TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 21 mars 2000
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool (Tracadie, Lib.)): À l'ordre, s'il vous plaît. Le Comité mixte permanent des langues officielles se réunit en ce mardi, 21 mars.
Chers membres de comité, le Parti réformiste a demandé si le comité acceptait de télédiffuser la réunion d'aujourd'hui. Êtes-vous d'accord, membres du comité, pour que la réunion soit télédiffusée?
(La motion est adoptée)
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Conformément à l'alinéa 1.08(4)b) du Règlement, nous passons à l'étude des politiques et des programmes de langues officielles. Nous accueillons aujourd'hui l'honorable Lucienne Robillard, présidente du Conseil du Trésor du Canada, ainsi que M. Marcel Nouvet, dirigeant principal des Ressources humaines, et M. Gaston Guénette, secrétaire adjoint de la Division des langues officielles du Secrétariat du Conseil du Trésor.
• 1535
Je souhaite la bienvenue aux témoins et
je leur cède la parole.
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Je vous remercie, madame la coprésidente, ainsi que les membres du Comité des langues officielles. Je suis très heureuse d'être parmi vous aujourd'hui avec mes collaborateurs et je vous remercie pour votre invitation à comparaître devant votre comité.
Sachez que je suis ravie de venir vous parler de l'engagement qu'a pris notre gouvernement en matière de langues officielles et de vous exprimer ce que m'inspire personnellement cette question. La dualité linguistique canadienne n'est pas un aspect folklorique de notre patrimoine collectif. Elle constitue une ressource culturelle inestimable et un avantage économique indéniable. Au moment où les forces de la mondialisation nous rapprochent toujours davantage les uns des autres, il est souhaitable, voire essentiel, de comprendre et de parler plus d'une langue et, par le fait même, de connaître plus d'une culture. Nous avons donc, comme société, un avantage indéniable.
Il est important pour moi de promouvoir et de sauvegarder cette dualité, non seulement à titre de francophone du Québec, mais également en tant que Canadienne. Les principes qui sous-tendent nos politiques sur les langues officielles sont au coeur de l'identité même de notre pays.
La politique sur les langues officielles représente notre volonté de reconnaître les différences linguistiques et culturelles comme une source d'enrichissement. Ce n'est pas pour rien que la Charte canadienne des droits et libertés et la Loi sur les langues officielles renferment des principes communs.
Cette Loi sur les langues officielles témoigne de ce que les Canadiens et les Canadiennes ont accompli ensemble au fil des décennies. Elle nous permet de constater que la collectivité canadienne n'est pas une société monolithique qui s'exprime d'une seule voix et qu'elle ne l'a jamais été.
Notre gouvernement a une responsabilité importante à l'égard des Canadiens et des Canadiennes. Il doit promouvoir notre dualité linguistique. Le premier ministre du Canada s'est engagé à faire de cette mission un objectif de notre gouvernement. En ma qualité de présidente du Conseil du Trésor, je suis fière d'exercer un rôle de premier plan à ce chapitre.
Comme vous le savez, la stratégie adoptée par le gouvernement pour faire valoir dans les institutions assujetties à la loi les principes énoncés dans la Loi sur les langues officielles est en trois volets.
D'abord, nous favorisons la dualité linguistique au sein de la fonction publique fédérale. Pour ce faire, nous dotons les employés des meilleurs outils qui soient pour servir les Canadiens et les Canadiennes dans les deux langues officielles et nous assurons également l'égalité d'accès à l'emploi pour les francophones et les anglophones.
Deuxièmement, nous cherchons à améliorer constamment l'accès aux services offerts dans nos deux langues officielles. Les Canadiens et les Canadiennes s'attendent à un service de haute qualité de la part de leur gouvernement: un service rapide et efficace. Ils sont également en droit de s'attendre à recevoir ce service dans la langue officielle de leur choix dans les bureaux désignés bilingues.
Troisièmement, nous nous employons à favoriser un développement sain et dynamique des communautés de langue officielle en situation minoritaire de concert avec celles-ci. Au fil des ans, les Canadiens ont reconnu que la diversité constituait un atout pour notre pays. Nous devons donc célébrer cette diversité et veiller à ce que ces communautés obtiennent l'appui dont elles ont besoin non seulement pour survivre, mais aussi pour s'épanouir, ce qui est encore plus important.
Vous me permettrez donc d'approfondir chacun de ces éléments.
[Traduction]
La fonction publique du Canada est reconnue à juste titre pour son professionnalisme et son talent. Elle sert de modèle partout dans le monde. En ce début de nouveau millénaire, notre gouvernement s'engage à tabler sur cette assise solide. Nous préparons la fonction publique à relever les défis de l'avenir. En favorisant la constitution d'effectifs bilingues, nous créons avant tout une main-d'oeuvre supérieure.
La Loi sur les langues officielles fait du français et de l'anglais les langues de travail dans les institutions fédérales. Cela signifie que les fonctionnaires fédéraux ont certains droits et obligations en matière de langues officielles. Nous voulons les sensibiliser davantage à ces droits et obligations, et veiller à ce qu'ils soient respectés. Mais, malgré l'adoption de politiques, la publication d'outils et la tenue d'ateliers de sensibilisation sur la langue de travail, force nous est de reconnaître que nous n'avons pas atteint entièrement nos objectifs en cette matière. Des progrès ont été réalisés, mais nous devons maintenir le cap.
• 1540
Le leadership doit commencer à l'échelon le plus élevé—les
cadres supérieurs doivent donner l'exemple. C'est la raison pour
laquelle nous avons établi de nouvelles politiques au sujet des
profils linguistiques des cadres supérieurs. Notre objectif est
clair: les cadres supérieurs à la fonction publique du Canada
doivent atteindre une connaissance linguistique appréciable pour
travailler dans les deux langues officielles. Ce n'est que pure
logique: quand vous tenez des réunions ou conseillez des employés,
vous devez être sensible à la langue parlée par vos collègues.
Cette sensibilité devrait à son tour se répercuter sur
l'organisation tout entière.
Notre gouvernement croit fermement que les francophones et les anglophones doivent avoir droit à l'égalité d'accès à l'emploi et à l'avancement au sein des institutions. Nous ne tolérerons aucune forme de discrimination dans le milieu de travail, y compris celle qui pourrait être fondée sur la langue. En bout de ligne, plus nos effectifs sont bilingues, mieux ils sont préparés à traiter avec le public qu'ils servent.
Cela m'amène au second point: l'amélioration de la prestation de services dans les deux langues officielles. Au moment où nous entrons dans le XXIe siècle, les rapports entre les gouvernements et les citoyens se transforment. Grâce à de nouvelles technologies comme Internet, nous avons la possibilité comme jamais auparavant de communiquer directement avec le public. Nous pouvons faire en sorte que les Canadiens participent à l'évaluation et à l'élaboration des politiques. Nous pouvons offrir les services plus rapidement. Une simple touche de clavier d'ordinateur vous donne maintenant accès au gouvernement du Canada.
Nous assistons donc à une révolution au chapitre de la prestation de services. À mesure que nous mettons au point de nouvelles façons de communiquer avec les Canadiens, nous devons toutefois veiller à ce que la dualité linguistique occupe le devant de la scène. Sur ce dernier point, je me permets de vous rassurer.
De manière générale, la situation actuelle est positive. Une étude du Conseil du Trésor entreprise l'an dernier a permis de confirmer que les bureaux désignés bilingues satisfont dans une très grande mesure aux besoins de la clientèle. Nous avons même constaté une amélioration à cet égard. Au Nouveau-Brunswick et dans la région de la capitale nationale, des services entièrement bilingues sont offerts au public. Il s'agit là de progrès notables, mais nous devons continuer d'innover.
Le mois dernier, par exemple, j'ai eu le plaisir d'inaugurer plusieurs centres d'accès Service Canada partout au pays. Service Canada est un ambitieux projet pilote conçu pour établir un guichet unique facile d'utilisation qui donnera accès à l'information sur plus d'un millier de programmes et de services du gouvernement du Canada. Service Canada met à profit des technologies comme Internet et le téléphone pour rapprocher le gouvernement et les citoyens. Cette initiative peut se résumer en deux mots clés: accès et qualité.
Le réseau de Service Canada nous permettra de rejoindre un plus grand nombre des communautés de langue officielle en situation minoritaire, surtout en milieu rural. Nous pourrons mieux les informer au sujet des programmes et des services gouvernementaux qui sont spécialement adaptés à leurs besoins. Il nous permettra également de mieux cerner ces besoins. Après tout, le gouvernement ne peut pas et ne doit pas dicter leurs besoins aux Canadiens, mais plutôt écouter et agir en conséquence.
Ce qui m'amène à mon dernier point, c'est-à-dire les efforts que déploie le gouvernement du Canada pour contribuer au développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire. Il s'agit d'une composante essentielle de la politique sur les langues officielles. Peu de Canadiens sont conscients des défis auxquels sont confrontées les minorités linguistiques dans la vie de tous les jours. Il s'exerce inévitablement une pression, de manière habituellement très subtile et souvent involontaire, qui incite les gens à se fondre dans la majorité. Il faut résister à ce phénomène. Les francophones de Sudbury, de Saint-Boniface et de Halifax, tout comme les anglophones de Lennoxville et de Gaspé, ont le droit de s'exprimer dans leur langue et de voir leur collectivité se développer à leur façon.
L'engagement qu'a pris le gouvernement du Canada de venir en aide aux communautés de langue officielle en situation minoritaire se manifeste de différentes façons. Premièrement, nous devons veiller à ce que leur situation soit reconnue et prise en considération par les décideurs en place au gouvernement du Canada. Il faut pour cela déployer des efforts de sensibilisation. Pour y arriver, le président du Conseil du Trésor a signé en mars 1997 un protocole avec la ministre du Patrimoine canadien dans lequel il s'est engagé à collaborer avec les grandes institutions à la promotion du développement de ces communautés.
• 1545
Cette étape a été suivie en mars 1998 par la décision de
nommer un champion des langues officielles dans toutes les
institutions fédérales où le Conseil du Trésor est l'employeur. Les
communautés de langue officielle en situation minoritaire peuvent
ainsi facilement repérer un cadre supérieur avec lequel elles
peuvent communiquer. Ces champions sont des personnes énergiques,
reconnues pour leur faculté de faire avancer les choses.
D'ailleurs, j'ai participé il y a quelques semaines, à Winnipeg, à la réunion des champions des langues officielles. Je leur ai rappelé à quel point nous comptons sur eux, non seulement pour atteindre nos objectifs, mais pour nous aider à développer les meilleurs outils possible. Les champions ont également la responsabilité de faire en sorte que la dualité linguistique soit incluse parmi les critères d'analyse dans les présentations ministérielles soumises au Conseil du Trésor. Je suis en mesure de vous confirmer que les décideurs au Conseil du Trésor sont ainsi davantage sensibilisés aux préoccupations des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Nous avons également établi des liens plus étroits entre les principaux intervenants fédéraux, comme le Comité consultatif des ministères sur les Langues officielles, le Comité national de développement des ressources humaines de la francophonie canadienne et le Comité national de développement des ressources humaines pour la communauté minoritaire anglophone. De cette façon, les enjeux sont étudiés d'une manière plus large et plus horizontale, étant donné que les ministères partagent l'information et le savoir- faire.
Le gouvernement travaille sur plusieurs front à doter les communautés de langue officielle en situation minoritaire des outils dont elles ont besoin pour assurer leur vitalité. Parallèlement, nous voulons permettre à ces collectivités de s'épanouir et de se développer comme le dictent leurs besoins. Le gouvernement fournira les outils, mais ce sont les collectivités qui ont la responsabilité d'optimiser leur usage.
[Français]
Mesdames et messieurs, je n'ai fait qu'effleurer les récentes initiatives gouvernementales adoptées dans ce domaine. Je pourrais continuer encore longtemps, mais j'estime qu'il est plus important d'entendre vos interventions.
Vous serez d'accord avec moi pour dire qu'il faut approfondir la discussion et la réflexion à ce chapitre, chez les décideurs comme dans le grand public. Le Conseil du Trésor bénéficie grandement du travail qu'il accomplit avec un bon nombre d'intervenants. Au cours des derniers temps, nous avons reçu bien des commentaires et des idées novatrices d'une variété de sources, tels les rapports du groupe de travail présidé par M. Yvon Fontaine, de M. Donald Savoie et du sénateur Simard. Ce genre de participation constitue une partie vitale d'un bon processus de prise de décision.
Ces rapports font état, entre autres, des inquiétudes que ressentent les communautés face aux changements profonds qu'a subis la fonction publique fédérale au cours des dernières années et des répercussions qu'ont eues ces changements sur leur développement et sur la prestation des services dans leur langue.
Certaines personnes s'interrogent sur le suivi qui a été apporté à ces rapports. Je profite donc de l'occasion qui m'est offerte, madame la présidente, pour déposer un document qui fait état des principales réalisations au sein de l'appareil gouvernemental entre le 30 avril 1998 et le 31 décembre 1999.
Nous avons regroupé les recommandations des rapports Savoie et Fontaine sous quatre avenues d'action, soit la réaffirmation de la dualité linguistique du Canada, l'élaboration d'outils de gestion, la sensibilisation au sein des institutions assujetties à la Loi sur les langues officielles et le soutien accordé aux communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Ce rapport que vous avez devant vous, Le vent dans les voiles, fait état des efforts déployés relativement à chacun de ces domaines importants. À titre d'exemple, ces mesures comprennent notamment l'aide fournie dans le cadre du Sommet de la Francophonie et l'élaboration d'une nouvelle politique du Conseil du Trésor qui prévoit que les institutions soumises à la Loi sur les langues officielles soient expressément tenues d'effectuer une analyse méthodique des répercussions des transformations sur les communautés de langue officielle en situation minoritaire. Ce rapport porte en outre sur diverses activités, par exemple les séances de formation offertes aux gestionnaires dans le but de les sensibiliser à l'importance de fournir des services de qualité dans les deux langues officielles.
La liste que je viens de dresser est loin d'être exhaustive, mais je crois que les quelques réalisations que j'ai énumérées confirment que nous sommes sur la bonne voie. C'est sur ces assises que nous bâtirons nos réalisations futures.
• 1550
Mesdames et messieurs les membres du Comité des
langues officielles, je sais que la dualité
linguistique du Canada compte beaucoup pour chacun
d'entre vous ainsi que pour chacun et chacune des
Canadiens et Canadiennes, et j'ai bon espoir qu'en ce
début de millénaire, la dualité linguistique et les
valeurs qu'elle incarne demeureront un élément
essentiel de l'âme canadienne.
Mais nous devons demeurer vigilants. Malgré les progrès accomplis, malgré les lacunes identifiées que nous nous efforçons de corriger, un fait demeure: si nous voulons conserver cette richesse collective que constitue notre dualité linguistique, nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers. Nous ne pouvons pas tenir pour acquis que le danger est écarté et que le développement de nos communautés linguistiques en situation minoritaire est assuré. Nous devons travailler sans relâche et garder présent à notre esprit que chacun de nos gestes et chacune de nos interventions gouvernementales doivent refléter notre volonté de permettre à ces communautés de s'épanouir et de demeurer fortes et vivantes.
Cette vigilance, elle doit s'exercer en partenariat non seulement à l'intérieur du gouvernement, mais également avec tous ceux et celles qui partagent cet objectif.
Je suis consciente du rôle qu'exerce votre comité dans le façonnement des politiques et j'ai hâte de travailler en plus étroite collaboration avec vous dans les mois à venir afin de poursuivre nos échanges.
J'aimerais donc, aujourd'hui, connaître votre point de vue et peut-être répondre à certaines de vos préoccupations avec mes deux collaborateurs.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci, madame la ministre. Avant de donner aux membres du comité l'occasion de poser des questions, je voudrais juste connaître la distribution de ce rapport. Est-il public ou s'il est seulement à la disposition des membres du comité?
Mme Lucienne Robillard: Il est public, madame la présidente.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Il est public. Tout le monde le sait.
Mme Lucienne Robillard: Oui.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci beaucoup.
[Traduction]
Je donne la parole à Mme Meredith, qui souhaite poser la première question. Madame Meredith.
Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Réf.): Merci, madame la présidente, et merci, madame la ministre, d'être venue nous rencontrer cet après-midi.
J'ai écouté avec grand intérêt, et je n'ai rien contre l'orientation que vous semblez adopter, toutefois, il me reste une préoccupation. Je représente une circonscription de la Colombie- Britannique et, dans notre région, il faut se rendre à l'évidence, la langue maternelle d'au moins la moitié des jeunes du district scolaire de Vancouver n'est ni le français, ni l'anglais. Ce qui m'inquiète, c'est que ces gens-là, qui n'auront pas la possibilité d'utiliser la deuxième langue qu'ils apprennent à l'école, risquent de ne pas acquérir des connaissances très solides. Pour perfectionner une langue, il faut pouvoir l'utiliser.
En ce qui concerne les hauts fonctionnaires, cela m'inquiète un peu également; ce que je crains, c'est qu'à long terme les Canadiens de l'Ouest, et en particulier ceux de la Colombie- Britannique, se voient exclus des postes supérieurs de la fonction publique fédérale faute d'une compétence suffisante dans les deux langues officielles.
Madame la ministre, pouvez-vous m'expliquer qui sera chargé de déterminer la compétence requise pour un poste de cadre supérieur. Est-ce qu'une personne qui a suivi des cours de base dans cette autre langue pourrait se perfectionner suffisamment à l'usage, ce qui défavoriserait fortement les gens de l'ouest du Canada qui n'ont pas les connaissances et l'expérience nécessaires dans cette autre langue? Qui détermine le niveau requis pour les postes supérieurs?
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, si vous le permettez, notre objectif est d'avoir des fonctionnaires supérieurs suffisamment à l'aise dans les deux langues officielles pour pouvoir travailler avec leurs employés dans la langue de ceux-ci. La plupart de nos cadres supérieurs suivent des cours lorsqu'ils n'ont pas déjà une connaissance suffisante de l'autre langue. Ils sont en train d'apprendre, c'est toujours possible. Ce ne sera pas un critère de sélection, mais une fois en poste, il faudra qu'ils apprennent l'autre langue.
Peut-être que mon collègue,
[Français]
le dirigeant principal des ressources humaines,
[Traduction]
pourrait donner des détails au sujet du niveau.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Monsieur Nouvet.
M. Marcel Nouvet (dirigeant principal des ressources humaines, Secrétariat du Conseil du Trésor): Pour vous donner une définition plus précise, un candidat au poste de sous-ministre adjoint doit parler le français au niveau C-B-C. La Commission de la fonction publique se charge d'une bonne partie de la formation, et également des examens.
Avec un niveau C-B-C, vous avez une connaissance de la langue amplement suffisante pour travailler, vous pouvez lire des documents en français et discuter avec vos employés en français ou en anglais, dans l'une ou l'autre langue. C'est donc l'exigence en ce qui concerne les sous-ministres adjoints.
En dessous de ce niveau-là, ce n'est pas toujours exigé, mais de plus en plus dans la fonction publique, il est entendu que pour atteindre des postes supérieurs, il faut acquérir ces connaissances. Dans le cas des régions bilingues, ce niveau de compétence est exigé pour d'autres types de poste, lorsque les employés travaillent dans les deux langues, et également, et c'est encore plus important, lorsqu'on est appelé à traiter avec un public qui exige un service dans les deux langues.
Mme Val Meredith: Quel est le niveau pour qu'une région soit bilingue? À partir de quelle proportion de la population les deux langues officielles sont-elles exigées?
M. Marcel Nouvet: Cela est défini par la loi. Si vous le voulez bien, je vais demander à Gaston Guénette de vous donner des détails.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Monsieur Guénette.
[Français]
[Note de la rédaction: Inaudible]
M. Gaston Guénette (secrétaire adjoint, Division des langues officielles, Secrétariat du Conseil du Trésor): ...sur la base de 10 p. 100 des gens de la langue de la minorité, et c'était après le dépôt de deux rapports de la commission Duhamel, qui avait fait des recommandations au gouvernement. De façon générale, les régions bilingues sont la région de la Capitale nationale, certaines parties du Québec, le nord et l'est de l'Ontario et le Nouveau-Brunswick en entier.
[Traduction]
Mme Val Meredith: Si je comprends bien la situation, les langues officielles s'appliquent lorsqu'une entreprise est réglementée par le gouvernement fédéral. Comme je connais particulièrement bien le secteur des transports, je vais prendre l'exemple des compagnies aériennes. Maintenant qu'Air Canada va être responsable de 80 p. 100 des lignes régulières, à partir de quelle proportion de la population une région est-elle considérée comme étant bilingue? S'agit-il de 10 p. 100 ou bien...
Mme Lucienne Robillard: Non, c'est très différent. Je crois que le gouvernement a décidé que, non seulement Air Canada, mais également tous ses affiliés, doivent respecter la Loi sur les langues officielles, en particulier pour tout ce qui concerne le service au public, tout cela doit être offert dans les deux langues.
Mme Val Meredith: Dans toutes les régions du pays, ou bien seulement dans celles qui ont été désignées... Je crois que la Loi sur les langues officielles parle de 5 p. 100.
[Français]
M. Gaston Guénette: Je voudrais préciser que les exigences de bilinguisme pour la langue de travail sont établies en vertu des régions bilingues telles qu'indiquées dans la Loi sur les langues officielles et que j'ai énumérées il y a quelques minutes. Par contre, pour ce qui est du service au public, il est offert en fonction de l'importance de la demande ou de la vocation des bureaux et non pas en fonction des régions.
Dans l'ensemble du pays, on a 12 044 points de service établis à partir de la réglementation sur le service au public, selon la démographie ou la vocation des bureaux. On a déterminé que 3 450 de ces bureaux donneraient un service au public dans les deux langues officielles.
[Traduction]
Mme Val Meredith: Je le répète, ce qui m'inquiète, et je ne suis pas certaine que vous compreniez bien, c'est que certains employés dans les compagnies aériennes, les compagnies de chemin de fer, entre autres, sont réglementés par le gouvernement fédéral lorsqu'ils offrent des services dans certaines régions, comme l'ouest du Canada, où il n'y a pas tellement de gens qui parlent le français. Le chinois, le mandarin, le cantonais et le punjabi, peut-être, mais pas le français.
Or, dans ces régions, les employés de ces compagnies qui ne parlent pas le français couramment risquent de perdre leur emploi à cause de cette exigence du gouvernement fédéral. Est-ce que les Canadiens de l'Ouest devraient s'inquiéter de cette possibilité?
Mme Lucienne Robillard: Je pense qu'il faut préciser les choses. Ce que nous voulons pour les citoyens de notre pays... Nous avons deux langues officielles, c'est-à-dire que vous, consommatrice, lorsque vous faites un voyage en avion, pouvez être servie dans votre propre langue. Autrement dit, la compagnie doit s'organiser pour vous offrir ce service car la loi l'exigera.
Peut-être que M. Guénette
[Français]
pourrait vous l'expliquer en détail.
M. Gaston Guénette: Merci. Je voudrais préciser que les 12 000 points de service dont j'ai parlé tout à l'heure comprennent les services qu'offrent les lignes aériennes. La réglementation régissant le service au public dans les deux langues officielles s'applique à tous les aéroports qui reçoivent plus de 1 million de passagers par année. Ils sont désignés ipso facto comme des endroits où le service doit être donné dans les deux langues officielles. Les aéroports et les lignes aériennes qui desservent l'est du Canada, c'est-à-dire qui offrent des points d'arrivée ou des points de départ dans la région de la Capitale nationale, au Québec ou au Nouveau-Brunswick, doivent également offrir leurs services dans les deux langues officielles.
Quant aux autres lignes aériennes qui n'ont pas de point d'arrivée ou de départ dans ces régions du pays, il faut évaluer la proportion de passagers de langue minoritaire. Si cette proportion atteint 5 p. 100, elles devront offrir les services dans les deux langues officielles.
[Traduction]
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame Meredith, peut-être pourrez-vous approfondir cette question lors de votre deuxième tour.
[Français]
Monsieur Plamondon.
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Je vous souhaite la bienvenue, madame la ministre.
Madame la ministre, dans son rapport, le Comité mixte des langues officielles constatait, avec le commissaire aux langues officielles, l'absence de volonté politique du gouvernement de donner suite à l'engagement pris par le premier ministre de faire respecter la partie VII de la Loi sur les langues officielles.
À la suite de ce rapport, les rapports Fontaine et Savoie concluaient aussi que le gouvernement n'avait pas été en mesure de s'acquitter de ses engagements. L'honorable sénateur Simard, qui siège à ce comité, a rédigé un rapport. Je me permets de vous citer un extrait de la page 28. Il disait ceci:
Cela étant déclaré, penchons-nous également sur les directives générales qui ont été données dans divers ministères et sociétés. Dans ces divers ministères, on a éliminé ou amalgamé à la direction des ressources humaines la direction qui veillait à la bonne marche des langues officielles.
Entre 1990 et 1997, on a également réduit de moitié le nombre de fonctionnaires affectés aux langues officielles. À la page 71 du plus récent rapport du Conseil du Trésor, on trouve un tableau portant sur l'évaluation des coûts du programme des langues officielles dans les institutions fédérales qui nous indique clairement que les coûts liés à ce programme n'ont cessé de décroître depuis 1990. Ce sont des faits quand même frappants qui démontrent qu'il n'y a pas de volonté politique de la part du gouvernement de vraiment respecter les engagements qu'il pris en ce qui concerne la partie VII.
Pouvez-vous nous dire aujourd'hui si vous allez respecter la Loi sur les langues officielles et soumettre non seulement 28 agences, mais les 128 agences gouvernementales à l'application de la partie VII de la Loi sur les langues officielles? Sinon, en vertu de quel principe à ajustement variable pensez-vous avoir le droit d'exempter une centaine de ces organismes de l'application des dispositions de la Loi sur les langues officielles?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, M. le député a soulevé plusieurs questions en même temps, bien qu'elles soient toutes liées à la partie VII de la loi, si je comprends bien. Cette partie de la loi relève de la responsabilité expresse de ma collègue la ministre du Patrimoine canadien. Je crois comprendre qu'elle est déjà venue témoigner devant vous et que vous avez pu discuter avec elle.
• 1605
Ce que je peux dire au député, madame la présidente,
c'est qu'il est très clair que le gouvernement a l'intention
de respecter la Loi sur les langues
officielles.
Je ne nie pas le fait qu'il y a eu des réductions
d'effectifs dans les différents ministères, y compris au
Conseil du Trésor, lorsque notre gouvernement a dû
remettre nos finances publiques en bon état.
Je ne doute pas non plus que, tout comme les autres
employés, les employés qui étaient
affectés aux programmes relatifs aux langues officielles
ont été touchés. Ce
qui est très important, c'est de regarder les actions
qui ont été posées. Dans ce contexte-là, la partie VII
de la Loi sur les langues officielles est une partie fort
importante étant donné que de très nombreuses institutions
fédérales sont visées—comme vous l'avez souligné, 28
d'entre elles sont
indiquées dans la loi—et que des
demandes ont été faites à ma
collègue la ministre du Patrimoine canadien afin qu'on
en ajoute encore d'autres.
On exige que toutes les institutions fédérales qui sont
visées aient un plan pour favoriser
l'épanouissement des minorités linguistiques dans ce
pays et promouvoir la reconnaissance de ces
communautés.
En ce sens, nous, du Conseil du Trésor, venons appuyer le ministère du Patrimoine canadien avec lequel nous avons conclu une entente. Comme vous l'avez souligné, les dépenses liées au programme des langues officielles ont diminué, mais elles sont maintenant stables. Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'améliorations possibles, mais il est très clair que ce gouvernement a pris un engagement ferme de favoriser la promotion et le développement des communautés minoritaires dans notre pays.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Monsieur Plamondon.
M. Louis Plamondon: C'était une réponse plutôt philosophique. Il ne m'apparaît pas y avoir un engagement très, très ferme de votre part, vous qui détenez les cordons de la bourse.
Je voudrais cependant profiter de l'occasion de votre passage pour parler d'un autre sujet, soit les tribunaux quasi judiciaires. Vous savez qu'à la fin de novembre, un traducteur du nom de Pierre Devinat a gagné une cause devant la Cour fédérale. La Commission de l'immigration et du statut de réfugié, un tribunal quasi judiciaire, rendait ses décisions dans une seule langue. Elle devra dorénavant les rendre dans les deux langues officielles en vertu de l'article 20 de la Loi sur les langues officielles.
Dans son jugement, la Cour fédérale reprend cet extrait d'un jugement antérieur et dit ceci:
Je suis étonné que la ministre qui était responsable du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration n'ait jamais, alors qu'elle occupait ce poste, enjoint la commission de respecter la Loi sur les langues officielles avant que la commission ne soit obligée de le faire à la suite d'un jugement de la Cour fédérale. La commission dont vous étiez la ministre a même invoqué en cour l'argument qu'elle ne traduisait pas ses jugements parce que cela lui coûterait trop cher. C'est donc dire que la ministre de l'époque, en l'occurrence vous-même, ne lui donnait que les ressources financières requises pour s'acquitter à demi de ses obligations législatives, voire constitutionnelles.
On sait que la partie VII est au coeur même du développement des communautés francophones et acadiennes. Est-ce que vous, comme présidente actuelle du Conseil du Trésor, allez vous assurer que tous les tribunaux quasi judiciaires du gouvernement fédéral auront les ressources financières appropriées pour respecter les dispositions de l'article 20 de la Loi sur les langues officielles? Est-ce que vous, comme ministre, vous engagez à présenter les requêtes nécessaires au financement de ces tribunaux?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, soyons très clairs aujourd'hui autour de cette table. Vous savez très bien que la Loi sur les langues officielles comporte différentes parties dont différents ministres sont responsables. Il faut que cela soit perçu très clairement. Je suis responsable de certaines parties de la loi, tandis que mes collègues les ministres du Patrimoine canadien et de la Justice sont responsables d'autres parties de la loi. J'aimerais bien qu'on comprenne très clairement aujourd'hui mes responsabilités comme présidente du Conseil du Trésor face à cette loi.
Le cas que vous citez, monsieur le député, est un dossier qui, me dit-on, est toujours devant les tribunaux. Je ne ferai donc pas de commentaires sur ce dossier particulier, mais je vous dirai que je suis certaine que ma collègue de la Justice se conformera au jugement des tribunaux et que si des ressources supplémentaires sont nécessaires, elle présentera sûrement des demandes en ce sens.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Je vous remercie, madame la ministre.
Monsieur Plamondon, puisque votre temps est écoulé, vous pourrez intervenir à nouveau lors du deuxième tour.
Sénateur Gauthier.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ontario, Lib.): Madame la présidente, je vous remercie. En raison d'un problème technique, la sténotypiste ne peut pas faire fonctionner son appareil. Ce n'est pas sa faute puisque l'équipement est défectueux. Vous m'excuserez donc, madame la ministre, si je ne peux pas vous répondre et si le dialogue est peut-être davantage un monologue.
J'ai bien apprécié votre commentaire sur la langue de travail. À la page 2 de vos notes d'allocution, vous admettez que:
M. Plamondon et moi étions là en 1989, lorsqu'on a modifié l'ancienne loi et adopté la nouvelle Loi sur les langues officielles. On avait inséré à l'article 36 de la loi un genre de jalon. On y avait inscrit que le 1er janvier 1991, les fonctionnaires auraient le droit de travailler dans leur langue et qu'ils disposeraient de documents de travail dans les deux langues officielles.
Pourriez-vous me dire si aujourd'hui, 10 ans après l'adoption de la loi, on peut travailler dans les deux langues officielles du pays et si on dispose de documentation, de renseignements et de directives dans les deux langues officielles du pays?
Mme Lucienne Robillard: Je peux vous dire que de façon générale, oui, les instruments de travail sont offerts dans les deux langues officielles. Cependant, je dois avouer que dans le domaine informatique de façon particulière et au niveau de l'utilisation de logiciels, des problèmes subsistent toujours. Parmi les trois responsabilités du Conseil du Trésor que j'ai décrites aujourd'hui, celle que vous ciblez, soit la langue de travail, est le domaine où il nous reste le plus de travail à faire. Bien que je vous aie dit que nos employés disposent d'instruments de travail dans les deux langues, il faut aussi qu'ils puissent travailler dans la langue de leur choix. Certains employés ont récemment porté plainte parce qu'ils ne pouvaient pas travailler dans leur langue, par exemple lors de réunions qui avaient lieu dans différents ministères. Il est très clair que ce domaine de la langue de travail à l'échelle du gouvernement a été ciblé comme une priorité par le comité des sous-ministres, qui a retenu quatre dossiers prioritaires, dont celui-là. Ça veut dire qu'il y a encore des progrès à faire.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je vous remercie. J'ai pu lire vos lèvres et je voudrais vous dire en passant que vous avez de belles lèvres.
Des voix: Ah, ah!
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: C'est un compliment que je lui fais. Ce n'est pas facile lorsqu'on est sourd.
Je voudrais changer de sujet et revenir à l'article 41 de la loi. On dispose de certains moyens pour mesurer l'atteinte des résultats escomptés. À la page 15 du plan d'action 1998-2001 du Conseil du Trésor, on lit:
• 1615
Je voudrais vous poser une ou deux questions. Qui
analyse ces rapports de performance dans les ministères
et combien de rapports de performance dans ce domaine
ont été analysés entre 1982 et 1999?
Je vous pose la question parce que notre recherchiste me dit que 170 institutions fédérales sont assujetties à la Loi sur les langues officielles. Comment peut-on expliquer que le Conseil du Trésor n'ait reçu que sept rapports de vérification interne ayant porté sur les langues officielles en 1998-1999?
Comprenez-vous ma question?
Mme Lucienne Robillard: Oui, je la saisis très bien.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame Robillard.
Mme Lucienne Robillard: Merci, madame la présidente. Je saisis très bien et vous avez raison quand vous dites—vous avez une bonne recherchiste—que 170 institutions sont soumises à la loi et doivent indiquer, dans leur rapport sur les plans et les priorités... D'abord, les institutions dont on a parlé tout à l'heure doivent déposer un plan d'action au ministère du Patrimoine canadien. Elles doivent aussi l'indiquer dans les plans et les priorités du ministère qui sont analysés par la Division des langues officielles du Conseil du Trésor. Je demanderai donc à M. Guénette d'apporter des précisions.
Parlez lentement, monsieur Guénette, en regardant monsieur.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Voulez-vous me regarder aussi quand vous parlez, s'il vous plaît? Ce n'est pas ma faute...
M. Gaston Guénette: Il y a 28 ministères qui doivent présenter des plans d'action pour la mise en oeuvre de l'article 41.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Sur 170?
M. Gaston Guénette: Sur 170. Ce sont les 28 ministères qui ont des responsabilités particulières quant au développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire, soit dans le secteur économique, soit dans le secteur du développement des ressources humaines. Le plan d'action pour la mise en oeuvre de l'article 41 de chacune de ces 28 institutions est d'abord soumis à Patrimoine Canada, qui en fait l'analyse et qui en rend compte au Parlement dans un rapport annuel présenté par le ministre.
Ces 28 ministères, en plus des autres institutions qui s'y ajoutent pour faire le compte de 170, présentent aussi des bilans annuels sur les langues officielles au Secrétariat du Conseil du Trésor. Ces bilans portent sur la mise en oeuvre du bilinguisme institutionnel, à savoir le service au public, la langue de travail et la participation équitable, et aussi sur ce qu'il en est du développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire.
Le rôle du Secrétariat du Conseil du Trésor, pour ce qui est des plans d'action pour la mise en oeuvre de l'article 41, est d'inciter les institutions fédérales à prendre en considération le développement des communautés de langue officielle en situation minoritaire dans leur planification stratégique. Ces exercices-là se font donc par les deux ministères, Patrimoine canadien et le Secrétariat du Conseil du Trésor, qui travaillent en collaboration l'un avec l'autre.
Vous avez aussi abordé un deuxième point, qui était celui des vérifications. Vous avez dit que les recherchistes avaient dit que sept ministères avaient fait des vérifications internes. Je veux placer les vérifications internes des ministères dans un contexte plus global. Il faut savoir que les ministères font également des sondages à partir d'indicateurs de rendement mis au point par le Secrétariat du Conseil du Trésor et visant à mesurer la satisfaction du public et la satisfaction des employés à travailler dans l'une ou l'autre des deux langues officielles. Ces sondages ne sont pas compris dans les vérifications que vous venez de mentionner.
En plus, le Secrétariat du Conseil du Trésor fait des vérifications dans certains domaines. On en a fait sur le service au public, sur les subventions et contributions et sur divers autres sujets. Le Secrétariat prend l'initiative de faire certaines vérifications.
Je compléterai ma réponse en disant que l'on demande des bilans annuels sur les langues officielles, comme je le mentionnais tout à l'heure, aux ministères. Ces bilans sont des diagnostics préparés par les ministères sur le stade où en est la mise en oeuvre des langues officielles chez eux. Donc, ce sont des documents qui ont une certaine objectivité, qui ne portent pas le titre de «rapport de vérification», mais qui décrivent la situation telle qu'elle est et proposent, au besoin, des correctifs.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Merci.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Est-ce que ça va, sénateur Gauthier?
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Puis-je poser une seule question additionnelle?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Toute courte.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Cette question concerne Internet, madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Allez-y.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous savez que la commissaire aux langues officielles a critiqué les textes français parce que la traduction ne serait pas, comment dirais-je, toujours très bonne. Je ne veux pas critiquer les traducteurs, parce que je sais que ce sont des personnes qui travaillent très fort, mais avez-vous pris des dispositions pour essayer de corriger la situation afin de donner suite à la recommandation de Mme Adam, la commissaire aux langues officielles?
Mme Lucienne Robillard: Je ne peux que souscrire à cette remarque de Mme la commissaire aux langues officielles. Si vous naviguez vous-même un peu sur les sites Internet des différents ministères, vous allez vous apercevoir que certains d'entre eux ont des sites bilingues, des sites dans les deux langues officielles, mais dont la qualité de la langue laisse parfois un peu à désirer. Je le note personnellement.
Vous savez sûrement que Mme la commissaire a aussi déposé deux rapports concernant les services offerts sur Internet et qu'il y a eu un engagement clair du gouvernement. Nous avons répondu à Mme la commissaire aux langues officielles à propos de chacune de ses recommandations, en particulier celles contenues dans son deuxième rapport.
Le ministère du Patrimoine canadien assume le leadership de la mise en oeuvre du contenu de cette réponse qui engage l'ensemble des ministères. Ceux-ci doivent travailler à améliorer la qualité de la langue, d'abord à augmenter la disponibilité de services en français et ensuite à améliorer la qualité du français sur Internet.
Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Merci beaucoup.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci.
Nous recevrons prochainement la commissaire des langues officielles et nous serons certainement très curieux et heureux d'entendre parler des améliorations qui ont pu être apportées sur ce point.
Sénateur Beaudoin.
Le sénateur Gérald-A. Beaudoin (Rigaud, PC): Merci, madame la ministre, d'être venue comparaître devant notre comité.
La première question que je voulais poser portait sur la fameuse partie VII. Toutefois, comme l'affaire est devant les tribunaux, que le sujet est sub judice, attendons donc de connaître ce que les tribunaux auront à dire. Cependant, à mon avis, si un texte aussi important que la Loi sur les langues officielles contient plusieurs articles dans la partie VII, c'est certainement pour quelque chose. J'ai beaucoup de mal à m'imaginer que ce ne pourrait pas être exécutoire. Enfin, ce n'est que mon opinion. Attendons.
J'aimerais plutôt vous entendre nous parler des quatre avenues d'action, ou plutôt de la deuxième, l'élaboration d'outils de gestion. Est-ce que vous pourriez élaborer à ce sujet? Est-ce que ce sont des moyens financiers? Est-ce que ce sont des fonctionnaires? Est-ce que ce sont des programmes quelconques qui aident à donner suite aux rapports Savoie et Fontaine?
Le premier est la réaffirmation de la dualité linguistique, et tout le monde est d'accord. Le deuxième est l'élaboration d'outils de gestion et la sensibilisation au sein des institutions assujetties à la loi. Évidemment, il y a tellement d'institutions qui sont assujetties à la Loi des langues officielles qu'il y a plusieurs façons de les sensibiliser.
En ce qui a trait aux outils de gestion, est-ce qu'il y a quelque chose en particulier qui a été pensé, imaginé ou élaboré?
Mme Lucienne Robillard: Je vous dirai qu'il y a eu plusieurs suggestions. Cependant, le principal outil de gestion, c'est sûrement une politique du Conseil du Trésor. Vous vous rappellerez qu'une conclusion de M. Fontaine et de son groupe s'imposait à l'évidence. Dans ce rapport qui portait sur les transformations gouvernementales, son diagnostic, si je puis m'exprimer ainsi, était que, malgré la transformation de certaines activités au sein même du gouvernement, malgré la mise en place de modes de services parallèles, on n'avait pas suffisamment tenu compte de l'impact sur les communautés de langues officielles dans ce pays. Son rapport en donnait plusieurs exemples.
À partir de cette constatation, M. Fontaine faisait plusieurs recommandations, la première étant de réaffirmer nettement et clairement cet engagement. Il nous demandait aussi de revoir le cadre de gestion du Conseil du Trésor, ce que nous sommes en train de faire. Néanmoins, nous voulons aller plus loin qu'une simple revue du cadre de gestion. Au Conseil du Trésor, nous voulons concevoir une politique qui préciserait très clairement ce que les ministères doivent faire quand ils changent leur façon d'offrir un service.
Cette politique, à l'heure actuelle, est en voie d'élaboration. Nous sommes en consultation, à son sujet, avec les divers ministères et aussi avec les communautés. Elle servira de filtre supplémentaire, d'outil de gestion supplémentaire, avant même que la décision gouvernementale de mesurer l'impact ne soit appliquée. C'est peut-être ce qui manquait antérieurement et que M. Fontaine dénonçait.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Sénateur Beaudoin.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Souvent, autour de cette table, on ramène la question financière sur le tapis. Et souvent on déclare que cela coûte trop cher dans tel ou tel secteur. Je suis toujours surpris d'entendre cet argument, parce que la Loi sur les langues officielles met sur le même pied la langue française et la langue anglaise dans tous les domaines fédéraux dans tout le pays, c'est-à-dire dans les 10 provinces. Cela est sans rapport avec la concentration des populations. Ce qui est important, ce sont les domaines. Dès qu'un domaine est fédéral, il doit être assujetti à la Loi sur les langues officielles.
Je parle d'institutions. Ce peut être un tribunal, une législature ou des organismes mis sur pied en vertu de lois fédérales. Ce sont des organismes de compétence fédérale et qui doivent être égaux. À ce moment-là, on ne peut pas reprocher au gouvernement de fournir de l'argent pour mettre en oeuvre le but même de la Loi sur les langues officielles. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus parce que j'entends souvent invoquer cet argument qui, je pense, n'est pas un bon argument.
Mme Lucienne Robillard: Je partage complètement votre opinion, monsieur le sénateur. M. Plamondon, tout à l'heure, a soulevé la question des coûts de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Je dois vous dire qu'en tant qu'ancienne ministre responsable de ce secteur, c'est un argument que je considérerais irrecevable.
C'est une obligation qui est non seulement inscrite dans la Loi sur les langues officielles, mais, fait encore plus important, qui est inscrite dans la charte, qui reconnaît aux deux langues l'égalité de statut. Il me semble donc que ça doit être là de façon très claire.
En conséquence, je suis d'accord avec vous que les coûts ne constituent pas un argument valable pour refuser de donner le service dans une des deux langues.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Je suis d'accord.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Ça va, sénateur Beaudoin?
Monsieur Godin.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Premièrement, j'aimerais souhaiter le bonjour à Mme la ministre. La question que je veux poser porte sur une chose qui m'inquiète vraiment.
Je me trouvais, la semaine dernière, à une séance du Comité des ressources humaines. Deux semaines auparavant, le Parti réformiste avait demandé les rapports du vérificateur général de 1991 et de 1994 sur Développement des ressources humaines. La semaine dernière, on n'a pas pu nous remettre ce rapport parce qu'il n'était qu'en anglais et qu'il n'avait jamais été traduit, cela après neuf ans.
S'il existe un tel problème ici, à la Chambre des communes, qui fait que les députés ne sont même pas capables de travailler avec des documents produits ici au fédéral, à Ottawa même, imaginez-vous ce qu'il en est en région.
J'aimerais savoir, madame la ministre, ce que vous avez à dire d'une telle situation. Vous allez dire que ce n'est pas de votre domaine, que cela relève d'un autre ministre. Est-ce à dire qu'il y a trois ou quatre ministres responsables de la question, qui peuvent se renvoyer la balle? J'aimerais entendre directement de votre bouche ce qu'on va faire, d'abord ici au Parlement, pour qu'on puisse obtenir les documents dans les deux langues.
Autrement, comme je l'ai dit la semaine dernière devant le Comité des ressources humaines, je pourrais bien, à la Chambre des communes, m'étendre sur le sujet pendant une heure, ce qui ferait un texte plus long que le document du vérificateur général. Le lendemain, je pourrais lire mon discours dans le hansard dans les deux langues officielles, tandis que le vérificateur général ne peut même pas présenter son document à un comité alors qu'il a été demandé par l'opposition deux semaines auparavant.
C'est un scandale pour les francophones, madame la présidente. Puis je vais vous en dire encore davantage; nous, les francophones, on est fatiguée de la situation. On se sent toujours pris en otages dans tout ce problème. C'est toujours notre faute à nous, quand on ne peut pas procéder. C'est inacceptable, totalement inacceptable. J'aimerais connaître votre position là-dessus, madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, je dois dire que mon collègue me surprend énormément. Si je comprends bien, il s'agit selon lui d'un rapport du vérificateur général qui ne serait pas traduit. Est-ce bien ce que je dois comprendre?
M. Yvon Godin: C'est cela.
Mme Lucienne Robillard: Cela m'apparaît impossible. Les rapports du vérificateur général, madame la présidente, sont déposés régulièrement à la Chambre dans les deux langues officielles.
M. Yvon Godin: D'accord. Je vais vous expliquer.
Mme Lucienne Robillard: Excusez-moi.
M. Yvon Godin: Je vais vous expliquer...
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Si vous pouvez expliquer...
M. Yvon Godin: Je vais essayer d'expliquer cela. Le comité qui s'est présenté devant le Comité des ressources humaines la semaine dernière a dit qu'il ne pouvait pas nous donner le rapport—et on peut vérifier le compte rendu de la semaine dernière—parce qu'il n'avait pas été traduit en français. J'ai soulevé une grande question là-dessus. J'étais vraiment insulté et je leur ai fait remarquer qu'en plus, ils savaient deux semaines à l'avance qu'on voulait avoir ce document-là au comité, et on ne l'a même pas.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, ne pourrait-il pas s'agir d'un rapport de vérification interne d'un ministère et non pas du rapport du vérificateur général?
M. Yvon Godin: Mais cela ne fait aucune différence, madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Non, mais je veux juste qu'il soit clair qu'il ne s'agit pas du vérificateur général.
M. Yvon Godin: D'accord.
Mme Lucienne Robillard: Est-ce que c'est cela? S'il s'agit bien d'un rapport de vérification interne d'un ministère, il est très clair que nous pouvons, au Conseil du Trésor, vérifier cela directement.
M. Yvon Godin: D'accord.
Mme Lucienne Robillard: Il se doit d'être dans les deux langues.
M. Yvon Godin: D'accord.
Mme Lucienne Robillard: On va vérifier.
M. Yvon Godin: Ça veut dire qu'il y a un groupe... Je répète que l'on avait demandé ce document deux semaines avant que le comité se réunisse, et la raison pour laquelle il ne nous a pas été remis, c'est que la traduction n'avait pas été faite. Qu'il s'agisse d'un document interne ou externe, je trouve que c'est désastreux. C'est inacceptable. J'étais là comme francophone et les anglophones ne pouvaient pas avoir leur document non plus parce que la version française n'était pas prête. On est fatigués d'entendre ces histoires-là, madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Vous avez raison.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Monsieur Godin, je pense que si vraiment il y a un rapport du gouvernement fédéral qui n'a pas été traduit dans les deux langues officielles, c'est un manquement à la loi. Alors, je demanderais au comité d'écrire une lettre. C'est le rôle du comité que de voir à ce que la loi soit respectée. Il est certain qu'on devra agir après avoir reçu une telle demande.
M. Yvon Godin: Ce sera fait.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci. Vous avez encore du temps.
M. Yvon Godin: J'ai une deuxième question au sujet du transfert des responsabilités aux provinces. Par exemple, le gouvernement fédéral a pris les ressources humaines et transféré le développement économique et la formation au Nouveau-Brunswick. J'utilise cela comme exemple. Ce n'est pas trop mal au Nouveau-Brunswick parce qu'on est la seule province officiellement bilingue au Canada. Nous en sommes d'ailleurs fiers.
J'aimerais savoir ce que fait la ministre ou ce que fait le gouvernement pour s'assurer, quand il y a un transfert à une province, peu importe qu'il s'agisse de l'Ontario, du Manitoba ou de l'Alberta, que les gens de cette province puissent encore avoir accès à ce programme, qui vient du fédéral, dans les deux langues. Ce programme , lorsqu'il était offert par le fédéral, était offert dans les deux langues. Or, quand il est transféré à une province, on peut perdre ce privilège.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, que je sache, toutes ces ententes, et particulièrement les ententes de transfert en développement de la main-d'oeuvre, sont des ententes pour une période déterminée et non pas des ententes ad vitam aeternam. C'est pour une période déterminée. Dans les ententes, il y a des clauses obligeant les provinces à donner les services aux communautés de langue minoritaire au pays. Les clauses varient d'une entente à l'autre; elles ne sont pas semblables partout au pays. Donc, il y a des clauses et le partenaire qui a signé l'entente doit les respecter. Il y a aussi une obligation de rendre compte, parce que l'entente est conclue pour un temps déterminé. Donc, il va falloir réévaluer ces ententes au terme de l'échéance.
Par ailleurs, même si c'est inclus dans les ententes à l'échelle du pays, quand M. Yvon Fontaine, avec son groupe de travail, a étudié les transformations gouvernementales, il a dit dans son rapport—il y a déjà quelque temps que je l'ai lu, mais sa conclusion est très claire—que ces clauses n'étaient peut-être pas assez fortes au niveau des transferts qui sont faits vers les provinces. Il nous a demandé de réviser le cadre de gestion du Conseil du Trésor pour nous assurer que les impacts fassent l'objet d'une étude détaillée quand une telle entente est signée. On a accepté cette recommandation de M. Fontaine et on va même aller plus loin: on va avoir une politique.
Certaines de ces ententes ont été signées pour cinq ans. Est-ce le cas de la majorité, monsieur Nouvet?
M. Marcel Nouvet: Oui.
Mme Lucienne Robillard: Cela veut dire que lorsque ces transferts pour la main-d'oeuvre vont arriver à échéance, au bout de cinq ans—certaines ont été signées il y a trois ans déjà et arriveront donc à échéance dans deux ans—on aura une nouvelle politique et le ministère qui renouvellera cette entente devra se soumettre à la politique du Conseil du Trésor.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci. Vous pourrez continuer au prochain tour, monsieur Godin.
La sénatrice Joan Thorne Fraser (De Lorimier, Lib.): Merci, madame la présidente.
Madame la ministre, j'aimerais vous interroger sur deux sujets. Si vous me le permettez, je vais poser mes questions en anglais, mais vous pouvez toujours répondre en français. D'abord, pour enchaîner, j'ai une question au sujet des transformations.
[Traduction]
L'idée que nous allons avoir une politique, qui sera d'examiner l'impact des transformations, est certainement magnifique, mais il me semble que suffisamment de temps s'est déjà écoulé pour nous permettre d'établir quelque chose d'un peu plus musclé qu'une simple étude d'impact.
Pourquoi ne pas adopter tout simplement une politique très ferme, de préférence en légiférant, pourquoi ne pas dire que dans tous les cas de transformation, qu'il s'agisse de privatisation ou de transfert aux provinces, temporaire ou permanent, que dans tous les cas où un service fédéral était offert dans les deux langues officielles, ce même service doit continuer à être offert dans les deux langues, quelle que soit l'entité responsable du service. Pourquoi ne pas en faire une condition absolue de la transformation? Est-ce que cela ne serait pas très simple et très facile?
Mme Lucienne Robillard: C'est votre première question?
La sénatrice Joan Fraser: C'est la première question.
Mme Lucienne Robillard: D'accord. Je croyais que vous vouliez en poser une autre.
La sénatrice Joan Fraser: Oh, certainement. Vous voulez que je vous pose la deuxième? Mais comme elle est très différente, peut- être préférerez-vous répondre à celle-ci d'abord.
Mme Lucienne Robillard: D'accord.
En légiférant, dites-vous.
La sénatrice Joan Fraser: De préférence, mais une déclaration ferme d'intention politique serait suffisante, l'important étant que tous les partenaires éventuels sauraient d'avance que cet élément-là n'est pas négociable.
Mme Lucienne Robillard: Je pense que nous devrions pouvoir reconsidérer les accords de formation de la main-d'oeuvre que nous avons signés avec les provinces et comparer les articles sur la protection des langues parlées par la minorité. Ce que vous dites, c'est qu'il faudrait établir cela clairement dans la politique, le déclarer officiellement.
Vous avez raison quand vous dites qu'une étude de l'impact ne constitue pas une politique suffisante, et que ces accords devraient être plus exigeants sur ce plan. Je peux vous assurer que cela sera le cas.
Mais avant d'adopter une telle politique officielle, il serait peut-être bon que votre comité examine la question et me donne son opinion, me dise si cela va suffisamment loin. À mon avis, ce n'est pas forcément une question de législation, il pourrait s'agir d'une politique, une politique incontournable lorsque le gouvernement décide de transférer certaines responsabilités à certains partenaires.
C'est très différent quand nous décidons de privatiser un service. Tout à fait différent. Cela, nous devons l'inscrire dans la loi, comme cela a été le cas dans la Loi sur les compagnies aériennes. Cela doit absolument figurer dans la législation. Ce n'est pas discutable, il faut respecter la Loi sur les langues officielles.
Mais je comprends votre message, et nous allons examiner cette idée dans le cadre de notre nouvelle politique.
La sénatrice Joan Fraser: Je vous en prie; c'est très important.
Mme Lucienne Robillard: Oui.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Sénatrice Fraser, il vous reste encore du temps.
La sénatrice Joan Fraser: Ma seconde question est tout à fait différente. Elle porte sur la communauté anglophone au Québec.
Comme vous le savez, pendant des années, des années et des années, chaque fois qu'on s'est penché sur la composition linguistique de la fonction publique fédérale au Québec, on a pu constater que les anglophones étaient terriblement sous- représentés. Je ne veux pas dire que les services n'existaient pas, mais bien que les anglophones étaient loin de figurer dans la fonction publique fédérale au Québec dans la même proportion qu'ils occupent dans la population. J'aimerais savoir ce que vous faites à ce sujet.
Mme Lucienne Robillard: Excellente question, madame la présidente.
C'est une réalité. D'après les statistiques que j'ai, les anglophones du Québec représentent environ 13 p. 100 de la population. Lorsque l'on inclut non seulement la fonction publique mais tous les employés qui travaillent dans les sociétés d'État, les anglophones représentent environ 10 p. 100. À la fonction publique, il n'est que de 6,4 p. 100.
• 1640
Comme vous le savez, il y a eu un rapport sur la question.
Beaucoup de gens ont travaillé à une étude pour en découvrir les
raisons. Y a-t-il un problème de sélection? Que se passe-t-il?
Pourquoi les jeunes anglophones ne présentent-ils même pas de
demandes pour entrer à la fonction publique? Parce que c'est le
cas. Nous avons même du mal à les amener à faire une demande. Que
se passe-t-il?
La Commission de la fonction publique a effectué une étude sur le sujet. Le rapport a été déposé puis on en a discuté avec la communauté anglophone. Hier, il y a eu une rencontre avec le groupe de travail dans la communauté anglophone du Québec pour travailler à un plan d'action clair, pas seulement des principes et des idées, mais pour voir ce qu'il faut faire.
Nous avons un projet de plan d'action actuellement. Les membres du groupe de travail hier ont dit qu'ils veulent ajouter des choses à ce plan d'action. Dans quelques semaines peut-être, nous aurons un plan d'action direct pour améliorer la situation.
La sénatrice Joan Fraser: Ce sera intéressant à voir. Comme vous le savez, il est très important pour cette communauté de pouvoir conserver ses jeunes. C'est un des principaux centres d'emploi.
[Français]
Merci, madame la présidente.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Monsieur Nouvet ou monsieur Guénette, est-ce que vous aimeriez ajouter quelque chose sur la dernière question de la sénatrice Fraser? Est-ce que vous avez de l'information supplémentaire, monsieur Nouvet, comme chef des ressources humaines?
M. Marcel Nouvet: Il me serait difficile et même impossible de donner une meilleure réponse que la présidente.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): J'ai dit «ajouter».
M. Marcel Nouvet: J'ajouterai par rapport à tout ce qui a été dit sur les transformations gouvernementales et sur la représentation des anglophones dans la fonction publique que ce qu'il y a de différent aujourd'hui, par rapport à ce qui se faisait il y a plusieurs années, c'est que maintenant, on discute et on dialogue avec les communautés. Donc, on élabore un plan d'action qu'elles vont pouvoir appuyer et promouvoir elles-mêmes. C'est cela, la grande différence. C'est ce qu'on est en train de faire en ce moment pour augmenter la représentation des anglophones dans la fonction publique fédérale au Québec.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci.
[Traduction]
Nous allons maintenant passer au deuxième tour, d'une durée de cinq minutes. Monsieur Breitkreuz.
M. Cliff Breitkreuz (Yellowhead, Réf.): Merci, madame la présidente.
Merci, madame la présidente, d'être venue ici pour faire votre exposé. Je voudrais un éclaircissement à propos de quelque chose qu'a dit la sénatrice Fraser à propos du fait que le gouvernement fédéral renonce à une compétence ou à son autorité dans certains secteurs en faveur des provinces ou des municipalités, j'imagine, mais conserve le caractère bilingue du dossier. Pourquoi procédez- vous ainsi si vous transférez les responsabilités à une province unilingue?
Mme Lucienne Robillard: Parce que dans toutes les provinces il y a des gens qui parlent l'autre langue. Ce n'est pas parce que la majorité d'une province parle une langue qu'il n'y a pas de minorité qui parle l'autre langue officielle. Ça signifie que même en Colombie-Britannique... Êtes-vous de la Colombie-Britannique?
M. Cliff Breitkreuz: De l'Alberta.
Mme Lucienne Robillard: Je connais bien l'Alberta. J'ai de la famille là-bas. Même en Alberta, comme vous le savez, il y a une population francophone. Elle vit à Calgary et dans les environs ainsi qu'à Edmonton et ses environs. Si cette population a accès aux programmes fédéraux, il est nécessaire de lui offrir les services dans sa langue. Si nous transférons la responsabilité, au lieu d'offrir nous-mêmes le programme, nous demandons à la province de le faire. La province doit donc donner exactement le même service au groupe minoritaire. C'est juste.
M. Cliff Breitkreuz: Mais cela n'a pas d'allure, n'est-ce pas?
Mme Lucienne Robillard: Qu'est-ce qui n'a pas d'allure? Bien sûr, que ça a de l'allure. C'est exactement ce que signifient la Loi sur les langues officielles et les obligations qui s'y rattachent.
M. Cliff Breitkreuz: Ce que je dis c'est que si la langue de la minorité est quasi inexistante, virtuellement inexistante, pourquoi est-ce que cela se donnerait dans les deux langues, surtout si vous renoncez à une compétence? Cela devient une compétence provinciale. Ce n'est plus une compétence fédérale.
M. Marcel Nouvet: En ce qui concerne les ententes relatives au marché du travail, toutes celles qui ont été signées ces dernières années, les provinces n'ont pas hésité à accepter les dispositions sur les langues officielles qui figurent dans tous les accords.
Si l'on insiste pour avoir cette disposition, c'est qu'il y a des francophones dans certaines de ces provinces et des anglophones au Québec qui sont habitués à recevoir des services dans la langue officielle de leur choix. Il était très important de s'assurer que les anglophones au Québec continuent de recevoir ce service.
Deuxièmement, ce sont toujours des fonds fédéraux qui sont dépensés. Ce ne sont pas des fonds provinciaux. Ce sont toujours des programmes et des initiatives du gouvernement fédéral qui sont assurés. Ce qui a changé, c'est le point de prestation, mais pas sa source de financement ou la nature des activités. C'est pourquoi pour toutes les provinces cela n'a pas été un problème lorsque les accords ont été signés.
Ce qui est nouveau, c'est que dorénavant nous allons insister pour qu'il y ait des consultations avec les groupes de langues officielles en situation minoritaire. Lors du transfert de la main-d'oeuvre, cela s'est fait sans consultation. À l'avenir, s'il y a quelque chose de ce genre, il devra y avoir des consultations.
M. Cliff Breitkreuz: Je peux comprendre alors, si ce sont toujours des fonds fédéraux, que vous voudriez... Mais ce ne sont plus des fonds fédéraux...
[Français]
M. Marcel Nouvet: C'est du financement fédéral.
[Traduction]
Ce sont bien des fonds fédéraux. Les activités offertes sont des activités décrites dans la loi fédérale, la Loi sur l'assurance- emploi.
Mme Lucienne Robillard: Je vais vous donner un autre exemple. Les services d'établissement du ministère de l'Immigration sont exactement les mêmes. Ces services sont des services fédéraux et le ministère s'est entendu avec certaines provinces pour transférer ces services à la province avec nos propres employés. Mais c'est avec l'argent du gouvernement fédéral. Il y a une clause dans l'accord que nous avons signé avec la Colombie-Britannique et le Manitoba. Malheureusement, nous n'avons pas pu obtenir le même genre d'accord avec le gouvernement de l'Alberta.
Je pense donc que c'est normal lorsqu'il s'agit d'un service payé par le gouvernement fédéral. Il faut respecter notre législation.
M. Cliff Breitkreuz: D'accord, si c'est payé, mais si ce n'est pas financé par le gouvernement fédéral, évidemment c'est une autre histoire.
Je veux aussi revenir à ce qu'a dit M. Guénette à propos de la réalité linguistique du pays. Il a parlé du bilinguisme dans l'est de l'Ontario et dans le nord du Nouveau-Brunswick et au Québec. C'est essentiellement là que les services bilingues sont offerts. Pourquoi, dans ce cas, les compagnies aériennes régionales de l'Ouest ou de l'Atlantique ou certaines d'entre elles à l'extérieur du Nouveau-Brunswick doivent-elles employer les deux langues sur un vol entre Calgary, disons, et Medicine Hat ou Calgary et Penticton ou Kamloops? Pourquoi ces frais supplémentaires?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Je me permets de rappeler à M. Breitkreuz que le ministre Collenette viendra ici nous expliquer exactement de quoi il retourne à propos du projet de loi sur le transport. De plus, votre temps est écoulé. Vous avez eu deux minutes de plus. Vous aurez sûrement la chance d'approfondir la question avec le ministre Collenette lorsqu'il viendra.
M. Cliff Breitkreuz: Je peux faire une dernière observation?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Je vous en prie.
M. Cliff Breitkreuz: Pourquoi dépenser des centaines de millions de dollars de plus pour toute cette histoire de langue—peu importe la langue—alors que le niveau de vie au pays ne cesse de baisser? Pourquoi?
Vous savez, nous régressons. Par rapport aux États-Unis, nous sommes presque en train de devenir un pays du tiers monde. Pourquoi?
Mme Lucienne Robillard: Il s'agit d'une question fondamentale sur laquelle nous avons un avis tout à fait divergent. Nos philosophies sont tout à fait différentes. Je ne parle même pas des droits et obligations en vertu de la Charte. Je parle de l'idée que nous nous faisons du pays, de la façon dont le pays a été fondé et du respect que l'on doit accorder à cela. Je parle du fait que la diversité apporte plus au pays et du respect non seulement de l'autre langue mais aussi de la culture. Être ouvert non seulement à la langue mais aussi à une autre culture, c'est merveilleux.
Je suis désolée, mais je comprends que nous n'épousons peut- être pas les mêmes valeurs ici. Et il s'agit...
M. Cliff Breitkreuz: Même si le niveau de vie du Canada baisse.
Mme Lucienne Robillard: ...de valeurs canadiennes.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Notre prochain intervenant sera M. Bélanger.
[Français]
M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Madame la présidente, notre collègue est en train d'essayer de nous faire croire que la qualité de vie au Canada s'effrite à cause du bilinguisme. Il devrait regarder ce que fait le premier ministre de l'Alberta, qui est lui-même en train de reconnaître la valeur de la communauté francophone de l'Alberta. Il a créé un ministère des Affaires francophones de l'Alberta et appuyé financièrement la Faculté Saint-Jean. Que notre collègue se réveille et qu'il se rende compte de ce qui se passe dans sa propre province, sans parler du reste du pays. Franchement, il doit être malheureux dans son nouveau parti, parce que ce dernier a reconnu les langues officielles. Peut-être a-t-il décidé de demeurer réformiste: il est bien casé.
Je m'excuse de m'emporter, mais je trouve aberrant qu'on soit soumis à de tels commentaires chaque fois qu'il vient présenter sa rengaine au comité.
Madame la ministre, j'appuie une des recommandations que notre collègue le sénateur Simard présentait dans son rapport. Sur les 170 agences ou ministères, il y en a seulement 28 desquels on exige un plan annuel, et je trouve qu'il est temps d'aller plus loin. C'est en place depuis 1994. À ce moment-là, il fallait commencer quelque part, et un amendement à la loi avait été adopté par le Parlement canadien en 1988, si je me souviens bien. De 1988 à 1994, on n'avait pas fait grand-chose pour mettre en application la partie VII de la loi, en particulier l'article 41. Le Cabinet a décidé, à l'été 1994, au mois d'août si je me souviens bien, et cela avait été annoncé en Acadie, que 28 agences et ministères devaient soumettre chaque année un plan d'action. Est-ce qu'il ne serait pas temps d'étendre cela à toutes les agences et à tous les ministères du gouvernement canadien?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, cette partie de la loi est la responsabilité de ma collègue la ministre du Patrimoine canadien. Je suis certaine que mon collègue d'Ottawa—Vanier va faire ses représentations en bonne et due forme, mais permettez-moi de vous dire que, comme présidente du Conseil du Trésor, je serais prête à appuyer une révision de cette liste auprès de ma collègue.
Dernièrement, j'ai reçu des représentations de la communauté francophone du Yukon, qui m'a demandé de faire en sorte qu'on ajoute le ministère des Affaires indiennes à la liste. J'ai appuyé cette demande de la communauté francophone et j'ai écrit à ma collègue pour lui demander d'ajouter ce ministère à la liste. Il serait peut-être temps qu'on révise cette liste.
M. Mauril Bélanger: Merci.
Vous avez offert au comité d'analyser la politique que vous êtes en train d'élaborer au Conseil du Trésor par rapport au transfert de l'administration de responsabilités aux provinces par le biais d'ententes. J'abonde dans le même sens que ma collègue du Sénat, qui disait tout à l'heure qu'il serait peut-être opportun d'avoir une loi à cet effet. Je vous demande votre opinion. Je vous place peut-être dans une situation embarrassante, et vous m'en excuserez, mais est-ce que la partie VII de la loi ne devrait pas être exécutoire et est-ce qu'on ne devrait pas demander à tout ministère qui songe à négocier une entente avec une province ou un territoire de ne pas négocier cette entente si elle ne donne pas effet à la partie VII? Est-ce que vous allez mettre une telle chose dans votre politique?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, je suis certaine que M. le député sait très bien que ce dossier est présentement devant les tribunaux et que c'est ma collègue de la Justice qui parle au nom du gouvernement pour dire si c'est exécutoire ou non. Je ne ferai donc pas de commentaires sur cette partie.
Par ailleurs, il est très clair que la politique qui est en voie d'élaboration au Conseil du Trésor va exiger que les institutions effectuent une analyse systématique des répercussions et fassent des consultations auprès des communautés. On est même en train d'examiner des mécanismes de recours possibles en cas de non-respect.
On veut aller assez loin dans notre politique gouvernementale, mais, encore une fois, si votre comité, madame la présidente, veut nous faire part de ses opinions sur cette ébauche de politique, je serai très heureuse de les recevoir. Je vais demander à mes collaborateurs de vous consulter officiellement.
M. Mauril Bélanger: Voici une dernière question, madame la présidente. Est-ce que l'on considère ce document comment la réponse du gouvernement du Canada au rapport Fontaine?
Mme Lucienne Robillard: Comme vous l'avez vu, monsieur le député...
M. Mauril Bélanger: Oui, j'ai lu. On fait allusion à plusieurs...
Mme Lucienne Robillard: Nous irons au-delà du rapport Fontaine. Comme vous l'avez vu, à la page 19, on a regroupé le rapport Fontaine et le rapport Savoie, qui se recoupaient parfois dans certaines recommandations. On a dégagé quatre avenues d'action et on travaille sur ces quatre avenues d'action dans le suivi des recommandations du rapport Fontaine.
Le président du Conseil du Trésor avait mandaté un groupe externe de répondre formellement au groupe externe sur les recommandation 1, 3, 4, 6 et 8, mais nous avons discuté avec M. Fontaine lui-même et nous le tenons au courant de l'évolution des recommandations qu'il a faites au gouvernement et des actions que nous entreprenons. C'est dans ce sens que nous travaillons sur les quatre avenues dont on parle.
Quiconque se donnera la peine de lire ce document verra que nous avons fait pas mal de chemin depuis deux ans.
M. Mauril Bélanger: Merci.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): J'aimerais demander au sénateur Beaudoin et à M. Godin de laisser au sénateur Robichaud la possibilité de poser une petite question. Il est le seul à ne pas avoir pu en poser au premier tour et il doit partir bientôt.
Sénateur Robichaud.
Le sénateur Louis-J. Robichaud (L'Acadie—Acadia, Lib.): Merci.
Je voudrais d'abord féliciter Mme la ministre pour la qualité de sa présentation et le doigté avec lequel elle a répondu aux questions.
Madame la ministre, au chapitre 2 de la version anglaise, vous dites ceci:
[Traduction]
[Français]
Je vous cite en anglais parce que je trouve que la version anglaise est plus claire que la version française pour la question que j'ai à poser.
Pouvez-vous nous dire si votre ministère et les autres font réellement la promotion du bilinguisme dans le milieu de travail ou si on est satisfait du statu quo? Y a-t-il réellement de la promotion? Si oui, pouvez-vous nous en donner des exemples tangibles?
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre Robillard.
Mme Lucienne Robillard: C'est une question fort intéressante. Est-ce que nous sommes satisfaits? Nous ne sommes jamais entièrement satisfaits et nous voulons faire encore plus de promotion. C'est très clair à l'échelle de la fonction publique, et c'est d'ailleurs la raison pour laquelle nous avons nommé, dans chacun des ministères, ce qu'on appelle un champion des langues officielles à un niveau élevé du ministère. Cette personne doit rendre compte directement au sous-ministre et a la responsabilité, dans le fond, d'être notre champion des langues officielles au ministère. Elle doit s'assurer non seulement qu'on respecte la loi, mais aussi qu'on en fasse la promotion à l'échelle du ministère.
• 1700
J'ai rencontré ces gens à Winnipeg dernièrement
et j'ai trouvé qu'il y avait, dans ce groupe
composé d'anglophones et de francophones,
un dynamisme incroyable. Ce sont tous des gens
qui croient fermement que la dualité
linguistique fait partie de notre identité
canadienne et qui pensent que la
fonction publique doit donner l'exemple. Ce sont
des gens qui ont plein d'idées, plein de créativité et
qui, je pense, vont nous aider à améliorer la
situation dans les différents ministères.
Le sénateur Louis Robichaud: Madame la ministre, j'aime beaucoup l'expression «champion de la dualité linguistique». Est-ce une création du Secrétariat du Conseil du Trésor? C'est une très belle expression. Elle est nouvelle.
Mme Lucienne Robillard: On me dit que c'est un terme qui a déjà été utilisé pour Fonction publique 2000. Oui, il vient de la fonction publique et de mes collaborateurs. Ces gens ont accepté la responsabilité d'être des champions des langues officielles. Ce sont des personnes de haut niveau dans les ministères. On a fait un rapport dernièrement avec eux. Ils sont très imaginatifs et s'emploient à développer davantage la dualité linguistique.
Le sénateur Louis Robichaud: Merci.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci beaucoup.
Sénateur Beaudoin.
Le sénateur Gérald Beaudoin: Je voudrais soulever un seul point, madame la présidente.
À la suite de l'intervention du député du Parti réformiste, Mme la ministre a dit très clairement que ce n'est pas seulement la Loi sur les langues officielles qui impose le bilinguisme dans les institutions fédérales, mais aussi la Charte des droits et libertés. La Charte des droits et libertés, c'est la Constitution. Il ne faut jamais oublier cela. C'est le coeur de la Constitution, avec le fédéralisme canadien. Pour les fins du rapport, je veux souligner cela parce que c'est au coeur même du Canada. On ne se pose pas le problème de savoir si la Constitution est exécutoire ou non. C'est impératif et ça finit là. On n'a même pas besoin d'aller en cour. Je voulais le dire parce que vous avez souligné, madame la ministre, que cela venait de la Charte des droits et libertés. Il n'y a rien de plus fort que la Constitution. Je sais que vous allez dire que c'est parce que j'aime la Constitution, mais c'est vrai.
Mme Lucienne Robillard: Je pense que M. le sénateur a tout à fait raison, madame la présidente: c'est la loi du pays.
Le sénateur Gérald Beaudoin: C'est la loi du pays.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Monsieur Godin.
M. Yvon Godin: Madame la ministre, je ne voulais pas soulever la question que le député du Parti réformiste a soulevée, mais je me sens maintenant dans l'obligation de faire des commentaires là-dessus.
Vous pouvez maintenant comprendre mon inquiétude quand des programmes sont transférés aux provinces. Mes inquiétudes sont maintenant plus grandes étant donné les réponses que vous avez données, madame la ministre et monsieur Nouvet. Vous avez dit qu'il s'agissait d'argent du fédéral et que vous serez donc capables de les forcer à faire quelque chose. Je ne sais pas si je répète vos mots exacts, mais il y a de l'argent du fédéral et il va falloir que les provinces suivent.
Mais mon inquiétude persiste. Qu'est-ce qui arrivera quand ce ne sera plus de l'argent du fédéral et qu'une entente aura été conclue selon laquelle ce sont elles qui s'en occuperont, et non plus le fédéral? Si jamais cela se produisait, il serait dangereux qu'il arrive ce qui est arrivé dans le cas du transport aérien, qui a été transféré au secteur privé. Vous avez adopté une loi pour le transférer au secteur privé, et des lois précisaient que parce que cela appartenait auparavant au fédéral et que c'était bilingue, le secteur privé devait lui aussi respecter le bilinguisme. Vous nous dites maintenant que le fédéral met de l'argent dans cela actuellement et que les provinces seront donc forcées de respecter le bilinguisme. Cela m'inquiète.
J'aimerais maintenant poser la question que je voulais poser. Elle porte sur le rapport Simard. Le sénateur Simard a mené une bataille pour le français, surtout au Nouveau-Brunswick, et j'aimerais l'en féliciter personnellement. Le rapport Simard a examiné le développement et l'épanouissement des communautés francophones et acadiennes. Dans ses recommandations, le sénateur Simard recommande la nomination d'un ministre d'État au développement des communautés de langue officielle qui assumera la responsabilité exécutive de la politique horizontale des langues officielles et veillera aux problèmes que j'ai mentionnés aujourd'hui.
• 1705
J'aimerais demander à la ministre ce
qu'elle pense de la nomination d'un ministre d'État
au développement des communautés de langue
officielle.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre.
Mme Lucienne Robillard: Madame la présidente, tout d'abord, j'aimerais faire un commentaire au sujet de l'inquiétude de mon collègue. Qu'il ne s'inquiète pas. D'habitude, quand on transfère une responsabilité aux provinces, il y a aussi un transfert de fonds. Je ne vois pas de cas où une province accepterait cette responsabilité sans un transfert de fonds. Je ne prévois cela à aucun moment dans l'avenir, que ce soit à court ou à long terme.
M. Yvon Godin: On est sauvés.
Mme Lucienne Robillard: Cela m'est très difficile à imaginer.
Cela étant dit, j'ai bien vu la recommandation du sénateur Simard, qui faisait écho, je pense, à la recommandation de Donald Savoie qui allait dans le même sens. Le rapport Savoie en avait aussi parlé, et ce rapport a été étudié par le gouvernement. Or, vous savez bien que ces questions relèvent directement du premier ministre du pays.
M. Yvon Godin: Je vais lui parler.
Mme Lucienne Robillard: Je pense que vous avez vu le dernier remaniement ministériel et que vous avez eu la réponse du premier ministre du pays. Je pense qu'il n'a pas choisi cette option, mais il a réaffirmé haut et fort, après le dépôt de ces rapports, son engagement envers la dualité linguistique. Il a nommé un responsable des langues officielles au Bureau du Conseil privé et il a fait renouveler le mandat du comité des sous-ministres des langues officielles, qui est sous l'autorité du sous-ministre de la Justice. Alors, il a posé des gestes, justement pour qu'on améliore encore la promotion, le soutien et l'aide aux communautés de langue minoritaire dans notre pays.
Madame la présidente, si vous me le permettez, je voudrais souligner aujourd'hui à quel point j'ai été impressionnée par certaines actions et certaines réalisations de mon gouvernement au cours des deux dernières années. Une des actions qui furent faites pour appuyer les communautés de langue minoritaire au pays m'a particulièrement intéressée, et c'est la mise sur pied du Comité national de développement des ressources humaines de la francophonie canadienne. Je ne sais pas si votre comité a déjà eu l'occasion d'accueillir le président du comité, M. Poirier, afin qu'il puisse venir vous dire comment ils agissent présentement à l'échelle du pays dans le domaine du développement économique et du développement des ressources humaines, mais je dois vous dire que cette nouvelle approche a eu beaucoup de succès. Et c'est tout à la faveur du ministère du Développement des ressources humaines, qui a accordé 21 millions de dollars à ce comité pour donner un mandat aux communautés. Le travail qu'ils font à l'échelle du pays est extraordinaire, et je me demande si ce n'est pas une approche qu'on devrait adopter dans d'autres domaines pour soutenir les communautés partout au pays.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Je vous remercie beaucoup. Je voudrais ajouter quelque chose au sujet du sénateur Simard. Le sénateur Simard a été invité à comparaître devant notre comité et il sera disponible et prêt à le faire tout de suite après Pâques... ou à la Trinité, mais pas plus tard, sénateur Simard. Nous avons hâte de vous entendre. Merci beaucoup.
Monsieur Bélanger.
M. Mauril Bélanger: Madame la présidente, la raison pour laquelle j'appuie l'idée de rendre exécutoire une partie de la Loi sur les langues officielles, c'est que même après ce que le sénateur Beaudoin nous a dit, à savoir que la charte est impérative parce qu'elle fait partie de la Constitution, il a fallu 15 ou même 20 ans pour que certaines parties de la charte soit respectées par les provinces signataires. Et il a fallu des recours juridiques. Les communautés se sont assuré le respect de leurs droits à force de recours juridiques devant les tribunaux. La question de Summerside, à l'Île-du-Prince-Édouard, en est la dernière preuve. C'est malheureux, mais il faut le reconnaître. Lorsqu'il n'y a pas de recours juridique, que font les communautés?
• 1710
L'exemple classique est celui de ma communauté en
Ontario. Le gouvernement Harris n'est pas
reconnu pour être le plus ouvert aux francophones.
Il voudrait définir la capitale nationale sans accepter
la recommandation de ses propres conseillers, qui
suggéraient qu'on la déclare officiellement bilingue.
On ne donne pas de recours juridique à la communauté. Je m'excuse, mais je suis le produit d'une société où les communautés minoritaires ont su faire respecter leurs droits parce que ceux-ci étaient inscrits dans une loi ou dans la charte. C'est en ce sens-là que je pense qu'il est important que la partie VII soit exécutoire. Et s'il faut procéder à une révision de la loi à cet effet, eh bien, qu'on la fasse. Autrement, on n'y arrivera pas. Merci.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Merci beaucoup.
Comme on dit dans l'émission américaine: «Is this your final answer?»
Mme Lucienne Robillard: C'est un dossier qui est devant les tribunaux présentement. Je pense qu'on attend tous impatiemment le résultat pour voir ce qui va se passer et on pourra ensuite agir en conséquence.
La coprésidente (la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool): Madame la ministre, il me reste à vous remercier pour votre disponibilité. On a dû changer la date à deux reprises. C'est très apprécié. Je remercie aussi M. Guénette et M. Nouvet.
Je m'adresse maintenant aux membres du comité. Si vous êtes d'accord, on pourrait lire ce rapport d'ici la semaine prochaine et j'inviterai les fonctionnaires à revenir le 28 mars pour répondre à d'autres questions, surtout sur ce rapport.
La séance est levée.