programmes de privatisation, l’évolution monopolistique de certaines industries ou encore les conditions de plus en plus difficiles faites aux exploitants privés dans le secteur agricole. En outre, certains interlocuteurs craignent que l'influence russe, qui s’accentue sur certains segments de l'économie ukrainienne, ne vienne miner l'indépendance économique du pays.

Ces mêmes experts ont déploré que le gouvernement ne semble pas pénétré de l'urgente nécessité d’accomplir les réformes et d’améliorer le climat des affaires. Ils se sont alarmés du fait que les autorités n'ont pas tiré les enseignements de la dernière récession, et ils n’ont pas exclu la possibilité d'une rechute économique. Ils ont souligné en particulier la corrélation entre la libéralisation du système politique et celle de l'économie, en pointant du doigt l'influence politique des oligarques. L'u, n des experts a exhorté les partenaires occidentaux de l'Ukraine à intensifier les pressions pour que le pays se réforme, en soutenant que l'impulsion nécessaire au changement ne pouvait venir que de l'extérieur.

Tout en prenant acte de certains progrès accomplis vers l'européanisation du secteur énergétique de l'Ukraine, les experts ont déploré que ces progrès ne se soient pas accompagnés de mesures concrètes renforçant l'indépendance énergétique du pays. L’Ukraine reste étroitement tributaire des approvisionnements énergétiques russes et la réforme du secteur énergétique n'a donné, à ce jour, que de maigres résultats. L’un des intervenants a également déploré que le gouvernement maintienne la priorité accordée au développement de l’infrastructure d’exploitation du gaz naturel et de l'énergie nucléaire au détriment de l'efficacité énergétique, ajoutant que si l'Ukraine avait atteint des niveaux d'économie d'énergie analogues à ceux des pays du Groupe de Visegrad, ses ressources internes suffiraient à couvrir ses besoins. La mise en valeur des gisements gaziers de schiste, à l'instar de la Pologne, semble contenir des perspectives prometteuses.

LE SERVICE DE SÉCURITÉ UKRAINIEN ET SON CENTRE DE LUTTE ANTITERRORISTE

La délégation de l'Assemblée a visité le Centre antiterroriste du SBU où elle a suivi des exposés, prononcés par de hauts responsables du service, portant sur l'historique et sur les priorités actuelles de sa coopération avec l'Alliance. Les parlementaires de l'OTAN ont ainsi appris que les consultations à haut niveau OTAN-Ukraine portant sur la réforme du secteur du renseignement constituent un mécanisme de coopération extrêmement utile. Les experts de l'OTAN collaborent de façon précieuse aux efforts déployés par leurs homologues ukrainiens pour transformer leur agence et la préparer à déjouer les menaces pour la sécurité nationale de leur pays. De leur côté, les forces de sécurité ukrainiennes apportent une collaboration importante à l'élargissement de la sécurité européenne dans des domaines tels que la lutte contre le terrorisme, le crime organisé, le trafic de la drogue et la traite d’êtres humains, ainsi que la cybercriminalité. Les rencontres entre experts de l'OTAN et de l'Ukraine permettent d’aborder un large éventail de problèmes, au nombre desquels la planification budgétaire, la gestion du personnel, l'utilisation de pièces d'archives et la déclassification des documents, ou encore la coopération avec les structures parlementaires chargées de suivre les activités du secteur du renseignement. Pour les interlocuteurs de la délégation, il s’agit d’une coopération pragmatique et axée sur des problèmes concrets. Par ailleurs, le SBU bénéficie d'une coopération intensive avec ses homologues russes.

La délégation de l'AP-OTAN a également suivi des exposés concernant le Centre antiterroriste qui opère sous l'égide du SBU. Le Centre se consacre à la mise sur pied et à l’exécution d'opérations antiterroristes, tout en coordonnant le travail des organismes engagés dans la lutte contre le terrorisme ou les opérations de contre-terrorisme. De manière générale, on considère que la menace terroriste est faible en Ukraine.

La sécurisation des rencontres du Championnat d’Europe de football (Euro-2012) représente, à brève échéance, l'une des tâches principales et l'un des défis majeurs que devra affronter le Centre. Les experts ukrainiens collaborent très étroitement dans ce domaine avec la Pologne, qui accueillera conjointement cette manifestation.

La délégation de l'Assemblée a en outre visité le Centre d’entraînement spécial de Koncha Zaspa.

RAPPORT DE LA VISITE DE LA SOUS-COMMISSION SUR LA COOPÉRATION TRANSATLANTIQUE EN MATIÈRE DE DÉFENSE ET DE SÉCURITÉ, ROME, ITALIE, DU 6 AU 7 JUILLET 2011

À Rome, le Canada a été représenté par le Sénateur Joseph A. Day et M. Stephen Woodworth, député.

À l’invitation du Parlement italien, une délégation de la Sous-commission de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN sur la coopération transatlantique en matière de défense et de sécurité (DSCTC) a effectué un séjour à Rome les 6 et 7 juillet 2011 pour une série d’échanges de haut niveau sur la contribution de l’Italie à la concrétisation du Concept stratégique de l’Alliance adopté en novembre 2010.

La délégation, qui comptait près de 30 parlementaires de 17 pays membres de l’OTAN, était conduite par le président de la DSCTC, sir John Stanley (Royaume-Uni). Les sous-commissions de l’Assemblée se rendent périodiquement dans des pays alliés pour y dialoguer avec des responsables officiels et des spécialistes indépendants, l’objectif étant d’aider les membres de l’AP-OTAN à mieux connaître le point de vue et les contributions de ces pays, d’une part, et de recueillir des informations destinées à l’élaboration des rapports analytiques de chaque commission, d’autre part.

La délégation s’est entretenue avec de hauts responsables civils et militaires, dont le secrétaire d’Etat à la Défense, Giuseppe Cossiga, et le chef de la défense nationale, le général Biagio Abrate. Elle a également visité le quartier général des carabinieri et le Collège de défense de l’OTAN.

L’ITALIE ET LES OPÉRATIONS

Actuellement, l’Italie affecte au total plus de 7 200 hommes à 30 opérations couvrant 28 pays. C’est ce qu’a appris la délégation lors d’un exposé présenté dans les bâtiments du Quartier général des opérations interarmées (QGOI) par l’officier commandant de ce dernier, le général de corps d’armée Giorgio Cornacchione. L’Italie est le 17e pays fournisseur de forces du système des Nations unies, mais le premier fournisseur « occidental » ; elle est aussi le 4e fournisseur de l’OTAN et le second de l’Union européenne. On peut citer, au nombre de ses théâtres de déploiement les plus importants, l’Afghanistan (où elle engage 4 200 hommes, dont 650 formateurs, et assume la responsabilité du commandement régional Ouest), la Libye (plus ou moins 1 500 hommes dans le contexte de l’opération Unified Protector), le Liban [1 600 hommes affectés à la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL)], le Kosovo (600 hommes pour la KFOR), et l’Irak [73 hommes affectés à la Mission de formation de l’OTAN (NTM-I)]. Elle participe en outre aux opérations de lutte contre la piraterie de l’OTAN et de l’Union européenne au large de la Corne de l’Afrique.

Le QGOI est une structure nouvelle créée vers la fin des années 90, destinée à confier directement au chef de la défense nationale la responsabilité des déploiements opérationnels, lesquels sont devenus plus nombreux et plus complexes. Le Quartier général s’occupe de la planification, de la coordination et de la conduite des opérations interarmées nationales et internationales, certes, mais aussi de la conduite et de la coordination générales de toutes les interventions militaires en cas de catastrophe nationale ou d’autres situations d’urgence.

Le QGOI est également l’un des cinq quartiers généraux opérationnels de l’Union européenne et est responsable de l’opération de l’EUFOR en Libye. Il n’est pas déployable et sera renforcé par du personnel des Etats membres de l’Union s’il devait être mis en activité dans le contexte d’une opération.

La délégation a eu l’occasion de discuter de l’évolution de la situation en Afghanistan par vidéoconférence avec le général de brigade Carmine Masiello, qui dirige le commandement régional Ouest de la FIAS, basé à Herat. Le général, qui compte sous ses ordres quelque 8 000 hommes de 10 pays, a déclaré que, d’un point de vue militaire, les plans relatifs au transfert de la responsabilité de la sécurité aux autorités afghanes ne posaient aucun problème à ses yeux ; il a toutefois rappelé que des attentats terroristes étaient toujours possibles, comme partout.

Le général s’est félicité de l’amélioration qualitative des capacités des forces de sécurité afghanes (FSA) dans son propre domaine de responsabilité : ces forces manifestent de très bonnes dispositions au combat ; des progrès supplémentaires sont cependant nécessaires dans les secteurs du commandement et de la planification. La police nationale afghane – et, singulièrement, la police chargée de l’ordre public (PNOP), bien entraînée et bien encadrée – a fait la preuve de sa très grande efficacité et a réagi avec promptitude et succès à une récente attaque contre une équipe de reconstruction provinciale de la région.

Selon le général, "l’offensive de printemps" qui était attendue de la part des insurgés, n’a pas eu l’ampleur des années précédentes et la multiplication des attentats-suicides et des attentats aux engins explosifs improvisés (EEI) pourraient être un signe de tendance au désespoir, une forme de « dernier recours », en quelque sorte. Par ailleurs, le général a l’impression que la population locale du commandement régional Ouest commence à faire confiance aux FSA comme dans les forces internationales, ainsi que l’atteste le nombre croissant de signalements d’EEI par les habitants.

Le général Abrate a indiqué qu’à mesure que le processus de transition se déroulerait, l’Italie restructurerait sa contribution pour accorder une plus grande place aux formateurs et aux instructeurs.

LA TRANSFORMATION MILITAIRE ITALIENNE ET L’OTAN

La transformation de l’OTAN, en application du nouveau Concept stratégique de cette dernière, reflète celle que connaissent les forces armées italiennes, a indiqué le gén. Cossiga. En 2000, l’Italie s’est engagée dans un passage progressif de la conscription à la professionnalisation. Depuis lors, elle déploie en moyenne 9 000 soldats par an à l’étranger, avec un pic de 12 000. Il était prévu d’accroître le financement annuel des activités d’entraînement et de spécialisation des forces professionnelles, mais ce projet a été victime de tiraillements politiques. Il n’empêche qu’en ces temps de raréfaction des ressources financières, a dit le gén. Cossiga, les forces armées italiennes ont resserré leurs liens avec la société et apporté des bénéfices bien réels.

Le général Abrate a indiqué à la délégation que les forces armées italiennes étaient passées sans encombre, grâce à une série de réformes, de l’état de forces à armée unique, statiques, fondées sur la conscription et concentrées sur la défense des frontières, à celui de forces interarmées/mixtes déployables, conçues pour œuvrer à l’instauration de la paix et de la sécurité dans le monde. Elles disposent d’un contingent de 61 000 hommes prêts à se déployer, dont 30 000 à un niveau de préparation très élevé. L’Italie prend part au processus de réforme de l’OTAN et apportera d’importantes contributions aux débats qui s’ouvriront dans le contexte de l’examen du dispositif de défense et de dissuasion de l’OTAN comme à la concrétisation des initiatives de l’Alliance dans le domaine de la défense antimissiles et de la défense cybernétique.

Le général a suggéré qu’en ce qui concerne la structure militaire de l’OTAN il n’était pas nécessaire de réinventer la roue ; cette structure a été mise à l’épreuve et s’en est tirée avec les honneurs, notamment lorsqu’il a fallu monter rapidement une opération en Libye. L’Italie, a ajouté le général, ne se considère ni comme une puissance mondiale ni comme un protagoniste mondial ; elle n’est pas non plus une puissance nucléaire et ne siège pas au Conseil de sécurité de l’ONU. En revanche, au-delà de ses contributions non négligeables à l’OTAN, à l’ONU et à l’Union européenne, elle estime jouer un rôle de premier plan dans la zone méditerranéenne élargie.

Selon le général de corps d’armée Claudio DeBertolis, directeur national des armements, l’Italie est très attachée à la coopération internationale en matière d’armements et privilégie à cet égard le pragmatisme. Le général a préconisé une harmonisation et une clarté accrues en ce qui concerne les besoins en armements à l’échelle de l’OTAN et de l’Union européenne, ainsi que des contrats plus souples et susceptibles d’être ajustés à mi-parcours pour garantir une dépense rationnelle des investissements dans le développement de capacités. Il a, par ailleurs, souhaité plus de dynamisme en faveur de l’Agence européenne de défense, dont il estime qu’elle peut donner des résultats d’une grande valeur.

La transformation que connaissent actuellement les forces armées italiennes est nécessaire, mais elle se heurte à de nombreux obstacles, a déclaré Valerio Briani, chercheur associé de l’International Affairs Institute. Ces obstacles sont d’ordre organisationnel et « culturel ». Sur le plan de l’organisation, le budget militaire est grevé par les dépenses de personnel ; de nombreux facteurs entrent ici en jeu, dont l’existence d’une proportion excessive d’officiers subalternes. De telles contingences économiques sont à l’origine d’un financement inadéquat des activités de formation, pourtant essentielles à la modernisation et à l’efficacité, et des acquisitions.

Selon M. Briani, il existe bien évidemment des solutions à ces problèmes, lesquels sont toutefois exacerbés par une absence généralisée de « culture de la défense » au sein de l’élite politique. Depuis 50 ans, la justification des opérations et des investissements militaires s’appuie exclusivement sur des raisons liées aux coalitions et à l’Alliance ; la discussion fait l’impasse sur l’intérêt national. Toujours selon M. Briani, quand les parlementaires se penchent sur ces questions, ils se concentrent non sur la stratégie, mais sur des aspects marginaux des décisions importantes à prendre.

M. Briani et le professeur Stefano Silvestri, président de l’International Affairs Institute, sont favorables à des arrangements multinationaux tels que la mise en commun ou le partage des ressources, ou encore, à une spécialisation dans le développement des capacités, et donnent à entendre qu’il n’existe tout simplement pas d’autre solution. M. Silvestri a cependant fait observer qu’une Europe complètement « spécialisée » n’aurait pu intervenir en Libye, dès lors que l’Allemagne a choisi de ne pas prendre part à l’opération : une spécialisation excessive peut donc déboucher sur la paralysie.

UNITÉS SPÉCIALES ITALIENNES

La délégation a entendu un exposé sur le Quartier général des opérations des forces spéciales interarmées italiennes (COFS), créé en 2004. Le COFS prélève des contingents dans les forces spéciales de chaque armée au profit d’opérations nationales et alliées. L’interopérabilité avec les doctrines des forces spéciales de l’OTAN est assurée. Selon l’orateur, les unités spéciales interarmées ainsi constituées se sont montrées très efficaces en Afghanistan, dans le contexte d’opérations s’étendant sur plusieurs commandements régionaux.

Lors d’une visite au corps des carabinieri, la délégation a été informée de la double responsabilité – défense nationale, d’une part, ordre et sécurité publics, d’autre part – qui échoit à ce corps exceptionnel. En tant que membres des forces armées et des forces de police, les carabinieri dépendent tout à la fois des ministères de la Défense et de l’Intérieur. Quelque 5 300 d’entre eux sont déployés sur le territoire italien et sont présents jusque dans les plus petits villages. On en dénombre également 620 à l’étranger, dont 500 sont en poste dans des missions diplomatiques. Ils ont été déployés dans le cadre d’opérations de l’OTAN au Kosovo, en Bosnie, en Irak, en Afghanistan, au Moyen-Orient, en Géorgie, au Congo et ailleurs ; ils assument en de telles occasions des tâches de formation et d’encadrement des forces locales, de gestion des crises et de police militaire. La création du Centre d’excellence pour les unités de police de stabilité, institution très appréciée, a offert une contribution des plus précieuses à la consolidation de la passerelle que jette le corps des carabinieri entre secteur civil et secteur militaire.

LE COLLÈGE DE DÉFENSE DE L'OTAN

La délégation a profité de sa présence à Rome pour visiter le Collège de défense de l’OTAN (NDC), établissement fondé en 1951 par le président Eisenhower et destiné à former des officiers aux tâches de commandement dans le contexte de l’Alliance. Les activités du Collège comportent trois volets : enseignement (dont le renommé cours supérieur), ouverture (vers les pays partenaires et les pays tiers) et la recherche (publications et conférences). Diverses nouvelles initiatives, telles que le programme de la "Faculté du Moyen-Orient", ont montré que le NDC continuait à évoluer pour s’adapter aux défis actuels. Son commandant, le général de corps d’armée Wolf Dieter Löser, a estimé que les restrictions budgétaires qui touchaient l’enseignement militaire ajoutaient encore à la valeur de l’établissement en tant qu’initiative de « défense intelligente », puisqu’il mettait en commun les ressources provenant de nombreux pays. Il a invité les autorités nationales compétentes, d’une part, à veiller à ce que soient envoyés au Collège les « bons » étudiants, autrement dit, ceux qui possèdent un grand potentiel pour le commandement, et, d’autre part, à continuer à financer les postes des enseignants et des chercheurs, compte tenu des résultats exceptionnels des uns et des autres en leur qualité de membres du personnel de l’établissement. Enfin, la délégation a engagé un débat animé avec Karl-Heinz Kamp, chef de la division de la recherche, au sujet de la politique nucléaire de l’OTAN.

Respectueusement soumis,

L’honorable sénatrice Raynell Andreychuk
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)