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REGS Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Délibérations du Comité mixte permanent
d'Examen de la réglementation

Fascicule 17 - Témoignages du 22 novembre 2012


OTTAWA, le jeudi 22 novembre 2012

Le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation se réunit aujourd'hui, à 8 h 31, pour une séance d'information sur le projet de loi S-12, Loi modifiant la Loi sur les textes réglementaires et le Règlement sur les textes réglementaires en conséquence.

Le sénateur Bob Runciman et Mme Chris Charlton (coprésidents) occupent le fauteuil.

[Traduction]

La coprésidente (Mme Charlton) : À la suite de nos discussions sur le projet de loi S-12 à la dernière réunion du comité, nous avons demandé aux conseillers juridiques de nous préparer une séance d'information détaillée sur le projet de loi. Nous avons depuis reçu une lettre d'invitation du Comité permanent sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles dans laquelle on demande que les coprésidents aillent témoigner devant ce comité au sujet du projet de loi S-12. Ce que je propose ce matin, c'est que nous commencions par la séance d'information des conseillers juridiques, suivie d'une période de questions sur l'information fournie, puis, que nous décidions si les coprésidents devraient accepter l'invitation et comparaître devant le Comité permanent sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles.

Peter Bernhardt, conseiller juridique du comité : Les membres recevront une version papier ainsi que des diapositives PowerPoint qui résument nos propos de ce matin. Voici ce que nous proposons : M. Rousseau prendra la parole en premier pour donner quelques renseignements généraux sur l'incorporation par renvoi, parler des questions que celle-ci pose et résumer l'historique des interventions du comité dans ce dossier. Ensuite, je passerai en revue les dispositions du projet de loi S-12. Le tout devrait durer, on l'espère, seulement 15 à 20 minutes, afin de permettre au comité d'avoir amplement de temps pour la période des questions et des discussions qui s'ensuivra.

[Français]

Jacques Rousseau, conseillier juridique : Comme disait le conseiller juridique principal, je vais d'abord faire un rappel de ce qu'est l'incorporation par renvoi, les justifications de son utilisation, les préoccupations qu'elle suscite, la codification des règles générales concernant son utilisation et, très brièvement, ce qu'on peut voir chez les autres législateurs.

D'abord, qu'est-ce que l'incorporation par renvoi? Lorsque le Parlement confère un pouvoir réglementaire, l'autorité réglementaire exerce généralement ce pouvoir en rédigeant elle-même le règlement requis. Celle-ci peut aussi décider d'utiliser dans le règlement le contenu d'un document qui existe déjà.

Plutôt que de reproduire ce document mot à mot dans le règlement, l'autorité réglementaire peut simplement faire un renvoi au titre du document. On décrit habituellement la conséquence juridique de cette incorporation par renvoi en disant que le libellé du document incorporé est intégré au règlement, comme s'il y avait été reproduit intégralement.

Différents genres de documents peuvent être incorporés par renvoi, incluant la législation du même législateur ou d'un autre législateur; des documents de nature non législative, comme des normes techniques; des accords internationaux et des manuels administratifs.

Au Canada, l'incorporation par renvoi d'un document existant a toujours été considérée comme une simple technique de rédaction et l'autorité réglementaire peut utiliser cette technique sans y être autorisée par un pouvoir particulier. Ce type d'incorporation par renvoi est alors qualifiée de fermée ou statique.

Le résultat de l'incorporation par renvoi fermé d'un document est que la version qui existe au moment de l'incorporation fait désormais partie du règlement. Si le document est modifié après son incorporation, cette modification ne fera pas automatiquement partie du règlement. L'autorité réglementaire qui souhaite adopter cette modification devra modifier le règlement en cause. Le comité n'a jamais contesté ce genre d'incorporation par renvoi.

Une disposition habilitante peut aussi conférer à l'autorité réglementaire le pouvoir d'incorporer par renvoi les modifications subséquentes apportées au document existant. Une façon de conférer ce pouvoir plus large est de prévoir expressément dans la loi habilitante que les règlements peuvent incorporer par renvoi un document externe avec ses modifications successives, appelée incorporation par renvoi évolutif, dynamique ou ouvert.

Une fois que le document est incorporé avec ses modifications successives, toute modification subséquente apportée au document sera automatiquement intégrée au règlement qui y fait renvoi.

Maintenant, les justifications. Plusieurs raisons légitimes justifient l'utilisation de l'incorporation par renvoi. Il y a, entre autres, les nécessités de la coopération fédérale-provinciale, l'intérêt de s'en remettre à des normes techniques élaborées par des organismes non gouvernementaux et l'harmonisation internationalement des normes et des exigences.

D'un point de vue purement bureaucratique, il est aussi appréciable de ne pas avoir à reproduire des documents et l'incorporation par renvoi ouvert fait en sorte qu'il n'est pas nécessaire de modifier le règlement en cause chaque fois que le document incorporé est modifié.

De plus, on justifie fréquemment l'incorporation par renvoi ouvert de documents produits par l'autorité réglementaire elle-même comme étant une approche plus flexible. En fait, on veut dire par là que cela permet d'imposer des règles sans avoir à passer par le processus réglementaire.

Compte tenu de tous ces facteurs, il n'est pas surprenant qu'il y ait eu dans les années récentes une croissance notable de l'utilisation de l'incorporation par renvoi dans la législation déléguée fédérale. Nous sommes maintenant entrés de plusieurs façons dans l'ère postrèglement où de plus en plus de règles se trouvent non pas dans les lois du Parlement, non pas dans des règlements, mais dans d'autres documents. L'incorporation par renvoi et, en particulier, l'incorporation par renvoi ouvert en est un aspect. Il ne fait aucun doute que le recours à cette technique ne fera qu'augmenter.

Passons maintenant aux préoccupations concernant l'utilisation de cette incorporation. L'utilisation de cette technique suscite toutefois des préoccupations quant à la préservation du choix par le Parlement du délégataire auquel il confie un pouvoir législatif, la forme dans laquelle les mesures en cause sont établies et l'accessibilité de ces mesures par les personnes tenues de s'y conformer. Un principe juridique bien établi veut que la personne à qui la loi confère le pouvoir de prendre des règlements ne puisse pas, en l'absence d'une habilitation claire, en déléguer l'exercice à quelqu'un d'autre. Dans le contexte des règlements, cela signifie que l'autorité : le gouverneur en conseil, un ministre, un office, une commission ou un autre organisme, à qui la loi confère le pouvoir de prendre des règlements, ne peut pas en l'absence d'une habilitation claire en déléguer l'exercice à une autre personne ou à un autre organisme. Cela vise à protéger le choix du législateur quant à la personne ou organisme qui exercera le pouvoir délégué.

Si le Parlement délègue au gouverneur en conseil le pouvoir de prendre des règlements régissant des matières particulières et que le règlement qui en résulte incorpore tout simplement une norme du CSA, avec ses modifications successives, qui, en fait, du gouverneur en conseil ou du CSA établit les règles?

Le comité a toujours été d'avis qu'en l'absence d'une délégation expresse de pouvoir ou d'indication claire du contraire dans la loi habilitante, l'incorporation par renvoi d'un document externe est justifiée seulement lorsque c'est la version à une date donnée du document qui est incorporé par opposition à la version avec ses modifications successives.

La position actuelle du ministère de la Justice semble être toutefois que l'incorporation par renvoi ouvert ne comporte aucun élément de subdélégation de pouvoir législatif. Cela a mené jusqu'à ce jour à une controverse. L'intention derrière le projet de loi S-12 est d'y mettre fin. Liée à cette préoccupation est la possibilité, si le document incorporé a été produit par l'autorité réglementaire elle-même, que cette technique soit utilisée pour contourner le processus réglementaire lors de l'incorporation de règles de conduite de fond. Prenons l'exemple d'un règlement sur l'aviation qui incorpore simplement un manuel du ministère des Transports avec ses modifications successives. Tout changement nécessaire peut simplement être ajouté au manuel sans qu'il soit nécessaire de modifier le règlement. Cela évite l'examen par le ministère de la Justice, l'enregistrement, la publication, sans mentionner les exigences du Conseil du Trésor à propos de la consultation, l'analyse d'impact et, enfin, la règle du gouvernement du un pour un, sans compter qu'un pouvoir que le Parlement voulait voir exercé par le gouverneur en conseil est maintenant exercé par le ministère des Transports sous la forme d'une discrétion administrative.

Finalement, l'incorporation par renvoi crée une préoccupation quant à l'accessibilité de la législation. Si nul n'est censé ignorer la loi, les citoyens doivent y avoir accès. Alors que le document incorporé fait désormais partie du règlement en cause, le texte de ce document se trouve ailleurs. En fait, plusieurs documents présentement incorporés par renvoi dans les règlements ne sont pas accessibles selon une interprétation raisonnable de ce mot. Plusieurs normes élaborées par des organismes privés ne sont disponibles que par le biais d'un achat, et le prix peut être conséquent. D'autres sont si obscures qu'il est virtuellement impossible de les retracer. Bien qu'il se puisse que les ministères et agences gouvernementaux aient des copies de toutes ces normes et autres documents, aucune tentative n'est faite pour en informer le public ou pour indiquer qu'ils sont gardés au ministère, à supposer que le public puisse les consulter. Cela est d'autant plus préoccupant quand le document est incorporé avec ses modifications successives. Même si quelqu'un a accès à une norme donnée, si celle-ci a été incorporée avec ses modifications successives, comment cette personne peut-elle savoir si la copie est à jour?

La codification maintenant. Dans la réponse gouvernementale au rapport du comité, le ministre de la Justice a proposé d'envisager une solution législative pour résoudre l'impasse entre le ministère et le comité et pour clarifier les principes régissant l'utilisation de l'incorporation par renvoi ouvert dans les règlements fédéraux.

Évidemment, la clarté est une bonne chose, mais il faut tenir compte des préoccupations qu'elle soulève, non seulement au moment de décider du genre et des sources de documents pouvant être incorporés par renvoi avec leurs modifications successives, mais aussi en concevant des mécanisme améliorés pour l'utilisation de tels documents par les autorités réglementaires. Le comité a proposé parmi ses recommandations au ministre de la Justice un régime permettant généralement l'incorporation par renvoi ouvert de la législation fédérale et provinciale. Toutefois, dans le cas de la législation étrangère, des documents produits par le gouvernement fédéral ou créés par des organismes non gouvernementaux, l'incorporation par renvoi ouvert ne devrait être permise que si le libellé de la loi habilitante en cause le permet.

Maintenant, rapidement, deux mots sur ce qu'on voit chez les autres législateurs. Ceux de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande, du Manitoba et de l'Ontario ont adopté des règles générales concernant l'incorporation par renvoi ouvert. Certains le permettent, d'autres l'interdisent expressément en l'absence d'une autorisation explicite.

Je vais terminer en disant qu'au moment d'évaluer une approche générale, il faut se rappeler que le délégué du Parlement, par l'incorporation par renvoi ouvert, choisit une autre personne pour exercer une partie de sa fonction législative. Il en est ainsi, que l'on considère ou non que cela constitue une subdélégation formelle. C'est clairement faire une analyse trop formaliste que de s'en tenir au fait que le règlement en cause énonce la règle à suivre et que, par conséquent, le document incorporé est seulement une affaire de technique. Sur ce, je cède la parole à mon collègue pour un examen article par article du projet de loi S-12.

[Traduction]

M. Bernhardt : Maintenant que le contexte est clair, nous passons au projet de loi S-12 lui-même. Si cette mesure législative est adoptée, les règles générales relatives à l'utilisation de l'incorporation par renvoi d'un document avec ses modifications successives feront partie de la Loi sur les textes réglementaires. Le projet de loi les ajoutera aux articles 18.1 à 18.7.

D'entrée de jeu, je suppose qu'il ne fait aucun doute que le contenu du projet de loi, voire le projet de loi lui-même, relève du mandat du comité. En vertu de son mandat général, le comité est autorisé à faire enquête et rapport sur les principes et les pratiques qu'il convient d'observer dans la rédaction des pouvoirs permettant aux délégués du Parlement de faire des lois subordonnées, dans l'adoption des textes réglementaires et dans l'utilisation du règlement exécutif et la façon dont le contrôle parlementaire devrait être effectué à cet égard. De toute évidence, c'est ce que vise le projet de loi dont nous sommes saisis.

Le principe de base énoncé dans le projet de loi se trouve au paragraphe 18.1(1). Cette disposition prévoit que le pouvoir de prendre un règlement comporte celui d'y incorporer par renvoi tout ou partie d'un document, soit dans sa version à une date donnée, soit avec ses modifications successives. Autrement dit, une autorité réglementaire pourrait toujours avoir recours à l'incorporation par renvoi ouvert. Évidemment, il s'agit d'une approche beaucoup plus large que celle que préconise le comité.

Il y a toutefois des limites, et elles sont énoncées au paragraphe 18.1(2). Il y en a trois. Tout d'abord, cette disposition prévoit une exception générale à la règle de l'incorporation par renvoi ouvert, qui fait que l'autorité réglementaire ne peut incorporer par renvoi un document qu'elle a établi, seule ou conjointement avec une personne ou un organisme qui appartient à l'administration fédérale.

Ensuite, il y a l'exception générale selon laquelle l'incorporation par renvoi ouvert ne s'applique pas aux documents que l'autorité réglementaire a elle-même créés. Évidemment, comme toute mesure législative moderne, le projet de loi prévoit des exceptions à l'exception. Tout d'abord, si le document — comme le dit le projet de loi — contient uniquement des éléments accessoires aux règles énoncées dans le règlement ou étoffant celles-ci et est incorporé dans sa version à une date donnée, l'autorité réglementaire peut incorporer par renvoi un document qu'elle a établi. Ce serait une incorporation par renvoi fermé. C'est conforme à la position du comité. Comme on l'a dit tout à l'heure, le comité ne s'est jamais opposé à l'incorporation par renvoi fermé, c'est-à-dire à l'incorporation d'un document comme il existe à une date donnée.

Bien entendu, cette disposition vise à faire en sorte que l'autorité réglementaire ne puisse pas contourner le processus d'élaboration de règlements en adoptant le contenu d'un règlement dans un document séparé et en l'incorporant avec ses modifications successives; cette disposition empêcherait une telle pratique.

Deuxièmement, l'autorité réglementaire peut incorporer un document s'il est issu de la reproduction ou de la traduction d'un document établi par une personne ou un organisme autre qu'elle-même. Par exemple, si on souhaite incorporer une norme d'un institut d'ingénierie allemand, le ministère préparera une traduction de ce document vers l'anglais et le français et pourra ensuite l'incorporer.

Je pense que l'objectif ici est de préciser que le document n'appartient pas vraiment à l'autorité réglementaire. Elle l'a traduit, mais ce n'est pas elle qui a produit le document proprement dit. Ce n'est pas stipulé explicitement, mais on peut présumer que cela permettrait également d'incorporer le document avec ses modifications successives.

Enfin, l'autorité réglementaire peut incorporer un règlement qu'elle a adopté avec ses modifications successives. Si l'autorité réglementaire a un autre règlement qu'elle souhaite adopter et intégrer à un deuxième règlement qu'elle a également adopté, elle peut le faire avec ses modifications successives. Encore une fois, je pense que c'est conforme à la position du comité. Dans ce cas-ci, la subdélégation d'autorité ne pose pas de problème parce que c'est la même autorité réglementaire qui prend les deux règlements. Il n'y aurait pas de problème d'accès à l'autre règlement incorporé parce que celui-ci sera enregistré, publié et soumis au processus global d'élaboration de règlements. Par conséquent, il n'y a pas vraiment de problème si on incorpore en alternance des règlements fédéraux, même s'ils sont pris par la même personne.

Je dois toutefois faire remarquer que rien n'empêcherait un ministre d'incorporer un document produit par un autre organisme du gouvernement fédéral avec ses modifications successives. Parmi les exemples, mentionnons les lignes directrices du Conseil du Trésor. On les voit souvent dans des règlements, comme une liste de dépenses autorisées pour des fonctionnaires. Parfois, le règlement établira un montant et stipulera que : « les montants ont été décidés conformément aux lignes directrices du Conseil du Trésor avec leurs modifications successives. » Ce serait permis dans ce cas-ci.

Passons maintenant au nouveau paragraphe 18.1(3), qui porte sur les formules. Il s'agit d'une autre question que le comité connaît très bien. Ce paragraphe permettrait l'utilisation de formules dont un des facteurs variera après l'adoption du règlement. Le comité a déjà vu, par exemple, un règlement qui pourrait prévoir un taux d'intérêt au taux préférentiel plus 1 p. 100 ou imposer un droit qui augmentera automatiquement selon les augmentations de l'indice des prix à la consommation.

Avec de telles formules, le montant réel des droits ou frais dépend de ce que fera plus tard une autre personne. Le comité a toujours estimé qu'il en résulte une subdélégation du pouvoir de déterminer le montant des droits. En vertu du paragraphe 18.1(3), chaque pouvoir de l'autorité réglementaire devrait être interprété comme incluant un pouvoir d'imposer ce type de formule.

Il vaut la peine de noter également que cette disposition permettrait l'adoption d'indices, taux et nombres établis par tous les organismes autres que l'autorité réglementaire. Encore une fois, on ne serait pas en mesure d'incorporer de cette façon un document qu'on a établi soi-même, mais on pourrait, comme je l'ai dit, incorporer quelque chose comme un indice des prix à la consommation ou des manuels du Conseil du Trésor, et cetera.

Le paragraphe 18.1(4) définit l'expression « autorité réglementaire » aux fins des paragraphes 18.1(2) et (3). Il élargit le sens qu'on attribue normalement à une autorité réglementaire. Par exemple, si l'autorité réglementaire est le gouverneur en conseil ou le Conseil du Trésor, le ministre qui recommande de prendre le règlement, le ministre responsable de son exécution et toute autre personne ou tout autre organisme dont le ministre est responsable sont aussi considérés comme une autorité réglementaire. Dans les cas où l'autorité réglementaire n'est ni le gouverneur en conseil, ni le Conseil du Trésor ni un ministre, l'autorité réglementaire inclurait le ministre responsable devant le Parlement.

Je pense que le but de cette disposition est d'empêcher l'incorporation de documents produits sous la responsabilité d'un même ministre, mais par recours à un autre aspect du pouvoir du ministre. Cela empêcherait ainsi la pratique de l'« aller-retour ». On se dit : « Eh bien, je ne peux pas incorporer mon propre document avec ses modifications successives, mais j'ai une autre responsabilité en vertu d'une autre loi; je vais donc l'incorporer là-dedans, puis, en utilisant mon pouvoir, je vais faire une permutation. » Cette disposition s'applique à tout ce qui relève de la responsabilité du ministre. Tout cela sera visé par la définition d'autorité réglementaire.

Une disposition très importante est ensuite proposée à l'article 18.2, qui stipule ceci :

Les pouvoirs conférés par l'article 18.1 s'ajoutent à tout pouvoir d'incorporation par renvoi que confère la loi habilitante en cause et cet article [18.1] ne limite pas ce pouvoir.

Aux termes de cet article, il est clair que les pouvoirs conférés par l'article 18.1 auront pour effet, dans plusieurs cas, d'augmenter et d'étendre les pouvoirs réglementaires contenus dans les lois fédérales. L'article 18.1 est donc davantage qu'une simple codification de la disponibilité de l'incorporation par renvoi en tant que technique de rédaction. Un exemple serait un pouvoir de prendre des règlements qui prescrivent une norme. De l'avis du comité, cela n'autoriserait pas l'incorporation par renvoi ouvert d'une norme externe. L'existence des dispositions générales comme celles prévues dans l'article 18.1 élargirait la portée de tels pouvoirs. Je crois qu'on peut dire sans se tromper que des centaines, voire des milliers, de pouvoirs d'élaboration de règlements actuellement prévus dans la législation fédérale seront élargis de cette façon.

En même temps, il y a aussi des lois qui confèrent maintenant un pouvoir général d'incorporer un document avec ses modifications successives, peu importe sa source. Cela permettrait expressément à une autorité réglementaire d'incorporer les documents administratifs qu'elle a produits elle-même. Je pense qu'on en trouve des exemples dans la Loi sur l'aéronautique et la Loi sur les aliments et drogues. En stipulant que rien dans l'article 18.1 ne limite ces pouvoirs, l'article 18.2 établirait clairement que les limites énoncées à l'article 18.1 ne s'appliqueraient pas à ces pouvoirs généraux là où ils existent maintenant.

Passons maintenant à l'article 18.3. Comme on en a déjà longuement parlé, l'incorporation par renvoi soulève des questions d'accessibilité. Le contenu des documents ne figure pas dans le règlement. Lorsque les documents sont incorporés avec leurs modifications successives, cela aggrave ces préoccupations. Il sera d'autant plus difficile de savoir quelle version d'un document particulier est applicable à un moment précis. On pourrait dire que l'imprécision de l'article 18.3 soulève plusieurs questions. Cette disposition prévoit simplement que l'autorité réglementaire veille à ce que le document incorporé soit accessible.

La question qui vient tout de suite à l'esprit, c'est qu'est-ce qui constitue un document « accessible »? Est-il suffisant de fournir le nom et l'adresse du siège social de l'organisme qui a créé les documents? Peut-on se contenter de désigner l'organisme qui a élaboré le document? Lorsqu'il faut payer pour avoir accès à un document, peut-on dire qu'il est accessible? Si les copies du document se trouvent uniquement à l'extérieur de la région où réside la personne, voire même à l'extérieur du Canada, peut-on dire qu'il est accessible? Si le document est affiché sur Internet, est-il suffisant de fournir l'adresse du site Web? Faut-il également fournir d'autres éléments permettant de communiquer avec l'organisme? Lorsqu'un document existe uniquement dans une langue officielle, peut-on dire qu'il est accessible à une personne qui ne parle pas nécessairement cette langue? Au bout du compte, lorsque ces questions sont soulevées au cas par cas, il revient aux tribunaux de décider si le document est accessible dans un cas particulier.

On peut comparer cela avec les exigences que l'on voit dans certains autres pays. Par exemple, une autorité réglementaire pourrait être tenue de mettre des copies du document à la disposition de ceux qui le demandent. Si un document est incorporé par renvoi, y aurait-il une objection ou une exigence qui ferait en sorte qu'une copie de ce document soit conservée et accessible au public? Certains pays ont même mis sur pied un registre ou dépôt central de documents incorporés que le public peut consulter.

Dans ses recommandations au ministre de la Justice, le comité mixte mentionne un certain nombre de ces pays et dit considérer que les exigences claires et précises en matière d'avis et de disponibilité seraient préférables à une obligation simple et plus générale de rendre les choses accessibles.

Au bout du compte, lorsqu'on parle d'accessibilité, on revient à une question fondamentale. Si les documents incorporés par renvoi sont considérés comme faisant partie du règlement, ne serait-il pas justifié en principe que ces documents soient tout aussi accessibles que le règlement lui-même? Je laisse au comité le soin de se pencher sur cette question, bien sûr.

Le nouvel article 18.4 précise qu'un document incorporé par renvoi n'a pas à être enregistré ni publié dans la Gazette du Canada du seul fait de son incorporation. Il semble permettre la publication des documents incorporés, mais sans l'exiger. Cela ne toucherait pas les mesures qui contiennent une obligation particulière de publication dans un cas précis.

L'article 18.5 crée une présomption relative à la preuve pour les instances judiciaires faisant intervenir le document, l'indice, le taux ou le nombre qui a été incorporé. Dans le cas d'un règlement, la Loi sur les textes réglementaires prévoit que la publication dans la Gazette du Canada constitue une preuve du règlement en cour, et puisque le document incorporé ne sera pas publié dans la Gazette du Canada, il doit y avoir une autre règle équivalente. C'est prévu à l'article 18.5.

Le sénateur Moore : Quelle est la règle? Comment est-ce couvert?

M. Bernhardt : La Couronne présente une copie du document incorporé et atteste qu'il s'agit de la version appropriée du document qui a été incorporé. C'est accepté en cour comme preuve du document.

L'article 18.6 prévoit une défense, en ce sens qu'il indique qu'aucune déclaration de culpabilité ni aucune sanction administrative ne peut découler d'une contravention faisant intervenir un document incorporé par renvoi si le document en question n'était pas accessible à la personne en cause. On trouve un moyen de défense semblable dans la Loi sur les textes réglementaires concernant la contravention à un règlement qui n'a pas encore été publié dans la Gazette du Canada. La défense est le reflet d'une recommandation formulée par le comité. Il convient toutefois de noter que l'article autoriserait le fait de lancer une poursuite ou de prendre une sanction administrative contre une personne qui a contrevenu à des documents incorporés par renvoi, même lorsque l'autorité réglementaire n'a pris aucune mesure pour s'assurer que ces documents soient accessibles, pourvu que ces derniers soient autrement accessibles. S'ils étaient accessibles ailleurs, même si l'autorité réglementaire ne s'est pas acquittée de son obligation en vertu de l'article 18.3, on peut tout de même obtenir une condamnation. La portée de cette disposition dépend du sens du mot « accessible ».

Le comité a toujours affirmé que ce moyen de défense est nécessaire, mais qu'il ne peut entièrement remplacer les exigences clairement définies relatives à l'accessibilité des documents incorporés. De toute évidence, un moyen de défense peut seulement être invoqué lorsqu'une personne a été accusée et qu'elle se présente devant un juge. Un tribunal peut juger s'il y a eu un accès suffisant, mais cela ne règle pas la question de l'accessibilité au départ.

Le nouvel article 18.7 est intéressant, en ce sens qu'il confirme que les incorporations par renvoi que l'on trouve actuellement dans les règlements fédéraux sont valides si elles satisfont aux exigences prévues à l'article 18.1. Cela traduit la position du ministère de la Justice voulant qu'aucune autorisation expresse ne soit maintenant exigée pour l'incorporation par renvoi ouvert. Le comité est d'avis que l'article 18.7 aurait pour effet de valider rétroactivement un grand nombre de dispositions qui ont été adoptées sans fondement législatif. Il est également difficile de réconcilier la confirmation de la validité des incorporations par renvoi ouvert dans les règlements fédéraux avec le projet d'article 18.2, qui énonce que les pouvoirs attribués par l'article 18.1 s'ajoutent à tout pouvoir existant. D'un côté, on confirme les pouvoirs existants, alors que de l'autre, on dit qu'on ajoute aux pouvoirs existants.

Les articles 3 et 4 du projet de loi modifient la version française de la Loi sur les textes réglementaires et le règlement pour remplacer le terme « autorité réglementante » par « autorité réglementaire ». Il s'agit simplement d'une modification de peu d'importance dans le libellé.

Voilà qui conclut nos observations, qui ont été, et je m'en excuse, un peu plus longues que prévu.

La coprésidente (Mme Charlton) : Je vous remercie de ce compte rendu exhaustif, monsieur.

Je propose deux façons de procéder. D'abord, nous devrions peut-être passer aux questions concernant le compte rendu, sur la question générale qui a été présentée ou sur le projet de loi plus précisément. Lorsque nous aurons terminé les questions et les réponses, nous nous pencherons sur la question dont est saisi le comité aujourd'hui, en ce qui a trait à la comparution devant le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.

Quelqu'un veut-il poser des questions au conseiller juridique au sujet de l'exposé?

[Français]

Le sénateur Bellemare : J'ai une question pour le spécialiste. J'ai écouté attentivement ce que vous nous avez dit concernant le projet de loi S-12. Je vais vous amener un peu à l'extérieur de cela. On vit dans un monde économique de plus en plus interdépendant, un monde où le travail se spécialise à l'échelle internationale, et il y a toutes sortes de réglementations volontaires ou non qui se forment, légalement ou pas, mais peu importe. Comment, selon votre expertise, un gouvernement peut-il prendre acte de ces développements à l'échelle internationale dans son processus réglementaire, tout en ayant la rapidité de s'adapter à notre monde d'aujourd'hui?

[Traduction]

M. Bernhardt : C'est certainement un sujet de préoccupation et l'une des raisons pour lesquelles on met de plus en plus l'accent, avec l'évolution du monde, sur l'incorporation par renvoi. Parfois, je dis que nous nous dirigeons vers une période d'après-réglementation. À l'origine, les gens ont commencé à prendre des règlements parce qu'il y avait trop de détails techniques à intégrer à un projet de loi et que les parlementaires ne pouvaient pas tous les passer en revue. Nous avons entendu de nombreuses critiques à propos de lois cadres dont tous les détails se trouvent dans le règlement. Étant donné que le monde devient de plus en plus rapide et complexe, nous commençons presque à voir des règlements cadres, dont les détails sont laissés à ce que certaines compétences appellent le « droit souple » — les diverses normes internationales et divers traités et manuels administratifs internationaux, ce qui soulève des questions quant à leur statut, à la façon de leur donner un statut applicable, et ainsi de suite. C'est pourquoi l'incorporation par renvoi est de plus en plus courante, mais elle a ses pièges.

La question que le comité doit se poser est la suivante : Comment trouver le bon équilibre pour assurer la souplesse et l'adaptabilité dont a besoin un gouvernement moderne, tout en s'assurant, premièrement, que les gens peuvent trouver la loi qu'ils sont tenus de respecter et, deuxièmement, qu'elle est présentée de façon cohérente?

Quand on a un règlement, on a la Gazette du Canada et les codifications actuelles; il est donc facile de savoir où se trouve le règlement, ce qu'il dit et ce qu'il disait. C'est souvent un problème, surtout dans des domaines comme l'impôt sur le revenu. Lorsque survient un conflit, la question n'est pas tant de savoir ce que dit la loi ou le règlement à l'heure actuelle, mais peut-être de savoir ce qu'elle disait il y a trois ou quatre ans, compte tenu de l'essence du litige. S'il s'agit d'un document incorporé, il peut être bien que le gouvernement le tienne à jour, mais on voudra peut-être savoir ce que cette version disait trois ans auparavant. Pourra-t-on la trouver? Il y a aussi les questions relatives à la responsabilité devant le Parlement. Si le Parlement accorde à quelqu'un le pouvoir de faire une chose, alors il s'attend à ce que ce soit cette personne qui élabore la mesure législative.

En fin de compte, la question n'est pas tant de savoir si l'incorporation par renvoi est bonne ou mauvaise, mais plutôt de savoir s'il devrait y avoir des limites lorsqu'il y a incorporation par renvoi. Quelles devraient être ces limites? Comment faire pour mettre en place les mesures de protection nécessaires pour s'assurer que les gens ont accès à la loi et que le gouvernement a la responsabilité de veiller à ce que les gens aient cet accès? Il est très facile pour les bureaucrates de simplement prendre une norme, de dire qu'elle est excellente, de l'adopter et de l'inclure dans le règlement — et le problème est réglé. Mais ils continuent d'être responsables, par la suite, de s'assurer que les gens peuvent avoir accès au document. Je doute qu'il soit satisfaisant de dire que les gens peuvent l'obtenir de l'organisation. Si un gouvernement veut que cela fasse partie du règlement, il a la responsabilité, par la suite, de s'assurer que les gens y ont accès.

Je ne sais pas si cela nuit nécessairement à l'adaptabilité. Il peut tout de même s'adapter aux circonstances changeantes.

[Français]

M. Rousseau : J'aimerais ajouter que quand on regarde ce qui se fait ailleurs, dans les documents qui vous ont été fournis aujourd'hui, parmi les différentes recommandations que le comité a faites au ministre, il y avait quand même une description de ce que signifie l'accessibilité dans d'autres juridictions, dans d'autres pays.

On a certes donné des pouvoirs de faire des incorporations par renvoi ouvert, mais on a aussi balisé beaucoup plus ce que l'autorité qui avait recours à l'incorporation par renvoi devait faire pour s'assurer que c'était un document accessible. Je pense qu'on ne retrouve rien de cela dans le projet de loi S-12, c'est clair. Donc en même temps, dans certains autres pays, on a, oui, permis cette façon de s'adapter rapidement au changement, mais en même temps on a prévu des règles très claires pour ce qui est de s'assurer qu'un document soit accessible. Ici, on a simplement une exigence qu'il soit accessible ou « autrement accessible ». Une fois que vous êtes rendu en cour, on en est rendu à « autrement accessible ».

Mme Ayala : Cela me semble très délicat, parce que supposément qu'une fois la loi produite, tous les citoyens sont censés la connaître. Dans ce sens, je trouve que l'accessibilité est fondamentale. C'est important aussi de savoir qui fait la loi et qui fait les règlements. Qu'est-ce que vous proposez? Vous avez parlé des exemples provenant d'autres pays, mais plus clairement dans la réalité du Canada? Parce qu'il me semble que si quelqu'un ne connaît pas la réglementation en tant que telle, il va être puni. Mais s'ils n'ont pas eu accès à cette information, les gens sont donc dans l'ignorance. J'aimerais que vous expliquiez un peu plus, parce que c'est un droit fondamental pour les citoyens de savoir et d'avoir accès.

M. Rousseau : Plusieurs mécanismes sont disponibles qu'il est possible d'envisager ou qui sont déjà en place dans d'autres pays. On pourrait idéalement penser à un registre central. On pourrait aussi penser à un système où les ministères ont l'obligation de conserver une copie d'un document qui a été incorporé, pour ensuite conserver une copie des modifications qui sont apportées. Comme mon collègue le soulignait, à un moment donné, cela peut être très important de savoir quelle était, au moment des faits, la version du document incorporé qui faisait partie de ce qu'on appelle le droit du pays. Idéalement, il y aurait un registre des documents incorporés. Il pourrait y avoir une obligation beaucoup plus détaillée pour chaque ministère afin de conserver un document, de faire savoir où on peut en prendre connaissance; évidemment, en prendre connaissance dans des périodes qui sont raisonnables, et puis, probablement avoir une publicité autour du respect de ces exigences.

[Traduction]

M. Albas : J'ai une question à poser au conseiller juridique par votre entremise. J'ai pour habitude de rencontrer les gens d'affaires quand je vais dans ma circonscription. J'y ai rencontré un entrepreneur en électricité, et je sais que ces gens doivent parfois acheter des manuels fort coûteux afin de se conformer aux normes de sécurité et de veiller à ce que leurs employés agissent en tout temps de façon sécuritaire et s'occupent bien des consommateurs.

Le coût des manuels de sécurité se justifie par la grande quantité de recherches nécessaires pour les produire. Je ne dirai pas s'il est bon ou non de suggérer que le gouvernement envisage de mettre en place un registre central. J'en ai entendu parler pour la première fois dans l'exposé d'aujourd'hui. J'ai demandé pourquoi il devait payer pour cela. Il m'a dit que les coûts sont assumés par sa clientèle parce qu'il ne devrait pas revenir aux contribuables canadiens de payer pour qu'il ait accès à ces règlements afin que ses employés agissent de façon sécuritaire, et qu'il adopte les normes les plus élevées. Il dit que cela fait partie intégrante du système et que s'il effectue un nouveau travail en électricité, il refile cela au consommateur.

S'il y avait une base de données centrale pour les manuels de sécurité de ce genre, est-ce que ce serait les contribuables en général qui en assumeraient les coûts? Est-ce là l'idée?

M. Bernhardt : Je crois que oui. Rappelez-vous que nous parlons ici de la loi. C'est peut-être un manuel, mais lorsqu'il est incorporé par renvoi, c'est la loi. Le public devrait-il être obligé d'acheter la loi? Je ne fais que soulever cette question de pure forme.

M. Albas : J'ai visité ces entreprises et j'ai posé la question. Le propriétaire de l'entreprise m'a dit : « Je travaille à protéger non seulement mes clients, pour qui j'installe ces systèmes, mais aussi mes employés, et à m'assurer qu'ils respectent les normes. Je l'achète aussitôt qu'il y a une mise à jour, car je maintiens les normes les plus élevées dans mon entreprise. » Il a laissé entendre que ce ne serait pas la bonne approche. Encore une fois, c'est une idée dont je n'ai pas beaucoup entendu parler, et je suis heureux que cette question soit soulevée aujourd'hui.

M. Bernhardt : Je tiens à préciser que la loi est censée être accessible à tous, pas seulement à un entrepreneur qui est tenu de la respecter. En tant qu'avocat, si je veux avoir accès à cette loi, ou si un professeur de droit, un journaliste ou tout simplement un citoyen intéressé veut avoir accès à la loi, c'est la loi. S'il s'agit d'une loi ou d'un règlement, j'y ai accès facilement et gratuitement, car c'est la loi. Dans notre système de droit et de gouvernement, c'est généralement un fait que la loi doit être accessible à tous. Les choses se compliquent lorsqu'on commence à incorporer des choses par renvoi, car elle devient automatiquement moins accessible. La question est de savoir jusqu'à quel point il est acceptable d'en réduire l'accessibilité.

M. Albas : Souvent, c'est imputable aux coûts de production du manuel et aux connaissances techniques que celui-ci requiert. C'est donc une question à laquelle nous devrons faire face à l'avenir. Toutefois, d'après la personne à laquelle j'ai parlé, je suis certain que, si quelqu'un souhaitait consulter la norme, il pourrait demander à l'entrepreneur s'il la respecte et s'il est possible d'y jeter un coup d'œil. Il pourrait s'adresser à l'organisation elle-même. Je ne crois pas que les gens répugnent à donner accès au manuel, mais il y a des coûts qui se rattachent à l'accès lorsque le domaine est spécialisé. Sur le plan pratique, je signale que, d'après les gens de ma circonscription auxquels j'ai parlé, ce n'est pas la norme dans l'industrie en question.

Le sénateur Moore : L'idée d'une bibliothèque de dépôt m'intrigue. Cela veut-il dire qu'il y en aurait une seule à Ottawa? Y en aurait-il une dans chaque province et dans chaque territoire? Comment le document serait-il offert? Une copie papier serait-elle disponible? Le document serait-il accessible seulement en ligne? Les gens n'auraient pas tous accès à la bibliothèque; le document ne serait pas accessible partout au pays.

Selon moi, la question de l'accès soulevée par Mme Ayala est importante, parce que nous cherchons à rendre notre pays meilleur pour ses citoyens. Cela laisse de nombreuses questions en suspens.

Je me souviens d'une mesure législative qu'on avait tenté de faire adopter dans le passé et qui stipulait que certaines de ses dispositions ne seraient pas des règlements en vertu de la Loi sur les textes réglementaires et que, par conséquent, elles ne pourraient pas être examinées par le Parlement ou notre comité. Au lieu d'indiquer quelque chose dans un projet de loi que le Parlement ou notre comité peut examiner, quelqu'un pourrait-il incorporer par renvoi un article qui stipulerait la même chose, de sorte que nous ne saurions même pas que cela est en train de se produire?

M. Bernhardt : Je ne suis pas certain de comprendre clairement le mécanisme qu'ils utiliseraient. Le texte incorporé peut être examiné par le comité. Il ne sera pas enregistré, ni publié. Toutefois, parce que le texte est incorporé au Règlement, il sera toujours soumis à l'examen du comité. Certaines lois permettent à certains éléments d'échapper à la portée de la Loi sur les textes réglementaires mais, en règle générale, le texte incorporé au Règlement est soumis à l'examen du comité.

Encore une fois, nous allons faire face aux mêmes problèmes d'accessibilité que rencontre tout autre membre du public; il nous faudra repérer le document en premier lieu, puis, nous assurer que nous sommes en mesure d'en obtenir une copie, que celle-ci est à jour, et cetera.

Encore une fois, le problème se posera peut-être plus tard. Vraisemblablement, le document pourra être examiné lorsque le Règlement sera établi et que le document sera incorporé pour la première fois. Toutefois, il est peu probable, selon moi, que le comité apprenne que le document a été modifié ou qu'il le revoit chaque fois qu'il l'a été.

Le sénateur Moore : En pratique, quelle incidence cela a-t-il sur votre bureau? Comment pouvez-vous suivre ce qui se passe si les processus ne déroulent plus comme par le passé? Cela aura, bien entendu, des répercussions sur nous et sur notre travail en comité.

M. Bernhardt : D'une part, le comité sera certainement moins saisi de problèmes de sous-délégation et de questions de savoir si une incorporation par renvoi est valide ou si une certaine formule est autorisée. Les dispositions que nous examinons en ce moment autorisent ce genre de choses d'une manière générale.

En ce qui concerne l'examen des documents, si une norme ou un manuel est incorporé par renvoi, nous y jetterons un coup d'œil au cours de notre examen du Règlement.

Le sénateur Moore : Comment en êtes-vous avertis?

M. Bernhardt : Le Règlement le mentionnera. Par exemple, il indiquera ce qui suit : « chaque entrepreneur doit se conformer à la norme de sécurité sur l'électricité X, Y, Z de la CSA, avec ses modifications successives ». Nous nous procurerons la version de la norme qui est en vigueur à ce moment-là, et nous l'examinerons afin de nous assurer qu'elle ne présente pas des exigences qui dépassent complètement la portée de la loi. Une fois que cet examen aura été achevé, si un problème a été découvert, le comité pourra le signaler et indiquer que la norme a besoin d'être adaptée ou modifiée. Cela pourrait être problématique, parce que la norme ne relève pas de l'organisme de réglementation.

Cela mis à part, à supposer que la norme ne pose pas de problème à ce moment-là, l'autre difficulté tient essentiellement au fait que les versions suivantes de la norme risquent de ne jamais être examinées. De nouveaux règlements ne seront pas nécessairement ajoutés, et ceux qui existent ne seront pas nécessairement modifiés. Nous ne sommes certainement pas en mesure de signaler tous les changements apportés à toutes les normes établies à l'échelle mondiale qui pourraient être incorporées par renvoi à des règlements fédéraux.

Le sénateur Moore : Et pourtant, cela pourrait survenir.

M. Bernhardt : Oui.

Le sénateur Moore : C'est ce que je pensais. Si ce projet de loi est adopté, je ne comprends pas comment, en pratique, vous allez vous y prendre.

M. Bernhardt : Nous agirons exactement comme nous le faisons en ce moment lorsque nous croisons une incorporation par renvoi. Nous jetterons un coup d'œil à la version courante de la norme lorsque nous examinerons le Règlement.

Le sénateur Moore : Ensuite, il faudra l'examiner en tenant compte de nos propres lois et de la Charte des droits de la personne — il nous faudra nous acquitter de toutes les tâches que nous accomplissons normalement pour remplir notre mandat. On devra examiner des lois, des normes et des documents étrangers pour voir s'ils...

M. Bernhardt : C'est souvent le cas. Jetons un coup d'œil à un document publié par l'Organisation maritime internationale. Si vous l'examinez, vous constaterez qu'il n'est pas rédigé comme un règlement fédéral et qu'il peut être difficile de combiner les deux. Nous avons remarqué, par exemple, que lorsque l'on passe de l'anglais au français, la terminologie utilisée n'est pas toujours uniforme, ce qui ne serait pas toléré dans nos règlements. Toutefois, si nous soulevons la question, on nous répond que c'est une convention internationale, que c'est la version officielle à laquelle ils sont arrivés et qu'on n'y peut rien. Lorsque la prochaine réunion portant sur la convention aura lieu dans quelques années, nous pourrions peut-être suggérer que ces modifications soient apportées à la convention. Toutefois, nous ne faisons qu'adapter le libellé de la convention.

[Français]

Mme Ayala : On a parlé de coûts et d'accessibilité. Le président d'une compagnie devra payer pour cela. La démocratie n'a pas de prix. Cela signifie peut-être qu'il faudra engager plus de spécialistes. Il faut protéger notre système démocratique, c'est aussi pour cela que nous sommes ici. On ne peut pas dire que cela coûte plus cher à ceux qui paient cela.

M. Rousseau : Une chose doit être claire, il n'y a pas moins de règles à observer, mais de plus en plus. Le fait qu'on ait de plus en plus recours à l'incorporation par renvoi, ouvert en plus, fait qu'on légifère facilement. On peut incorporer des choses qui ont été déjà rédigées, mais globalement, il y a de plus en plus de règles.

Juste en matière d'aviation, c'est extraordinaire. Je défie quiconque, n'importe quel avocat du ministère des Transports, de venir ici pour répondre aux questions qu'on pourrait lui poser. Les membres du comité posent des questions au ministère des Transports sur le règlement, et trois ans plus tard, il est encore en train de faire des études pour répondre à la question, à des vérifications ou autres. Ce règlement, qui doit faire 400 pages, incorpore une tonne de normes rédigées par le ministère, et certains des commentaires que nous faisons ont trait au fait que la norme qui est incorporée ne concorde pas avec celle qui est dans le règlement. Elle est censée la préciser. On a donc constamment un problème d'ajustement de toutes ces normes. Comme je vous dis, c'est impossible d'avoir une vue d'ensemble de tout cela.

Pour répondre au sénateur, notre travail, maintenant, consiste parfois à dire que la norme qui a été incorporée ne concorde pas du tout avec la norme prévue dans le règlement, elle ne la complète pas du tout, et au contraire la contredit. On a eu des cas comme cela, évidemment, et cela va continuer. Ultimement, oui.

En résumé, oui, pour faire le travail, il faudrait être beaucoup plus nombreux que les quatre avocats que nous sommes présentement.

[Traduction]

M. Vellacott : J'ai deux questions à poser. L'une d'elles est liée à la question que le sénateur Moore a posée. Compte tenu de vos compétences, pensez-vous vraiment qu'aux fins du comité et de l'examen de la réglementation, vous serez dans l'impossibilité de repérer les textes réglementaires incorporés à ces divers règlements, dans les mois et les années à venir? Cela pourra exiger davantage de temps mais, grâce à votre degré de compétence et aux connaissances auxquels nous avons accès par votre entremise, vous serez sûrement toujours en mesure de le faire.

M. Bernhardt : Je suppose que je vais détourner la réponse en un sens et affirmer que, oui, s'il faut que nous trouvions un document incorporé, nous serons probablement en mesure de le faire grâce aux ressources dont nous disposons — nous avons accès à la Bibliothèque du Parlement. Nous serons en mesure de le repérer.

Cela étant dit, il y a plusieurs années, nous avons observé un exemple flagrant des limites de nos ressources, lorsque la Bibliothèque du Parlement n'a pas réussi à trouver une bibliothèque qui pouvait lui prêter une copie de la norme en question, laquelle était offerte seulement par l'organisme émetteur à un coût de plusieurs centaines de dollars.

Toutefois, je ne suis pas tellement inquiet pour nous qui savons assez bien comment nous débrouiller avec les règlements fédéraux. C'est surtout pour les citoyens ordinaires que je suis préoccupé, que ce soit des propriétaires de petites entreprises ou simplement des personnes intéressées qui s'efforcent de franchir les étapes d'un système déjà assez compliqué et qui devront maintenant prendre des mesures supplémentaires pour trouver des documents.

Comme je l'ai dit, il y a un certain nombre de façons de remédier à ce problème. Nous avons mentionné que l'on pourrait créer un dépôt central. Une autre façon de procéder consisterait à assortir chaque incorporation par renvoi figurant dans le Règlement d'une note en bas de page qui fournirait un hyperlien. Celui-ci permettrait à la personne qui lit le Règlement de trouver la norme à laquelle il fait allusion. Ainsi, il y aurait une règle, et ceux qui établissent les règlements sauraient non seulement qu'ils doivent rendre les documents accessibles, mais aussi ce qu'ils doivent faire pour y parvenir. Cela pourrait court-circuiter de tels problèmes.

M. Vellacott : J'espère que cela ne me fera pas paraître trop égoïste, mais le mandat de notre comité me préoccupe davantage que les problèmes que les gens pourraient rencontrer, quoique s'ils s'adressent au bureau de députée de la coprésidente du comité pour demander d'avoir accès à ces documents, cela pourrait accroître le travail de nos bureaux. Nous sommes chargés de nous assurer que nous pouvons les obtenir. La façon dont les autres comités règlent ce problème est secondaire.

Nous aimons tous connaître un peu l'historique de nos processus, et nous devrions en tirer quelques enseignements. Au cours de l'histoire, les gouvernements fédéraux de tout genre ont pris de l'importance et leur champ de compétence s'est élargi. D'aucuns diraient qu'il s'est élargi excessivement, car ces fonctions étaient exercées par les associations corporatives, les syndicats et les associations professionnelles, et j'ignore si la concordance de leurs normes était vérifiée. Il est clair que, dans le passé, c'était les associations corporatives qui s'occupaient de cela en Angleterre et ailleurs. Elles avaient en quelque sorte le pouvoir d'établir des règles dans ce domaine sans que les gouvernements interviennent.

Pour en revenir aux observations de M. Albas concernant les normes de sécurité sur l'électricité, entre autres, je présume que, compte tenu de leur caractère extrêmement technique, elles sont rédigées par des gens compétents, car il faut posséder de vastes connaissances pour s'acquitter de cette tâche. Les documents de ce genre sont-ils rédigés par un groupe de gens? Je présume que cette tâche n'est pas confiée à une seule personne.

M. Bernhardt : Je le suppose aussi. On a peut-être recours à cette technique parce que les bureaucrates soutiennent que ces gens sont des experts, qu'ils savent ce qu'ils font et que nous devrions nous adresser à eux, examiner leur norme afin de déterminer si elle est gérable de notre point de vue et l'adopter, le cas échéant.

M. Vellacott : Par conséquent, si l'organisme ne nous inspirait pas confiance, nous n'approuverions pas ce que ces membres font parce que nous les considérerions comme des personnes louches, peu recommandables ou simplement incompétentes. J'ai l'impression que nous n'incorporerions pas leurs documents par renvoi.

M. Bernhardt : J'ose espérer que oui. Le problème concernant l'incorporation tient essentiellement au fait que tout document incorporé par renvoi a force de loi. Dans bon nombre de cas, son non-respect constitue une infraction. Cela confère à la norme industrielle en question un statut complètement différent. Par exemple, si vous voulez annoncer que vous êtes membre de l'Association canadienne des entrepreneurs électriciens, vous devez démontrer que vous comprenez et respectez ses normes. Sinon, on ne vous permet pas d'utiliser cette désignation. C'est un genre d'autoréglementation, mais c'est seulement un aspect du rôle de ces associations. Toutefois, dès que l'on donne à leurs normes force de loi, on passe à un autre niveau. Dans le scénario précédent, non seulement vous perdriez votre désignation, mais vous encourriez aussi une amende ou vous seriez incarcéré si vous refusiez de vous conformer à la norme. Cela fait passer la norme au niveau suivant.

M. Pacetti : À ce sujet, je serais prêt à recommander qu'on affiche les documents en ligne. En raison des détails techniques associés à ce dont on parle, seule une personne qui peut avoir accès à la technologie pourrait comprendre. Je ne pense pas qu'une personne qui n'a pas accès à la technologie ou qui ne sait pas comment se servir d'un ordinateur comprendra ces détails techniques. Je ne vois aucun problème à ce qu'on les affiche en ligne. Il est inacceptable que l'industrie privée décide de l'information qui est ou non disponible. Cette décision devrait appartenir au gouvernement, qui doit faire preuve de transparence. Contrairement à ce que M. Albas disait, certains de mes électeurs affirment ne pas être en mesure d'obtenir des copies des normes. Ils se sont adressés à leur entrepreneur, à la personne qui a effectué les travaux ainsi qu'au gouvernement lorsqu'il a adopté cette règle, mais les citoyens n'y ont pas accès. Ils m'ont demandé de les aider. Nous avons essayé. Cette situation arrive non seulement au fédéral, mais aussi dans d'autres ordres de gouvernement où il nous est impossible de franchir la première porte. L'information n'est pas accessible. Nous payons même parfois un frais, puis, nous n'obtenons pas de réponse. Telle est la transparence du gouvernement.

Tout le monde a accès à Internet. Je sais qu'il n'est pas accessible à certains endroits, mais nous devons planifier pour l'avenir en incorporant des hyperliens et des renvois. Il devrait être facile maintenant de tenir un registre et un site Web où l'on peut faire des recherches. On peut lancer une recherche sur Google pour trouver l'information voulue.

J'aimerais poser une petite question sur un élément qui figure à la page 17. À la deuxième puce, qui porte sur la tarification, il est indiqué que le montant du frais ou du droit sera tributaire des actions futures d'une autre entité. Qu'est-ce que cela signifie? Je ne vois que des signes de dollars.

M. Bernhardt : Par exemple, si vous êtes une autorité réglementaire et que vous fixez un tarif et que vous voulez qu'il varie automatiquement, vous soumettez le tarif aux changements apportés au taux de la Banque du Canada. La question qui se pose alors est la suivante : Qui fixe le tarif? Est-ce l'autorité réglementaire ou la Banque du Canada, étant donné que le tarif sera ajusté automatiquement chaque fois que la banque apportera un changement? Si le Parlement a établi dans le règlement qui fixe le tarif et que la responsabilité est transférée à une autre entité, à quel moment cela va-t-il à l'encontre de la volonté du Parlement? Dans ce cas-ci, une autre entité fixe le tarif. La situation est différente si on a un tarif fixe à 1 $ la tonne, par exemple. Même si le tarif variera en fonction du poids, on sait exactement qu'il sera pour 10 ou 50 tonnes. En ce sens, le tarif est fixé et ne variera pas en fonction des calculs effectués ou d'une décision prise par quelqu'un d'autre.

La coprésidente (Mme Charlton) : Permettez-moi d'essayer d'aborder la question sous un angle un peu différent. Ai- je raison de dire que le comité doit déterminer si la question de l'accès est adéquatement protégée par le projet de loi S- 12, mais pas comment nous devrions garantir cet accès? Nous ne proposons pas aujourd'hui d'établir si nous devons créer un registre en ligne ou un répertoire central ou d'autres mécanismes parce qu'ils ne seront pas prévus dans le projet de loi S-12. Devons-nous formuler les recommandations pour déterminer si le projet de loi, dans sa forme actuelle, protège adéquatement l'accès, ou devrions-nous discuter du mécanisme?

M. Bernhardt : Il appartiendra au comité d'en décider. Le Comité des affaires juridiques et constitutionnelles est actuellement saisi du projet de loi. D'abord, le comité discute s'il a des préoccupations, ensuite, il détermine quelles sont ces préoccupations et, enfin, s'il souhaite les faire connaître publiquement. Le comité dispose d'assez de latitude pour décider de ce qu'il veut faire.

La coprésidente (Mme Charlton) : Nous demanderons de prévoir un créneau de deux heures au comité sénatorial.

[Français]

Le sénateur Bellemare : Je vais passer. J'allais parler des possibilités du Web, mais je suis hors sujet si on retourne à notre propos.

[Traduction]

M. Boughen : J'aimerais faire quelques observations au sujet du débat sur le câblage électrique. Je ne peux pas parler au nom de toutes les provinces, mais dans ma vie antérieure, j'ai beaucoup travaillé dans le secteur de la construction. Les inspecteurs en bâtiment vérifient tous les travaux qui sont effectués. S'ils ne respectent pas les normes, que ce soit des travaux de mécanique, d'électricité ou autre, on est obligé de recommencer et de corriger le problème. Il y a un système de freins et de contrepoids. Je suis certain que d'autres provinces ont des lois semblables qui protègent le client. Les lois protègent aussi les entrepreneurs.

Je vais revenir à ce que la coprésidente a dit tout à l'heure. Il y a six puces à la page 5, où l'on énumère les raisons d'utiliser les incorporations par renvoi. Je signale aux membres que les témoins ont fait un exposé très pertinent. Il était excellent, à mon avis. En regardant cette page, je me demande s'il y a des inconvénients. Le cas échéant, pourriez-vous nous dire quels sont-ils? Cela semble être très positif. Il y a une collaboration, des normes, une uniformisation et une reproduction des documents.

M. Bernhardt : À la page suivante, les préoccupations se divisent essentiellement en trois catégories. La raison rigoriste en est la subdélégation, mais il s'agit de déterminer si la personne à qui le Parlement a confié la responsabilité de prendre les règlements est bel et bien celle qui les met en œuvre. C'est la première préoccupation.

La deuxième préoccupation a trait à l'utilisation de la technique simplement pour contourner le processus d'élaboration des règlements. Quand on prend un règlement, il y a un processus par lequel le projet de règlement est examiné par le ministère de la Justice. Le règlement doit être enregistré et publié dans la Gazette du Canada. Il faut s'adresser au Conseil du Trésor, qui évalue l'incidence et vous dit quel genre d'analyse des répercussions à laquelle vous devez vous soumettre et l'ampleur des consultations qu'il faut mener. Vous devez suivre tous ces processus, qui existent pour une raison.

L'inconvénient de l'incorporation par renvoi — et je ne dis pas que c'est systématique —, c'est le risque que l'on abuse de la technique simplement pour contourner les procédures administratives.

La troisième préoccupation dont nous avons parlé est l'accessibilité. Lorsque vous le faites pour toutes ces raisons, vous devez également vous assurer que les gens peuvent obtenir l'information. Ce sont là les inconvénients potentiels.

On ne dit pas que la technique n'a pas sa place. La question qui se pose est la suivante : Faut-il assurer un équilibre et quel devrait être cet équilibre?

M. Rafferty : Vous avez peut-être répondu en partie à ma question, mais elle porte sur les moyens de contourner le processus. C'est la première fois que j'assiste à une réunion du Comité mixte permanent d'examen de la réglementation, mais c'est une étude qui m'intéresse. Il me semble que ce projet de loi accordera davantage de pouvoirs au gouvernement en place et à ses fonctionnaires, mais en donnera moins à la Chambre des communes et aux députés pour examiner ces mesures législatives avant qu'elles soient adoptées. Sommes-nous inquiets à ce sujet? Est-ce une préoccupation qui a été soulevée?

M. Bernhardt : Oui, cela fait partie des moyens utilisés pour contourner le processus réglementaire dans un certain sens, car le processus et les résultats sont moins visibles.

M. Rafferty : Je comprends la nécessité d'agir rapidement et de changer le monde, et cetera, mais je crains que des mesures législatives soient adoptées et que les parlementaires se demandent ce qui est arrivé.

M. Bernhardt : Pour revenir à la préoccupation de M. Vellacott, qui portait sur les travaux du comité, ce n'est rien de nouveau. C'est un problème avec lequel nous sommes aux prises à l'heure actuelle; nous avons des incorporations par renvoi ouvertes dans les règlements fédéraux en ce moment. Le comité ne peut certainement pas réexaminer chaque norme qui est incorporée, lorsqu'elle est modifiée. Nous l'examinerons lorsque le règlement est pris. Si une norme est incorporée, nous l'examinerons.

M. Rafferty : Elle aura parfois été examinée par le Parlement, dans le cas d'un accord de libre-échange, par exemple. Le règlement sera ratifié et adopté. Peu de temps après, le gouvernement en place pourrait apporter des modifications à l'accord de libre-échange qui n'avaient pas été examinées initialement par la Chambre des communes. Cela devient alors une nouvelle pratique.

M. Bernhardt : C'est certainement ce qui arrive de temps à autre.

M. Vellacott : Pour répondre aux questions du sénateur, en tant que parlementaires, nous ne sommes pas au courant de toutes les mesures législatives et de tous les règlements qui sont proposés, n'est-ce pas?

La coprésidente (Mme Charlton) : C'est le rôle de notre comité.

M. Vellacott : Exactement. C'est uniquement le rôle de notre comité, mais pas des autres. J'imagine qu'il s'agit de se concentrer sur comment cela nuit à nos travaux par rapport aux travaux d'autres comités. Nous avons d'autres comités et si le projet de loi à l'étude concerne la justice ou la santé, ils l'examineront. S'ils font leur travail convenablement et font preuve de diligence raisonnable, ils devront chercher longtemps pour trouver quelles sont les autres incorporations par renvoi. N'est-ce pas la responsabilité du comité compétent plutôt que celle de notre comité?

M. Bernhardt : Cela dépend. Notre mandat prescrit que cette tâche nous appartient. Nous ne sommes pas un comité d'orientation. Le rôle du comité, lorsqu'on se penche sur un document incorporé, est le même que lorsqu'on examine un règlement. Est-il clair et cohérent, et son contenu est-il autorisé en vertu de la loi existante? Je présume que les autres comités seraient en mesure, s'ils le souhaitent, d'étudier une norme particulière pour déterminer si elle est adéquate et la plus appropriée et s'il faudrait consulter une autre entité et vérifier s'il a une meilleure norme.

Il n'incomberait pas à notre comité de se pencher sur ce genre de questions; cela relève plutôt de la compétence du Comité de la santé, du Comité des ressources naturelles, du Comité de l'agriculture ou peu importe.

M. Calkins : Je demande à mes collègues de faire preuve d'indulgence à mon égard. Je suis nouveau au comité et je remplace un membre. Comme j'observe la situation de l'extérieur, j'aimerais vous poser quelques questions pour que vous puissiez m'éclairer.

Tout d'abord, je sais qu'en tant que législateur, mon rôle consiste à voter en faveur des modifications législatives ou contre ces dernières et à en proposer. Le rôle du comité, qui est d'examiner la réglementation, est unique; ses pouvoirs se limitent aux lois qui sont adoptées et aux organismes de réglementation.

Je comprends cette incorporation par renvoi statique et incorporation par renvoi à caractère dynamique. Ce sont des choses faciles à saisir au plan conceptuel. Cela dit, sans la surveillance et l'examen minutieux de tout appendice, annexe ou code susceptible de relever de tout autre organe législatif — auquel des pouvoirs ont peut-être été conférés par une autre loi du Parlement ou une loi provinciale selon le cas — il aurait certainement les connaissances techniques voulues pour honorer son mandat particulier. Le problème que j'ai comme parlementaire est qu'il ne s'agit pas seulement de l'expertise se rapportant à ce mandat en particulier. Si cet organe a pour mandat de traiter ses affaires entièrement dans l'optique de la sécurité publique, l'on pourrait se préoccuper de coûts croissants de la réglementation, de son incidence sur l'économie globale ou autre.

Un bon exemple serait tout règlement pris par un organe, comme la SPCA ou autre, lorsqu'il est question de sécurité ou de santé animale. Ces types de règlements importent beaucoup aux parlementaires, mais le fait de réglementer inutilement un secteur particulier de l'économie sans procéder à un examen minutieux ou à une surveillance en bonne et due forme pourrait donner lieu à une impasse, ce qui est très difficile à surveiller.

Cependant, nous devons maintenir que notre rôle en tant que législateurs n'est pas d'entrer dans ce genre de détails.

Ma question et ma préoccupation découlent du commentaire qui se trouve à la page 25 du dossier. S'il est question d'incorporer tous ces documents par renvoi, de combien parlons-nous ici? C'est une chose de savoir; nous ne savons même pas.

Pour ce qui est d'ajouter un hyperlien, quiconque a navigué sur Internet sait qu'un lien peut changer à n'importe quel moment, vous pouvez tomber en tout temps sur un lien qui ne fonctionne pas, qu'il s'agisse d'Internet ou d'intranet. Les hyperliens ne fonctionnent que dans la mesure où l'hôte laisse un document à un endroit en particulier et cela soulève la question des renvois absolus et relatifs lorsque l'on crée un renvoi à un document; il s'agit là d'une terminologie entièrement différente. De combien de règlements est-il question ici?

M. Bernhardt : Combien de normes sont-elles incorporées à la réglementation fédérale? Je présume qu'il doit y en avoir des centaines, assurément. Cela pourrait aller des manuels ministériels aux traités internationaux en passant par les accords de libre-échange.

M. Calkins : Si on allait plus loin, en théorie, on pourrait créer un renvoi à un manuel stratégique sur diverses procédures applicables au personnel ou quelque chose du genre, du moment que cela ne déborde pas du cadre de la loi.

M. Bernhardt : Certainement, par exemple, dans tout le secteur agricole, vous voyez des règlements qui disent quelque chose du genre « chaque producteur devra se conformer au manuel de l'Agence canadienne d'inspection des aliments ».

M. Calkins : Le problème est qu'il n'y aurait pratiquement aucune surveillance à cet égard dans ce renvoi. S'il n'est pas publié dans la Gazette, il n'est pas soumis au comité.

M. Bernhardt : Le comité l'examinerait en ce sens que lorsque la loi serait édictée, nous nous pencherions sur le contenu de ce manuel. Cependant, ce manuel pourrait changer hebdomadairement ou mensuellement et nous ne le réviserons pas chaque fois qu'il est modifié pour en connaître les modifications. C'est physiquement impossible.

M. Calkins : Si je comprends bien moi aussi, il n'y a aucun contrôle des versions et aucune exigence d'énoncée dans l'une de nos lois ou l'un de nos règlements voulant que tout organisme qui a un document de renvoi — qu'il s'agisse d'une incorporation par renvoi statique ou autre — pour assurer le contrôle des versions des documents.

M. Bernhardt : Si le projet de loi est adopté, vous pourriez exiger qu'ils prennent des mesures pour le rendre accessible.

M. Calkins : Mais nous ne savons toujours pas ce que c'est non plus.

La coprésidente (Mme Charlton) : Je suis consciente de l'heure. Il est 9 h 50. Nous sommes invités à assister au comité du Sénat la semaine prochaine. Nous devons étudier deux questions urgentes. Premièrement, voulons-nous accepter l'invitation à témoigner? Deuxièmement, qu'est-ce que le comité aimerait que les présidents conjoints disent?

Nous avons un rapport produit par ce comité en 2007 qui recommandait les mesures à prendre concernant ces questions. J'aimerais que vous me disiez si vous voulez que nous disions que cela y répond ou non, et comment.

M. Albas : J'ai une courte question concernant les questions de M. Calkins. À la page 25, au deuxième paragraphe, l'on fait depuis longtemps des incorporations par renvoi qui excluent la phrase « avec ses modifications successives ». Monsieur Bernhardt, est-ce que ce projet de loi particulier étofferait ou fixerait ensuite ce processus en autorisant les parlementaires à faire en sorte que cela se produise?

M. Bernhardt : Oui.

M. Albas : En ce moment, on le fait et le comité a dit que cette pratique n'est pas entièrement réglo — pour utiliser ce terme. Ce projet de loi réglerait cela; c'est ce que le comité a recommandé.

M. Bernhardt : Ce qui est certain, c'est que cela clarifie les choses.

M. Albas : Excellent.

M. Saxton : Je veux traiter spécifiquement de l'invitation adressée aux présidents conjoints de témoigner devant le comité du Sénat. Il y a des questions de logistique qui pourraient être compliquées; nommément le fait que le sénateur Runciman siège lui-même à ce comité, et je crois aussi qu'il en est le président, c'est bien cela?

Le coprésident (le sénateur Runciman) : En effet.

M. Saxton : Le sénateur passerait sans arrêt de la barre des témoins au fauteuil du président. Je ne sais pas si ce serait une bonne idée. Cela pose problème au plan de la logistique.

Le comité aurait des renseignements très utiles à partager avec le comité sénatorial. Comment devrions-nous les transmettre? Quelle est la façon la plus efficace de le faire? Nous avons pas mal de renseignements. Peut-être qu'il serait plus judicieux de présenter une déclaration écrite au comité si l'on considère qu'aucun de nos présidents n'était présent lorsque notre comité a reçu une bonne partie de ces informations par le passé, vu qu'ils sont nouveaux, comme bien d'autres membres du comité.

Il serait peut-être plus efficace de présenter un document écrit au comité du Sénat. J'aimerais savoir ce que notre conseiller juridique en pense.

M. Bernhardt : Je suis entre les mains du comité. Nous pouvons certainement rédiger un texte pour approbation et partir de là. Nous aurions besoin de connaître l'orientation exacte que devrait prendre cette présentation. Une option serait de réitérer les recommandations antérieures du comité et d'y ajouter des commentaires.

Il y avait aussi une présentation faite en 2009 par le ministre de la Justice, à sa demande, qui énonce des points plus concrets. Le rapport de 2007 se préoccupait surtout de l'état du droit à l'heure actuelle — un différend avec Justice Canada. Les recommandations de 2009 et, en fait, le projet de loi actuel ne s'attachent pas beaucoup à ce qu'est la loi, mais plutôt à ce qu'elle devrait être et à ce qu'elle sera à l'avenir. C'est une orientation différente.

Comme je disais, on pourrait simplement les réitérer avec des commentaires sur la façon dont elles ont ou non été prises en compte dans le projet de loi. Le document pourrait souligner certaines parties du projet de loi qui préoccupent le comité; il pourrait, par exemple, dire que certaines parties ne sont pas aussi bien définies qu'elles pourraient l'être. Il pourrait aussi s'agir de recommandations précises.

M. Saxton : Il y a manifestement plusieurs façons de procéder. Nous avons des lettres qui ont été envoyées, l'une en 2007 et l'autre en 2009. Nous avons peut-être aussi d'autres suggestions.

Je crois que le but de cet exercice est d'aider le comité du Sénat à examiner cette question particulière et à en faire rapport. Je recommanderais au comité de préparer une présentation écrite, que notre conseiller juridique pourrait rédiger pour nous. Si le temps presse, alors peut-être que le sous-comité pourrait la passer en revue avant qu'elle ne soit envoyée.

Cela ne devrait pas prendre trop de temps par contre, car ces lettres ont déjà été rédigées. Elles sont déjà prêtes; il suffit de compiler et de regrouper les informations et de les présenter dans un document au comité du Sénat. C'est ce que je suggère ce matin.

Le sénateur Moore : J'allais formuler un commentaire dans la même veine. En premier lieu, nous commençons avec ce que nous avons déjà fait, c'est-à-dire les rapports de 2007 et de 2009. Ensuite, nous pouvons confirmer les préoccupations que nous avons soulevées aujourd'hui.

Je suis en train de regarder ce courriel. Il dit que vous êtes invités.

La coprésidente (Mme Charlton) : Vous êtes invités ce matin ou mercredi prochain, ce qui, selon moi, est une coquille.

Le sénateur Moore : Nous aimerions vous inviter. Vous n'êtes pas tenus d'y aller, et cetera.

La coprésidente (Mme Charlton) : Avons-nous atteint un consensus?

Le sénateur Moore : Déclinez l'invitation, mais présentez une réponse écrite.

La coprésidente (Mme Charlton) : Cette approche fait-elle l'objet d'un consensus? Je me demandais comment j'allais remplir mon agenda qui est vraiment vide la semaine prochaine, alors je suis bien d'accord pour envoyer une lettre. Est-ce que cela vous convient?

Le coprésident (le sénateur Runciman) : Je suis sûr que l'on a une liste de témoins experts qui, selon moi, formuleront aussi des commentaires concernant les positions que notre comité a prises par le passé. Je pense que c'est une bonne approche.

M. Saxton : Alors y aura-t-il une réunion du sous-comité? Nous sommes déjà jeudi. Nous devrions le faire au début de la semaine prochaine, je présume. Pourquoi le sous-comité ne se réunirait-il pas lundi? Est-ce que cela a du sens?

La coprésidente (Mme Charlton) : Est-il nécessaire que le sous-comité se réunisse? Nous savons en quoi consiste le rapport de 2007; il en va de même pour celui de 2009. La présentation que nous avons eue aujourd'hui a permis de dégager un consensus clair.

M. Bernhardt : Sous réserve de l'approbation des deux présidents?

La coprésidente (Mme Charlton) : Pourrions-nous faire en sorte que cela soit sujet à l'approbation des présidents conjoints?

M. Albas : J'allais mentionner que parce qu'il serait probablement utile à tout le comité de le voir, peut-être que vous pourriez en remettre une ébauche à tout le monde. Si quelqu'un prend contact avec un président conjoint et dit « Voilà ce qui me préoccupe », le président conjoint pourrait l'apaiser. Cela serait utile. La supervision est toujours souhaitable, tout simplement.

M. Saxton : Je suis d'accord avec cela. Ce serait préférable que nous recevions le courriel au moins 48 heures avant qu'il soit diffusé pour avoir le temps d'y jeter un coup d'œil. Si nous recevions le courriel le lundi, avec l'idée de diffuser le document le mercredi, ce serait génial.

M. Bernhardt : C'est ce que nous viserons.

M. Pacetti : Cela me va. Nous pouvons bien travailler avec ce courriel. Cela veut-il dire que vous ne témoignerez pas, madame la présidente?

La coprésidente (Mme Charlton) : J'en déduis que nous avons dégagé un consensus. Je pense que les gens conviennent en général qu'ils se préoccupent de ce que je pourrais dire.

M. Pacetti : Voilà pourquoi je vous encourage à y aller. Je pense que ce serait une bonne expérience pour vous d'essayer de remettre cela. Si j'étais vous, je demanderais évidemment à notre conseiller juridique de m'accompagner.

Le sénateur Moore : Je vois que vous êtes invitée à témoigner le mercredi 28 en après-midi ou le jeudi 27 novembre. Cela devrait être le 29, je suppose. Vous partez cet après-midi, n'est-ce pas?

La coprésidente (Mme Charlton) : Ce matin, juste après la réunion.

Comme je vois qu'il y a consensus, nous diffuserons le rapport. Je vous sais gré de me faire part de vos commentaires pour que nous puissions les transmettre à notre conseiller juridique.

(La séance est levée.)


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