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REGS Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Délibérations du comité mixte permanent
d'Examen de la réglementation

Fascicule 16 - Témoignages


OTTAWA, le jeudi 9 mai 2002

Le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation se réunit aujourd'hui, à 9 h 21, pour examiner des textes réglementaires.

Le sénateur Céline Hervieux-Payette et M. Gurmant Grewal (coprésidents) occupent le fauteuil.

[Traduction]

Le coprésident (M. Grewal): Mesdames et messieurs, nous avons deux questions à examiner aujourd'hui. La première est le Règlement sur les permis de pêche communautaires des Autochtones.

DORS/93-332 — RÈGLEMENT SUR LES PERMIS DE PÊCHE COMMUNAUTAIRES DES AUTOCHTONES

DORS/94-390 — RÈGLEMENT SUR LES PERMIS DE PÊCHE COMMUNAUTAIRES DES AUTOCHTONES — MODIFICATION

DORS/94-631 — RÈGLEMENT SUR LES PERMIS DE PÊCHE COMMUNAUTAIRES DES AUTOCHTONES — MODIFICATION

DORS/95-106 — RÈGLEMENT SUR LES PERMIS DE PÊCHE COMMUNAUTAIRES DES AUTOCHTONES — MODIFICATION

Le coprésident (M. Grewal): Je suis sûr que tous les membres ont reçu le document de travail. Nous allons en examiner tous les éléments un par un et laisser les membres du comité exprimer leurs idées. Enfin, si le comité est d'accord, nous ferons rédiger l'ébauche du rapport.

Nous allons engager la discussion, en commençant par la première question.

M. François-R. Bernier, conseiller juridique principal du comité: Monsieur le président, d'après ce que j'ai compris de ce qui s'est dit à notre dernière réunion, les membres voulaient recevoir la documentation avant aujourd'hui et décider si le comité présenterait un rapport, et s'il s'agirait d'un rapport courant ou d'un rapport de désaveu.

Il a aussi été proposé que le comité ne traite pas tous les aspects du règlement de la même façon, c'est-à-dire que certains éléments du règlement pourraient faire l'objet d'un désaveu et d'autres non.

Nous avons développé davantage, si vous voulez, l'analyse de la réponse du ministère qui avait déjà été distribuée deux ou trois fois au comité.

Il faudra que le comité prenne une décision sur les dispositions de fond du règlement pour que nous sachions quoi écrire pour la prochaine réunion. C'est ce que les considérations préliminaires disent; elles seront modifiées en fonction de la décision prise par le comité.

Nous pourrions peut-être commencer à discuter de la portée du règlement, c'est-à-dire de l'article 4, et de la sous- délégation de pouvoir contestée, pour décider comment le comité veut examiner cet aspect du règlement.

Le coprésident (M. Grewal): Mesdames et messieurs, êtes-vous d'accord pour que nous commencions par discuter de la portée du règlement?

Des voix: Oui.

Le coprésident (M. Grewal): Je vous laisse la parole.

M. Bernier: Monsieur le président, je me trompe, la portée du règlement examine la question liée à l'absence de définition de l'expression «activité connexe»dans le règlement et non la sous-délégation de pouvoir.

M. Cummins: Monsieur le président, nous avons le rapport du conseiller juridique. Est-il nécessaire d'examiner le rapport section par section? Dans celle sur les considérations préliminaires, il y a plusieurs pages qui ont été ajoutées à ce que nous avions déjà. Le président peut peut-être demander au conseiller juridique s'il est utile de commencer au début du rapport et de donner des explications sur l'un ou l'autre aspect.

Le coprésident (M. Grewal): Préféreriez-vous commencer par les considérations préliminaires?

M. Cummins: Oui, nous pourrions peut-être examiner le rapport du début à la fin.

M. Bernier: Pour l'instant, monsieur Cummins, nous ne savons pas s'il y aura un, deux ou trois rapports. La question est restée en suspens à la dernière réunion. Ce que les considérations préliminaires diront dépend de ce qui sera décidé pour le reste.

Le coprésident (M. Grewal): Nous allons commencer par la portée du règlement. Nous discuterons des considérations préliminaires à la fin.

Nous discutons de la portée du règlement, c'est-à-dire de l'article 4.

M. Wappel: Si c'est possible, le conseiller juridique pourrait peut-être résumer chacun des éléments au fur et à mesure — je ne veux pas dire lire le document, mais nous dire brièvement où nous en étions quand nous avons discuté du précédent projet de rapport, quels étaient les arguments du ministère, et ce que le conseiller a découvert. Ce survol pourrait nous aider à engager la discussion et prendre une décision.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Que voulez-vous faire des trois premières sections?

M. Wappel: Madame la présidente, je reprends ce que le conseiller juridique a dit. Il nous propose d'examiner d'abord la portée du règlement, qui correspond au deuxième onglet bleu.

Le coprésident (M. Grewal): Monsieur le conseiller, vous pourriez peut-être nous résumer la situation.

M. Bernier: Monsieur le président, le comité s'est interrogé sur le sens de l'expression «activité connexe» qui figure dans le règlement.

D'après le règlement, il est possible de délivrer un permis de pêche communautaire pour pratiquer une activité connexe. Le comité s'est demandé ce que cela voulait dire au juste. Le ministère a fourni une explication et le comité a alors demandé que cette explication figure dans la définition du règlement, pour que tout le monde sache à quoi s'en tenir et qu'on ne se pose plus de question là-dessus. Le ministère a refusé en indiquant que l'explication n'était pas une définition exhaustive.

Quand des représentants du ministère ont comparu devant le comité, l'avocat général a invoqué l'affaire de la Nova Scotia Pharmaceutical Society. Comme on l'explique dans l'analyse, cette cause était fondée sur la Charte. L'affaire portait sur la question de savoir si l'interdiction énoncée dans la Loi relative aux enquêtes sur les coalitions était à ce point imprécise qu'intenter un procès au motif qu'elle avait été enfreinte violait l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Or, il est clair que le comité n'a jamais invoqué la Charte. C'est un problème de rédaction que le comité a soulevé, comme il le fait souvent. Quand un règlement lui semble vague, le comité va recommander qu'on y apporte plus de précisions. Les arguments présentés par le ministère n'étaient pas vraiment de mise, pertinents ou utiles.

Nous en sommes encore au même point. L'expression «activité connexe» est utilisée et il serait utile que le règlement puisse à tout le moins donner une idée de ce qu'elle veut dire. Il n'est pas nécessaire que la définition soit exhaustive. La définition pourrait prévoir qu'une «activité connexe s'entend notamment» d'un certain nombre d'activités énumérées, ce qui éclaircirait le sens de l'expression.

C'est clairement une question de rédaction et non une question de droit. Le ministère l'a considérée comme une question de droit, alors que ce n'en est pas une.

M. Wappel: C'est peut-être le bon moment de commencer à se demander s'il devrait y avoir un rapport ou plusieurs rapports. C'est une question de rédaction. Il ne semble pas très pertinent de recommander le désaveu d'un règlement pour un problème de rédaction.

Je pense que, dans une situation semblable, notre comité devrait produire un rapport. Il n'y a pas lieu de poursuivre la discussion avec le ministère. Cependant, nous pourrions présenter un rapport aux deux Chambres pour exposer notre point de vue ainsi que nos préoccupations et nos recommandations, et demander que le gouvernement les examine.

Je ne sais pas ce que les autres membres en pensent, mais ce serait peut-être le bon moment de déterminer ce qui devrait faire l'objet d'un désaveu et le distinguer de ce qui pourrait figurer dans un rapport régulier.

Pour engager la discussion, je propose que la question de l'expression «activité connexe» soit traitée dans un rapport présenté aux deux Chambres, avec d'autres sujets peut-être, mais elle n'est pas assez grave pour justifier un désaveu.

Je dis cela simplement pour amorcer la discussion.

M. Lee: Étant donné que notre conseiller juridique est d'avis que c'est avant tout une question de rédaction, j'ai tendance à penser que cette question n'est pas vraiment importante. Je suis d'accord pour dire que c'est un problème de rédaction. Je me demande moi-même ce qu'il y a de mal à ce que le ministère accorde un permis pour pratiquer une activité connexe. À mon avis, il n'a le pouvoir d'accorder aucun permis à ce sujet de toute façon.

Il pourrait en faire trop. On n'empêche personne de pratiquer une activité connexe, à moins que cela crée une infraction, comme cela semble avoir été le cas d'après le point no 4 de la liste de nos problèmes, étant donné que le ministère aurait créé une infraction de façon détournée quand quelqu'un déroge aux conditions du permis. Il est possible, en agissant de mauvaise foi, d'accorder un permis pour une activité connexe, de fixer des conditions à ce sujet — conditions qui n'ont bien sûr jamais été prévues par la loi — et d'accuser quelqu'un d'y avoir dérogé. Cependant, à mon avis, le risque potentiel pour l'intérêt public est assez indirect.

Je pense que nous ne devons pas nous concentrer seulement là-dessus. Nous pouvons exprimer notre point de vue sans insister pour dire que le désaveu est la seule solution. Il est possible qu'un problème semblable, d'emploi de termes imprécis dans un règlement, survienne dans d'autres dossiers concernant d'autres ministères.

Je propose que nous accordions moins d'intérêt à cette question.

M. Cummins: Je ne sais pas vraiment si l'objectif de M. Wappel n'est pas de tout simplement éliminer la possibilité de recommander le désaveu du règlement.

Personne ne dit que c'est le seul problème. C'est un aspect de la question. C'est l'effet cumulatif qui est problématique. Le comité a reconnu que le règlement n'était pas valide. C'est simplement un aspect de la question.

Après avoir reconnu que le règlement n'était pas valide, le comité a constaté qu'il y avait d'autres problèmes, et il les a examinés. Je ne vois pas pourquoi on supprimerait toutes les informations justificatives qui indiquent que c'est un mauvais document législatif.

Je ne comprends pas pourquoi on agit de la sorte, si ce n'est, comme je l'ai dit, pour peut-être enlever du poids au désaveu du règlement. Si le comité revenait maintenant sur sa décision de recommander le désaveu du règlement, il perdrait toute sa crédibilité.

M. Wappel: M. Cummins a parlé de moi et je devrais donc lui répondre.

Je n'ai pas l'intention d'empêcher le désaveu des dispositions du règlement qui devraient en faire l'objet, à notre avis. Nous étudions ce dossier depuis tellement longtemps que je ne sais plus trop à quoi m'en tenir. Je croyais que ce n'était pas tous les mots du règlement qui nous paraissaient illégaux ou abusifs, mais seulement certaines dispositions et certains mots dans ces dispositions.

Notre rapport de désaveu traitait de ces aspects du règlement. Évidemment, si le règlement n'est pas corrigé, le désaveu doit s'appliquer à l'ensemble du règlement.

Je ne cesse de répéter ce que je crois être le problème. J'ai demandé au conseiller juridique de me corriger si je me trompe. Cependant, depuis le début de notre étude, on nous dit qu'il est impossible d'empêcher le gouverneur en conseil d'accorder des permis aux organisations autochtones. C'est une décision de politique. Le problème, c'est que ce n'est pas ce que le règlement prévoit. Il prévoit que le gouverneur en conseil peut déléguer au ministre son pouvoir d'accorder des permis de pêche communautaires aux organisations autochtones.

Dire, ou même insinuer que le comité a jugé la politique abusive est tout simplement faux. Même dans la documentation, le conseiller met beaucoup de soin à souligner que, si le règlement avait été rédigé autrement, le gouverneur en conseil pourrait faire ce qu'il veut, et il peut en fait déléguer son pouvoir, par exemple, aux ministres provinciaux.

J'en ai dit beaucoup. Non, je n'essaie pas d'éviter le désaveu. Comme M. Lee l'a dit, je ne pense pas que tous les problèmes dans ce dossier nécessitent un désaveu.

Ce sera au conseiller juridique de rédiger un rapport recommandant le désaveu de ce qui doit en faire l'objet selon nous. Il va ajouter d'autres détails. Dans un autre rapport, ou peut-être dans le même, il pourra être question de problèmes que nous voulons signaler au Parlement mais que nous ne jugeons pas assez graves pour que les dispositions du règlement les concernant fassent l'objet d'un désaveu.

C'est ce que je veux dire, monsieur Cummins. M. Lee a parlé, par exemple, de la disposition sur les sanctions qui devrait faire l'objet d'un désaveu selon le comité. Si c'est le cas, d'accord. Si c'est ce que le comité veut, nous allons recommander le désaveu de cette disposition pour les raisons énoncées.

M. White: Monsieur le président, j'aimerais demander des précisions à notre conseiller juridique. Est-ce que le fait d'accorder moins d'importance à l'expression «activité connexe»et de la considérer comme un problème de rédaction, et le fait de faire d'autres suggestions, peut enlever du poids aux arguments selon lesquels d'autres aspects du règlement ne sont pas valides? Est-ce que cela peut enlever du poids aux autres arguments?

M. Bernier: Non, je ne le pense pas, monsieur White. Pour être parfaitement honnête avec vous, la prochaine section du document, sur les permis de pêche, traite de la sous-délégation de pouvoir qui est au coeur de tout le règlement. Si cet aspect fait l'objet d'un désaveu, les activités connexes n'ont plus beaucoup d'importance, parce que c'est le coeur du règlement qui est annulé.

Si, par la suite le désaveu devait entraîner la révocation du règlement, il faudrait adopter un tout nouveau règlement de toute façon.

M. White: La rédaction d'un nouveau règlement réglerait probablement l'autre problème, n'est-ce pas?

M. Bernier: Peut-être.

M. Cummins: C'est aussi de cette façon que je comprends la question. Cependant, pour moi, le rapport rédigé au départ est complet et comprend une partie, comme l'a dit le conseiller juridique, qui traite du désaveu. Monsieur Wappel, je ne vois vraiment pas pourquoi vous voulez qu'il y ait deux rapports. Que reprochez-vous au premier rapport, si nous décidons d'aller de l'avant, bien sûr? Il est clair que la question du désaveu s'applique à la prochaine section du document. Le rapport indique que c'est le coeur du problème, mais qu'il y a d'autres questions qu'il convient de noter.

Il me semble qu'il vaut mieux présenter un rapport complet qui traite de tous les aspects. Toutes les réflexions du comité figurent dans un seul rapport. Les objections du comité apparaîtront clairement à tout le monde. Il ne sera pas nécessaire de tâtonner pour trouver un autre rapport. Je ne comprends pas pourquoi vous voulez qu'il y en ait deux.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Je vais vous donner mon impression là-dessus. Si nous pouvons régler tout de suite deux aspects de la question et présenter un rapport, le ministre pourra agir. La question du désaveu peut prendre plus de temps à régler. Ce serait peut-être exagéré de traiter d'autres questions dans le rapport de désaveu, pour obtenir ce que nous voulons, étant donné qu'il faudra adopter une mesure législative; j'estime que nous pouvons faire rapport tout de suite de ce qui peut être modifié rapidement. Nous pouvons envoyer le rapport au ministre pour qu'il agisse sans délai. Ce serait plus pratique que de tout demander et d'attendre que les choses soient réglées. Je proposerais que ce qui peut être réglé tout de suite fasse l'objet d'un rapport. Il s'agit davantage de questions de forme que de fond. Le rapport de désaveu est probablement le meilleur moyen d'obtenir le changement de fond que nous voulons.

C'est mon point de vue. Je pense que c'est une solution pratique. Nous pouvons examiner chaque section et décider laquelle fera partie du rapport courant plutôt que du rapport de désaveu. Nous pouvons présenter deux rapports.

Nous pouvons aussi envoyer une lettre. Nous avons proposé de présenter un rapport, ce que je suis tout à fait disposée à envisager. Cependant, nous avons la possibilité d'envoyer une lettre, un rapport courant ou un rapport de désaveu.

MM. Wappel et Lee proposent que nous présentions deux rapports pour régler la question de façon plus efficace.

Vous proposez d'en présenter un seul. Si nous examinons chaque section, nous allons pouvoir déterminer laquelle doit faire l'objet d'un rapport de désaveu.

M. Cummins: Je ne vois pas l'utilité de présenter un rapport sur cette question si c'est pour le faire suivre par un rapport de désaveu. Le premier rapport serait sans conséquence, s'il devait y en avoir un autre recommandant le désaveu.

Un rapport de désaveu exige une intervention immédiate. Je pense que le comité a envoyé assez de lettres sur le sujet. La question est à l'étude depuis plus de cinq ans. Un autre genre de rapport n'exigera pas d'intervention immédiate; il ne fera que retarder encore davantage les choses.

Il faudra se demander si nous allons recommander le désaveu ou non. Nous pourrions peut-être en discuter après avoir décidé de ce que nous voulons faire de la prochaine section, qui est au coeur du problème. Si le comité décide de recommander le désaveu, c'est ce que nous ferons. Cependant, il restera à discuter de la forme que prendra le rapport.

Il est inutile d'envoyer une lettre pour demander de changer telle chose si vous voulez ensuite présenter un rapport de désaveu, parce que la question dans son ensemble ne sera pas prise au sérieux.

Le coprésident (M. Grewal): Jusqu'ici, certains voudraient présenter un rapport de désaveu tandis que d'autres voudraient déposer un rapport courant, demandant une réponse détaillée de la part du gouvernement. Nous allons combiner les deux.

Si nous pouvons tirer des conclusions sérieuses sur les divers aspects du problème, ce sera facile. Nous pouvons revenir rapidement sur la question à la fin de la séance et résumer certains des progrès accomplis aujourd'hui.

M. White: Monsieur le président, puis-je proposer que nous examinions la section qui suit et qu'on laisse en suspens la question des deux rapports. Nous saurons peut-être mieux plus tard si c'est la suggestion de M. Cummins ou la présentation de deux rapports qui est préférable. Au lieu de régler cela tout de suite, pourquoi ne pas poursuivre?

Le coprésident (M. Grewal): Nous avons une bonne idée de ce que la plupart d'entre nous pensent. À mon avis, nous devrions passer au point suivant, à moins que quelqu'un veuille ajouter quelque chose à propos de cette section.

Nous allons passer à l'essentiel du Règlement sur les permis de pêche communautaires des Autochtones.

M. Bernier: Comme je l'ai dit, monsieur le président, ce particulier régime des permis est au coeur du règlement.

Je ne vais pas reprendre ce qui se trouve dans la documentation distribuée, comme je l'ai déjà dit deux ou trois fois. Je vais seulement faire quelques remarques qui font suite à la comparution du ministre et à divers documents remis par ses collaborateurs.

Le ministre des Pêches et des Océans a comparu devant le comité le 11 avril 2002. Nous nous sommes malheureusement rendu compte que, malgré tous les efforts que nous avons déployés pour exprimer le point de vue du comité, les conseillers du ministre n'ont tout simplement pas compris la nature de nos objections, même après tout ce temps.

Dans sa déclaration au comité mixte, le ministre a dit:

D'après certains membres du comité, permettre à des communautés autochtones de désigner des personnes pour pratiquer une pêche conformément à des permis communautaires équivaut à une sous-délégation abusive de mon pouvoir d'octroi de permis. Or, il n'en est rien.

Comme je viens de le dire, cette déclaration montre que les conseillers du ministre n'ont pas compris que ce n'est pas le pouvoir administratif de délivrance des permis octroyés au ministre qui, de l'avis du comité, a été illicitement délégué, mais plutôt le pouvoir législatif conféré au gouverneur en conseil par l'alinéa 43f) de la Loi sur les pêches.

À l'alinéa 43f) de la loi, le Parlement a donné au gouverneur en conseil le pouvoir discrétionnaire de décider, par règlement, qui sera autorisé à délivrer les permis éventuels. Autrement dit, le gouverneur en conseil a été habilité à adopter un régime de délivrance équivalant à celui dont il est question à l'article 7 de la loi.

S'il exerce à bon escient le pouvoir discrétionnaire que lui a octroyé le Parlement, le gouverneur en conseil désignera, dans un règlement pris en vertu de l'alinéa 43f), une personne ou une entité qu'il autorise à délivrer des permis de pêche. Il peut s'agir d'un ministre provincial, d'une organisation autochtone et même du ministre fédéral.

Cependant, ce n'est pas ce qu'a fait le gouverneur en conseil dans ce cas. Sous le régime de ce règlement, le ministre ne délivre pas des permis, c'est-à-dire une permission de pêcher nonobstant une interdiction légale; il décide quelles organisations autochtones seront autorisées à les délivrer. Le pouvoir discrétionnaire de décider qui délivrera les permis est celui-là même que le Parlement voulait que le gouverneur en conseil exerce par voie de règlement.

Le ministère a cherché à minimiser l'importance des soi-disant désignations qu'émet une organisation autochtone, qui pour le comité sont équivalentes à des permis de pêche. Le ministre n'est pas du même avis que le comité à ce sujet. Selon lui, ce n'est pas la désignation qui autorise les gens à pêcher, mais le permis de pêche communautaire.

Je demanderais aux membres de se reporter à l'article 8 du règlement. Selon cet article, «il est interdit à quiconque n'est pas désigné de pêcher en vertu d'un permis.»

Cette disposition interdit clairement de pêcher à moins qu'il y ait eu désignation. Je pense que cela donne peu de poids au point de vue du ministère selon lequel les désignations sont un détail administratif sans importance pour usage interne. Il est aussi évident que, juridiquement, la désignation est l'équivalent d'un permis, au sens où il est utilisé normalement dans la Loi sur les pêches, c'est-à-dire une autorisation de pêcher, nonobstant une interdiction légale de le faire.

Le soi-disant permis de pêche communautaire, d'après le ministre, est ce qui accorde vraiment le droit de pêcher. Encore une fois, si on étudie le régime, quand le ministre délivre un permis de pêche communautaire, personne ne peut pêcher; en effet, personne ne peut pêcher tant qu'un conseil de bande n'a pas émis de désignation.

Dire que le permis de pêche communautaire permet de pêcher est un peu comme si je disais que c'est le règlement de pêche commerciale dans le Pacifique qui permet aux gens de pêcher. Il fait essentiellement partie du régime mais, tant qu'une personne n'a pas obtenu un permis en vertu du règlement sur les permis de pêche commerciale dans le Pacifique, elle ne peut pas pêcher en vertu du règlement.

De même, sans désignation, une personne ne peut pas pêcher même si un permis de pêche communautaire est attribué. L'article 8 prévoit qu'il est interdit à quiconque n'est pas désigné de pêcher en vertu d'un permis.

Maintenant, pour ce qui est du permis de pêche communautaire, je suis tout à fait en désaccord avec le conseiller du ministère qui est d'avis que la Loi sur les pêches ne s'applique qu'à des personnes naturelles ou morales. Pour accepter de considérer cette loi, ou toute autre loi, comme s'appliquant à des entités légales autres que des personnes, il faudrait que ceci soit prévu expressément dans le texte législatif, ce qui n'est pas le cas dans la Loi sur les pêches.

Ensuite, le ministère lui-même a reconnu qu'un permis de pêche constitue, et je cite, «une permission de faire quelque chose que son titulaire ne pourrait légalement faire en absence de cette permission.»C'est dire que tout titulaire d'un permis de pêche doit nécessairement être une personne visée par une interdiction légale, autrement, il n'aurait pas besoin d'un permis.

Nous devons nous demander si une interdiction légale de pêcher peut s'appliquer à une organisation autochtone qui n'a pas la personnalité morale. Il est clair que non. Cette organisation ne peut pas être poursuivie en justice.

En troisième lieu à ce sujet, il est intéressant de remarquer que, même si le ministère prétend que le soi-disant permis communautaire est bel et bien un permis, alors que c'est l'organisation autochtone qui en est titulaire, le règlement ne prévoit aucune sanction qui lui soit applicable advenant une contravention des conditions du permis. Au contraire, le règlement précise que ce sont les personnes désignées qui sont tenues responsables de toute contravention à une condition du permis communautaire — essentiellement tout comme le pêcheur titulaire d'un permis est tenu responsable d'avoir enfreint les conditions du règlement en vertu duquel le permis est attribué.

Par conséquent, la comparution du ministre a plutôt servi à confirmer le fait que le soi-disant permis de pêche communautaire n'est vraiment pas un permis, que c'est un instrument de délégation, par lequel le ministre exerce en fait le pouvoir que le Parlement a confié au gouverneur en conseil en vertu de l'article 43 de la loi.

M. White: J'aimerais que le conseiller juridique me dise si le document anonyme qui nous a été distribué au début de la réunion d'aujourd'hui change quoi que ce soit à l'analyse.

M. Bernier: Non, il ne change rien.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Il n'est pas anonyme. Il répond à des questions laissées en suspens par le ministère des Pêches à notre dernière réunion. Nous avons demandé des précisions. Nous avons reçu ce document en guise d'explication. Je comprends qu'il aurait fallu identifier l'auteur, mais il vient du ministère. Il a été rédigé à notre demande.

M. White: Merci de la précision, madame la présidente, mais il ne porte aucun en-tête ni aucune signature. Il aurait pu être écrit par n'importe qui, n'importe où.

M. Lee: J'avoue trouver le problème mal circonscrit. Je ne veux pas perdre de temps à expliquer pourquoi cela me dérange. J'aimerais que vous compreniez le problème parce que vous pouvez peut-être m'aider, monsieur le conseiller.

D'abord, vous dites essentiellement contester le processus de délégation. C'est le gouverneur en conseil, et non le ministre, qui aurait dû créer le régime. C'est ce qui est préoccupant. C'est là que le problème réside.

Pourtant, vous nous avez dit, dans les explications que vous nous avez données, que c'est la désignation qui crée le permis. Cependant, c'est une ou deux étapes après l'intervention du gouverneur en conseil.

Si le problème est le processus de délégation, pourquoi nous demander, deux étapes plus loin, si le titulaire de la désignation ou du permis est une personne ou non? Pourquoi voulons-nous savoir si les conditions du permis s'appliqueraient à une personne ou à une entité si le problème est le processus de délégation? Je ne comprends pas cela.

Si nous soutenons que le gouverneur en conseil aurait pu créer tout le régime de façon légale, si cela avait été fait dès le départ, je ne vois pas pourquoi nous nous préoccupons de savoir qui détient l'autorisation en bout de ligne.

Je ne sais pas si je peux m'expliquer plus clairement. Vous pourriez peut-être simplement répondre à la question suivante. Le gouverneur en conseil aurait-il pu créer le même régime légalement, ce qui aurait donné le même régime et les mêmes désignations, simplement sans que le ministre ne s'en mêle?

M. Bernier: Si le ministre ne s'en mêle pas, nous n'avons pas le même régime. C'est le problème.

M. Lee: Pourriez-vous l'avoir?

M. Bernier: Aurait-on pu l'avoir? Oui, le gouverneur en conseil peut parfaitement, autant que je sache, prendre un règlement qui établirait essentiellement ce qui est actuellement établi par le ministre avec le permis de pêche communautaire. Il prendrait un règlement autorisant la bande X a délivré des permis de pêche et énoncerait dans le règlement les conditions de délivrance des permis que doit observer la bande ainsi que celles qui doivent régir les permis délivrés, et le reste.

M. Lee: On aurait pu le faire?

M. Bernier: Oui. Le problème, c'est que le gouverneur en conseil ne veut pas s'en occuper et a confié ce pouvoir au ministre. C'est la sous-délégation qui transforme le pouvoir.

En vertu de l'alinéa 43f), le gouverneur en conseil doit agir par voie de règlement. Un texte est ensuite publié dans la Gazette du Canada. Dan ce cas, il a délégué son pouvoir au ministre, et il l'a également autorisé à produire un document administratif qui n'est pas enregistré dans la Gazette du Canada — le soi-disant permis de pêche communautaire.

M. Lee: Pourquoi se préoccuper alors de savoir si le titulaire du permis est une entité légale ou non?

M. Bernier: En raison de la qualification juridique des documents en question. Monsieur Lee, c'est le ministère qui prétend que le permis de pêche communautaire est vraiment un permis de pêche.

M. Lee: À mon humble avis, il importe peu qu'il soit réel, artificiel ou le fruit de l'imagination de qui que ce soit. Si le gouverneur en conseil avait conçu le régime comme il faut au départ, il aurait été légal, n'est-ce pas?

M. Peter Bernhardt, conseiller juridique du comité: Ce serait peut-être plus clair si je vous disais que, si le régime était comme il se doit, il n'y aurait pas de permis de pêche communautaire. Il y aurait plutôt un règlement pris par le gouverneur en conseil indiquant que les bandes indiennes peuvent délivrer des permis. Il n'y aurait pas de désignation, mais un permis. Il ferait exactement ce que fait la désignation maintenant, sauf qu'il n'y aurait pas de confusion quant à savoir si c'est un permis ou une désignation.

Ce serait un règlement autorisant les bandes à délivrer des permis, ce qui rétablirait leur statut légal, étant donné que le règlement serait pris par le gouverneur en conseil, et ce ne serait plus un règlement demandant au ministre de décider, par le truchement d'un permis communautaire, qui obtiendra les permis qu'on appelle désignation.

M. Bernier: S'ils disaient que ce sont des permis, ils admettraient qu'il y a sous-délégation de pouvoir; ce serait évident. C'est la raison pour laquelle on les appelle autrement.

M. Lee: En fin de compte, même si le gouverneur en conseil avait créé le régime, on aurait toujours des désignations. Quelqu'un doit accorder une désignation pour permettre à une personne de pêcher. La désignation comme telle ne pose pas de problème, c'est plutôt la sous-délégation de pouvoir abusive.

M. Bernier: Monsieur Lee, si le gouverneur en conseil décide, dans un règlement, que des permis seront des désignations, il est libre de le faire, dans la mesure où nous savons tous ce que c'est sur le plan légal. Il est permis de changer le vocabulaire.

M. Lee: C'est mon argument. C'est une question de sémantique.

M. Bernier: Le gouverneur en conseil aurait dû prendre un règlement prévoyant l'émission de désignations par les conseils de bande; il a plutôt permis au ministre de décider, par un soi-disant permis de pêche communautaire, qui va émettre la désignation.

M. Cummins: J'aurais une remarque à faire sur ce qu'on vient de dire. Il me semble que ce qui est en cause ici, ce ne sont pas les possibilités futures, mais le règlement tel que nous le concevons. Qu'il soit possible d'arriver au même résultat autrement n'est pas notre problème.

Pour faire suite à ce que le conseiller juridique a dit, j'ai un exemplaire d'un permis de pêche communautaire des bandes Tseshaht et Hupacasath pour la pêche au saumon. Ce document indique en substance que l'administrateur de bande de la Première nation Tseshaht et le chef de bureau de la Première nation Hupacasath désigneront les participants qui peuvent pêcher en vertu de ce permis en leur délivrant des cartes de désignation.

Le permis communautaire que la bande accorde précise que l'administrateur de bande et les autres désigneront qui va pêcher. Je crois que cela confirme clairement la position que le comité a adoptée à ce sujet.

Ce qui est intéressant et réfute, je pense, certains commentaires formulés par les représentants du ministère lors de leur témoignage, c'est que le permis de pêche communautaire précise que les pêcheurs vendent le poisson et ne sont nullement tenus de remettre à la bande le poisson ou les produits de la pêche. Il est important de remarquer qu'on précise qu'il est permis de vendre le poisson capturé au moyen d'un filet maillant ou d'une senne traînante. On indique également que tout le saumon capturé par un participant en vertu de ce permis doit être inspecté au site de débarquement par un observateur qui remettra aux participants un bordereau de débarquement précisant la date du débarquement, la date et l'heure du débarquement, le nom du participant et le numéro de désignation ainsi que le nombre de saumons débarqués pour chaque espèce.

On fait référence précisément à la personne qui est désignée par la bande et on précise quoi faire.

On indique également que tous les participants doivent obtenir des bordereaux de vente quand ils vendent le poisson capturé en vertu du permis. Ces bordereaux doivent être délivrés par un observateur ou l'acheteur qui doit préciser le nom de l'usine, du transformateur ou de l'agent qui achète le poisson, le nom et l'adresse du participant ainsi que le numéro du permis et le numéro de désignation du participant.

Encore une fois, la bande désigne qui va pêcher. Si ce n'est pas une sous-délégation de pouvoir, je ne sais pas ce que c'est. Ce permis en établit la preuve.

M. Bernier: Le permis communautaire précise-t-il le nombre de désignations qu'un conseil de bande peut faire, ou est-ce laissé à la discrétion du conseil de bande?

M. Cummins: Je n'ai jamais vu de précision à ce sujet. C'est laissé entièrement à la discrétion de la bande. Comme nous l'avons déjà vu, on ne tient pas compte du pays d'où vous venez, que vous soyez Canadien ou Australien, Autochtone ou non, cela n'a pas d'importance.

M. Easter: N'est-ce pas un problème, étant donné qu'habituellement un permis est délivré de droit à un particulier? Dans ce cas-ci, comme on veut délivrer un permis à la communauté, il faut une désignation. Cela fait-il une différence? Dans le cas qui nous occupe, la pêche est effectuée pour la communauté avec un permis communautaire. Faut-il traiter la question différemment?

M. Bernier: Monsieur Easter, pour esquiver la question, je vous dirai que le permis de pêche communautaire n'est pas un permis. C'est un document appelé «permis». Comme je l'ai déjà dit, personne ne peut pêcher en vertu d'un permis de pêche communautaire. Personne ne peut pêcher sans avoir obtenu un vrai permis, qu'on appelle désignation.

Le permis de pêche communautaire remplace vraiment tout autre règlement de pêche, dont celui de l'Ontario. Oui, il y a un règlement de pêche de l'Ontario qui prévoit des dispositions sur la délivrance des permis par le ministre ontarien. Cependant, ce n'est pas parce que le gouverneur en conseil a promulgué le règlement de pêche de l'Ontario que tous ceux qui vivent en Ontario peuvent commencer à pêcher. Il faut toujours obtenir un permis en vertu de ce règlement.

C'est la même chose avec le soi-disant permis de pêche communautaire. Dans un sens, je ne pense pas qu'il est nécessaire de se demander si un permis de pêche pourrait être délivré à quelqu'un d'autre qu'une personne, parce que nous n'avons pas à nous occuper de ce problème. Aucun permis n'est délivré à une organisation autochtone.

Le sénateur Tunney: Je remplace quelqu'un ici aujourd'hui, et je dois d'abord dire que je fais partie du Comité des pêches du Sénat, mais que nous n'avons jamais examiné de document de ce genre avant.

MM. Cummins, Matthews et Easter ont répondu à la plupart de mes questions.

Je me demande pourquoi vous parlez d'un permis communautaire, en disant du même souffle que ce n'est pas un permis. C'est le premier élément de ma question. Ensuite, si vous délivrez un permis communautaire, la communauté doit désigner les pêcheurs. Dans ce cas, y a-t-il une différence entre le fait de désigner deux membres de la communauté ou d'en désigner 20, et le permis prescrit-il la quantité en termes de poids, de nombre ou d'espèces?

Pourquoi, si vous voulez parler d'un «permis communautaire», ne pas dire qu'il s'agit d'un permis de pêche délivré aux personnes que la communauté va désigner? Il doit bien y avoir un contingent dans le cas de chacun des permis.

M. Bernier: Sénateur Tunney, je dirais d'abord que ce n'est pas moi qui choisis le vocabulaire. Je reprends la terminologie que le gouvernement a employée dans le règlement.

Dans un sens, vous revenez à la question posée par M. Easter. J'imagine que nous allons nous y arrêter. Un permis peut-il être délivré à une communauté plutôt qu'à un particulier?

Comme je l'ai déjà dit, par sa nature, un permis autorise quelqu'un à faire quelque chose qu'il serait illégal de faire sans permis.

Il faut ensuite se demander si une communauté peut faire l'objet d'une interdiction légale en vertu de la Loi sur les pêches? Puis-je prévoir par règlement qu'il est interdit à toute bande indienne de pêcher? Est-ce une interdiction légale? Je ne le pense pas. Si nous examinons le règlement, à qui l'interdiction s'applique-t-elle? Elle s'applique à des personnes, à des particuliers. «Il est interdit à quiconque n'est pas désigné de pêcher». Voilà à qui s'applique l'interdiction légale.

Logiquement, si vous délivrez un permis, c'est-à-dire si vous permettez de faire quelque chose d'interdit, vous le permettez à la personne qui fait l'objet de l'interdiction. C'est à elle que l'interdiction s'applique, non pas à l'organisation autochtone. Rien n'interdit à une organisation autochtone de pêcher. Comment peut-on lui attribuer un permis, et à quelle fin?

Je ne pense pas que nous ayons à nous pencher là-dessus, parce qu'il ne s'agit pas vraiment d'un permis, mais j'espère avoir répondu à votre question. À mon avis, pour délivrer un permis à un groupe, il faut d'abord déterminer que ce groupe, et non chacun de ses membres, est visé par une interdiction légale.

Le sénateur Tunney: Vous n'avez pas répondu à l'autre partie de ma question: Est-ce qu'un permis limite la quantité de poissons et les espèces de poisson que son titulaire peut capturer?

Par exemple, si un permis communautaire désigne seulement quatre pêcheurs et qu'un autre en désigne 40, s'il n'y a pas de contingent ou de limite pour chacun d'eux, le permis qui désigne 40 pêcheurs permettra de pêcher 10 fois plus que celui qui en désigne quatre.

M. Bernier: Pour être bien honnête avec vous, monsieur le sénateur, je n'ai pas lu assez de soi-disant permis de pêche communautaires pour vous dire comment ils fonctionnent en pratique. J'imagine que c'est la responsabilité de l'autorité compétente, l'organisation autochtone, qui connaît le contingent global — en présumant qu'il y en a un — de s'assurer que les désignations en tiennent compte, ou qu'une fois que les rapports sur les débarquements indiquent que le contingent global est atteint, on cesse d'accorder des désignations.

M. Cummins: Puis-je répondre à la question du sénateur?

Sénateur Tunney, comme vous le savez sans doute, le comité s'intéresse à la légalité du règlement. Certaines de vos questions portent sur ses effets. Je vous comprends que vous vous interrogiez là-dessus. Si je peux, je vais vous répondre à ce sujet. Il n'y a pas de limite au nombre de pêcheurs qu'une bande peut désigner. En fait, rien ne limite les activités de pêche d'une bande et, dans la mesure où elle capture le poisson à des fins commerciales aux termes de ces permis, la demande est sans fin.

Par exemple, en 1996, le gouvernement a adopté un plan pour réduire le nombre de permis commerciaux sur le fleuve Fraser. On a réduit de 1 500 à 400 le nombre de bateaux de pêche à filets maillants. Or, en vertu des permis de pêche communautaires des Autochtones, la pêche commerciale dans le fleuve Fraser a en fait augmenté parce que la pêche commerciale pratiquée par les Autochtones sur le fleuve Fraser est à certains égards plus importante que ne l'était la pêche commerciale auparavant. C'est l'effet de la désignation sans limite.

Le sénateur Tunney: La pêche des Premières nations était-elle assujettie à certaines restrictions, ou est-elle entièrement libre, pour ce qui est du volume de la pêche?

M. Cummins: Le ministère aimerait que vous pensiez qu'elle est rigoureusement surveillée, mais la réalité est tout autre. Lundi dernier, le ministère est venu dire au Comité des pêches qu'il y avait un peu plus de 79 000 saumons sockeye qui ont été capturés l'été dernier par les Autochtones à des fins commerciales. Cependant, nous savons, par exemple, que six bateaux senneurs ont pêché sur le fleuve Fraser pendant près de 30 jours. Trois de ces bateaux pouvaient capturer et transporter 79 000 poissons en une seule journée. Or, l'opération s'est poursuivie pendant près de 30 jours.

J'ai demandé à un fonctionnaire s'il voulait dire que ces six bateaux senneurs avaient pêché les 79 000 poissons. Il m'a répondu que non, qu'ils n'en avaient pêché qu'une partie. Des poissons ont été capturés dans le cadre d'autres activités de pêche autorisées par ces permis de pêche communautaires.

Je sais que les bateaux ont débarqué leurs prises, par exemple, à French Creek, et que ces bateaux auraient pu débarquer 15 000 à 20 000 poissons, et cela s'est produit jour après jour. Il n'y a donc aucune limite aux activités de pêche autorisées en vertu de ces permis communautaires.

[Français]

M. Farrah: Je diffère d'opinion. Des conditions sont rattachées à un permis communautaire lorsqu'il est octroyé. Selon l'exemple de M. Cummins, l'erreur vient peut-être du fait que le ministère n'aurait pas émis de conditions. Cependant, les conditions reliées au permis, en ce qui concerne le temps de pêche, la quantité de poissons permise ou autres, doivent être respectées. Par conséquent, la licence est donnée à la communauté. Toutefois, la communauté peut faire pêcher qui elle veut et le nombre de personnes qu'elle veut en autant qu'on respecte les conditions reliées au permis en termes de quotas, de temps de pêche ou autre. Selon moi, il s'agit d'une désignation et non d'une délégation. C'est peut-être la nuance par rapport au règlement. Pourriez-vous m'expliquer la différence entre la désignation et la délégation de pouvoirs?

Si la communauté désigne des gens pour pêcher, ce n'est pas alors une délégation d'autorité du ministère, parce que les conditions du ministre sont caduques. Les conditions reliées au permis s'appliquent de toute façon.

M. Bernier: Le problème ne concerne pas le fait qu'il s'agisse d'un conseil de bande ou d'une organisation autochtone. On émet des licences, qu'on les appelle désignation ou autre chose. Le problème est que le Parlement, selon l'article 43(f) de la loi, a confié au gouverneur en conseil — c'est-à-dire au Cabinet — le pouvoir, par le biais d'un règlement, de prévoir et de régir l'émission d'un permis de pêche assorti de conditions imposées sur cette délégation.

Prenez le règlement sur les permis de pêche communautaire pour les Autochtones. Ce règlement ne désigne pas quelqu'un pour émettre les licences. Le règlement dit simplement que le ministre pourra désigner des personnes qui vont émettre des licences qu'on a appelées désignation. C'est cela le problème.

Il y a eu transfert de l'autorité du gouverneur en conseil au ministre. Le ministre est de trop dans cette équation. On peut faire légalement ce qu'on fait si on élimine le ministre et si c'est le gouverneur en conseil, le Cabinet, qui décide quelles organisations autochtones peuvent émettre des licences.

Le sénateur Hervieux-Payette: On revient à nos discussions antérieures quant à la définition d'une organisation autochtone. S'agit-il d'un individu ou d'une personne morale? On avait convenu que le ministre ne pouvait donner de pouvoirs, parce qu'on arrive à un troisième niveau, à savoir définir ou non l'organisation autochtone. Ce n'est même plus pertinent, parce que l'erreur se glisse avant dans la chaîne de décision.

Si, demain matin, tous les pouvoirs étaient exercée par le gouverneur en conseil, tout le reste de la chaîne fonctionnerait sans aucun problème. Il n'y aurait plus de problème de définition quant à savoir qui exercerait le droit de pêche pour la communauté autochtone. Êtes-vous d'accord?

M. Bernier: Oui.

Le sénateur Hervieux-Payette: Je me demande pourquoi on a discuté si longuement de cette question. M. Farrah m'a éclairée en disant que très souvent les communautés autochtones, n'ayant pas les ressources ni les compétences techniques nécessaires, exerçaient leur droit par le biais d'autres entreprises qui faisaient la pêche en leur nom. Ils en touchaient les bénéfices. Au Québec, il existe un programme de formation. Quand tous auront un bateau, tous pourront pêcher. Jusqu'à maintenant, les organisations autochtones ne sont en général pas incorporées. La définition demeure problématique.

Dans une organisation autochtone, quand on parle d'un conseil de bande, d'un conseil de tribu ou d'une association, très souvent, il n'y a pas de personne morale. Admettons que demain matin tous les permis soient délivrés par le gouverneur en conseil et qu'on suive la chaîne de décisions, aura-t-on régler la question des organisations autochtones et du permis de pêcher légalement par la communauté autochtone, laquelle aura à désigner quelqu'un? Qu'on le veuille ou pas, c'est un droit collectif. Ils sont propriétaires de maisons. À ce que je sache, il y a des maisons sur les réserves, et il y a des gens qui ont prêté de l'argent à la communauté autochtone. Toutefois, les gens qui habitent les maisons ne sont pas propriétaires, les maisons appartiennent à la communauté. On a déjà résolu le problème ailleurs où il y a des titres de propriété, une communauté des droits.

Advenant le cas où le ministre dirait qu'on procéderait par décret du gouverneur en conseil, j'amènerais cela régulièrement au Cabinet et on émettrait les permis. Le ministre va encore agir dans ce dossier, mais il prendra un autre chemin.

M. Bernier: J'aimerais préciser. Il n'a jamais été question que le gouverneur en conseil émette tous les permis de pêche. Il est question que le gouverneur en conseil prenne lui-même les règlements qui désignent les personnes ou les organisations autochtones qui peuvent les émettre. Pour émettre des permis, il n'est pas nécessaire qu'une entité désignée comme émettrice de permis ait la personnalité juridique. Il est parfaitement possible pour le gouverneur en conseil de désigner de telles entités statutaires, comme justement beaucoup d'organisation autochtones, pour émettre des permis, même si elles n'ont pas la personnalité juridique.

Pour détenir un permis, il faut autre chose. Comme je l'ai dit à plus d'une reprise, pour détenir un permis, il faut d'abord être le sujet d'une prohibition légale, ce qui implique qu'on soit un sujet de droit.

Le sénateur Hervieux-Payette: Selon votre explication, dans le cas d'un conseil de bande ou d'un conseil de tribu, il ne s'agit pas de personnes de droit, parce qu'elles ne répondent pas aux critères du droit commun canadien mais plutôt du droit oral qu'exercent les communautés autochtones?

M. Bernier: Je ne suis pas spécialiste en droit autochtone. Ce sont des entités statutaires, le conseil de bande en particulier, qui possèdent les attributs d'une personne juridique pour les fins requises. Autrement dit, dans la mesure où c'est nécessaire à l'exercice de ses fonctions statutaires, un certain degré de personnalité juridique sera reconnu à un conseil de bande, par exemple. Cependant, le conseil de bande n'est certainement pas équivalant à la corporation ou à la société. Ce n'est pas une personne morale.

Le sénateur Hervieux-Payette: Dans notre système de droit, je suis d'accord. Je vais quand même apporter une précision au cas présent. Nous sommes évidemment confrontés à deux systèmes de droit, en fait c'est le troisième au Canada, parce qu'on a le droit civil. Très souvent, le droit civil, dans certains cas, n'aura pas la même interprétation que le droit commun.

On arrive dans un autre mode de droit pour l'exercice des droits d'un groupe qui a le pouvoir de désigner. Si on prenait la route du gouverneur en conseil voulant qu'un permis soit émis, ce qui se fait dans le moment, le conseil de bande, le conseil de tribu ou l'association serait-elle capable de désigner les personnes qui vont exercer leur droit?

M. Bernier: Oui, ce serait le but.

Le sénateur Hervieux-Payette: Ils pourront détenir le document juridique qui leur permettra de pêcher et de respecter les conditions de quotas, et cetera, qu'on connaît.

M. Bernier: Prenons un exemple. J'ai un permis communautaire. Si ce permis avait été adopté et avait pris la forme d'un règlement du gouverneur en conseil, il n'y aurait aucun problème. Dans son règlement, le gouverneur en conseil dirait — il y a des définitions comme on en retrouve dans le permis communautaire ici:

[Traduction]

«Sauf indication contraire dans le règlement, les membres de la Première nation sont désignés pour pêcher en vertu du présent permis [...]» et le reste.

[Français]

La coprésidente (Le sénateur Hervieux-Payette): Je me sens plus confortable et le problème est peut-être moins grand qu'on l'avait anticipé.

M. Bernier: Il n'y a pas de problème juridique avec la politique gouvernementale reflétée dans ce règlement, c'est-à- dire l'idée d'avoir des organisations autochtones qui émettent des licences. C'est la façon dont on s'y est pris pour mettre en place cette politique gouvernementale qui fait problème.

[Traduction]

M. Wappel: Mesdames et messieurs, j'aimerais que vous vous reportiez à trois courts paragraphes de la section intitulée «Les permis de pêche communautaires». Pour moi, ils résument le problème dont nous discutons.

À la page 5, on dit:

Lorsqu'il a édicté la Loi sur les pêches, le Parlement a décidé que les permis seraient délivrés par le ministre en vertu de l'article 7 de la loi. Le Parlement a néanmoins prévu la possibilité pour le gouverneur en conseil d'établir, par règlement, un fondement juridique différent pour la délivrance des permis par le ministre ou même de désigner un autre organisme pour le faire. Si le pouvoir de délivrer des permis doit être délégué à une personne ou à un organisme autre que le ministre, la décision doit absolument être prise par le gouverneur en conseil sous forme de règlement.

À la page 8, dans le milieu du paragraphe, on dit:

Autrement dit, c'est le pouvoir discrétionnaire même de décider qui devrait être autorisé à délivrer des permis que le gouverneur en conseil délègue au ministre.

Enfin, à la page 4, le premier paragraphe complet dit:

Le comité est convaincu que, même si la Loi sur les pêches autorise le gouverneur en conseil à conférer à des organisations autochtones le pouvoir de délivrer les permis de pêche, elle ne lui permet pas de déléguer ce pouvoir au ministre. Lorsqu'il a adopté l'article 43 de la loi, le Parlement a investi le gouverneur en conseil du pouvoir discrétionnaire de décider qui pouvait être autorisé à délivrer des permis en vertu de la Loi sur les pêches. En prenant l'article 4 du Règlement, le gouverneur en conseil n'a pas exercé ce pouvoir; il a plutôt cherché à déléguer son propre pouvoir discrétionnaire au ministre des Pêches et des Océans.

Cela dit tout. À mon avis, rien de ce que les témoins nous ont dit contredit l'une ou l'autre de ces déclarations. C'est ce que je cherchais quand j'ai écouter les témoins, un argument qui réfuterait ce que je viens de lire. Je ne crois pas qu'il y en ait. C'est là où je veux en venir; je pense que les trois passages que j'ai lus sont justes, et il m'apparaît incontestable qu'il y a sous-délégation et qu'il faudrait recommander le désaveu.

Le coprésident (M. Grewal): Je pense que M. Wappel a très bien résumé la question, mais laissons parler M. Lee.

M. Lee: Pour être aussi bref que M. Wappel, n'est-il pas juste de dire que c'est le gouverneur en conseil qui a délégué son pouvoir sans autorisation? Nous ne critiquons pas les désignations que le ministre, la bande indienne ou quelqu'un d'autre confère, mais le fait que le gouverneur en conseil prétend déléguer un pouvoir que le Parlement ne lui a jamais autorisé à déléguer. Si c'est le cas, pourquoi perdons-nous notre temps à discuter d'autres considérations, comme des bateaux de pêche dans le fleuve?

Le problème est structurel, et se trouve au sommet de la chaîne hiérarchique, si je ne me trompe pas. Tout au sommet, le gouverneur en conseil a délégué au ministre un pouvoir que le Parlement ne l'a pas autorisé à déléguer.

Le conseiller, dans le rapport, signale que tout ce qui se passe par la suite, tout ce qui découle de cette délégation abusive, est une sous-délégation abusive.

Si je me trompe, dites-le-moi mais, à mon avis, nous devrions pointer du doigt le gouverneur en conseil. Dans le règlement par lequel le gouverneur en conseil établit tout ce régime figure une délégation abusive des pouvoirs conférés par la loi au gouverneur en conseil, n'est-ce pas?

M. Bernier: C'est exact, monsieur Lee.

M. Lee: Alors peu importe qui désigne qui? C'est le gouverneur en conseil qui a fait une erreur.

M. Bernier: Monsieur Lee, le comité n'a pas d'autre choix que de répondre aux arguments présentés par le ministère et le ministre. Dans le cas qui nous occupe, les arguments ont beau être faibles et injustifiés, ils ont été présentés par le ministre et ses collaborateurs, et il faut donc y répondre comme on le fait à la rubrique «Analyse de la réponse du ministère».

Le point de vue du comité, qui est exposé dans la première partie, est beaucoup plus succinct, ce qui vous plaît probablement plus, parce qu'il indique directement que la sous-délégation de pouvoir prévue dans le règlement est illégale.

À la rubrique «Analyse de la réponse du ministère», nous n'avons pas beaucoup de choix. Nous devons tenir compte des arguments présentés. Le ministère s'est donné beaucoup de mal pour montrer que le permis de pêche communautaire est effectivement un permis.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): C'est le gouverneur en conseil et non le ministre qui est de trop là- dedans, d'après ce que je comprends.

M. Lee: J'aimerais ajouter que l'alinéa 43f) et les autres dispositions connexes indiquent que le gouverneur en conseil peut faire ce qu'il veut pour établir un régime de permis. Le conseiller juridique nous rappelle, et il ne faut pas l'oublier, que, s'il peut faire pratiquement tout ce qu'il veut pour établir un régime de permis, il ne peut procéder à une sous- délégation illégale.

J'aimerais vous poser la question suivante: Le libellé de l'article 43 de la loi pourrait-il, à la rigueur, permettre au gouverneur en conseil de prévoir ce qui serait autrement une sous-délégation de pouvoir illégale?

M. Bernier: On emploie le mot «concernant». Ce mot, au début de l'énoncé d'un pouvoir habilitant, confère un mandat assez vaste. À la page 13 de cette section, le deuxième paragraphe complet dit:

Il faut dire que la portée de l'alinéa 43f) suffirait probablement à justifier la prise d'un règlement dans lequel le gouverneur en conseil autoriserait quelqu'un à décider qui devrait délivrer les permis [...]

C'est ce qui a été fait ici.

[...] pour autant que la personne désignée dispose de certains critères la guidant dans l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire. Ce n'est pas le cas pour le RPPCA. Dans ce règlement, le pouvoir discrétionnaire du ministre de décider quelles organisations autochtones seront autorisées à délivrer des permis reste entier. D'où la sous- délégation.

M. Lee: C'est beaucoup plus clair, merci.

[Français]

M. Farrah: Si le règlement n'est pas respecté, il y aurait deux possibilités, soit de le modifier pour qu'il respecte la loi eu égard au gouverneur en conseil, ou soit d'amender la loi. On s'entend là-dessus?

M. Bernier: À la dernière réunion, le comité avait en main une opinion juridique fournie par M. Cummins. J'avais bien aimé l'expression de l'avocat qui décrivait tout ce schème mis en place comme étant l'équivalent de forcer un bout de bois carré dans un trou rond. On a une loi qui remonte à 1879 et qui a été faite pour les conditions de l'époque. Cela fait au-delà d'un siècle. On essaie d'accommoder du droit entièrement nouveau avec des droits autochtones, communautaires, et cetera. Et au lieu de retourner devant le Parlement et de dire: «Écoutez, il faut modifier la loi pour qu'on puisse mettre cela en vigueur», on tiraille et on pousse pour faire entrer le bout de bois carré dans le trou rond. Et cela passe mal.

M. Farrah: Je pose la question parce qu'il y a évidemment un processus enclenché au niveau de la révision de la loi qui pourrait aboutir à une nouvelle loi ou à des amendements à la loi qui seraient présentés devant la Chambre des communes. Je ne peux pas présumer. Dans ce sens — excusez l'expression —, en termes de «timing», peut-être que cette alternative vaudrait la peine d'être explorée par le comité, parce que vous discutez également de changements aux règlements.

Compte tenu qu'il y a une possibilité très réelle d'amendement à la loi prochainement, je pense que ce serait une alternative qui devrait être considérée.

M. Bernier: Je rappelle aux membres du Comité mixte d'examen de la réglementation par la même occasion qu'il y avait eu présentation d'une révision de la Loi sur les pêches en 1996; le projet de loi C-62. Le projet de loi C-62, parmi les dispositions qu'on y retrouvaient, permettait au gouvernement de conclure des «fisheries management agreements».

[Traduction]

Ce genre d'entente aurait convenu parfaitement dans ce cas. Le gouvernement aurait sûrement pu utiliser ce moyen pour mettre la politique en oeuvre.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Qui l'aurait fait, le gouverneur en conseil ou le ministre?

[Français]

M. Farrah: C'est à la page 10 du projet de loi qui n'a pas été adopté. L'article 16 dit que dans l'exercice des pouvoirs et fonctions que lui confèrent l'article 14, le ministre peut conclure des accords, des arrangements ou des opérations avec tout organisme ou toute personne de droit public ou privé. Certains éléments feraient en sorte de rencontrer certaines inquiétudes du comité, compte tenu des circonstances où une révision est amorcée et laquelle débouchera sur un autre projet de loi.

Le projet de loi fait renaître le ministre. Vous disiez plus tôt que le ministre était de trop dans la hiérarchie.

M. Bernier: Je n'ai rien contre le ministre personnellement.

M. Farrah: Je parlais du point de vue légal. Sur le plan de la délégation, à l'article 7, le ministre pourrait donner un permis pour la gestion et la régulation des pêches et la préservation du poisson. Par conséquent, déjà au niveau de ce projet de loi qui n'a pas été adopté, il y a des éléments très intéressants pour le comité. Des éléments répondraient à certaines de vos interrogations.

La coprésidente (Le sénateur Hervieux-Payette): Qui émet les permis dans d'autres circonstances? Il me semble que la plupart du temps ce sont les ministres, et non le gouverneur en conseil, qui émettent tous les permis.

M. Bernier: Dans la plupart des situations, c'est effectivement le ministre. Ce serait ici le cas aussi.

[Traduction]

Le coprésident (M. Grewal): Il est 10 h 45. Étant donné que nous parlons de la sous-délégation de pouvoir illégale, j'ai le sentiment que nous penchons en faveur du désaveu, n'est-ce pas? Devrions-nous demander au conseiller juridique de rédiger un rapport de désaveu à ce sujet?

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Vous avez dit au début que nous allions examiner chaque section avant de décider. Pour cette section, nous sommes d'accord.

Le coprésident (M. Grewal): Je parle de cette section en particulier.

Passons à la section suivante, qui s'intitule «Incompatibilité entre le permis et les règlements».

M. White: Faut-il présenter une motion à ce sujet?

Le coprésident (M. Grewal): Nous allons fonctionner par consensus au lieu de présenter des motions aujourd'hui. Nous avons fait des progrès et nous allons poursuivre.

Monsieur le conseiller, pourriez-vous nous fournir des informations sur l'incompatibilité entre le permis et les règlements, je vous prie?

M. Easter: Nous avons proposé de recommander le désaveu au sujet de cette section. Va-t-on reprendre la proposition de M. Farrah, à savoir qu'il y a d'autres façons de faire, qu'on pourrait suggérer?

Le coprésident (M. Grewal): Nous avons étudié cela. À mon avis, nous en avons longuement discuté. L'idée est bonne, mais comment régler cela?

M. Bernier: Si je comprends bien ce que vous demandez, nous pourrions sûrement indiquer dans l'ébauche du rapport qui sera soumise à l'examen du comité qu'une mesure ressemblant au projet de loi C-62 aurait éliminé le problème et permis la mise en oeuvre du régime.

Le coprésident (M. Grewal): Ce n'est pas une mauvaise idée.

[Français]

M. Farrah: Il suffirait d'inclure cette possibilité d'amendement législatif.

[Traduction]

M. Cummins: Je reconnais que c'est possible, mais je ne suis pas sûr que ce qui est possible est toujours faisable, pratique et réaliste. C'est probablement une des raisons pour lesquelles le gouvernement a décidé de ne pas donner suite au projet de loi C-62, qui a été mis de côté il y a presque six ans. C'est aussi pourquoi le passage qu'on vient de lire qui dit que la portée de l'alinéa 43f) suffirait probablement me pose un problème.

C'est fort possible que la disposition suffise, mais je crains que, si nous formulons des suggestions de ce genre, on pense que le comité a approuvé au préalable un certain régime. Je ne suis pas sûr que ce soit une bonne chose.

De plus, pour ce qui est du projet de loi C-62, ce qu'il aurait prévu pour autoriser ces licences, est très dangereux. Je crois honnêtement que c'est ce que le ministère a reconnu.

M. Easter peut confirmer qu'un des sujets dont il a été souvent question au cours des audiences du Comité des pêches est l'érosion du pouvoir du ministre ainsi que sa capacité de gérer les pêches et son obligation constitutionnelle. Le gouvernement doit être très prudent à ce sujet. Le comité devrait être conscient du fait que le pouvoir du ministre pourrait être amoindri simplement pour permettre que quelque chose soit mis en place. Ce n'est peut-être pas ce que le comité à de mieux à proposer.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Monsieur Cummins, j'aimerais vous rappeler que le rôle de notre comité est d'examiner la conformité du règlement avec la loi et la teneur de la loi. La Chambre discutera de la politique quand vous allez examiner les amendements au projet de loi. Nous connaissons l'intention de la politique, qui est bien claire, mais les choses n'ont pas été faites correctement.

Tout ce que nous pouvons faire, c'est dire au ministre que, pour agir en toute légalité, il doit modifier soit le règlement, soit la loi.

Les changements que vous proposez pourront être apportés quand la Loi sur les pêches sera réexaminée. Je ne suis pas sûre que votre chef proposera volontiers au nôtre de faire cela rapidement.

M. Cummins: Vous m'avez mal comprise. J'ai dit exactement ce que vous avez dit, sauf pour ce qui est de vos derniers commentaires. J'ai dit que le comité est saisi du règlement que le gouvernement a pris. L'objectif du comité est de se prononcer à son sujet.

Avec ce qui figure au bas de la page 13 et ce que le secrétaire du ministre a proposé, le comité essaie de conseiller le gouvernement sur la façon d'atteindre son objectif.

Il y a deux problèmes à ce sujet. Premièrement, on peut penser que nous approuvons à l'avance un régime particulier et, deuxièmement, nous pouvons involontairement proposer au gouvernement d'amoindrir la responsabilité et l'obligation constitutionnelle du ministre. Je ne pense pas que c'est ce que le comité veut faire.

Le comité devrait simplement examiner la question dont il est saisi. Le gouvernement va de toute évidence savoir ce qui est possible en vertu de l'article 43. Nous pourrons en décider quand nous aurons à le faire, mais je ne pense pas qu'il soit sage de proposer quelque chose à l'avance.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Dans le cas d'autres lois et d'autres règlements, le comité a souvent recommandé une solution à un problème. Nous venons de comparaître devant le Comité de la justice sur un tout autre sujet, et nous avons proposé de nouvelles mesures pour corriger le problème auquel il était confronté. Nous avons indiqué des articles dans la loi qui pourraient régler la situation.

Je pense que vous devez compter sur le comité pour qu'il établisse la validité du règlement et qu'il trouve une façon de corriger le problème. Vous êtes peut-être d'un autre avis, mais je pense que c'est au comité de décider. Nous sommes d'avis qu'il y a une erreur et qu'il faut la corriger. Vous proposez une solution et d'autres en proposent une autre. C'est au comité de décider quoi faire.

Le coprésident (M. Grewal): À mon avis, nous avons assez discuté. Je vais laisser le conseiller juridique formuler un bref commentaire là-dessus. Je pense qu'il a besoin de plus de temps pour préparer un rapport de désaveu, mais je demanderais instamment que nous ayons ce rapport avant la prochaine réunion afin de pouvoir l'examiner et aller de l'avant.

M. Bernier: Je comprends ce que M. Cummins veut dire. Comme le président l'a indiqué, quand le comité formule des objections, la politique n'entre pas en ligne de compte. Quand le comité propose d'autres façons d'agir, la politique n'est pas prise en considération non plus. Ceux qui connaissent le mandat du comité savent que, si le comité propose telle ou telle solution pour agir légalement, cela ne suppose pas qu'il approuve la politique. Il ne se préoccupe pas davantage de la politique dans ce cas.

J'ajouterais qu'il serait assez étonnant qu'un comité parlementaire ne mentionne pas que le Parlement, qui est souverain sur le plan législatif, peut faire ce qu'il veut, sous réserve de la Constitution.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Nous aurons l'occasion de savoir, monsieur Cummins, si vous êtes d'accord avec l'ébauche du rapport. Vous pourrez alors formuler des commentaires, et nous verrons si nous sommes d'accord ou non.

Monsieur Bernhardt, avez-vous un résumé de l'article 4?

M. Bernhardt: Bien sûr, sans l'article 4 du règlement, il ne reste pas grand-chose, nous pouvons alors nous en remettre à l'article 6 qui prévoit que les conditions de tout permis l'emportent s'il y a incompatibilité entre les conditions d'un permis accordé par le ministre et tout règlement pris par le gouverneur en conseil.

Bien sûr, les conditions du permis seront établies par le ministre cas par cas, conformément au pouvoir administratif qui lui est conféré par le règlement. Évidemment, le règlement est une mesure législative.

On peut considérer que l'article 6 confère au ministre le pouvoir de modifier le règlement en vigueur cas par cas, en fonction de ce que le ministre prévoit pour chaque permis.

Le comité est d'avis que, sans avoir été expressément habilité à le faire, le gouverneur en conseil n'est pas autorisé à accorder ce pouvoir au ministre. Le ministère estime que cela ne correspond pas à une modification de fait du règlement. C'est simplement une disposition par laquelle le gouverneur en conseil a décidé lequel des deux régimes de réglementation primerait.

Certes, s'il y avait deux règlements, le gouverneur en conseil serait tout à fait libre d'indiquer lequel prime s'il y avait divergences entre les deux. Ce n'est pas ce qui se passe ici. Il n'y a pas incompatibilité entre deux règlements, mais entre un règlement et les conditions d'un permis. Je pense que c'est trompeur de dire qu'il y a divergences entre deux régimes réglementaires.

Il reste que l'article 6 accorde au ministre le pouvoir d'annuler un règlement. Étant donné que l'autorisation d'accorder ce pouvoir n'est pas claire, il faut considérer que c'est illégal.

M. Lee: J'ai eu le temps d'examiner la question de plus près à loisir. Je pense que le problème est assez clair, qu'il ne présente pas d'ambiguïté. Nous devrions être fermes.

Puis-je simplement confirmer que le dernier projet de loi déposé à la Chambre avait une disposition à ce sujet? Pouvons-nous vérifier si le projet de loi qui a été déposé à la Chambre il y a quelques années contenait bien une disposition qui aurait accordé au permis la priorité sur un règlement?

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Le projet de loi de 1996, quand on a essayé de modifier la loi?

M. Lee: C'était l'article 7 du projet de loi C-62.

Je ne peux pas donner de précisions maintenant, mais on m'avait dit que c'était l'objectif, ou qu'il y avait une disposition dans le projet de loi. Quoi qu'il en soit, je pense que nous devrions rester fermes là-dessus. Il faut une modification législative. Si le ministère est d'avis que les permis peuvent à l'occasion primer sur les règlements — et il peut arriver que, pour de bonnes raisons, deux régimes soient incompatibles — si le gouvernement est d'avis que la loi doit prévoir que, s'il y a divergences et si c'est dans l'intérêt public, le permis doit l'emporter sur un régime réglementaire adopté au préalable, il faudrait que ce soit prévu dans la loi.

Pour régler la question, il faut s'en remettre à la loi.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Vous recommandez le désaveu dans ce cas, si je vous ai bien compris.

M. Lee: À ce sujet, j'aimerais bien savoir si le gouvernement est prêt à modifier la loi ou à présenter une modification.

M. White: Qu'est-ce que cela changerait à la recommandation de désaveu? Logiquement, vous recommandez le désaveu ou non.

M. Lee: Le comité, depuis que j'en fais partie, a toujours accepté un engagement de la part du gouvernement en vue de modifier une loi, et il ne recommande pas le désaveu si une modification est promise.

M. White: Je n'ai aucune objection, monsieur Lee. Mais nous avons donné au gouvernement l'occasion de prendre cet engagement pendant des années.

M. Lee: Dans le cas qui nous occupe, monsieur White, je me rappelle que le comité, en demandant de rédiger un rapport de désaveu il y a quelques mois, a dérogé à la façon dont il fonctionnait depuis des années. Nous n'avons peut- être pas eu l'occasion de permettre au ministre et au gouvernement de venir annoncer un engagement. Le comité a alors rompu avec ses habitudes, si bien que nous avons l'air aujourd'hui, comme M. Cummins ou quelqu'un d'autre l'a dit, de vouloir revenir sur notre position. On dirait qu'il en est ainsi seulement parce que nous avons dérogé à nos habitudes, et maintenant nous envisageons la situation de façon assez pragmatique, comme nous devons le faire.

Je ne propose pas que nous changions d'avis. Je pense avoir entendu les gens exercer des pressions en coulisse, et que c'est une démarche que le gouvernement envisage.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): En feriez-vous état dans un rapport ordinaire semblable à la deuxième section?

M. Lee: Je ne suis pas sûr. Je ne veux pas éterniser les choses. Disons que je ne sais pas trop à quoi m'en tenir.

M. Bernier: Puis-je peut-être vous venir en aide, monsieur Lee? M. Easter peut le confirmer. Je crois qu'il a demandé deux fois aux témoins, au cours des audiences, s'ils étaient prêts à agir au sujet de cette disposition. Ils ont répondu non les deux fois. On a posé la question.

M. Lee: Je veux connaître la réponse du gouvernement, pas du ministère.

M. Easter: Oui, j'ai posé la question et le représentant du ministère a sûrement semblé hésiter à agir de la sorte. Cependant, le ministre réfléchit à la question. On sait bien que la prestation des fonctionnaires devant le comité n'a pas été très remarquable. Je pense que le ministre l'a reconnu. Si on lui demandait, il consentirait à examiner la question de façon à respecter les responsabilités.

M. Bernier: Comme mon collègue l'a dit à M. Lee, nous avons reçu ce document hier du ministère. D'après lui, la disposition est acceptable. C'est à la page 7 du document.

D'après le document que nous avons reçu hier au milieu de l'avant-midi, il ne semble pas y avoir de changement dans l'air.

Le coprésident (M. Grewal): Où est-ce?

M. Bernier: C'est à la page 7 du document, à la rubrique intitulée «Le RPPCA prévoit que les conditions du permis prévalent». Le gouverneur en conseil a validement promulgué un règlement de manière qu'en vertu de la loi les conditions de tout permis l'emportent.

M. Lee: Monsieur le président ou madame la présidente, le secrétaire parlementaire et le ministre sont venus témoigner devant nous. Je ne peux pas faire mieux. Si le secrétaire parlementaire n'a rien d'autre à proposer pour régler la question, je vais m'arrêter là.

[Français]

M. Farrah: Sur le fond de la question, il existe une situation de compromis. D'une part, il y a un consensus à l'effet que le règlement ne répond pas et on doit trouver une façon de régler la situation. On peut soit changer le règlement ou amender la loi. Il est tout à fait légitime de mettre ces deux possibilités dans le rapport. Je ne peux pas parler au nom du ministère, mais je comprends qu'il y a une volonté politique d'arriver à arrimer le règlement ou la loi pour faire en sorte qu'on puisse s'entendre. La raison pour laquelle il est pertinent de mettre cette possibilité dans le rapport, c'est que tout le monde est au courant qu'il y a une revue de la loi depuis un certain temps et on est pratiquement à l'échéance de cette révision. C'est une occasion intéressante. Cette révision qui arrive à échéance aboutira nécessairement à des amendements à loi. Par conséquent, le temps est propice. Ce serait pertinent de le mettre dans le rapport. Compte tenu de la situation qui prévaut, ce serait logique de le faire, tout en invoquant les deux possibilités.

[Traduction]

M. Wappel: Madame la présidente, je vais rapidement résumer comment nous devrions procéder, à mon avis. D'après le conseiller juridique, sans une autorisation claire dans la loi, il est illégal qu'un permis l'emporte sur un règlement. C'est ce qu'il faut vérifier. L'article 6 prévoit précisément cela et, par conséquent, il devrait être révoqué. La solution la plus simple est de prévoir dans la loi, si c'est ce que le ministère, le ministre et le gouverneur en conseil veulent, que, dans certaines circonstances, un permis pourra l'emporter sur un règlement.

Passons maintenant à la section suivante.

Le coprésident (M. Grewal): M. Wappel a dit exactement ce que je voulais dire. À mon avis, nous devrions recommander le désaveu parce que la situation est illégale. Cependant, nous devrions aussi mentionner ce que M. Farrah a dit. Nous devrions ajouter un paragraphe sur la modification de la loi. Nous devrions demander au conseiller de rédiger un rapport de désaveu conforme à celui déjà rédigé pour la prochaine réunion.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Y a-t-il consensus?

Des voix: Oui.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Bien. Passons à la cinquième section.

J'aimerais d'abord vous rappeler qu'un autre comité doit se réunir ici à midi. Si vous voulez poursuivre la réunion, il faudra nous déplacer dans un autre immeuble. Il y a une salle libre, mais celle-ci ne l'est pas. Ensuite, il n'y aura pas de nourriture. Les gens peuvent se décider avant midi.

Le coprésident (M. Grewal): Nous pouvons parler moins et terminer plus tôt.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Passons maintenant à la cinquième section et nous allons demander au conseiller juridique de nous en donner un aperçu.

M. Bernhardt: Cette section, madame la présidente, traite de l'article 7 du règlement, selon lequel il est interdit à quiconque pratique la pêche ou toute activité connexe autorisée en vertu d'un permis de contrevenir ou de déroger aux conditions de ce permis. L'objet de cette disposition se précise quand on se reporte à l'article 78 de la loi, qui traite des infractions, et prévoit que les contraventions à la loi ou à ses règlements constituent une infraction.

Le permis n'est ni une loi ni un règlement. À première vue, l'article 78 ne s'applique pas aux conditions des permis. L'article 7 vise à faire en sorte que la dérogation à une condition du permis soit considérée comme une infraction à la loi.

Encore une fois, rien dans la loi ne permet que le règlement prévoie des infractions. Le comité a déjà convenu dans un autre rapport que cette mesure est illégale. Le document renvoie au rapport no 66, qui traite de dispositions du règlement de pêche de l'Ontario.

L'article 7 a pour seul objet de faire indirectement ce qu'on ne pourrait faire directement. Le ministère a rejeté le point de vue du comité dans sa réponse au rapport précédent et à propos du règlement. Depuis le dépôt du dernier rapport du comité, le ministère invoque l'affaire Barnett. La note analyse cette affaire pendant plusieurs pages, pour conclure que de sérieux doutes subsistent quant à sa valeur comme précédent.

Le ministère soutient essentiellement que l'article 7 du règlement ne crée pas d'infraction, mais établit tout simplement une règle de conduite à suivre. Le comité a examiné cet argument dans son premier rapport et je crois qu'il l'a qualifié de «mal fondé».

Si ce n'était de l'article 7 du règlement, on ne pourrait pas être condamné pour avoir enfreint les conditions d'un permis. Peu importe comment on essaie de définir le problème, c'est essentiellement cela.

M. Lee: Je me suis penché assez longuement sur cette question au cours de la dernière réunion. Mes arguments me semblent assez convaincants.

Je comprends aussi le ministère quand il dit qu'on ne fait que créer une norme dans le règlement pour que tout le monde sache qu'il faut respecter un règlement. Si, en plus, le ministère indiquait qu'il n'a jamais accusé personne en vertu de cette disposition, et qu'il n'a pas l'intention de le faire — il pourrait même ajouter qu'il a pour politique de n'accuser personne en vertu de l'article 7 du règlement — je trouverais cela acceptable. De prime abord, la présence de l'article 7 dans le règlement ne contrevient à aucun principe particulier de la réglementation. Elle indique qu'il faut respecter les règlements ou les conditions d'un permis.

Quelqu'un sait-il si le ministère a jamais condamné qui que ce soit pour avoir enfreint l'article 7 du règlement? Je pense que nous n'avons jamais vérifié cela. Je tiens à faire consigner cela au compte rendu, parce que c'est peut-être simplement une norme inscrite dans le règlement. Cependant, si j'ai le moindre sentiment que les fonctionnaires du ministère ont déjà envisagé de condamner quelqu'un en vertu de cette disposition, je partirai en guerre.

Je suis déjà prêt à partir en guerre parce que j'ai clairement le sentiment que le règlement crée un paradigme — une structure — en vertu de laquelle une personne pourrait être accusée. Je suis sûr qu'elle ne serait pas condamnée si elle a un bon avocat; je serais prêt à gager là-dessus précisément parce que nous jugeons que c'est inconstitutionnel. Je tiens cependant à ce que le compte rendu fasse état de l'autre point de vue à ce sujet, de l'argument peut-être discutable et naïf du ministère selon lequel c'est simplement une norme qui a été énoncée dans le règlement.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): M. Grewal doit partir dans quelques minutes.

Le coprésident (M. Grewal): Cette section est bien claire. Je ne partirai pas en guerre, mais je vais recommander le désaveu à ce sujet.

M. Lee: Pourrais-je demander au conseiller juridique de communiquer avec le ministère pour savoir si des poursuites ont déjà été engagées?

M. Cummins: J'ai une note qui peut peut-être répondre en partie à cette question. Elle est datée du 7 mars 1996. Un pêcheur commercial de la rivière Yukon et membre de la Première nation Dawson a plaidé coupable sous deux chefs d'accusation pour la vente de poisson capturé en vertu d'un permis de pêche communautaire pour les Autochtones devant la Cour provinciale de Dawson City. La cour l'a condamné à une amende de 1 000 $ et 500 $, pour chacun des deux chefs d'accusation. On a aussi suspendu son permis de pêche commerciale du 1er au 30 septembre 1996.

C'en est un exemple.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Cela nous apporte peut-être de bons arguments, s'ils disent ne jamais l'avoir invoqué. Ce n'est pas une mauvaise chose de le savoir.

Y a-t-il consensus pour que cela fasse partie du rapport de désaveu?

Des voix: Oui.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Nous passons à la section 6.

M. Bernier: Il y est question de l'établissement des périodes de fermeture symboliques, madame la présidente, et il n'y a pas grand-chose à ajouter là-dessus. Il est clair que c'est une erreur importante de la part qui des conseillers juridiques du ministère sont conscients de la différence qui est faite en droit entre l'exercice d'un pouvoir conféré par la loi de bonne foi et l'exercice d'un pouvoir de mauvaise foi.

Les représentants du ministère reconnaissent dans le document distribué ce matin qu'une période de fermeture de trois jours, ce que nous avons appelé une «période de fermeture symbolique» devra toujours être modifiée. En fait, interdire la pêche pendant trois jours avant le nouvel an est de la pure fiction. Cela a été prévu dans la loi pour permettre de faire indirectement ce qui ne peut être fait directement. C'est le principe. C'est un principe important du droit administratif qui ne trouve pas d'écho au ministère ou dans ses services juridiques, ce qui est incroyable.

Le gouverneur en conseil n'a pas été autorisé à déléguer le pouvoir de prescrire les périodes de fermeture. Il doit les prescrire lui-même. C'était l'intention du Parlement en 1869. Cependant, le gouverneur en conseil peut autoriser des fonctionnaires des pêches ou d'autres fonctionnaires à modifier une période de fermeture qu'il a prescrite de bonne foi. Les périodes de fermeture symboliques ne sont pas prévues pour protéger une pêche en particulier. Une période de fermeture symbolique de trois jours a pour seul objet de permettre à quelqu'un de laisser croire qu'il veut modifier la période de fermeture alors qu'il veut créer une véritable période de fermeture. C'est le problème qui n'a pas été réglé. Le comité devrait donner suite à cette question comme il le juge souhaitable.

[Français]

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Les explications de notre conseiller juridique sont claires; il s'agit probablement d'un mauvais règlement — et je ne présume pas de bonne ou de mauvaise foi.

M. Bernier: De mauvaise foi au sens juridique.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Si on veut juger des intentions on peut tirer toutes sortes de conclusions, malgré qu'il peut parfois y avoir d'autres raisons variant de l'incompétence à l'innocence. Il demeure que dans ce cas c'est plutôt sur le plan opérationnel.

[Traduction]

M. Lee: J'ai l'impression qu'il y a d'autres artifices semblables dans les règlements fédéraux. Nous avons signalé la chose aux ministères. Certains ont corrigé la situation et d'autres non. Ce n'est pas nécessairement très compliqué. Nous n'avons jamais recommandé le désaveu dans ce cas avant. Nous avons été en désaccord de façon continue, si je peux m'exprimer ainsi, avec certains ministères.

À mon avis, il est inutile pour nous d'en rajouter, à moins que mes collègues insistent. Je pense que nous devrions rester fermes au sujet de cet artifice qui permet de faire indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement.

M. Bernier: Pour chercher à éduquer les gens — en ajoutant cela peut-être dans la section sur la portée du règlement pour présenter un rapport sur ces deux questions, un rapport d'accompagnement sur les activités connexes et les périodes de fermeture symboliques.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Nous sommes d'accord pour dire qu'il y a deux problèmes différents. Dans un cas, le règlement, ou du moins l'objet du règlement, comporte des lacunes, et nous allons opter pour l'autre solution.

C'était la dernière section. Les directives du comité étaient-elles assez claires, monsieur Bernier?

M. Bernier: Oui. Nous continuons de recevoir divers documents du ministère, et nous devons modifier l'ébauche du rapport en conséquence. Si vous êtes d'accord, nous allons essayer de présenter un rapport de désaveu au comité le 30 mai, ce qui nous donnera trois semaines pour mettre la touche finale. Si le comité le veut bien, nous pourrions peut-être revoir les deux autres questions, qui feront l'objet d'un rapport ordinaire, à la prochaine réunion. Il est moins important que ce rapport soit adopté tout de suite; il peut l'être d'ici la fin de la session. Seriez-vous d'accord?

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Oui, et nous devrions examiner d'autres règlements. Ce serait donc utile, si vous êtes d'accord, monsieur Cummins, que le rapport de désaveu soit le premier point à l'ordre du jour de la prochaine réunion. Le reste sera examiné à un autre moment.

M. Bernier: Il sera question du rapport général le 13 juin.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Nous allons examiner l'autre à ce moment-là et, en même temps, nous allons remplir notre mandat qui consiste à examiner toute la loi.

M. Cummins: Le 30 mai, qu'allons-nous examiner?

M. Bernier: L'ébauche du rapport de désaveu.

M. Cummins: Et le 13 juin?

M. Bernier: Les activités connexes et les périodes de fermeture symboliques, dont il sera question dans le rapport ordinaire, et non pas dans le rapport de désaveu.

[Français]

DORS/92-738 — RÈGLEMENT SUR L'INTERCONNEXION DU TRAFIC FERROVIAIRE — MODIFICATION

La coprésidente (Le sénateur Hervieux-Payette): Passons au DORS/92-738.

[Traduction]

M. Wappel: Les membres du comité se rappelleront que nous négocions avec le ministre des Transports depuis un certain temps déjà. On nous a ignorés, et les membres savent que le comité n'aime pas être ignoré. Nous n'avons reçu aucune réponse. Nous avons demandé au ministre de venir nous rencontrer, mais il n'est pas venu. Nous n'avons pas reçu de réponse, même si le Bureau du greffier du Sénat a envoyé un document complet sur l'assignation des témoins. En conséquence, je vais présenter maintenant au comité un certificat, que j'ai signé, et qui indique qu'à mon avis les preuves fournies par Louis Ranger, du ministère des Transports, sont solides et importantes dans l'enquête concernant le règlement dont nous parlons.

Par conséquent, madame la présidente, je propose:

Que Louis Ranger, du ministère des Transports, soit assigné à comparaître et à témoigner devant le Comité mixte permanent d'examen de la réglementation, le jeudi 30 mai 2002, à 8 h 30, dans la salle 160-S de l'édifice du Centre, à Ottawa, et que les coprésidents soient autorisés à prendre les mesures nécessaires pour communiquer cette ordonnance.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Nous pouvons peut-être demander au greffier ce qu'il faut faire pour assigner un sous-ministre à comparaître devant notre comité. Ce n'est pas habituel mais, compte tenu des faits, c'est important.

M. Cummins: J'ai une question à poser. Le 30 mai, nous avons décidé d'examiner le rapport de désaveu. Y aura-t-il un conflit d'horaire à ce sujet?

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Je n'ai pas l'impression que M. Ranger va parler pendant deux heures. Il doit nous donner une réponse. Ce n'est pas très long. C'est presque «oui» ou «non». Cela ne devrait pas prendre trop de temps. C'est la raison pour laquelle nous lui avons demandé de comparaître d'abord, pour que nous puissions ensuite prendre le temps de discuter du rapport de désaveu.

Nous n'avons pas encore obtenu de réponse. Nous avons envoyé plusieurs lettres. Nous avons fait une demande au ministre, sans obtenir de réponse. Nous avons demandé au sous-ministre. Il devra nous dire pourquoi il ne nous a pas répondu.

Cela ne devrait pas prendre des heures. Il doit nous expliquer pourquoi on ne nous fournit pas de réponse sur ce règlement qui est illégal, et que le ministère ne veut pas modifier.

M. Cummins: Je ne veux pas que nous manquions de temps pour le rapport de désaveu.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Il y a un seul sujet de discussion. Je lui souhaite bonne chance.

Le greffier va vous dire de quoi il s'agit.

M. Till Heyde, cogreffier du comité: On vous a distribué un court document de deux pages dans les deux langues que j'ai rédigé pour résumer les pouvoirs des comités permanents concernant l'assignation des témoins, ainsi qu'un article sur le sujet. Comme vous le constaterez, on commence habituellement par inviter un témoin à comparaître volontairement, ensuite c'est le dépôt d'un certificat — ce que vient de faire M. Wappel — puis, un membre du comité propose une motion pour assigner à comparaître un témoin et le comité l'adopte s'il le veut. Ensuite, l'assignation est signifiée au témoin, généralement par un huissier, ce qui sera le cas cette fois-ci. Le témoin est alors tenu de comparaître devant le comité à la date fixée.

Comme je l'indique dans le document, pour que tous les membres soient bien au courant des faits, on a dérogé à la pratique habituelle dans ce cas-ci, étant donné que la personne qu'on veut assigner à comparaître n'a pas été expressément invitée à venir témoigner volontairement. Je crois que les membres sont au courant de tout ce qui s'est passé à ce sujet. Le conseiller juridique peut vous parler de la pertinence de la réponse reçue afin que vous sachiez bien ce qu'il en est. Si vous avez des questions, je pourrai y répondre.

M. Wappel: Notre greffier a tout à fait raison. Nous n'avons pas invité cette personne. Le conseiller juridique a distribué une note qui me confirme que les questions sont simples, et qu'on a simplement négligé d'y répondre. Si ce monsieur se présente ici à 8 h 30 et nous donne une réponse en cinq minutes, il pourra partir, et l'affaire sera réglée. Je soupçonne qu'après avoir été assigné à comparaître, il peut très bien nous envoyer les réponses par écrit avant de se présenter.

De toute façon, cela reste à voir. Compte tenu de tous nos échanges avec le ministre, nous avons sauté l'étape de l'invitation pour tout de suite assigner le témoin à comparaître. Je demande instamment au comité de procéder de cette façon.

M. Bernier: J'aimerais simplement dire que je suis surpris que le greffier ait choisi de se fonder sur le document de Mme Davidson sur les pouvoirs d'un comité parlementaire plutôt que sur l'ouvrage de M. Lee.

Le cogreffier (M. Heyde): C'est un ouvrage volumineux, et je ne voulais pas risquer de ne pas respecter les droits d'auteur en le reproduisant.

Malheureusement, monsieur Lee, nous n'avons pas le budget voulu pour acheter l'ouvrage.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Pouvons-nous avoir un exemplaire gratuit de votre ouvrage, monsieur Lee?

M. Lee: J'aimerais remercier tous ceux qui ont contribué financièrement à la fondation qui a permis que cet ouvrage soit produit et publié. Grâce à leur aide, je vais maintenant pouvoir offrir des exemplaires aux personnes dans le besoin.

La coprésidente (le sénateur Hervieux-Payette): Nous allons sûrement faire campagne pour que le comité en achète un à partir de son budget.

Je présume que le comité a accepté de procéder de cette façon et que c'est ce qu'il convient de faire à ce moment-ci.

La séance est levée.


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