TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 29 avril 1999
• 0830
Le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation se réunit
aujourd'hui à 8 h 30 pour examiner des textes réglementaires.
M. Gurmant Grewal (coprésident) occupe le fauteuil.
Le coprésident (M. Gurman Grewal (Surrey-Centre, Ref.)): Bonjour. Je déclare la séance ouverte. Avant d'entendre nos témoins, j'ai deux brèves annonces à faire.
À la fin de la réunion, nous devons discuter d'un projet de voyage du comité en Australie. Notre prochaine réunion est le 13 mai.
ARRÊTÉ MODIFIANT LES DROITS PROPOSÉS PAR LA WESTERN CANADA MARINE RESPONSE CORPORATION, LA GREAT LAKES RESPONSE CORPORATION OF CANADA, LA SOCIÉTÉ D'INTERVENTION MARITIME, EST DU CANADA LTÉE, L'ATLANTIC EMERGENCY RESPONSE TEAM (ALERT) INC. ET LES SERVICES POINT TUPPER MARINE LTÉE.
Le coprésident (M. Grewal): Les membres se rappelleront qu'à notre dernière réunion du 18 mars, nous voulions entendre des hauts fonctionnaires du ministère des Pêches et des Océans. Ils sont ici aujourd'hui. Nous recevons M. Michel Leclerc, directeur intérimaire des Affaires législatives et réglementaires; M. Gerry Bartram, Politique sur les interventions environnementales, conseiller principal et M. Bruce Bergen, avocat-conseil du ministère.
Je vais maintenant demander à M. Leclerc de faire un exposé et nous passerons ensuite à la période des questions.
M. Michel Leclerc (directeur intérimaire, Affaires législatives et réglementaires, ministère des Pêches et des Océans): Même si je suis heureux de comparaître devant le comité aujourd'hui, je suis désolé qu'on nous ait demandé de le faire parce que les membres du comité peuvent croire que le ministère des Pêches et des Océans refuse de répondre à certaines questions posées par M. Bernier concernant les droits exigés par les organismes d'intervention. J'espère que la réunion d'aujourd'hui nous permettra de dissiper ces soupçons et fournira aux membres du comité des renseignements utiles sur le fonctionnement du régime d'intervention environnementale.
Comme vous le savez peut-être, en 1993, le Parlement a mis en place un nouveau régime afin de protéger les eaux du Canada, après que l'opinion publique eût été galvanisée par le déversement de pétrole du Exxon Valdez au large des côtes de l'Alaska et, d'un incident distinct, lorsque des nappes de pétrole ont pollué la côte de la Colombie-Britannique.
Ce régime de l'entreprise privée est entièrement financé et administré par les secteurs dont les activités économiques peuvent constituer une menace au milieu marin. Les droits sont fixés et perçus dans le cadre de ce régime par l'industrie et non par le gouvernement. Nous avons remis à M. Onu, à l'intention des membres du comité, une note qui traite du régime, de son importance et de son origine.
J'aimerais maintenant demander à M. Bartram de faire ressortir très brièvement les points saillants de cette note pour mieux vous situer par rapport aux questions que vous examinez.
M. Gerry Bartram (conseiller principal, Politique sur les interventions environnementales, ministère des Pêches et des Océans): Tout le monde a-t-il entre les mains la note que nous avons remise hier?
Le coprésident (M. Grewal): Oui.
M. Bartram: Il s'agit d'un régime unique qui se veut un exemple de partenariat entre le gouvernement et l'industrie à ses tout débuts. Je propose de faire ressortir quelques points de cette note pour vous aider et pour vous situer par rapport aux questions que vous examinez.
Je parlerai tout d'abord, en me rapportant à la note, de l'importance du régime. Comme l'a dit M. Leclerc, le régime a été mis en place pour protéger les eaux canadiennes contre un risque de déversement d'hydrocarbures jusqu'à concurrence de 10 000 tonnes, ce qui correspond au niveau de préparation recommandé par David Brander-Smith au début de la présente décennie dans le cadre d'une importante enquête importante menée par un groupe sur la sécurité des navires-citernes, après le déversement catastrophique de l'Exxon Valdez dans les eaux de l'Alaska. Aux termes de ce régime, le secteur privé, c'est-à-dire ce que nous, dans un sens politique, appelons «les pollueurs potentiels», assumons la pleine responsabilité de gestion et de financement de ce niveau de préparation dans toutes les régions du Canada. Les contribuables ne participent aucunement au financement de réseau de dépôts d'équipement, un investissement d'environ 55 millions de dollars en personnel qualifié, en plans d'intervention et en exercices perpétuels afin d'assurer la protection des eaux canadiennes contre un risque de déversement catastrophique. Telle est l'importance du régime.
La nature inusitée du régime est qu'il s'appuie sur le secteur privé. Après la publication du rapport David Brander-Smith's, dans lequel les auteurs avaient recommandé des investissements majeurs dans l'état de préparation aux déversements d'hydrocarbures au Canada, le secteur privé a fait savoir au gouvernement de l'époque qu'il pouvait assumer la responsabilité à ce niveau de sécurité; cependant, il voulait organiser et gérer le régime à leur manière, selon une approche axée sur le secteur privé. Le gouvernement de l'époque a adopté une loi afin d'autoriser un tel partenariat dans le cadre duquel le secteur privé s'occupait du financement et de la gestion et le gouvernement de la surveillance technique pour vérifier si le secteur privé respectait ses promesses, c'est-à-dire assurer pleinement et en permanence la protection de ces eaux à ce niveau
Tel est le rôle fondamental. En cas de déversement, la Garde côtière canadienne fait en sorte que les organismes d'intervention interviennent et que toutes les mesures nécessaires sont prises pour intervenir. Entre les déversements — et nous espérons qu'il n'y aura pas d'autre déversement de cette importance — le secteur privé finance et gère le régime. Il est important de signaler que c'est le secteur privé qui fixe et perçoit les droits qui sont versés dans le cadre du régime. Le gouvernement ne perçoit pas ces droits.
En créant le régime, le Parlement a muni le gouvernement de leviers lui permettant de réglementer l'aspect technique, mais n'a prévu aucun pouvoir de prendre des règlements à l'égard des droits. Il a été entendu, dans le cadre de l'entente avec le secteur privé, que le régime était autogéré dans un contexte de réglementation minimale.
Vous êtes au courant des dates clés de la création du régime — je suis au point numéro 3 des notes. Entre 1989 et 1991, des déversements catastrophiques ont poussé le grand public à demander des mesures de protection de l'environnement et le gouvernement a décidé d'apporter d'importantes améliorations à l'état de préparation du Canada. Entre 1991 et 1993, les intervenants de l'industrie ont décidé de procéder à des consultations en vue de la mise en place de son réseau. Entre 1993 et 1995, une loi a été adoptée, des règlements ont été pris et les organismes d'intervention, qui sont les outils dont dispose l'industrie pour assurer la protection, ont été créés.
Enfin, en 1995, des règlements sont adoptés et les organismes d'intervention sont agréés selon le barème de droits proposé. C'est le sujet de la réunion d'aujourd'hui.
Nous sommes maintenant au point numéro 5, le processus de droits actuel. Je n'ai pas besoin d'insister sur ce processus vu que nous en discuterons aujourd'hui ici. Je peux dire sans risque que la surveillance gouvernementale se limite au processus d'avis d'opposition des clients au versement des droits et que le gouvernement peut exercer la diligence voulue.
Le MPO estime avoir respecté la lettre et l'esprit de la loi en examinant minutieusement les objections qui ont été soulevées après la première ronde de propositions relatives aux droits, et en guidant et conseillant le ministre en ce qui a trait à la décision qu'il a prise au printemps de 1998.
Je vais maintenant passer au processus de droits actuel. Les organismes d'intervention sont tenus de proposer des droits tous les trois ans. Par conséquent, ils ont proposé des droits pour la deuxième fois à l'automne.
Nous avons exercé la diligence voulue et avons conseillé le ministre en ce qui a trait à ces droits. Nous sommes prêts maintenant à recevoir l'arrêté du ministre pour approuver ou modifier quatre des cinq droits proposés par les OI. Nous attendons de prendre les mesures à cet égard étant donné que votre comité est en train d'examiner ces questions. Nous informons simplement le comité que ce deuxième arrêté est prêt.
Enfin, je veux signaler à votre attention, dans le cadre de la réforme de la Loi sur la Marine marchande du Canada, que nous clarifions le processus d'établissement des droits et proposons de conférer le pouvoir nécessaire au gouvernement pour prendre des règlements financiers à l'endroit des organismes d'intervention à l'avenir. De toute évidence, étant donné l'expérience que nous avons acquise au cours des trois dernières années, cela devient maintenant nécessaire.
Un document de travail a été publié en décembre. Pour les membres du comité que la chose intéresse, j'en ai apporté un exemplaire. Un rapport, que nous sommes tenus de soumettre tous les deux ans au Parlement, a été déposé cet automne et traite du fonctionnement du régime.
Je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de comparaître devant le comité.
M. Leclerc: Pour terminer, j'aimerais dire deux choses au sujet des questions qu'a posées le conseiller juridique du comité. Premièrement, en ce qui concerne la publication des droits fixés, le MPO estime que le processus suivi par le ministère, même s'il était différent de celui prôné par M. Bernier, était conforme aux dispositions de la Loi sur la marine marchande du Canada et permettait de fournir au grand public l'avis nécessaire concernant les droits que les organismes d'intervention étaient autorisés à exiger. Ainsi, ce processus menait aux mêmes résultats que le processus légèrement différent proposé par M. Bernier et, a atteint les objectifs de la loi.
M. Lee: Je fais un rappel au Règlement. Monsieur le président, M. Leclerc fait de son mieux pour donner préalablement des réponses aux questions qu'il s'attend que nous posions. Cependant, il attribue à M. Bernier certaines des suggestions que nous avons faites au ministère par le passé. Je n'ai pas voulu qu'on aille plus loin sans faire remarquer qu'il ne s'agit pas de l'opinion de M. Bernier à cet égard. Il s'agit uniquement de l'avis du comité et des exigences de la loi.
Personne ne personnalise les exigences de la loi ici. Il peut arriver que le comité et le ministère ne partagent pas le même point de vue, mais il est injuste de la part de M. Leclerc de mettre notre conseiller en première ligne. Le témoin a mal compris ce qui se passe.
Je demande à M. Leclerc de bien vouloir songer à remplacer les mots «M. Bernier» par «le comité». Cela permettrait de corriger le compte rendu.
M. Leclerc: Monsieur le président, je m'excuse auprès des membres du comité si j'ai donné cette impression. Je faisais allusion aux observations reçues du conseiller juridique au nom du comité. Je crois comprendre que ces observations représentent les points de vue du comité. Merci beaucoup de nous le signaler.
J'ai un autre point dont je veux parler. Selon nous, l'arrêté signé par le ministre n'est pas rétroactif.
Voilà qui met fin à mon exposé. Nous sommes prêts à répondre aux questions des membres du comité.
M. Lee: Monsieur le président, je m'excuse auprès de M. Leclerc de l'avoir devancé aussi près de la fin de son exposé.
De toute façon, je félicite le ministère d'avoir créé ce réseau d'organismes d'intervention. Je crois que cela fonctionne, que le contribuable y trouve son compte et que cela est favorable à l'environnement.
Cela dit, il s'agit d'une méga-approche. Ce comité n'examine pas toujours la situation dans son ensemble. Notre mandat exige que nous nous concentrions sur des situations ponctuelles. D'aucuns pourraient dire que nous effectuons un examen microscopique. Pourtant, nous sommes tenus de veiller à ce que la loi soit respectée.
J'ai relevé quatre éléments distincts que j'aimerais que nous examinions. Premièrement, nous vous avons demandé de nous assurer que les droits établis par les organismes d'intervention avaient été publiés. Qu'est-ce qui constitue une publication? Nous n'avons pas eu de réponse à ce sujet.
Deuxièmement, nous croyons comprendre que le ministère n'a jamais publié de liste finale des droits. Nous estimons qu'un organisme qui établit des droits pour la première fois doit publier officiellement les nouveaux droits proposés avant qu'ils soient valides.
Troisièmement, je ne vois pas dans la loi aucun pouvoir permettant à un organisme qui établit des droits pour la première fois de les imposer rétroactivement.
Quatrièmement, alors que cela contrevient à la disposition de la loi disposant que le ministre nomme une personne pour faire enquête, le ministre a nommé trois enquêteurs pour examiner la première série de droits proposés.
Je vais commencer par le premier point. Nous vous avions demandé de nous informer au sujet de la publication des droits par l'organisme d'intervention. Pouvez- vous nous dire si vous avez demandé un dossier de l'établissement des droits ou avez déterminé s'il existe un dossier à cet égard dans les organismes d'intervention?
M. Leclerc: Il serait utile, pour répondre à cette question, que je vous explique la procédure que nous avons suivie. Quand le ministre a signé l'arrêté, les organismes d'intervention ont été informés peu de temps après que les droits proposés avaient été approuvés. Ils nous ont dit, verbalement, qu'ils fixeraient les droits en conséquence.
Comme la loi n'exige pas que l'arrêté soit publié, vu que le ministère avait décidé de publier l'arrêté et les droits proposés, que les organismes d'intervention nous avaient dit qu'ils fixeraient les droits en conséquence et que la procédure prescrite par la Loi sur la marine marchande du Canada avait été respectée, nous avons jugé que la publication de l'arrêté et des droits correspondait en fait à la publication d'une copie du barème des droits, conformément aux exigences de la Loi sur la marine marchande du Canada.
M. Lee: Vous n'avez peut-être pas bien saisi ma question. Plusieurs organismes d'intervention ont fixé des droits. Comme c'est moi qui paie ces droits, je pourrais fort bien demander à l'organisme d'intervention: «Pouvez-vous s'il vous plaît me montrer le document qui vous autorise à fixer ces droits»? Nous vous avons demandé de nous fournir une copie de ce document. Est-ce qu'il existe? D'après votre réponse, il n'existe pas.
M. Leclerc: Je suis en train de vous dire que nous n'avons pas de document, que le texte formel que le comité recherche n'est pas le genre de document auquel on s'attend de manière générale.
J'insiste là-dessus. Je vais demander à mes collègues d'intervenir, parce qu'il est important de mettre l'accent sur la nature des arrangements que les organismes d'intervention vont conclure avec leurs clients.
M. Lee: Je sais qu'il y a eu un processus de consultation, que tous les organismes d'intervention étaient au courant de la situation le 2 ou 3 avril 1998, quand le ministre a signé l'arrêt portant approbation des droits. Je ne dis pas que les gens ont été pris par surprise. Toutefois, si je dois payer des droits, j'aimerais voir le document en vertu duquel ils ont été établis, parce que la loi exige que l'organisme d'intervention fixe les droits.
Ce document n'existe peut-être pas. Le moins qu'on puisse dire, c'est que cette façon de gérer laisse à désirer, mais passons.
S'il n'y a pas de document — et j'estime qu'il devrait y en avoir un — alors nous devrions peut-être poser la question à un organisme d'intervention.
Le coprésident (M. Grewal): Monsieur Leclerc, si j'ai bien compris, il n'existe aucun document qui sert à établir les droits?
M. Leclerc: Nous n'avons pas de document.
Le coprésident (M. Grewal): Mais en a-t-on préparé un?
M. Leclerc: J'imagine.
Le coprésident (M. Grewal): Pouvez-vous nous en fournir une copie?
M. Bruce Bergen (avocat-conseil principal, Direction des services législatifs, Pêches et Océans): Quand le ministère a préparé l'arrêté ministériel et discuté avec les organismes d'intervention des droits qui seraient établis, il savait, en avril 1998, que la loi n'obligeait pas l'organisme d'intervention à s'appuyer sur un document précis pour fixer les droits. Le ministère aurait peut-être dû demander qu'on lui fournisse un tel document, mais il ne l'a pas fait à ce moment-là.
Nous avons reçu de chacun des organismes d'intervention une lettre indiquant qu'ils avaient fixé les droits en avril 1998, après avoir été informés que le ministre avait approuvé les droits proposés. Nous avons ces lettres.
Comme l'a mentionné M. Lee, les droits ont été incorporés dans les arrangements ou contrats conclus entre les organismes d'intervention et leurs clients. C'était à eux de choisir la formule qui leur convenait. Cette façon de procéder manquait peut-être de rigueur, mais le ministère jugeait qu'il n'avait pas à poser de questions à ce sujet. Avec du recul, il aurait peut-être été préférable de le faire.
M. Lee: C'est nous qui allons maintenant être obligés de poser ces questions. Les organismes d'intervention peuvent très bien se réunir, ce qu'ils ont fait à l'occasion, et s'entendre, collectivement, sur les droits qui seront fixés. S'ils ne l'ont pas encore fait, c'est qu'il y a un problème en quelque part.
Je sais que nous sommes en train de parler d'un petit groupe d'organismes, que cela ne touche pas des milliers de personnes et d'entreprises. Nous sommes en train de parler d'un groupe de personnes qui s'occupent de transport et de marine marchande.
M. Bergen: Il est important de noter que les droits ont été approuvés par le ministre et qu'ils seront fixés par chacun des organismes d'intervention. En fait, les organismes d'intervention fixent eux-mêmes les droits avec leurs clients. Le ministère ne sait pas s'ils le font par voie de résolution, ou s'ils envoient tout simplement une lettre à leurs clients dans laquelle ils disent, «Voici les frais qui ont été approuvés par le ministre et que nous avons fixés en conséquence.»
M. Lee: Nous ne pouvons pas accepter qu'un organisme d'intervention puisse faire cela dans une cabine téléphonique ou sur le siège avant d'une camionnette, le soir, parce que quelqu'un a dit «Vous devez établir un barème des droits.» Ce n'est pas comme cela qu'on fixe ces droits. Voilà pour le premier point.
Le coprésident (M. Grewal): Je comprends ce que vous dites, mais on a laissé entendre qu'il y a ou qu'il y aurait peut-être un document. Or, nous devons savoir si ce document existe effectivement. Le cas échéant, nous aimerions qu'il soit envoyé au comité.
M. Lee: Le deuxième point que je veux aborder est le suivant: le ministre n'a jamais fait publier le barème définitif des droits dans la Gazette du Canada, comme il est tenu de le faire. Il s'agit là d'une exigence législative. Pouvez-vous confirmer que le ministre n'a jamais fait publier le barème définitif des droits qu'il avait approuvés?
M. Leclerc: Pouvez-vous répéter la question?
M. Lee: La Loi exige que le ministre publie le barème des droits qu'il a approuvés dans le cadre du processus. Est-il vrai qu'il n'a jamais fait publier le barème définitif des droits qu'il a approuvés?
M. Leclerc: Je pense que le ministre est tenu de publier les droits fixés par les organismes d'intervention en vertu de la Loi sur la marine marchande du Canada.
M. Bartram: La réponse à la question est «oui». Le barème définitif des droits a été publié le 18 avril parce que c'était le barème qui accompagnait l'arrêté ministériel qui avait été publié.
M. Lee: J'aimerais que le conseiller juridique m'aide à comprendre.
Le coprésident (M. Grewal): Il y a malentendu sur ce point.
M. François-R. Bernier (conseiller juridique principal du comité): La loi exige que les organismes d'intervention proposent des droits. Ces droits sont examinés par le ministre, et c'est lui qui les approuve. Il approuve en fait un projet de barème. L'arrêté portant approbation du projet a été publié. La loi n'exige pas qu'il le soit. Les organismes d'intervention doivent fixer les droits, et le ministre doit ensuite, en vertu de la loi, les faire publier. Ils ne l'ont jamais été.
M. Lee: Monsieur le président, c'est ce que je cherchais à savoir. Les droits approuvés n'ont jamais été publiés. Les témoins ont dit que le barème des droits avait été publié. Si tel est le cas, peuvent-ils nous en fournir les détails?
M. Leclerc: Nous convenons avec le comité que le processus comporte trois étapes. D'abord, le ministre approuve les droits proposés; les organismes d'intervention fixent ensuite les droits en conséquence; enfin le ministre fait publier une copie de ces droits dans la Gazette du Canada. Tout se fait selon un ordre chronologique.
Le ministre a signé l'arrêté le 2 avril 1998. Le ministère a ensuite informé les organismes d'intervention que le ministre avait approuvé les droits proposés. Ces derniers nous ont indiqué qu'ils fixeraient les droits en conséquence. Ainsi, quand nous avons publié l'arrêt accompagné des droits, nous avons en fait publié les droits établis par les organismes d'intervention. À notre avis, les exigences de la Loi sur la marine marchande du Canada ont été respectées.
Il est vrai que la Loi n'exige pas que l'arrêté ministériel soit publié. Nous l'avons publié aux fins de transparence, pour informer le public de l'arrêté ministériel et des droits qui seraient imposés par les organismes d'intervention. C'est pour cela, selon nous, que les droits sont publiés.
M. Lee: Ce n'est pas la publication de l'arrêté ministériel qui pose problème. Nous n'avons rien à redire à cela. Nous voulons tout simplement nous assurer que le ministère a bel et bien publié le barème des droits, comme l'exige la Loi. À notre avis, ce barème n'a pas été publié, et c'est ce qui pose problème. Nous n'avons rien contre le fait que le ministre publie son arrêté. Il peut publier son agenda dans la Gazette du Canada s'il le veut. Ce qui importe pour nous, c'est que la loi soit respectée.
M. Wappel: Le ministère est convaincu qu'il l'a respectée. Nous ne sommes pas du même avis, mais c'est ce qu'il pense.
Pouvez-vous me dire qui est Sharon Ashley?
M. Leclerc: Sharon Ashley est l'ancienne directrice des affaires législatives et réglementaires du ministère des Pêches et Océans.
M. Wappel: Où se trouve-t-elle maintenant?
M. Leclerc: Elle est la directrice générale intérimaire des Affaires autochtones.
M. Wappel: Elle ne répondait pas très promptement à nos lettres. Je note monsieur Leclerc que, lorsque vous avez envoyé votre lettre, en septembre 1998, vous occupiez le poste de directeur intérimaire. Vous l'occupez toujours?
M. Leclerc: Oui.
M. Wappel: Nous avons ensuite adressée notre lettre du 28 septembre à Mme Ashley, parce que vous n'aviez pas mentionné dans la vôtre que vous l'aviez remplacée à ce poste. Je suppose que nous sommes censés tirer cette conclusion quand nous voyons la mention «directeur intérimaire? sous votre nom, n'est-ce pas»?
M. Leclerc: C'est exact.
M. Wappel: Vous auriez pu avoir la courtoisie d'informer le conseiller juridique que Mme Ashley n'occupait plus ce poste et que vous l'aviez remplacée.
Quoi qu'il en soit, nous vous avons adressé une lettre le 28 septembre, et une autre le 28 janvier, parce que nous n'avions pas reçu de réponse. Pourquoi? N'avez- vous pas reçu la lettre?
M. Leclerc: Si j'ai mis du temps à répondre, c'est en partie à cause de la complexité des questions soulevées.
M. Wappel: Parlons-en de la complexité des questions, si c'est cela votre excuse. Prenons par exemple le paragraphe 660.4(2) de la Loi. La première étape consiste à proposer des droits. Ce n'est pas tellement compliqué, n'est-ce pas? Vous proposez des droits.
M. Bergen: L'organisme d'intervention qui présente une demande d'agrément doit déposer le barème des droits qu'il se propose d'exiger.
M. Wappel: Ensuite, le ministre fait publier le projet de barème de droits. Ce n'est pas compliqué, n'est-ce pas?
M. Bergen: Cela a été fait en 1995.
M. Wappel: Il n'est pas difficile de publier un projet de barème de droits, n'est-ce pas?
M. Bergen: Non.
M. Wappel: Ensuite, les gens qui ne sont pas d'accord avec les droits proposés déposent un avis d'opposition. C'est bien cela?
M. Bergen: C'est exact. En fait, nous avons reçu, en 1995, 31 avis d'opposition. Certains ont ensuite été retirés.
M. Wappel: Le paragraphe (5) précise que:
Le ministre, saisi d'un avis d'opposition, nomme [...] une personne pour faire enquête sur les motifs de l'opposition. Est-ce que cette démarche est compliquée?
M. Bartram: Il y a une nuance. Si vous lisez l'article jusqu'à la fin, vous allez constater, dans la version anglaise, que «shall» devient «may».
M. Wappel: Oui, c'est vraiment brillant comme formule, mais passons. Êtes-vous bien certain que le mot «personne» est singulier?
M. Bartram: Oui.
M. Bergen: Le texte dit bien «une personne».
M. Wappel: Alors, en vertu de quelle autorisation légale le ministre a-t-il nommé trois personnes pour faire enquête sur les droits proposés?
M. Bergen: Même si la Loi précise clairement qu'«une personne» sera chargée de l'enquête, il est possible, parfois, d'interpréter le singulier comme englobant le pluriel, ou l'inverse.
M. Wappel: Mais en vertu de quelle autorisation? Est-ce qu'on trouve cela dans la Loi d'interprétation?
M. Bergen: Oui.
M. Wappel: Dans quel article?
M. Bergen: Je ne l'ai pas devant moi.
M. Leclerc: Cela se trouve dans la Loi d'interprétation, mais le fait qu'un groupe de trois personnes ait été nommé ne signifie pas que toutes ont le statut de commissaire en vertu de la Loi sur les enquêtes. En fait, d'après ce que nous croyons comprendre, M. Gold agissait en qualité de commissaire tandis que les deux autres membres étaient là pour le seconder dans ses fonctions.
M. Wappel: Avait-on pris la peine de le préciser?
M. Bartram: Nous n'étions pas là à ce moment-là, mais j'ai jeté un coup d'oeil à la correspondance et je dois dire en toute honnêteté que ce n'était pas clair.
M. Wappel: Pourtant, la règle est assez simple.
M. Bartram: M. Gold agissait comme président, et les deux autres personnes étaient là à titre de membres de la commission.
M. Bergen: Je pense que c'était à cause de leur expertise.
M. Wappel: Si le ministère soutient que, dans le cas du mot «personne», le singulier englobe le pluriel, j'aimerais que vous fournissiez au comité l'autorisation légale qui sert de fondement à cet argument. Autrement, j'aimerais que vous acceptiez le fait que le mot personne est singulier. Il n'est pas nécessaire de s'éterniser là-dessus aujourd'hui, mais j'aimerais que vous nous fournissiez l'autorisation légale qui appuie l'argument selon lequel le mot «personne» dans les paragraphes (5) et (6) veut dire une ou plusieurs personnes.
M. Bergen: Je pense que nous devrions examiner la question plus à fond, et fournir au comité des précisions sur les faits qui se sont déroulés en 1995 et auxquels nous n'étions pas témoins. M. Bartram a soulevé un point important concernant le groupe de trois personnes qui a été nommé.
M. Wappel: Merci. Nous allons attendre votre réponse.
Le paragraphe (7) précise que la personne qui est chargée de faire l'enquête fait parvenir son rapport au ministre.
Le paragraphe (8) précise que le ministre peut, par arrêté, approuver ou modifier les droits proposés. Dans ce cas-ci, il les a modifiés. Le paragraphe ajoute ensuite que l'organisme d'intervention fixe les droits en conséquence.
Dans sa lettre du 2 mars, M. Leclerc précise que les organismes d'intervention désignés ont fixé leurs droits aux dates indiquées. Comment l'ont-ils fait?
M. Leclerc: Nous ne leur avons pas demandé quel document ils ont utilisé pour établir ces droits. Nous croyons comprendre que l'organisme d'intervention choisit la formule qui lui convient.
M. Wappel: Donc, le ministère estime qu'il n'a pas déterminer que les droits ont été établis légalement?
M. Leclerc: Le fait qu'ils nous aient dit, verbalement, que les droits ont été fixés conformément à l'arrêté ministériel constitue, pour nous, une preuve adéquate.
M. Wappel: Est-ce une façon prudente d'agir?
M. Leclerc: Il y a un autre point qui mérite d'être souligné: le barème des droits approuvés par le ministre a été publié dans la Gazette le 18 avril.
M. Wappel: Nous allons en reparler. Croyez-vous qu'il est prudent de se fier à la parole des organismes d'intervention?
M. Leclerc: Vu la nature du système, il est toujours préférable d'avoir un texte, mais le fait que les organismes d'intervention aient dit qu'ils avaient fixé les droits conformément à l'arrêté ministériel constituait une preuve satisfaisante, dans les circonstances.
M. Bartram: Tout d'abord, je vous répondrai par l'affirmative parce que le régime est axé sur le marché et que les organismes d'intervention n'avaient pas le choix. Ils étaient obligés d'exiger les droits approuvés par le ministre.
De plus, le ministre, lorsqu'il a publié la liste définitive des droits établis le 18 avril, a bien précisé à l'intention de tous ceux qui payent des droits que seuls ces droits seraient exigés.
Ensuite, les droits sont exigés dans des marchés conclus entre parties du secteur privé. La loi n'habilite pas le ministre à examiner les modalités de pareils contrats. Ce sont des contrats de gré à gré entre parties.
Enfin, étant donné la nature publique des droits fixés, puisqu'ils sont publiés dans la Gazette du Canada, si un organisme d'intervention avait la témérité d'exiger de ses clients des droits autres que ceux qu'a approuvés le ministre, le client pourrait invoquer le décret publié, porter plainte au ministre et refuser de payer les droits. C'est aussi simple que cela. C'est un régime du secteur privé.
M. Bergen: Voici ce que j'ajouterais à ce qu'a dit M. Bartram: comme ces droits sont intégrés à des arrangements contractuels pris entre les organismes d'intervention et leurs clients et comme les clients sauraient sans équivoque — surtout du fait qu'il y a eu publication le 18 avril — que les OI ne peuvent établir des droits que s'ils sont approuvés par le ministre, ces clients pourraient, entre autres, réclamer des dommages-intérêts en vertu du contrat. En d'autres mots, les clients pourraient poursuivre les OI en invoquant le non-respect du contrat.
M. Wappel: D'après la deuxième partie du paragraphe (8), le ministre fait publier les droits dans la Gazette du Canada. Nous comprenons votre position, soit qu'en publiant tous les décrets d'approbation des droits et en affirmant que les OI ne peuvent faire autrement que d'accepter ces droits, vous vous êtes conformés à l'esprit et, si j'ai bien compris, à la lettre de la loi. C'est peut-être vrai pour ce qui est de l'«esprit» de la loi, mais quant à la «lettre» loi, je ne le crois pas. Toutefois, là n'est pas la question.
D'après vos notes, les droits proposés ont été établis par les OI le 2 et 3 avril 1998. Le décret fixant ses droits — et pour fins de discussion, nous accepterons votre interprétation généreuse de la loi — a été publié le 18 avril 1998. Comment ces organismes peuvent-ils exiger ces frais depuis 1995?
M. Bergen: En 1995, quand les organismes d'intervention ont demandé un certificat de désignation, qu'ils ont été désignés organismes d'intervention et qu'ils ont commencé à prendre des arrangements avec leurs clients, il fallait que ces arrangements contractuels prévoient le paiement ou le service offert par l'organisme d'intervention, c'est-à-dire un service de préparation en cas de déversement de pétrole. Quand les contrats ont été signés, bien que le ministère des Pêches et des Océans n'ait pas eu le pouvoir législatif d'exiger des exemplaires des contrats ni d'imposer la manière dont est réglée la question du paiement des services dans les contrats, les organismes d'intervention et leurs clients auraient pu inclure une disposition en vue de régler cette question.
En théorie, un contrat peut prévoir que les droits proposés par les organismes d'intervention seront payés jusqu'à ce qu'ils aient été approuvés par le ministre. C'est pourquoi les organismes d'intervention peuvent établir leurs droits en conformité avec le paragraphe (8) de cet article.
M. Wappel: Votre position s'appuie-t-elle sur une disposition de l'article dont nous discutons ou ailleurs dans la loi? Y a-t-il quoi que ce soit dans la loi qui confère aux organismes le pouvoir d'exiger des droits? Supposons que, de 1995 à 1998, elles ont exigé des droits supérieurs à ce que le ministre a établis. Auraient-elles pu le faire?
M. Bergen: En théorie, elles pourraient le faire.
M. Wappel: Elles auraient pu également ne pas exiger de droits?
M. Bergen: La loi est muette quant à la forme des arrangements et du contrat pris entre les organismes d'intervention et leurs clients, ainsi qu'à la manière dont les deux pourraient régler la question des droits. L'exemple que vous nous avez donné est tout à fait plausible.
De même, les organismes d'intervention et leurs clients auraient pu s'entendre pour qu'aucun droit ne soit payé à compter de la date de signature du contrat jusqu'à ce que le ministre ait approuvé le droit, que l'OI ait établi le droit. À partir de là, le droit aurait pu être payé par les clients. Au-delà de cette question dont nous discutons, c'est-à-dire de l'approbation par le ministre des droits, le ministère n'est pas habilité à s'immiscer dans les contrats passés entre les organismes d'intervention et leurs clients. Cela en réalité nous ramène au point qu'a fait valoir M. Bartram, soit qu'il s'agit d'un régime axé sur l'entreprise privée. Il était clair que l'entreprise privée ne souhaitait pas ce genre d'immixtion dans ses contrats ou arrangements.
M. Wappel: Qu'en est-il du paragraphe (11)?
M. Bergen: Avez-vous une question précise?
M. Wappel: Il dit qu'après que le ministre a approuvé un nouveau droit ou un droit modifié, ce droit est applicable. À partir de quel moment le droit est-il applicable? Ce n'est pas à la date à laquelle les parties contractantes décident qu'il s'appliquera, mais bien à partir de la date de publication dans la Gazette du Canada. Cela n'indique-t-il pas que c'est la loi, plutôt que les parties contractantes, qui décide quand le droit entre en vigueur?
M. Bergen: C'est une question épineuse.
M. Wappel: Elle me semble plutôt claire.
M. Bergen: Dans le paragraphe (11), il est question d'un nouveau droit ou d'un droit modifié. Selon nous, il n'est pas clair qu'on entend par là les droits qui sont proposés par un organisme d'intervention au moment où il demande un certificat de désignation, tel que l'exige le paragraphe (2).
L'organisme d'intervention dépose alors une liste des droits qu'il projette d'exiger. Le processus décrit aux paragraphes (3) à (8) s'applique.
Fait intéressant, le paragraphe (9) exige que, lorsqu'un organisme d'intervention projette d'exiger un nouveau droit ou de le modifier — ce sont les expressions utilisées au paragraphe (11) —, la partie du processus allant de la publication jusqu'à l'approbation par le ministre s'applique, moyennant certaines modifications au nouveau droit ou au droit modifié proposé, selon les circonstances.
On peut voir les choses de deux façons. Selon moi, un droit proposé est un nouveau droit et, par conséquent, la disposition relative à l'effet rétroactif s'applique. Toutefois, si l'on fait une interprétation très rigoureuse de la loi, certains diront que ce n'est pas ce qu'avaient en tête les législateurs.
On peut aussi dire que droit proposé est un droit unique puisqu'il n'est publié qu'une seule fois, soit quand l'organisme d'intervention demande un certificat de désignation. Par conséquent, si la disposition relative à l'effet rétroactif ne s'applique pas au droit proposé, quelle est la solution?
M. Wappel: Je suppose que la solution serait de reconnaître le problème et de modifier la loi, plutôt que d'essayer de faire comme si le problème n'existait pas.
M. Bartram: Vous serez heureux d'apprendre qu'en fait, nous sommes en train de modifier la loi en vue de simplifier le processus et de mettre de l'ordre dans tout cela.
M. Bergen: En fin de compte, le ministère des Pêches et des Océans s'est fié à l'opinion reçue du ministère de la Justice et a conclu que tout ce qui distingue un droit proposé d'un droit nouveau ou modifié est que les deux parties sont au courant du droit proposé par l'organisme d'intervention au moment où il demande un certificat de désignation, après quoi il peut signer des contrats avec ses clients. Elles savent que le droit proposé pourrait en fait être modifié, c'est-à-dire abaissé ou augmenté, par le ministre, conformément au paragraphe (8). C'est pourquoi elles peuvent rédiger un contrat qui tient compte de cette éventualité, qui reconnaît que le paragraphe (11) ne s'applique peut-être pas au droit proposé.
Monsieur Wappel, je conviens avec vous que ce n'est pas très clair. Au ministère, nous en avons chaudement débattu. Nous avons décidé que les mesures que nous avions prises étaient peut-être la meilleure voie à suivre. Comme l'a dit M. Bartram, une réforme est effectivement en cours.
M. Bartram: Voilà qui a rapport également avec la question d'orientation, qui porte sur l'esprit de la loi. C'est l'une des choses auxquelles nous sommes confrontées quand nous essayons d'interpréter ce processus et la loi intelligemment, étant donné la situation actuelle.
Ici, la loi vise de toute évidence à ce qu'un régime relevant de l'entreprise privée offre un niveau élevé de préparation et qu'il se finance au moyen des droits versés par les pollueurs éventuels. Elle vise aussi de toute évidence à ce que des organismes d'intervention soient en place et qu'ils soient financés d'une façon quelconque. Ils se financent par le prélèvement de droits. L'arrêté du ministre ne dit rien au sujet de l'effet rétroactif, de sorte qu'il n'est pas rétroactif, mais les arrangements qu'ont pris les OI avec leurs clients sont des arrangements contractuels, de sorte qu'ils peuvent s'entendre pour exiger des droits ou les modifier. Cela n'a rien à voir avec le devoir de diligence raisonnable du ministre et il n'a pas le pouvoir d'examiner ces arrangements.
M. Bernier: J'aimerais attirer l'attention des membres du comité sur l'extrait de la loi qui figure en annexe et à la définition des «organismes d'intervention» donnée à l'article 654, là où il est question de tout particulier ou organisme du Canada à propos duquel un certificat de désignation a été émis par le commissaire, c'est-à-dire le commissaire de la Garde côtière canadienne «aux termes du paragraphe 660.4(1)». Si nous nous reportons à ce paragraphe, il nous dit que le ministre peut émettre un certificat de désignation pour une région.
De toute évidence, nous avons un problème ici. La loi dit, d'une part, que le commissaire de la Garde côtière du Canada est responsable d'émettre les certificats et, d'autre part, que c'est le ministre qui le fait. Le ministère est-il conscient du problème? Le ministère s'est-il formé une opinion quant aux conséquences juridiques éventuelles que cela pourrait avoir sur la validité des désignations qui ont été effectuées dans ces cinq cas?
M. Bergen: Oui, je crois que le ministère est conscient de la différence entre la définition d'organisme d'intervention et la disposition du paragraphe 660.4(1). C'est une correction qui sera apportée dans le cadre de la réforme de la loi. L'essentiel à retenir, c'est que les organismes d'intervention ont été en fait désignés par le commissaire. Nous pourrions dire que le commissaire agit en réalité comme délégué du ministre et que les mesures prises pour le ministre au paragraphe 660.4(1) pourraient aussi être prises par le commissaire. En réalité, sous ce régime qui impose pas mal de travail sur le plan de l'application de la loi, ces mesures sont en grande partie prises par le commissaire ou par ses représentants et, par conséquent, au nom du ministre des Pêches et des Océans.
M. Bernier: M. Bergen vient tout juste de mentionner le fait que la loi engage beaucoup de travail d'application. Il l'affirme alors qu'il vient de nous dire qu'il s'agit d'un arrangement purement privé entre des particuliers et que le ministère ne peut donc s'en mêler. Voilà, tout à coup, que le ministère a un rôle très poussé.
M. Bergen: Je parlais d'activités comme la publication des droits dans la Gazette du Canada et de tout le reste. Au paragraphe (3), on peut voir que le ministre fera publier la liste des droits. Ce n'est de toute évidence pas quelque chose que le ministre ferait lui-même.
M. Bernier: On a fait observer tout à l'heure que la lettre et l'esprit de la loi avaient été respectés dans l'établissement du processus de droits, des droits proposés, des premiers droits. Il a fallu au ministre trois ans presque pour approuver les droits après leur publication. Est-ce là l'esprit et la lettre de la loi? Est-ce le genre de retard qu'envisageaient les législateurs pour l'établissement des droits?
M. Bergen: Je ne crois pas que quiconque ait prévu ce genre de retard entre la publication initiale des droits par les organismes d'intervention et leur éventuelle approbation par le ministre ou entre l'établissement des organismes d'intervention et la publication. Ceux qui ont participé à la rédaction de la loi, les membres de l'industrie qui ont contribué à l'élaboration de ce régime, n'avaient pas prévu de pareils retards.
Simplement, des questions étaient sans réponse et il fallait les régler, il fallait nommer un panel ou un enquêteur et cette nomination a pris beaucoup de temps. Le panel a aussi pris beaucoup de temps pour rédiger son rapport. Il y avait plusieurs avis d'opposition à examiner. Après avoir reçu le rapport du panel, le ministère des Pêches et des Océans estimait que, pour que le ministre puisse prendre une décision éclairée au sujet de l'approbation des droits révisés, il fallait creuser davantage la question. Je crois que tout le processus a pris beaucoup plus de temps que prévu. Je ne crois pas que le ministère ait délibérément cherché à contourner l'esprit de la loi. Le processus a tout simplement pris plus de temps que prévu.
M. Bartram: Monsieur le président, si vous le souhaitez, je peux donner d'autres précisions.
Le coprésident (M. Grewal): Faites très vite. La séance prend fin à 9 h 45.
M. Bartram: Je serai le plus bref possible. Le ministère a tout fait pour se conformer au processus décrit dans la loi, pour nommer l'enquêteur et pour informer le panel. L'enquêteur a remis son rapport un an environ après que les droits ont été proposés pour la première fois. Cependant, il n'était pas facile au ministre de mettre en oeuvre les recommandations de ce rapport. Il a dû demander qu'on le conseille à l'égard de ce qui constitue des droits justes et équitables. Le panel d'enquête a produit un rapport selon lequel tous nos régimes devraient être modifiés, mais il n'a pas fourni au ministre les données requises pour approuver ou modifier les droits comme il était tenu de le faire aux termes de la loi. Par conséquent, le ministre a continué de faire preuve de diligence raisonnable sur le plan financier en vue d'établir les droits. C'est la raison qui explique le retard.
M. Bernier: J'aimerais maintenant revenir à la déclaration faite par M. Leclerc selon lequel on aurait peut-être donné l'impression — ce sont ses propres paroles — que le ministère ne répondait pas au comité. Si les membres du comité se reportent à ma lettre du 23 avril 1998, qui se trouve à l'annexe B, ils constateront que les points abordés sont numérotés. Ainsi, on trouve à la page un un point numéro 1. Il y est question du ministre qui n'aurait pas fait la publication requise. Si vous passez maintenant à la page 2, au quatrième paragraphe complet, vous verrez le point numéro 2. Ce paragraphe amorce un débat de la question de l'application rétroactive des droits par les organismes d'intervention.
M. Leclerc m'a répondu le 14 septembre 1998. Cette réponse concerne exclusivement le point 1, soit la question de la publication. Je lui ai écrit quelque deux semaines plus tard pour souligner que sa lettre ne mentionnait pas du tout la date d'entrée en vigueur des droits établis en conformité avec la disposition pertinente de la loi, question qui était abordée au point 2 de ma lettre. Je poursuis en discutant de la réponse donnée au sujet de la question de la publication.
M. Leclerc m'a répondu le 8 février 1999, discutant à nouveau exclusivement de la question de publication sans s'arrêter au point 2 de ma lettre initiale, bien que je lui aie clairement souligné que rien n'avait été dit à ce sujet.
Cela m'a incité à lui écrire ce que voici, le 12 février:
Comme je l'indiquais clairement dans ma lettre subséquente du 28 avril 1998, vous ne dites rien dans votre réponse à ma lettre du 23 avril au sujet de la seconde question. J'ai maintenant reçu votre lettre du 8 février 1999 dans laquelle vous continuez de parler de la question de publication, mais demeurez à nouveau complètement muet au sujet de l'entrée en vigueur de ces arrêtés. Comme je vous ai demandé une réponse à ce sujet de manière claire et explicite, je suis obligé d'en conclure que vous refusez délibérément de le faire. Dans sa lettre datée du 2 mars, M. Leclerc indiquait que les organismes d'intervention avaient pris les arrêtés à telle et telle date, c'est-à-dire le 3 avril, et le 2 avril dans un cas. Il ne parlait pas de l'application rétroactive des arrêtés par les organismes d'intervention, ce qui était le deuxième problème que j'avais soulevé dans ma lettre. Le 18 mars, j'ai alors transmis l'invitation à comparaître du comité.
Les témoins peuvent-ils comprendre pourquoi le comité a eu l'impression qu'on refusait de lui répondre? Cette impression ne semblerait-elle pas bien réelle? Encore aujourd'hui, le ministère ne nous répond pas. J'oserais dire que ce n'est pas seulement une impression, mais la réalité. Va-t-on répondre clairement au comité?
M. Leclerc: Nous allons vous répondre très prochainement. Je m'excuse de ne pas l'avoir encore fait, mais la question est complexe. Comme M. Bergen l'a signalé, nous devions examiner en détail toutes les répercussions dans cette affaire. Il est difficile pour nous de répondre à cette question. Nous voulions nous assurer de ne pas induire le comité en erreur et de lui fournir une réponse qui ne compromettrait pas la structure d'autorité de cet important régime.
Si les membres du comité ont l'impression que le ministère a tardé à leur répondre parce qu'il ne respecte pas leur travail, je tiens à les rassurer tout de suite. Nous prenons très au sérieux le travail et les observations du comité, mais il faut parfois plus de temps pour répondre de façon satisfaisante. C'est mon explication à votre question.
Le coprésident (M. Grewal): Quand devriez-vous nous fournir ces informations?
M. Leclerc: Je vais essayer de vous les envoyer d'ici une semaine.
M. DeVillers: Monsieur Leclerc, vous avez dit ne pas avoir voulu nous manquer de respect. Dans les circonstances, n'aurait-il pas été plus simple d'indiquer au comité les difficultés que vous aviez à lui répondre plutôt que de passer complètement outre à ses questions, ce que le comité n'a pu interpréter autrement?
M. Leclerc: Vous avez raison. Il aurait peut-être fallu donner des explications. Pour ce qui est du changement de direction de nos services, que M. Wappel a évoqué, je ne l'ai pas signalé de façon officielle au comité parce que j'avais déjà écrit au comité à propos de différents dossiers en tant que directeur intérimaire et j'avais le sentiment que les membres du comité auraient remarqué le changement.
Quand j'ai constaté, après avoir échangé des lettres avec le comité pendant quelques mois, qu'on continuait d'adresser la correspondance à Mme Ashley, l'ancienne directrice, j'ai décidé d'écrire au comité expressément pour lui annoncer que j'avais été nommé directeur intérimaire.
M. DeVillers: Quand une question est délicate, il suffirait de nous signaler que vous êtes en train de l'étudier. Je suis certain que le comité comprendrait. Quand on ne nous dit rien, c'est plus difficile.
M. Leclerc: Nous nous excusons. Nous allons essayer à l'avenir de mieux vous informer de ce que nous faisons au sujet de dossiers précis.
M. Wappel: C'est exactement ce que je voulais faire valoir.
M. Bernier: J'ai une autre question à poser, monsieur le président. Les témoins admettent que tous les organismes d'intervention sont des personnes morales, n'est-ce pas?
M. Bergen: Oui.
M. Bernier: En tant que personnes morales, ils fonctionnent par voie de résolution, n'est-ce pas?
M. Bartram: Pas nécessairement.
M. Bernier: Je pensais que, légalement, — et M. Bergen voudra peut-être me répondre — les décisions des personnes morales étaient prises par voie de résolution. Les organismes ont des conseils d'administration.
M. Bergen: Oui, je suis sûr que les organismes d'intervention doivent fonctionner selon ce que prévoit la loi mais, en fait, je ne sais pas vraiment si une résolution est nécessaire pour établir des droits.
M. Bernier: La loi stipule qu'un organisme peut établir et prescrire des droits. Selon moi, il doit exercer ce pouvoir par voie de résolution, et je m'attendrais à ce qu'il agisse de cette façon.
Dans ma lettre du 18 mars, j'ai demandé qu'on m'envoie copie des résolutions adoptées par chaque organisme d'intervention. Le ministère va-t-il chercher à obtenir les résolutions? Apparemment, il ne s'est pas encore occupé de la question. Il a présumé que la loi était respectée, ce qui est vraiment merveilleux. Va-t-il maintenant se donner la peine de communiquer avec les organismes d'intervention pour savoir s'ils ont établi les droits après avoir obtenu l'approbation du ministre?
M. Bergen: Nous l'avons fait, monsieur Bernier. Chacun des organismes d'intervention nous a confirmé qu'il avait établi ses droits immédiatement après avoir su qu'ils étaient approuvés par le ministre.
M. Bernier: Les organismes peuvent alors vous envoyer copie de la résolution pertinente?
M. Bergen: Ils n'ont pas indiqué dans leur lettre avoir adopté des résolutions.
M. Bernier: Allez-vous leur demander de vous envoyer leurs résolutions?
M. Bergen: Nous pouvons le faire.
M. Bernier: D'après la lettre du 2 mars de M. Leclerc, Point Tupper Marine Services a établi ses droits le 2 avril 1998. Or, dans sa lettre du 18 septembre précédent, M. Leclerc indique que l'approbation du ministre a été transmise à chacun des organismes d'intervention seulement le 3 avril. Comment Point Tupper Marine Services pouvait-il fixer des droits avant que l'approbation du ministre ne lui soit transmise?
M. Bartram: Si la lettre indique que Point Tupper Marine Services a établi ses droits le 2 avril, il y a peut-être eu un problème de communication.
M. Bernier: c'est la date d'entrée en vigueur des droits, du moins pour Point Tupper Marine Services.
M. Bartram: Pour revenir à votre question précédente, je ne peux pas vous assurer de pouvoir produire les résolutions de chacun des organismes d'intervention. Certains en ont, mais peut-être pas tous. Je ne pense pas avoir le pouvoir de le leur demander.
M. Wappel: Vous ne pensez pas pouvoir le faire? Vous pouvez assurément le leur demander.
M. Bartram: Oui, mais je n'ai pas le pouvoir de l'exiger.
M. Lee: Nous avons ce pouvoir.
M. Bernier: J'ai autre chose à signaler aux membres du comité. Si le ministère s'était conformé à la loi, c'est-à-dire si le ministre avait publié les droits établis par les organismes d'intervention comme il est tenu de le faire, aucune de ces questions ne seraient nécessaires. Le ministère n'aurait pas à présumer de la conformité des droits et de l'approbation du ministre. Il pourrait vérifier qu'on a observé la loi parce que les droits auraient été publiés. Nous n'aurions pas à demander copie des résolutions ni les dates d'entrée en vigueur, ou la preuve de l'existence officielle des droits parce qu'ils auraient été publiés conformément à la loi.
On a dit que j'avais proposé un mode de publication différent. À mon avis, c'est contestable parce que le processus — que je propose selon vous — est celui qui est exigé par le Parlement. C'est aussi simple que cela. C'est le processus qui est exigé, non pas par moi, mais par le Parlement.
M. Lee: D'après ce que vous nous dites aujourd'hui, le ministère envisagerait de proposer des modifications à ces articles de la loi. Il nous serait utile de savoir ce qu'on veut modifier. J'aimerais que vous obteniez du ministre la permission de nous indiquer les modifications envisagées. Ça devrait pouvoir se faire dès que le ministère aura les modifications. Je pense que ce pourrait être utile.
M. Leclerc: Nous pouvons sûrement essayer de le faire. Je dois vous rappeler que les modifications à la Loi sur la marine marchande du Canada sont parrainées par deux ministres, le ministre des Transports et le ministre des Pêches et des Océans. Il nous faut donc obtenir l'accord des deux ministres.
M. Lee: Si vous ne pouvez pas faire cela pour nous, je vous prierais d'écrire au greffier ou au conseiller juridique du comité pour nous le faire savoir. Dans ce cas, le comité écrira aux deux ministres. Si vous ne pouvez pas coordonner la chose pour une raison quelconque, faites-nous le savoir. Nous ferons alors ce qui nous semble indiqué.
Le coprésident (M. Grewal): Avant de poursuivre nos travaux à huis clos, j'aimerais remercier les témoins d'être venus nous rencontrer ce matin. Le comité va attendre avec impatience la lettre que vous avez promis de nous envoyer d'ici une semaine ainsi que copie des documents dont nous avons besoin, c'est-à-dire ceux sur l'établissement des droits et les autres documents qui contiennent les renseignements qu'il nous faut, comme nos discussions l'ont démontré.
Nous allons poursuivre nos travaux à huis clos.
La séance se poursuit à huis clos.