PRÉAMBULE
Le comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes sur la garde et le droit de visite des enfants se réunit aujourd'hui à 15 h 30 pour examiner et analyser les questions liées aux ententes de garde et de visite après la séparation et le divorce et notamment, étudier la nécessité d'adopter une approche plus axée sur l'enfant dans les politiques et les pratiques du droit de la famille, approche qui mettrait l'accent sur la coresponsabilité des parents et des modalités de garde fondées sur les besoins et l'intérêt des enfants.
Le sénateur Landon Pearson et M. Roger Gallaway (coprésidents) occupent le fauteuil.
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 18 mars 1998
[Traduction]
Le coprésident (M. Gallaway): Je tiens tout d'abord à souhaiter la bienvenue à tous les participants à la 9e réunion du comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite. Étant donné que cette séance est retransmise à la télévision, je précise que le comité a été établi suite à une résolution adoptée par le Sénat du Canada et la Chambre des communes. Le comité est composé de 23 membres et a été chargé d'étudier la question de la garde et du droit de visite dans le contexte de la Loi sur le divorce.
Les premiers témoins que nous accueillons aujourd'hui représentent la Section d'Ottawa de la G.R.A.N.D. Society, Grandparents Requesting Access and Dignity. Vous avez la parole.
Mme Jeanette Mather, membre honoraire, G.R.A.N.D. Society, Section d'Ottawa, Grandparents Requesting Access and Dignity: Mesdames et messieurs, étant donné qu'on nous a alloué 10 minutes pour faire un exposé, je vais résumer notre mémoire. Je vous demanderai de le verser au compte rendu comme s'il avait été lu en entier. Mme George fera un exposé complémentaire après moi.
Nous comparaissons devant vous dans le but de demander que la Loi sur le divorce soit modifiée, afin d'y reconnaître l'importance, pour les grands parents, de continuer à avoir des droits de visite après le divorce des parents de leurs petits-enfants.
Ce qui est encore plus important, les modifications que nous souhaitons voir apporter à la loi devraient établir que, si l'on veut reconnaître les besoins et l'intérêt des enfants, il est critique et nécessaire qu'ils puissent continuer à avoir des rapports avec leurs grands-parents à la suite d'une séparation et d'un divorce.
Le stress que vivent les grands-parents dans une telle situation, sur le plan affectif et financier, est énorme. Dans la plupart des cas, le droit de rendre visite à leurs petits-enfants leur est refusé tout simplement parce que c'est leur fils ou leur fille qui n'en a plus la garde.
Les grands-parents perdent leur droit de visite à cause des relations hostiles entre les parents. Ils doivent dépenser des milliers de dollars lorsqu'ils sont contraints d'intenter une action en justice afin d'avoir à nouveau le droit de rendre visite à leurs petits-enfants, sans pour autant être assurés que leur initiative sera couronnée de succès ou, si elle l'est, que l'ordonnance de la cour pourra être exécutée. De nombreux grands-parents n'intenteront aucune action en justice de crainte de perdre le peu de contacts qu'ils ont conservés avec leurs petits-enfants.
Presque tous les grands-parents sont prêts à aider leurs petits-enfants lorsque cela est nécessaire. D'après un sondage effectué à Toronto par Wilks et Melville, en 1990, parmi les cas renvoyés pour étude à la clinique du tribunal de la famille de Toronto, entre juin 1985 et juin 1986, un tiers des parents et trois quarts des enfants avaient habité chez des grands-parents pendant ou après la séparation des parents.
Bon nombre de grands-parents n'ont plus de lien avec leurs petits-enfants ou vivent, d'un mois à l'autre, en espérant que leurs petits-enfants continueront de leur rendre visite et qu'ils auront même la chance de pouvoir les garder un soir ou l'autre. Ils méritent d'être traités de façon plus digne qu'ils ne le sont actuellement parce que les lois ne protègent pas leur intérêt ni celui de leurs petits-enfants.
D'après Statistique Canada, il y a eu, en 1995, 77 636 divorces au Canada. En présumant qu'il y a deux enfants, en moyenne, par famille, ce sont 155 272 enfants qui ont été touchés par ces divorces. Quant aux grands-parents qui ont été affectés, ils sont sans doute beaucoup plus nombreux.
Les membres de notre organisation estiment que reconnaître le rôle important que jouent les grands-parents au sein des familles contribuera à maintenir la stabilité familiale et ira dans le sens de l'intérêt des enfants. C'est critique dans une société qui évolue aussi rapidement que la nôtre. Une des façons d'en arriver à ce résultat est de modifier la Loi sur le divorce afin d'établir le statut particulier des grands-parents lorsqu'une séparation ou un divorce survient dans une famille.
Nous avons décrit dans notre mémoire l'expérience vécue par des grands-parents dans quatre cas, le premier étant celui de «B et GL». Lorsque le mariage du fils de ce couple a été dissout, leurs trois petits-enfants étaient âgés de neuf, huit et six ans. Depuis leur naissance, ils couchaient chez leurs grands-parents au moins deux fois par semaine. Après la rupture du mariage, les conflits entre les parents se sont intensifiés, et quatre années désastreuses ont suivi.
La mère a obtenu la garde des enfants et éventuellement, les grands-parents ont été complètement coupés de leur vie. Les enfants ne pouvaient téléphoner à leurs grands-parents et leur rendre visite qu'en cachette de leur mère. Cette situation a conduit, à plusieurs reprises, à l'arrestation du père, du grand-père et de la grand-mère.
Les grands-parents ont déposé une demande au tribunal pour obtenir un droit de visite, mais n'ont obtenu qu'une demi-journée par mois. L'aînée des enfants s'est sauvée de chez sa mère et a été ramenée par la police 17 fois. Elle a menacé de se suicider si on l'obligeait à rentrer chez sa mère. Les enfants ont été traités comme des criminels.
Par la suite, le père a obtenu la garde complète d'un des enfants. Il avait la garde partagée d'un autre, qui passait une semaine avec chaque parent et plus tard, cet enfant a choisi de son propre gré de vivre à plein temps avec son père. Le troisième enfant vit avec sa mère et rend maintenant en visite régulièrement à son père et à ses grands-parents. Telle est la situation après quatre ans de batailles juridiques engagées par les grands-parents pour obtenir un droit de visite, batailles qui leur ont coûté des milliers de dollars.
Cette famille a été déchirée, et le préjudice affectif subi par tous ses membres, en particulier par les enfants, ne pourra peut-être jamais être réparé. Si les grands-parents avaient eu des droits précis et s'ils avaient été respectés, le conjoint qui avait la garde n'aurait sans doute pas essayé de rompre ces liens, et le tribunal aurait pu mieux reconnaître à quel point il est important que les grands-parents continuent de jouer un grand rôle dans la vie des enfants. Il aurait été dans l'intérêt des enfants de bénéficier de la sécurité que procure une relation saine avec tous les membres de
Je vais maintenait passer au paragraphe qui se trouve à la page 8 de notre mémoire et dont le titre devrait être «Législation existante et prévue».
Actuellement, la Loi sur le divorce permet aux deux époux ou à l'un d'eux ou à «Toute personne» de demander la garde d'un enfant ou un droit de visite. Les grands-parents sont assimilés à des tiers; ils sont classés dans la catégorie «Toute personne», à l'article 16 de la Loi sur le divorce. À ce titre, ils doivent obtenir la permission des tribunaux avant de pouvoir faire une demande en vertu de l'article 16.
En ce qui concerne le droit de visite, il peut être accordé aux grands-parents des enfants dont les parents sont en instance de divorce ou déjà divorcés. Si une ordonnance a déjà été rendue en vertu de l'article 16, le droit de visite des grands-parents peut être ajouté ou modifié, à condition qu'ils demandent qu'un changement soit apporté à l'ordonnance émise à l'origine en vertu de l'article 16. Je le souligne, il faut qu'ils obtiennent la permission du tribunal avant de pouvoir faire une telle demande.
Je passe maintenant au paragraphe intitulé «Lois des autres pays», qui commence à la page 11. Les grands-parents canadiens découvrent qu'ils ne sont pas les seuls à vouloir faire reconnaître l'importance qu'ils ont dans la vie d'un enfant. La question est également débattue dans un bon nombre d'autres pays du monde.
En France, les tribunaux prescrivent qu'un des parents ne peut s'opposer à une relation entre un enfant et ses grands-parents sans motif raisonnable. En Belgique, il existe des dispositions législatives semblables. Le 1er juillet prochain, il entrera en vigueur en Allemagne une nouvelle loi qui inclut une disposition précise concernant les grands-parents, afin de reconnaître non seulement les droits de l'enfant, mais aussi ceux des grands-parents, en matière de droit de visite.
Aux États-Unis, il existe dans les 50 États des lois qui portent sur la question de la garde et du droit de visite des grands-parents. Dans ce pays, la participation des grands-parents aux soins que requièrent leurs petits-enfants s'élargit de plus en plus. L'office fédéral américain chargé du recensement rapporte qu'en 1995, environ 3 965 000 enfants habitaient avec leurs grands-parents, ce qui représente une augmentation de 6,2 p. 100 par rapport à 1994 et de 25,7 p. 100 au cours des cinq années précédentes. Plus d'un tiers de ces enfants vivent chez leurs grands-parents, sans leurs parents.
Depuis que nous avons transmis notre mémoire, nous avons reçu des renseignements concernant l'Australie. La loi australienne sur le droit de la famille a été modifiée en 1996 afin de reconnaître de façon explicite et légale que les grands-parents jouent un rôle important dans l'éducation des enfants. L'Australie a suivi le même processus que celui qui vient d'être lancé au Canada.
La législation australienne prescrit qu'en cas de différend entre les parties, elles doivent présenter au tribunal un plan familial. Si toutes les parties sont d'accord, ce plan familial peut devenir le document final. Toutefois, en cas de différend, la loi stipule qu'un plan familial doit être élaboré. Après avoir étudié ce plan, le tribunal décide quelles sont les dispositions concernant la garde et le droit de visite qui sont dans l'intérêt des enfants. C'est l'application de cette loi qui fait problème à l'heure actuelle.
En ce qui a trait à nos recommandations, la Loi sur le divorce devrait être libellée de façon à ce qu'on parte du principe qu'il est dans l'intérêt de l'enfant d'être en contact avec ses grands-parents et que ces derniers ont une influence positive dans sa vie.
Il devrait également être possible de présumer, en se fondant sur la formulation des dispositions de la Loi sur le divorce, que les grands-parents qui demandent la garde de leurs petits-enfants ou un droit de visite ont un statut distinct. Lorsque nous préparions notre mémoire, nous avons analysé la Loi sur le divorce. À la page 13 du document que nous vous avons transmis, nous énonçons les modifications que nous souhaitions alors voir apporter à la loi. Depuis, nous avons décidé que ce n'est peut-être pas la façon la plus appropriée de formuler nos recommandations.
Nous souhaitons plutôt faire valoir auprès du comité que la Loi sur le divorce devrait être modifiée afin que, premièrement, en ce qui concerne les questions de garde et de droit de visite, le statut unique et spécial des grands-parents vis-à-vis leurs petits-enfants soit reconnu légalement et que, deuxièmement, les grands-parents n'aient pas à obtenir l'autorisation du tribunal avant de déposer une demande ayant trait à la garde ou au droit de visite.
Je passe maintenant la parole à Liliane George.
Mme Liliane George (présidente, section locale d'Ottawa, G.R.A.N.D. Society, Grandparents Requesting Access and Dignity): Cela fait dix ans que je suis présidente de la section locale de la G.R.A.N.D. Society.
Il y a cinquante ans, les parents avaient de nombreux enfants; malheureusement, aujourd'hui, les enfants ont de nombreux parents.
La vie est difficile pour des enfants à qui l'on ne reconnaît pas le droit fondamental de voir celui de leur parent qui n'a pas obtenu leur garde, ainsi que leurs grands-parents, après une séparation et un divorce. Bon nombre de ces enfants sont complètement désorientés; certains souffrent énormément à cause de la peine et de la colère qu'ils ressentent; et certains se laissent aller à la violence et commettent des actes criminels.
Les enfants maltraités sont de plus en plus nombreux, et ce sont généralement les grands-parents qui décèlent les premiers signes de mauvais traitements et de négligence familiale. Lorsqu'ils essaient d'intervenir pour faire cesser ce genre de chose, les grands-parents perdent souvent le droit de rendre visite à leurs petits-enfants. La Société d'aide à l'enfance retire parfois la garde des enfants à leurs parents, les place en famille d'accueil et ensuite les font adopter. Pour une famille, c'est dévastateur. Parfois, ce sont les grands-parents qui obtiennent la garde de leurs petits-enfants,
Un des membres de notre groupe, une grand-mère qui se déplace en fauteuil roulant, élève ses trois petits-enfants âgés de trois, cinq et sept ans. Financièrement, cela n'a pas été facile. Le grand-père a trois emplois pour être en mesure de prendre soin de ses petits-enfants.
En cas de séparation ou de divorce au sein d'une famille, de nombreux grands-parents doivent relever de nouveaux défis. Bien souvent, cela se traduit par un fardeau financier lorsque les enfants reviennent à la maison avec leur propre progéniture. Arrivés à cette époque de leur vie, les grands-parents devraient pouvoir jouir de ce qu'on appelle l'âge d'or et ne devraient pas être acculés à la ruine uniquement pour pouvoir entretenir des relations normales et saines avec leurs petits-enfants. Certains de nos membres ont dépensé 30 000 $, 40 000 $ et 50 000 $ en frais judiciaires, ce qui est dév
Dans certains cas, un des parents ou encore les grands-parents sont accusés de maltraiter les enfants. Lorsque des accusations de ce genre sont portées sans fondement, cela peut aboutir à ce que les enfants qui sont véritablement maltraités ne bénéficient pas de toute l'attention et de toutes les ressources qui devraient leur être consacrées. Je vais vous parler d'une des nombreuses affaires portant sur des allégations de mauvais traitements.
Le coprésident (M. Gallaway): Excusez-moi de vous interrompre, mais nous avons un horaire à respecter. Peut-être pourriez-vous passer aux recommandations.
Mme George: Merci. Nous demandons au comité d'envisager la modification de la Loi sur le divorce afin d'assurer que les tribunaux ne rétribuent pas un comportement répréhensible. Nous recommandons au comité de modifier la Loi sur le divorce pour que, si des accusations sans fondement sont portées, le tribunal considère cela comme des mauvais traitements qu'on aurait fait subir à un enfant et en tienne compte dans ses décisions concernant la garde et le droit de visite. À cette fin, on pourrait ajouter à l'article 16 de la Loi sur le divorce un paragraphe concernant les accusations non fondées,
On doit protéger les enfants du divorce d'une expérience qui peut s'avérer dévastatrice et changer le cours de leur vie à jamais. Merci.
Le coprésident (M. Gallaway): Merci.
Je prie maintenant Mme Luyken, le témoin suivant, de prendre la parole.
Mme Irma Luyken (présidente, Filiale de Waterloo, Association to Reunite Grandparents and Families): Je suis heureuse d'avoir été invitée à témoigner devant le comité. Nous sommes un groupe de grands-parents parmi tant d'autres. Nous adoptons peut-être différentes approches, mais nous avons un seul objectif: le bien-être de nos petits-enfants.
Le premier but de notre groupe est d'offrir un système de soutien à tous les membres des familles. Nous accueillons non seulement les grands-parents mais ceux et celles qui, lorsqu'un foyer est brisé, perdent des nièces ou des neveux.
Notre deuxième but est de déterminer et de satisfaire les besoins des enfants. Nous tenons principalement à ce que la période requise pour régler un différend puisse être raccourcie afin d'atténuer l'impact négatif que cela peut avoir sur les enfants.
Troisièmement, nous cherchons à faire valoir que la médiation est meilleure que toute action en justice. Les avantages d'un bon processus de médiation, engagé avec le secours de psychologues, sont nombreux. La médiation permet aux parties en cause de trouver des solutions adaptées à leurs besoins et à leurs intérêts spécifiques, alors que toute action en justice crée encore plus d'hostilité. La médiation coûte beaucoup moins cher, et les problèmes peuvent être résolus plus rapidement.
Parmi les buts que nous poursuivons, citons également la sensibilisation et l'éducation du public. Nous participons à des manifestations axées sur l'auto protection, à des émissions de télévision et nous donnons des entrevues à la radio, à des clubs philanthropiques, à des groupes d'intérêt spéciaux, à quelque association que ce soit qui veut bien nous accueillir, où qu'elle soit. Nous écoutons ce qu'ont à nous dire des avocats, des médiateurs, des conseillers et des techniciens judiciaires. Nous espérons pouvoir discuter avec les élèves d'écoles secondaires, dans le cadre de leurs cours sur l
Notre cinquième but est d'entreprendre des démarches auprès des politiciens afin que le droit de visite soit concrètement reconnu et appliqué. Nous encourageons nos membres, nos amis et même nos relations à écrire à leurs députés fédéraux et provinciaux ainsi qu'aux journaux. Nous savons pertinemment que ce qui est requis, c'est la modification de nos lois, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd'hui.
Nous soulignons également lors de nos réunions que tout ce qui est dit et tout ce qui se passe au sein de notre groupe est confidentiel. Nous avertissons aussi nos membres et tous les gens qui nous rendent visite que nous ne sommes ni des professionnels ni des avocats, et que la seule chose que nous puissions offrir, ce sont des conseils non spécialisés. Nous nous inspirons de notre propre expérience.
Pourquoi les grands-parents devraient-ils avoir un droit de visite? Il est bien connu qu'entre les jeunes et les vieux, il existe des affinités et que le courant passe; cela est particulièrement vrai en ce qui concerne les petits-enfants et leurs grands-parents. Un des nombreux avantages que les enfants tirent de leurs relations avec leurs grands-parents est le soutien affectif qu'ils trouvent dans un environnement stable et sûr, ce qui est de la plus haute importance. Souvent, il faut ajouter à cela un soutien financier. Les grands-parents offrent un amour sans conditions, donné sans compter,
Les données statistiques démontrent clairement que le nombre de foyers brisés augmente. On recueille des statistiques sur la rupture des mariages, mais cela ne comprend pas toutes les situations qui peuvent se présenter, par exemple, les conflits familiaux et la mort d'un des parents ou des deux. Je sais que nous nous intéressons particulièrement à la Loi sur le divorce dont les dispositions nous préoccupent. Toutefois, il n'y a pas de statistiques sur le nombre des grands-parents à qui l'on refuse le droit de visite, à moins qu'ils aient comparu en cour. Beaucoup de grands-parents à qui l'on
Mon mari et moi en avons souffert il y a environ quatre ans lorsque notre fils et notre belle-fille se sont séparés, ce qui, bien entendu, a été pour nous une expérience bouleversante. À divers moments, au cours de cette séparation, on nous a refusé le droit de rendre visite à notre petit-fils, le premier de nos petits-enfants, et quand nous avons enfin pu voir notre nouvelle petite-fille, elle avait déjà cinq mois. Je me souviens d'avoir vu mon petit-fils d'un an et demi dans le parc, et l'angoisse que j'ai pu lire sur son petit visage était si manifeste lorsque le moment est venu pour moi de
Nous sommes reconnaissants de l'aide et du soutien que nous ont fournis la G.R.A.N.D. Society, un autre groupe de grands-parents. Mon mari et moi avons beaucoup de chance puisque notre fils et notre belle-fille sont à nouveau réunis et essaient de résoudre leurs problèmes - et il y en a beaucoup - mais cela a été précédé de plusieurs années marquées par beaucoup de souffrance et des dépenses importantes.
Dans un autre cas où l'on a refusé à une grand-mère le droit de visite, lorsqu'elle l'a finalement obtenu, sa petite-fille s'est exclamée, «Grand-maman, tu n'es pas morte!» Quand le moment est venu de se séparer, sa petite-fille lui a dit, «Grand-maman, ne meurt pas encore une fois».
De nos jours, le concubinage est une relation reconnue et parfois, on refuse aussi le droit de visite aux grands-parents dans ce genre de situation.
À notre époque, on donne beaucoup d'importance à l'individu et à cause de cela, les différends familiaux peuvent aboutir à un refus du droit de visite aux grands-parents et aux membres de la famille. Nous connaissons des cas où le décès de l'un des parents ou des deux a privé les membres de la famille d'un droit de visite.
Ces dernières années, on a reconnu beaucoup plus largement l'existence de ces problèmes. Au niveau fédéral, un projet de loi émanant d'un député a été déposé et, à notre plus grande satisfaction, on a établi ce comité. Au niveau provincial, plusieurs administrations ont adopté des projets de loi pour tenter de résoudre ce problème. Au plan de la sensibilisation du public, je mentionnerais qu'en janvier 1998, June Stewart, la dirigeante de la filiale d'Oakville d'ARGF, et moi-même avons participé à une émission de télévision de la chaîne Vision TV portant sur la garde et le droit de visite. Sui
La filiale de Waterloo reçoit en moyenne au moins un appel de grands-parents en détresse toutes les deux semaines. Ils ont tous une histoire différente à raconter, mais le problème auquel ils font face est le même: on leur refuse le droit de rendre visite à des petits-enfants bien-aimés et ils cherchent des informations sur les dispositions qu'ils peuvent prendre. Souvent, ils peuvent voir leurs petits-enfants à condition de faire quelque concession à l'un des parents ou aux deux, une concession qui prend habituellement la forme d'une contribution monétaire.
Pour conclure, il est impératif de considérer en tout premier lieu le bien-être des enfants. Pour ce faire, lorsque des foyers se brisent ou que des différends se font jour au sein de certaines familles, on devrait accélérer les procédures relatives à la garde et au droit de visite. Si ces deux points sont résolus en premier, les enfants ne peuvent pas être utilisés comme des pions ou une monnaie d'échange que l'un des parents ou les deux peuvent faire valoir pour régler à leur avantage d'autres questions qui se posent en cas de séparation.
Il faut envisager la possibilité d'accorder la garde des enfants à leurs grands-parents et-ou à leurs proches avant de les placer dans des foyers d'accueil. C'est une disposition qu'on trouve dans la Loi ontarienne sur les services à l'enfance et à la famille, mais elle est rarement respectée. Votre comité a l'occasion de présenter des recommandations d'une portée considérable qui atténueront la souffrance et la tension qui sont le lot de toutes les parties impliquées dans des différends familiaux et la séparation de deux conjoints. Ainsi, en établissant des lignes directrices et des dispositi
L'existence d'une législation fédérale est importante, car elle sera la norme sur laquelle s'aligneront toutes les lois existantes ou prévues en la matière, à l'échelle provinciale ou territoriale. Toutefois, nous vous suggérons respectueusement de noter et de prendre en considération les points énoncés dans le projet de loi C-27, destiné à modifier la Loi portant réforme du droit de l'enfance en vigueur en Ontario. La législation proposée accorde un statut particulier aux grands-parents devant les tribunaux. Elle se montre particulièrement favorable à l'entretien de relations personnelles ent
Nous souhaiterions ajouter que les parents devraient être obligés de démontrer au tribunal pourquoi il ne serait pas dans l'intérêt de l'enfant de continuer à voir ses grands-parents - ce qui, je crois, est stipulé dans la loi au Québec et en Alberta.
Enfin, habituellement, les grands-parents forment une équipe. Je me suis présentée seule pour témoigner mais Opa, comme l'appellent nos petits-enfants, est au fond de la salle et je sais que j'ai son appui. Merci.
Le coprésident (M. Gallaway): Je vous remercie d'avoir respecté les délais qui vous étaient impartis.
Mme Luyken: Pour la première fois de ma vie.
Le coprésident (M. Gallaway): Le témoin suivant est Mme Bremmer.
Mme Madelaine Bremmer (présidente, Canadian Grandparents' Rights Association, Ottawa): Je représente la section d'Ottawa de notre association. Vous allez recevoir prochainement mon mémoire. Je me suis absentée pendant un mois, et c'est seulement il y a environ huit jours que j'ai été mise au courant de la tenue de cette réunion à laquelle j'ai dû me préparer au plus vite.
Je vous remercie de nous donner l'occasion de vous parler du très grand problème que pose la séparation des petits-enfants de leurs grands-parents, alors que ni les uns ni les autres de sont responsables de ce qui arrive. Cela fait sept ans que je travaille avec des groupes de grands-parents établis dans tout le Canada et après avoir entendu les histoires tragiques que m'ont racontées des centaines de grands-parents, je n'hésite pas à dire aujourd'hui, comme l'a déclaré également le Dr Kornhaber, un psychiatre reconnu, spécialiste des enfants et de la famille, chercheur et auteur de divers ouv
Dans cet exposé, je vais essayer d'illustrer, en décrivant des situations réelles, y compris la nôtre, comment les grands-parents qui se voient refuser la possibilité de garder des relations avec leurs petits-enfants sont privés d'exercer leurs droits et responsabilités - lesquels, selon le Dr Kornhaber, leur reviennent dès l'instant qu'ils deviennent grands-parents. Dès ce moment-là, dit-il, nous avons à assumer un tout nouveau rôle dans la structuration de l'avenir à long terme de nos familles. Par ailleurs, nous avons besoin de nos petits-enfants pour les aimer, nous occuper d'eux et partag
Nos petits-enfants ont également le droit inhérent d'avoir des relations avec leurs grands-parents et de les aimer, peu importe qu'il y ait eu dans la famille une séparation, un décès ou un différend. Sauf motif grave, on ne devrait jamais laisser des forces extérieures altérer ce lien affectif génétique. Malheureusement, les forces extérieures dont je parle sont les parents qui ont la garde et qui, pour diverses raisons, mais principalement pour des motifs égoïstes, comme nous avons pu le découvrir, détruisent l'harmonie qui peut exister dans la vie de leurs enfants en les traitant d'aussi cr
Nous savons tous que la distance peut souvent limiter nos contacts physiques avec nos petits-enfants, mais il y a d'autres formes de contact qui nourrissent et consolident la relation, les coups de téléphone - notamment lors d'événements spéciaux comme les anniversaires, Noël, la remise des diplômes à l'école maternelle - les lettres, les cartes et le courrier électronique qui n'a pas de secret pour nos petits-enfants et qu'ils nous apprennent même à utiliser. Vous vous demandez peut-être pourquoi je mentionne ces moyens évidents de maintenir des relations. C'est pour vous signaler que, dans l
Lorsque les grands-parents demandent aux parents de leur donner des nouvelles de leurs petits-enfants, cette requête est parfois totalement ignorée. C'est la même chose lorsqu'on demande une photo récente - la requête reste lettre morte. Les dernières photos que nous avons de nos petits-enfants ont été prises lorsqu'ils avaient respectivement 6 et 7 ans. Ils ont maintenant 13 et 14 ans.
Telle est la triste réalité: d'innombrables grands-parents sont dans la même situation déchirante et, trop souvent, les tribunaux ignorent ce qui est pourtant une requête fondamentale et légitime. Pouvons-nous recommander que nos tribunaux fassent preuve d'une certaine compassion dans les jugements qu'ils rendent?
J'aimerais consacrer un peu de temps au cas des enfants qui sont séparés de leurs grands-parents suite à la première tragédie qui marque leur vie: le décès de l'un de leurs parents. Nous savons tous que c'est, dans la majorité des cas, lorsque les parents divorcent que les enfants sont séparés de leurs grands-parents et que la plupart du temps, ce sont les parents du conjoint qui n'a pas la garde qui sont affectés. Il semble que la plupart des initiatives qui ont été prises dans le passé pour modifier la loi aient été ciblées sur ce genre de cas. Mais qu'en est-il des grands-parents confrontés
La séparation est parfois très abrupte. Dans notre cas, cela s'est fait du jour au lendemain. Parfois, c'est beaucoup plus subtil, et les enfants ne se rendent pas bien compte qu'on les coupe de leurs grands-parents, particulièrement lorsqu'ils habitent assez loin et ne leur rendent pas visite fréquemment.
Pour illustrer la situation déchirante que nous avons vécue, je vais lire un bref texte que j'ai écrit en 1994, l'Année internationale de la famille, l'année où nous avons osé espérer que nos assemblées législatives adoptent des lois équitables envers les grands-parents. Ce texte est tiré du livre intitulé Families from Within, publié par l'Université Saint-Paul. Voilà ce que j'ai écrit:
Même si nous sommes des grands-parents à distance, l'attachement spécial qui nous lie, nous et nos petits-enfants, est très fort. Nous leur rendons visite dans la province éloignée où ils habitent, chaque fois que nous le pouvons, nous envoyons des colis et des cartes. Lorsque nous entendons leur petite voix joyeuse au téléphone lors d'occasions spéciales ou quand nous nous téléphonons sans avoir d'autres raisons que de dire, «Nous vous aimons de tout notre coeur», cela nous fait le plus grand bien. Ils adorent que nous leur lisions des histoires et ils rient lorsque nous n'arrivons pas à dire
C'est avec beaucoup de tristesse que j'ajoute que toute notre famille - mon mari et moi-même, nos trois filles, leurs conjoints et leurs enfants - vit cette situation traumatisante depuis maintenant sept ans. Cela fait sept ans qu'un gendre que nous aimions et avec qui nous avions des liens pleins de respect et d'affection mutuels avant le décès de notre fille - du moins, nous le croyions - a cruellement fermé la porte qui nous sépare de nos petits-enfants.
En réalité, nous sommes toujours les grands-parents des enfants et nous le resterons, quelle que soit la situation matrimoniale de leur père.
Dans son livre intitulé Divorce and Disengagement, portant sur 50 grands-parents séparés de leurs petits-enfants, le Dr Kruk de l'Université de la Colombie-Britannique déclare que les uns comme les autres - les deux générations - ressentent le même chagrin, comparable à celui qui nous envahit lorsque quelqu'un meurt dans notre entourage. D'autres spécialistes sont également d'avis que rompre ainsi des liens de façon aussi brutale aura des conséquences néfastes et durables sur les deux parties concernées.
Avant que mon amie Patricia ne vous donne la liste des recommandations que nous vous transmettons respectueusement, j'aimerais faire brièvement une autre observation sur l'adoption des enfants par une belle-mère ou un beau-père. Pour s'assurer que les grands-parents disparaissent complètement de la vie des enfants, il est une ruse qu'on emploie souvent, l'adoption légale des enfants par le nouveau beau-père ou la nouvelle belle-mère, à l'insu des grands-parents. Il est à espérer que les juges se rendent compte que l'adoption par un beau-père ou une belle-mère est parfois un moyen d'éloigner le
Dans notre cas, étant donné que nous n'avions intenté aucune action en justice avant l'adoption de notre petit-fils et que les contacts avec la famille étaient à sens unique - de notre part uniquement - il est évident que l'adoption était un fait accompli lorsque nous avons découvert ce qui s'était passé.
Nous recommandons donc qu'on inclue parmi les modifications de la loi dont ma collègue fera état plus tard une nouvelle disposition concernant l'adoption par un beau-père ou une belle-mère.
J'aimerais également attirer votre attention sur le fait que les droits de l'enfant sont stipulés dans la Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies en 1989 et ratifiée officiellement par le Canada en décembre 1991. L'article 5 de la Convention oblige les États parties à respecter la responsabilité, le droit et le devoir non seulement des parents, mais également des membres de la famille élargie. L'article 16 de cette même Convention stipule que nul enfant ne fera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa famille. L'article 19 pre
Le très honorable Joe Clark, qui était à l'époque ministre chargé des Affaires constitutionnelles, a écrit à l'un de nos membres de Calgary en 1992, je crois, pour l'aviser que les dispositions de ladite convention étaient considérées suffisantes pour traiter le problème qu'elle avait soulevé, c'est-à-dire le fait qu'elle soit séparée de l'enfant dont elle était la grand-mère. J'ai ici une copie de cette lettre que vous souhaiterez peut-être examiner après mon exposé.
J'espère avoir illustré la triste réalité de la situation dans laquelle se retrouvent trop de grands-parents et de petits-enfants aujourd'hui. Nos lois, que ce soit au niveau fédéral ou provincial, à l'exception de trois provinces, ne reflètent pas les changements qu'a connus notre société au cours des deux dernières décennies. Les grands-parents demandent qu'on y apporte des modifications depuis 1980. Ils parlent au nom de leurs petits-enfants qui sont, dans tout cela, des victimes innocentes. Ils n'ont aucun recours dans ces situations injustes.
Alors qu'un espoir pointait à l'horizon et que nous comptions voir adopter le projet de loi d'initiative parlementaire C-232, pour la énième fois, nos espérances ont été réduites à néant lorsque ce texte a été rejeté par nos législateurs, même si certains spécialistes avaient prouvé qu'il s'agissait d'un projet de loi valable à tous égards. Pourquoi nos politiciens ne les ont-ils pas écoutés?
Pour conclure, nous vous supplions, mesdames et messieurs, d'être fermes et clairs lorsque vous transmettrez notre message, pour l'amour de nos petits-enfants. Nous vous prions de demander à nos législateurs d'agir promptement, avant que la situation ne fasse d'autres victimes.
Mme Patricia Moreau (Canadian Grandparents' Rights Association): Je m'appelle Patricia Moreau, et voici quelles sont nos recommandations concernant les modifications à apporter à la loi.
Si la loi comportait des dispositions en faveur du maintien de la relation entre les grands-parents et leurs petits-enfants, cela influencerait probablement le comportement des parents qui ont la garde et qui, autrement, auraient tendance à refuser le droit de visite sans motif valable. Nous suggérons que la Loi sur le divorce dispose que cette relation soit présumée être dans l'intérêt de l'enfant et que, par conséquent, elle ne soit pas perturbée à moins qu'on puisse démontrer à un tribunal qu'elle n'est pas dans l'intérêt de l'enfant.
La Loi sur le divorce devrait être modifiée afin de reconnaître que les grands-parents appartiennent à une catégorie distincte de tiers et qu'ils peuvent demander un droit de visite sans y avoir été autorisés par la cour.
Les lois concernant le droit de visite dans des situations autres qu'un divorce devraient être modifiées dans le sens des recommandations que nous formulons à propos de la Loi sur le divorce.
Les lois provinciales sur le bien-être de l'enfance devraient être modifiées afin de stipuler que les grands-parents doivent être avisés de toute audience concernant l'intervention des autorités provinciales dans le but d'assurer la protection d'un enfant, ainsi que de toute procédure concernant l'adoption d'un enfant.
L'adoption par un beau-père ou une belle-mère ne devrait avoir aucun effet sur le droit d'un enfant de rendre visite à ses grands-parents.
En outre, les grands-parents devraient avoir la possibilité de demander une ordonnance sur leur droit de visite, lors même d'une audience concernant l'adoption de l'enfant par un beau-père ou une belle-mère; le tribunal devrait également prendre en considération ces recommandations, ainsi que la bonne volonté démontrée par le beau-père ou la belle-mère en ce qui a trait au maintien d'une relation entre l'enfant et ses grands-parents biologiques.
La médiation entre les grands-parents et les parents de l'enfant devrait être obligatoire. Si l'une des parties concernées la refuse, le tribunal devrait alors examiner immédiatement la demande de droit de visite, et le jugement devrait refléter la mauvaise volonté démontrée par la partie qui refuse de chercher un terrain d'entente.
Le sénateur Cohen: Étant moi-même grand-mère, j'ai été très émue par les histoires que vous avez racontées. Je trouve choquant qu'on considère toujours les grands-parents comme des tiers.
Il faut que je contienne mes émotions et que, pour vous poser des questions, je raisonne avec ma tête plutôt qu'avec mon coeur, car je serai encline en tant que grand-mère, après avoir écouté vos exposés, à vous accorder tout ce que vous demandez. Toutefois, nous avons une tâche à accomplir, et c'est pourquoi je vais vous poser deux ou trois questions concrètes auxquelles je vous demanderais de répondre.
Devrait-on donner la possibilité de faire une demande de droit de visite à tous les grands-parents ou uniquement à ceux qui peuvent démontrer que, par le passé, ils ont entretenu des relations avec leurs petits-enfants ou que ces relations sont étroites? Je pense, par exemple, aux relations qui s'établissent lorsque les enfants viennent coucher chez leurs grands-parents le vendredi soir ou passer la fin de semaine ou lorsque les grands-parents font du baby-sitting. Ou alors, estimez-vous que cette possibilité devrait être offerte à tout le monde?
Mme George: Je dirais qu'on devrait donner la possibilité de demander le droit de visite aux grands-parents dont la réputation est établie, car tous les grands-parents n'entrent pas dans cette catégorie. Il faut être prudent.
Mme Moreau: Ce qui m'inquiète, c'est qu'il va alors se poser le problème des enfants qui ont déménagé dans une autre province parce que l'un de leurs parents a été muté ou pour une autre raison. Les grands-parents ne peuvent pas leur rendre visite une fois par semaine. Ils peuvent bien sûr leur parler au téléphone ou communiquer d'une autre manière. Si nous stipulons dans la loi que ces grands-parents ne peuvent pas voir leurs petits-enfants, nous allons pénaliser des gens qui aiment beaucoup leurs petits-enfants. Ce n'est pas de leur faute si les enfants n'habitent pas la même province qu'eux
Tant que les grands-parents concernés n'ont jamais eu d'influence néfaste sur l'enfant, au plan affectif ou autre, pourquoi ne pas leur donner le droit de voir cet enfant?
Mme Luyken: Je pense que par droit de visite, on doit entendre les communications par téléphone, par courrier électronique, et cetera. Même si nous ne sommes pas en mesure de leur rendre visite, nous pouvons habituellement prendre contact avec eux, qu'ils habitent dans une autre province ou de l'autre côté de la ville, ce qui est parfois le cas.
Il faut également accepter le fait que certains grands-parents ne doivent pas être autorisés à voir leurs petits-enfants. C'est le cas de ma meilleure amie. Elle ne les voit pas, et elle ne devrait pas les voir. Je pense toutefois également que ce serait une bonne idée d'obliger les parents ou celui qui a la garde à prouver que les visites ne sont pas dans l'intérêt de l'enfant. Après tout, c'est des enfants dont nous nous préoccupons. Nous voulons les voir. Ce faisant, nous pensons à nous, mais nous voulons ce qu'il y a de mieux pour eux.
Le sénateur Cohen: Dans le contexte du droit de visite, s'il est difficile pour les parents de partager le temps dont disposent les enfants - ce qui arrive, nous le savons - comment devrait-on prendre en considération la demande formulée par les grands-parents? C'est une situation qui pourrait se présenter.
Mme Luyken: Oui. Je pense que bien des fois, le droit de visite des grands-parents pourrait être combiné avec celui du conjoint qui n'a pas la garde. C'est ce qui se passe dans notre cas. Nous devons nous rappeler que même si nous voulons les voir souvent, ils sont encore petits. S'ils rendent visite à leur papa pendant la fin de semaine, tous les quinze jours, et si nous voulons les voir, nous aussi, très souvent, ces pauvres petits n'auront plus de temps pour jouer au foot, pour prendre des leçons de natation, et cetera. Je pense que bien souvent, le droit de visite des grands-parents pourra
Le tribunal nous avait accordé un droit de visite pour l'anniversaire de mon mari, qui tombe en avril et pour le mien, qui tombe en octobre. Nous avions également deux fins de semaine par an plus une semaine pendant l'été avec chacun de nos petits-enfants. Peut-être est-ce suffisant. Nous pouvions également les voir chaque fois qu'ils rendaient visite à leur père. Il faut penser à leur intérêt. Il doit leur rester du temps dont ils peuvent disposer librement.
Mme Bakopanos: Permettez-moi de dire, avant que je fasse mes observations, qu'avec un nom comme Bakopanos, je suis d'origine grecque. Chez nous, la famille élargie n'est pas une théorie - c'est quelque chose de bien concret. Si je siège ici aujourd'hui à titre de députée, c'est que j'ai pu compter sur mes parents pour s'occuper de mes enfants en mon absence et aussi pour leur donner ce dont ils avaient besoin dans la vie de tous les jours. J'accorde donc une très grande valeur au rôle que les grands-parents jouent dans ma propre vie et dans celle des gens qui appartiennent à ma communauté. Je
Plus tôt, Mme Bremmer a mentionné le projet de loi C-232. Étant donné que j'ai joué un certain rôle à la Chambre des communes le jour où ce projet de loi a été déposé, j'aimerais vous donner quelques précisions.
Il s'agissait d'un projet de loi d'initiative parlementaire. Dans le cadre du Règlement de la Chambre des communes - et je vous prie de m'excuser si je vous donne l'impression de vous faire un cours, mais je pense qu'il est important de consigner cela au procès-verbal - le comité chargé des affaires émanant des députés a jugé que ce projet de loi ne devrait pas faire l'objet d'un vote. Autrement dit, pour que ce texte fasse l'objet d'un vote à la Chambre, il aurait fallu le consentement unanime des membres du comité. Toutefois, le comité en a décidé autrement.
Le projet de loi n'a pas été rejeté par les législateurs. Je tiens à le souligner parce que c'est moi qui ai dit «Non» lorsque le moment est venu de décider si ce projet de loi devait faire l'objet d'un vote. Il existe une procédure et un Règlement de la Chambre des communes qui doivent être respectés. Je voulais le signaler, à vous et aux fins du compte rendu. C'est un des rôles qu'à titre de parlementaires nous sommes appelés à jouer, et je respecte les règles qui nous sont imposées. Les commentaires que vous avez entendus à ce sujet vous ont peut-être amenés à penser que nous avions rejeté
Je pense que beaucoup de députés étaient favorables au projet de loi, y compris moi. Il comportait de nombreuses dispositions.
J'ai trois questions. Lorsque ce projet de loi a fait l'objet d'un débat, l'Association du barreau canadien et le Barreau du Québec se sont tous deux déclarés contre, en disant que ces dispositions enfreignaient le caractère privé des relations entre parents et enfants et accorderaient aux grands-parents des droits qu'ils n'ont pas lorsque tout va bien entre les conjoints.
Ces deux associations estimaient également que, dans une certaine mesure, la participation automatique des grands-parents à des procédures de divorce se révélerait perturbatrice dans une situation qui est très difficile et complexe.
Comment s'y prendra-t-on pour faire appliquer les dispositions portant sur le droit de visite des grands-parents lorsqu'on ne peut même pas faire respecter une ordonnance du tribunal concernant l'un des parents? Il s'agit de questions très complexes et très difficiles, et la plupart d'entre vous avez vécu ce genre d'expérience. Je veux dire par-là que vous avez traversé des circonstances qui s'avèrent très difficiles pour les parents des enfants comme pour vous-mêmes.
Telles étaient certaines des réserves que nous ont signalées, à nous, les législateurs, l'Association du Barreau canadien et le Barreau du Québec. À ce moment-là, une autre question s'est posée car, pour certains législateurs, le droit de visite devrait relever des provinces et ce sont elles qui devraient décider si elles souhaitent changer leurs lois afin d'autoriser le droit de visite des grands-parents.
Mme Bremmer: Je croyais que vous aviez voté contre le projet de loi C-232 à la Chambre.
Mme Bakopanos: Je n'étais pas contre le projet de loi. Je viens juste de vous expliquer ce que j'ai fait.
Mme Bremmer: On m'a laissé entendre que ce qui était en question, c'était l'idée de faire du deuxième dimanche de septembre la Fête des grands-parents.
Mme Bakopanos: C'était l'une des questions qui se posait.
Depuis que le projet de loi C-232 a été déposé, quelles initiatives avez-vous prises pour convaincre l'Association du Barreau canadien et le Barreau du Québec du bien-fondé de votre cause?
Mme Moreau: Il existe au Québec des lois qui protègent les grands-parents et qui sont régulièrement appliquées. J'essaie de voir pourquoi vous dites qu'il ne serait pas possible de faire respecter les dispositions ayant trait au droit de visite. On les fait exécuter tous les jours.
Mme Bakopanos: L'article 611 du Code civil du Québec accorde ce droit. Toutefois, il ne peut pas faire l'objet d'une exécution forcée. S'il est impossible de procéder ainsi dans le cas des parents, comment peut-on le faire dans le cas des grands-parents? C'est la raison pour laquelle je vous ai posé la question.
Mme Luyken: En Ontario, les pères qui ne versent pas de pension alimentaire doivent en subir les conséquences. Si le droit de visite fait l'objet d'une ordonnance du tribunal, pourquoi est-ce que le parent qui a la garde - la mère, habituellement - ne s'exposerait pas aux mêmes conséquences que le père lorsqu'il ne fait pas les versements requis? Il risque de se voir retirer son permis de conduire ou son passeport.
S'il existait une ordonnance sur le droit de visite, les tribunaux pourraient fort bien dire, «Vous feriez mieux de laisser papa voir ses enfants sinon, on va vous retirer votre permis de conduire et cela va vous poser des problèmes pour aller travailler». Ça pourrait être utile.
Mme Bakopanos: Et dans le cas des grands-parents? Comment obligez-vous le tribunal à leur accorder le droit de visite?
Mme Luyken: Je ne sais pas.
Mme Bakopanos: C'est l'objet de ma question. Donnez-moi des conseils.
Mme Luyken: Je croyais que vous parliez de l'impossibilité de faire respecter le droit de visite des parents.
Je sais bien que les tribunaux ont beaucoup de mal à faire appliquer les dispositions concernant le droit de visite. Toutefois, si l'on faisait exécuter le droit du conjoint qui n'a pas la garde, peut-être que l'autre parent réaliserait qu'il est également important que les grands-parents voient les enfants. Dans ce cas, pas de sanctions. Je serais prête à essayer.
Mme Moreau: Ma fille est morte il y a trois ans, et on nous a immédiatement empêchés de voir nos petits-enfants. Il a fallu que nous intentions des poursuites pour arriver à les voir. Nous avons reçu provisoirement l'autorisation de leur rendre visite une fois par mois. Puis, tout d'un coup, on nous a fermé la porte au nez. Nous avons frappé et il nous a dit, «Non, j'ai décidé que vous n'auriez pas de droit de visite; je ne veux pas». Il nous a fermé la porte au nez. Nous n'avons pas été autorisés à voir les enfants. Il a fallu que nous nous adressions à nouveau à la cour. Le juge l'a remis en
Je ne vois pas en quoi de telles dispositions sont si difficiles à faire exécuter.
[Français]
Mme Diane St-Jacques (députée de Shefford): J'aimerais vous remercier de votre témoignage qui m'a vraiment touché. Je dois vous dire que j'ai beaucoup de difficulté à comprendre qu'il y ait des parents qui puissent empêcher les petits-enfants de voir leurs grand-parents. J'ai une petite fille de 11 ans et si jamais je divorçais, il me semble que ce serait tout naturel.
Quelles sont les principales raisons qui sont invoquées pour empêcher les enfants de voir leurs grands-parents? Est-ce qu'il y aurait d'autres moyens pour encourager les parents à considérer l'accès des petits-enfants aux grands-parents, mis à part les mesures légales, ou si l'on doit absolument se fier uniquement aux mesures légales?
[Traduction]
Mme Moreau: Ce serait la solution idéale dans un monde parfait. Toutefois, dans notre cas, il a fallu que nous nous fassions évaluer par un psychiatre et ainsi de suite. Apparemment, il est animé d'un tel sentiment de vengeance à notre égard parce que nous avons cherché à obtenir un droit de visite, qu'il s'est marié presque immédiatement après et maintenant, la belle-mère de nos petits enfants ne veut pas que nous fassions partie de leur vie. Elle leur a dit que, pour eux, nous n'étions pas des grands-parents.
Ces enfants ont perdu non seulement leur mère, mais toute sa famille. Le père est animé d'un terrible sentiment de vengeance. Nous avons fait ce que nous avons pu pour régler l'affaire hors cour en ayant recours à la médiation et à d'autres moyens, mais rien n'a marché, tant et si bien que sept mois plus tard, nous avons dû aller en cour.
Je ne pense pas qu'il y ait un autre moyen qu'une loi pour nous défendre. Nous n'aurions alors probablement pas besoin de nous adresser aux tribunaux. Si sa conjointe savait qu'il existe une loi qui nous assure une protection quelconque, je ne pense pas qu'il serait aussi méchant envers nous. Il nous a tout simplement fermé la porte au nez en disant, «Traînez-moi devant les tribunaux si vous voulez voir les enfants». C'est l'attitude qu'il a adoptée.
Mme Bremmer: Je suis sûre que s'il y avait eu une loi, on ne nous aurait pas empêché de voir nos petits-enfants. Nous avons essayé la médiation par l'intermédiaire d'amis, de prêtres et de son employeur. C'est la raison pour laquelle cela nous a pris si longtemps avant d'aller en cours. Nous espérions toujours arriver à une entente avec lui et être en mesure de négocier quelque chose, mais cela n'a jamais marché. Nous avons attendu cinq ans. Finalement, lorsque nous sommes allés en cour, nous n'avons rien obtenu. Nous avons trouvé cela très difficile. C'était une semaine avant Noël, et nos pro...
Nous n'avons rien obtenu parce qu'il a fait venir des témoins qui ont déclaré que nos relations avec notre fille n'étaient pas bonnes. Peut-on imaginer dire une chose pareille alors que notre fille n'était plus là pour se défendre? Nous connaissions à peine ces gens-là et pourtant, le tribunal a accepté leurs témoignages et ne nous a absolument rien accordé.
Mme Luyken: Si je donne l'impression de toujours rejeter le blâme sur la femme, c'est parce qu'habituellement, c'est la mère qui a la garde des enfants. On peut se retrouver dans la même situation si c'est le père qui a la garde. Par vengeance, celui des conjoints qui a la garde refuse de laisser les parents de l'autre voir les petits-enfants. C'est tout simplement pour se venger de son conjoint ou de son ex-conjoint. Ça finit là.
J'aimerais qu'on impose aux parents qui divorcent l'obligation de prouver qu'il n'est pas dans l'intérêt des enfants de voir leurs grands-parents. Je pense que c'est le cas en Alberta. Peut-être ainsi y aurait-il moins de grands-parents obligés de rompre leurs relations avec leurs petits-enfants, car je ne pense pas que des parents soient prêts à se présenter au tribunal et à invoquer des broutilles pour refuser un droit de visite.
[Français]
Mme Alarie: Ce que l'on veut tous - parce que je suis aussi une grand-mère, et fort heureusement, je vais toucher du bois parce que tout va bien - c'est le bien de l'enfant. C'est très triste d'entendre des témoignages aussi touchants. Il y a plusieurs questions qui me viennent à l'esprit. Vous faites une différence majeure - elle m'apparaît majeure en tout cas - entre les cas de divorce et les cas de décès. C'est un éclairage tout nouveau que vous me donnez. J'étais venue ici en ne pensant qu'à la Loi sur le divorce, alors que vous avez des cas de décès qui apportent des situations dramatique
On a parlé, tout à l'heure, de la législation au Québec sur le droit des grands-parents soit l'article 611, et il me semble que sa mise en vigueur est difficile - mais elles sont toujours difficiles dans ces cas-là - et vous l'avez mentionné aussi dans votre lettre, mesdames:
Les pères et mères ne peuvent sans motifs graves, faire obstacle aux relations personnelles de l'enfant avec ses grands-parents. À défaut d'accord entre les parties, les modalités des relations sont réglées par le Tribunal.
Bien sûr, on ne commence pas par le tribunal; on finit par le tribunal. Il y a une période de temps où cela fait moins mal aux enfants, et peut-être les parents et les grands-parents aussi. Et cela couvre aussi les enfants de divorce comme les enfants qui ont perdu un parent. Je ne sais pas si c'est un éclairage important, mais il me semble que c'est une façon importante peut-être d'aborder la problématique.
Je me préparais à vous parler de médiation, et je vous ai entendues, madame Bremmer et madame Moreau, presque avouer l'échec des médiations. Cela me trouble beaucoup parce que dans la médiation il y a aussi des modifications d'attitude normalement. Dans des cas de divorce, comme j'imagine dans des cas de décès, il y a des attitudes qui sont très dures et très difficiles à changer.
J'aimerais que vous me disiez un peu plus comment cela s'est passé et pourquoi ces échecs dans la médiation familiale.
[Traduction]
Mme Moreau: Dans notre cas, nous avons évidemment essayé en premier la médiation, comme on nous l'avait demandé. Il est venu une seule fois. Nous n'avions pas vu les enfants pour leur anniversaire, pour Noël ou en d'autres occasions et nous avons demandé un rendez-vous pour apporter aux enfants tous les cadeaux qui les attendaient à la maison. Il a dit non, que ces cadeaux seraient un moyen d'acheter l'affection des enfants et qu'il s'opposait à cela. Il n'a jamais assisté à nouveau à une réunion de médiation. Il a tout simplement dit, «Non, je ne veux pas participer, un point c'est tout». Not
C'est la raison pour laquelle, dans mes recommandations, j'ai demandé que, lorsqu'on a recours à la médiation, les deux parties soient obligées de participer ou qu'on prenne en compte sérieusement les raisons pour lesquelles l'une des parties refuse d'être impliquée. Cela pourrait marcher si les parties étaient obligées de participer. Étant donné qu'à l'heure actuelle une telle obligation n'existe pas, on peut tout simplement partir en claquant la porte. C'est très simple. Dans notre cas, le médiateur a appelé le père des enfants au bureau et il a dit, «Non, je ne reviendrai pas, un point c'es
[Français]
Mme Alarie: Je n'ai pas de statistiques, parce que c'est quand même récent, mais dans le droit matrimonial et de la famille au Québec depuis 1997, on impose la médiation. Le minimum est de six heures, je pense, et les parties sont présentes. Malheureusement, je ne sais pas si cela réussit ou non, mais je cherche toutes les avenues qui peuvent tempérer ces situations. Je porte cela à votre réflexion.
[Traduction]
Mme Luyken: À la page 5 de notre mémoire, nous avons en effet suggéré qu'on encourage la médiation volontaire, comme première étape et que si cela n'aboutit à rien, les tribunaux obligent les parties à avoir recours à un médiateur. En cas d'échec, on devrait alors organiser une réunion dans le but de régler le différend et, si cela ne donne rien, ce sont les tribunaux qui devraient imposer une solution. Nous avons en effet suggéré que les parties soient obligées de participer à une médiation.
Mme Moreau: Vous avez dit qu'au Québec, toutes les parties en cause se réunissaient. En ce qui nous concerne, cela n'a pas été autorisé. Les médiateurs nous ont rencontrés et ensuite, ils ont communiqué avec le père et l'ont fait venir. Ils ne voulaient pas nous voir tous ensemble. Il a pu dire, «Non, je ne viendrai pas».
Le sénateur Cohen: L'autre jour, des avocats conseils ont comparu devant nous et ont déclaré qu'à leur avis, la médiation ne marche pas. Ils ont suggéré une intervention rapide, pas nécessairement de la part des autorités judiciaires, mais plutôt d'un psychologue ou d'une tierce partie, avant que la guerre n'éclate pour de bon. Peut-être que si l'on intervient rapidement, les droits des grands-parents peuvent être discutés avec les parents sur un terrain neutre. Les enfants peuvent voir ainsi qu'il existe des relations stables, même si celles de leurs parents se sont effritées. Peut-être devri
Mme Luyken: J'aimerais vous dire ce qui est arrivé dans notre cas. Nous avons fait l'objet d'une évaluation par un psychologue clinicien, mais cela s'est passé plus tard. Il aurait sans doute été bon de faire cela plus tôt, au début, parce que c'est juste après cette évaluation que notre belle-fille a proposé à notre fils de reprendre la vie commune. Ce psychologue clinicien était excellent. Il les a rencontrés; il les a rencontrés avec les enfants; il nous a rencontrés; il nous a rencontrés avec les enfants. Nous avons tous fait les mêmes petits tests. Ensuite, il a parlé à notre petit-fils.
Mme Moreau: Il y a cependant une différence entre ce genre d'intervention et la médiation dont vous avez parlé. Nous avons essayé la médiation et nous nous sommes également soumis à ce dont parle Mme Luyken, l'évaluation psychologique. Nous venons à nouveau de le faire. Cela a vraiment fait sortir beaucoup de choses qui n'auraient jamais été abordées dans le cadre d'une médiation. Les résultats de l'évaluation sont tout à fait favorables au maintien de relations entre les grands-parents et les enfants. Même si les enfants sont arrivés en disant, «Non, ce ne sont pas nos grands-parents», quand
Le sénateur Jessiman: Il est évident que le problème vient habituellement du conjoint qui a la garde, et non de celui qui a un droit de visite et qui peut inviter ses parents à partager le temps qu'il ou elle peut passer avec les enfants.
Je présume également que vous aimeriez tous des mesures comparables à celles qui existent dans le Code civil du Québec. L'article 611 du Code civil du Québec stipule que le maintien de relations entre les grands-parents et leurs petits-enfants est dans l'intérêt des enfants et ne devrait donc pas être perturbé à moins qu'on puisse démontrer à un tribunal que garder ce contact est contraire à l'intérêt des enfants. Êtes-vous d'accord sur ce point?
Mme Luyken: Oui.
Le sénateur Jessiman: On nous a suggéré de modifier l'article 16 de la Loi sur le divorce, qui touche les grands-parents, parce qu'ils ne sont ni l'une des parties directement concernées ni l'un des conjoints. À l'heure actuelle, vous devez déposer une demande auprès d'un tribunal. Nous suggérons que, lorsqu'elle émet une ordonnance en vertu de l'article 16, la cour devrait traduire concrètement le principe voulant que l'enfant issu d'un mariage doive avoir autant de contacts que possible avec les parents des deux conjoints, tant et aussi longtemps que cela est dans l'intérêt de l'enfant et qu
Mme George: C'est exactement ce que nous souhaitons.
Le sénateur Jessiman: Je suis heureux de voir que nous nous entendons bien.
J'aimerais attirer votre attention sur un autre point. En 1994, Catherine Bostock a effectué une étude qui a été publiée dans le Columbia Journal of Law and Social Problems. Elle a constaté qu'actuellement, il existe dans 50 États des lois qui autorisent les grands-parents à s'adresser aux tribunaux pour obtenir un droit de visite. Vous avez également ce droit, mais en ce qui vous concerne, il y a une autre étape à franchir. Mme Bostock prétend que partager entre les membres de la famille les droits reconnus par la loi peut avoir des conséquences négatives sur les enfants et leurs parents, par
J'aimerais que vous me disiez si vous êtes d'accord ou non avec ce point de vue. Il est suggéré que les juges, en imposant un droit de visite contre le gré des parents, peuvent soumettre l'enfant à une tension psychologique prolongée. Par exemple, il se peut que la mère ne veuille pas que vous ayez un droit de visite, mais que le tribunal en décide autrement. Peut-être n'est-ce pas dans l'intérêt de l'enfant. Dans ces circonstances, ne laisseriez-vous pas le juge décider? Nous ne devrions pas imposer au conjoint qui a la garde un autre problème - accorder la garde ou un droit de visite pendant
Vous pouvez voir que donner aux grands-parents certains droits et les enchâsser dans une loi pose des problèmes. Vous avez ce droit à l'heure actuelle, même si les tierces parties, ce qui comprend les grands-parents, ont une étape supplémentaire à franchir. Si nous apportons la modification que j'ai suggérée ou si nous prescrivons quelque chose de semblable à ce qui existe dans le Code civil du Québec, je pense que nous ne serions pas loin de répondre à vos préoccupations. Je suis tout à fait favorable à votre cause car, moi aussi, je suis grand-père.
Mme Mather: Les avantages qui découlent du maintien d'une relation entre les grands-parents et leurs petits-enfants l'emportent de loin sur tout dommage éventuel. Je pense que celui des parents qui a la garde a souvent peur de perdre un peu du contrôle qu'il exerce, à cause de l'animosité accumulée entre les conjoints. Si l'on accorde un droit de visite aux grands-parents, éventuellement, le parent en question verra que cela ne fait aucun mal à l'enfant et appréciera probablement beaucoup la contribution qu'apportent les grands-parents.
Le sénateur Jessiman: Je suis d'accord, mais vous admettrez, je pense, que cela ne s'applique pas à tous les grands-parents. Il y a seulement certaines personnes qui peuvent être des grands-parents extraordinaires.
Mme Mather: C'est exact, mais dans la majorité des cas, la relation avec les grands-parents est bonne.
M. Lowther: Je félicite Grandparents Requesting Access & Dignity d'avoir présenté un mémoire que j'ai trouvé excellent parce qu'à la fin, il y a des recommandations précises sur la manière dont nous pourrions modifier certaines dispositions de la Loi sur le divorce. Toutefois, j'aimerais en savoir plus sur vos intentions.
Si l'on apportait les modifications que vous suggérez, est-ce que cela mettrait les grands-parents sur le même pied que les parents en ce qui concerne la Loi sur le divorce? Ne court-on pas le risque de créer un véritable cirque en impliquant la mère, le père et les grands-parents?
Mme Moreau: Non. Tous les grands-parents à qui j'ai parlé savent que ce sont les parents qui passent en premier. Les grands-parents jouent toujours un rôle secondaire.
M. Lowther: C'est ce que vous pensez?
Mme Moreau: Oui.
M. Lowther: On nous a suggéré qu'en cas de séparation, les parents devraient se soumettre à un counselling quelconque ou qu'on devrait leur montrer une bande vidéo pour qu'ils se rendent compte de l'impact que les critiques formulées par un des parents à l'endroit de l'autre peuvent avoir sur leurs enfants. Certaines études montrent que si l'un des parents fait des remarques désobligeantes à propos de l'autre devant l'enfant, ce dernier en veut en fait à celui qui critique. Jeter la pierre se retourne contre celui qui le fait.
Serait-il sage, à votre avis, qu'en cas de séparation, les grands-parents participent à ces séances de counselling de façon à ce que tout le monde sache quel est l'impact que les critiques formulées de part et d'autre peuvent avoir?
Mme Luyken: Je pense que oui. Pour tous ceux qui se retrouvent dans une telle situation, c'est l'inconnu. Je pense que cela serait utile.
M. Lowther: Si l'on apportait les modifications que vous proposez, est-ce que cela s'arrêterait là ou y a-t-il autre chose? Cherchez-vous simplement à obtenir ces modifications, tout en vous abstenant de mentionner d'autres revendications?
Mme Mather: La question qui se pose ensuite est celle de l'exécution des dispositions de la loi. Même si, en Australie, des modifications ont été apportées - je l'ai découvert ce matin - ce qui les inquiète là-bas au plus haut point, c'est la question de l'application de la loi.
Si les changements que nous souhaitons sont apportés à la loi, cela modifiera l'attitude des juges et de toutes les parties concernées. Cela modifiera également les attentes des grands-parents. Ils s'attendront à ce qu'on les traite de façon différente si on leur reconnaît, en vertu de la loi, un statut plus important. Cela changera également l'attitude des parents et de toutes les parties concernées.
M. Lowther: Lorsque vous parlez de ce changement d'attitude ou de ces nouvelles attentes, vous voulez dire que les grands-parents seraient censés participer à tout ce processus dès le début et non après coup, lorsque quelqu'un dit, «S'ils veulent être entendus, ils n'ont qu'à faire des représentations à cette fin»?
Mme Luyken: Oui.
Le sénateur Cools: J'aimerais dire aux témoins qu'ils sont les bienvenus et les remercier d'avoir présenté ce qui, à mon avis, était des exposés très sensibles et très réfléchis. J'aimerais également saisir l'occasion pour remercier Mme Bakopanos d'avoir exprimé sa reconnaissance envers ses propres parents. C'est bien de dire «Merci» de temps en temps à ses parents.
Madame George, à la fin de votre exposé, avant que le président ne vous demande d'aller un peu plus vite, vous vous apprêtiez à dire quelque chose à propos d'accusations non fondées de mauvais traitements portés contre des grands-parents. Vous êtes passée directement à vos conclusions. Peut-être pourriez-vous décrire, aux fins du compte rendu, le cas que vous souhaitiez porter à notre attention.
Mme George: Oui. C'est l'affaire T.K.B. c. E.L.M. portée devant le juge Edwards de la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Dans cette affaire, le père et les grands-parents d'une petite fille de deux ans étaient accusés de violence sexuelle à son endroit.
Aimeriez-vous que je lise ce qui a été écrit sur cette affaire?
Le sénateur Cools: Juste une ou deux phrases. Je rassemble de la documentation sur ce genre d'affaires et j'aimerais beaucoup ajouter celle-ci à mon arsenal.
Mme George: Cette petite fille a été examinée trois fois et l'on n'a trouvé aucune trace de sévices. Par ailleurs, lorsqu'elle a été questionnée par la police, elle n'a pas parlé de violence. Elle a été vue par des psychologues. Même si elle n'a jamais dit avoir été victime de violence sexuelle, la mère l'a fait traiter comme si cela avait été le cas. Cette petite fille en arrivera à penser qu'elle a été victime de sévices de ce genre, même si cela n'est pas vrai.
De plus, l'ami de sa mère a acheté un fusil et lui a dit que c'était pour la protéger contre son père. Donc, même si l'enfant n'a pas subi de violence, elle a maintenant peur de son père. Le père et les grands-parents ont perdu leur droit de visite.
Le sénateur Cools: Dans cette affaire, les grands-parents ont également été accusés à tort?
Mme George: Oui.
Le sénateur Cools: C'est très courant.
J'allais vous poser des questions sur les cas où les grands-parents ne sont pas eux-mêmes accusés à tort mais où, lorsqu'ils appuient leur fils contre qui, dans la plupart des cas, sont portées des accusations non fondées, ils épuisent leurs ressources financières personnelles. J'ai été fort intéressée par les remarques que vous avez faites au début de vos exposés lorsque vous avez dit que si leur foyer se brise, beaucoup de gens doivent demander à leurs parents de les aider financièrement, de les nourrir et de les loger. C'est un fardeau supplémentaire.
J'aimerais mentionner aux fins du compte rendu, l'affaire Plesh c. Plesh , jugée au Manitoba en 1992. Dans cette affaire, un juge très éminent, le juge Carr, a fait une déclaration concernant des accusations non fondées portées par une mère qui cherchait, par ce terrible moyen, à punir le père et à se venger.
Le juge Carr déclare:
Les propos du juge Carr s'appliquent à ce genre de situation.
Très souvent, vos membres ont été obligés d'assumer à nouveau leur rôle de parent. Avez-vous des données concernant ceux qui ont épuisé leurs ressources financières en aidant leurs enfants dans ces circonstances?
Mme George: Il y a plusieurs personnes dans notre groupe dont les fils ont été faussement accusés de violence sexuelle envers de petits-enfants, dans le but de les priver, eux et leur famille, du droit de visite.
Le sénateur Cools: Si vous avez d'autres témoignages anecdotiques, j'aimerais que vous m'en fassiez part. J'ai un dossier sur la question.
Mme George: Nous allons vous envoyer des informations.
Le sénateur DeWare: Je tiens à remercier les témoins d'avoir accepté de comparaître devant nous cet après-midi. Je n'ai pas besoin de vous rappeler la raison pour laquelle ce comité a été établi. L'an dernier, lors des audiences concernant la modification de la Loi sur le divorce, presque tous les témoins qui ont comparu devant le comité voulaient parler de la garde et du droit de visite plutôt que des pensions alimentaires pour enfants. Nous avons donc souligné au ministre qu'il s'agissait d'une question grave qui devrait être prise en considération. Il a suivi notre conseil et nous sommes he
En ce qui concerne les recommandations de Grandparents Requesting Access & Dignity, il est curieux que dans ce que vous recommandez d'ajouter à l'article 16(1) de la Loi sur le divorce, vous incluiez l'expression «Le tribunal compétent peut, sur demande des époux ou de l'un d'eux, ou de toute personne». «Toute personne» est une expression qui se trouve déjà dans la loi. Peut-être que des tiers ne verraient pas la chose de cette façon, mais les grands-parents se demandent pourquoi ils ne seraient pas cités avant «Toute autre personne». Je ne vois aucune raison de ne pas recommander que cela soi
La modification recommandée par le sénateur Jessiman reprend presque mot à mot ce que vous recommandez vous-mêmes d'ajouter à l'article 16(10). Nous devons examiner cela sérieusement.
Madame Luyken, je constate que vous avez beaucoup approfondi la question de la médiation. Selon moi, la médiation est importante. Je sais qu'en Alberta, il existe un programme de médiation qui marche assez bien.
Généralement, la première personne à laquelle s'adressent les gens qui divorcent, c'est un avocat. Comment pouvons-nous nous y prendre pour exiger que, chaque fois que cela est possible, les avocats recommandent la médiation avant les poursuites en justice?
Mme Luyken: Parmi les récents diplômés en droit, beaucoup sont également des médiateurs, ce qui est excellent. À Kitchener - Waterloo, il existe une association d'avocats spécialistes du droit familial. Peut-être pourrions-nous inciter ces associations à encourager leurs membres à recommander, en premier, la médiation.
Le sénateur DeWare: Ce sont principalement des avocats spécialistes du droit de la famille?
Mme Luyken: Je pense, même s'il existe beaucoup de médiateurs qui ne sont pas avocats.
Le sénateur DeWare: Je suis convaincue que l'une des clés du problème est la médiation, avant de s'adresser aux tribunaux.
Mme Luyken: Peut-être pourrait-on inclure dans la loi une disposition concernant la médiation volontaire et, si cela n'aboutit à rien, faire en sorte que les tribunaux imposent la médiation.
Mme Mather: Je n'en ai peut-être pas l'air, mais je suis une avocate fraîchement diplômée, et les avocats sont dans l'obligation de suggérer la médiation en premier lieu. La seule façon dont on pourrait découvrir que nous ne l'avons pas fait, ce serait qu'une plainte soit déposée auprès du barreau. Toutefois, on nous conseille très fortement à l'école de droit d'encourager la médiation plutôt que le recours aux tribunaux.
Le sénateur DeWare: Quelqu'un a mentionné que la médiation conjointe peut être difficile à cause des dissensions entre les époux et qu'il peut être préférable d'intervenir séparément auprès des intéressés. Je suppose que c'est la raison pour laquelle on a parlé d'avoir recours à la médiation «Lorsque c'est possible».
Mme Mather: Oui. Parfois, il faut attendre que les choses se calment un peu et ensuite, la médiation peut marcher.
Le sénateur DeWare: L'an dernier, un des comités du Sénat s'est penché sur la question de l'enseignement post-secondaire, et l'on a souligné que l'acquisition de connaissances est un processus qui ne finit jamais. Tous mes compliments, madame Mather, pour votre réussite.
Le sénateur Cohen: Une avocate de Halifax a comparu devant un autre comité dont je suis membre et qui traite de certaines lignes directrices. Le cabinet auquel elle appartient s'occupe uniquement d'affaires ayant trait au droit de la famille et a établi un groupe d'éducation familiale chargé d'intervenir rapidement. Dans ce cabinet, on presse les parents de profiter des services offerts par ce groupe avant de prendre d'autres mesures. Peut-être est-ce une modification que nous pourrions prendre en considération et peut-être que les grands-parents devraient être mentionnés dans un autre article
M. Lowther: J'ai besoin des conseils de ceux d'entre vous qui avez connu la peine qu'on peut ressentir dans ce genre de situation.
Ma propre mère adore jouer avec mes enfants. Je peux très bien imaginer la peine que vous avez ressentie, et certaines des histoires que vous avez racontées en sont imprégnées. À part la question du droit de visite des grands-parents, pourriez-vous nous conseiller sur la façon d'aborder tout ce problème? Même après le counselling, même après que beaucoup de problèmes aient été résolus, dans certains cas, il y a encore quelqu'un qui n'obtient pas le droit de visite, alors que les tribunaux l'ont accordé. Il se peut que ces cas soient rares, mais il y en a. C'est pour nous la question la plus di
On a cité au comité le cas d'une femme qui a été mise en prison parce qu'elle ne respectait pas le droit de visite du père. Il est allé en cour quelque 41 fois et finalement, le juge a décidé de la mettre en prison. Nous avons discuté du cas des parents qui ont la garde et qui la perdent parce qu'ils ne respectent pas la décision du tribunal.
Nous avons parlé de la médiation, mais on ne peut pas négocier à n'en plus finir. Il y aura des cas où la médiation ne marchera pas.
Dans ma circonscription, je rencontre des gens qui me disent, «Je ne verse pas de pension alimentaire parce que je ne peux pas faire valoir mon droit de visite; cependant, si mes droits étaient respectés, je paierais». On utilise aussi cet argument.
Étant donné que vous avez étudié la question de près, j'aimerais vous demander conseil sur la façon de régler ce genre de cas. Je sais qu'il n'y a probablement pas de solution toute faite. Y a-t-il des idées que vous jugez meilleures que d'autres ou avez-vous d'autres solutions à nous proposer pour régler les cas où quelqu'un a obtenu du tribunal un droit de visite mais ne peut le faire exécuter? Dire «Non», ce n'est pas une solution.
Mme Moreau: Celui des parents qui refuse de respecter un droit de visite n'a évidemment aucune considération pour le bien de l'enfant. Si ce droit a été accordé, c'est dans l'intérêt de l'enfant.
Peut-être que le tribunal n'a pas accordé la garde à celle ou à celui qui devrait l'avoir. Si cette personne ne tient pas compte des sentiments de l'enfant ni de son bien, je pense que le tribunal devrait peut-être réexaminer sa décision concernant la garde.
Le sénateur DeWare: Nous envisageons sérieusement interroger quelqu'un qui a été victime d'un divorce et demander à cette personne de nous dire ce qui lui aurait rendu la vie plus facile. Nous voulons savoir si les tribunaux se trompent, et ce qui aurait pu rendre la vie des victimes d'une telle situation et celle de leur famille plus facile. Pensez-vous qu'en procédant ainsi nous nous immisçons dans leur vie privée? Pensez-vous que nous pourrions obtenir quelques réponses? Est-ce un aspect des choses que nous devrions explorer?
Mme Luyken: Si un enfant refuse de vous parler, vous ne vous immiscerez évidemment pas dans sa vie privée. S'il accepte, laissez-le dire.
Un de nos membres a dit à son petit-fils, «Tu dois être content, car à ton âge, tu peux décider où tu veux vivre, avec ta mère ou avec ton père». Il a répondu, «Non, je préférerais que ce soit le juge qui décide, parce que si je choisis maman, papa va être fâché, et si je choisis papa, c'est maman qui va être fâchée».
Le sénateur DeWare: Quel âge a l'enfant dont vous parlez?
Mme Luyken: Environ 13 ans, je pense.
Le sénateur DeWare: Les personnes que nous envisageons d'interroger seraient plutôt des gens de 20 ou 30 ans.
Mme Luyken: Avec des gens de cet âge-là, vous ne risquez pas de vous immiscer dans leur vie privée. S'ils veulent vous parler, ils le feront. Treize ans, c'est peut-être un peu jeune.
Ce serait une bonne idée. Si l'on m'autorise à parler à des jeunes dans le cadre des cours sur la famille qu'ils suivent à l'école, je m'attends à ce que l'expérience soit très révélatrice. Ils ont probablement beaucoup de choses à m'apprendre.
Le sénateur DeWare: Je n'avais pas encore envisagé la chose par rapport aux grands-parents, mais peut-être est-ce quelque chose que nous devrions explorer pour obtenir les informations que nous voulons. Nous cherchons à savoir quelle importance cela aurait eu dans leur vie si leurs grands-parents avaient eu un droit de visite.
La coprésidente (le sénateur Pearson): Je tiens à vous dire que j'ai vraiment beaucoup apprécié vos exposés. Je suis grand-mère de dix petits-enfants, y compris trois dont les parents ont divorcé, je peux donc vous comprendre parfaitement lorsque vous décrivez la situation dans laquelle vous vous trouvez. J'ai eu beaucoup de chance parce que les familles où il y a eu un divorce ont agi dans l'intérêt des enfants.
Je suis également tout à fait prête à défendre le droit d'un enfant de maintenir la relation qu'il a établie avec ses grands-parents et avec la famille élargie. En réalité, il s'agit, parmi tant d'autres choses, du droit de contribuer à la formation de l'identité d'un enfant, et je ferai tout en mon pouvoir pour assurer que cette question est prise en considération d'une façon ou d'une autre.
Mme Bremmer a évoqué la Convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant. Je suis heureuse que cela ait été consigné au procès-verbal. Mme Luyken et Mme Moreau ont toutes deux parlé de réunions au cours desquelles les enfants ont eu la possibilité d'exprimer leur désir de conserver des contacts avec leurs grands-parents. J'ai été heureuse d'entendre cela.
Avez-vous d'autres recommandations à faire sur la façon dont les enfants peuvent participer à ce genre de processus? Pourriez-vous nous parler un peu plus de votre propre expérience pour que nous ayons une idée de la procédure qui a été suivie?
Mme Moreau: La seule fois où les enfants ont eu la possibilité d'exprimer leurs sentiments, c'est lors de l'évaluation psychologique effectuée par un psychiatre qui a pu déceler ce que les enfants ressentaient réellement. Comme il l'a dit lui-même, on avait monté les enfants contre leurs grands-parents, mais petit à petit, en parlant avec eux, il a pu déterminer ce que les enfants ressentaient réellement.
La situation a également eu des conséquences financières. Cela a coûté si cher. L'évaluation a été ordonnée par le tribunal. Le juge a dit qu'après avoir écouté le témoignage des deux parties en cause, il ne savait pas qui croire. Pour l'aider à prendre une décision et déterminer qui disait la vérité, il a fallu qu'il nous envoie voir un psychiatre. Nous n'avons pas eu le choix, et cela a coûté très cher.
La coprésidente (le sénateur Pearson): Il a fallu que vous payiez cela aussi?
Mme Moreau: Oui. Mon mari est à la retraite et il a un coeur qui ne marche qu'à moitié, si bien qu'en ce moment, nous n'avons pas beaucoup d'argent. Il a fallu que nous en empruntions.
La coprésidente (le sénateur Pearson): Alors, ces évaluations devraient être faites plus tôt, à un moment où elles coûteraient moins cher?
Mme Moreau: Oui. La médiation n'a pas coûté cher. Quant à l'évaluation psychologique, même si c'est la seule possibilité pour les enfants de donner leur avis, ça coûte cher.
Mme Luyken: Je pense que dans notre cas, cela nous a coûté 6 000 $, mais cette dépense, c'est le meilleur investissement que nous ayons jamais fait. Notre petit-fils avait environ trois ans, et le psychiatre lui a demandé de dessiner les gens qu'il voudrait avoir avec lui s'il était sur une île déserte. Apparemment, il a d'abord dessiné son père. Ensuite, sa mère et sa petite soeur, tout près de sa maman. Il s'est aussi dessiné lui-même, évidemment. Le psychologue a noté que cet enfant avait une notion très concrète de la famille, étant donné qu'il avait inclus sa petite soeur dans son dessin.
Le coprésident (M. Gallaway): Toute publicité est interdite ici.
Mme George: Dans notre cas, nous avons dépensé plus de 35 000 $ en frais juridiques. Il y a eu une évaluation de la famille au début; elle a été très bien faite et s'est révélée en notre faveur, mais le juge a décidé de ne pas en tenir compte. Il faut donner des outils aux juges, mais il faut également les instruire sur la manière de s'en servir. C'est très important.
[Français]
Mme Alarie: Dans les cas de divorces, quel est le pourcentage de grands-parents qui doivent se présenter devant les tribunaux afin d'avoir accès à leurs petits-enfants? Est-ce que vous avez des chiffres sur cela?
Mme George: Il n'y a pas beaucoup de grands-parents qui peuvent aller en cour, parce que cela coûte tellement cher; surtout que plusieurs de nos membres reçoivent que des petites pensions.
Mme Alarie: Je vois que sur ce document il est écrit: Association de grands-parents. Je me demandais si c'était une association de grands-mamans ou de grands-parents, vraiment.
Mme George: Ce sont des grands-parents.
Mme Alarie: Bravo! Voilà, ma curiosité est comblée.
[Traduction]
Le coprésident (M. Gallaway): Je vous remercie tous d'être venus. J'aimerais souligner, étant donné que cette audience est télévisée, que même si ce sont des grands-mères qui ont témoigné aujourd'hui, ce dont je les remercie, je tiens également à adresser mes remerciements aux grands-pères qui se sont manifestés à la dernière minute au fond de la salle.
La séance est levée.