STANDING JOINT COMMITTEE ON OFFICIAL LANGUAGES

COMITÉ MIXTE PERMANENT DES LANGUES OFFICIELLES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 15 mai 2001

• 1530

[Français]

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu (Rougemont, Lib.)): Nous allons commencer, collègues. Aujourd'hui, nous en sommes à la troisième réunion sur l'obligation d'Air Canada de fournir des services dans les deux langues officielles.

Nous accueillons M. Stephen Markey, vice-président, Relations gouvernementales et Affaires réglementales; Mme Michèle Perreault-Ieraci, directrice, Équité en matière d'emploi et Affaires linguistiques, et Mlle Chantal... Je ne me souviens pas de vos coordonnées. Voulez-vous vous présenter?

Mme Chantal Dugas (chef de service, Diversité et Langues officielles): Je suis chef de service, Diversité et Langues officielles.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): D'accord. Soyez la bienvenue.

Monsieur Markey, nous allons vous demander de faire une intervention de 10 à 15 minutes, et ensuite les députés et sénateurs vous poseront des questions. Je vous invite à commencer.

Mme Michèle Perreault-Ieraci (directrice, Équité en matière d'emploi et Affaires linguistiques, Air Canada): Avec votre permission, madame la présidente, c'est moi qui vais faire la présentation d'ouverture.

Madame la présidente, madame, messieurs les députés et sénateurs, au nom d'Air Canada, je vous remercie de l'occasion que vous me donnez aujourd'hui de faire cette présentation. Ma présentation sera très courte. Elle ne dépassera pas six minutes. Je voudrais vous laisser l'occasion de poser toutes les questions que vous avez à l'esprit aujourd'hui.

Voici mon collègue M. Markey, vice-président aux Relations gouvernementales, et ma collègue Chantal Dugas. Quant à notre président, M. Milton, il est à Winnipeg aujourd'hui. C'était l'assemblée annuelle d'Air Canada. Il m'a donc demandé de le représenter et de lui faire un rapport complet le plus rapidement possible sur les discussions qui auront lieu dans cette pièce aujourd'hui.

Je doute que beaucoup de vos invités aient été aussi heureux que je le suis maintenant d'avoir la chance que vous me donnez de jeter un peu de lumière sur tout ce qui s'est dit dans les médias depuis quelques mois concernant les obligations linguistiques d'Air Canada.

M. Rovinescu, notre premier vice-président général, a réitéré l'engagement d'Air Canada, la semaine dernière, face à ses obligations linguistiques devant le Comité des transports. Quant à M. Milton, dont je relève directement, il se trouve à être le premier responsable des affaires linguistiques à Air Canada. Ce sont deux assurances des deux plus hauts dirigeants d'Air Canada qui m'évitent peut-être de réitérer ce même genre d'engagement moi-même aujourd'hui.

Ce que j'aimerais tenter de faire, cependant, cet après-midi, c'est rectifier les informations fausses et incomplètes qui ont circulé dans les médias depuis le début de l'année. Je ne prendrai pas beaucoup de votre temps pour vous permettre de poser vos questions.

Je n'ai absolument pas l'intention de faire valoir qu'Air Canada a une feuille de route parfaite, mais j'ai passé la plus grande partie de ma carrière à Air Canada à oeuvrer pour la justice et les droits, notamment les droits des francophones. En toute justice pour Air Canada, cette fois-ci, il conviendrait de reconnaître ses efforts et ses résultats.

Or, ces derniers mois, on a fait plusieurs procès d'intention à Air Canada, et je suis heureuse que le Conseil du Trésor ait déjà remis quelques pendules à l'heure la semaine dernière. Quant à moi, je voudrais faire état des attentes, parfois contradictoires, qu'on peut avoir à l'endroit d'Air Canada et qui ne tiennent pas toujours compte des circonstances dans lesquelles la société évolue maintenant.

Ainsi, je ne vous cacherai pas que l'intégration de Canadien et de ses employés, en très grande majorité unilingues, aura un impact sur la capacité bilingue d'Air Canada. Il faut savoir qu'à la demande du gouvernement, Air Canada a accepté de reprendre tous les employés de Canadien. Or, Canadien International n'était pas soumise à la Loi sur les langues officielles. Canadien International n'avait pas de politique d'embauche de personnel bilingue. Le nombre des employés d'Air Canada est passé, depuis le début de l'année, de 23 000 à 40 000 employés. La dilution de la capacité bilingue était inévitable. Mais en reprenant le personnel de Canadien, Air Canada sauvait des milliers d'emplois.

Nous n'avons cependant pas attendu que la loi C-26 soit promulguée pour nous donner des moyens de faire face à la situation. Les fameux sondages qui ont fait couler tant d'encre au début de l'année dans les journaux comptent parmi ces moyens que nous avons pris. Je pense bien que nous y reviendrons.

• 1535

En premier lieu, dès janvier 2000, Air Canada a multiplié les rencontres avec Canadien pour évaluer très exactement ses ressources linguistiques, afin d'organiser ensuite des programmes de formation linguistique adaptés aux besoins immédiats. Comme résultat, des dizaines d'agents de bord de Canadien et, d'ailleurs, des transporteurs régionaux, sont présentement, depuis septembre 2000, retirés du service et remplacés par d'autres agents de bord pendant qu'ils passent leur test linguistique et suivent une formation linguistique.

Vous m'excuserez de parler de gros sous, mais ce sont des centaines de milliers de dollars qui passent actuellement en formation linguistique, exclusion faite, d'ailleurs, des coûts de remplacement des agents qui sont en formation. C'est un programme qui s'étendra sur au moins quatre ans et qui coûtera au bas mot 12 millions de dollars. C'est le coût de la formation linguistique des employés actuellement unilingues dans l'ensemble des ressources d'Air Canada.

Deuxièmement, les services d'affectation des personnels au sol et en vol ont été mis au courant de la situation à laquelle ils allaient devoir faire face, s'ils le devaient, pour se préparer à déployer un personnel de service en fonction des besoins linguistiques. Il est bon de noter ici qu'Air Canada a toujours affecté des agents de bord bilingues sur tous ses vols, que les sondages aient déterminé qu'il y avait 5 p. 100 de demande importante ou non. À l'heure actuelle, je peux vous garantir qu'Air Canada a du personnel bilingue sur tous ses vols, sur tous les itinéraires qu'elle a au pays et internationalement: tous ses vols.

Notre intention a toujours été de continuer à assurer cette présence bilingue universelle autant qu'on pourra le faire. Je dois vous dire, cependant, qu'encore aujourd'hui, la fusion des personnels naviguant d'Air Canada et de Canadien n'est pas complétée, ce qui revient à dire que nous ne pouvons pas mélanger les équipages encore aujourd'hui. Si vous prenez un vol assuré par un avion de Canadien demain, il pourrait arriver qu'il n'y ait pas de personnel bilingue à bord.

La fusion des listes d'ancienneté est l'un des problèmes les plus complexes qui soient. Le gouvernement avait prévu au départ trois ans pour que les vols de Canadien soient en mesure d'offrir le service bilingue. Nous avons commencé à travailler il y a plus d'un an déjà, six mois avant la promulgation de la loi, pour rendre tous ces vols bilingues bien avant le délai de trois ans.

Ces mêmes mesures et d'autres ont été prises également avec les transporteurs régionaux, à telle enseigne que tout nouveau pilote actuellement embauché par Air Nova est nécessairement bilingue, parce que les pilotes d'Air Nova commencent leur carrière sur des appareils qui s'appellent des Beechcraft. Ces appareils sont exploités sans agent de bord, avec seulement deux pilotes et, pour respecter les engagements en matière de bilinguisme, il faut qu'au moins un des pilotes à bord soit capable de faire les annonces ou d'offrir quelque service qui soit requis en français. Ce n'était pas évident; on y a quand même pensé. Tous les pilotes d'Air Nova embauchés aujourd'hui sont bilingues lors de leur embauche.

Je sais aussi que vous voudrez parler de représentation équitable. Je suis prête à déclarer dès maintenant qu'Air Canada n'a pas de problème de sous-représentation de francophones, ni en général ni parmi ses pilotes, et je serai heureuse de vous expliquer pourquoi et comment.

Dans tous les domaines du service à la clientèle, que ce soit la ponctualité, les bagages, les files d'attente ou les services bilingues, il y a toujours place pour l'amélioration. La tolérance zéro, cependant, n'est pas pour ce monde. L'important—c'est ce que j'aimerais en tout cas—c'est que quand vous repartirez d'ici cet après-midi, vous vous disiez qu'Air Canada n'a jamais volontairement négligé ses obligations linguistiques, qu'elle n'a jamais rien tenté pour les réduire, comme cela s'est tellement dit dans les médias au cours des derniers mois, et qu'au contraire, les événements récents, la loi C-26 et la fusion, ont plutôt démontré qu'elle est proactive quand la situation l'exige: lacunes, soit, mais désengagement, jamais.

Je vous remercie de votre attention. Nous sommes tous les trois à votre disposition pour répondre à vos questions.

La présidente: Monsieur Sauvageau, voulez-vous commercer?

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Bonjour, monsieur, mesdames.

D'abord, je suis très heureux de votre présentation. Si tout va bien, comme vous le dites, il doit y avoir quelque chose qui ne va pas bien. Vous avez quand même un problème d'image, n'est-ce pas? À tout le moins, on va se l'accorder.

Je tiens à vous dire que vous nous offrez très gentiment cette carte lorsqu'on est élu député. Il y a un numéro de téléphone en arrière pour obtenir de l'information. À Montréal, c'est le 393-3333. On répond uniquement en anglais; je l'ai essayé. Vous pouvez me dire que je ne suis pas tombé sur la bonne journée ou sur la bonne personne, mais c'est quand même arrivé.

• 1540

À la première page de votre présentation, vous nous dites que M. Untel et M. Untel nous garantissent qu'ils vont respecter la loi et qu'on n'a pas de problème. Dans La Presse du 28 mars 1985—il y 16 ans de cela—Pierre Jeanniot avait promis que le pourcentage de francophones chez Air Canada serait de 24 p. 100 sous peu. Sous peu, c'est tout à fait relatif, et Air Canada a fourni à la commissaire aux langues officielles, en 1997 et en 1998, des chiffres selon lesquels il y avait 16,7 p. 100 de francophones.

Peut-on se fier aux belles promesses quand vous nous dites de vous faire confiance en ce qui a trait à l'équité envers les francophones, et est-il vrai que vous avez fourni des chiffres qui indiquent que le pourcentage est de 16,7 p. 100?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je suis vraiment très heureuse de répondre à cette question. La question qui est posée à Air Canada, celle que nous posons à nos employés quand ils entrent chez Air Canada et que le Conseil du Trésor nous demande de poser est la suivante: à quel groupe linguistique vous identifiez-vous, au groupe francophone ou au groupe anglophone? Seize pour cent de nos employés ont répondu qu'ils s'identifiaient au groupe francophone. Il y a énormément d'employés à Air Canada qui ne répondent pas à cette question-là, et il y a peut-être plusieurs raisons à cela. Celle que je connais le mieux et que je peux donner avec assurance, c'est qu'on a beaucoup, beaucoup d'employés dont la langue maternelle n'est ni le français ni l'anglais. En tant que compagnie internationale, on a des employés d'origines diverses. Ces employés-là s'identifient à leur propre langue maternelle. Ils sont incapables de répondre à cette question. Mais chez nous, il y a une deuxième question qu'on pose à tous nos employés pour une autre raison: on leur demande quelle est leur langue maternelle. Tous répondent à cette question; il n'y a pas d'inconnus. Aujourd'hui, 23 p. 100 des employés d'Air Canada ont le français comme langue maternelle.

M. Benoît Sauvageau: Est-ce que c'est ce que vous avez envoyé à la commissaire aux langues officielles?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Non, ce qu'on envoie...

M. Benoît Sauvageau: Pas à la commissaire, mais au Conseil du Trésor?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, excusez-moi. Ce qu'on envoie au Conseil du Trésor, c'est la réponse à la question que le Conseil du Trésor nous demande de poser: quel est le pourcentage d'employés qui s'identifient à l'une ou l'autre des langues officielles? La réponse à ça, c'est 16 p. 100.

M. Benoît Sauvageau: Quel est le processus de plaintes et le suivi que vous en faites chez Air Canada? Mettons que je prends l'avion. Bien sûr, il y a du personnel bilingue sur tous les avions, sauf celui que j'ai pris récemment, malheureusement. Si je veux faire une plainte, quel est le processus de cette plainte et quel est le processus de suivi de cette plainte?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je ne sais pas quels sont les vols que vous avez pris dernièrement, mais...

M. Benoît Sauvageau: Montréal—Toronto et Toronto Island, et l'agent de bord n'était pas capable de comprendre les mots «un verre d'eau».

Mme Michèle Perreault-Ieraci: D'accord. Vous étiez sur un vol d'un transporteur régional. Sur les vols d'Air Canada, il y des agents bilingues sur tous les vols.

M. Benoît Sauvageau: Lors d'un vol entre Singapour et Vancouver, je peux me faire servir en français sur Singapore Airlines. Sur un vol d'Air Canada de Vancouver à Montréal, je ne le pouvais pas.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Les annonces, en général, sont faites dans les deux langues.

M. Benoît Sauvageau: Sur cassette, oui.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: En tout cas, je pense...

M. Benoît Sauvageau: Je m'excuse. Quel est le processus de plaintes?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Les plaintes nous arrivent par l'intermédiaire de la commissaire aux langues officielles. Ces plaintes sont examinées chez nous. Elles sont ensuite communiquées à la direction, qui est directement responsable des employés qui n'auraient pas rendu un service à la hauteur de nos normes. Nécessairement, une enquête est faite, et la réponse qu'on doit envoyer à la commissaire dans un délai prescrit doit comprendre les résultats de l'enquête et les mesures correctives que la direction locale va prendre ou a déjà prises pour apporter un correctif.

Si on a été capables d'identifier très exactement la personne qui n'a pas rendu le service à la hauteur de nos normes, ça nous arrange beaucoup, parce qu'on est capables de retourner à cette personne et d'apporter un rectificatif auprès de cette personne-là tout de suite.

Si on n'a pas de nom et qu'on n'est pas capables d'identifier la personne qui n'a pas rendu le service, ça devient un petit peu plus compliqué. On fait une communication plus générale. Je vous donne un aperçu très général de la façon dont les plaintes sont traitées.

• 1545

[Traduction]

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Sauvageau, vous pouvez poser votre autre question si vous le voulez.

M. Benoît Sauvageau: VIA Rail avait mis en place un principe qui était intéressant concernant les plaintes. Dans les petits bancs, il y avait des formulaires de plaintes sur lesquels on pouvait écrire le nom de la personne, etc. Chez Air Canada, étant donné que vous faites l'objet d'un nombre assez important de plaintes et que vous êtes un joueur important là-dedans, ne croyez-vous pas qu'il serait plus simple de fournir aux passagers un petit formulaire en quatre versions énonçant les droits qui doivent être respectés dans l'avion? On en a parlé l'autre jour au Conseil du Trésor. Ça ne semblait pas clair pour les membres du comité ou pour les témoins. Ce formulaire serait en quatre exemplaires, un pour la commissaire aux langues officielles, un pour vous et les deux autres pour les autres si nécessaire. Ainsi, le passager dans l'avion saurait quels sont ses droits, dans un premier temps, et, dans un deuxième temps, il saurait à qui s'adresser pour faire une plainte. On nous disait que si c'était une question de sécurité, on devait s'adresser à Transports Canada, que si c'était une question de service, on devait s'adresser à Air Canada et que si c'était autre chose, on devait s'adresser à la commissaire aux langues officielles. Ça ne semblait pas clair.

Seriez-vous d'accord qu'on mette à bord des avions un formulaire uniforme, où les droits seraient énoncés d'un côté et où il y aurait un formulaire de plainte de l'autre côté, avec l'adresse, etc.? De cette façon, ce serait plus facile et plus uniforme pour vous.

M. Michèle Perreault-Ieraci: Nous avons déjà des fiches de commentaires à bord de tous les avions. Je suis d'accord avec vous qu'elles ne sont pas dans les pochettes, mais si vous avez besoin de faire des félicitations ou de faire une plainte quelconque, l'agent de bord vous remettra une fiche de commentaires.

M. Benoît Sauvageau: Est-ce qu'il serait possible de mettre cette fiche dans les petites pochettes?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, certainement. Je trouve que c'est une bien bonne idée. Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur Sauvageau.

Sénateur Gauthier.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ontario, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je veux revenir à la partie VI de la loi, où on parle de la représentation équitable. Je vous ai écoutés attentivement. M. Sauvageau a posé une question sur les soi-disant statistiques qu'on nous donne concernant la participation des francophones et des anglophones dans l'organisation d'Air Canada. Tout ce qu'on a comme information, c'est le rapport annuel du commissaire aux langues officielles.

Quand je regarde les statistiques de 1999—pas celles d'aujourd'hui, alors que vous avez 40 000 employés—je vois vous aviez à cette époque 22 000 employés dont 45,7 p. 100 se disaient anglophones. C'est ce que je vois dans le rapport: anglophones 45,7 p. 100 ou 10 043; francophones, 16,7 p. 100; langue inconnue, 37,7 p. 100. Il y a 8 294 personnes qui travaillent chez Air Canada et dont on ne sait pas si elles sont francophones ou anglophones.

Vous avez répondu à M. Sauvageau que vous aviez des allophones, comme on les appelle chez nous, des gens qui parlent une autre langue. Là n'est pas la question. Air Canada est soumise à la Loi sur les langues officielles. Je ne parle pas des allophones. Je parle des Canadiens d'expression française et d'expression anglaise qui travaillent chez vous. Ne les mélangez pas avec les allophones. Je ne leur enlève rien. Ce sont de bons techniciens, de bonnes personnes, mais la Loi sur les langues officielles s'applique aux francophones et aux anglophones.

Comment se fait-il que les statistiques que vous soumettez au Conseil du Trésor soient aussi incomplètes, pour être poli? Il y a plus du tiers des gens qui travaillent chez vous dont on ne sait pas s'ils sont francophones ou anglophones. La question principale est que la loi vous oblige à vérifier l'embauche afin d'assurer une répartition équitable. De cela découle un autre principe, celui de la langue de travail. Si le patron est anglophone, évidemment, il s'attend à ce qu'on lui parle en anglais.

Je pourrais vous poser plusieurs questions là-dessus, mais je veux seulement que vous répondiez à celle-ci: comment expliquez-vous ce 37,7 p. 100? J'ai écouté ce que vous avez dit à M. Sauvageau. Ce n'est pas satisfaisant.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Monsieur le sénateur, les employés répondent à cette question s'ils le veulent. Quand on s'est rendu compte qu'il y avait autant d'inconnus pour cette question-là, on a demandé à tous nos services de personnel de dire aux gens qui remplissent ce questionnaire, lors de l'embauche, qu'ils ont omis de répondre à cette question et de leur demander de réparer cette omission. S'ils refusent, on ne peut pas les forcer à le faire.

• 1550

Ce à quoi vous me faites penser aujourd'hui, c'est qu'à l'avenir, étant donné ce haut taux d'inconnus à cette question précise, je pense que nous allons commencer à fournir au Conseil du Trésor des renseignements sur la langue maternelle également.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je suis bien conscient de tout ça, mais ça fait 30 ans que je suis ici et ça fait 20 ans qu'on pose la même question. La question était ciblée: les francophones ont-ils leur juste place à Air Canada? Les statistiques que nous avons indiquent que ce n'est pas le cas. Elles nous indiquent qu'il y a un manque à cet égard, et vous me répondez que c'est parce que les employés ne répondent pas à la question. Je ne suis pas fou et je me dis que quand 37 p. 100 des gens refusent de dire quelle langue ils parlent dans un pays qui a deux langues officielles, c'est sérieux.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: En fait, monsieur le sénateur, ils ne nous disent pas à quel groupe ils s'identifient. Si ce sont des allophones, ils s'identifient peut-être à la langue italienne ou à la langue chinoise; ils ne s'identifient ni à l'une ni à l'autre des langues officielles. Dans l'est du pays, ces gens-là sont souvent éduqués dans les deux langues à la fois, et ils ne s'identifient pas plus à l'une des langues qu'à l'autre. C'est l'explication qu'on a de tout ça aujourd'hui. Moi, je me fierais bien plus à 23 p. 100 de langue maternelle qu'à 16 p. 100 d'identification.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je comprends votre situation, mais j'ai du mal à l'expliquer aux Canadiens qui se plaignent. J'ai vécu certaines situations sur Air Canada, dont je ne parlerai pas aujourd'hui, où des unilingues francophones du nord de l'Ontario allaient à Montréal pour se faire soigner. Dans l'avion, il n'y avait pas une seule personne qui pouvait leur donner un verre d'eau en français. Les personnes en question étaient unilingues francophones et venaient du nord de l'Ontario. Ça arrive, ça. C'est un exemple que je vous donne.

Nous recevons des plaintes. Il y a des gens qui disent qu'ils ont essayé de se faire servir en français, mais qu'ils n'en ont pas été capables. Vous me répondez que plus du tiers de vos employés ne veulent pas dire s'ils parlent français ou anglais. Ce n'est pas une réponse adéquate. Je m'excuse, mais votre obligation est de vous assurer que votre personnel soit capable de répondre à la clientèle dans l'une ou l'autre des deux langues officielles. Aujourd'hui, vous m'avouez que vous n'êtes pas capables de le faire parce que les gens ne vous disent pas quelle langue officielle ils utilisent.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je peux ajouter, monsieur le sénateur, que dans le cas du personnel en contact avec le public, Air Canada n'embauche que des employés bilingues. Si vous me parlez des vols du nord de l'Ontario, vous me parlez des transporteurs régionaux d'Air Canada. Le statut des transporteurs régionaux d'Air Canada a été clarifié par la Loi C-26. Vous me parlez en l'occurrence d'Air Ontario, si c'est un vol du nord de l'Ontario. Cette compagnie-là, selon notre interprétation à nous, n'avait pas d'obligation linguistique jusqu'à l'adoption de C-26. Jusqu'à ce moment-là, vous avez raison, elle avait peu de personnel bilingue. Mais depuis juillet dernier, des efforts énormes sont faits pour rendre bilingues tous ces employés.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: On va regarder les statistiques l'année prochaine. Est-ce que vous êtes en train de me dire que la situation sera meilleure l'an prochain?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Étant donné les efforts de formation linguistique qui sont faits présentement, on prévoit que d'ici la fin de 2001, 440 agents de bord des transporteurs régionaux auront reçu une formation linguistique. Donc, les chiffres ne pourront qu'être meilleurs l'année prochaine.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: J'ai une dernière question.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Gauthier, votre temps est écoulé. Vous reviendrez.

Monsieur Godin.

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, madame la présidente. Soyez les bienvenus au comité.

Je peux vous dire que personnellement, je ne suis pas satisfait d'Air Canada à bien des égards. On ne fera peut-être pas son procès aujourd'hui, car on est ici pour parler de langues officielles. Je vais juste vous dire que quand on arrive à l'aéroport d'Ottawa, qu'on doit attendre jusqu'à la dernière minute à la porte 8, alors qu'on a rendez-vous avec 500 personnes à Bathurst pour faire un discours, qu'il y a deux portes 8 et qu'on se rend compte qu'on a manqué sa porte, ce n'est pas intéressant. Ça m'est arrivé la semaine dernière. Mais ça ne s'est pas arrêté là. J'ai envoyé une lettre à M. Milton, et c'est celle-ci.

• 1555

On n'est plus dans le nord de l'Ontario, je pense. On est à Ottawa, la capitale nationale. J'allais à Bathurst, au Nouveau-Brunswick, dans la péninsule acadienne, et je suis arrêté à Montréal. Je pense qu'entre Ottawa et Montréal, ce n'est pas le nord de l'Ontario. Toutes les directives données dans l'avion étaient en anglais et nous, les francophones, on s'est amusés avec une cassette. C'est une cassette qui nous a donné l'information.

J'ai déjà posé la question au Conseil du Trésor et au ministère des Transports. Qu'est-ce qui arrive quand l'avion commence à perdre de l'altitude? De quelle cassette viennent les directives à ce moment-là?

Il semble que la réponse doit venir d'Air Canada. On entend le troisième groupe de témoins aujourd'hui. Je ne sais pas si vous allez me dire qu'il y en a un quatrième à qui je dois poser la question. On ne m'a pas encore dit ce qu'un francophone devait faire en cas d'urgence. Il semble qu'Air va seulement nous dire quoi faire en cas d'urgence, mais que quand arrive l'urgence, c'est bien de valeur, mais nous, les francophones, on doit s'organiser. Moi, j'étais là. L'agent de bord parlait seulement en anglais.

Vous connaissez M. Yvon Charbonneau, qui est secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, un bon libéral. Il était derrière moi et je me suis dit que j'allais le prendre comme témoin. Je lui ai dit: viens, mon chum. À la porte, j'ai demandé à l'agent de bord où allait cet avion après. Il faut croire que là, elle n'avait pas de cassette à me donner pour me dire où allait l'avion. Elle a dit:

[Traduction]

Je ne parle pas français.

[Français]

Dans l'avion, quand on a annoncé:

[Traduction]

Vous pouvez ramasser toutes vos affaires au Sky Chef,

[Français]

je me suis dit que c'était bien de valeur, mais que les francophones allaient tous perdre leurs bagages parce qu'il n'y avait pas de cassette en français. C'est ça, le service d'Air Canada.

C'est inacceptable. Inacceptable! Entre Ottawa et Montréal, il y a des millions de personnes. On ne parle plus du tout de 5 p. 100. Ne vous inquiétez pas, j'ai tout compris ce qui s'est passé, mais je plains le pauvre francophone qui aurait été sur l'avion et qui n'aurait absolument rien compris.

Voulez-vous arrêter de faire des tests sur cela? Je vais peut-être vous embêter, mais je vais vous en écrire, des lettres. Ça va continuer. Comment fait-on une plainte? On écrit une lettre au président et on en envoie une copie à Mme Adam, à l'ombudsman, à Mauril Bélanger, à madame... Tout le monde va avoir mes lettres. Je vais continuer jusqu'à ce qu'on ait du service à Air Canada.

Mais ce n'est pas fini. Deux semaines plus tôt, j'arrive à l'aéroport d'Ottawa. Je pense qu'il y a plus d'un million de personnes maintenant à Ottawa, avec l'amalgamation et tout. Ottawa est la capitale du Canada. Il me reste 30 minutes pour me rendre à mon guichet et avoir le service. Quand je commence à parler en français, on me répond:

[Traduction]

Je suis désolée, monsieur, mais je ne parle pas français.

[Français]

Qu'est-ce que je fais? J'attends encore 30 minutes dans une autre ligne pour avoir le service en français et je risque de me retrouver devant un autre anglophones? Je ne vous raconte pas d'histoires. Deux semaines avant ça, la même chose m'est arrivée.

C'est pour ça, madame, que je ne suis pas satisfait du tout de ce que fait Air Canada. Vous pouvez me raconter toutes les histoires au monde, me dire comment vous faites de la formation, etc. Moi, je vous donne des cas spécifiques de vols d'Ottawa à chez nous, en passant par Montréal; pas en passant par Toronto, mais en allant d'Ottawa à Montréal.

Je monte un matin sur l'avion et je m'essaie de nouveau. Sur le vol Montréal-Ottawa, il y a une francophone qui parle l'anglais. Je pense aller m'asseoir devant la porte d'urgence, parce que là il va falloir qu'elle me pose des questions. Elle me dit: «Tu prends la porte et tu la tires dehors.» Je lui demande comment on fait ça. Est-ce que c'est quand l'avion est arrêté? Quand est-ce que tu tires la porte? Elle dit: «Attends mes ordres. C'est moi qui vais te dire quand la lancer.» Si tu ne parles pas ma langue, qu'est-ce qui va arriver? Je veux savoir ce qu'il faut faire en cas d'urgence. Est-ce seulement l'information qu'on nous donne quand on entre, ou si c'est l'information qu'on nous donne en cas d'urgence, quand ont sent qu'on a frappé l'arbre ou qu'on a frappé l'autre bout de la piste?

La manière dont je vous raconte ça est peut-être comique, mais c'est vraiment ce que se passe chez Air Canada. Je veux qu'il y ait des changements. Ça ne marche plus du tout, votre affaire. Je ne veux pas écouter une cassette. Je veux qu'un être humain soit capable de communiquer avec moi pour les 1 100 $ que le gouvernement du Canada donne à toutes les semaines à Air Canada pour que je puisse voyager à bord de ses avions. Je n'ai pas mon billet à 250 $. Je paie 1 100 $. Toute personne qui part de Bathurst pour venir ici devrait être capable, surtout si elle ne parle pas les deux langues... La Loi sur les langues officielles dit qu'une personne doit être capable d'avoir le service dans les deux langues, et on ne l'ajuste pas à certaines occasions.

Il n'y a pas d'excuses. À l'aéroport, tu dois pouvoir te faire servir dans ta langue. Tu as le droit de demander un francophone. Tu attends 30 minutes pour te rendre à ce guichet-là. Ton avion est à la veille de partir.

• 1600

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je veux tout d'abord vous assurer, monsieur Godin, que je suis d'accord avec vous. Je ne prends pas cela de façon comique, pas du tout. J'entends très, très bien ce que vous me dites. Je voudrais redire un petit peu ce que j'ai dit.

Les vols que vous avez pris sont des vols de nos transporteurs régionaux. Ce ne sont pas des vols d'Air Canada. Ces transporteurs régionaux sont clairement soumis à la loi depuis juillet et font en ce moment des efforts invraisemblables, incroyables pour...

M. Yvon Godin: Excusez-moi. Je m'en fiche carrément. Si je suis un francophone, avec la Loi sur les langues officielles au Canada, je n'ai pas à m'embarquer sur un avion et à mettre ma vie en danger. Je sais qu'ils font des efforts, mais ils sont soumis à la loi depuis le mois de juillet. Pourquoi n'ai-je pas pu avoir le service dans ma langue, comme le dit la Loi sur les langues officielles?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je suis d'accord que ces deux compagnies-là, Air Nova et Air Ontario, sont soumises à la loi depuis juillet dernier. Air Nova a 80 p. 100 de personnel bilingue; Air Nova est capable d'offrir un bon service bilingue. Air Ontario n'avait pas beaucoup d'employés bilingues. Ce sont ces employés qu'on est en train de former actuellement. On a aussi des conventions collectives. Ces gens-là, on ne peut pas les mettre à la porte, et vous en conviendrez. Le seul choix qu'on a, c'est de former ces gens-là depuis que la loi impose le bilinguisme à ces entreprises. Et c'est ça qu'on fait à grands coups de budgets, en ce moment. Je vous dis qu'ils seront prêts le plus rapidement possible. Beaucoup ont déjà suivi et réussi ces cours. Ils sont maintenant capables, alors qu'ils ne l'étaient pas il y a six mois, d'offrir le service bilingue. Mais je ne vous cacherai pas qu'il reste des employés unilingues anglais qu'il faut bien mettre quelque part à bord des avions des transporteurs régionaux.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, madame Perreault-Ieraci. Vous reviendrez plus tard si vous le voulez, monsieur Godin.

M. Yvon Godin: En plus de ça, madame la présidente, je vais donner à tout le comité une copie de la lettre que j'ai envoyée au président d'Air Canada.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): D'accord, monsieur Godin.

Sénateur Losier-Cool.

La sénatrice Rose-Marie Losier-Cool (Tracadie, Lib.): Merci, madame la présidente. Soyez les bienvenus.

Je sais qu'Air Canada a été reconnue, au niveau international, comme la meilleure compagnie pour le système de réservations. Mais je suis d'accord avec M. Godin pour ce qui est des vols en provenance de Moncton, au Nouveau-Brunswick. Les mêmes choses me sont arrivées. Je ne peux pas les raconter d'une façon aussi humoristique, mais ce sont des choses qui arrivent, que ce soit dans le service en vol, dans le service au sol ou à la billetterie.

Vous avez donné une réponse à M. Sauvageau concernant le processus de plaintes. J'espère avoir mal compris; j'espère qu'on ne se contentera pas de mettre une fiche d'évaluation dans la pochette. Ce n'est pas suffisant.

Pour moi, tout ça est une question d'image pour Air Canada. Ces nombreuses plaintes qui sont reçues par Air Canada, c'est une question d'image d'Air Canada. Quand on doit écrire quatre, cinq ou six lettres, c'est une question d'image. Il me semble qu'Air Canada pourrait faire mieux. Elle devrait faire mieux.

Les transporteurs régionaux sont très importants pour Air Canada. Vous savez combien il y a de francophones qui voyagent dans l'est du Canada. Je crois qu'il y a là une grosse amélioration à faire. Et il n'y a pas seulement la question des pilotes. Il y a aussi la qualité du français. Vous allez me dire que j'ai le service en français, mais il faut que je me force pour comprendre le français qui est parlé. Il y a aussi la qualité des cassettes. M. Godin n'en a pas parlé. On ne comprend pas ces cassettes.

Tout ça ajoute à la frustration des clients et fait du tort à l'image d'Air Canada. J'ose croire qu'avec ce que vous nous avez présenté aujourd'hui, la situation s'améliorera, mais il y a encore beaucoup à faire et je vous exhorte à le faire pour les francophones. Je suis sûre que vous savez que la Loi sur les langues officielles ne veut pas dire «un petit nombre», ou «là ou le nombre le justifie» ou «5 p. 100». La loi sur les langues officielles veut dire l'égalité.

• 1605

Ce n'est peut-être pas une question. C'est simplement un commentaire, mais je voulais le faire.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Merci beaucoup, madame.

Je prends très au sérieux votre commentaire et je pense que personne autour de cette table n'accorde plus d'importance que moi, après autant d'années, à l'image d'Air Canada. Il y a plusieurs petites choses sur lesquelles j'aurais aimé peut-être apporter mes commentaires, mais je suis sûre que cela va ressortir autrement. Alors, j'en profiterai à ce moment-là, mais je vous remercie infiniment.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Rivest.

Le sénateur Jean-Claude Rivest (Stadacona, PC): Bonjour.

Très souvent, avec les firmes de relations publiques, j'ai une très bonne... [Note de la rédaction: inaudible]. Est-ce que, juridiquement, c'est clair, réglé, définitif que la Loi sur les langues officielles s'applique à ce que vous appelez les transporteurs régionaux?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Il est effectivement très clair maintenant qu'Air Canada est responsable de s'assurer que les transporteurs régionaux offrent des services bilingues sur leurs vols là où il y a une demande. Les transporteurs Air Nova et Air Ontario tombaient sous le coup de la loi en juillet 2000, mais, comme M. Godin le faisait remarquer, ce n'est pas parce que la loi a été passée avant-hier que c'est parfait aujourd'hui, puisqu'on avait du chemin à faire avec ces transporteurs-là. Air BC sera soumise à la loi à compter de juillet de cette année. Ces gens-là aussi suivent des cours de langue en ce moment, et il devrait donc y en avoir un bon nombre de prêts à l'été. Pour ce qui est de Canadian Regional Airlines, ce sera également dans un an, je crois, donc, à partir de cette année.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: C'était ma prochaine question. Vous avez parlé d'Air Nova où il y a 80 p. 100... D'abord, parlons des avions qui partent d'Ottawa. Comme le disait M. Godin, c'est la capitale nationale. Il me semble qu'il y a des priorités là. On devrait s'assurer, dans la gestion du personnel, que that's a must, tout de suite. Ce n'est pas compliqué. Il y a là un bassin qui le justifie, que ce soit pour Air Nova ou un autre.

Quant à Canadian Regional Airlines, je comprends qu'il y a l'intégration, mais il y a des régions au Canada où il y a des francophones qui prennent l'avion. On voudrait avoir un plan d'action. Si vous nous dites que vous allez franciser, donner des cours de langue chez Canadian Regional Airlines, ça va prendre un an, deux ans, trois ans, quatre ans, cinq ans. Il me semble qu'il y a des besoins spécifiques auxquels il faut répondre, par exemple à Ottawa, dans l'est du pays, pour les Acadiens, dans le nord-est, là où sont les francophones. Commencez par là. C'est bien dommage, mais il n'y en a pas beaucoup à Canadian Regional Airlines qui parlent français, mais que ceux qui le parlent soient sur ces vols-là: that's it. Les autres, il faudra les former et étendre les services pour respecter les engagements.

On a l'impression que vous nous dites que vous allez intégrer Canadien, donner des cours de français, mais que c'est très long, que ça va commencer au mois de juillet de l'an prochain, que former une personne en français ne se fait pas en 10 minutes et que ça coûte de l'argent. Mais on ne sent pas qu'il y a une volonté. On peut régler des cas, répondre aux lettres de notre ami M. Godin. C'est très bien, mais on ne sent pas qu'il y a un quelconque plan concret à court, moyen et long terme. C'est sûr que c'est difficile, mais faites Ottawa premièrement, et Bathurst, Moncton, Fredericton, Sault-Sainte-Marie, etc.

Il y a des endroits comme Toronto, par exemple, par où tout le monde au Canada passe. Qu'est-ce qu'on fait à Toronto? C'est important, ça. À Montréal, de façon générale, ça semble aller, mais on ne peut pas négliger Toronto. Ce n'est pas la capitale du Canada, mais tous les francophones du Canada passent par Toronto à un moment donné.

Qu'il y ait un problème sur un vol de nuit entre Yellowknife et Vancouver, on le comprend, mais là où sont les francophones, qu'on donne les services et qu'on sente qu'il y a une préoccupation, une volonté de le faire. Comprenez-vous ce que je veux dire quand je parle d'un plan?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Est-ce que vous avez plus que les relations publiques?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: D'abord, est-ce que je peux vous dire que c'est moi qui ai préparé...

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Vous êtes très bonne en relations publiques.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: ...cette présentation-là, et que je ne suis pas aux relations publiques?

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Congédiez tous les gens des relations publiques à Air Canada et dites-leur de vous prendre. Vous êtes bien meilleure qu'eux.

• 1610

Mme Michèle Perreault-Ieraci: J'ai bien précisé que je n'allais pas vous raconter n'importe quoi, que nous n'étions pas parfaits et qu'il y avait place à de l'amélioration.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Vous ne racontez pas n'importe quoi, mais vous utilisez des euphémismes. Cela me fait penser aux ministres qui parlent des langues officielles. Nous avons fait d'immenses progrès, mais il y a encore des problèmes. Il y a encore des problèmes qui nous intéressent.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, il y a encore des problèmes et oui, il y a des problèmes qui sont plus pressants que d'autres. Je pense que vous pouvez d'ores et déjà constater qu'à bord de tous les vols d'Air Nova qui partent d'Ottawa, il y a des employés bilingues. Il ne faut pas oublier qu'il n'y a qu'un seul agent à bord de ces vols et qu'étant donné qu'il reste des agents unilingues, ceux-ci doivent bien travailler quelque part. Nous faisons un effort pour qu'il y ait des agents bilingues à bord des vols qui partent de villes où cela est prioritaire, et Ottawa en est une.

Des mesures ont été prises à Toronto au cours des dernières années pour qu'il y ait toujours, par exemple, des employés bilingues au comptoir RapidAir, là où passent tous les gens de Montréal et d'Ottawa. Il est possible que si vous vous présentez à un comptoir, vous ayez devant vous un employé unilingue. Cet employé a comme directive d'aller immédiatement chercher quelqu'un qui parle français et, en général, la personne à sa gauche ou à sa droite vous parlera en français.

J'utilise souvent RapidAir, et maintenant ils font leurs propres annonces au comptoir de RapidAir tellement il y a de personnel bilingue à ces endroits. Nous nous sommes donc attardés aux endroits les plus sensibles. Réussissons-nous à 100 p. 100? Probablement pas. Mais nous nous sommes attardés aux endroits les plus sensibles.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Avec la compagnie Canadien aussi?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Avec la compagnie Canadien aussi. Le déploiement des ressources linguistiques est parfaitement au point pour les vols. Il reste encore des choses à améliorer au sol, mais cela est en train de se faire également en collaboration, bien sûr, avec nos syndicats puisque nous ne pouvons pas réaliser cela seuls. Nous sommes conscients des endroits prioritaires et avons déjà pris toutes les dispositions pour qu'à moyen et long terme les nouveaux arrivants soient prêts le plus rapidement possible au niveau linguistique. Mais, comme l'un de vous l'a dit, on ne devient pas bilingue du jour au lendemain et c'est tout à fait vrai.

Nous avons dû intégrer 16 000 employés unilingues anglais. Nous avons été obligés par une loi de les reprendre. Je crois qu'il était juste, en fait, de leur offrir un emploi au Canada, mais ils étaient unilingues et nous avons dû les intégrer. Nous devons donc les former. C'est la seule solution, car ils sont nos employés.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, madame.

Député Bellemare.

M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je n'ai pas de situation dramatique ou comique à relater comme mon collègue Yvon Godin, étant donné que je ne voyage pas autant que lui. Je voyage rarement, et les gens d'Air Canada diraient sûrement que ce n'est pas assez souvent.

Le cas que relatait M. Godin paraissait comique, mais dans le fond, il s'agit d'un événement pénible. Il a parlé de situations d'urgence. Il donné l'exemple d'un avion qui frapperait un poteau ou qui arriverait en bout de piste et il aimerait savoir si, dans de telles situations, il devait défoncer la porte avant ou arrière, avec son pied ou sa main. Mais il y a des situations qui se rapprochent plus de celle du sénateur Gauthier.

Ainsi, y a-t-il des défibrillateurs dans tous les avions?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je ne crois pas qu'il y ait des défibrillateurs dans tous les avions. Mais Air Canada a commencé à installer il y a un an, je dirais, des défibrillateurs à bord. Nos agents de bord sont formés pour se servir de ces défibrillateurs.

M. Eugène Bellemare: Est-ce le cas dans les avions qui voyagent au Canada ou dans les avions qui voyagent à l'extérieur du pays?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je vais laisser M. Markey répondre à cette question.

[Traduction]

M. Stephen Markey (vice-président, Relations gouvernementales et affaires réglementaires, Air Canada): Il y en a dans tous les avions d'Air Canada.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Dans tous les avions d'Air Canada.

M. Stephen Markey: Mais nous vous donnerons des précisions.

[Français]

M. Eugène Bellemare: Prenons le cas de quelqu'un qui fait une crise cardiaque. Comme M. Godin disait, il y a beaucoup de francophones unilingues, tout comme il y a beaucoup d'anglophones unilingues. Il se pourrait qu'à bord d'un avion quelqu'un ait besoin de plus qu'un verre d'eau, qu'il fasse, par exemple, une crise cardiaque, soit en état de panique et ne sache plus quoi dire. Votre rapport est très encourageant, mais pouvez-vous nous assurer qu'au Canada les gens pourront se sentir en sécurité, tout d'abord parce qu'il y a des défibrillateurs et ensuite parce que, si des gens ont besoin de ces appareils, ils ne paniqueront pas davantage parce qu'on ne peut pas leur parler ou les comprendre?

• 1615

Mme Michèle Perreault-Ieraci: L'idéal, monsieur le député, et je suis d'accord avec vous, c'est que tout le monde puisse se comprendre dès maintenant à bord des avions.

M. Eugène Bellemare: Je vais utiliser des comparaisons lors de mes prochains propos. Lorsqu'on voyage en avion en Europe, le service est multilingue. Lorsqu'on voyage dans certains secteurs des États-Unis, le service est unilingue anglais. Mais, dans certains secteurs des États-Unis, le service est bilingue, la deuxième langue étant l'espagnol ou le français. Quand on voyage dans certains secteurs canadiens, le service est unilingue anglais. Je ne comprends pas cela. Suis-je aux États-Unis? Je suis près de l'Oregon. Je suis dans la région de Vancouver, Calgary, Edmonton. Il n'est pas facile d'avoir du service en français et je me demande si je suis dans mon pays.

Mon pays est un endroit où je dois me sentir à l'aise, où je dois me sentir sécurisé et surtout me sentir chez moi. La thèse des gens comme Benoît Sauvageau et son groupe du Bloc québécois m'énerve, parce qu'ils disent que je ne me sens pas vraiment chez nous quand je voyage au Canada à l'extérieur d'Ottawa.

M. Benoît Sauvageau: Veux-tu dire que j'ai raison?

M. Eugène Bellemare: Cela nous énerve, parce que nous voulons vivre dans les deux langues. Air Canada a la responsabilité de faire en sorte que les gens se sentent chez eux partout. Ce n'est pas une question d'être désespéré ou de ne pas comprendre la deuxième langue, mais de se sentir chez soi. Je veux me sentir chez moi à Edmonton. Je ne veux pas avoir le sentiment que je dois m'y promener avec deux revolvers pour me défendre.

Si je voyage dans cette région, je veux me sentir accueilli, me sentir chez moi, mais sans écoeurer qui que ce soit en disant des choses déplaisantes. Est-ce une question de chiffres ou de besoins, d'après vous? Le fait d'avoir des fonctionnaires bilingues dépend-il de la loi ou du bon sens? Et les fonctionnaires sont-ils plus importants que les passagers?

J'ai de l'estime pour ce que vous avez fait dans le dossier de Canadian Airines et je vous félicite, mais il ne faut pas s'arrêter là. Il faut maintenant exiger l'apprentissage d'une deuxième langue, non pas pour se défendre en Cour suprême du Canada ou pour enseigner à l'Université de Montréal, mais pour pouvoir comprendre ce que les gens qui parlent l'autre langue disent.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je comprends.

M. Eugène Bellemare: Vous dites que vous dépensez des centaines de milliers de dollars. Vous dépensez, non pas des centaines de milliers de dollars, mais des millions de dollars en pétrole, en boulons pour les avions, en morceaux et en pièces d'avions. Les besoins linguistiques sont aussi importants que les boulons et le pétrole. Il s'agit de notre pays. Mais on nous demande si nous sommes assez nombreux à bord. Si je vais à Hamilton, on me demande s'il y a assez de francophones à Hamilton. Si oui, on va me parler en français, sinon, on ne me parlera pas en français. Devrais-je être accompagné de beaucoup de gens, d'une équipe de lutteurs unilingues francophones, par exemple, pour insister pour que les employés à bord me parlent français?

Parfois, on veut parler anglais, français, anglais, français. Mais à la base, il faut se sentir chez soi chez Air Canada, sinon il va falloir changer son nom pour Air quelque chose d'autre.

• 1620

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Bellemare, peut-on laisser le temps au témoin de répondre brièvement?

M. Benoît Sauvageau: [Note de la rédaction: inaudible].

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Alors, s'il vous plaît...

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Ma première réaction à ce que vous me dites est de dire qu'il ne s'agit pas d'une question purement juridique ou d'une question de nombre. Dans une entreprise de services qui essaie de donner un bon service, vous avez raison, c'est une question de bon sens, une question commerciale. Là où notre clientèle est francophone, on doit être en mesure d'offrir un service de qualité en français.

M. Eugène Bellemare: Oui, mais il n'y a pas de personnes bilingues qui veulent être des Canadiens? Est-ce que vous vous adressez seulement aux unilingues francophones dans votre message?

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Je reviens à vous au deuxième tour, monsieur Bellemare. Madame, est-ce que vous pourriez terminer?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Air Canada n'en fait donc pas purement une question de nombre. Au risque de me répéter, je dirai que peu importe les résultats des sondages qui ont été faits il y a 10 ans, nous avons mis des agents de bord bilingues partout et nous voulons continuer à le faire. Je ne suis pas en mesure de vous dire qu'on peut le faire demain matin, mais on veut continuer à faire cela avec les employés de Canadien et des transporteurs régionaux. C'est notre but et, pour répondre à monsieur, c'est peut-être notre but à plus long terme, mais c'est ce qu'on vise. D'ailleurs, on le faisait déjà pour Air Canada.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): D'accord. Monsieur Drouin.

M. Claude Drouin (Beauce, Lib.): Merci, madame la présidente.

C'est à mon tour de vous remercier de votre présence. C'est important. C'est un débat qui dure depuis plusieurs années, et il faut travailler ensemble pour se donner une meilleure qualité de services dans les deux langues. Je voudrais seulement obtenir quelques clarifications à l'égard du fameux formulaire dont M. Sauvageau a parlé, ce sur quoi vous dites être d'accord.

On était allé jusqu'à demander que ce formulaire soit disponible en quatre exemplaires et qu'il soit possible de l'envoyer au Conseil du Trésor, à Transports Canada, aux Commissariat aux langues officielles et à vous-mêmes, pour s'assurer qu'il y ait un suivi sérieux. Seriez-vous d'accord sur cela? Est-ce vous qui devez faire ce formulaire ou si c'est nous qui devons mettre le processus en branle par le biais de Transports Canada, du Commissariat aux langues officielles ou du Conseil du Trésor, pour nous assurer que ce formulaire...

Pour ma part, je crois que ce serait là un incitatif qui permettrait d'assurer le meilleur service possible. Cela motiverait encore plus les gens d'Air Canada qui, selon ce que vous dites, donnent un service constamment en amélioration. C'est le premier point que je voulais soulever. Est-ce vous qui allez créer ce formulaire ou si on doit travailler de notre côté pour s'assurer d'avoir les quatre exemplaires?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Ce que je peux vous dire aujourd'hui, ce dont je peux vous assurer, c'est que, puisque M. Markey est d'accord qu'il s'agit là d'une excellente suggestion, c'est maintenant à nous de proposer celle-ci à Air Canada et de voir ce qui peut être fait. Je pense que c'est effectivement la responsabilité d'Air Canada.

M. Claude Drouin: Avec les quatre exemplaires et les adresses de retour?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Écoutez, je ne sais pas quel sera le résultat de tout ça et ce qui sera réalisable très exactement, mais je vous promets de m'en occuper à partir d'aujourd'hui et de voir ce qu'on peut faire.

M. Claude Drouin: Merci, madame Perreault. Je serais triste si vous faisiez beaucoup d'efforts pour mettre un système en place et que, parce qu'on voit que ça ne va finalement qu'à Air Canada, on nous demande de travailler à un autre système par la suite. Si vous ne le pouvez pas ou si c'est trop contraignant, nous allons regarder ce qu'on peut faire pour s'assurer d'avoir les quatre exemplaires et que les gens puissent l'envoyer aux quatre endroits, dont Air Canada.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: C'est ça. Il faut mentionner qu'il appartient au passager—c'est sa liberté à lui—de décider s'il veut que son exemplaire soit envoyé aux quatre endroits.

M. Claude Drouin: Il aura la liberté de les envoyer.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: C'est lui-même qui devra les envoyer.

M. Claude Drouin: Oui.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: D'accord.

M. Claude Drouin: Oui. Il aura les quatre exemplaires avec les adresses de chacun et il devra décider s'il les envoie ou non.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: On fait tout de même beaucoup de sondages sur la qualité du service à bord des vols et il y a presque toujours une question qui concerne les langues officielles. Les résultats restent évidemment chez Air Canada dans ce cas-là. Vous voulez que les passagers aient la possibilité de l'envoyer là où ils le veulent, mais ces sondages nous donnent déjà une bonne idée de ce que les passagers pensent de nos services.

• 1625

Votre question me donne l'occasion aussi de vous dire qu'en 2000, il y a eu 50 plaintes de service qui nous sont venues de la commissaire aux langues officielles. Je parle du service soit à bord, soit au sol. Il y a un peu plus de plaintes que ça, mais pour ce qui concerne le service dont il est question aujourd'hui, il y en a 50. On transporte 30 millions de passagers. On a 2 800 vols par jour. Cinquante plaintes nous sont venues de la commissaire. Il en est venu 16 pour les transporteurs régionaux, monsieur Godin, 16.

Une entreprise aligne son service en fonction des plaintes qu'elle reçoit. Si M. Godin veut nous faire parvenir ses plaintes, ça nous fera plaisir. C'est également ce qui permet à une entreprise de progresser. Si les gens ont une impression défavorable et qu'ils ne nous en font pas part, il est bien difficile, à partir de 50 plaintes, d'admettre qu'on a un problème d'image épouvantable.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Ici, en 10 minutes, vous en avez eu quatre. C'est parce que les gens...

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, et je reconnais qu'il y a certainement beaucoup de gens qui ne se plaignent pas. Mais je suis en train de vous inviter à le faire, vous, monsieur Godin. Ça nous donnerait une image qu'on n'a peut-être pas complètement.

M. Claude Drouin: Madame la présidente, on empiète sur mon temps.

Le deuxième point que vous avez mentionné, madame Perreault, c'est qu'il y avait 440 agents de bord qui sont en formation linguistique. Vous avez combien d'agents de bord au total?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je vous parle des agents de bord des transporteurs régionaux. Je ne sais pas quel est le total, mais tous ensemble, ils sont probablement près de 800. Donc, une grande partie de ces agents-là seront en formation linguistique d'ici la fin de l'année.

M. Claude Drouin: On parle de plus de 50 p. 100.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui. Je vous disais tout à l'heure que 80 p. 100 des agents d'Air Nova sont bilingues. C'est loin d'être le cas pour Air Ontario et pour Air BC. Ce sont surtout sur ces deux transporteurs-là que nous devons concentrer nos efforts.

M. Claude Drouin: J'ai un dernier point, madame la présidente.

Vous mentionnez—et c'est normal—qu'on ne peut pas congédier quelqu'un parce qu'il n'est pas bilingue, mais est-ce qu'il y a une obligation pour ces gens-là de faire des efforts pour apprendre la deuxième langue ou si, parce qu'ils étaient là auparavant, leur statut leur permet de s'opposer à une formation payée par l'entreprise pendant leurs heures de travail? Est-ce qu'ils peuvent s'y opposer?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: C'est une excellente question. Je ne suis pas certaine qu'on puisse forcer un employé qui n'a pas été embauché, il y a 20 ans, pour son bilinguisme, à devenir bilingue demain matin. Je ne suis pas convaincue qu'on puisse le faire. Ce que je peux vous dire, par contre, c'est que les employés qu'Air Canada ou les transporteurs régionaux ont embauchés comme étant bilingues ont la responsabilité de rester bilingues.

Air Canada reteste—et les transporteurs régionaux font de même—tous ses employés bilingues à tous les deux ans, et un employé qui aurait été embauché parce qu'il était bilingue et qui perdrait son bilinguisme en cours de route, pourrait, étant donné que c'est une condition d'emploi, être congédié. Manifestement, on va donner à cet employé toutes les chances du monde de retrouver son bilinguisme, mais pour ceux pour qui c'était une condition d'emploi, ça pourrait devenir une raison de congédiement, oui.

M. Claude Drouin: Il pourrait même y avoir des incitatifs à suivre des cours pour les gens qui sont unilingues. Je pense qu'Air Canada pourrait innover. Je m'inspire d'une compagnie qui reconnaît—et je ne suggère pas qu'on fasse ça—l'employé du mois. En tout cas, on pourrait inciter les gens, avoir un incitatif et peut-être même un avantage de quelque sorte pour inciter les gens à devenir bilingues.

Continuez. Vous avez beaucoup de travail à faire, mais vous êtes sur la bonne voie.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: On avance. Merci beaucoup, monsieur Drouin.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Beaudoin.

Le sénateur Gérald A. Beaudoin (Rigaud, PC): Je voulais aborder un autre point.

Une voix: La Constitution.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Non, pas ça.

Les langues officielles, au fond, c'est que les langues sont égales. Je suis toujours surpris d'entendre ce qu'on entend généralement. Qu'on ne me parle pas du nombre, de ceci et de cela. Les deux langues officielles, pour la première fois dans l'histoire du Canada, sont devenues égales.

Il faut prendre les moyens pour répondre à cette obligation juridique. Ce n'est pas tout à fait constitutionnel, mais ça, c'est un autre point de vue.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Ce n'était pas loin.

Le sénateur Gérald Beaudoin: C'est quasi constitutionnel sur ce plan-là et c'est constitutionnel pour certains domaines particuliers.

• 1630

Alors, comment se fait-il qu'on ne saisisse pas ce problème d'égalité? Si on l'acceptait—et on doit l'accepter, parce que c'est la loi du pays—à ce moment-là, il faudrait prendre tous les moyens possibles pour réussir. Et qu'on ne vienne pas me dire qu'on essaie. Je félicite les gens qui font des efforts. C'est très beau. Mais dans un domaine comme celui-ci, où on parle de l'égalité des deux langues officielles d'une immense fédération—c'est le cas de notre pays—il faut prendre les moyens, qu'ils soient juridiques, pratiques ou administratifs, pour réussir et pour atteindre cet objectif.

Par exemple, on dit qu'on n'a pas d'agents de bord. Mon Dieu, mettez-en. On n'a pas telle chose. Eh bien, il faut la réaliser. On a ça dans plusieurs secteurs. Quant aux langues officielles, on a l'égalité de deux langues très répandues dans le monde. Alors, il me semble que ce n'est pas la fin du monde que d'arriver à cette égalité. Évidemment, ça ne peut pas se faire dans une journée, mais sur le plan régional, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas arriver à l'égalité des deux langues.

Pour Canadien et Air Canada, vous avez sûrement fait des efforts extrêmement importants, et je vous en félicite. Mais c'est une nécessité. Air Canada est là pour rendre un service, et le rendre dans les deux langues. Le reste, ce sont des détails pour moi. C'est ça, le but des deux langues officielles du Canada. Ce n'est pas une question de nombre, comme je l'ai dit, et je le répète. Ce sont les langues qui sont officielles. Les citoyens sont égaux entre eux sur le plan individuel. Mais ça, c'est une autre histoire. Sur le plan linguistique, les deux langues sont officielles. Alors, il faut trouver le moyen d'arranger les structures de telle façon qu'on puisse arriver à cette égalité-là.

On le fait et on l'a fait dans d'autres domaines. L'égalité des hommes et des femmes, c'est fondamental. C'est dans le coeur de la Constitution. Alors, on y arrive. On n'y arrive pas dans une journée; ça prend du temps. Ça ne fait rien. On va réussir. On n'a qu'à changer des lois et à les appliquer.

Dans le domaine linguistique, pour moi, ce n'est pas une question de dire qu'on va faire ce qu'on peut, etc. Il faut faire plus que ça. Il faut viser l'objectif, et l'objectif est de donner l'égalité à deux langues officielles. Je ne sais pas si c'est une question, mais c'est mon commentaire.

On pourrait faire des plaintes sans arrêt. C'est bien. J'y crois. C'est un système qui est acceptable dans une grande démocratie, mais si on veut suivre les lois d'un pays—et la Loi sur les langues officielles est certainement une loi excessivement importante—il faut changer le système. Il ne s'agit pas d'améliorer ce qu'on a fait dans le passé. Ce n'est pas ça. On est arrivés au deuxième étage et le deuxième étage est l'égalité des deux langues; ce n'est pas de donner des services là où on les demande. C'est déjà beaucoup, mais c'est plus que ça, les deux langues officielles dans un pays.

Sur la question du temps, je sais bien qu'on ne peut pas réaliser cela très, très rapidement, mais il y a quand même des limites pour ceux qui attendent depuis assez longtemps.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je ne peux certainement pas être plus d'accord avec vous. Je peux vous dire qu'on y arrivera, monsieur. On y arrivera. Tout est en place pour ça, et l'est depuis longtemps. Vous parlez localement. On est en train de faire localement ce qu'on a fait nationalement avec Air Canada. On va y arriver.

On a des employés unilingues. Ils vont toujours se trouver quelque part à bord de nos vols. On ne peut y arriver qu'en embauchant des employés bilingues. Moi, je suis impliquée dans ce dossier-là depuis 12 ans, et depuis 12 ans, on n'embauche que des employés bilingues. On n'embauche plus d'unilingues. Donc, les chiffres se sont améliorés au fur et à mesure que les années ont passé, au fur et à mesure des embauches, au fur et à mesure de la formation linguistique, au fur et à mesure des tests de langues, au fur et à mesure des sommes d'argent qu'on a versées là-dedans, et ce ne sont pas des centaines de milliers de dollars, mais des millions de dollars. Le programme de formation linguistique des quatre prochaines années est de 12 millions de dollars.

• 1635

On nous demandait plus tôt si nous avions un plan à court, à moyen et à long terme. À l'aide de 12 millions de dollars pendant les quatre prochaines années, nous allons y arriver. Je vous le garantis.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Si vous engagez des gens, il faut qu'ils soient bilingues. Comme ça, vous respectez la loi.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: C'est ce que nous faisons depuis 12 ans. Les transporteurs régionaux le font depuis de nombreuses années également.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Il faut continuer de le faire.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Toutefois, il y a du rattrapage à faire, et je l'admets.

[Traduction]

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénatrice Fraser.

[Français]

La sénatrice Joan Fraser (De Lorimier, Lib.): Je vous remercie, madame la présidente.

[Traduction]

Madame Perreault, je suis moins cynique que le sénateur Rivest. J'ai trouvé votre exposé très impressionnant et je suis sûre qu'à votre niveau, l'engagement de la société est sérieux. Cet engagement s'appuie sur un investissement de 12 millions de dollars. Pourriez-vous nous dire ce que vous faites en plus d'informer les employés qu'ils doivent apprendre l'autre langue? Ce que nous disons à ces milliers d'employés de Canadien, c'est qu'ils doivent apprendre le français à tout prix et qu'ils seront renvoyés s'ils oublient cette langue une fois qu'ils l'ont apprise. Que faites-vous pour modifier ou renforcer la culture de l'entreprise de façon à ce que ce ne soit plus un fardeau à Air Canada—un fardeau comme la TPS que je dois payer—d'apprendre l'autre langue, pour que les employés ne pensent pas seulement qu'ils doivent apprendre cette autre langue pour garder leur emploi? En changeant cette culture, l'apprentissage de la deuxième langue officielle ne sera pas seulement naturel mais aussi un sujet de fierté pour tous.

Vous avez entendu toutes les histoires d'horreur. Je suis anglophone et j'en ai vécu ma part également. Au comptoir Rapidair de Toronto, on m'a ri au nez quand j'ai demandé pourquoi on ne faisait pas les annonces en français. La préposée m'a répondu avec aigreur qu'elle n'avait pas à le faire, que «ce n'était pas son travail». Et pourtant, on m'a jeté des regards irrités au comptoir d'Air Canada à Montréal parce que je parlais anglais. J'ai été servi en anglais, mais vous vous doutez avec quelle courtoisie.

M. Yvon Godin: Vous êtes déjà chanceuse d'avoir obtenu le service.

La sénatrice Joan Fraser: On peut toujours être servi en anglais chez Air Canada. Je ne le nie pas. Ce que je dis, c'est que je ne suis pas certaine que sur le terrain—même chez vos employés de longue date, sans parler de vos milliers de nouveaux employés—ce message est perçu comme positif, comme un avantage. Cela revient un peu à ce que disait M. Drouin au sujet des incitatifs. Que faites-vous à ce sujet?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: La meilleure réponse que je puisse vous fournir, sénatrice, c'est qu'à mon arrivée chez Air Canada, il y a 25 ans, il n'y avait pas de femmes parmi les cadres supérieurs de la société. Il n'y avait pas non plus de francophones parmi les cadres supérieurs. J'aurais dû amener un exemplaire du rapport annuel avec moi, car on peut y voir que l'exécutif d'Air Canada compte aujourd'hui de nombreuses femmes. Elles sont maintenant plus nombreuses que jamais. Il y a également plusieurs francophones parmi les cadres supérieurs d'Air Canada. À mon avis, c'est ce genre d'exemple qui montre aux gens des autres niveaux que cela vaut la peine d'être bilingue. Je pourrais probablement leur faire un discours sur ce que cela signifie pour les passagers, mais vous m'avez demandé ce que nous faisons pour modifier la culture de la société. C'est en employant 25 p. 100 de francophones et en nommant des francophones à des niveaux élevés de la hiérarchie que nous transmettons ce message.

La sénatrice Joan Fraser: Avez-vous envisagé la possibilité de mettre en oeuvre des programmes d'incitatifs ou de primes, ou encore des prix d'employés du mois ou de groupes du mois en fonction des exigences linguistiques, surtout en cette période très difficile que traverse Air Canada en matière de personnel?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: À vrai dire, non. Nous ne l'avons pas fait. C'est une question délicate pour les employés que de recevoir une récompense parce qu'ils parlent une langue que d'autres ne savent pas parler. Nous n'envisageons pas de telles mesures à l'heure actuelle. Nous y avons déjà réfléchi, et nous avons toujours constaté que cela créerait des problèmes entre les différents groupes d'employés. Il est donc difficile pour nous de savoir exactement comment nous devrions procéder pour mettre en place de telles mesures, aussi bonne que soit la proposition.

• 1640

La sénatrice Joan Fraser: Permettez-moi de vous raconter brièvement une expérience que j'ai vécue il y a plusieurs années. J'étais en Norvège, très tôt un dimanche matin de février, durant la morte-saison du tourisme, sur un vol interne d'Oslo à Bergen. J'étais seule dans un avion plein de Norvégiens. Évidemment, toutes les annonces étaient en norvégien. Au milieu du vol, l'hôtesse de l'air m'a présenté son petit panier de friandises et je lui ai dit que j'aimerais bien avoir un café—je ne savais pas comment le lui dire en norvégien. «Je suis désolée» a-t-elle répondu, «je ne me suis pas rendu compte qu'il y avait une anglophone à bord. Je suis désolée de ne pas avoir fait les annonces en anglais. Que voudriez-vous savoir, qu'est-ce que vous n'avez pas compris?» Par la suite, chaque fois qu'elle prenait le micro, elle faisait aussi les annonces en anglais. Le personnel de bord a redoublé d'efforts pour que je me sente en sécurité et bien informée durant le vol. Il n'était pas obligé de le faire. Si le pourcentage de passagers nécessaire était de 5 p. 100, je n'y suffisais pas à moi seule.

M. Stephen Markey: Il faut que nous en arrivions à cela.

La sénatrice Joan Fraser: Oui, et que vous récompensiez les gens qui le font. Elle n'était pas récompensée parce qu'elle parlait l'anglais, elle était récompensée—ou aurait dû l'être—pour avoir offert un excellent service.

M. Stephen Markey: Tout à fait. C'est exactement la culture que nous devons créer à Air Canada. Il nous faudra du temps pour cela, mais je puis vous assurer que Michèle et tous nos collègues ont à coeur de faire constamment de leur mieux. Nous ne manquons pas d'enthousiasme ni de sérieux pour ce qui est de répondre aux attentes de la loi et de nous acquitter de nos engagements envers le gouvernement. Nous voulons simplement pouvoir le faire de façon méthodique et à un rythme qui correspond actuellement à nos possibilités. Ce n'est pas par manque d'enthousiasme ou de bonne volonté. Ce qui nous manque parfois, c'est la capacité de faire tout cela aussi rapidement que nous le souhaiterions, pour bon nombre des raisons que Michèle a expliquées tout à l'heure. C'est une bonne idée et nous devons peut-être la concrétiser.

Permettez-moi d'apporter une précision, madame la présidente. En réponse à M. Bellemare, nous avons dit tout à l'heure que nous pensions qu'il y avait des défibrillateurs dans tous les avions. Cette mesure n'a pas encore été approuvée; nous envisageons encore la possibilité de le faire pour l'instant. On me dit que tous les avions ne sont pas équipés de défibrillateurs, mais nous envisageons d'étendre ce programme à tous les appareils.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur Markey.

Monsieur Binet.

[Français]

M. Gérard Binet (Frontenac—Mégantic, Lib.): Je suis un nouveau parlementaire et c'est la première fois que je prends la parole au Comité des langues officielles.

Une voix: Laisse-toi aller, laisse-toi aller.

Une voix: Tu ne te souviens pas, mais plus tôt, tu as parlé à Bellemare.

M. Gérard Binet: Je vais vous prouver que je suis un nouveau parlementaire. Je vais être moins chialeur. C'est sûr qu'avec le temps et l'expérience, on acquiert un côté critique.

J'ai assisté à toute l'assemblée. J'ai entendu ce qu'a dit M. Godin. C'est sûr qu'il est question des syndiqués lorsqu'il y a une fusion entre deux compagnies. M. Godin connaît ça, les syndiqués. C'est un ancien chef syndical. C'est sûr que ça ne doit pas être évident d'essayer de marier tout ça.

Ce que vous avez dit plus tôt, madame Perreault, les chiffres le disent aussi. Il y a eu de l'amélioration. C'est sûr qu'il y a toujours lieu d'améliorer davantage les choses. Toutefois, là où je veux en venir, c'est au fait qu'Air Canada est une compagnie privée. Je vois qu'il y a eu des pertes. Il y a eu de grosses pertes, n'est-ce pas?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, selon les derniers résultats...

M. Gérard Binet: Si avec le temps Air Canada continue d'accumuler des pertes, pourra-t-on en arriver à ce qu'un autre transporteur achète Air Canada, un transporteur qui viendrait d'un autre pays, une compagnie américaine, par exemple?

• 1645

Mme Michèle Perreault-Ieraci: À ma connaissance, cela relèverait de M. Collenette. C'est à lui de permettre ou non la présence d'un transporteur étranger qui voudrait concurrencer ou remplacer Air Canada, advenant de très graves pertes, ce à quoi je ne crois pas.

M. Gérard Binet: Je proviens d'une entreprise privée, mais j'ai aussi déjà travaillé dans un milieu syndical. J'oeuvrais dans les mines auparavant. Il s'agit de deux mondes différents. Je constate qu'Air Canada perd de l'argent et en plus dépense de l'argent pour former des gens. Cela ne doit pas être facile. Il doit être difficile de consacrer plus d'argent à la formation.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Pour l'instant, je ne crois pas qu'il faille en dépenser plus. Les cours de langue ne peuvent être offerts qu'à un nombre limité d'employés à la fois. Le chiffre de 448 est déjà énorme, car chacun de ces employés suivra de la formation six fois au cours de l'année, parce qu'il s'agit de cours d'immersion intensive qui se donnent en six étapes.

M. Gérard Binet: Cela veut-il dire qu'il est sûr qu'il y aura amélioration?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Cela veut dire qu'il y aura amélioration l'année prochaine. Nos chiffres seront alors bien meilleurs. Vous avez raison, 12 millions de dollars constituent un gros engagement, d'autant plus qu'à cause de l'intégration, nos résultats financiers ne sont pas à la hauteur de nos espérances en ce moment.

M. Gérard Binet: Cela veut dire que nous sommes chanceux, les Canadiens d'un océan à l'autre, qu'il y ait une compagnie privée qui fait des déficits et qui investit malgré tout pour offrir ses services dans les deux langues officielles à bord de ses avions.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je pense que ce que vous dites, monsieur le député, c'est qu'il y a une seule compagnie aérienne au Canada, en ce moment, qui offre des services bilingues et c'est Air Canada.

M. Gérard Binet: Je peux vous dire que je suis bien fier qu'il existe une compagnie canadienne qui s'appelle Air Canada. Je comprends tout ce que mes confrères ont dit, et ils ont raison, mais d'après moi, il ne peut y avoir qu'amélioration si on se fie aux chiffres que vous nous avez donnés.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Nous prenons les mesures pour y arriver.

M. Gérard Binet: La situation d'aujourd'hui doit être complètement différente de celle que vous avez vécue il y a 25 ans.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je vis aujourd'hui, en effet, dans un environnement totalement différent, sur le plan linguistique, de celui dans lequel j'ai vécu il y a 25 ans, quand je suis arrivée à Air Canada.

M. Gérard Binet: Pour finir, je souhaite qu'il y ait une Mme Perreault à Air Canada pendant plusieurs années encore.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Merci, monsieur le député.

[Traduction]

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Markey, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Stephen Markey: Non, mais j'allais dire, entre parenthèses, que nous investissons dans cette formation car nous estimons qu'elle fait partie de nos responsabilités et que c'est notre devoir. C'est pour cette raison que nous trouvons l'argent nécessaire, même si nous avons perdu près d'un demi-milliard de dollars au cours des deux derniers trimestres.

Le sénateur Gérald A. Beaudoin: Un demi-milliard de dollars?

M. Stephen Markey: Près d'un demi-milliard de dollars en deux trimestres, le dernier trimestre de l'an dernier et le premier de cette année.

Nous ne prévoyons pas que cette tendance se poursuivra, sénateur. Nous avons un plan d'affaires, nous avons pris des décisions qui permettront à la société aérienne de faire de nouveau des bénéfices et nous sommes persuadés qu'avec le temps nous atteindrons cet objectif. Mais le marché ne joue pas en notre faveur. Il y a beaucoup de concurrence, encore plus que les gens ne le croient, et notre économie n'est pas aussi performante que nous leur souhaiterions actuellement, au moment où nous avons accepté les obligations qui découlent de la fusion de deux sociétés aériennes. Nous sommes toutefois persuadés que nous prendrons en fin de compte les décisions qui protégeront—pour répondre à votre question—l'avenir de cette société aérienne et sa capacité de continuer de servir les Canadiens tout en améliorant, nous l'espérons, les services offerts dans tous les secteurs, avec le temps.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur Markey.

Madame Bulte.

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Merci beaucoup, madame la présidente.

Je tiens moi aussi à vous remercier d'être venu nous présenter cet exposé.

Monsieur Markey, permettez-moi de revenir sur ce que vous venez de dire au sujet de la concurrence. Ne croyez-vous pas que la capacité d'offrir vos services dans les deux langues officielles vous donne un avantage sur vos compétiteurs?

M. Stephen Markey: Tout à fait.

Mme Sarmite Bulte: À mon avis, c'est ce que préfèrent les clients.

M. Stephen Markey: Vous avez raison.

Mme Sarmite Bulte: C'est ce qui vous donne un avantage sur vos concurrents.

M. Stephen Markey: C'est exact.

Mme Sarmite Bulte: Je sais bien que vous avez des concurrents, mais je serais portée à croire qu'une société aérienne bilingue a un avantage sur ses compétiteurs, surtout pour les vols en partance du Canada. Ce n'est qu'une petite observation.

• 1650

Deuxièmement, c'est important et c'est très bien d'investir dans la formation linguistique, mais quel est le taux de réussite? J'ai étudié le français, et je suis encore des cours de français deux ou trois fois chaque semaine, mais pourtant, je ne me sens pas assez à l'aise pour vous poser une question en français. Je le comprends mieux que je ne le parle. Quel est le taux de réussite? Je ne sais pas s'il existe d'autre moyen pour garantir cette liberté linguistique, mais prenez-vous des mesures pour montrer à nos jeunes gens l'importance du français? Cela commence presque au niveau élémentaire d'enseignement. Il faut voir à ce que nous ayons des gens capables de communiquer dans les deux langues officielles. C'est difficile, et même parfois impossible, d'apprendre une autre langue lorsqu'on est plus âgé. J'aimerais savoir quel taux de réussite vous avez obtenu jusqu'à présent avec la formation.

Troisièmement, le sénateur Beaudoin a parlé de l'égalité des langues. Je comprends qu'il faut accorder la priorité aux services offerts ici à Ottawa, ou ailleurs au Canada, pour éviter des problèmes comme ceux que M. Beaudoin a connus, surtout à Ottawa. Rien ne peut excuser cela. Quelle est votre politique pour ce qui est des services que vous offrez au comptoir d'Air Canada en Floride, par exemple, qui est une destination pour beaucoup de francophones? J'ai déjà vu des gens se rendre au comptoir de Miami et être très fâchés parce que personne ne parlait français. Quand on pense à Air Canada et à cet avantage concurrentiel, comme le disait la sénatrice Fraser—si j'utilise les services de cette société aérienne, c'est qu'on y parle ma langue ou qu'il est possible que j'obtienne le service dans cette langue—quelle est votre politique dans de tels comptoirs?

Je ne dis pas qu'il faudrait y accorder la même priorité qu'aux services offerts au Canada, mais j'aimerais savoir quelle est votre politique en ce qui a trait aux services aux voyageurs qui rentrent au Canada et non seulement à ceux qui en partent ou qui circulent à l'intérieur du pays. Si je me rends à New York, je veux avoir la possibilité d'aller... Supposons que je voyage à bord d'Air Canada; je ne veux pas utiliser les services d'American Airlines. Il y a beaucoup de transactions commerciales menées en français à New York. La dernière fois que je me suis rendue à New York, aucun des employés ne parlait français.

M. Stephen Markey: Permettez-moi de faire deux observations, puis je laisserai Michèle répondre à la question.

J'espère ne pas avoir laissé entendre que nous avions des problèmes avec la concurrence, car nous ne voyons pas le marché sous cet angle-là. J'estime que la concurrence est très saine, et Air Canada s'est toujours dite prête à faire face à ses concurrents. La concurrence est bénéfique et vous avez raison quand vous dites que la langue devient presqu'un produit supplémentaire.

[Français]

J'avais le même problème avec la langue.

[Traduction]

Je ne suis pas à l'aise pour le parler, mais je fais un effort. Il y a beaucoup d'autres gens au sein de la société qui continuent de faire de grands efforts pour y parvenir. Michèle pourra vous en dire davantage au sujet de notre taux de réussite. Je lui laisse la parole.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Vous avez raison, madame Bulte, ce n'est pas tout le monde qui a de la facilité pour apprendre d'autres langues. Certaines personnes ne sont pas douées pour cela. Nous aidons les employés qui s'inscrivent volontairement à nos cours. Dans les cours d'apprentissage accéléré que nous offrons aux employés des transporteurs régionaux et de Canadien à l'heure actuelle, le taux de réussite est de 100 p. 100, parce que si l'un d'entre eux a des difficultés à l'un des six niveaux, nous ne le décourageons pas. Ils sont de nouveau inscrits au cours et nous recommençons au premier niveau, jusqu'à ce que ce niveau soit entièrement maîtrisé, puis nous passons au second, etc.

Certains ont plus de facilité, d'autres plus de difficulté. Mais nous ne les abandonnons pas. Il en va de même de notre programme de maintien des compétences. Les employés d'Air Canada qui sont en contact avec le public ont le choix de venir suivre de nouveau des cours pour conserver leurs compétences car, vous avez raison, une langue qui n'est pas parlée est une langue perdue. Nous ne voulons pas avoir investi autant d'argent pour que six mois plus tard les employés ne puissent plus parler la langue qu'ils ont apprise faute de pouvoir la pratiquer. J'espère que cela répond à vos questions au sujet du taux de réussite.

• 1655

Pour ce qui est de nos comptoirs en Floride ou à New York, je ne doute pas que vous n'ayez pas entendu parler français quand vous y étiez, mais vous seriez étonnée d'apprendre que parmi nos employés aux aéroports en Floride, il y a bon nombre de Québécois. C'est peut-être mal tombé pour vous, mais j'ai été étonnée—je n'ai pas les chiffres sous les yeux aujourd'hui—de voir le nombre de Québécois qui travaillent aux États-Unis et qui peuvent s'adresser à vous en français, surtout à Miami et à Tampa.

Je suis désolée de ne pas avoir parlé de la politique, puisque cela fait partie de la loi. Cela fait donc partie de la politique d'avoir des employés bilingues à ces comptoirs.

Mme Sarmite Bulte: À l'extérieur du Canada?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oh, oui.

M. Stephen Markey: C'est exact.

Mme Sarmite Bulte: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Très bien. Nous allons commencer notre deuxième tour de table.

[Français]

Nous commençons le deuxième tour et je cède la parole au sénateur Gauthier.

[Traduction]

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: J'ai une question à poser à M. Markey—vous pourrez m'envoyer l'information plus tard. La formation proprement dite fait partie de vos activités. Si vous voulez demeurer concurrentiel, vous devez former votre personnel, les mécaniciens et autres. Vous devez également leur fournir de la formation linguistique. Cela entre dans vos dépenses, n'est-ce pas?

M. Stephen Markey: C'est exact.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Pourriez-vous me faire parvenir une lettre ou une copie de document dans lequel vous indiquerez combien d'argent vous dépensez en général à la formation et, plus particulièrement, à la formation linguistique? Merci.

M. Stephen Markey: Oui. Dois-je l'envoyer à votre greffier?

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Oui, je vous en prie.

[Français]

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Madame Perreault-Ieraci, j'ai écrit souvent, il y a quelques temps, à M. Milton à propos des langues officielles et de la politique d'Air Canada. J'ai écrit en décembre dernier, et il m'a répondu en janvier, ce qui est très bien, à propos des coupures de 3 500 postes que vous avez effectuées dans vos effectifs l'hiver passé. Cette opération est-elle terminée?

[Traduction]

M. Stephen Markey: Il n'y a pas eu de réduction d'effectif. Nous avons dit que nous souhaitons réduire l'effectif de 35 000 personnes cette année et nous aurons recours pour cela à l'attrition et aux départs volontaires. Trois cent cinquante employés ont quitté les rangs de la société au quatrième trimestre, un autre millier environ durant les premiers mois de cette année, et le reste partira au cours de l'année, sénateur.

[Français]

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je pose la question parce que lorsque j'ai écrit à M. Milton, c'est M. Douglas Port m'a répondu. Vous connaissez M. Port, j'imagine. Dans ma lettre, je demandais si des postes bilingues, et non des individus—ont été protégés. Voici sa réponse:

En d'autres mots, il renverse le fardeau. Je lui ai répondu que ce n'était pas cela que je voulais savoir. Allez-vous protéger vos postes bilingues? Il n'avait qu'à dire oui. Mais il m'a répondu que s'il faisait cela, cela pourrait être désavantageux pour les francophones. Là n'est pas la question. Pourriez-vous demander à M. Port de répondre à ma question, parce que je n'ai pas eu de réponse satisfaisante jusqu'à maintenant?

Je pose maintenant ma deuxième question, parce que mon temps est limité et que je sais que la présidente va m'arrêter.

Dans cette même lettre, j'ai demandé à M. Port ou à M. Milton de me transmettre un plan et un programme officiels d'Air Canada. Vous avez un plan et un programme, et je voulais en avoir une copie. J'ai demandé cela au mois de février et je ne l'ai pas encore reçue. Pourriez-vous, madame, demander à qui de droit de m'envoyer une copie de ce fameux document afin que nous puissions l'examiner?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: D'accord. Puis-je répondre à M. le sénateur? Pour ce qui est de la protection des postes, les 3 500 employés qui sont partis n'ont pas été remplacés. Il s'agissait d'un programme de réduction de personnel. Je peux vous dire, par contre, que si des employés d'Air Canada qui étaient en contact avec le public se sont prévalus du programme de départs, ils seront tous réembauchés le jour où on recommencera à embaucher des employés et ils devront être bilingues, parce que c'est notre politique depuis une douzaine d'années. Il se peut que parmi les 3 500 employés, il y ait eu des employés administratifs. Étant donné l'évolution rapide, et difficile à suivre, des postes, chaque fois qu'un poste devient vacant à Air Canada, les besoins linguistiques de ce poste sont réévalués, parce que souvent la tâche est adaptée au nouvel employé. On profite du fait qu'un employé part pour revoir la tâche. À chaque fois qu'un poste devient vacant, les besoins linguistiques de ce poste-là sont réévalués par moi-même ou par Chantal ici présente. Donc, la réponse à votre question était: non ils ne sont pas protégés, parce que s'ils s'en vont, ils ne sont pas remplacés.

• 1700

La réponse aurait dû continuer et dire que, par contre, chaque fois qu'un poste est remplacé, ce poste-là est réévalué linguistiquement.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: C'est une meilleure réponse.

[Traduction]

M. Stephen Markey: Vous devriez peut-être le lui demander une troisième fois.

[Français]

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Non, mais les journalistes nous ont appris que quand Air Canada vient témoigner devant un comité parlementaire, ses représentants se font briefed, comme on dit en canadien, avant de venir. Vous avez un dossier sur Godin, sur Beaudoin, sur Mauril Bélanger. Est-ce vrai?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Si vous me posez la question, je n'ai rien vu qui concernait... Ce qui m'intéressait, c'est de savoir qui... [Note de la rédaction: inaudible]. Mais je pense qu'Air Canada, comme toute société importante, sait à qui elle a affaire. Elle doit savoir qui est M. Drouin, qui est Mme Fraser.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: La correspondance que vous avez reçue de parlementaires, l'avez-vous vue?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: On vous a tenue au courant?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: C'est tout ce que je voulais savoir.

[Traduction]

M. Stephen Markey: C'est exact.

[Français]

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, sénateur Gauthier.

Monsieur Sauvageau, c'est votre tour.

M. Benoît Sauvageau: Dans un premier temps, vous allez faire une étude. Vous allez examiner la possibilité de mettre des formulaires dans les petites pochettes et vous allez donner le suivi à ce comité-ci.

Une voix: C'est ça.

M. Benoît Sauvageau: Vous avez fait un sondage, entre autres sur l'utilisation des langues officielles dans les avions. Est-ce qu'on pourrait avoir une copie de ce sondage le plus récent?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Ce sera public, monsieur. Oui.

M. Benoît Sauvageau: Je vous remercie.

Dans les aéroports d'un million de voyageurs et plus et dans tous les aéroports, au lieu de mettre des petites pancartes bilingues disant que les services sont disponibles dans les deux langues, pourriez-vous mettre de grandes affiches disant que dans cet aéroport, on a l'obligation de respecter la Loi sur les langues officielles?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Vous savez, nous avons déjà eu ça. Je ne sais pas très bien... C'était Transports Canada, en fait, et cette fois-ci, c'est plutôt la responsabilité des propriétaires des installations, soit Transports Canada, de mettre dans leurs aéroports des affiches disant que cet aéroport est un aéroport bilingue. Air Canada a ses affiches sur ses propres comptoirs expliquant qu'on offre le service dans les deux langues. L'aéroport, lui...

M. Benoît Sauvageau: Je m'excuse de vous interrompre. Je ne parle pas des petits trucs disant qu'on peut être servi dans les deux langues. Je voudrais que ce soit inscrit dans l'aéroport ou sur le comptoir d'Air Canada: Nous avons l'obligation de respecter la Loi sur les langues officielles. Ce serait bon pour le client et ce serait bon pour l'employé.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je vais prendre ça en considération également. Merci beaucoup.

M. Benoît Sauvageau: Quand vous avez eu des problèmes de service à la clientèle, à la réservation, pour les horaires et tout ça, il y a eu un beau plan de relations publiques fait par M. Milton. On le voyait en bras de chemise dans les journaux. Il disait que la société avait 180 jours et qu'après 90 jours, elle donnait des rendements. On parle des problèmes d'image. C'était concret. C'était correct. Pourquoi ne faites-vous pas ça pour les langues officielles? Je vous donne 360 jours au lieu de 180. Vous pourriez dire que vous avez un plan, qu'en 360 jours, vous ferez telle chose et qu'en 190 jours, ce sera fait.

Le sénateur Jean-Claude Rivest: Ça n'a pas marché, l'affaire de Milton. Alors, ne propose pas ça pour les langues officielles.

M. Benoît Sauvageau: Mon problème, c'est quand on dit qu'on va faire des efforts, qu'on est gentil avec nous, qu'on met 12 millions de dollars, qu'on a l'obligation de respecter la Loi sur les langues officielles et que, éventuellement, on va potentiellement respecter ses engagements. Moi, j'aimerais avoir des dates limites. Je pense que le plan de communication sur le service de réservations et tout ça, c'était quand même une bonne idée. Je ne sais pas si ça a marché ou non, mais c'était quand même une bonne idée.

Dans la même veine, si pour vous ou Air Canada, la Loi sur les langues officielles est importante, pourquoi ne faites-vous pas une campagne de publicité semblable en disant que vous vous engagez, d'ici 360 jours, à ce que tous vos clients puissent être desservis dans les deux langues officielles dans telle et telle régions? Après 180 jours, vous diriez que les 12 millions de dollars que vous avez investis en formation linguistique donnent 448 personnes bilingues de plus, qu'on n'aura plus de problème parce que l'autre formation s'en vient et que ça va être réglé.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Ce plan-là existe, monsieur.

M. Benoît Sauvageau: Eh bien, rendez-le public.

• 1705

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Il est fourni au Conseil du Trésor à tous les ans.

M. Benoît Sauvageau: Ce n'est pas ce que je vous dis.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Il est public.

M. Benoît Sauvageau: Pardon. Il y a des documents publics et il y a des documents qui sont médiatisés. Il est sûr que si vous le publiez sur Internet, vous le rendez public. Par contre, si je lis tout ce qu'il y a sur Internet, je vais avoir de la difficulté à compléter ma journée, n'est-ce pas? Pourquoi ne faites-vous pas une campagne de relations publiques qui annoncerait que la Loi sur les langues officielles est importante pour Air Canada et que celle-ci s'engage à atteindre tel objectif dans tel délai? Vous auriez moins de problèmes au niveau de votre image. D'autre part, votre investissement de 12 millions de dollars aurait une retombée médiatique et, d'autre part, le comité connaîtrait votre échéancier.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Vous êtes un bon relationniste public, meilleur que moi.

M. Benoît Sauvageau: Donc, vous êtes d'accord! Je vous remercie. J'aime les réponses claires. Je les apprécie beaucoup. Êtes-vous d'accord?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je trouve que c'est certainement une excellente idée. Je ne vais pas vous promettre aujourd'hui que cela va se faire. Cela doit probablement faire partie de tout un plan de communications. Il faudra étudier cela. Je m'engage très certainement, moi, Michèle Perreault, à soumettre cela aux autorités concernées d'Air Canada et à en discuter honnêtement.

M. Benoît Sauvageau: Je voudrais formuler deux petites demandes. Peut-on avoir un suivi sur les formulaires et un suivi sur l'affichage de l'obligation du respect de la loi dans les aéroports?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: D'accord.

M. Benoît Sauvageau: Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Monsieur Bellemare.

M. Eugène Bellemare: Merci, madame la présidente.

Si j'ai bien compris votre conclusion, madame Perreault, la question des deux langues, pour Air Canada, n'est pas affaire de chiffres, mais plutôt de besoin. Ce n'est pas une question de compréhension, mais plutôt de volonté que les gens se sentent chez eux à bord de l'avion. Ce n'est pas une question de droit, mais de bon sens canadien. Ce n'est pas une question de ressources, mais de culture et de politique corporative. Cela constitue un engagement de la part de la corporation. Ai-je bien compris?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Monsieur Bellemare, c'est d'abord par respect qu'Air Canada offre le service dans les deux langues officielles de ce pays, et c'est aussi pour les raisons que vous avez mentionnées.

M. Eugène Bellemare: Je voudrais poser une deuxième question. Il y a eu des audiences avec Transports Canada et le Conseil du Trésor. J'imagine que le greffier vous a envoyé les bleus ou les procès-verbaux de ces réunions.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je ne les ai pas vue.

M. Eugène Bellemare: Est-ce que le greffier les a envoyées, madame la présidente?

Le cogreffier du comité (M. Jean-François Pagé): Cela ne m'a pas été demandé, mais je vais vous les faire parvenir sans problème.

M. Eugène Bellemare: Cela rend ma question inutile, madame Perreault. Je dois trouver un autre moyen de poser ma question.

Des gens de Transports Canada vous ont pointés du doigt. Des gens du Conseil du Trésor vous ont pointés du doigt. Ils ont dit plusieurs choses un peu déplaisantes pour Air Canada.

Vous avez la chance de vous défendre aujourd'hui. J'imagine que, comme toute grande corporation nationale ou internationale, vous avez des employés qui ont pris des notes durant les réunions. Votre entreprise est immense. Vous n'êtes sûrement pas sans ignorer ce qui s'est passé auparavant. Vous devez savoir ce qui s'est discuté au cours de ces réunions, surtout au cours de ces deux audiences avec Transports Canada et le Conseil du Trésor.

Que dites-vous pour vous défendre de ce dont vous accusent Transports Canada et le Conseil du Trésor?

Mme Michèle Perreault-Iareci: Pouvez-vous me donner un exemple de ce que ces deux institutions ont pu dire, et desquelles nous devrions nous défendre? Je ne sais pas très bien sur quel sujet vous aimeriez que je m'étende.

• 1710

M. Eugène Bellemare: En général, il était question de pourcentages et de qui avait la responsabilité de répondre aux plaintes et on disait que ça ne semblait pas déboucher chez Air Canada. C'est du moins ce qu'il laissait entendre par la façon dont il répondait aux questions.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je croyais que nous avions des amis dans tous ces organismes.

Je peux vous répéter aujourd'hui ce que nous avons fait et les résultats que nous avons atteints. Que Transports Canada et le Conseil du Trésor aient renvoyé la balle dans notre camp, j'imagine que ça fait partie des règles du jeu et je peux l'accepter.

M. Eugène Bellemare: Pour que ce soit clair, j'ajouterai qu'ils se sont aussi renvoyé la balle entre eux, sans être présents à la réunion à laquelle l'autre comparaissait.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je n'ai pas l'intention de faire quoi que ce soit de ce genre aujourd'hui, mais si vous me posez des questions précises, je changerai peut-être d'idée. J'imagine que chacun a un mandat bien particulier. Transports Canada a un mandat. Je n'ai pas beaucoup de relations avec le ministère et je ne sais pas ce qu'ils ont pu dire. Les plaintes nous sont transmises par le Commissariat aux langues officielles, et non par Transports Canada. Je ne connais pas ces gens-là.

Quant au Conseil du Trésor, Air Canada a des relations très suivies avec lui depuis toujours. Ces gens-là nous ont toujours beaucoup aidés en nous donnant des conseils sur les façons de faire, les pratiques exemplaires, etc. On a toujours eu des relations étroites et efficaces, à mon avis, avec le Conseil du Trésor.

Donc, je ne sais pas trop bien de quoi je dois me défendre au juste, mais aujourd'hui, je mets au défi n'importe qui de nous dire que nous ne faisons rien, que nous ne faisons pas bien. Je serais incapable d'accepter ce genre d'affirmation. Ça fait 12 ans que j'oeuvre dans ce domaine et je ne vois pas qui d'autre, y compris au gouvernement, peut avoir mis en place autant de mesures qu'Air Canada.

Je ne suis pas en train de vous dire que les résultats sont là à 100 p. 100, mais les mesures... Si quelqu'un a d'autres suggestions à faire, comme celle de M. le député là-bas tout à l'heure, elles seront les bienvenues. Ce sont peut-être des mesures auxquelles on n'a pas pensé. Mais je ne connais pas beaucoup d'autres institutions réglementées qui puissent se vanter d'avoir mis en place un programme comportant autant de mesures.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, madame Perreault-Ieraci.

Monsieur Godin.

M. Yvon Godin: Vous dites que si une personne se présente au guichet et que la préposée ne parle pas sa langue, vous demandez à une autre personne d'accourir pour l'aider. Je ne veux pas insister, mais ce sont toujours les francophones qui sont obligés de faire cette demande et de bâdrer le client d'à côté qui est en train de se faire servir. Je trouve que c'est inacceptable. Je dois vous dire ça carrément.

[Traduction]

Ce sont toujours les francophones, et je ne comprends pas. Les autres arrivent et me fournissent l'information dont j'ai besoin et l'autre client me regarde en se disant que je l'empêche d'être servi. Cela arrive toujours aux francophones. J'ai toujours des questions à poser. Je ne veux pas prendre le temps d'examiner si ces questions sont importantes ou non.

[Français]

C'est un de mes commentaires; je trouve cela vraiment inacceptable.

Voici un autre commentaire. Les cours qui sont donnés aux employés, par exemple les cours pour les agents de bord, sont-ils en français et en anglais ou seulement en anglais? J'ai l'impression, et j'aurai de l'information que des gens sont supposés me faire parvenir par la poste, que le cours se donne seulement en anglais. Il faut être bilingue pour le suivre, mais le cours se donne seulement an anglais.

En cas d'urgence, quand l'avion descend, il n'y a plus de cassette. Les directives en cas d'urgence,

[Traduction]

redressez votre siège, etc.

[Français]

sont en anglais seulement. C'est l'information que j'ai et je reviendrai plus tard avec des preuves.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Si c'est possible, madame la présidente, je voudrais répondre tout de suite à cette question, parce que je vais l'oublier.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Très bien.

• 1715

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Vous me parlez des cours de formation qui sont donnés aux agents de bord. Je peux vous dire qu'il y a des classes anglaises et des classes françaises de formation aux agents de bord. Les agents de bord passent huit semaines en formation avant d'effectuer leur premier vol, et il y a des classes entièrement en français et des classes entièrement en anglais.

M. Yvon Godin: Et dans quelle langue le cours sur les directives en cas d'urgence est-il donné?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Dans les classes françaises, tout est donné en français, y compris les directives en cas d'urgence.

M. Yvon Godin: Ce qu'il faut dire aux clients dans les deux langues sur un avion où il faut parler les deux langues.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, absolument.

M. Yvon Godin: Que veut dire «vol AC»?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Un vol effectué par Air Canada ou un de ses transporteurs régionaux.

M. Yvon Godin: Donc «vol AC» veut dire un vol d'Air Canada. C'est parfait. Donc, le vol AC 1336, à 14 h 35, le 4 mai 2001, était un vol d'Air Canada qui m'a donné le service en anglais et qui était supposé donner le service dans les deux langues depuis juillet 2000. Donc, il n'y a pas de différence. Malgré tous les efforts que vous faites, la loi a été violée sur ce vol. Vous êtes d'accord avec moi?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je suis d'accord avec vous que, depuis juillet 2000, la loi demande que... C'était probablement un vol d'Air Nova ou d'Air Ontario. Dès qu'il y a quatre chiffres, ce n'est pas un vol d'Air Canada. C'est un vol d'un transporteur régional.

M. Yvon Godin: Voici une dernière question vraiment facile. Vous avez reçu 50 plaintes sur la langue. Combien en avez-vous eu de la part d'anglophones?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Les plaintes que nous recevons des anglophones sont des plaintes sur la qualité de la langue en général. Il y a un chiffre, que je n'ai pas, mais si vous voulez me faire dire qu'il n'y en a presque pas, je dirai qu'il n'y a presque pas de plaintes d'anglophones sur l'absence de services en anglais.

M. Yvon Godin: Les plaintes portent sur le fait qu'on ne parle pas assez bien l'anglais.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui.

M. Yvon Godin: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Gauthier.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: J'ai deux petites questions à poser.

Chez Air Canada et ses filiales, combien d'employés peuvent travailler dans les deux langues officielles? Vous m'enverrez des chiffres, si vous le voulez.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: D'accord, on va faire ça. J'aurais peur de vous donner de faux chiffres.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Voici ma deuxième question.

Mme Diana Monnet du Conseil du Trésor est venue ici récemment. Elle nous a affirmé que la Loi sur les langues officielles devait primer dans les négociations avec vos employés. Êtes-vous d'accord sur ça?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je respecte très certainement l'opinion de Mme Monnet. Comme je ne suis ni avocate ni constitutionnaliste, je suis très mal placée pour trancher là-dessus. Ce que je sais, c'est qu'Air Canada est soumise à la Loi sur les langues officielles et qu'Air Canada a également des conventions collectives qu'elle est obligée de respecter. Je pense que tout le monde autour de la table se rend bien compte qu'une convention collective, ça ne se brise pas en plein milieu d'un contrat. Donc, depuis des années déjà, et surtout aujourd'hui, en raison de l'intégration de tous ces personnels syndiqués de toutes ces compagnies, on fait face au défi d'essayer de concilier toutes nos obligations.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Mme Monnet nous a assurés que la loi primait. Ce n'était pas une opinion qu'elle donnait, mais une assurance.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Moi, je ne suis pas capable de vous donner cette assurance. On jongle avec les deux et on essaie de respecter les deux le mieux possible.

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous pourriez demander à vos vice-présidents ou à quelqu'un d'autre de répondre à cette question. C'est important.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, je...

Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Est-ce qu'Air Canada considère que la Loi sur les langues officielles prime en matière de... [Note de la rédaction: inaudible]. Merci.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Beaudoin.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Ma question porte sur la concurrence. Votre argument m'a impressionné, parce qu'évidemment, les autres transporteurs aériens ne sont pas obligés de respecter la Loi sur les langues officielles.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Non.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Vous y êtes obligés, vous, parce que nous avons une loi fédérale sur la question, qui est impérative.

• 1720

Je voudrais savoir comment vous pouvez réussir sur le plan économique. Il y a un point que vous ne pouvez pas occulter, parce que la loi est la loi, et d'un autre côté, vous avez des rivaux qui sont de taille. Est-ce qu'il y a un budget particulier pour la question des droits linguistiques ou de l'observance de la Loi sur les langues officielles? J'ai cru comprendre que mon collègue Jean-Robert Gauthier voulait avoir les chiffres sur ce plan. Par exemple, il voulait savoir combien il en coûte pour donner effet à la Loi sur les langues officielles. C'est un document que vous allez nous présenter. Ça m'intéresse parce qu'il y a une obligation, que vous remplissez. Ça, c'est évident.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je peux déjà vous dire aujourd'hui que oui, bien sûr, il y a un budget. Il y a un budget d'enseignement des langues. Nos obligations linguistiques sont couvertes par plusieurs domaines. Il y a un budget pour l'enseignement des langues. Il y a un budget très élevé pour les tests linguistiques qu'on fait. On reteste des milliers et des milliers d'employés chaque année. Donc, il y a un budget pour ça. Il y a nos salaires. Dans tous les aéroports du Canada et sur toutes les bases de service en vol du Canada, il y a des coordonnateurs linguistiques qui s'occupent de mettre en place ce qu'il faut, qui nous aident à répondre aux plaintes quand il y en a, qui nous aident à corriger les défauts quand il y a des plaintes.

On peut mettre tout ça ensemble, et ça va donner un budget. Il n'y a pas un budget séparé pour le bilinguisme qui porte un numéro, mais il y a tous ces différents postes budgétaires dans lesquels un montant d'argent est alloué au bilinguisme. Depuis de nombreuses années, c'est une dépense qu'a Air Canada et que n'ont pas les concurrents d'Air Canada qui ne sont pas soumis à ces obligations.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Il y a évidemment des rivaux. Vos rivaux ont aussi des langues qu'ils doivent respecter. Non? Chez Air France, on parle le français, et probablement l'anglais en Amérique, ou encore l'espagnol.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Excusez-moi. Je pensais surtout à la concurrence canadienne. Les différents autres transporteurs qui offrent des services au Canada n'ont aucune obligation linguistique, ni commerciale ni juridique.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Oui, mais par contre, vous avez été obligés de... Canadien était tout de même une partie extrêmement importante du transport, et vous avez incorporé cette compagnie. Vous l'avez aussi assimilée, si je peux ainsi dire. Vous avez fait la même chose dans le cas des transporteurs régionaux. Ça demande énormément d'argent et, j'imagine, énormément de temps. C'est peut-être pour ça que vous dites que vous essayez de vous fixer un objectif pour rendre le service bilingue.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je peux vous dire qu'il y a énormément de personnes dans les transporteurs régionaux, à l'heure actuelle, dont le mandat est de s'occuper de satisfaire aux obligations linguistiques le plus rapidement possible.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Il faut tout de même être juste.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, sénateur.

Madame Perreault, je voudrais vous entendre encore une fois. Quand on parle du fameux 5 p. 100, là où il y a la demande, cela me fâche. Je suis loin d'être satisfaite de ce fameux article de la loi. Il vous reste deux ans pour respecter l'obligation, dans le cas de Canadien, partout au pays.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Les vols de Canadien qui sont assurés sur les mêmes lignes qu'Air Canada doivent déjà offrir le service bilingue. Le gouvernement avait prévu trois ans pour rendre le service bilingue chez Canadien, selon certains critères. Il fallait qu'ils restent, qu'ils aient un statut particulier.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Pour ce qui est du 100 p. 100 à long terme, que prévoyez-vous faire? Est-ce que ce sera rigide? Est-ce qu'on comptera les passagers qui passent à l'aéroport au cours d'une journée où il n'y aura pas de francophones?

• 1725

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Permettez-moi, madame la présidente, de clarifier une chose. Les aéroports ne sont pas soumis au 5 p. 100. Les aéroports ont été déterminés par Transports Canada. Il y a probablement une douzaine d'années, Transports Canada a décidé quels aéroports étaient des aéroports à demande importante. Ce n'est pas le 5 p. 100.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Je m'excuse. Je me suis mal exprimée. Où faites-vous le sondage? À bord des avions?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Sur les vols.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sur les vols.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Oui, c'est ça.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): D'accord. Alors, un jour où il n'y a pas beaucoup de francophones et que ça tombe à 2 p. 100, vous n'êtes pas obligés d'avoir quelqu'un de bilingue sur l'envolée. C'est bien ça?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je voudrais vous rassurer par rapport à cela, madame la présidente.

Le sondage est fait par une entreprise sérieuse, Angus Reid, qui fait ce sondage selon une méthodologie assurée. Le sondage est fait pendant trois périodes de temps. Il est fait sur une période d'un an, comme le Conseil du Trésor l'exige. Il est fait en période de pointe et en période de non-pointe. Selon la méthodologie utilisée et le Conseil du Trésor, ces trois périodes sont considérées comme suffisantes pour assurer, comme vous le disiez, que l'on ne tombe pas sur un jour où il n'y a personne ou sur un jour où il y a tout le monde. Ainsi, ça devrait être un sondage dont les résultats sont absolument sûrs.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Si vous en arrivez, de façon professionnelle, à 3 ou 4 p. 100, que faites-vous à long terme?

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Comme je l'ai dit plus tôt dans mon discours, à long terme, notre objectif est de faire avec tout le monde ce qu'Air Canada faisait pour elle-même, quand les résultats du sondage d'Air Canada sont sortis il y a 10 ans et jusqu'à l'avènement du projet de loi C-26, c'est-à-dire d'avoir des agents bilingues sur tous ses vols, peu importe qu'il y ait 5 p. 100 ou pas. C'est notre objectif à long terme et probablement à moyen terme, mais ce ne sera certainement pas fait demain matin. Tel est l'objectif.

C'est que ça n'a pas de bon sens—M. Bellemare parlait d'avoir du bon sens—qu'un passager qui part de l'ouest du pays pour voyager dans un secteur où la demande est importante et où le service en français est offert, ne reçoive plus ce service après avoir fait une première correspondance pour un deuxième vol et qu'il se fasse répondre, lorsqu'il exige d'être servi en français, que la compagnie est désolée, mais qu'en raison du fait qu'il n'y avait pas 5 p. 100 de francophones le jour où le sondage a été fait, le service en français n'est donc pas offert maintenant sur cette section du trajet. Il fait ensuite une deuxième correspondance et se trouve dans un secteur où il y avait 5 p. 100 de francophones. Là, on va lui offrir le service en français. Commercialement, c'est insoutenable de toute façon.

Air Canada avait donc adopté la pratique de mettre des agents bilingues partout, de sorte qu'il n'y avait pas de bris de service entre Halifax et Vancouver, par exemple. Si vous aviez à changer de vol trois fois, vous étiez assuré de recevoir un service bilingue sur les trois vols.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Je vous remercie.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je vous en prie.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Sénateur Prud'homme, la parole est à vous.

Le sénateur Marcel Prud'homme (La Salle, Ind.): Merci. Je ne veux pas abuser de votre patience. C'est que le Sénat siégeait, et il manquait quelques individus.

Ce n'est qu'un commentaire que j'aimerais porter à votre attention. J'ai représenté pendant 30 ans une circonscription montréalaise énormément multiculturelle, où le fait de parler trois ou quatre langues était courant. Mon amie, madame le sénateur, avait la circonscription voisine, et c'était la même chose.

Ces gens-là m'ont dit qu'ils aimeraient beaucoup travailler à Air Canada. Pour des raisons que je ne comprends pas—je ne porte aucune accusation, c'est simplement un commentaire auquel j'aimerais que vous y réfléchissiez—selon vos méthodes d'emploi, il semblerait que...

Moi, je pense qu'aujourd'hui... Quand je vois des jeunes gens, je les aime bien. Qu'ils soient unilingues français ou anglais et qu'ils se présentent chez Air Canada en étant unilingues... Des unilingues français, vous n'en trouverez pas beaucoup, entre parenthèses. Soyons francs. Ce n'est pas parce que je m'assois de ce côté-là... Je ne veux pas qu'on me mélange.

Des voix: Ah, ah!

Le sénateur Marcel Prud'homme: Cela ne me dérangerait pas non plus, mais...

M. Benoît Sauvageau: On vient d'avoir un député et un sénateur.

Une voix: C'est bon.

Le sénateur Marcel Prud'homme: Vous comprendrez que c'était assez frustrant pour madame, dans le temps où elle était députée, et pour moi d'avoir à répondre parce que, chaque fois que je cherchais à obtenir des réponses, je n'en recevais pas.

Il y a souvent des emplois qui sont mis à la disposition des jeunes. Il y a des gens qui, pour la gloire d'Air Canada et du Canada... On parle de la politique du multiculturalisme, on encourage le multiculturalisme.

• 1730

Je ne vous le cache pas, je suis un nationaliste canadien-français du Québec. Cela est clair. Je le dis partout à l'heure actuelle, et bientôt je le dirai encore plus fort. Mais je parle anglais. Cela n'a rien coûté à l'État, car je l'ai appris en travaillant ici, tranquillement. Je le parle encore mal. Mais je sais qu'il y a un bassin, au Canada, de jeunes gens encouragés par les politiques canadiennes à préserver leur héritage culturel. Ils parlent français, anglais et arménien. Il y a des écoles à Montréal. Vous savez, nous n'avons pas de leçons à recevoir du reste du Canada. À Montréal, il y a des écoles arméniennes. Il y a des écoles arabes, il y a des écoles grecques, comme les écoles Socrate, dont je suis un des protecteurs. Je trouve que le fait que des étudiants finissants parlent trois langues est une spécificité du Québec. Je souhaiterais, par contre, que d'autres répandent le message en dehors de Montréal. Ces personnes ne parlent qu'une seule langue. Cela sera l'objet de notre débat.

Tout ce que je souhaite, madame, c'est de vous livrer le témoignage d'un vieil homme qui réfléchit depuis toujours à cette question, qui se pose des questions et qui ne comprend pas. Je prends l'avion. Je suis encore capable de me retenir, mais parfois je suis fatigué. Je prends l'avion depuis 38 ans, depuis que je siège au Parlement. Quand des gens me disent,

[Traduction]

Je suis désolé, je ne parle pas français.

[Français]

je leur réponds,

[Traduction]

il ne faut pas se désoler, il faut l'apprendre.

[Français]

Parfois, ils sont un peu plus brutaux. Dans ces moments-là, la moutarde me monte au nez, mais je suis capable de répondre.

Je voudrais simplement participer très sérieusement à ce comité, si on veut bien m'en donner l'occasion. Comme je suis indépendant, je n'ai pas le droit de faire partie d'un comité, mais au Sénat, nous avons le droit de parole.

Prêtez attention à ce que je viens dire. Prévoyez et préparez l'avenir. Il y a énormément de jeunes gens. Aujourd'hui, il y a des bassins extraordinaires où Air Canada pourrait puiser sans être obligé d'envoyer les gens à l'école des langues.

C'est tout. Je voulais faire ce commentaire depuis longtemps. J'ai profité de cette occasion. Je suis heureux d'être arrivé à temps. Je ne veux pas être désagréable à votre égard, je veux simplement échanger avec vous et mes collègues.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Cela réduirait les dépenses.

M. Yvon Godin: [Note de la rédaction: inaudible].

La coprésidente (La sénatrice Shirley Maheu): Il y en a partout.

Le sénateur Marcel Prud'homme: Il existe un bassin extraordinaire au Nouveau-Brunswick, par exemple à Bathurst.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Je suis d'accord avec vous qu'il y a un bassin extraordinaire. Je le sais d'autant plus que j'ai fait du recrutement pendant des années et des années, surtout du recrutement d'agents de bord et d'agents qui travaillent dans les aéroports.

Air Canada, entre autres critères, donne préséance aux candidats qui parlent plusieurs langues. J'ai expliqué plus tôt que nous n'embauchons pas de personnel unilingue, et un candidat qui parle plusieurs langues aura certainement un atout supplémentaire face à un candidat qui n'en parle que deux.

Vous avez raison, ces bassins existent. Je voudrais simplement préciser que ces bassins sont devenus de plus en plus pauvres. Nous avons embauché énormément de personnes provenant de ces bassins et nous ne sommes pas les seuls. Les entreprises qui dirigent, par exemple, des centres d'appels font aussi appel à du personnel qui parle plusieurs langues. Nous avons de plus en plus de difficulté à trouver des candidats. Vous comprendrez qu'il n'y a pas seulement la langue qui est un critère lors de l'embauche. Nous avons de plus en plus de difficulté à trouver des candidats intéressés à venir travailler à Air Canada, comme agents de bord ou comme agents passagers.

M. Yvon Godin: Je voudrais dire un dernier mot, faire un commentaire.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): D'accord.

M. Yvon Godin: Je veux que mon intervention soit consignée au compte-rendu. Le député Gérard Binet, qui est un nouveau membre du comité, a beaucoup parlé de la concurrence et du secteur privé. Il faut se rappeler d'où vient Air Canada.

Air Canada était un transporteur qui appartenait au gouvernement, qui faisait partie du secteur public. La compagnie a été vendue par mon prédécesseur, Doug Young, qui en était bien fier. Cela s'est fait à une condition: Air Canada devait rester bilingue. Cela n'a rien à voir avec la concurrence ou l'argent. Il s'agit d'un transporteur du secteur public que le secteur privé était bien d'accord d'acheter avec tout ce que cela comportait. Je veux être sûr que ce soit clair.

• 1735

M. Gérard Binet: C'est très bien, monsieur Godin.

M. Yvon Godin: Merci bien.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci beaucoup, monsieur Markey, madame Perreault et madame Dugas de votre patience et de nous avoir accordé votre temps.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Cela m'a fait plaisir, madame.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Vous avez passé presque deux heures à vous faire griller, comme on dit.

Mme Michèle Perreault-Ieraci: Merci à vous de nous avoir invités.

La coprésidente (la sénatrice Shirley Maheu): Merci, monsieur, et au revoir.

La séance est levée.

Haut de la page