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REGS Rapport du Comité

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Le 23 mars 2000

Le Comité mixte permanent d’examen de la réglementation a l’honneur de présenter son

DEUXIÈME RAPPORT

(Rapport no 66)

Conformément à son ordre de renvoi, l’article 19 de la Loi sur les textes réglementaires, L.R.C. 1985, ch. S-22, le Comité mixte désire attirer l’attention des Chambres sur le paragraphe 36(2) du Règlement de pêche de l’Ontario de 1989, enregistré sous le DORS/89-93.

Le paragraphe 36(2) de ce Règlement Règlement prévoit ce qui suit :

36(2) Il est interdit au titulaire d’un permis de pêche commerciale d’enfreindre les conditions de son permis.

Cette disposition a été décrétée afin que le non-respect d’une condition d’un permis constitue une infraction à la Loi sur les pêches, L.R.C. 1985, CHCh. fF-14. L’article 78 de la Loi prévoit quant à lui ce qui suit :

78. Sauf disposition contraire de la présente loi, quiconque contrevient à celle-ci ou à ses règlements commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité :

a) par procédure sommaire, une amende maximale de cent mille dollars lors d’une première infraction ou, en cas de récidive, une amende maximale de cent mille dollars et un emprisonnement maximal d’un an, ou l’une de ces peines;

b) par mise en accusation, une amende maximale de cinq cent mille dollars lors d’une première infraction ou, en cas de récidive, une amende maximale de cinq cent mille dollars et un emprisonnement maximal de deux ans, ou l’une de ces peines.

Les conditions d’un permis ne constituent pas des dispositions de la Loi ou du Règlement, et le non-respect de ces conditions les enfreindre ne constitue pas une infraction à la Loi ou à l’un de ses règlements au sens de l’article 78 de la Loi. L’inclusion dans le Règlement de pêche de l’Ontario de 1989 d’une interdiction générale d’enfreindre les conditions d’un permis vise à déclencher l’application de l’article 78 de la Loi. Bien qu’une personne contrevenant aux conditions d’un permis ne soit pas passible des peines énoncées dans la Loi, une fois le paragraphe 36(2) du Règlement promulgué, cette personne serait responsable d’une violation du paragraphe 36(2) du Règlement. Ce paragraphe 36(2) vise donc uniquement à combler le fossé qui existe entre la violation des conditions d’un permis et les peines prévues dans la Loi. En fait, cette disposition réglementaire cherche à faire indirectement ce qui ne pourrait être fait directement, à savoir imposer une responsabilité criminelle pour une violation des conditions d’un permis.

2.Il ne fait aucun doute qu’une disposition réglementaire qui prescrit des peines ou crée des infractions doit être autorisée expressément par le Parlement. C’est incontestable. Or, la Loi sur les pêches ne contient aucune autorisation expresse de prendre des dispositions réglementaires créant des infractions et on ne saurait dire que ce pouvoir s’y retrouve par implication nécessaire. et on En fait, la Loi prévoit elle exactement le contraire. Premièrement, les actes qui constituent des infractions en vertu de la Loi sur les pêches sont énoncés dans le texte de la Lloi même, et il faut présumer que si le Parlement avait voulu conférer à son délégué le pouvoir d’allonger cette liste d’infractions, il l’aurait fait expressément explicitement dans la Loi. Deuxièmement, la Loi confère le pouvoir de prescrire par règlement la suspension et la révocation des permis, ce qui indique clairement les peines au moyen desquellesprévues par le Parlement pour le non-respect des conditions d’un permis. entendait que l’on sévisse contre de tels actes. De plus, le fait qu’il ait conféré ce pouvoir fait qu’on ne peut plus soutenir que le pouvoir de créer des infractions est essentiel à la gestion et à la surveillance judicieuses des pêches en eaux côtières et internes.

3. Contrairement à la position qu’il défendait au début, le ministère des Pêches et des Océans admet maintenant que la Loi sur les pêches n’autorise pas le gouverneur en conseil à créer des infractions par règlement, mais le ministre n’en continue pas moins , apparemment sur le conseil du ministère de la Justice, de soutenir soutenir que le paragraphe 36(2) est valide. Même si le ministère a déjà indiqué que le paragraphe 36(2) créait « l’infraction d’enfreindre les conditions d’un permis », on affirme maintenant que cette disposition ne crée pas d’infraction, « En termes simples, il soutient en substance que ces dispositions ne créent pas d’infractions, mais prescrivent simplement une norme de conduite dont la violation peut donner lieu à des poursuites aux termes de l’article 78 de la Loi ». On a aussi soutenu que la disposition établissait une « interdiction ». La « norme de conduite » imposée au paragraphe 36(2) du Règlement consiste en l’obligation de respecter les conditions d’un permis. Or, comme l’article 78 de la Loi prescrit, quant à lui, qu’on commet une infraction quand on contrevient au Règlement, l’infraction consisterait, en droit strict, à contrevenir à l’article 78 de la Loi et non à enfreindre les conditions d’un permis.

Le Comité juge fallacieux l’argument voulant que le paragraphe 36(2) du Règlement impose simplement une « norme de conduite ». Si ce n’était du paragraphe 36(2) du Règlement, le titulaire d’un permis qui enfreindrait les conditions de celui-ci ne pourrait pas être poursuivi au criminel. De plus, les exigences à respecter figureraient non pas dans le Règlement, mais dans le permis puisqu’il s’agirait de ses conditions. L’unique objet du paragraphe 36(2) du Règlement est de rendre le non-respect des conditions d’un permis, qui ne sont pas des exigences législatives, punissable comme s’il s’agissait d’exigences de la Loi. Ne pas tenir compte de ce fait équivaut à ne pas tenir compte de l’objet et de l’effet clairs de cette disposition.

Bien sûr, quelle que soit la façon dont on choisisse de caractériser les paragraphes 36(2) et 36.1(3) du Règlement, il demeure que le pouvoir d’adopter cettes interdictions doit être conféré à l’article 43 de la Loi sur les pêches. Le ministre le reconnaît explicitement. L’établissement par un délégué Adopter d’une interdiction visant à assortir la violation de conditions imposées dans l’exercice d’un pouvoir administratif des mêmes peines que le Parlement a prévues prévues pour une infraction aux règles imposées dans l’exercice d’un pouvoir législatif revient à exercer un pouvoir législatif permettant d’adopter des règles juridiques de fond qui doit être autorisé par une , et pour ce faire, il faut d’abord pouvoir démontrer l’existence d’une disposition habilitante claire et précise. Or, aucune des dispositions de l’article 43 de la LoiLoi, sur lesquelles le ministre se fonde, ne confère cette habilitation. Les pouvoirs accordés au gouverneur en conseil concernant les permis sont le pouvoir « concernant la délivrance, la suspension et la révocation des licences, permis et baux » (alinéa 43 f)) et « concernant les conditions attachées aux licences, permis et baux » (alinéa 43 g)). À première vue, l’alinéa 43 g) peut paraître pertinent, mais sa version française montre clairement que cette disposition concerne l’établissement des conditions des permis eux-mêmes. Bien sûr, le paragraphe 36(2) ne constitue pas une condition d’un permis, mais bien une interdiction réglementaire. Enfin, l’alinéa 43 a) a aussi été invoqué par le ministre. Cette clause habilitante autorise le gouverneur en conseil à prendre des règlements « concernant la gestion et la surveillance judicieuses des pêches en eaux côtières et internes ». Ce pouvoir réglementaire général n’est pas suffisamment spécifique pour justifier une disposition comme celle qui est contestée ici.

Il semblerait que la position du ministre repose sur une méprise fondamentale selon laquelle le pouvoir réglementaire , conféré aux fins deconcernant la gestion et de la surveillance judicieuses des pêches en eaux côtières et internes (alinéa 43a)), de prendre des règlements régissantconcernant la délivrance, la suspension et la révocation des licences, permis et des baux (alinéa 43f)) et régissant concernant les conditions attachées aux auxquelles les licences, permis et les baux peuvent être délivrés (alinéa 43g)) englobe nécessairement le pouvoir de punir le non-respect l’infraction auxdes conditions des permis comme s’il constituait une infraction à la Loi. Aux yeux du ministre, on ne peut imposer une « norme de conduite » que si la violation de cette norme est passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement. Mais l’attribution d’un pouvoir réglementaire prévoyant la suspension et la révocation des permis n’indique-t-il pas clairement le genre de sanctions dont le Parlement entendait assortir la violation des conditions des permis? Le ministère des Pêches et des Océans a d’abord soutenu en substance que que le pouvoir de prendre des règlements régissant la suspension et la révocation des permis « n’annulerait pas les dispositions de la Loi relatives aux infractions et aux peines, et que le titulaire qui enfreindrait une des conditions de son permis pourrait le conserver et payer une amende pour cette au titre de la violationviolation ».  Mais pourquoi le Parlement aurai-t-il expressément prévu la suspension et la révocation des permis s’il considérait que ces peines ne convenaient pas dans les cas de non-respect des ’infraction aux conditions conditions des permis? Pourquoi n’a-t-il pas lui-même prévu que chaque violation des infraction aux conditions conditions d’un permis constitue une infraction à la Loi? L’article 78 de la Loi prévoit que contrevenir aux dispositions de la Loi ou de ses règlements constitue une infraction, mais il ne dit absolument rien des conditions des permis. À notre avis, c’est parce qu’un permis est un document administratif et que les personnes qui enfreignent les conditions de tels documents s’exposent habituellement à des sanctions administratives. En l’absence d’une autorisation législative claire, On estime en général qu’il neil ne convient pas de considérer l’infraction àle non-respect des documents administratifs comme des infractions susceptibles d’être sanctionnées au pénal.une infraction aux lois.

LeDans sa lettre, le ministre des Pêches et des Océans a aussi tenté de s’appuyer sur s’appuie également sur l’article 9 de la Loi, lequel lui interdit de suspendre ou de révoquer un permis si une procédure prévue à la Loi a été engagée contre le titulaire à l’égard des opérations visées par le permis. Selon le ministre, cela indique que le Parlement voulait que les titulaires qui enfreindraient les conditions de leur permis puissent être poursuivis pour infraction à la LoiLoi. En réalité, cette disposition signifie exactement le contraire. Chacun sait que, dans certaines circonstances, tel geste enfreignant les conditions d’un permis enfreindra aussi la LoiLoi ou le RèglementRèglement. C’est dans ces cas-là que l’article 9 de la LoiLoi s’appliquera. Mais il faut lire cet article de concert avec l’article ans le contexte de l’article 79.1 de la LoiLoi, lequel prévoit qu’en cas de déclaration de culpabilité pour une infraction à la LoiLoi commise dans l’exercice d’activités régies par un permis, le tribunal peut, en sus de toute autre peine infligée, révoquer ou suspendre le permis et interdire au titulaire de présenter une nouvelle demande de bail ou de permis pendant la période qu’il estime indiquée. Lorsque l’infraction auxle manquement aux conditions d’un permis constitue aussi une infraction à la LoiLoi ou au RèglementRèglement, l’article 9 de la LoiLoi oblige le ministre à choisir entre suspendre ou révoquer le permis, et poursuivre le titulaire. S’il opte pour les poursuites, seul le tribunal peut alors décider de suspendre ou de révoquer le permis à titre de peine supplémentaire. En fait, cCes dispositions montrent de plus que le Parlement entendait établir une distinction entre enfreindre les conditions d’un permis et contrevenir à la LoiLoi ou au RèglementRèglement. Or, le but des dispositions du RèglementRèglement que le Comité conteste est d’éliminer complètement cette distinction.

En résumé, aux termes des dispositions contestées, le faitle paragraphe 36(2) vise à faire en sorte que le non-respect des d’enfreindre les conditions conditions d’un permis constitue dorénavant une infraction. Toutefois, le Parlement a déjà prescrit, à l’article 78 de la LoiLoi, que seule la contravention àla violation de la LoiLoi ou dau RèglementRèglement constitue une infraction. S’il avait voulu que la contravention violation aux des conditions d’un permis constitue une infraction, on peut présumer qu’il l’aurait indiqué dans la LoiLoi. Les paragraphes 36(2) et 36.1(3) du RèglementRèglement ne sontn’est rien d’autre qu’une manœuvre dont l’objet est que la contraventionvisant à ce que les violations des aux conditions d’un permis, qui sont des exigences administratives, soient traitées comme si elles constituaient des manquements une infraction à à des exigences législatives. Que cela revienne ou non à créer une infraction, il demeure que la Loi sur les pêches ne contient pas d’habilitation le fait est que le exprès et obligatoireclaire et explicite permettant de prendre une telleces disposition.s brille par son absence. Et la lettre du ministre n’est guère plus qu’une redite des arguments que ses fonctionnaires avaient déjà fait valoir et que le Comité a étudiés et rejetés.

Si le ministère estime que lesla dispositions contestées est jugée sont nécessaires pour la bonne gestion des pêches, il faudrait demander au Parlement de modifier la Loi doit veiller à ce que la Loi soit modifiée de manière à faire une infraction du non-respect des conditions d’un permis. On ne peut renoncer aux habilitations légales requises parce que les responsables de l’application d’une loi jugent qu’une disposition est nécessaire sur le plan administratif. Cela est d’autant plus vrai quand c’est la liberté de la personne qui est en jeu. En effet, il est primordial de mentionner que la promulgation du paragraphe 36(2) permettrait au gouverneur en conseil de faire de la violation des conditions d’un permis une infraction qui serait passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement. Dans la Loi sur les pêches, le Parlement a expressément réservé ces sanctions pénales au non-respect des exigences législatives précisées dans la Loi ou les règlements afférents. On ne trouve pas actuellement dans la Loi l’habilitation claire et explicite qui est requise pour justifier l’établissement d’une disposition réglementaire visant à étendre l’application des dispositions pénales prévues au non-respect d’exigences imposées dans l’exercice d’un pouvoir administratif. En adoptant le paragraphe 36(2) du Règlement de pêche de l’Ontario de 1989, le gouverneur en conseil tente de faire indirectement ce que la Loi ne lui permet pas de faire directement, soit étendre l’application de l’article 78 de celle-ci à la violation des conditions d’un permis.

Comme le Comité l’a mentionné dans un rapport au Parlement en 1987 : « Tout le monde est au courant que le cadre légal actuel comporte des lacunes qui empêchent une gestion moderne de nos ressources halieutiques. Comme la loi ne lui permet pas de remplir les exigences d’une gestion moderne, l’exécutif se voit forcé d’avoir recours à des techniques réglementaires d’une validité douteuse afin de répondre à ces besoins. Bien qu’il reconnaisse ces difficultés, votre Comité ne considère pas qu’elles justifient un abus persistant et délibéré des pouvoirs réglementaires conférés par le Parlement ».

Le Comité mixte signale que le paragraphe 36(2) du Règlement de pêche de l’Ontario de 1989 n’est pas autorisé par les dispositions de la législation habilitante, empiète indûment sur les droits et libertés de la personne, et utilise de manière inhabituelle ou inattendue les pouvoirs que confère la Loi sur les pêches. Des dispositions similaires au paragraphe 36(2) se retrouvent dans le Règlement de pêche de l’Ontario de 1989 ainsi que dans d’autres règlements pris en vertu de la Loi sur les pêches. Les conclusions de votre Comité s’appliquent également à ces dispositions.

Conformément à l’article 109 du Règlement de la Chambre des communes, le Comité mixte demande au gouvernement de déposer une réponse complète au présent rapport.

lui conférer le pouvoir habilitant requis. Il pourrait alors les reprendre en vertu de ce pouvoir. Il pourrait aussi faire modifier la Loi de manière à y créer, comme on l’aurait fait dans la nouvelle loi proposée, l’infraction consistant à enfreindre les conditions d’un permis. Il ne resterait alors plus qu’à abroger les dispositions du Règlement qui excèdent actuellement les pouvoirs conférés par la Loi.

10. L’adoption de la nouvelle Loi sur les pêches, dans laquelle on créait expressément l’infraction consistant à enfreindre les conditions d’un permis, aurait réglé ce problème. Elle aurait donc rendu inutiles les paragraphes 36(2) et 36.1(3) du Règlement, que le ministère entendait d’abroger éventuellement. Or, la nouvelle loi proposée a bien été présentée lors de deux sessions du Parlement, mais elle n’a jamais franchi l’étape de la première lecture aux Communes. Qui plus est, le ministère a depuis fait savoir, dans le contexte d’autres dossiers, que la nouvelle loi ne sera vraisemblablement pas présentée une troisième fois dans un avenir assez rapproché.

11. Enfin, le ministère a apporté au Règlement de nombreuses modifications qui corrigent la vaste majorité des 38 autres défectuosités signalées pour la première fois à son égard à l’automne de 1994, mais il demeure qu’il n’a toujours pas fait certaines des modifications promises, et il conviendrait que le Comité revienne à la charge à ce sujet.

Un exemplaire des Procès-verbaux et témoignages pertinents (fascicule no 3, deuxième session, trente-sixième législature) est déposé à la Chambre des communes.

Respectueusement soumis

Les coprésidents,

Sénateur Céline Hervieux-Payette

Gurmant Singh Grewal, député