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AMAD Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir


NUMÉRO 011 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 6 juin 2022

[Enregistrement électronique]

  (1830)  

[Traduction]

    Bonsoir et bienvenue à la réunion du Comité mixte spécial sur l'aide médicale à mourir.
    Je souhaite la bienvenue aux membres du Comité, aux témoins et à ceux qui suivent cette réunion sur le Web.
    Je m'appelle Marc Garneau et je suis coprésident représentant la Chambre des communes. Je suis accompagné de l'honorable Yonah Martin, coprésidente représentant le Sénat. Nous allons nous partager la tâche de présider ce soir.
    Nous poursuivons aujourd'hui notre examen législatif des dispositions du Code criminel relatives à l'aide médicale à mourir et de leur application.
    Je vous rappelle que les membres du Comité doivent se conformer aux protocoles sanitaires établis par le Bureau de régie interne, qui seront en vigueur jusqu'au 23 juin. Je sais que vous les connaissez très bien. La sénatrice Martin, en sa qualité de coprésidente, et moi-même veillerons à leur application. Nous vous remercions à l'avance de votre coopération.
    Je rappelle également aux membres et aux témoins qu'ils doivent garder leur microphone en sourdine, sauf lorsqu'un des coprésidents leur cède nommément la parole, et que toutes leurs observations doivent être adressées à la coprésidence. Lorsque vous parlez, exprimez-vous, s'il vous plaît, lentement et clairement. Cela facilite la tâche de nos interprètes. Les services d'interprétation seront disponibles pendant cette vidéoconférence, comme pour une réunion en présentiel. Au bas de votre écran, vous pouvez choisir entre le parquet, l'anglais ou le français.
    Cela étant dit, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos témoins du premier groupe, qui discuteront de la question de l'aide médicale à mourir pour les mineurs matures au Canada.
    Nous avons deux invités au cours de la première heure ce soir. Nous tâchons toujours d'établir la communication avec Myeengun Henry, gardien des connaissances autochtones à l'Université de Waterloo.
    Nous accueillons en personne Ahona Mehdi, membre et cheffe de recherche de Just Recovery du Disability Justice Network of Ontario. Merci à vous deux de vous être joints à nous.
    Nous allons commencer par les déclarations préliminaires.
    Madame Mehdi, si vous êtes prête, je vous invite à commencer, après quoi nous passerons à M. Henry.
    Vous avez chacun la parole pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    La parole est à vous.
    Je m'appelle Ahona Mehdi. J'ai 19 ans et je suis membre du conseil d'action pour les jeunes du Disability Justice Network of Ontario. J'ai de multiples handicaps et, à la suite des récentes modifications apportées au Code criminel, certaines d'entre elles me rendraient admissible à l'aide médicale à mourir.
    Je suis ici aujourd'hui parce que, en tant que jeune avec un handicap, je suis extrêmement préoccupée et désemparée par la possibilité d'étendre l'aide médicale à mourir aux mineurs matures de notre pays.
    Avant de commencer, je veux que chacun des sénateurs et députés ici présents comprenne bien que, si on m'avait offert l'aide médicale à mourir il y a un peu plus d'un an, quand j'avais accès à des traitements en tant que mineure, je ne serais pas ici pour témoigner devant vous aujourd'hui.
    Vous continuez de prétendre que des mesures de protection seront en place pour cet élargissement du régime, que l'évaluation des demandes d'AMM sera diligente et délibérée, mais comment est‑ce possible? Au Canada, les jeunes handicapés paient jusqu'à 200 $ l'heure pour une thérapie, et pourtant vous envisagez d'élargir l'accès à l'AMM à ces jeunes et de la rendre gratuite.
    Je crois au droit de choisir, mais faire de l'AMM une option par défaut pour les enfants handicapés que vos systèmes ont laissé tomber équivaut à de la coercition, non à un choix. Si ce processus est vraiment fondé sur les droits des personnes handicapées et la prise de décisions autonome, pourquoi est‑il lancé pendant une pandémie mondiale où les professionnels de la santé sont plus surchargés que jamais?
    Un récent sondage mené par le Programme canadien de surveillance pédiatrique révèle que les professionnels de la santé du Canada sont de plus en plus sollicités par les parents d'enfants, y compris d'enfants en bas âge, trop jeunes pour prendre une décision éclairée au sujet de l'accès à l'AMM. C'est effrayant et cela prouve que ces discussions ne font qu'amplifier le message de banalisation du suicide. Comment les connaissances sur l'accès à l'AMM pour les mineurs matures se sont-elles répandues si largement et qu'en même temps le gouvernement refuse constamment et délibérément de rendre accessibles aux jeunes handicapés les soins à domicile, les soins palliatifs, les appareils fonctionnels, les soins d'affirmation de genre, les soins culturellement adaptés, les services de counselling et d'autres ressources?
    Quand je pense à ce que j'ai vécu dans le système de soins de santé, la possibilité d'étendre dans un deuxième temps l'AMM aux mineurs matures m'effraie. À l'âge de 17 ans, mes proches m'ont fait admettre à l'hôpital dans l'espoir que je reçoive du soutien et des soins, mais c'est le contraire que j'ai connu. Mon psychiatre assigné m'a dit que je devais surmonter mon anxiété si je voulais réussir. Il m'a dit que, s'il m'arrivait d'avoir des idées suicidaires, je devais les mettre au rancart et les oublier. Adolescente, j'ai été placée dans des endroits où j'étais sans cesse harcelée par d'autres patients, des hommes adultes. À l'hôpital, plutôt que de régler les problèmes que je vivais et de me donner un espace plus sûr, on m'a constamment administré des médicaments, et cela sans prendre le temps de comprendre ma situation. On m'a souvent fait subir des traitements qui ont aggravé mon état.
    Je crains pour les jeunes handicapés comme moi et pour ceux dont la situation est pire que la mienne qui pourraient se voir offrir l'AMM au lieu d'un traitement ou de soins. De la même façon que les établissements continuent de recourir aux médicaments d'ordonnance comme solution facile à des problèmes complexes, l'élargissement de l'AMM serait d'une grande imprudence. Il est tout à fait scandaleux d'imposer à des enfants handicapés le fardeau de choisir entre la vie et la mort en même temps qu'on ferme les yeux sur les réalités du capacitisme systémique au Canada.
    Vous continuez de prétendre que nous brimons le droit des personnes handicapées de mourir dans la dignité, mais la mort ne peut pas être l'option par défaut pour les jeunes handicapés en difficulté.
    Je vous demande de vous opposer à cet élargissement de l'AMM et de lutter pour offrir une autre solution aux jeunes handicapés dans laquelle le gouvernement se montrera accueillant et soucieux de les voir vivre dans la dignité. Je suis ici pour vous demander de faire une pause, de ralentir et de refuser cet élargissement. Je suis ici parce que je n'admets pas que vous discutiez sans moi de mon droit de vivre et le remettiez en question. Je m'oppose à ce que vous remettiez en question le droit des jeunes handicapés noirs, autochtones et racialisés de vivre et de recevoir des soins, surtout sans faire un effort concerté pour leur créer un espace sûr.
    Vous prétendez vouloir mettre fin à nos souffrances, mais vous empirez les choses quand vous laissez votre crainte des handicaps vous mener à considérer comme jetables et indignes de vivre ceux d'entre nous qui vivent actuellement avec un handicap.
    Merci de votre attention.

  (1835)  

    Merci, madame Mehdi.
    Je vois que la communication est maintenant établie avec M. Henry.
    Monsieur Henry, je suppose que vous pouvez m'entendre. Nous sommes maintenant prêts à entendre votre déclaration préliminaire de cinq minutes. Allez‑y, monsieur Henry.
    Oui, nous vous entendons.
    Je vous remercie de m'avoir permis de me joindre à vous aujourd'hui.
    Je suis un ancien chef de la Première Nation des Chippewas de la Thames, tout près de London, en Ontario. Je travaille actuellement à l'Université de Waterloo, où je suis le gardien des connaissances autochtones. Je suis aussi guérisseur traditionnel et je travaille au sein d'organismes qui ont des pratiques autochtones de guérison pour diverses personnes en quête de leur propre façon de guérir.
    Ma journée a été intéressante aujourd'hui. J'ai amené mon doyen de faculté à l'Institut Mohawk à Brantford, en Ontario, où nous avons commémoré les survivants de cette école et ceux qui y sont décédés. Je me sens fortement interpellé par le sujet d'aujourd'hui en ceci qu'il porte sur la vie d'une personne. Je crois vraiment que le Comité a besoin du point de vue d'une personne autochtone pour réfléchir à l'orientation que nous donnons aux lois canadiennes. Comme j'étais au pensionnat aujourd'hui, j'étais très clairement conscient qu'il y a ici une histoire profondément enracinée qui doit vraiment être examinée d'un peu plus près sous l'angle du sens de la vie et de la vision qu'en ont les peuples autochtones.
    Nous comprenons aussi qu'il y a des moments où les gens trouvent leur vie très compliquée et ont à éprouver certaines difficultés, mais je pense que, pour ce qui est de la façon dont les Autochtones perçoivent la vie, c'est vraiment notre Créateur vers qui nous nous tournons dans des moments comme ceux‑là. Si nous adoptons des lois qui tiennent vraiment compte de ce point de vue, soyons conscients que les peuples autochtones ont déjà vécu cela. Nous avons été forcés de quitter ce monde, comme l'attestent les enfants perdus et retrouvés dans les pensionnats récemment, sous une forme très semblable.
    C'est vraiment douloureux de savoir que ces enfants ont quitté ce monde sans aucune possibilité dans la vie. Je sais que les survivants d'aujourd'hui sont eux aussi aux prises avec des difficultés mentales, physiques, émotionnelles et spirituelles. Je vis cela en ce moment avec un beau-père qui ne veut plus vivre à cause de ce qu'il a dû endurer au pensionnat. Ces dernières années, son esprit revient sur à cette époque. Ce que je retiens de lui, c'est le fait d'avoir conservé sa valeur. Il a encore la possibilité de partager quelque chose dont le pays a besoin pour prendre conscience de cette expérience. Il ne s'abandonnera pas à des pensées suicidaires, même si la douleur qu'il ressent aujourd'hui est vraiment très profonde.
    Je pense que le thème et notre discussion aujourd'hui nous amèneront à vouloir participer à cette conversation. Les Autochtones de partout au Canada ont subi toutes ces choses terribles, mais aujourd'hui, je pense, lorsqu'il s'agit de soutenir les gens qui peuvent s'aider eux-mêmes à l'aide de moyens différents, comme les pratiques de guérison autochtones... J'ai déjà vu cela chez des gens qui sont allés jusqu'à vouloir quitter ce monde, mais maintenant, en retrouvant leur culture et en sachant qu'il y a des façons de traiter ces gens et de travailler avec eux, l'idée de vouloir quitter ce monde s'est estompée.
    Tout au long de mes pratiques de guérison auprès de nombreuses personnes, il m'est apparu très clairement qu'elles doivent avoir cette capacité supplémentaire de connaître leurs pratiques de guérison et, quand elles y accèdent, elles retrouvent ce qui a été enlevé à notre peuple. Pendant toutes ces années, les pensionnats nous ont empêchés d'avoir nos sueries et nos cérémonies, mais, parce que les gens sont maintenant en mesure de reprendre ces pratiques, ils ont désormais l'espoir de s'en sortir, plutôt que la tentation de mettre fin à leurs jours. Cela vaut non seulement pour les peuples autochtones, mais pour tous les peuples. Si les gens trouvent cette paix qui leur permet d'espérer, je pense que nous pourrons alors vraiment examiner ce sujet plus en profondeur et avoir de nouveau l'occasion de peut-être raviver chez ces gens l'espoir qui a été perdu.
    Je sais aussi qu'il y a des moments où les gens en arrivent à un stade de leur vie où c'est inévitable et où la douleur qu'ils ressentent est probablement au plus fort. Je pense que les professionnels de la santé sont d'accord pour dire qu'il y a des moments où c'est faisable.

  (1840)  

    Jusqu'à ce que nous en arrivions là, la décision doit venir de la personne. Je pense que nous pouvons nous entendre là‑dessus et peut-être remettre cette décision à un peu plus tard, plutôt que de laisser à elle-même la personne qui porte cette souffrance dans son esprit et qui veut simplement quitter ce monde.
    Mon message est le suivant: favorisons la discussion dans le Comité. Je ne sais pas s'il y a des Autochtones qui ont été invités à vos réunions et qui ont fait entendre ce point de vue. Mais depuis que je fais du travail de guérison, je sais que nous pouvons aider les gens, même à un moment où ils pensent qu'il n'y a plus d'espoir pour eux. Je l'ai vu tellement de fois.
    Je suis ici pour faire part de mes réflexions et pour profiter de l'occasion d'exprimer notre point de vue. Personne d'autre au pays n'a vécu ce que nous avons vécu et n'a connu les expériences que nous faisons connaître. Dans un comité comme le vôtre, je pense qu'il est très important pour vous d'entendre cela et pour nous d'avoir l'occasion de communiquer nos connaissances.
    J'espère que nous pourrons poursuivre cette discussion en tenant compte de ces éléments très importants qui, à mon avis, doivent être abordés dans la discussion de ce sujet.
    Le Canada est un grand pays, mais nous devons inclure dans ces discussions les gens qui sont ici depuis des temps immémoriaux. Nous avons traversé une période difficile. Nous reprenons les cérémonies saines, interrompues le temps des pensionnats, que nous avons toujours pratiquées. Elles ont été interdites au Canada pendant longtemps. Maintenant que nous sommes en train de les rétablir, nous voyons des gens comme mon beau-père être en mesure de tenir le coup un peu plus longtemps, puis de transmettre ses connaissances à ses enfants et ses petits-enfants.
    Je tenais à vous en faire part aujourd'hui.

  (1845)  

    Merci beaucoup, monsieur Henry.
    Merci beaucoup.
    Nous aurons l'occasion de vous poser des questions au cours de la prochaine heure. Merci beaucoup de votre déclaration préliminaire.
    À titre d'information, nous avons entendu un témoin autochtone à notre dernière séance et, bien sûr, nous tiendrons d'autres réunions.
    Je cède maintenant la parole à la coprésidente, la sénatrice Martin, pour la première série de questions.
    Merci.
    Je remercie nos invités de leurs témoignages éloquents.
    Nous allons commencer ce premier tour avec M. Barrett, pour cinq minutes.
    Par votre entremise, j'aimerais remercier nos deux témoins d'avoir accepté de comparaître aujourd'hui et de nous faire connaître leur point de vue sur ce sujet difficile.
    J'adresse ma première question au chef Henry.
    Tout d'abord, encore une fois, je vous remercie, chef, de nous avoir fait part de votre expérience et de votre point de vue.
    Je pense que la capacité des enfants de prendre des décisions est très importante, et j'aimerais connaître votre point de vue à ce sujet. Nous la tenons parfois pour acquise. D'autres fois, nous veillons à protéger nos enfants parce qu'ils sont susceptibles d'être influencés. Je pense à l'attrait que peuvent exercer sur eux l'alcool, le tabac et, dernièrement, le vapotage et les stupéfiants, ainsi qu'aux protections que nous offrons aux jeunes. Au Québec, la publicité destinée aux jeunes est restreinte.
    Quel est votre point de vue sur l'offre qui serait faite aux jeunes, plus particulièrement aux jeunes Autochtones, ou l'information qui leur serait fournie, par une personne de confiance comme un médecin praticien en matière d'AMM lorsque ces jeunes vivent dans la souffrance?
    Je pense qu'il serait avantageux pour ces jeunes qu'il y ait un guérisseur ou un praticien autochtone qui les accompagne, en parallèle avec l'action du médecin.
    De nos jours, nous voyons des jeunes qui veulent renouer avec leur culture et faire ces choses dont j'ai parlé. Je pense que les avantages seraient immenses si l'enfant savait qu'il existe, dans sa propre culture, des façons de régler ces problèmes.
    Dans mon travail avec le Dr Conroy à Toronto — qui est avocat et médecin —, lorsque nous faisons appel à des guérisseurs traditionnels, les enfants qui se trouvent à Anishnawbe Health à Toronto s'en tirent beaucoup mieux. Au moins, ils se sentent à l'aise avec les connaissances qu'ils acquièrent.
    Je pense vraiment qu'il faut qu'il y ait les deux dans ce scénario... pour parler à ces enfants. Il y a, chez nos jeunes enfants, un regain de confiance dans les gardiens du savoir autochtone, et je pense que, lorsqu'il y a un professionnel de la santé qui est présent, ils en font partie. C'est ainsi que la recherche et les connaissances avancent, mais il y a un élément spirituel pour ces enfants que le gardien du savoir autochtone peut apporter.

  (1850)  

    D'accord.
    Dans le meilleur des cas, je pense qu'il faudrait que les deux travaillent ensemble.
    Je vous remercie, monsieur.
    Nous savons que le racisme à l'endroit des Autochtones est bien présent dans notre système de soins de santé. Je me demande si vous avez des préoccupations ou des réflexions au sujet de l'AMM qui pourrait être proposée aux jeunes Autochtones parce qu'ils sont autochtones et vivent dans la souffrance.
    Pourriez-vous reformuler votre question?
    Certainement, monsieur. Nous avons vu des exemples, même récemment, de racisme dans notre système de santé visant précisément les Autochtones ou les gens des Premières Nations. Je me demande si vous avez des préoccupations ou des réflexions au sujet des Autochtones qui pourraient être ciblés, faute d'un meilleur terme, par une proposition d'AMM au lieu de se faire offrir d'autres options de soins de santé.
    Cela me préoccupe beaucoup, surtout dans les collectivités du Nord où il n'y a qu'un seul médecin. Parfois, il doit se rendre sur place par avion ou traiter les gens au moyen de Zoom. Parfois, ce qu'ils entendent... Cela ne donne pas les connaissances nécessaires à l'enfant, ni même à ceux qui s'en occupent et cherchent à l'aider.
    J'ai des préoccupations au sujet des soins de santé offerts aux Autochtones partout au Canada. C'est pourquoi je dis toujours que nous devons participer à ces discussions. Cela dit, nous pouvons peut-être aider les collectivités qui subissent un racisme dans le système d'assurance-maladie ici au Canada.
    Merci beaucoup.
    Je ne sais pas si j'aurai le temps d'obtenir une réponse complète, mais j'adresse quand même ma question à Mme Mehdi. D'abord, je vous remercie de nouveau de nous avoir accordé de votre temps et de nous avoir fait part de vos réflexions aujourd'hui. J'espérais que vous pourriez nous en dire davantage sur vos préoccupations à la suite de discussions avec de jeunes handicapés à qui on propose l'AMM et sur la façon dont de telles propositions pourraient renforcer les idées suicidaires.
    Soyez très concise, je vous prie.
    D'accord.
    Je pense que les messages évoquant le suicide sont une chose énorme. Lorsque nous entendons cela de la part de nos pairs et dans les médias, c'est énorme, mais je pense que ce sera beaucoup plus dramatique quand cela viendra des autorités publiques, de l'État en particulier, qui exercent des pouvoirs si étendus. Je crains pour les jeunes parce que nous savons que les messages évoquant le suicide et le fait d'entendre parler d'idées suicidaires ont un effet déclencheur. Cela pourrait susciter un accroissement d'idées suicidaires chez les jeunes.
    Je vais interrompre la discussion un instant.
    Il y a quelqu'un à l'arrière de la salle, dont je ne connais pas le nom, à qui j'ai dit de mettre un masque. Il ne l'a pas fait.
    Monsieur, veuillez quitter la salle tout de suite.
    Monsieur le président, vous pourriez peut-être mettre un masque vous-même.
    Connaissez-vous les consignes? Les personnes assises à la table n'ont pas à porter un masque à condition de respecter entre elles la distance prescrite, mais toutes les autres personnes doivent en porter un.
    Donc le membre du personnel...
    Je ne vais pas me lancer dans un débat avec vous, monsieur Cooper. Votre collègue doit partir.
    Eh bien, je pense, monsieur le président, que vous êtes très déraisonnable, et encore une fois...
    Je ne vais pas en discuter avec vous.
    M. Michael Cooper: ... vous êtes [inaudible] libéral typique [inaudible]...
    Le coprésident (L'hon. Marc Garneau): Votre collègue doit partir. Allez‑vous lui demander de...
    Je l'encourage à ne pas partir.
    A‑t‑il la possibilité de mettre un masque maintenant?
    Oui. Il a cette possibilité, et c'est ce que je lui ai demandé de faire. Il a refusé.
    Je préférerais qu'il reste.
    Une voix: Nous sommes aussi tous handicapés. Je vous recommande vivement de le mettre pour nous, sinon pour les autres.
    M. Michael Cooper: Eh bien, nous devrions peut-être tous porter le masque, si c'est le cas.
    Une voix: C'est juste. Mettez‑le [inaudible].
    Je serais heureux de porter un masque moi aussi, mais votre collaborateur doit mettre un masque. Ce sont les consignes du Bureau de régie interne. Je serai inflexible sur ce point.
    Une voix: Vous êtes soumis à des règles différentes [inaudible]. Les choses sont ainsi. Mettez votre masque.
    Une voix: Il n'a pas de privilège parlementaire.
     [Inaudible] mieux vaut mettre votre masque.
    Deux poids, deux mesures. Prenez‑en note.
    Soyez assuré que je prends note de ce que vous avez dit ce soir, monsieur Cooper. Vous ne suivez pas les consignes du Bureau de régie interne.

  (1855)  

    C'est vraiment un cas de deux poids, deux mesures.
    Poursuivons, s'il vous plaît.
    C'est maintenant au tour de M. Maloney, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je veux d'abord présenter des excuses à nos deux témoins qui ont dû assister à l'incident qui vient de se produire. Nous sommes ici pour parler de questions très graves, des questions qui sont très importantes pour vous deux, et il est malheureux, c'est le moins qu'on puisse dire, que cette altercation soit survenue en votre présence — ou même qu'elle se soit produite —, mais c'est ainsi.
    Merci à vous deux d'être ici. Vos témoignages sont très éloquents. J'ai plusieurs questions.
    Tout d'abord, pour que ce soit bien clair — et ma question s'adresse aux deux témoins —, êtes-vous contre l'aide médicale à mourir dans n'importe quelle circonstance ou seulement dans des circonstances particulières?
    Je vais commencer par vous, madame Mehdi.
    Comme je l'ai dit, je crois au droit de choisir, mais je ne crois pas qu'il s'agisse d'un choix quand il se fait entre deux options extrêmes, alors même nous ne finançons pas des choses comme les soins à domicile...
    D'accord. J'y reviendrai, mais ma question est très simple.
    Il y a donc des circonstances où vous estimez que l'AMM est appropriée et acceptable?
    Oui.
    Je vous remercie de votre réponse.
    Monsieur Henry, qu'en est‑il pour vous? Êtes-vous du même avis ou êtes-vous généralement contre?
    Après avoir été témoin de la situation de certains de nos gens, je n'y suis pas totalement opposé quand vient le temps de la décision finale, mais il faut que ce soit une décision longuement réfléchie. Je vais m'arrêter là‑dessus. Il y a un moment où c'est approprié, oui.
    Voilà qui est très utile, et je vous en remercie parce que nous sommes ici pour parler des mesures de sauvegarde et des garde-fous, peu importe comment vous voulez les décrire. C'est un bon point de départ pour mes questions.
    Madame Mehdi, je vais commencer avec vous. Vous dites que vous avez maintenant 19 ans?
    Mme Ahona Mehdi: Oui.
    M. James Maloney: D'accord. Vous avez dit que si vous aviez présenté une demande d'AMM il y a un an, vous y auriez été admissible, sauf erreur, mais vous aviez 18 ans il y a un an? Est‑ce exact?
    J'avais 17 ans.
    Vous aviez 17 ans. À votre avis, y a‑t‑il des circonstances dans lesquelles des personnes de moins de 18 ans — des mineurs — peuvent prendre des décisions pour elles-mêmes, que ce soit dans le cas de l'AMM ou dans d'autres situations médicales?
    Je pense que oui, dans une certaine mesure, mais je sais aussi que le développement du cerveau, en particulier le cortex préfrontal, où se fait l'évaluation des risques...
    Je comprends qu'il y aura des circonstances médicales où les médecins jugeront que ce n'est pas approprié parce que la personne n'a pas la capacité de décider, et ma question est donc très simple: croyez-vous qu'il soit acceptable, si l'opinion médicale va dans ce sens, qu'une personne de moins de 18 ans prenne cette décision de son propre chef?
    Je pense, dans un tel cas, qu'il faudrait faire une pause, évaluer la situation et en parler à plus de professionnels.
    Sauf votre respect, madame, c'est une question à laquelle vous pouvez répondre par oui ou par non. Vous dites... Je conviens qu'il faut ralentir le processus dans certaines circonstances, mais la question est très simple. Il y a des circonstances où une personne dans cette situation pourrait prendre cette décision parce que, en fin de compte, il s'agit d'un choix individuel.
    Vous êtes d'avis qu'une personne de moins de 18 ans qui a la capacité, qui est appuyée par des professionnels de la santé, devrait être autorisée à prendre des décisions médicales par elle-même.
    Eh bien, je répondrai que je ne le sais pas. Je n'ai pas cette information....
    D'accord.
    ... mais je pense que nous devons aussi mettre... Nous ne pouvons pas continuer à faire passer la question des droits individuels avant celle de la responsabilité collective.
    D'accord.
    Permettez-moi une petite digression. Vous avez mentionné les soins palliatifs, entre autres, et je suppose que c'est parce qu'il y a divergence d'opinions dans le domaine des soins palliatifs au sujet de l'AMM. Est‑ce pour cette raison que vous avez dit que les gens devraient avoir droit à des services avant d'avoir accès à l'AMM? Est‑ce juste?
    Oui, tout à fait.
    D'accord.
    C'est très bien parce que nous avons entendu un certain nombre de témoins, comme je l'ai dit, qui ont fait remarquer que dans le domaine des soins palliatifs, chez les praticiens dans ce domaine, il y a une évolution en cours et que les gens en apprennent davantage sur l'AMM. Cette évolution résulte du fait que les praticiens sont à l'aise avec les mesures de protection mises en place, mais aussi, ce qui est plus important encore, du fait que leurs patients demandent l'AMM, en supposant que ces mesures de protection soient en place. Pensez-vous qu'il est approprié d'y recourir dans ces circonstances, lorsque les mesures de protection sont en place?
    À vrai dire, je ne pense pas pouvoir répondre à cette question.
    D'accord. Merci.
    Ce sera probablement ma dernière question. Vous avez dit — j'espère vous citer correctement — que « nous empirons les choses » pour les personnes handicapées.
    Je suis fermement d'avis, comme tout le monde autour de cette table, que personne ne devrait être forcé de subir quelque situation que ce soit et qu'une personne handicapée ne devrait pas être désavantagée à cause de son handicap. Pouvez-vous nous expliquer en quoi les personnes handicapées seraient désavantagées? Dans les cas où le bien-fondé médical de la décision et son approbation par une équipe médicale sont acquis, pouvez-vous me dire comment vous conciliez ces deux éléments?

  (1900)  

    Je parle également en tant que jeune handicapée qui travaille avec d'autres jeunes handicapés. Certains d'entre eux sont ici aujourd'hui, derrière moi. Je peux dire que nous avons tous souffert en entendant ces discussions parce que nous savons, d'après notre vécu, combien souvent il est impossible d'avoir accès à des services comme le counselling, une thérapie, un logement accessible, des appareils fonctionnels...
    Je pense que nous sommes tous d'accord que, dans ces circonstances, c'est inapproprié...
    Oui.
    ... mais lorsque les critères sont respectés, pensez-vous que ce serait approprié?
    Non.
    D'accord, merci.

[Français]

     Nous poursuivons avec M. Thériault pour cinq minutes.
    Monsieur Thériault, vous avez la parole.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de nous avoir fait part de leurs expériences, car il est toujours intéressant d'entendre les gens parler de leur vécu, et ces questions-là ne sont pas seulement le propre des experts.
    Je m'adresse aux deux témoins.
    Vous conviendrez avec moi que la maladie, dans sa forme la plus grave, frappe tout le monde. Elle n'a pas de barrières quant au genre, à l'origine ou à l'âge. Pourquoi serait-il inacceptable d'accorder à des patients d'âge mineur, par exemple ceux âgés de 14 à 18 ans, ce qu'on accorde à ceux d'âge majeur?

[Traduction]

    Nous entendrons d'abord M. Henry, puis Mme Mehdi.
    Comme je l'ai dit plus tôt, nous savons que le cortex préfrontal, qui est le siège de l'évaluation des risques et de la prise de décisions, n'est pas complètement développé avant la deuxième décennie de la vie, parfois même la troisième, et nous ne pouvons donc pas nous attendre à ce que les jeunes soient en mesure de prendre ces décisions.
    Il y a un autre point. Nous pouvons prétendre que les médecins suivront les procédures garantissant que ces décisions sont vraiment délibérées et que la personne qui demande l'AMM est rationnelle, mais le masquage est un procédé largement utilisé par les personnes handicapées, surtout les jeunes, quand elles ont à se frayer un chemin dans des systèmes de soins de santé où elles ne rencontrent qu'indifférence et manque de soutien. Nous avons...

[Français]

     Excusez-moi, mais je dispose de peu de temps de parole et je veux éviter de faire un faux débat. D'abord, je vais écouter M. Myeengun et, ensuite, j'ajouterai un petit commentaire.
    Monsieur Myeengun, j'aimerais que vous me répondiez brièvement, s'il vous plaît.

[Traduction]

    Je n'avais pas d'écouteurs pour entendre l'interprétation.
    Monsieur Henry, avez-vous des écouteurs?
    On m'a envoyé des écouteurs, mais [inaudible].
    Vous pouvez cliquer sur « English » à droite dans le bas de votre écran pour...
    C'est pour l'interprétation?
    Oui, c'est pour l'interprétation. Veuillez sélectionner « English ».
    Monsieur Thériault, voulez-vous répéter votre question pour M. Henry.

[Français]

    Bien sûr.
    Je vais simplifier ma question. Dans quels cas pensez-vous que l'aide médicale à mourir pourrait être autorisée aux mineurs?

[Traduction]

    Je vous entends à peine.
    Dans quels cas croyez-vous que l'AMM pour les mineurs matures pourrait être autorisée? C'était la question.
     Je pense qu'il faut procéder au cas par cas. Avec l'avis d'un médecin, une personne de moins de 18 ans qui a un tuteur, un parent ou quelque autre personne [difficultés techniques] prendre cette décision. Chaque cas est différent, et nous ne pouvons donc pas faire une affirmation générale dans un sens ou l'autre. Je pense que chaque cas exigera...

[Français]

    En éthique clinique, il faut d'abord et avant tout — c'est ce qu'on enseigne dans les facultés de médecine — procéder par une logique inductive au regard des décisions prises au chevet d'un patient. Il ne faut pas appliquer une grille d'analyse lorsqu'on arrive au chevet d'un malade, mais plutôt essayer de voir ce qui émerge, c'est-à-dire écouter ce qu'il a à dire, écouter ses volontés et entendre sa souffrance.
    Cette approche, accompagnée d'une évaluation qui tient compte de tous les critères, ne permettrait-elle pas une sauvegarde et un exercice de cette pratique qui serait quand même assez sécuritaire?

  (1905)  

[Traduction]

    Je crois qu'ils doivent avoir leur mot à dire, bien sûr. C'est ainsi qu'on peut savoir ce qu'ils ressentent. Il est très important d'entendre ce point de vue. Tous les renseignements médicaux disponibles, ainsi que les renseignements sur la personne, sont très importants. Je suis d'accord.

[Français]

     Aux Pays‑Bas, l'un des deux pays où l'on administre l'aide médicale à mourir à des mineurs, les parents des jeunes de 12 à 16 ans sont toujours impliqués. Ce serait pour les jeunes de 16 à 18 ans que les parents n'auraient pas de droit de veto.
    Les parents sont nécessairement partie prenante à la décision.
    Que pensez-vous de cela? Croyez-vous vraiment qu'il y aurait des abus?

[Traduction]

    Certainement. Je pense que beaucoup de points de vue doivent entrer en ligne de compte. Ils savent comment leur...

[Français]

    S'il faut aussi le consentement des parents, quelle sorte d'abus pourrait-il y avoir?

[Traduction]

    Excusez-moi. Pourriez-vous répéter?

[Français]

    S'il faut aussi le consentement des parents, quelle sorte d'abus pourrait-il y avoir?

[Traduction]

    Soyez très bref, monsieur Henry.
    Je n'ai pas compris la question. Je suis désolé.
    D'accord. Eh bien, de toute façon, le temps est écoulé. Désolée.
    Nous passer maintenant à M. MacGregor, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Mahdi, bienvenue au Comité et merci de vous être jointe à nous aujourd'hui.
    Dans ma province, la Colombie-Britannique, quand il s'agit de la prestation de soins de santé, un professionnel de la santé peut obtenir le consentement sans se référer à un parent ou un tuteur s'il est certain que l'enfant comprend la nécessité des soins de santé, en quoi ils consistent et les avantages et les risques qu'ils comportent. Ainsi, les enfants peuvent prendre des décisions concernant l'immunisation, et c'est très important dans les décisions de soins de santé génésique des adolescents. Par souci de clarté, je précise que vous êtes d'accord là‑dessus.
    C'est très différent de ce dont nous parlons aujourd'hui.
    J'ai constaté au cours des audiences tenues par le Comité qu'il faut tenir compte de la différence entre l'état de santé d'une personne et sa condition sociale. Je comprends que les problèmes de santé et les choix s'y rapportant sont très personnels, mais beaucoup de témoins ont dit qu'on ne peut pas vraiment faire de choix valables en l'absence du soutien approprié.
    Vous avez dit que, pour beaucoup de jeunes handicapés, le coût des soins constitue un obstacle de taille. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, sur la façon dont nous devons, en tant que collectivité nationale, réellement nous pencher sur ces facteurs sociaux?
    Tout d'abord, environ un Canadien handicapé sur quatre n'a pas les moyens de se payer des choses comme des appareils fonctionnels, des soins à domicile et ce genre de choses. Ils n'ont pas les moyens de se payer les aides nécessaires, les ordonnances et les choses de ce genre. Je pense que, dans le cas de mineurs en particulier, cela peut aussi parfois entraîner des difficultés financières pour la famille, ce qui ne passe pas inaperçu à leurs yeux. Beaucoup de parents d'enfants ayant une déficience intellectuelle et d'autres handicaps de ce genre doivent s'absenter du travail ou simplement ne pas travailler, ce qui représente une perte de revenu qui leur permettrait de mieux répondre aux besoins de leur enfant handicapé.
    Ce qui ressort de tout cela, c'est que les jeunes handicapés sont conscients de ces difficultés financières et qu'ils en sont troublés. Ils peuvent même avoir le sentiment d'être un fardeau. Se sentir comme un fardeau n'est pas une raison de mourir. Nous devrions nous demander pourquoi ils peuvent en venir à ce sentiment et ce que nous pouvons faire pour qu'ils s'en affranchissent.
    Je tiens à préciser que le Comité, à la fin de son mandat, présentera un rapport assorti de recommandations. Cela ne se traduira pas nécessairement par des modifications législatives. Nous étudions la question en profondeur afin de bien comprendre ce que les Canadiens de toutes les tendances pensent de tout cela, puisque les sentiments sont très marqués de chaque côté de ces questions.
    Le sujet que nous étudions aujourd'hui comporte cinq grands thèmes. L'un d'eux était la protection des personnes handicapées, et nous en sommes maintenant aux mineurs matures.
    Pouvez-vous me dire ce que nous devrions examiner, au minimum, pour nous assurer que les jeunes handicapés sont suffisamment représentés dans ce processus?

  (1910)  

    Je pense que le processus se déroule à grande vitesse.
    Je veux aussi parler du fait que, le 2 juin, la sénatrice Wallin a déposé un projet de loi visant à élargir l'AMM en ouvrant la voie aux directives anticipées. Je suis d'avis que, étant membre du Comité, elle en a compromis l'intégrité.
    Je pense aussi que les gens qui ont été consultés, notamment les jeunes handicapés comme moi, ne sont pas très nombreux. À ma connaissance, je suis la seule jeune handicapée à avoir été appelée à témoigner. Je doute fort que suffisamment de jeunes handicapés aient été consultés à ce sujet, et cela soulève mes appréhensions. Il est inacceptable que des décisions soient prises nous concernant et concernant notre droit de vivre ou de mourir sans que nous participions à la discussion. Malheureusement, nous en sommes absents.
    En ce qui concerne la protection des personnes handicapées, qui était notre thème précédent... Lorsque vous entendez que le Comité a été chargé de se pencher sur ce thème, qu'est‑ce que cela signifie pour vous?
    Je suis désolée, je n'avais pas mon casque d'écoute. Pourriez-vous répéter la question?
    Le thème sur lequel nous nous sommes penchés précédemment était la protection des personnes handicapées. Lorsque vous considérez que c'est l'un des thèmes autour duquel s'articule l'étude du Comité, qu'est‑ce que cela signifie pour vous?
    Je pense que c'est important, mais je n'en vois pas vraiment les résultats concrets.
    Il nous faut examiner également les nombreux déterminants sociaux de la santé, qui sont négligés à l'heure actuelle. Nous devons parler de la pénurie de logements, surtout pour les jeunes handicapés racialisés, noirs et autochtones. Nous devons parler des niveaux disproportionnés de pauvreté et de précarité du logement chez les Autochtones, ainsi que de leur taux disproportionné de suicide et d'idéation suicidaire. De plus, les jeunes autochtones risquent, plus que d'autres, de subir les contrecoups de ce projet de loi.
    Je pense que ces choses sont vraiment négligées à l'heure actuelle. Dans tout cela, je ne suis pas sûre de voir un souci de protection des personnes handicapées.
     Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à mon coprésident pour une série de questions des sénateurs.
    Merci, sénatrice Martin.
    Vous soulevez un bon point, madame Mehdi. À titre d'information, c'est la première fois que nous nous penchons sur la question des mineurs matures. Vous êtes donc là pour les premières discussions à ce sujet.
    Nous allons maintenant passer aux sénateurs, pour des tours de trois minutes.

[Français]

     Nous allons commencer par la sénatrice Mégie.
    Mes trois questions s'adressent à Mme Mehdi.
    Si j'ai bien compris, quand vous étiez jeune, autour de 17 ans, vous avez été très malade et vous dites que vous étiez admissible à l'aide médicale à mourir. Pourquoi dites-vous que vous étiez admissible à l'aide médicale à mourir? Qui vous a dit que vous étiez admissible à l'AMM?
    Même si vous dites que vous étiez admissible à l'aide médicale à mourir, saviez-vous qu'il vous fallait obtenir deux évaluations pour voir si vous répondiez vraiment aux critères d'admissibilité à l'AMM? Le saviez-vous?
    En tant que mineure, sentez-vous que vous seriez capable de dire non à l'aide médicale à mourir?

[Traduction]

    Si j'ai bien compris, vous me demandez pourquoi je serais admissible. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire que je divulgue la raison ici. Je ne pense pas que je doive divulguer mes handicaps à vous tous ici présents aujourd'hui.
    Vous m'avez aussi demandé si j'aurais pu dire non, si un médecin m'avait offert l'aide médicale à mourir. J'étais à l'hôpital parce que j'étais en crise. J'étais au plus mal. À ce moment‑là, je n'aurais peut-être pas dit non, parce que j'étais suicidaire et en crise. Ce que je vous dis, c'est que beaucoup de jeunes pourraient se retrouver dans cette situation. En y réfléchissant bien, si on m'avait offert de le faire à l'époque, je ne serais pas ici aujourd'hui pour vous en parler.

[Français]

    Vous savez que ce n'était pas à vous de décider si vous étiez admissible à l'aide médicale à mourir. Cela aurait pris une évaluation d'un médecin ou d'un autre professionnel de la santé pour confirmer si vous étiez admissible à l'aide médicale à mourir. C'est ce que je voulais dire. Étiez-vous au courant de cette évaluation?
    Quand une personne est en crise, ce n'est pas le moment d'évaluer l'admissibilité à l'aide médicale à mourir. C'est précisé très clairement dans les rapports.

[Traduction]

    Oui, je suis au courant de cela. Je savais qu'ils devaient me consulter, mais j'ai aussi de multiples handicaps. Je ne pense pas qu'ils se seraient arrêtés au fait que j'étais en crise.
     J'ai également mentionné plus tôt qu'en tant que personnes handicapées, qui ont été beaucoup en contact avec les systèmes de soins de santé et qui ont dû composer avec ces systèmes, nous sommes souvent capables de masquer nos problèmes. Nous sommes souvent capables de présenter la situation comme si nous avions besoin d'une chose en particulier, alors que dans les faits, nous ressentons complètement autre chose.
    Oui, je suis au courant de ce processus, mais j'ai peur et je ne sais pas non plus... Vous dites que ces processus sont en place, mais comment peut‑on en être sûrs? Bon nombre d'entre vous ont peut-être vu les manchettes au sujet d'une infirmière autorisée qui a assassiné huit résidents de foyers de soins de longue durée en Ontario en 2019. Personne ne l'aurait su si la chose n'avait pas été divulguée à un psychiatre. Comment pouvez-vous garantir que cela ne se reproduira plus?
    Je comprends que les circonstances sont différentes, mais il n'y a absolument aucun moyen de garantir que cela n'arrivera pas.

  (1915)  

[Français]

     Madame Mehdi, je vous arrête parce que ce ne sont pas là des cas d'aide médicale à mourir. Le cas de l'infirmière dont vous parlez ne relève pas de l'aide médicale à mourir. C'est du domaine criminel, ce qui est autre chose. Comprenez-vous?
    Ce que je veux vous faire comprendre, c'est que vous n'avez pas à avoir peur, parce qu'une évaluation sera faite par des professionnels de la santé en qui vous devriez avoir confiance. Ils pourraient déterminer qui est admissible à l'aide médicale à mourir. C'est en quelque sorte ce que je voulais soulever.
    Pensez-vous que, à l'âge de 17 ans, vous étiez apte à exprimer votre opinion de façon volontaire et réfléchie, sans subir de pressions?

[Traduction]

     Oui, mais ce que je dis, c'est que je crois, je comprends, que ces cas ne concernaient pas l'aide médicale à mourir, mais nous savons que le racisme médical existe, et nous savons que le capacitisme médical existe. Il n'y a aucune façon de garantir que ces professionnels de la santé... n'est‑ce pas?... ne commettraient pas ces actes de coercition, sachant que ces choses existent, et je dis qu'à 17 ans, on a beaucoup moins de pouvoir que ces gens en position d'autorité, ce qui nous rend très vulnérables.

[Français]

    Merci, madame Mégie.
    Sénateur Kutcher, vous avez la parole.

[Traduction]

     Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai deux questions et elles s'adressent aux deux témoins.
    Merci beaucoup d'être parmi nous aujourd'hui.
     L'aide médicale à mourir pour les mineurs matures est actuellement disponible dans certains pays. Savez-vous dans quelles circonstances ou à quelles conditions elle est fournie dans ces pays? Pouvez-vous nous dire dans quelles circonstances et à quelles conditions des mineurs matures ont reçu l'aide médicale à mourir dans les pays où elle est fournie?
     Voulez-vous commencer, madame Mehdi?
    Je ne le sais pas avec précision, mais j'imagine que ce serait peut-être dans le cas de maladies en phase terminale, de maladies chroniques...
    Pardon?
    Je ne le sais pas avec précision, mais j'imagine que ce serait peut-être dans le cas de maladies chroniques ou de maladies en phase terminale.
    D'accord. Donc, vous ne le savez pas?
    Non, je ne sais pas.
    Monsieur Henry, voulez-vous répondre à cette question?
     Je ne sais pas non plus, malheureusement.
    Merci pour cela et pour votre honnêteté.
    Ma deuxième question s'adresse encore à vous deux.
    L'un d'entre vous a‑t‑il déjà parlé à une jeune personne en phase terminale qui avait des souffrances intolérables et qui voulait être évaluée pour l'aide médicale à mourir? Avez-vous parlé à une personne — un enfant, un jeune, un mineur mature — qui se trouvait dans cette situation?
    Oui.
    Quelle était la situation?
    Je ne pense pas qu'il soit approprié que je le divulgue. Ce sont des renseignements très personnels.
    C'est difficile d'évaluer cela.
    Qu'en est‑il de vous, monsieur?
    Oui, et j'ai eu une conversation très intéressante avec cette personne. En fait, nous avons organisé une cérémonie de dénomination pour elle.
    D'accord...
    Elle envisageait cela, mais après notre cérémonie, sa façon de voir les choses a beaucoup changé, parce que sa situation n'était pas aussi mauvaise qu'elle le pensait. Comme je l'ai dit tout à l'heure, il s'agit du même cas où, lorsque les bonnes personnes sont là pour offrir leur soutien, cela aide énormément. C'est pourquoi j'ai dit que les cérémonies étaient vraiment importantes.
     Lorsque cette jeune femme envisageait cela sérieusement, nous, ainsi que les professionnels de la santé qui étaient présents... Je suppose que les choses ont changé pour elle et qu'elle a cessé d'envisager l'aide médicale à mourir après la cérémonie. Je ne peux pas vous dire exactement comment, mais elle a changé d'avis à ce sujet.

  (1920)  

    Eh bien, merci beaucoup. Je pense que vous avez soulevé un point très important. Ce que j'entends, c'est que vous et des professionnels de la santé l'avez épaulée dans le cadre d'une cérémonie, que vous avez essayé de répondre aux besoins de cette personne et qu'à la suite de cette intervention, cette personne a changé d'avis.
    Je vous remercie beaucoup d'avoir expliqué au Comité à quel point il est important d'avoir ce genre de conversations pour répondre aux besoins des personnes. Merci beaucoup.
    Merci, sénateur Kutcher.
    Le prochain intervenant est le sénateur Dalphond.

[Français]

[Traduction]

    Je vais poser une question à Mme Mehdi, si elle veut répondre.
    Je ne suis pas sûr de comprendre votre position. Vous opposez-vous à ce que toute personne de 18 ans ou moins ait accès à l'aide médicale à mourir? Vous dites que même au milieu de la vingtaine, le cerveau n'est pas encore bien formé, mais 18 ans vous semble acceptable, même si le cerveau n'est pas bien formé...?
     Je ne crois pas non plus que les projets de loi antérieurs aient été étudiés assez longtemps. Je ne pense pas que suffisamment de gens aient été consultés.
    Je pense que vous soulevez un excellent point. Cela ne se peut pas qu'à 18 ans, on puisse évaluer si on veut mourir ou non. Je pense qu'il faut une évaluation plus poussée pour tous les âges, pour tous les handicaps. Ce n'est pas un seuil ferme qui se situe juste en dessous de 18 ans.
    Je pense que pour toutes les personnes handicapées, il faut plus d'information, plus de travail et plus d'espace de consultation.
    Vous avez raison de dire que le choix doit être un consentement éclairé, et qu'il doit venir du patient, et non des médecins. Il faut que ce soit basé sur la situation telle qu'évaluée par la personne d'abord, puis par deux personnes indépendantes, et peut-être même un plus grand nombre de personnes.
    Vous avez dit qu'il est difficile de tracer une ligne quelque part. Si vous avez quelqu'un de 17 ans qui a un cancer, qui souffre terriblement et qui demande l'aide médicale à mourir, vous allez lui refuser? Par exemple, dans certaines provinces, comme au Québec, à 14 ans et plus, il est possible de consentir ou non à un traitement médical. Cette personne pourrait refuser un autre traitement et décider qu'elle veut mettre fin à ses souffrances. Lui refuseriez-vous cela? Ou pensez-vous qu'il ne devrait pas y avoir de limite précise dans un tel cas, pour qu'il soit possible de dire oui après avoir bien évalué la situation?
    Puis‑je vous demander quelle est votre question exactement?
    Vous avez le cas d'une personne de 17 ans qui a un cancer en phase terminale et qui n'a aucune chance d'être guérie et à qui il reste six mois à vivre. Cette personne demande de mettre fin à ses souffrances et de recevoir l'aide médicale à mourir. Lui refuseriez-vous dans un tel cas? Ou pensez-vous que cela devrait être fondé sur la demande de cette personne et sur une évaluation de sa situation et que, dans un tel cas, même si la personne est âgée de 17 ans, on devrait lui accorder l'aide médicale à mourir?
    Encore une fois, comme je l'ai mentionné plus tôt, je crois au droit de choisir.
     J'aimerais revenir sur le fait que nous parlons beaucoup des droits individuels, qui sont importants, mais je pense que nous devons aussi nous pencher sur la responsabilité collective, n'est‑ce pas? Nous devons déterminer s'il s'agit d'une souffrance qui ne s'arrêtera pas, peu importe les circonstances sociales ou externes qui n'ont rien à voir avec les fonctions physiologiques ou avec un handicap physique, quel qu'il soit.
    La question est simple. Quelqu'un qui a le cancer, qui est en phase terminale, qui a peut-être un maximum de six mois à vivre et qui souffre terriblement peut‑il avoir accès, selon vous, à l'aide médicale à mourir?
    Je ne pense pas pouvoir me prononcer là‑dessus. Je ne pense pas qu'il soit approprié que je réponde.
    Vous refuseriez donc l'aide médicale à cette personne si elle la demandait?
    Je ne sais pas.
    Merci.

[Français]

     Merci, sénateur Dalphond.

[Traduction]

    Nous allons passer à la sénatrice Wallin.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question complémentaire pour Mme Mehdi.
    Je comprends que vous soutenez le choix et que vous soutenez le droit de ne pas choisir — de ne pas opter pour cette option. Je pense que tout le monde est généralement d'accord là‑dessus.
    J'aimerais revenir à l'autre point que vous avez soulevé, à savoir que les gens n'ont pas atteint leur plein développement émotionnel ou intellectuel avant d'avoir atteint la mi‑vingtaine.
    Lorsque vous avez eu ce problème pour la première fois, vous aviez 17 ans, et vous avez maintenant 19 ans, n'est‑ce pas?

  (1925)  

    Oui.
    D'accord.
     De toute évidence, vous avez des opinions très tranchées à ce sujet. Êtes-vous en train de dire qu'à l'heure actuelle, à 19 ans, vous êtes pleinement développée sur le plan émotionnel et intellectuel et que vous êtes donc en mesure de prendre cette décision?
     Ce n'est pas ce que je dis.
    Pardon?
    Si je devais décider d'avoir accès à l'aide médicale à mourir maintenant, vous me demandez si je serais capable de le faire.
    Oui.
    Non, je ne le crois pas.
    D'accord. Merci beaucoup.
    C'est la fin de mes questions.
    Merci, sénatrice Wallin.
    Nous passons maintenant à la sénatrice Martin.
    Merci à nos deux témoins. Je pense que vos voix sont très importantes à cette table. Vous êtes très courageux.
    Ma question porte sur l'aide médicale à mourir offerte aux mineurs. Croyez-vous qu'il devrait y avoir consentement parental, et pourquoi ou pourquoi pas?
     Je pense que le consentement des parents est aussi extrêmement délicat. Dans mon domaine de travail, j'ai vu de nombreux parents de jeunes enfants souffrant d'un handicap chronique qui les ont forcés à subir des traitements qu'ils ne voulaient pas subir. Je crains que ce soit la même chose dans le cas de l'aide médicale à mourir. Je crains que les parents qui ont peur des handicaps de leurs enfants et qui ne les comprennent pas puissent faire la même chose en ce qui concerne l'aide médicale à mourir.
     Je sais aussi que les parents ont beaucoup d'influence sur ce que les enfants ressentent en dedans d'eux.
     Ce sont de très bons points que vous soulevez là.
    Monsieur Henry, j'espérais vous interroger sur le processus de consultation. Après le témoignage des fonctionnaires, nous sommes d'avis qu'il n'y a pas eu suffisamment de consultation des peuples autochtones, métis et inuits.
    Discutez-vous de cela avec les membres de votre communauté? Pourriez-vous nous dire s'il y a eu suffisamment de consultation? Que disent les membres de votre communauté?
     J'ai parlé à nos membres et à la grande communauté autochtone, pour qui la situation est très difficile. Nous avons un historique de ces types de scénarios. Je ne pense pas que tout le monde puisse être d'accord.
    Nos approches concordent quand nous revenons à la façon dont nous avons traité ces questions tout au long de nos voyages spirituels. Nous laissons le Créateur décider. La situation est pénible. Le scénario est différent dans chaque cas.
    Cependant, quand je parle... Comprenez bien que nous sortons tout juste des pensionnats et que nous sommes toujours confrontés aux barrières qu'ils posaient. Ce que les gens ont vu dans ces pensionnats a encore une incidence sur leur façon de penser.
    Ils espèrent que le soutien médical qu'ils reçoivent est le meilleur possible, et ils comptent sur leur communauté lorsque vient le temps de prendre ces décisions. D'autres membres de notre communauté sont également interpellés dans ces scénarios lorsque ces décisions se prennent.
    C'est une grosse histoire, qui demande beaucoup de [Inaudible] réflexion...
    Pour ce qui est des consultations du gouvernement, on ne peut pas dire qu'il y en a eu beaucoup.
    Non, pas au niveau du gouvernement.
    Il importe de souligner que nous devons mener ce genre de consultation au sujet de l'aide médicale à mourir et de tous les groupes qui seraient touchés.
    J'en ai vu très peu; alors je vous remercie de cette question.
     Merci beaucoup. Voilà qui met fin aux témoignages de ce groupe.
     J'aimerais remercier Mme Mehdi et M. Henry de leur comparution, de leurs déclarations préliminaires et de leurs réponses à toutes nos questions sur le sujet très important que nous avons abordé ce soir. Nous vous sommes très reconnaissants de vos commentaires. Ils éclaireront les délibérations du Comité.
    Sur ce...
    Puis‑je ajouter quelque chose avant de partir?
    Oui, s'il vous plaît. Allez‑y.
    Je pense aux enfants qui vivent cette situation. Dans mon travail, j'ai toujours une pensée ou une prière avec les enfants pour toutes les personnes qui vivent cela. Je donne toute ma force au personnel médical et aux enfants, aux familles et aux communautés qui vivent ces situations difficiles.
     Je voulais vous en faire part ce soir. Merci de m'avoir permis de le faire.

  (1930)  

    Merci, monsieur Henry. C'est admirable. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Sur ce, chers collègues, nous allons suspendre la séance très brièvement pour nous préparer à accueillir le deuxième groupe de témoins.

  (1930)  


  (1930)  

    Nous reprenons la séance et revenons à nos travaux.
    J'aimerais prendre quelques instants pour rappeler à nos nouveaux témoins qui viennent de se joindre à nous de bien vouloir attendre que je leur donne nommément la parole avant de parler. Je vous rappelle que tous les commentaires doivent passer par les coprésidents. Parlez lentement et clairement. L'interprétation pour cette vidéoconférence sera comme pour une réunion en présentiel. Vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français au bas de votre écran. Lorsque vous ne parlez pas, veuillez mettre votre micro en sourdine.
    Sur ce, j'aimerais souhaiter la bienvenue à nos deux témoins. À titre personnel d'abord, Mme Constance MacIntosh, professeure. Ensuite, M. Bryan Salte, avocat, du College of Physicians and Surgeons of Saskatchewan. Merci à vous deux d'être là ce soir pour nous faire profiter de votre expertise et de vos réflexions.
    Commençons donc par Mme MacIntosh, qui sera suivie de M. Salte. Si c'est plutôt « docteure », je vous prie de m'excuser. Vous avez chacun cinq minutes pour votre déclaration d'ouverture.
    Allez‑y, madame MacIntosh.
     C'est professeure, et non pas docteure.
    Merci, monsieur le président et membres du Comité, de m'avoir invitée à me joindre à vous ce soir. Je m'appelle Constance MacIntosh. Je suis professeure titulaire de droit à la Schulich School of Law. J'ai été directrice du Health Law Institute de l'Université Dalhousie pendant six ans.
    À titre d'information, mon expérience de l'enjeu que vous étudiez, je la tiens de ma participation au comité organisateur de quatre conférences internationales sur la pratique clinique en fin de vie, la preuve empirique, le droit et la politique. J'ai aussi publié des articles sur le droit et la politique concernant les mineurs et la prise de décisions sur les soins de santé pour les très jeunes mineurs — enfants et nouveau-nés —, ainsi que pour les adolescents et les mineurs matures.
    J'ai deux recommandations à formuler dans ma perspective de professeure de droit. La première est de modifier le Code criminel pour supprimer la mention de l'exigence relative à l'âge. À mon avis, cela est inconstitutionnel. Si le Comité conclut qu'il faut une mention de l'âge, pour maintenir la confiance du public, je recommanderais 12 ans. Cela s'aligne sur les données psychologiques sur le renforcement des capacités, où il est si peu probable qu'un enfant de moins de 12 ans soit capable de prendre ce genre de décision. Une telle restriction pour l'âge serait constitutionnelle.
    Par ailleurs, je recommande d'adopter un règlement ou d'apporter une autre modification au code même, pour codifier et peut-être améliorer le processus existant d'évaluation de la capacité décisionnelle des jeunes qui pourraient demander l'aide médicale à mourir. Selon moi, c'est une question de transparence publique, car le public ne connaît pas le concept de « mineur mature », ni celui de confiance du public. Je pense que nous devons être très clairs, si nous allons dans ce sens, sur la façon de reconnaître et d'évaluer la vulnérabilité potentielle des jeunes.
    Voyons les cinq raisons sur lesquelles s'appuient mes recommandations.
    En premier lieu, le régime d'aide médicale à mourir est fondé sur la capacité décisionnelle effective de chaque personne. Partant de là, il n'est pas logique de ne pas reconnaître la capacité décisionnelle réelle des personnes pour seule raison d'âge.
    Deuxièmement, l'approche du consentement et de la capacité dans le régime d'AMM devrait être compatible avec la pratique clinique et le droit canadiens en matière de prise de décisions sur les soins de santé par les mineurs. La pratique et le droit sont conçus pour évaluer la situation et la vulnérabilité potentielle de chaque personne. Comme vous le savez sans doute, ne pas avoir 18 ans n'est pas un empêchement absolu de décider soi-même des actes médicaux, y compris de décider d'interrompre ou de refuser un traitement de survie.
    Les détails des régimes varient d'une province à l'autre, mais, au fond, ils s'articulent tous sur la maturité des jeunes et, en particulier, sur leur compréhension et leur appréciation de la nature et des conséquences d'une décision et, naturellement, des diverses solutions possibles, et de la question de savoir que leur consentement est libre ou pas. Pour évaluer cela, les experts analysent des facteurs comme la maturité, l'expérience de vie et l'état psychiatrique, émotionnel et psychologique du jeune. Une équipe d'experts décide si le mineur possède vraiment la maturité requise pour prendre la décision relative au service médical en question.
    Troisièmement, comme je vous l'ai déjà dit, je crois que le régime d'AMM sera jugé inconstitutionnel s'il maintient une interdiction fondée sur l'âge, ce qui serait incompatible avec les éléments de preuve sur la façon dont la capacité s'acquiert avec l'âge et l'expérience. Parce que ce critère d'âge absolu exclut les jeunes qui possèdent effectivement la capacité, et parce qu'il leur bloque l'accès à l'AMM et qu'ils n'ont pas besoin de la protection d'une interdiction, il sera jugé excessif. Parce que l'âge de 18 ans ne signifie rien pour la maturité et le développement — il est arbitraire et non pas un anniversaire magique —, cette loi, je crois bien, sera jugée inconstitutionnelle en cas de contestation.

  (1935)  

    La vulnérabilité des jeunes exige une approche différente de celle appliquée aux personnes plus âgées. Il faut d'autres protections. J'estime que beaucoup sont déjà intégrées dans la façon dont les fournisseurs de soins de santé approchent les adolescents qui ont des décisions à prendre en matière de services médicaux. Effectivement, plus la décision relative au traitement est grave, plus l'examen qui sert à évaluer la capacité, le caractère volontaire et la compréhension est rigoureux. Il se peut, toujours dans l'intérêt de la confiance du public et de la transparence, que des protections, comme l'obligation de consulter les parents, soient nécessaires pour les mineurs matures.
    Notons enfin que tous les groupes d'experts canadiens qui avaient mandat de formuler des recommandations précises ont appuyé l'approche fondée sur la capacité et rejeté l'approche fondée sur l'âge.
     Merci, madame.
    Nous entendrons maintenant M. Bryan Salte, du College of Physicians and Surgeons of Saskatchewan.

  (1940)  

     Je tiens à me faire l'écho de presque tout ce qu'a dit Mme MacIntosh.
    Je suis avocat depuis 23 ans au College of Physicians and Surgeons of Saskatchewan. Entre autres responsabilités, j'ai celle d'élaborer des politiques. J'ai également fait partie du groupe d'experts qui a présenté le rapport du Conseil des académies canadiennes sur les mineurs matures. Ce fut une expérience tout à fait remarquable, qui a rassemblé un groupe de personnes ayant des antécédents divergents en médecine, en éthique, en droit et dans d'autres disciplines. Le rapport est une codification de la sagesse de tous ceux qui ont siégé à la table et discuté de tout cela. Enfin, j'ai participé à l'élaboration du projet de politique de la Fédération des ordres des médecins du Canada, ainsi que de la politique de notre collège en matière d'aide médicale à mourir. Voilà pour mes antécédents.
    La première chose que j'aimerais signaler, c'est que la Cour suprême du Canada, dans l'affaire A.C. c. Manitoba, a reconnu que la capacité décisionnelle d'un adolescent ne dépend pas de son âge et que les adolescents qui ont la capacité décisionnelle ont le droit de prendre eux-mêmes les décisions qui concernent leurs soins de santé. Cela comprend les situations dans lesquelles ces décisions peuvent mener à la mort.
    Le deuxième point que j'aimerais faire valoir est que bon nombre des personnes qui accèdent à l'aide médicale à mourir sont d'un âge plutôt avancé, et que certaines ont une capacité quelque peu réduite, mais ont quand même la capacité de prendre les décisions qui les concernent. Le résultat, à mon avis, est qu'il est tout à fait anomal que des personnes d'un âge avancé et ayant une capacité quelque peu réduite aient accès à l'aide médicale à mourir — dans la mesure où, je le répète, elles ont la capacité de prendre ces décisions en matière de soins de santé —, ce qui est pourtant refusé aux moins de 18 ans qui pourraient bien avoir une plus grande capacité décisionnelle que certaines des personnes qui ont actuellement accès à l'AMM.
    Le prochain point que j'aimerais aborder découle des discussions et des renseignements recueillis par le groupe du Conseil des académies canadiennes, dont je faisais partie. On déplore souvent de voir que les adolescents ont tendance à ne pas s'inquiéter autant du résultat de leurs décisions, qu'ils prennent des risques et que leurs lobes préfrontaux ne sont pas pleinement développés. Par conséquent, ils ont une capacité d'exécution un peu moindre que les personnes un peu plus âgées. La preuve en est assez convaincante.
    Par contre, la preuve qui a été réunie relativement aux personnes qui luttent depuis longtemps contre une maladie éventuellement mortelle témoigne qu'elles sont pleinement conscientes des conséquences de leur état de santé. Ces personnes sont bien conscientes de leur état et prennent des décisions très réfléchies.
    Par conséquent, si l'aide médicale à mourir pour les adolescents est autorisée, et qu'ils ont la capacité de décider, cela signifie que vous n'aurez pas à traiter avec des personnes irréfléchies, qui prennent des risques et tout le reste. Vous aurez plutôt affaire à des personnes qui ont une compréhension assez nuancée de leur état de santé et qui sont capables de réflexion nuancée sur l'évolution éventuelle de leur mal.
    Un concept qui était nouveau pour moi lors de la discussion au Conseil des académies canadiennes était la question de l'économie relationnelle. Nous sommes tous solidement ancrés dans nos relations familiales et autres. La façon d'envisager l'autonomie du patient n'est pas nécessairement de le considérer exclusivement comme personne, mais aussi de reconnaître que les décisions sont prises dans le contexte des relations avec ceux qui l'entourent, c'est-à-dire sa famille. Dans le cas des adolescents, ce seront très souvent les parents, mais ce pourrait être d'autres soignants.
    J'ai quelques suggestions. La première est que la discussion sur l'aide médicale à mourir et la possibilité d'y donner accès aux mineurs matures ne devrait pas s'articuler sur la question de savoir s'il faut l'autoriser, mais plutôt qu'il devrait y avoir des protections supplémentaires pour les personnes qui doivent se soumettre à des mesures de protection supplémentaires qui ne sont pas exigées des adultes. Il y a deux choses que le Parlement devrait peut-être envisager pour la mise en œuvre de ces mesures supplémentaires.

  (1945)  

    Premièrement, c'est la reconnaissance de l'autonomie relationnelle; il faut reconnaître que la décision de recourir à l'aide médicale à mourir a des effets sur votre entourage immédiat, que vous soyez un adulte ou un adolescent. Il vaudrait la peine d'envisager que les parents, à tout le moins, participent à cette décision et qu'ils soient tenus au courant des décisions qui sont prises. Je pense toutefois que leur consentement ne doit pas être obligatoire. L'une des constatations du rapport du Conseil des académies canadiennes, c'est que si les parents sont tenus de donner leur consentement à la mort de leur enfant, ils pourraient être très réticents à le faire, éprouver une grande culpabilité et refuser de le donner. Cette réaction pourrait priver un adolescent de sa pleine capacité de décider de mettre fin à ses souffrances intolérables.
    La deuxième mesure que vous pourriez envisager, c'est celle que le Parlement a prévue à l'égard des personnes dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible, c'est‑à‑dire exiger la participation d'un spécialiste de la maladie de la personne lorsque les professionnels chargés de l'évaluation ne possèdent pas cette expertise. Une mesure similaire pourrait être mise en place si jamais l'admissibilité à l'aide médicale à mourir était étendue aux mineurs matures.
    La disponibilité de ce genre de services est également préoccupante. Elle est assez inégale d'une région à l'autre du Canada. Par exemple, il peut être assez facile d'obtenir une consultation psychiatrique si vous vivez au centre-ville de Toronto, mais beaucoup moins si vous vivez dans une région rurale.
    Ce sont là mes observations préliminaires. Je suis impatient d'en discuter avec les membres du Comité.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Salte.
    Merci à nos deux témoins.
    Nous allons amorcer notre premier tour de questions.
    Madame Vien, vous pouvez commencer.

[Français]

    Merci, monsieur Salte et madame Macintosh, d'avoir pu vous rendre disponibles ce soir pour répondre à nos questions.
    J'ai une première question pour Mme Macintosh.
    Dans le cas de mineurs matures, vous avez soutenu qu'une approche différente était nécessaire et que d'autres mesures de sauvegarde devaient être envisagées. Pourriez-vous rapidement nous brosser un tableau de ce qui devrait être envisagé comme nouvelles mesures de sauvegarde?

[Traduction]

    Tout d'abord, je tiens à dire que l'approche mise en place par des cliniciens qui travaillent auprès de mineurs qui souhaitent décider eux-mêmes de leur traitement médical — par exemple, interrompre ou refuser un traitement susceptible de les maintenir en vie — est assez rigoureuse pour permettre à chaque province d'évaluer la capacité d'un mineur dans cette situation.
    Cela dit, si je pouvais mettre en place les mesures dont je rêve, je voudrais être certaine qu'il soit obligatoire d'examiner toutes les options de soins palliatifs et de bien les comprendre. J'aimerais que des lignes directrices plus détaillées soient élaborées par différentes associations de soins de santé et de soins palliatifs afin d'aider les jeunes à prendre des décisions, et que ces lignes directrices soient mises à la disposition du public et soumises à un examen public.
    Je commencerais par ces mesures.
    J'aimerais aussi que des équipes participent au processus. J'aimerais que des équipes pédiatriques...

[Français]

    J'ai peu de temps, madame Macintosh, mais vous pourriez faire parvenir vos réflexions par écrit au Comité sur ces mesures de sauvegarde. Je vous en serais reconnaissante.
    J'ai une deuxième question pour vous. Vous avez parlé d'une obligation de consulter les parents. Si les parents devaient être en désaccord, qu'est-ce qui serait prépondérant à ce moment-là? Serait-ce le choix de l'adolescent, du mineur mature, ou celui des parents?

[Traduction]

    Cela dépendrait de la conclusion à laquelle l'équipe des soins de santé en est arrivée concernant la capacité décisionnelle du jeune.
    Ces décisions sont prises collectivement par les familles. Mon collègue, M. Salte, a évoqué le concept de l'autonomie relationnelle. La décision d'interrompre ou de refuser un traitement de maintien en vie se prend lentement et consciencieusement au fil des conversations.
    Je n'exigerais pas le consentement parental. Je pense qu'il n'est pas nécessaire, mais je...

  (1950)  

[Français]

     Merci beaucoup, madame Macintosh.
    Ma question s'adresse aux deux témoins.
    Jugez-vous que la population canadienne est maintenant prête à accepter que les mineurs matures puissent être admissibles à l'aide médicale à mourir? Est-ce le sentiment que vous avez?

[Traduction]

    Dans la mesure où il existe des données probantes, il s'agit de celles présentées dans le rapport du Conseil des académies canadiennes. L'opinion publique semble assez divisée par rapport à ce qu'elle était il y a quelques années.
    Ce que je peux dire, c'est qu'avec le temps, le concept général de l'AMM — que ce soit pour des mineurs matures ou d'autres personnes — est beaucoup plus largement accepté, et cette acceptabilité croissante de l'aide médicale à mourir fait maintenant partie de ce que croit le public. À ma connaissance, aucun sondage mené au cours des récentes années ne portait sur ce que la population canadienne pense de l'idée de rendre l'aide médicale à mourir accessible à des mineurs matures.
    D'après l'information dont j'ai pris connaissance, elle accepte que des mineurs matures aient le droit de prendre des décisions concernant les traitements qu'ils reçoivent, y compris lorsque cela peut entraîner leur décès. Il se peut fort bien que cela ne soit pas une grande préoccupation au sein de la population, à condition que des mesures de sauvegarde et autres soient en place pour donner aux gens l'assurance que ces décisions sont prises en toute connaissance de cause.
    Je vous remercie.
    Merci. Vos cinq minutes sont écoulées.
    Madame MacIntosh, cette ronde de questions est maintenant terminée.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Monsieur Arseneault, vous avez cinq minutes à votre disposition.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Mes questions s'adressent à nos deux témoins, que je remercie de leur présence.
    Je voudrais vous dire d'abord que tous les membres de ce comité mixte sont honorés d'y siéger, mais nous avons un poids très lourd sur les épaules. Nous devons discuter de la question des mineurs matures.
    Madame Macintosh, vous nous dites que, peu importe ce qui se passe, il pourrait devenir inconstitutionnel de refuser l'aide médicale à mourir aux mineurs matures.
    J'aimerais qu'on se reporte à l'affaire A.C. c Manitoba, une décision qui a été rendue en 2009. Elle concernait une jeune femme mineure qui refusait un traitement médical. Selon la Cour suprême du Canada, il était de son droit de refuser qu'on lui administre un traitement médical contre son gré. Dans l'affaire Carter c Canada, c'est tout à fait le contraire: on demande une aide médicale à mourir. On veut que les services médicaux offrent une aide médicale à mourir et qu'on modifie le Code criminel pour permettre que cela se fasse.
    D'un côté, l'arrêt A.C. c. Manitoba statue qu'une personne a le droit de refuser des traitements médicaux. Cela va de soi, cela se comprend. De l'autre côté, dans l'arrêt Carter, on veut l'aide médicale à mourir.
    Comment pensez-vous que la Cour pourrait rendre inconstitutionnelle l'aide médicale à mourir pour les mineurs matures?

[Traduction]

    Dans l'arrêt Carter, la Cour suprême du Canada a rejeté la distinction entre ne pas donner de traitement et prodiguer un service médical. Les juges ont conclu qu'il s'agissait d'une fausse dichotomie, ce qui, à mon avis, constitue une réponse exhaustive à la question.
    Je signale que le raisonnement dans l'arrêt Carter s'appuyait en grande partie sur les motifs de la décision A.C. Je ne crois pas que ce soit un problème réel.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Salte, j'aimerais connaître votre opinion sur la même question.

[Traduction]

    Je suis tout à fait d'accord avec la professeure MacIntosh. L'arrêt Carter s'appuie sur l'idée qu'il est inconstitutionnel de refuser à des gens en proie à des souffrances intolérables le droit de mourir dans la dignité et la compassion. Il n'y a rien dans cet arrêt qui dit que vous pouvez exercer ce droit seulement si vous avez plus de 18 ans, mais pas si vous avez moins de 18 ans.
    Là encore, je ne crois pas qu'il soit absolument essentiel en l'instance de tenir compte de la distinction entre mettre fin activement à sa vie et refuser un traitement, ce qui a pour effet de mettre fin à la vie. Dans la mesure où cela est pertinent, cependant, le tribunal de première instance dans l'affaire Carter a radicalement rejeté cela comme étant une fausse dichotomie et ajouté que la dichotomie n'existait pas. Le tribunal reconnaît aux gens le droit de prendre des décisions qui auront pour effet de mettre fin à leur vie.
    Je vous remercie.

  (1955)  

[Français]

     Je vous remercie beaucoup. Cela répond à ma question.
    Ma prochaine question s'adresse aussi aux deux témoins.
    Selon vous, nous pourrions ajouter des mesures de sauvegarde supplémentaires pour ce qui est des mineurs matures. Les deux témoins semblent avoir retenu la mesure selon laquelle il faudrait consulter les parents. Il y a une différence entre consulter les parents et obtenir leur permission. Comment voyez-vous cela?
    Je pense qu'on vous a déjà posé la question, mais j'aimerais y revenir. Qu'arriverait-il si les parents refusaient de donner leur accord?
    M. Salte a fait allusion au fait que des parents pourraient, le cœur brisé, refuser que leur enfant mineur décide de mourir pour des raisons médicales et des souffrances incontrôlables.
    J'aimerais connaître votre opinion. Doit-on consulter les parents ou obtenir leur permission?
    Je demande à Mme Macintosh de répondre la première à la question.

[Traduction]

    Merci.
    À mon avis, si l'équipe de soins a déterminé que le jeune est apte à prendre des décisions, qu'il est stable sur les plans psychologique, émotionnel et psychiatrique, qu'il comprend la décision à prendre et qu'il en comprend les conséquences et l'irréversibilité, je pense que c'est un affront à sa dignité et à ses droits fondamentaux garantis par la Charte, que ses parents puissent annuler sa décision et faire en sorte que le résultat dépende de leur consentement. C'est pourquoi il est très important, à mon avis, de faire participer les parents tout au long du processus décisionnel et, idéalement, d'en arriver à une décision consensuelle.

[Français]

    Je vous remercie.
    Monsieur Salte, avez-vous quelque chose à ajouter?

[Traduction]

    Oui, et je suis encore une fois d'accord avec madame MacIntosh.
    Ce que j'essayais de dire, de toute évidence maladroitement, c'est que si le consentement est obligatoire, cela entraîne des conséquences non voulues qui pourraient être problématiques. En fait, vous demandez aux parents d'accepter qu'on mette fin à la vie de leur enfant dans une situation où ce dernier est en proie à des souffrances intolérables.
    C'est en partie pour cette raison que je ne suis pas d'accord avec l'idée du consentement obligatoire. Je suis plutôt en faveur de la consultation des parents et de leur participation au processus décisionnel. En supposant que l'enfant est apte à prendre une décision, ce qui est évidemment le fondement même de la doctrine du mineur mature, il revient alors à ce dernier de prendre la décision finale, mais seulement après en avoir discuté avec ses parents et ses proches afin que la décision soit prise conjointement.
    Toutes les données probantes concernant le processus décisionnel à la fin de la vie de jeunes indiquent que ces décisions sont pratiquement toujours prises conjointement. Je m'attends donc à ce que ce soit...
    Je vous remercie...
    ... très rare que les parents s'y opposent catégoriquement lorsque cette discussion a eu lieu.
    Je vous remercie, monsieur Salte.

[Français]

    Je remercie les deux témoins.
    Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Thériault, c'est maintenant à vous. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais continuer sur le même sujet.
    Madame Macintosh, en réponse à ma collègue Mme Vien, vous avez mentionné l'obligation d'avoir des mesures de protection supplémentaires.
    Personnellement, ce que je comprends, c'est qu'il ne s'agit pas d'augmenter les critères ou les exigences dans les deux voies, mais plutôt de s'assurer qu'il y a, sur le plan des instances réglementaires au Québec, dans les provinces et dans les territoires, des lignes directrices qui encadrent bien la pratique de façon à faire en sorte que les évaluations soient plus adéquates.
    Vous ne parlez pas d'inclure cela dans le Code criminel. Vous ne demandez pas au législateur d'augmenter les critères des deux mesures de sauvegarde.

[Traduction]

    Je suis ouverte à l'ajout de nouveaux critères parmi les sauvegardes déjà en place et à leur inclusion éventuelle dans le Code. Si nous ajoutons de nouveaux critères...

  (2000)  

[Français]

    Quels seraient ces critères?

[Traduction]

     La consultation avec les parents est un critère très important, à mon avis. En général, je souhaite que notre approche concernant les décisions des mineurs matures soit normalisée dans toutes les provinces de manière cohérente. La seule chose sur laquelle j'insisterais beaucoup, c'est que la consultation parentale soit intégrée dans le Code.

[Français]

     Monsieur Salte, qu'en pensez-vous?

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je suis un régulateur. Je travaille dans le milieu de la réglementation professionnelle depuis longtemps. L'un des rôles de tout organisme de réglementation d'une profession est de veiller au respect des normes professionnelles. Ce qui me préoccuperait, si ce critère était intégré dans une forme de règlement ou de loi, c'est qu'il deviendrait difficile de le modifier et que son application pourrait être assez rigide. Je serais en faveur de l'inclusion à la loi de mesures minimales de protection. La consultation est un critère sur lequel nous sommes tous les deux d'accord, je pense.
    Concernant l'ajout d'exigences, je pense que vous pouvez vous fier aux organismes de réglementation de l'ensemble du Canada, comme nous l'avons fait. Lorsque nous conseillons nos membres à cet égard, nous leur disons ce que nous attendons d'eux si jamais ils devaient participer à l'aide médicale à mourir.
    Je vous remercie.

[Français]

    Sur la question de la consultation des parents, nous avons peu de données probantes. Peu de gens peuvent venir témoigner concernant leur pratique dans de tels cas, puisque ce n'est pas en vigueur ici. Seulement deux pays admettent cette pratique.
    Selon ce que vous nous dites tous les deux, contrairement aux Pays‑Bas, si nous devions aller de l'avant au Canada, il ne serait pas question de définir un âge où les parents auraient un droit de veto, par exemple, lorsque l'enfant aurait entre 12 et 16 ans, et de leur enlever ce droit lorsqu'il aurait entre 16 et 18 ans. Il s'agit simplement d'établir la capacité décisionnelle. Serait-ce le cas même entre 12 et 16 ans?

[Traduction]

    Allez‑y, madame MacIntosh.
    Plus la personne est jeune, moins il est probable qu'elle soit apte à prendre une décision. Lorsque j'ai suggéré un seuil potentiel de 12 ans, j'ai dit cela parce que les données psychologiques démontrent que c'est l'âge minimal possible auquel une jeune personne possède le niveau de discernement nécessaire. Cela dit, je fais grandement confiance aux équipes médicales chargées de l'évaluation pour déterminer si une personne fait un choix de son plein gré et si elle comprend vraiment ce choix implique. Je suis donc à l'aise avec le fait qu'il n'y ait pas de limite d'âge à cet égard.
    Les cinq minutes sont presque écoulées. Monsieur Thériault, je suis désolée, mais nous n'avons plus de temps.
    Nous allons poursuivre avec M. MacGregor.

[Français]

    J'aurais aimé entendre l'opinion de M. Salte là-dessus.

[Traduction]

    Monsieur Salte, nous vous écoutons.
    Très brièvement, la capacité décisionnelle dépend grandement de la nature de la décision à prendre. Comme nous parlons d'une décision très grave qui entraînera la mort, la capacité décisionnelle qui sera requise pour obtenir l'aide médicale à mourir sera fondamentalement différente de celle requise pour être traitée pour une entorse à la cheville.
    J'ai une grande confiance dans la capacité des professionnels de la santé de reconnaître ce concept et de le prendre au sérieux. Je ne peux pas imaginer qu'un médecin s'engage dans ce processus s'il n'est pas pleinement convaincu que la jeune personne a parfaitement compris les conséquences de sa décision.
    Merci beaucoup.
    Monsieur MacGregor, vous disposez de cinq minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci à nos deux témoins d'être présents ici aujourd'hui et de nous aider dans cette entreprise.
    Vous avez tous les deux dit que l'aide médicale à mourir devrait être fondée sur la capacité décisionnelle. Dans ma province, la Colombie-Britannique, et je suis certain que c'est pareil dans de nombreuses autres provinces, un évaluateur doit déterminer, dans l'intérêt de la santé de l'enfant, si ce dernier comprend la nécessité des soins qui lui sont prodigués, ce que ces soins impliquent, leurs bienfaits et les risques qu'ils posent; d'après ce que vous nous avez tous les deux dit, un régime d'aide médical à mourir serait fondé sur les mêmes principes fondamentaux.
    Il arrive souvent que des enfants, en particulier des enfants vivant avec une incapacité ou une maladie chronique et incurable, soient atteints d'une même maladie qui les rend admissibles à l'aide médicale à mourir, mais dont les expériences avec le système médical sont aux antipodes. Vous en avez peut-être des exemples. Prenons deux enfants dont un a eu la chance de naître dans une famille riche ou à l'aise et a eu accès à toute une gamme de services, tandis que l'autre vient d'une famille brisée, a vécu dans des conditions socioéconomiques pénibles et n'a jamais eu accès à ces traitements. Ce que nous avons entendu ici au comité, c'est une crainte très réelle exprimée par des personnes de nombreux groupes de la société qui ont l'impression que si elles n'ont jamais eu ces choix pour obtenir ces services médicaux, elles n'auront pas vraiment le choix à la fin.
    Madame MacIntosh, je vais commencer par vous. Que pouvons-nous faire pour dissiper cette perception bien réelle et pour corriger les inégalités qui existent entre les niveaux de soins dans deux situations complètement différentes, lorsque deux personnes arrivent à un moment de leur vie où elles doivent prendre cette décision de la plus haute importance?

  (2005)  

    J'espère vraiment que si une personne handicapée se trouvant dans une situation de pauvreté et d'exclusion comme celle que vous venez de décrire faisait appel à un médecin ou à une équipe de soins, le médecin comprendrait la situation de la personne et l'orienterait vers un endroit plus approprié et l'aiderait à se prévaloir des services de soutien en place ou qui devraient l'être. Je ne peux imaginer qu'un médecin soit d'accord pour dire que, dans ces circonstances, la personne répond aux critères de l'aide médicale à mourir.
    Monsieur Salte, voulez-vous faire un commentaire? C'est un sujet récurrent que nous entendons.
    Et ce même sujet récurrent a fait l'objet de discussions concernant les adultes, parce que je participe à ces discussions depuis longtemps. Ce n'est pas une réponse parfaite, mais toutes les données probantes indiquent que les gens qui ont actuellement accès à l'aide médicale à mourir sont, en fait, des gens instruits et avantagés sur le plan socioéconomique, et non le contraire. Les préoccupations concernant l'accès non justifié de personnes désavantagées ne se posent tout simplement pas.
    Il est vrai que ce qu'est une souffrance intolérable dépendra, dans une certaine mesure, de l'environnement dans lequel vit la personne, et les évaluateurs sont parfois étonnés de constater que des personnes en proie à des souffrances intolérables, selon presque tous les critères objectifs, refusent de recourir à l'aide médicale à mourir, tandis que d'autres, qui vivent dans un inconfort physique ou des douleurs moindres, diront que leur souffrance est intolérable.
    Bien qu'il s'agisse d'une préoccupation bien réelle, l'autre préoccupation que j'aurais, ce serait que vous disiez qu'aucun mineur ne peut avoir accès à l'aide à mourir, en se basant sur cette crainte théorique qu'une personne puisse un jour se retrouver dans cette situation et être désavantagée, ce qui serait très malheureux. Obliger ces jeunes à continuer à endurer des souffrances intolérables jusqu'à l'âge de 18 ans, ce n'est pas une approche appropriée.
    En terminant, j'essaie de déterminer dans quelle mesure la capacité décisionnelle d'une personne est influencée par les événements de sa vie et si un évaluateur médical est capable d'en tenir compte. Je suppose que c'est la grande question à laquelle nous essayons de répondre.
    Je vous remercie tous les deux de vos interventions et de l'aide que vous nous avez apportée dans notre étude.
    Merci.
    Je vais céder la place à notre coprésident, M. Garneau.
    Je vous remercie, sénatrice Martin.
    Nous allons maintenant passer aux questions des sénateurs.

[Français]

     Sénatrice Mégie, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à Mme Macintosh.
    En 2016, vous avez publié un article intitulé: « Carter, Medical Aid In Dying, and Mature Minors ». Dans cet article, vous avez passé en revue les administrations où les mineurs sont inclus dans les régimes d'AMM. Vous avez démontré le peu de preuves empiriques qui existaient, à ce moment, concernant les demandes des mineurs.
    Maintenant, en 2022, avez-vous trouvé d'autres preuves et avez-vous réussi à recueillir d'autres informations concernant les demandes d'AMM des mineurs?

  (2010)  

[Traduction]

    Voulez-vous dire au Canada ou dans des pays où les jeunes peuvent recourir à l'aide médicale à mourir?

[Français]

    Je parle des autres administrations, parce que, au Canada, ce n'est pas encore permis.

[Traduction]

    Ce n'est pas encore permis.
    Dans une récente publication, la Société canadienne de pédiatrie fait état des résultats d'un sondage mené auprès de pédiatres pour savoir s'ils avaient reçu des demandes d'aide médicale à mourir ou des demandes d'information à ce sujet au cours des dernières années. Au Canada, il y a eu un certain nombre de demandes ou de demandes d'information. Je crois que 17 ont été documentées. Je pourrai vous faire parvenir cette information plus détaillée plus tard.
    Dans les pays où cette pratique est légale, en Belgique et aux Pays‑Bas, le nombre de demandes est encore très faible.

[Français]

    J'ai une brève question à poser à M. Salte.
    Quelle est la vraie définition de « mineur mature »?

[Traduction]

    Par « mineur mature », on entend une personne qui a la capacité de prendre la décision qu'on lui demande de prendre. Cette personne doit être en mesure de comprendre les risques et les avantages de la décision qu'elle est appelée à prendre, d'en comprendre pleinement les répercussions, d'être apte à prendre une décision éclairée et d'en comprendre toutes les implications. C'est ma compréhension d'un mineur mature.
    Les gens préfèrent utiliser l'expression « capacité décisionnelle » à « mineur mature ». Je vous remercie.

[Français]

    Je vous remercie.
    Merci, sénatrice Mégie.

[Traduction]

    Sénateur Kutcher, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence.
    J'ai trois questions et j'aimerais que vous y répondiez tous les deux. Les réponses ne devraient pas être longues.
    Premièrement, est‑ce que l'aide médicale à mourir pourrait être prodiguée à un jeune en situation de crise? Deuxièmement, dans quelle mesure est‑il courant qu'il y ait un désaccord insoluble entre les parents et leur enfant concernant l'aide médicale à mourir? Troisièmement, dans certains pays, l'AMM est prodiguée à des mineurs matures. Le Canada pourrait‑il tirer des leçons de ces expériences, par exemple, les choses à éviter ou à appliquer?
    Madame MacIntosh, vous pourriez commencer.
    Une jeune personne en crise ne serait pas admissible à l'AMM, pas plus qu'elle le serait pour toute autre décision, par exemple, pour refuser un traitement de maintien en vie. L'état émotionnel de ces personnes est pris en compte pour évaluer si, dans le cas de cette décision, le mineur est capable de comprendre pleinement la décision qu'on lui demande de prendre et ses conséquences. Pour moi, c'est un non catégorique.
    Quant à savoir si les désaccords insolubles au sujet de l'AMM sont courants, je n'ai aucune information à ce sujet.
    Concernant les leçons à tirer des expériences des autres pays, les comités d'examen font partie des pratiques que nous examinons. Dans tous les cas où l'AMM sera prodiguée à un mineur, ou à un adulte si je me souviens bien, un rapport doit être déposé auprès d'une instance centrale qui fera une révision complète du cas. C'est l'une des sauvegardes.
    Je pense que nous nous sommes beaucoup inspirés des pratiques mises en place dans d'autres pays au moment de la création du régime d'aide médicale à mourir il y a quelques années.
    Je vais maintenant céder le micro.
    Merci beaucoup.
    Je vais d'abord répondre à la deuxième question, parce que je ne crois pas qu'il existe de données probantes portant expressément sur l'aide médicale à mourir. Il existe toutefois passablement de données probantes concernant de nombreuses autres décisions difficiles ayant un impact sur la vie. Le nombre de désaccords importants entre des parents et leur enfant est peu élevé, mais nécessairement plus élevé que sur d'autres enjeux, par exemple, sur l'avortement, au sujet duquel il peut y avoir de fortes divergences d'opinions sur le plan éthique ou religieux entre les parents et leur enfant. Concernant les soins de santé, peu de profonds désaccords ont été signalés. Bien entendu, comme l'AMM n'est pas illégale au Canada, cela n'a pas vraiment posé de problème en ce qui concerne l'aide médicale à mourir prodiguée à des mineurs matures.
    Concernant les leçons à tirer des autres pays, il est certain que la Belgique et les Pays‑Bas sont plus restrictifs quant aux critères d'admissibilité par rapport à ceux que j'appliquerais si je devais prendre cette décision. Je pense aussi qu'il est problématique que des comités interviennent dans ce genre de situations, sauf en cas d'extrême nécessité. La meilleure approche consiste donc, je le répète, à se fier au jugement des professionnels de la santé qui sont tenus de prendre ces décisions en s'appuyant sur les conseils des organismes de réglementation et sur le consentement éclairé qu'ils doivent obtenir à l'égard de l'ensemble des pratiques qu'ils exécutent, notamment l'aide médicale à mourir.
    Enfin, si une personne est en crise et qu'il s'agit d'une situation temporaire, je suis tout à fait d'accord pour dire qu'en raison de son état d'esprit, qui risque de changer ultérieurement, la personne ne sera pas admissible à l'aide médicale à mourir. Si cela soulève des inquiétudes, une période de réflexion pourrait alors être envisagée, c'est‑à‑dire une période d'attente obligatoire entre la présentation de la première demande et le moment où l'aide médicale à mourir pourrait être prodiguée, comme cela se fait pour les personnes dont la mort n'est pas raisonnablement prévisible en vertu de la loi actuelle.

  (2015)  

    Merci, sénateur Kutcher.

[Français]

     Sénateur Dalphond, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai deux questions que je vais poser tout de suite.
    Ma première question est la suivante.
    L'accès à l'aide médicale à mourir pour les mineurs matures que vous proposez s'appliquerait-il autant dans le cas où la mort est imminente que dans celui où la mort n'est pas imminente? La possibilité d'obtenir l'aide médicale à mourir lorsque la mort n'est pas imminente a été ajoutée dans le projet de loi C‑7.
    Ma deuxième question est la suivante.
    Au fond, les mesures supplémentaires de protection que vous proposez ne sont-elles pas simplement des variantes des mesures habituelles qui sont suivies dans tous les cas d'aide médicale à mourir? Je pense à l'évaluation appropriée de la capacité à consentir de la personne et à la nécessité de s'assurer que la demande est libre et volontaire et que la personne est capable de faire cette demande.
    Cela pourrait par exemple être une personne veuve de 70 ans qui vit seule, abandonnée par sa famille ou par ses autres proches.
    Ne s'agit-il pas toujours des mêmes critères? Au fond, il s'agit de découvrir si la capacité décisionnelle de la personne est vraiment toujours là en fonction de sa situation.

[Traduction]

    Certes, la consultation obligatoire des membres de la famille n'est pas exigée dans le régime actuel. Si je suis admissible à l'aide médicale à mourir et si je décide de ne pas en informer les membres de ma famille, j'ai tout à fait le droit de ne pas le faire. Quant à savoir si les médecins sont prêts à prodiguer l'aide à mourir dans ces circonstances, c'est une tout autre question, étant donné qu'aucun médecin n'est tenu de fournir l'aide médicale à mourir, même si la personne répond techniquement aux critères.
    Je pense donc qu'il est important d'avoir des critères supplémentaires. La professeure MacIntosh a parlé, et cela mérite réflexion, de la pertinence d'ajouter des sauvegardes pour susciter un certain degré de confiance. Il faut aussi s'assurer que le public a confiance que la personne a pris cette décision de son propre gré, en étant pleinement informée et en comprenant toutes les implications du processus qui a mené à cette décision.
    Personnellement, je ne suis pas en faveur de cela parce que je pense que la profession médicale sera en mesure de bien gérer la situation. Je peux toutefois comprendre que le public souhaiterait que les critères soient renforcés.
    Est‑ce que cela serait vrai dans les deux cas de figure, c'est‑à‑dire dans le cas d'une mort prévisible et dans le cas d'une mort non prévisible?
    Je pense que ce le serait davantage dans les situations où la mort est raisonnablement prévisible. On pourrait avancer des arguments constitutionnels intéressants, parce que la décision rendue au Québec conclut que l'aide médicale à mourir doit être accessible aux adultes, que leur mort soit raisonnablement prévisible ou non.
    Selon moi, la décision d'autoriser des adolescents à recourir à l'aide médicale à mourir uniquement lorsque leur mort est raisonnablement prévisible serait une décision politique qui pourrait faire l'objet d'une contestation constitutionnelle. D'une manière générale, il serait plus facile de recueillir un appui pour les personnes dont la mort est raisonnablement prévisible.
    Sur le plan constitutionnel, toutefois,...

  (2020)  

    J'aimerais demander à Mme MacIntosh de compléter cette réponse brièvement.
    Je n'ai pas grand-chose à ajouter.
    Je pense que l'idée d'ajouter des mesures de sauvegarde vise à renforcer la transparence et la confiance du public, à s'assurer que les gens comprennent le processus en place pour faire en sorte que les vulnérabilités des jeunes sont reconnues et prises en compte.
    Je vous remercie.
    Madame Wallin, c'est à vous.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais simplement entendre ce que Mme MacIntosh répond à M. Salte qui vient d'exprimer ses réserves au sujet du recours à des comités d'examen et des complications que cela pourrait poser, au lieu de se fier au jugement des évaluateurs et des professionnels de la santé qui interviennent directement auprès des patients.
    Selon moi, les comités d'examen ne devraient pas être des intermédiaires, parce qu'ils ne peuvent pas réagir assez rapidement. Je ne crois pas qu'ils puissent faire leur examen durant cette période de 10 jours et déterminer si la demande a été examinée comme il se doit.
    Personnellement, je souhaiterais la mise en place d'un organe collectif qui recueillerait toute l'information sur chaque cas où l'AMM a été prodiguée à un mineur afin que nous puissions comprendre ce qui se passe dans cette pratique et avoir un niveau supplémentaire d'examen.
    Je sais que cela alourdirait les formalités administratives et que ce n'est pas ce que nous souhaitons, mais cela renforcerait ma confiance dans le système, et pas seulement la mienne, si nous comprenions...
    C'est en fait un examen réalisé ex post facto visant à établir des pratiques et à examiner les résultats.
    C'est exact.
    Oui, c'est utile.
    Monsieur Salte, j'ai trouvé intéressant que vous suggériez de parler de « capacité décisionnelle » de préférence à « mineurs adultes », parce que cela semble plus clair d'utiliser ces termes, comme l'a dit la sénatrice Mégie, pour définir ces concepts.
    Y a‑t‑il d'autres situations où le concept de la « capacité décisionnelle » est reconnu et utilisé couramment et où il a un poids juridique?
    À la table des discussions du Conseil des académies canadiennes, les participants ont dit que l'expression « capacité décisionnelle » était de beaucoup préférable à « mineurs matures », parce que même si l'expression juridique « mineurs matures » est bien comprise des avocats et des juges, elle ne l'est pas autant du grand public. L'expression « capacité décisionnelle » décrit mieux le concept que vous souhaitez avoir.
    Ce que je comprends de ces échanges, c'est que les professionnels de la santé n'ont pas l'habitude de parler de « mineurs matures ». Ils parlent plutôt de personnes dotées d'une « capacité décisionnelle », que cette personne ait 14 ou 94 ans. C'est la même question qui se pose.
    Diriez-vous que ce concept est utilisé dans votre pratique du droit, comparativement à quelqu'un qui traite uniquement de l'aspect médical des questions de droit ou qui travaille dans le domaine médical? Ce concept est‑il reconnu et accepté dans d'autres milieux?
    À ma connaissance, il est assez bien accepté dans les échanges entre médecins ou entre un médecin et un autre praticien de la santé, mais le terme de droit utilisé dans les décisions des tribunaux, notamment par les avocats, c'est « mineur mature ». Vous devez déterminer si vous voulez reprendre l'expression juridique et sa définition, qui a été élaborée par divers tribunaux, avec ses lacunes potentielles, ou si vous voulez utiliser un terme que les professionnels de la santé comprennent mieux dans le cadre de leurs fonctions quotidiennes.
    Je vais revenir à Mme MacIntosh. Même si vous...
    Vous avez dit que 12 ans est un âge que vous pourriez accepter pour un jeune qui démontre une capacité décisionnelle. Est‑ce que cet âge est reconnu ailleurs dans le monde ou dans un autre domaine?

  (2025)  

    Cet âge est mentionné dans la littérature psychologique portant sur les jeunes et la prise de décisions médicales. C'est l'âge le plus jeune qui a été recensé et il est considéré comme plausible qu'un jeune de cet âge soit apte à prendre une décision.
    Très bien. Je vous remercie.
    Merci, sénatrice Wallin.
    Sénatrice Martin, c'est à vous.
    Je vous remercie tous les deux pour vos témoignages.
    Je suis encore un peu troublée de voir que des enfants de 12 ans soient considérés comme des ados, comme on les appelle. Dans tous les autres contextes, le consentement parental est requis, même pour la prise de photos à l'école. J'ai été enseignante pendant 21 ans. Je suis encore très troublée par ce chiffre. À mon avis, le consentement parental serait essentiel.
    Ne craignez-vous pas que l'élargissement de l'admissibilité aux enfants risque d'avoir une incidence sur les enfants pris en charge par le réseau de la protection de la jeunesse, les jeunes autochtones et les enfants handicapés? Dans son rapport, le Conseil des académies canadiennes fait état d'un manque de documentation à l'égard de ces enfants et du fait que leurs voix ne sont pas entendues.
    De nombreux témoins nous ont répété que les communautés autochtones n'ont pas été consultées. Il semble encore très prématuré d'envisager l'élargissement de l'AMM et cela va vraiment à l'encontre de ce que nous essayons de faire, c'est‑à‑dire consulter de nombreux groupes parmi les plus vulnérables. Que pensez-vous de cela?
    Madame MacIntosh?
    Si un jeune en détresse ou en famille d'accueil cherche à obtenir l'aide médicale à mourir auprès d'un médecin, je pense que ce sont des facteurs qui inciteront le médecin à conclure que ce n'est pas une décision qu'il a prise librement.
    Je ne sais pas si vous entendez les voix des familles qui ont un enfant atteint d'une maladie complexe et douloureuse. J'espère que oui. J'espère aussi que vous continuerez à consulter activement les communautés autochtones, parce que je ne peux certes pas prétendre parler en leur nom ici.
    Monsieur Salte, qu'en pensez-vous?
    Merci.
    L'un des grands défis auxquels a été confronté le Conseil des académies canadiennes est le fait que les points de vue des communautés autochtones sont loin d'être uniformes. Il y a une très grande diversité d'opinions. Certains groupes s'opposeraient fort probablement à tout concept d'aide médicale à mourir. D'autres seraient plus ouverts. C'est tout ce que le Conseil a réussi à déterminer quant au point de vue des communautés autochtones. La consultation est certes un aspect important de notre façon de fonctionner au Canada. Je conviens qu'aucune instance n'a été mandatée pour mener ces consultations.
    Si le but est vraiment d'alléger la souffrance des personnes aux prises avec des douleurs intolérables, je me demanderais plutôt s'il est approprié de penser qu'un jeune de 16 ans en phase terminale, atteint d'une maladie incurable qui ne peut être contrôlée, devra attendre que nous prenons notre décision, parce qu'il n'y a pas assez eu de consultations. Personnellement, je pense que cette approche est inacceptable.
    Je vous remercie.
    Je remercie nos deux témoins, madame MacIntosh et monsieur Salte. Merci d'avoir pris le temps de répondre aux questions des membres du Comité et merci également pour vos observations préliminaires sur la délicate question des mineurs matures. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Sur ce, chers collègues, nous allons clore la discussion avec ce groupe de témoins et nous préparer à accueillir le prochain.
    La séance est suspendue temporairement. Je vous remercie.

  (2025)  


  (2030)  

    Nous reprenons nos travaux avec notre troisième groupe de témoins.
    Avant de commencer, je signale à nos témoins d'attendre que la coprésidente ou moi-même vous nomme avant de prendre la parole. Vous devez toujours adresser vos commentaires aux coprésidents. Quand vous parlez, veuillez vous exprimer lentement et clairement par respect pour nos interprètes, étant donné que la réunion de ce soir se déroulera en anglais et en français.
    Le service d'interprétation offert durant cette vidéoconférence est le même que celui offert pour une réunion en personne. Au bas de votre écran, vous avez le choix entre le parquet, l'anglais ou le français. Quand vous n'avez pas la parole, veuillez mettre votre microphone en sourdine.
    Sur ce, je souhaite la bienvenue à nos témoins du troisième groupe qui aborderont la question de l'aide médicale à mourir dans le cas de mineurs matures.
    Nous accueillons ce soir deux témoins, M. Franco Carnevale, professeur et éthicien clinique, ainsi que la Dre Alisha Montes, qui témoignera à titre personnel.
    Je vous remercie de vous joindre à nous.
    Nous commencerons par entendre les observations préliminaires de M. Carnevale et ensuite celles de la Dre Montes.
    Chacun de vous dispose de cinq minutes pour son allocution préliminaire.
    Monsieur Carnevale, veuillez commencer.
    Je suis honoré de témoigner devant ce comité spécial mixte.
    Je m'adresse à vous à titre d'éthicien clinique œuvrant auprès de jeunes, notamment d'enfants et d'adolescents mourants et de leurs familles. Je vous parle également à titre de chercheur en éthique pédiatrique. J'ai fondé et je dirige un programme de recherche sur l'enfance appelé Voix de l'enfant, à l'Université McGill. Je suis ici pour vous dire ce que j'ai appris en travaillant avec des jeunes, leurs familles et les professionnels qui travaillent auprès d'eux.
    Mes observations sont tirées d'un rapport qui m'a été commandé en 2021 par le Dr Michel Bureau, président de la Commission de fin de vie du Québec, que j'appellerai mon rapport Québec 2021.
    Le Dr Bureau m'a demandé de recenser les opinions au sein de la communauté de l'Université McGill concernant l'inclusion potentielle de certains mineurs dans les critères d'admissibilité à l'aide médicale à mourir, ou AMM, afin que sa commission puisse les prendre en considération dans ses travaux. Je lui ai présenté mon rapport le 27 mai 2021 et il m'a autorisé à le transmettre au Comité. Je l'ai joint au texte de mon exposé.
    De plus, j'ai fait partie d'un groupe de travail pancanadien de 14 experts sur l'admissibilité des mineurs matures à l'AMM. Ce groupe a été constitué par le ministre de la Justice et la ministre de la Santé du Canada pour faire un examen des données probantes relatives à l'admissibilité de mineurs matures à l'AMM. Les résultats de notre analyse sont documentés dans notre rapport final, publié en 2018. Ce rapport est probablement le plus exhaustif et le plus rigoureux sur ce sujet, et j'espère que le Comité l'examinera sérieusement.
    Une préoccupation majeure mise en évidence dans ce rapport est l'absence de participation des jeunes aux discussions sur l'accès des mineurs à l'AMM. Pour corriger cette lacune, j'ai soumis en guise de preuve des entretiens vidéo que j'ai menés avec de jeunes leaders autochtones vivant avec des incapacités au Holland Bloorview Kids Rehabilitation Hospital de Toronto. Pour plus de détails, veuillez consulter les pages 143 et 144 de la version française du rapport. Le rapport est également disponible en anglais.
    Dans le cadre de la préparation de mon rapport Québec 2021, j'ai consulté le Conseil consultatif jeunesse et le Conseil consultatif des jeunes autochtones du programme de recherche en éthique de l'enfance intitulé Voix de l'enfant. J'ai également consulté des représentants des familles au sein des services pédiatriques, des praticiens faisant autorité en médecine et en soins infirmiers dans différents services cliniques, des chercheurs en soins palliatifs pédiatriques, le comité d'éthique clinique du centre de soins pédiatriques Le Phare, Enfants et familles, ainsi que le comité d'éthique en santé mentale pour enfants et adolescents de l'Institut universitaire en santé mentale Douglas à Montréal. Cette dernière consultation portait spécifiquement sur la question de savoir si certains mineurs devraient être considérés admissibles à l'AMM uniquement sur la base d'une problématique de santé mentale.
    Je vais brièvement vous faire part de quelques-unes des conclusions et recommandations de ce rapport.
    Il y a des désaccords marqués parmi les cliniciens concernant la justification de l'AMM pour certains mineurs. Certains cliniciens ont décrit des trajectoires cliniques qui correspondent à celle d'adultes pouvant être admissibles à l'AMM. Mon rapport décrit des conditions médicales pour lesquelles ces cliniciens ont estimé que l'AMM était une option raisonnable pour certains mineurs. Par contraste, d'autres cliniciens ont exprimé des objections catégoriques à l'admissibilité de tout mineur à l'AMM.
    Des cliniciens ont exprimé des inquiétudes à l'idée que les risques potentiels ou les vulnérabilités associés à l'AMM puissent exacerber les inégalités dont sont déjà victimes certains mineurs. Les groupes consultés s'entendaient pour dire que l'AMM ne devrait pas être disponible pour les jeunes dont un trouble mental est le seul problème de santé sous-jacent, surtout parce qu'il leur était impossible de décrire des scénarios cliniques pouvant être qualifiés de cas irrémédiables ou dans un état avancé de déclin irréversible.
    À la lumière des vulnérabilités pouvant être préoccupantes chez certains mineurs, une attention particulière doit être accordée aux sauvegardes qui doivent être mises en place pour s'assurer que tous les mineurs seront traités en toute sécurité. Parallèlement, il est important que ces mesures de sauvegarde ne constituent pas des obstacles onéreux pouvant créer des inégalités discriminatoires pour l'accès à l'AMM.

  (2035)  

    Tout en veillant à ce que les vulnérabilités des mineurs soient prises en compte de manière adéquate, nous devons éviter la perpétuation des tendances courantes à ne pas reconnaître ou à dévaloriser leurs capacités, leurs aspirations et leurs préoccupations en tant qu'agents moraux. Toute initiative visant à accorder ou à refuser à un mineur l'admissibilité à l'AMM doit être fondée sur les connaissances les plus récentes issues d'études portant sur des enfants et des adolescents, en consultation avec des membres des conseils consultatifs jeunesse.
    En conclusion, l'examen visant à déterminer l'admissibilité ou la non-admissibilité de certains mineurs à l'AMM doit comporter des consultations approfondies avec des groupes de jeunes ainsi qu'avec de jeunes leaders. Il est également nécessaire de consulter des chefs et des communautés autochtones pour s'assurer que les préoccupations et les incidences liées aux expériences et aux vulnérabilités des jeunes autochtones soient respectueusement prises en compte.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Carnevale.
    Nous passons maintenant à la Dre Montes.
    Docteure Montes, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie de m'avoir invitée à prendre la parole. Je m'appelle Alisha Montes. Je suis professeure agrégée clinicienne en pédiatrie à l'Université Memorial de St. John's, à Terre-Neuve. J'ai également reçu une bourse Rhodes, et j'ai terminé ma maîtrise en bioéthique et santé publique à l'Université d'Oxford. Ma pratique comprend des enfants de la naissance jusqu'à l'âge de 18 ans, et je m'intéresse particulièrement à la pédiatrie du développement. Je suis également mère de trois enfants.
    Si je devais décrire ma propre adolescence, les mots tumultueuse, stressante, désespérante et traumatisante me viendraient immédiatement à l'esprit. J'étais une adolescente obèse qui venait d'un foyer brisé et chaotique. J'ai été victime de violence pendant mon enfance et j'ai été élevée par une mère célibataire qui souffrait du trouble de stress post-traumatique, le TSPT. J'ai été victime d'intimidation à l'adolescence. J'ai trouvé très difficile de fonctionner à l'école et dans mes cercles sociaux. Pendant de nombreuses années, je me suis sentie désespérée et j'ai voulu mourir à cause de souffrances sociales et psychologiques intolérables. Mais avec beaucoup de soutien, d'encouragement, de mentorat et un accès aux soins médicaux qu'il me fallait, j'ai pu surmonter mes difficultés. J'ai été en mesure de vivre une vie pleine et enrichissante. Si l'aide médicale à mourir avait été légalisée, cela aurait peut-être été la fin de mon histoire, mais mon avenir était prometteur, et je suis très reconnaissante d'être ici aujourd'hui pour vous parler.
    Des études montrent que le lobe frontal n'est pas complètement développé avant le début de l'âge adulte. Le lobe frontal est très important pour coordonner les fonctions exécutives, y compris les compromis à faire entre les risques et les récompenses et la prise de décisions. Cela explique pourquoi l'adolescence est une période très vulnérable aux comportements à risque.
    En pédiatrie, nous pratiquons la réduction des préjudices, qui est une stratégie de santé publique conçue pour réduire les effets négatifs des comportements à risque, atténuer le risque de blessures et prévenir les décès prématurés chez les adolescents. Je dirais que l'aide médicale à mourir, l'AMM, pour les mineurs matures présente le plus grand risque, puisqu'elle aboutit nécessairement à la mort. C'est irréversible. Nous devons nous demander si nous devrions légaliser l'AMM pour les mineurs matures lorsque la biologie nous montre que la capacité de concilier les risques et les récompenses est régie par l'une des dernières zones du cerveau à arriver à maturité.
    La Cour suprême du Canada reconnaît que la capacité décisionnelle des enfants doit tenir compte de l'étape mentale, émotionnelle, physique et développementale de l'enfant. Les tribunaux appliquent une échelle mobile à la capacité, ce qui signifie que les décisions qui ont de graves conséquences exigent un examen plus approfondi. Dans certains cas, une interdiction totale est nécessaire pour éviter des préjudices futurs, comme pour la marijuana, l'alcool, les cigarettes et les drogues illicites. Je crois que nous avons le devoir de protéger les adolescents pendant la période de maturation de leur cerveau. La légalisation de l'aide médicale à mourir fait exactement le contraire de la réduction des préjudices. Elle expose les enfants au choix très dangereux de mettre fin prématurément à leurs jours, avec l'appui du gouvernement canadien.
    D'après mon expérience, donner aux adolescents la possibilité de mettre fin prématurément à leurs jours n'est pas ce qu'ils veulent ni ce dont ils ont besoin, car la majorité de leurs souffrances ne sont pas causées par leur état mental ou physique. Elles sont plutôt attribuables à la stigmatisation sociale, à la pauvreté, au manque d'accès aux ressources et à une vie tumultueuse au foyer. Soixante-quinze pour cent des enfants atteints de troubles mentaux n'ont pas accès à un traitement spécialisé. Ici, à Terre-Neuve, il y a une liste d'attente d'un an pour voir un pédopsychiatre. On sait que 70 % des troubles de santé mentale commencent pendant l'enfance ou l'adolescence. L'aide médicale à mourir n'est pas la solution à ces statistiques troublantes. Nous devons consacrer notre temps et nos ressources à améliorer l'accès à des soins spécialisés et à écouter la voix des jeunes afin de déterminer comment nous pouvons les soutenir pendant cette période de développement très difficile.
    Quel genre de message envoie‑t‑on en suggérant l'aide médicale à mourir lorsqu'un adolescent traverse une période de développement difficile? Nous devons plutôt croire en eux. Il faut leur donner une raison d'espérer. Nous devons nous réjouir de leurs talents individuels, les encadrer et leur enseigner les compétences importantes nécessaires pour relever leurs défis et être résilients.
    Lorsque des adolescents veulent mettre fin à leurs jours, les parents font tout ce qu'ils peuvent pour les empêcher de se suicider. Je le sais grâce à ma propre expérience clinique et en tant que mère. Nous savons que la relation parentale est très importante et qu'elle fait partie intégrante du développement des enfants. Elle permet même de prédire les problèmes de santé à long terme comme le bien-être en santé mentale et la capacité de s'adapter et de nouer et maintenir des relations significatives. Nous devons examiner attentivement et étudier comment la légalisation de l'AMM risque d'avoir un effet négatif sur les relations parentales, de causer des effets d'entraînement dans la famille et aussi causer un traumatisme qui pourrait avoir des effets négatifs tout au long de la vie.

  (2040)  

    Enfin, le rapport du Conseil des académies canadiennes, le CAC, souligne également qu'il n'y a pas de données probantes solides qui permettent d'approfondir l'opinion des jeunes à ce sujet. Il est troublant de constater que les opinions des mineurs handicapés, des jeunes Autochtones et des assistés sociaux n'ont pas été prises en compte dans les études.
    En médecine, nous prenons des décisions fondées sur des données probantes solides. Pourquoi nous précipitons-nous pour légaliser l'AMM alors qu'il y a peu de preuves et que toutes les opinions n'ont pas été entendues?
    Merci beaucoup.
     Merci, docteure Montes.
    Je vais maintenant céder la parole à ma coprésidente, la sénatrice Martin.
    Nous allons commencer la première série de questions avec M. Cooper.
    Merci, madame la présidente.
     Mes questions s'adressent à la Dre Montes.
    Docteure Montes, dans le dernier groupe de témoins, nous avons entendu ce que je qualifierais de témoignage plutôt choquant de la part de Mme MacIntosh, qui a affirmé que des enfants d'à peine 12 ans peuvent prendre la décision de mettre fin à leurs jours. Bien sûr, les jeunes de 12 ans sont à des années de pouvoir voter et de pouvoir faire d'autres choix réservé aux adultes. Au Québec, la Loi sur la protection du consommateur interdit la publicité qui cible les jeunes de moins de 13 ans.
    En 2017, le Sénat a adopté à l'unanimité le projet de loiS‑228, qui interdit la commercialisation des aliments et des boissons auprès des personnes de moins de 17 ans.
    Comment peut‑on concilier toute ces mesures avec l'affirmation de Mme MacIntosh selon laquelle des jeunes de 12 ans peuvent décider de mettre fin à leurs jours?

  (2045)  

     Je pense qu'il est important, évidemment, que nous tenions compte de l'opinion des enfants et des adolescents. Il est très important que nous entendions ce qu'ils ont à dire et, en pédiatrie, nous devons concilier l'opinion des enfants avec bon nombre d'autres facteurs, dont le risque associé à la décision.
    Comme je l'ai dit, nous appliquons le principe de la réduction des préjudices, et il faut parfois établir une interdiction complète parce que nous savons que, compte tenu de la biologie de leur cerveau, les jeunes n'ont tout simplement pas la capacité de prendre ces décisions très risquées. Comme vous l'avez dit, il y a certaines choses que nous devons interdire complètement, et j'estime donc que, puisqu'il s'agit d'une décision à haut risque qui est irréversible et qui se termine par la mort, nous avons absolument besoin d'une interdiction complète, parce que nous savons que leur cerveau n'est pas complètement développé.
    Merci.
    On pourrait dire que, dans le cas d'un enfant de 12 ans, c'est un exemple extrême, mais qu'en est‑il d'un jeune de 17 ans et demi? Mme MacIntosh a dit qu'il était arbitraire, évidemment, d'établir le seuil à 18 ans.
    Pourriez-vous répondre à cette question?
    Je ne vais pas m'aventurer en dehors de mon champ d'expertise, qui se limite aux moins de 18 ans, mais je préconiserais que, pour tous les enfants qui relèvent du domaine de la pédiatrie, soit les jeunes de 0 à 18 ans, il y ait une interdiction complète, parce qu'il est établi scientifiquement que leur cerveau n'est pas complètement développé.
    À votre avis, le fait d'étendre cette mesure aux moins de 18 ans mettrait les jeunes vulnérables à risque.
    Pour revenir au témoignage de Mme MacIntosh, elle a dit qu'elle préconiserait l'option des soins palliatifs comme mesure de sauvegarde.
    Quelle est la situation actuelle des soins palliatifs pour les jeunes au Canada, et seriez-vous d'accord avec cette recommandation?
     L'accès aux soins palliatifs n'est pas bon. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais je sais qu'ici, à Terre-Neuve, par exemple, nous n'avons pas de spécialiste en soins palliatifs.
    Avant de légaliser cette pratique, nous devons nous assurer d'avoir un accès approprié à ces services, en particulier aux soins palliatifs, et nous disposons maintenant d'une très bonne technologie pour que les enfants ne subissent pas de souffrances physiques intolérables. J'ai constaté, dans le cadre de ma pratique clinique et aussi à titre personnel — j'ai vu un neveu mourir d'une anomalie cardiaque congénitale — qu'une grande partie de la souffrance que les familles endurent est attribuable à la frustration de ne pas avoir accès aux soins nécessaires. Elles n'ont pas accès aux traitements appropriés. Les délais sont longs. Nous devons nous attaquer à ces problèmes avant d'aller plus loin avec ce projet de loi. Nous devons veiller à ce que tout le monde soit sur un pied d'égalité et, particulièrement ici à Terre-Neuve, nous traitons beaucoup avec la population autochtone. Il n'y a pas de services au Labrador. Comme les gens doivent prendre l'avion pour avoir accès à tous leurs services pédiatriques, c'est un problème que nous devons régler avant d'aller plus loin avec ce projet de loi.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Hanley.
    Vous avez cinq minutes.
    Je remercie nos deux invités de leurs témoignages très intéressants.
    J'aimerais préciser que je suis nouveau au sein de ce comité, mais en tant qu'ex‑praticien et médecin en santé publique, j'ai bien suivi le dossier de l'aide médicale à mourir.
    J'aimerais vous poser, docteure Montes, une question sur ce que vous appelez l'approche de l'interdiction complète jusqu'à un certain âge, qui a été appliquée dans certaines conditions. Vous pourriez peut-être nous dire ce que vous en pensez. À quel âge considérez-vous que les lobes frontaux ont atteint la maturité et que le fonctionnement exécutif se situe à l'âge adulte?
     Excusez-moi, pouvez-vous répéter la question?
    Oui, je vais peut-être reformuler ma question.
    Dans certaines de nos délibérations — par exemple, sur l'adolescence et la consommation de drogues ou de cannabis —, nous tenons souvent compte de la maturité de l'adolescent. En fait, la science nous dit que la maturité des lobes frontaux n'est pas atteinte avant l'âge de 25 ans. À un moment donné, nous devons prendre des décisions sur la maturité relative. Il n'y a évidemment pas de seuil noir sur blanc.
    Où appliquez-vous ce seuil dans votre propre expérience et pratique.

  (2050)  

    Je ne peux pas vous donner un chiffre fondé sur l'âge en nombre d'années. Évidemment, comme vous l'avez dit, le développement prend fin au début de l'âge adulte. Cela ne relève pas de mon domaine d'expertise. Je ne peux pas faire de commentaires concernant les plus de 18 ans, parce que je ne m'occupe des enfants que jusqu'à cet âge. Par conséquent, je soutiens que l'AMM ne devrait pas être légalisée pour les enfants de 0 à 18 ans. Il devrait y avoir une interdiction complète.
    Au‑delà de cet âge, puisque cela dépasse mon champ d'expertise, je ne peux pas faire de commentaires.
    Ce que j'essaie de dire, c'est que ces facteurs sont relationnels. Comme l'ont dit les témoins précédents, la capacité décisionnelle est relative, et la gravité d'une situation doit être prise en compte dans le contexte de l'état et de la maturité de la personne.
    Monsieur Carnevale, j'aimerais savoir ce que vous en pensez.
    Lorsque vous dites que nous devons tenir compte de l'opinion des jeunes, qu'avons-nous négligé et que pouvons-nous faire pour mieux tenir compte de leur opinion dans la prise de décisions?
     Eh bien, ces commentaires se situent dans le contexte d'un très grand nombre de publications et de données probantes qui mettent en évidence le fait que les jeunes sont exclus des discussions en soins cliniques et dans l'élaboration de politiques. En soins cliniques, il est souvent très humiliant et pénible pour les jeunes d'être exclus des discussions sur leur diagnostic et leur pronostic.
    Dans le cas des enfants atteints de divers types de maladies terminales, la loi reconnaît, par la doctrine du mineur mature, qu'ils devraient être les principaux décideurs dans la prise de décisions qui pourraient même entraîner leur mort, l'abandon de certains traitements à l'essai contre le cancer et d'autres affections neurodégénératives et neuromusculaires dégénératives. C'est un domaine très bien documenté.
    On reconnaît de plus en plus, et certains en fait... C'est pourquoi j'ai collaboré avec Holland Bloorview à la préparation de la preuve pour les travaux du comité du CAC auquel j'ai participé. Holland Bloorview compte probablement le plus ancien conseil consultatif de jeunes. Ils ont, par l'entremise de leur conseil consultatif de jeunes, des programmes de développement du leadership chez les jeunes. Il s'agit de jeunes qui vivent avec diverses formes de handicaps et qui peuvent donc exprimer des points de vue très éclairés sur les répercussions de différents types de traitements et de politiques. L'intégration des jeunes à divers comités afin qu'ils puissent se prononcer sur la façon dont les politiques sont élaborées relève du mandat institutionnel de Holland Bloorview.
    L'article 12 de la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant souligne que les jeunes doivent être entendus et qu'ils doivent avoir leur mot à dire dans les dossiers qui les concernent. C'est assez vaste comme principe.
    Monsieur Hanley, j'aimerais revenir sur l'un de vos commentaires, au sujet de la reconnaissance du fait que la capacité décisionnelle est un phénomène relationnel. En ma qualité d'éthicien clinique, je travaille notamment dans un centre de santé mentale pour les enfants et les jeunes. Il est très clair que la façon dont nous présentons l'information et que la mesure dans laquelle nous réussissons ou non à créer un environnement relationnel rassurant et sécuritaire peuvent renforcer ou contrecarrer la capacité d'un jeune de participer aux décisions.
    Merci, monsieur Hanley.
    Monsieur Thériault, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leurs témoignages, qui étaient intéressants et éclairants.
    Madame Montes, vous avez beaucoup parlé des troubles mentaux comme seuls problèmes médicaux pour obtenir l'aide médicale à mourir dans le cas des mineurs. J'imagine que vous avez pris connaissance du rapport des experts qui a été déposé dernièrement.
     Dans ce rapport, à quel endroit est-il question des mineurs matures qui, lors d'une situation de crise ou d'idéation suicidaire, pourraient avoir accès à l'aide médicale à mourir?

  (2055)  

[Traduction]

     Je suis vraiment désolée. Pensez-vous pouvoir répéter cette question, parce que la traduction n'était pas... Pourriez-vous simplement répéter la question?

[Français]

    Je disais que, dans le rapport déposé par les experts, il était question des troubles mentaux comme seuls problèmes médicaux permettant d'obtenir l'aide médicale à mourir.
    Vous avez beaucoup insisté sur les troubles mentaux et parlé de crises et de l'état suicidaire.
    À quel endroit, dans ce rapport, trouve-t-on la recommandation selon laquelle il faut aller de l'avant sur le plan des mineurs matures atteints d'un trouble mental ou en état de crise?
    À quel endroit du rapport avez-vous vu cela?

[Traduction]

     Parlez-vous du rapport du CAC? De quel rapport parlez-vous?

[Français]

    Je parle du rapport que le ministre a commandé au comité d'experts qui devait se pencher sur la mise en place ou non, dans le projet de loi C‑7, de la disposition de temporisation au 17 mars 2023 quant aux troubles mentaux comme seuls problèmes médicaux invoqués.
    Ce n'est pas grave, je vais passer à une autre question.
    Monsieur Carnevale, vous avez parlé de mesures de sauvegarde supplémentaires concernant les mineurs matures. Vous avez aussi dit qu'il ne fallait pas accorder l'aide médicale à mourir aux mineurs matures en cas de troubles mentaux. J'ai bien compris ce que vous avez dit.
    Selon vous, quelles devraient être les mesures de sauvegarde supplémentaires?
     C'est vraiment un travail continu. Il nous faut beaucoup plus d'informations pour bien comprendre les sauvegardes qui sont nécessaires.
    On peut s'inspirer de ce que font les Pays‑Bas et la Belgique, où il y a des sauvegardes. Dans certaines situations, on demande l'accord des parents, selon l'âge de l'enfant. C'est une mesure qui existe déjà dans certaines situations au Canada. Cela dépend de la province. Au Québec, par exemple, si un mineur refuse un traitement qui est nécessaire, il est possible de remettre en question sa décision dans l'intérêt supérieur du mineur.
    Il y a des mesures de sauvegarde en ce qui concerne les quelques mineurs qui prendront une décision qui n'est pas dans leur intérêt supérieur. Par exemple, il faut s'assurer qu'ils n'ont pas fait l'objet de pressions et ont été bien informés. Cette mesure est aussi décrite dans le rapport que j'ai soumis au Comité. Il faut aussi considérer les parents comme une autre autorité décisionnelle.
    J'ai bien hâte de lire ce rapport.
    Vous avez une vaste expérience clinique. Arrive-t-il souvent que des parents soient en conflit avec leur enfant, quand ils veulent prendre une décision en fonction dans l'intérêt supérieur de l'enfant au cours de l'évolution de sa maladie? C'est bien un processus décisionnel, puisque ce n'est pas du jour au lendemain que tout se met en place.
    Selon votre vaste expérience clinique, y a-t-il beaucoup de désaccords, ou est-ce que tout se fait de façon naturelle, ou en symbiose, dans l'intérêt de l'enfant?

  (2100)  

[Traduction]

    Soyez très bref, s'il vous plaît, monsieur Carnevale.

[Français]

    Selon mon expérience, les cas où il y a conflit entre ce que veut l'enfant et ce qui est nécessaire dans son intérêt sont l'exception.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. MacGregor, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Docteure Montes, j'aimerais commencer par vous.
    Je viens de la Colombie-Britannique et vous exercez à Terre-Neuve, n'est‑ce pas?
     Oui.
    Je sais que les provinces ont toutes des lois régissant, comme la Colombie-Britannique, le consentement des mineurs matures. Il permet essentiellement aux professionnels de la santé d'accepter le consentement d'un enfant s'ils comprennent que l'enfant est informé des risques qu'il court.
    En tant que pédiatre, quelles sont vos lignes directrices lorsque vous traitez un enfant et que cela concerne uniquement des procédures médicales? Comment interprétez-vous ce concept de consentement éclairé à des actes médicaux pour des mineurs qui pourraient être sous vos soins?
    C'est une question très complexe, évidemment, et il faut tenir compte de nombreuses opinions. La pédiatrie n'est pas aussi simple que la médecine pour adultes. Il ne s'agit pas seulement de parler à l'adulte. D'abord et avant tout, nous parlons à l'enfant. Lorsque je me rends dans une salle de consultation, la première personne que je salue et avec laquelle j'essaie d'établir un rapport est l'enfant, et j'écoute ce qu'il a à dire.
    Évidemment, j'essaie d'établir si l'enfant comprend l'intervention médicale et s'il est capable de me dire quels sont les risques et les avantages. Ce n'est pas tout. C'est très complexe, parce que les enfants font partie d'un réseau social plus vaste. Ils font partie d'une famille, et il y a beaucoup d'autres opinions qu'il faut concilier avec la protection de l'enfant, parce que nous tenons compte de son stade de développement. Nous devons aussi considérer tout ce qui concernent leur développement.
    Et si, par exemple, vous traitiez un enfant atteint d'une maladie incurable, d'une maladie irréversible, et que vous discutiez avec les parents et l'enfant des soins de fin de vie? Et si, dans votre bureau, en tête à tête avec l'enfant seulement, ce dernier manifestait le souhait de recevoir des soins palliatifs, considéreriez-vous cela comme un consentement, en supposant que l'enfant comprenne la situation? Ressentiriez-vous le besoin d'aller voir les parents, ou accepteriez-vous le souhait de l'enfant de recevoir des soins palliatifs?
     Cela dépend du contexte, mais évidemment, comme je l'ai dit, il n'y a pas qu'une seule opinion à considérer. Il faudrait que je parle aussi aux parents. Il faut penser à la décision que prend l'enfant et aux répercussions que cette décision aura sur les parents. C'est une chose dont nous n'avons pas vraiment discuté, surtout dans le contexte de l'aide médicale à mourir. Le décès d'un enfant, comme je l'ai vu dans ma pratique, est littéralement l'une des choses les plus déchirantes, et certains parents ne s'en remettent jamais. J'ai personnellement vécu cette situation, ayant perdu un enfant de neuf mois...
    Je vous crois sur parole. J'ai moi-même trois enfants.
    C'est assurément la pire chose qui puisse arriver.
    Pour répondre à votre question, je ne me contenterais pas du point de vue de l'enfant; il faudrait que je tienne compte de celui de plusieurs personnes. C'est ainsi que cela fonctionne en pédiatrie.
    Pour que ce soit bien clair, parce que vous avez parlé de modifier la loi, je veux qu'il soit très clair pour vous, et pour quiconque écoute ceci, que ce comité ne parle pas d'une loi déjà en vigueur. Nous menons actuellement une étude qui, nous l'espérons, nous permettra de prendre des décisions éclairées. À l'heure actuelle, le Parlement du Canada n'est saisi d'aucun projet de loi visant à modifier le Code criminel en ce qui a trait à l'aide médicale à mourir; je tiens simplement à ce que ce soit clair pour tout le monde.
    L'autre question que je voulais poser concerne les projets de loi C‑14 et C‑7. Le projet de loi C‑7 a créé cet autre volet, soit les cas où la mort est « raisonnablement prévisible ». Je me demande simplement... C'est une décision très personnelle. Pour ce qui est des enfants de moins de 18 ans, s'ils ont une maladie incurable et s'il est tout à fait évident que, chaque jour de leur vie, ils endurent des souffrances intolérables, êtes-vous personnellement contre le fait que cet enfant obtienne un jour l'aide médicale à mourir?
     Ou seriez-vous ouverte à lui accorder si vous aviez eu une conversation avec les parents et si tout le monde savait que c'était une situation irréversible et que l'enfant souffrait? J'aimerais connaître votre point de vue personnel sur cet aspect particulier du projet de loi C‑14, le volet initial.

  (2105)  

    À l'heure actuelle, l'accès aux soins est inégal. Il est très difficile de répondre à cette question, car nous n'avons pas les soins dont nous avons besoin. Les malades n'y ont pas accès.
     À mon avis, avant de nous pencher sur cette question, nous devons nous assurer qu'il y a un accès aux soins palliatifs, qu'il y a une bonne gestion des symptômes et que toutes ces mesures sont mises en place. Nous devons aussi analyser d'autres facteurs.
     C'est une question très complexe, et je ne peux pas y répondre parce qu'il y a actuellement une inégalité d'accès aux soins. Je crois que nous devons vraiment investir dans ce domaine avant d'aller plus loin.
    Je comprends. Merci.
     Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à mon coprésident.
     Merci, sénatrice Martin.

[Français]

     Nous poursuivons avec la sénatrice Mégie et une autre série de questions.
    Sénatrice Mégie, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Carnevale.
    Pouvez-vous nous parler davantage du concept de la children's agency?
    Quelles sont les principales raisons pour lesquelles on devrait l'utiliser? En quoi cela aiderait-il le travail du Comité?
    Premièrement, la traduction de children's agency est problématique. En général, en français, on utilise les termes « l'agentivité de l'enfant ». Ce concept émerge du champ de recherche sur l'enfance, dans lequel on soulève beaucoup de préoccupations quant à la façon dont on juge les enfants, c'est-à-dire en les jugeant comme des incapables ou des incompétents. On les exclut des décisions importantes. Comme je l'ai dit plus tôt, on sait très bien qu'ils vivent mal ce genre d'exclusion. L'agentivité est un concept qui reconnaît que les jeunes personnes nourrissent quand même des espoirs, qu'elles ont des préoccupations et qu'elles sont capables d'être responsabilisées. Par exemple, des enfants atteints de diabète peuvent apprendre comment assurer et optimiser leur bien-être en gérant leur alimentation, leur prise d'insuline, l'exercice qu'ils font, et ainsi de suite. On sait très bien que l'agentivité des jeunes enfants peut être soutenue et maximisée par la façon dont on les engage dans le processus et dont on respecte leur point de vue.
    Est-ce que cela répond à votre question?
     Oui, plus ou moins, mais, étant donné que vous avez dit tous les deux qu'il fallait écouter la voix des enfants, comment croyez-vous que nous, nous pourrions les écouter?
    Quel serait l'effet de la participation des jeunes que nous aurions consultés sur les décisions à venir concernant l'aide médicale à mourir?
    Voilà la question clé: quel poids devons-nous accorder à la voix des jeunes enfants sur le plan clinique, individuel et politique?
    Sur le plan clinique, nous le faisons déjà. Comme je l'ai déjà mentionné, si un enfant atteint d'une maladie neuromusculaire ne veut plus être ventilé à long terme et décide que cela suffit, nous avons des méthodes pour évaluer sa capacité décisionnelle. Il y a une grande obligation d'accorder un poids important à son choix.
     Pour ce qui est de déterminer l'autonomie décisionnelle d'un mineur mature, cela dépend de la province. Par exemple, il y a des milieux où cela peut être subordonné à une évaluation de l'intérêt supérieur du mineur. Ainsi, même si sa capacité décisionnelle est établie, d'autres pourront juger que son choix va à l'encontre de son intérêt supérieur, et on pourrait limiter le poids qu'on va y accorder.

  (2110)  

    Je vous remercie.
    Merci, madame la sénatrice.

[Traduction]

     La parole est à vous, sénateur Kutcher.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai quelques questions pour la Dre Montes. Les trois premières sont très brèves — j'aimerais obtenir des renseignements factuels à ce sujet — et il y en a une autre sur laquelle j'aimerais connaître votre opinion.
    L'aide médicale à mourir pour les mineurs matures est offerte dans certains pays depuis un certain nombre d'années. Pouvez-vous dire au Comité dans quelles circonstances ou conditions l'aide médicale à mourir a été fournie dans ces pays? C'est ma première question.
     Parlez-vous des autres pays? Je ne suis pas sûre. Je ne peux pas répondre à cette question.
    Dans ces pays, combien de jeunes ont reçu l'aide médicale à mourir chaque année?
    Je sais que le chiffre est très bas, mais il n'y a pas beaucoup de données à ce sujet. Je ne suis pas certaine des chiffres exacts, mais je pourrai vous les fournir après la réunion du Comité.
    Ce serait formidable.
    Dans ce groupe de personnes, combien de jeunes ont reçu l'aide médicale à mourir pendant une crise de santé mentale?
    Encore une fois, je ne connais pas les chiffres exacts.
    Pouvez-vous les obtenir?
    Oui, je pourrai vous fournir ces renseignements après la réunion du Comité, mais je ne les connais malheureusement pas par cœur.
    Excellent. Merci.
    Dans votre pratique pédiatrique, disons que vous traitez un jeune qui a la capacité de prendre des décisions. Cette personne a un glioblastome multiforme de grade IV. Pour les personnes ici présentes, c'est le pire type de cancer. C'est un cancer que vous voulez absolument éviter. Disons que ses parents appuient sa décision de ne recevoir aucun traitement.
    Comment procéderiez-vous dans un tel cas?
    C'est une question difficile, et je pense que cela nous ramène à la gravité de cette décision. Ce que je dirais, c'est que nous devons aussi nous pencher, tout d'abord, sur les abus qui pourraient se produire dans d'autres populations, de sorte que nous n'avons pas...
    Excusez-moi. Nous avons très peu de temps.
    Respectez-vous la décision de l'enfant et de ses parents de ne pas suivre de traitement pour un glioblastome multiforme de grade IV?
    C'est une question complexe, alors je dirais que nous devons nous assurer... Il est très difficile de déterminer s'ils demandent ou non l'aide médicale à mourir en raison d'un manque de services ou d'un manque d'accès à...
     Attendez une seconde. Je vous arrête tout de suite.
    Je ne parle pas de l'aide médicale à mourir. Je vous demande si vous acceptez leur décision de ne pas demander de traitement pour le glioblastome.
    Vous me demandez si je l'accepterais?
    Oui.
    Cela ne relève pas de mon domaine d'expertise. Comme je ne pratique pas l'oncologie, je n'ai pas à me prononcer à ce sujet. Cependant, ce que je peux dire, c'est qu'il est très difficile de déterminer si la demande est attribuable ou non à un manque d'accès aux soins. D'après mon expérience clinique, souvent...
    Non. Je vous arrête. Nous ne parlons pas d'un manque d'accès aux soins ici. C'est une question simple.
    Nous parlons d'un patient apte à prendre une décision qui refuse le traitement pour un cancer en phase terminale. Accepteriez-vous la décision du patient — et celle des parents? Répondez par oui ou par non.
    Je ne peux pas me prononcer là‑dessus, sénateur Kutcher.
    Nous allons passer au sénateur Dalphond.
     Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à la Dre Montes.
    Il s'agit peut-être d'une variation sur le même thème que j'aimerais aborder dans la foulée des questions du sénateur Kutcher.
    Je crois comprendre que vous vous inquiétez de l'accès à l'aide médicale à mourir pour les personnes de moins de 18 ans et peut-être même plus âgées. Seriez-vous moins inquiète si l'accès était limité au premier volet, c'est-à-dire à ceux dont la mort est imminente? Dans un tel cas, une personne aurait reçu le diagnostic médical clair qu'elle va mourir dans quelques mois ou quelques semaines, et elle endure entretemps des souffrances insupportables, selon elle. Cette personne de 17 ans veut obtenir l'aide médicale à mourir et les parents, à qui vous avez parlé, disent qu'ils sont d'accord pour dire que l'enfant a assez souffert.
    Êtes-vous en train de dire qu'on devrait refuser l'accès dans un tel cas et obliger la personne à endurer des souffrances insupportables?
     Je préconise que, dans certains cas, nous mettions en pratique ce que nous appelons la réduction des préjudices. S'il s'agit d'une situation à très haut risque, nous devons protéger les enfants et les adolescents pendant leur développement parce que c'est une période très vulnérable où ils prennent beaucoup de décisions à haut risque...
    Oui, je comprends. Je suis désolé de vous interrompre, mais le temps est limité.
    Les principes de réduction des préjudices pour un groupe sont acceptables, mais cette personne dont il est question souffre irrémédiablement et est sur le point de mourir, alors ce n'est plus un principe de réduction des préjudices. Il s'agit de savoir si l'on doit respecter le désir de mettre fin à une souffrance qui est insupportable.

  (2115)  

    J'ai écouté d'autres groupes de témoins. À cause du très grand nombre de cas d'abus des mesures de protection, le risque est simplement trop grand pour moi.
    Encore une fois, je vais m'en tenir à mon argument, c'est-à-dire à l'interdiction totale en raison de la biologie et du manque d'accès aux services et aux soins palliatifs à l'heure actuelle.
    Vous n'êtes pas dérangée par le fait que, d'une certaine façon, vous écartez l'intérêt supérieur de l'enfant?
    Parfois, le risque est tout simplement trop élevé. Nous avons des limites d'âge pour l'alcool, la marijuana et les autres drogues et même pour la conduite automobile parce que nous savons que les enfants sont très vulnérables à ce stade de développement.
    Merci.
    Sénatrice Wallin.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez tous les deux. Nous allons commencer par la Dre Montes.
    Comme vous l'avez dit, vous écoutiez les témoignages. Nous avons discuté de la capacité se prendre des décisions en fonction de l'âge réel. Comme vous travaillez tout le temps avec des enfants de moins de 18 ans, seriez-vous d'accord pour dire qu'il y a des enfants de 9, 12, 14 ou 17 ans qui ont vécu des expériences ou qui ont vécu avec des maladies ou des douleurs profondes et qui pourraient fort bien avoir la capacité de prendre des décisions-clés, peut-être dans certains cas aussi bien ou même mieux que quelqu'un qui a 45 ou 70 ans et qui ne prend pas de bonnes décisions? Est‑ce possible?
    Je vous remercie de la question.
    Tout à fait, mais souvent, d'après mon expérience clinique, ces demandes sont très difficiles à analyser. Souvent, c'est en fait à cause de la stigmatisation sociale, de la pauvreté ou d'une vie familiale très difficile. Il n'est pas du tout facile de comprendre ce qui se passe vraiment. Oui, c'est certainement possible, mais...
    Prenons un exemple où ce n'est pas le cas. Il y a beaucoup de situations où de jeunes enfants sont très bien soutenus par leur famille et prennent une décision de leur propre chef parce qu'ils sont peut-être malades depuis longtemps. Ils ont décidé que la situation ne s'améliorera pas, qu'elle ne changera pas et qu'elle ne peut pas être corrigée. Parce qu'ils ont cette expérience personnelle — cette expérience de vie qui, vous en conviendrez, est très importante lorsqu'on parle aux enfants —, ils pourraient en arriver à cette décision avec la bénédiction de leurs parents, ou du moins avec leur accord. Ils sont capables de le faire.
     Il est très difficile de vivre avec une maladie chronique. Je m'occupe de nombreuses familles, mais nous devons aussi tenir compte des abus possibles afin que les enfants suicidaires, qui cherchent un moyen de mettre fin à leurs jours... Nous n'en avons pas discuté.
    Oui, mais nous ne parlons pas de cette catégorie.
    C'est vrai.
    Il faut faire une distinction, parce que ce n'est pas tout le monde qui est dans cette catégorie.
    Tout à fait.
    Il y a beaucoup d'autres situations. J'essaie simplement de focaliser sur cet aspect parce que, de toute évidence, s'il y a de grandes préoccupations sociales ou s'ils n'ont pas accès, on ne parle pas des mêmes problèmes.
    Oui, en pratique, il est très difficile d'analyser tout cela, et la décision présente un trop grand risque parce qu'elle est irréversible et entraîne la mort.
    Vous diriez donc simplement que l'enfant, peu importe son expérience, ne devrait pas être autorisé à prendre ce genre de décision?
    Non, ce n'est pas ce que je dis. Je dis simplement qu'il s'agit d'une question très complexe, et que nous devons également établir un équilibre entre cet enfant et d'autres enfants qui peuvent avoir recours à l'aide médicale à mourir pour se suicider ou qui peuvent avoir recours à l'aide médicale à mourir...
    Mais j'essaie vraiment de ne pas tenir compte de cette catégorie. Ce n'est pas une question d'équilibre entre le nombre de personnes dans chaque catégorie. Je parle d'enfants qui sont bien soutenus, qui ont eu accès à toutes sortes de traitements et de soutien, psychologiquement et médicalement, et qui ont pris une décision.
    Dans ma pratique clinique, je n'ai pas vu de cas où toutes ces cases ont été cochées, alors, malheureusement, je ne sais pas...
    D'accord. Je ne sais pas combien de temps il nous reste. Le professeur Carnevale a‑t‑il le temps de répondre?

  (2120)  

     Je crains que le temps soit écoulé, sénatrice.
    D'accord. Je suis vraiment désolée.
    Ce n'est pas un problème.
    Sénatrice Martin.
     J'ai aussi une question pour chacun de nos témoins.
    Docteure Montes, votre histoire démontre l'incroyable capacité des enfants à surmonter la souffrance quand ils ont du soutien. Comme nous l'ont dit d'autres témoins, la souffrance psychosociale n'est pas irrémédiable chez les personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale ou une déficience, et elle peut souvent être apaisée par des soins et un soutien appropriés.
    Pouvez-vous nous parler des répercussions que des injustices sociales comme l'intimidation et les traumatismes peuvent avoir sur le désir de mourir? Craignez-vous qu'un évaluateur de l'AMM, surtout s'il n'a pas d'expertise dans ces domaines spécialisés, ne néglige la raison d'être d'une demande d'AMM de la part d'un jeune? Qu'en pensez-vous?
    Je vous remercie de votre question.
    Oui, nous avons une étude sur les expériences négatives dans l'enfance. Elle révèle que les enfants qui ont subi des événements traumatisants au cours de leur enfance sont trois fois plus susceptibles d'avoir des symptômes dépressifs et de présenter un risque très grand de pensées suicidaires. L'un des aspects qui me préoccupent, c'est qu'il peut y avoir des abus dans le cas de ces enfants et qu'il est très difficile de déterminer la cause véritable de la demande. Ces enfants se débrouillent très bien quand ils ont un soutien et ils peuvent surmonter ces difficultés comme celles que j'ai décrites dans mon cas. J'ai vu beaucoup d'enfants dans ma pratique qui, avec le bon soutien, ont pu surmonter leur traumatisme, mais dans ces moments de crise, il est très difficile de le déterminer, et c'est très préoccupant. C'est quelque chose que nous devons vraiment examiner avant d'aller de l'avant.
    Monsieur Carnevale, vous avez parlé de l'importance des mesures de protection, mais j'aimerais savoir si vous pourriez nous en parler plus en détail, si vous ne l'avez pas encore fait.
    À ce stade‑ci, je...
    Ma question s'adressait à M. Carnevale.
    Cela concerne les mesures de protection et la question de savoir si vous voulez préciser ce à quoi vous faisiez allusion dans votre témoignage.
     J'en ai parlé un peu plus tôt dans une réponse en français.
    Les mesures de protection dont il est souvent question et qui sont également décrites dans mon rapport sont la façon dont nous évaluons la capacité décisionnelle, soit en tenant compte de certaines des préoccupations soulevées par la Dre Montes, pour nous assurer qu'elles sont toutes bien évaluées.
    Je pense que l'autre grande mesure couramment envisagée et également en place aux Pays-Bas et en Belgique, ce sont les situations dans lesquelles la corroboration parentale pourrait également être nécessaire.
     Je tiens également à souligner que, dans les cas où j'ai eu affaire à des mineurs, où il y a eu des questions en lien avec l'aide médicale à mourir, ces situations étaient très différentes de celles où un mineur pourrait chercher à utiliser des moyens de contraception. Lorsqu'il s'agit d'une maladie limitant l'espérance de vie, il est très, très rare que nous parlions seulement avec le mineur. Ces personnes ont des besoins importants en matière de soins, et d'après mon expérience, ce sont habituellement les parents qui ont demandé l'aide médicale à mourir pour leurs enfants mineurs. Comme je l'ai dit à M. Thériault tout à l'heure, il est très rare, dans ce genre de situation où le mineur demande à mourir, que le traitement soit interrompu lorsqu'il y a une objection catégorique de la part des parents.
     Merci beaucoup.
    Je tiens à vous remercier, monsieur Carnevale et docteure Montes, d'être venus ce soir. Je vous remercie d'avoir répondu à nos questions et de vos témoignages. Je sais qu'il est tard pour vous. C'est particulièrement tard pour la Dre Montes, qui est à Terre-Neuve. Il doit être près de 23 heures.
    Encore une fois, nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps de nous faire part de vos commentaires francs. Merci.
    Cela met fin aux témoignages du troisième groupe.
    Chers collègues, si vous pouviez rester, nous devons parler de ce qui reste à faire d'ici au 23 juin. Je vais le faire très rapidement. Selon toute probabilité, nous aurons deux autres réunions. L'une se tiendra lundi prochain et l'autre le lundi suivant, soit le 20 juin. Il ne semble pas que nous aurons une réunion le jeudi soir, parce que le Bureau de régie interne veut se réunir... pour l'instant, pour ces deux réunions.
    Comme vous le savez, le 13 juin, nous allons examiner l'ébauche du rapport provisoire sur les troubles mentaux qui est en cours de préparation et que nous devons déposer au plus tard le 23 juin. Nous aurons les trois heures pour le faire. Le lundi suivant, nous avons réservé deux heures pour, espérons‑le, finaliser le tout, puis nous aurons une réunion du sous-comité qui se penchera sur ce qui nous attend, seulement de façon générale. Beaucoup de questions ont été posées sur ce que nous allons faire après la relâche estivale.
    C'est simplement pour vous donner une idée du calendrier. Voici maintenant la partie compliquée.
    Vous allez recevoir le rapport provisoire vendredi, celui que nous devons déposer au plus tard le 23 juin. Il sera remis ce vendredi. Il sera étudié lundi. Comme nous le savons, ce processus peut être très complexe. Le délai est très serré. Nous vous demandons alors d'examiner ce rapport et d'être prêts à en discuter en termes précis lundi soir. Cela veut dire un peu de travail en fin de semaine. Nous voulons nous assurer d'être prêts à terminer le rapport au plus tard le 20 juin.
    C'est un délai très serré. S'il y a d'énormes révisions à apporter au rapport lundi prochain, cela signifie également que nous aurons encore beaucoup à faire le 20 juin, lorsque nous examinerons la dernière ébauche ou, espérons‑le, la version définitive.
    Tout changement à cette deuxième version, celle qui viendra après le 13 juin, devra être minime, sinon le travail nécessaire pour présenter le rapport à la Chambre ne pourra pas être terminé avant le 23 juin.
    Nous espérons que, si vous voulez ajouter ou modifier un libellé, vous nous le présenterez et, si possible, que vous transmettrez vos commentaires à la greffière d'ici lundi midi. Ainsi, il sera possible de traduire les ajouts ou changements dans certains cas. Il ne sera peut-être pas prêt d'ici lundi soir, mais les analystes auront au moins une idée de ce que vous voulez vraiment.
    Tout cela pour dire que vous allez recevoir le rapport vendredi, et nous espérons que vous nous ferez part de vos commentaires lundi. Notre stratégie consiste à faire en sorte que la majeure partie du travail se fasse lundi soir. De cette façon, nous pourrons simplement mettre la touche finale le lundi suivant, parce qu'il ne nous reste que deux réunions.

  (2125)  

    Je vois que la sénatrice Wallin a levé la main, mais je pourrais peut-être ajouter quelque chose à ce que le député Garneau vient de dire.
    Pour ce qui est de la réunion de lundi prochain et des révisions ou ajouts que nous proposons, si nous sommes prêts à les lire à la réunion, nous pouvons obtenir l'interprétation à mesure que nous lisons. Cela facilitera les délais serrés dans lesquels nous devons travailler. Nous devons faire des recherches pour être prêts à discuter des révisions et des modifications lundi prochain.
    Oui, c'est une bonne remarque.
    La sénatrice Wallin a levé la main.
     J'espère que nous dirons « voici ce que je propose » et que nous le lirons pour que tout le monde l'entende, plutôt que de dire « je pense que nous devrions changer cela pour quelque chose comme ceci », ce qui, malheureusement, signifie qu'il faudra travailler davantage pour décider de ce que cela devrait être au final, de ce qui devra être examiné la semaine suivante. Ce serait bien d'être aussi précis que possible lundi soir.
    Allez‑y, sénatrice Wallin.
     Je veux dire un mot au sujet du projet de loi parce qu'un des témoins a soulevé la question.
    Ce projet de loi n'est pas conçu pour être préventif. C'est un peu la réalité. Le Sénat prend un peu plus de temps que la Chambre des communes pour faire les choses, et nous n'aborderons pas cette question avant l'automne.
    Il était important que cela figure au compte rendu pour que ceux qui voulaient en parler puissent le faire, mais nous ne ferons rien à titre préventif. Je le dis simplement à titre d'information.
    Merci.
     Merci, sénatrice Wallin.
    Quelqu'un veut‑il ajouter autre chose?
    Merci à tous pour une autre très longue soirée.
    La séance est levée.
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