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Association parlementaire canadienne de l'OTAN

Rapport

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN, qui est la délégation canadienne à l’Assemblée parlementaire de l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (AP OTAN), a l’honneur de présenter son rapport sur la Réunion conjointe de la Commission de la défense et de la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité et de la Commission politique, qui s’est tenue à Bruxelles, en Belgique, du 17 au 19 février 2020. Le Canada était représenté par la députée Cheryl Gallant, chef de délégation intérimaire, par les honorables sénateurs Pierre-Hugues Boisvenu, Pierre J. Dalphond, Josée Forest-Niesing et Victor Oh, et par les députés Julie Dzerowicz et Jack Harris. La délégation était accompagnée de M. Jean-François Pagé, secrétaire de l’Association, et de M. James Lee, conseiller de l’Association.

La Réunion conjointe tenue une fois l’an à Bruxelles, à laquelle participent aussi les membres de la Commission sur la dimension civile de la sécurité et de la Commission des sciences et des technologies, a pour objectif principal de permettre aux délégués de faire le point sur les activités et les opérations de l’OTAN et de discuter des principaux enjeux avec lesquels l’Alliance devra composer tout au long de l’année. Comme à l’habitude, les représentants de l’AP OTAN ont également rencontré le secrétaire général de l’OTAN et les représentants permanents au Conseil de l’Atlantique Nord[1] . Les délégués ont également eu pour interlocuteurs le ministre belge des Affaires étrangères et de la Défense, ainsi que des représentants de haut niveau de l’OTAN et de l’Union européenne.

Les délibérations de la Réunion conjointe se sont déroulées suivant la tradition des règles de Chatham House.

Avant le début de la Réunion conjointe, les délégués canadiens ont eu une séance d’information avec le représentant permanent du Canada à l’OTAN, l’ambassadeur David Angell, et son personnel, ainsi qu’avec le représentant militaire du Canada à l’OTAN, le vice-amiral Darren Hawco.

RÉSUMÉ DES DISCUSSIONS

Pendant la Réunion conjointe, les délégués canadiens et les autres délégués ont reçu de l’information sur divers sujets dont ils ont également discuté : le programme politique de l’OTAN; la sécurité à l’ère cybernétique; les politiques de défense et nucléaire de l’OTAN; les relations transatlantiques, l’OTAN et l’Union européenne (UE); les opérations de l’OTAN; le paysage changeant de la sécurité dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et le rôle de l’OTAN. Au nombre des thèmes communs à toutes ces discussions se retrouvent la nécessité pour l’OTAN de s’adapter continuellement à des circonstances changeantes, ainsi que l’importance fondamentale de la consultation, de l’unité et du lien transatlantique entre l’Amérique du Nord et l’Europe.

Les sections suivantes résument les points principaux des discussions sur chacun de ces sujets.

Programme politique de l’OTAN

L’OTAN est une alliance politico-militaire qui prend ses décisions par consensus et, à ce titre, la consultation et l’unité ont toujours été considérées comme essentielles à l’efficacité de l’Alliance.

En 2014, l’annexion illégale de la région ukrainienne de la Crimée par la Russie ainsi que la déstabilisation subséquente de la région ukrainienne du Donbass ont amené l’OTAN à renforcer considérablement sa posture de défense militaire et de dissuasion pendant les années qui ont suivi. Cependant, elle a moins insisté sur le renforcement de la dimension politique de l’Alliance. Cette situation a été exacerbée par l’élection aux États-Unis en 2016 du président Donald Trump, qui a publiquement remis en question l’utilité de l’OTAN et de la consultation avec les alliés traditionnels. Tout juste trois mois avant la Réunion conjointe, le président français Emmanuel Macron a laissé entendre dans une entrevue avec le magazine The Economist que, faute de pouvoir compter sur les États-Unis, les alliés vivaient la « mort cérébrale » de l’OTAN [2].

Lors d’un sommet à Londres en décembre 2019, les dirigeants de l’OTAN ont convenu, entre autres choses, que « la solidarité, l’unité et la cohésion » étaient les principes fondamentaux de l’Alliance, et ont invité le secrétaire général de l’OTAN à élaborer une proposition pour un processus de réflexion prospective visant à « renforcer encore la dimension politique de l’OTAN, y compris la consultation[3]  ». (Ce processus a été rapidement renommé « OTAN 2030 ».)

Lors de la Réunion conjointe, on a souligné que la dimension politique de l’Alliance était très importante pour son efficacité et son adaptabilité, et que tout ce que l’OTAN avait fait sur le plan politique visait à soutenir ses objectifs stratégiques. On a dit que la décision des dirigeants de l’Alliance d’amorcer un processus de réflexion dans le but de renforcer la dimension politique de l’OTAN était de la plus haute importance et que l’on travaillait actuellement à l’élaboration du mandat pour ce processus. On a également souligné le fait que les parlementaires de l’OTAN doivent jouer un rôle dans le renforcement de la dimension politique de l’Alliance, notamment par le biais de l’AP OTAN.

Après avoir reçu de l’information, les délégués ont discuté des enjeux clés du programme politique de l’OTAN. Ils ont discuté entre autres choses de la nécessité de préserver le consensus dans les échanges avec la Russie, d’obtenir un consensus encore plus grand en ce qui concerne la menace du terrorisme sous ses nombreuses formes, de se concentrer sur les technologies émergentes et perturbatrices, et de travailler ensemble devant la montée de la Chine.   

Les délégués ont appris qu’un élément important du programme politique de l’OTAN est l’avenir du contrôle des armes. Celui-ci est nécessaire non comme une fin en soi, mais parce qu’il contribue à la stabilité internationale. De plus, même dans le cas d’accords nucléaires bilatéraux, comme ceux conclus entre les États-Unis et la Russie, il est logique d’engager d’abord un dialogue entre les Alliés afin de pouvoir ensuite conclure des accords fondés sur des intérêts communs.

Les délégués ont également appris que la violation de longue date par la Russie de ses engagements en vertu du Traité bilatéral entre les États-Unis et la Russie sur les armes nucléaires de portée intermédiaire a amené les États-Unis à se retirer de ce traité en 2019. On leur a également rappelé que le dernier traité touchant les armes nucléaires liant les États-Unis et la Russie, Nouveau départ, venait à échéance au début de 2021 à moins que les deux pays ne s’entendent pour le prolonger. 

En ce qui concerne le désarmement nucléaire, on a rappelé aux délégués que l’OTAN et ses États membres soutiennent le Traité de non-prolifération (TNP) des armes nucléaires, mais s’opposent au récent Traité sur l’interdiction des armes nucléaires, qui ne comprend pas de mécanismes de vérification. Dans le contexte des questions de désarmement, les délégués ont été informés que l’OTAN n’excelle pas toujours dans l’art d’expliquer et de promouvoir publiquement ce qu’elle fait.

La sécurité à l’ère cybernétique

Tous les États, dont les membres de l’OTAN, ont constaté l’importance de la cybersécurité ces dernières années. En 2007, une série de cyberattaques à grande échelle contre l’Estonie, membre de l’OTAN, a constitué une étape clé de cette prise de conscience. On a dit aux délégués que l’Alliance a pris des mesures pour renforcer ses capacités défensives dans ce domaine ces dernières années. Voici ces mesures :

  • affirmation au Sommet du Pays de Galles de 2013 voulant que la cyberdéfense fasse partie de la tâche fondamentale de défense collective de l’OTAN, et qu’une cyberattaque puisse mener à l’invocation de l’article 5 sur l’engagement de l’OTAN envers la défense collective;
  • déclaration lors de son Sommet de Varsovie en 2016 reconnaissant le cyberespace en tant que domaine d’opérations dans lequel l’OTAN doit se défendre comme elle le fait dans les airs, sur terre et en mer;
  • augmentation du nombre d’outils à la disposition de l’OTAN pour protéger ses propres réseaux;
  • maintien du renforcement de la résilience dans l’ensemble de l’Alliance.

Les Alliés se sont également entendus sur la manière d’intégrer les efforts nationaux souverains dans le domaine de la cybernétique, partagés volontairement avec l’Alliance, dans les opérations et les missions de l’OTAN.

Même s’il y a de nombreux pirates non étatiques, les délégués ont appris que les cyberattaques à grande échelle sont probablement menées par des États, ou à tout le moins commandées par ceux-ci. Cependant, comme l’attribution de la responsabilité de telles attaques est complexe sur le plan technique et hautement politique, l’OTAN n’attribue pas collectivement le blâme pour les attaques, même si des Alliés peuvent individuellement le faire unilatéralement. L’échange de renseignements est d’une importance cruciale pour la cyberdéfense, et il est recommandé que les Alliés continuent de renforcer leurs compétences, leurs dépenses et leurs effectifs dans ce secteur. Malgré les travaux sur les implications des cyberattaques en matière de défense collective dans les scénarios les plus pessimistes, en fait, la plupart de ces attaques sont encore le résultat d’actes criminels ou d’accidents, et l’OTAN encourage également les États membres à renforcer leur cybersécurité à l’échelle nationale.

Après la Réunion conjointe, un nombre limité de délégués de l’AP OTAN ont pu participer à un exercice interactif spécial de cyberdissuasion organisé par le ministère des Affaires étrangères de l’Estonie et CybExer Technologies[4] . Un délégué canadien a pris part à cet exercice.

Politiques de défense et nucléaire de l’OTAN

Comme il est mentionné plus haut, l’OTAN a considérablement renforcé sa posture en matière de défense militaire et de dissuasion en réponse aux gestes posés par la Russie depuis 2014. Les délégués ont appris que l’Alliance a augmenté sa présence avancée dans la portion orientale de l’Alliance, amélioré sa préparation, commencé à se concentrer sur la réponse aux menaces hybrides, et adopté une approche à 360 degrés en matière de sécurité et de stabilité. L’Alliance a également reconnu l’importance de l’espace pour en termes de dissuasion, de défense et de sécurité en adoptant une politique spatiale, en soulignant le rôle qu’il peut jouer dans l’échange d’information et la coordination des mesures, et en déclarant l’espace comme domaine opérationnel. Cependant, il y a encore du travail à faire, dans des domaines comme le développement de la capacité de défense, l’adaptation aux technologies émergentes et perturbatrices, et le renforcement accru de la complémentarité entre l’OTAN et l’UE.  

En ce qui a trait à la politique nucléaire et de défense, les délégués ont appris que la dissuasion nucléaire est depuis longtemps au cœur des activités de dissuasion de l’OTAN, et que les dirigeants de l’Alliance avaient réitéré lors du sommet de Londres de décembre 2019 qu’« aussi longtemps qu’il y aura des armes nucléaires, l’OTAN restera une alliance nucléaire[5]  ». En ce qui concerne la Russie, on a dit lors de la Réunion conjointe que ce pays a augmenté à la fois ses capacités nucléaires et sa rhétorique connexe au cours des dernières années. En outre, les formidables compétences de la Russie en matière de communication sont axées sur la transmission de messages simples, comme des affirmations selon lesquelles les États-Unis et l’OTAN sont irresponsables, et l’Alliance est divisée.

On a dit que la réussite de la dissuasion nucléaire et de toute autre dissuasion repose sur une combinaison de capacité, de détermination et de communication efficace pour influencer un adversaire éventuel. Au sein de l’OTAN, les États-Unis, le Royaume-Uni et la France possèdent des armes nucléaires. Les délégués ont appris que l’Alliance démontre sa détermination en matière de dissuasion nucléaire par des moyens comme la doctrine et la politique, des exercices et des démonstrations, des déclarations politiques et une grande participation au partage du fardeau nucléaire et autre. Les délégués ont également appris que l’unité est le « centre de gravité » de l’OTAN pour ce qui est des communications sur les questions nucléaires, et que l’Alliance reconnaît la nécessité de faire preuve de transparence et de sensibiliser les citoyens et les opposants éventuels à ses politiques. La plupart des communications de l’OTAN dans ce domaine portent sur le contrôle des armes, et il a été précisé que la couverture de presse des politiques nucléaires de l’OTAN est généralement négative.

Les relations transatlantiques, l’OTAN et l’Union européenne

Depuis des décennies, les relations transatlantiques entre l’Amérique du Nord, qui comprend les alliés de l’OTAN, les États-Unis et le Canada, et l’Europe, qui comprend tous les autres membres de l’OTAN, constituent les principaux piliers de l’OTAN. Ce sont les États-Unis qui offrent les plus grandes contributions à l’OTAN depuis des décennies, et les alliés européens en particulier dépendent de l’engagement des États-Unis vis-à-vis de l’Alliance, et donc de l’Europe. Même s’ils maintiennent cet engagement, les États-Unis soutiennent également que d’autres alliés, surtout ceux d’Europe, devraient consacrer plus d’argent à la défense et se doter de capacités militaires plus importantes et interopérables.

Une autre chose complique la situation : le fait que 22 des membres de l’OTAN, qui seront bientôt 30, sont également membres de l’UE. En plus de s’agrandir au fil des ans, cette Union a élargi son rôle dans les politiques d’affaires étrangères et de défense de ses États membres. Les efforts déployés par les membres de l’UE pour développer de plus fortes capacités militaires au sein de l’Union ont été critiqués par certains aux États-Unis et ailleurs qui estiment que cela affaiblit l’OTAN plutôt que de la renforcer. Une autre critique à l’endroit des initiatives de défense de l’UE est que celles-ci excluent les États qui ne font pas partie de l’UE, dont des alliés de l’OTAN. Pendant des années, cet argument s’appliquait surtout à la Turquie, qui n’est pas membre de l’UE et a des différends avec l’Union, y compris dans la Méditerranée orientale. Cependant, la décision du R.-U. de quitter l’UE signifie que cet argument sur l’exclusion des États non-membres de l’UE pourrait maintenant également s’appliquer au R.-U.

En ce qui concerne la relation États-Unis–OTAN, les délégués ont appris que même si les déclarations et les gestes du président Trump avaient amené de nombreuses personnes à s’interroger sur l’engagement de son administration à l’endroit de l’OTAN, le Congrès des États-Unis a continué d’accorder un solide soutien à l’Alliance. On a pu le constater une fois de plus lorsque la présidente de la Chambre des représentants Nancy Pelosi a mené une grande délégation américaine bipartite à la Réunion conjointe de 2020[6].

Dans une perspective européenne, les délégués ont appris que le lien transatlantique entre l’Europe et l’Amérique du Nord était plus important que jamais. Pour cette raison, la Déclaration de Londres des dirigeants de l’OTAN, qui ont réaffirmé « le lien transatlantique qui unit durablement l’Europe et l’Amérique du Nord » a été très bien accueillie[7]. Les délégués ont également appris que l’OTAN demeure une pierre angulaire pour la défense collective des États de l’UE qui sont également membres de l’OTAN.

En ce qui concerne les initiatives de défense de l’UE, on a dit que la coopération en matière de défense entre l’OTAN et l’UE s’est accrue ces dernières années, comme en attestent des déclarations communes en 2016 et 2018. Même si un certain nombre de délégués ont insisté sur la nécessité de veiller à ce que les efforts de défense de l’UE visent à compléter et renforcer l’OTAN plutôt qu’à l’affaiblir, les Européens ont déclaré que de telles initiatives renforçaient en fait les États membres de l’UE, et donc l’Alliance. Plusieurs délégués ont déclaré que de plus amples discussions et une plus grande coopération pourraient aider à dissiper les doutes à cet égard.

Pour ce qui est de la participation des États non-membres de l’UE, les délégués ont appris que les initiatives de l’UE peuvent être ouvertes à des tiers. Dans le cas de la Coopération structurée permanente de l’UE (CSP ou PESCO en anglais), par exemple, on a expliqué qu’il appartient aux membres de l’UE qui choisissent de participer aux projets de la CSP de décider quels autres États peuvent également participer. Lorsqu’on s’est interrogé sur le cas du R.-U., qui avait investi dans certains programmes de l’UE avant de décider de quitter l’Union, un présentateur a répondu que cette décision avait eu certaines répercussions regrettables.

Les opérations de l’OTAN

Les délégués ont appris que les opérations actuelles de l’OTAN étaient axées soit sur la défense conventionnelle collective, soit sur la projection de stabilité. 

Sur le plan de la défense collective, la fin de la Guerre froide a vu une diminution des forces militaires conventionnelles alliées et de leur niveau de préparation. De plus, après les attaques terroristes du 11 septembre 2001, les États-Unis ont exhorté les Alliés à délaisser les forces militaires lourdes et à les remplacer par de plus légères. Ainsi, au moment de l’agression par la Russie contre la Crimée en 2014, l’OTAN était très faible du point de vue conventionnel, et les membres de l’Alliance ont pris des mesures pendant les années qui ont suivi pour renforcer à la fois leurs forces et leur niveau de préparation. Cependant, les délégués ont appris qu’il y avait encore beaucoup à faire, surtout dans les domaines de la logistique et de la pratique du déplacement de forces multinationales. En ce qui concerne la Présence avancée rehaussée (eFP) de l’OTAN dans les États baltes et la Pologne, dont un élément est dirigé par le Canada, on a dit que même si la combinaison de contingents nationaux multiples sous le niveau des brigades crée certains problèmes opérationnels, ceux-ci sont plus que compensés par l’unité politique dont témoignent ces forces.

Pour ce qui est de la projection de stabilité, l’OTAN continue d’accomplir sa mission de formation des forces de sécurité de l’Afghanistan. Même si l’Alliance avait déjà déclaré que les talibans devaient négocier toute entente de paix avec le gouvernement de l’Afghanistan, les États-Unis sont maintenant à négocier directement une entente de principe avec les talibans. Les délégués ont appris que dans le cadre de cette entente, on envisage une réduction de la présence de forces étrangères pour amener les talibans à amorcer des négociations avec le gouvernement de l’Afghanistan. Il reste à voir comment ce processus se déroulerait.

Les délégués ont également discuté des opérations de l’OTAN qui se poursuivent au Kosovo. On leur a rappelé que l’intervention décisive de l’OTAN il y a plus de 20 ans a mis un terme aux atrocités au Kosovo et que la présence de l’Alliance contribue toujours à la stabilité de la région.

Au Moyen-Orient, des années de guerre civile et la montée de Daech ont considérablement affaibli le gouvernement de l’Iraq, qui en 2018 a demandé à l’OTAN de lancer une mission non combattante, de conseil, de formation et de renforcement des capacités en Iraq. Au moment de la Réunion conjointe, la Mission OTAN en Iraq (NMI) était sous le commandement de la major-général canadienne Jennie Carignan. Même si l’on avait dit que la NMI s’était bien déroulée, les délégués ont appris que les États-Unis avaient tué le major-général Qasem Soleimani en janvier 2020, un mois avant la Réunion conjointe, ce qui a changé le paysage politique. Le parlement iraquien a adopté une résolution non exécutoire exigeant l’expulsion du pays de toutes les forces étrangères, et en particulier de la Coalition mondiale de lutte contre Daech. Cependant, les délégués ont appris que, pour sa part, le gouvernement de l’Iraq voulait que l’OTAN maintienne, et même augmente, sa présence au pays pour l’instant.

Le paysage changeant de la sécurité dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et le rôle de l’OTAN

L’OTAN a augmenté ses partenariats avec des pays ne faisant pas partie de l’OTAN après la fin de la Guerre froide. Dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MOAN), l’OTAN entretient des liens avec des partenaires dans la Méditerranée, des États qui ne se réunissent pas souvent dans d’autres contextes, depuis 25 ans, et a engagé un dialogue politique avec des partenaires dans le Golfe il y a 15 ans[8].

Les attaques de septembre 2001 contre les États-Unis ont incité à mettre davantage l’accent sur la lutte contre le terrorisme en Afghanistan et ailleurs, et, comme il est mentionné plus haut, les délégués ont appris que les gestes illégaux et déstabilisants de la Russie ces dernières années ont entraîné un recentrage sur la défense collective. Comme l’Alliance ne pouvait plus se concentrer sur une seule menace, elle a adopté une approche globale à 360 degrés en matière de sécurité qui inclut une attention portée au Sud.

Les délégués ont appris que la région du MOAN est importante pour l’Alliance de manières bien tangibles. Par exemple, la mer Méditerranée sert essentiellement de pont entre l’Europe et la région. D’un point de vue négatif, cependant, l’instabilité dans la région augmente la migration illégale vers l’Europe. C’est important, étant donné que la région peut être vue comme un arc d’instabilité qui comprend plusieurs États fragiles. Ces dernières années, la région est également devenue un théâtre de concurrence géopolitique, comme on peut le voir avec les interventions de la Russie en Syrie et les investissements de la Chine en Afrique. Pour toutes ces raisons, l’OTAN a intérêt à aider les pays de la région pour la stabiliser.

Il a été mentionné que des facteurs économiques, sociopolitiques, démographiques et climatiques contribuaient à la fragilité des États, qui est un terreau fertile pour la montée de groupes armés non étatiques, dont des terroristes. Bien que l’OTAN n’ait pas le mandat de répondre directement aux enjeux relatifs au climat, elle se soucie de l’incidence du climat sur la sécurité. Les délégués ont appris qu’il est beaucoup plus efficace de prévenir de tels problèmes que d’intervenir plus tard pour les régler. Ils ont appris qu’il y avait un besoin urgent d’une plus grande participation internationale pour soutenir des réformes de développement et de gouvernance dans la région et que l’OTAN, en collaboration avec des partenaires locaux, avait un rôle à jouer dans la création de conditions propices à la stabilité. L’Alliance est déjà engagée dans la formation des forces de sécurité en Iraq, par exemple, et le gouvernement iraquien lui a demandé d’augmenter son soutien. En réponse à leurs questions, les délégués ont également appris que l’OTAN surveille étroitement la situation en Libye, où elle appuie les appels à la réduction de la violence et à la recherche de solutions politiques. De plus, même si l’Alliance a reconnu l’importance du conflit dans la région du Sahel, les délégués ont appris que l’Alliance n’y était pas un acteur militaire, même si elle était à examiner ce qu’elle pouvait faire de plus dans le cadre de son partenariat avec la Mauritanie.

En plus de participer à la Réunion conjointe officielle, certains délégués canadiens ont eu la possibilité de prolonger les discussions sur le contrôle des armes, sur les femmes, la paix et la sécurité et sur la sécurité humaine à l’OTAN. Ils ont conclu que ce sont là des questions très importantes pour l’Alliance, qu’elles devraient bénéficier de ressources plus importantes et qu’elles devraient faire partie intégrante de ses travaux.

La Réunion conjointe de 2020 de la Commission de la défense et de la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité et de la Commission politique ont permis aux délégués canadiens de tenir des discussions approfondies avec des dirigeants de l’OTAN et d’autres dirigeants, ainsi que des parlementaires de l’OTAN, sur des questions touchant la défense, l’économie et la politique préoccupantes pour l’Alliance. Ils ont ainsi appris quels sont les principaux enjeux du programme de l’Alliance, tout en contribuant au débat et en défendant les intérêts canadiens.

Respectueusement soumis,

Julie Dzerowicz, députée
Présidente de l’Association parlementaire canadienne de l’OTAN



[2] « Emmanuel Macron warns Europe: NATO is becoming brain-dead », The Economist, 7 novembre 2019.
[3] OTAN, Déclaration de Londres, publiée par les chefs d’État et de gouvernement participant à la réunion du Conseil de l’Atlantique Nord à Londres, les 3 et 4 décembre 2019.
[5] OTAN, Déclaration de Londres, 3 et 4 décembre 2019.
[7] OTAN, Déclaration de Londres, 3 et 4 décembre 2019.
[8] Les sept partenaires du Dialogue méditerranéen sont : l’Algérie, l’Égypte, Israël, la Jordanie, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie. Voir OTAN, Le dialogue méditerranéen de l’OTAN. L’Initiative de coopération d’Istanbul, lancée en 2004, regroupe quatre pays du Conseil de coopération du Golfe : Bahreïn, Qatar, Koweït et Émirats arabes unis. Selon l’OTAN, l’Arabie saoudite et Oman ont également « exprimé leur intérêt pour l’Initiative ». Voir OTAN, L’Initiative de coopération d’Istanbul (ICI).